120
Zone euro La croissance économique devrait rester en demi-teinte, en raison du faible niveau de la demande extérieure et d'une perte de confiance des entreprises, qui pèsent sur l'investissement privé. La consommation privée apportera un soutien modeste à l'activité économique grâce à la solidité du marché du travail, le chômage poursuivant son repli et la hausse des salaires s'affermissant modérément. L'inflation sous-jacente ne remontera que progressivement depuis les niveaux bas qu'elle a connus. La politique monétaire devrait rester très accommodante et une orientation budgétaire légèrement expansionniste est attendue. L'ample excédent extérieur diminuera très légèrement. Il est opportun de reporter la normalisation de la politique monétaire tant que l'économie n'est pas en mesure d'atteindre l'objectif d'inflation. L'investissement et le potentiel de croissance portant encore les stigmates de la crise, des efforts conjugués en matière de politiques budgétaires et structurelles s'imposent. Les pays ayant une dette publique limitée devraient étoffer leurs investissements publics, ce qui permettrait de remédier aux déficits d'infrastructures et de générer des externalités positives dans l'ensemble de la zone euro. Les pays devraient tous mener des réformes structurelles pour accroître la concurrence sur les marchés de produits, en particulier dans les services et les industries de réseau. Progresser plus vite dans l'achèvement de l'union bancaire et dans l'élaboration d'outils budgétaires communs permettrait de renforcer la capacité de résistance de la zone euro à la prochaine crise. Zone euro 1 Le marché du travail est solide % de la population active 13
L'inflation reste modérée
Glissement annuel en % 4.0
Glissement annuel en % 4 Inflation globale²
12
3.5
11
3.0
10
2.5
9
2.0
8
1.5
7
Inflation sous-jacente²
3
2 0 1
1.0
0
← Taux de chômage
6 5
0.5
Salaires¹ →
2007
2009
2011
2013
2015
2017
0.0
2010
2012
2014
2016
2018
2020
-1
1. Salaire nominal par employé. 2. Indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), hors énergie et produits alimentaires pour l'inflation sous-jacente. Source: Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 105. StatLink 2 https://doi.org/10.1787/888933934299
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121
Zone euro : Demande, production et prix 2015
2016
Prix courants milliards de EUR
Zone euro PIB aux prix du marché Consommation privée Consommation publique Formation brute de capital fixe Demande intérieure finale Variation des stocks1 Demande intérieure totale
2017
2018
2019
2020
Pourcentage de variation, en volume (prix de 2015)
10 502.6 5 726.6 2 167.8 2 103.2 9 997.6 33.8 10 031.4
1.9 1.9 1.8 3.9 2.3 0.1 2.4
2.5 1.8 1.2 2.9 1.9 -0.1 1.8
1.8 1.2 1.1 3.3 1.7 0.1 1.8
1.2 1.2 1.2 2.6 1.5 -0.1 1.4
1.4 1.3 1.1 2.2 1.5 0.0 1.5
471.3
-0.4
0.8
0.2
-0.2
-0.1
_ _
0.8 0.2
1.1 1.5
1.4 1.8
1.4 1.2
1.6 1.5
_ _
0.8 10.0
1.0 9.1
1.0 8.2
1.0 7.9
1.4 7.7
6.1 5.7 6.0 6.4 -1.6 -1.0 -0.5 -0.9 109.0 105.5 102.0 101.2
6.5 -0.8 100.0
Exportations nettes1 Pour mémoire Déflateur du PIB Indice des prix à la consommation harmonisé IPCH sous-jacent2 Taux de chômage (% de la population active) Taux d'épargne nette des ménages (% du revenu disponible) Solde financier des administrations publiques (% du PIB) Dette brute des administrations publiques (% du PIB) Dette brute des administrations publiques, définition Maastricht (% du PIB) Balance des opérations courantes (% du PIB)
_ _ _ _
91.5
89.1
87.1
86.3
85.2
_
3.4
3.9
3.6
3.6
3.5
Note: L’agrégat correspondant à la zone euro est calculé à partir des pays de la zone euro membres de l’OCDE, et de données corrigées des variations saisonnières et des effets de calendrier. 1. Contributions aux variations du PIB en volume, montant effectif pour la première colonne. 2. Indice des prix à la consommation harmonisé, hors énergie, alimentation, alcool et tabac. Source: Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 105.
StatLink 2 https://doi.org/10.1787/888933935325
Zone euro 2 L'investissement reste atone
La croissance potentielle n'a pas totalement retrouvé son niveau d'avant la crise
Indice T4-2007 = 100 110
Glissement annuel en % 2.0 Investissement privé¹ Investissement public¹
100
1.5
90
0
0
1.0
80
70
0.5
2008
2010
2012
2014
2016
2018
2020
2005
2007
2009
2011
2013
2015
2017
2019
0.0
1. Données en volume, corrigées par le déflateur du PIB ; l'investissement privé est la différence entre la formation brute de capital fixe (FBCF) de l'ensemble de l'économie et l'investissement public (c'est-à-dire la formation de capital fixe des administrations publiques dans le compte d'affectation). Source: Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 105. StatLink 2 https://doi.org/10.1787/888933934318
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122
La croissance a fortement ralenti L'économie de la zone euro a fortement ralenti depuis la mi-2018. Le fléchissement de la demande extérieure, notamment de certaines économies de marché émergentes, et la persistance de tensions commerciales ont pesé sur la croissance des exportations. L'investissement s'est lui aussi essoufflé, un déstockage massif ayant eu lieu au dernier trimestre de 2018, et dans certains pays, l'activité a été également freinée par des facteurs ponctuels. Une inversion de ces facteurs ponctuels a contribué à raffermir la croissance au premier trimestre de 2019, mais l'expansion économique sous-jacente reste faible. De fait, les indicateurs récents font ressortir de fortes baisses des nouvelles commandes à l'exportation et de la production de biens d'équipement, ainsi qu'une dégradation de la confiance des entreprises, en particulier dans le secteur manufacturier. La zone euro dans son ensemble a été touchée, avec un net repli de ses échanges intérieurs, probablement dû à la forte intégration des chaînes de valeur. Les effets produits à l'échelle nationale ont toutefois été asymétriques, l'Allemagne et l'Italie ayant été les plus durement affectées, compte tenu de leur forte dépendance vis-à-vis du secteur manufacturier et, s'agissant de l'Allemagne surtout, de leur grande ouverture commerciale et de l'importance de leur industrie automobile, où l'impact d'événements ponctuels s'est fait durement sentir. Dans ce contexte, la consommation privée a montré une certaine capacité de résistance, à l'instar des indicateurs de confiance dans les services. La solidité du marché du travail en est la principale explication, avec un chômage qui poursuit son repli dans la plupart des pays et une croissance des salaires qui s'accélère quelque peu. Quoi qu'il en soit, les répercussions sur les prix ont été très limitées jusqu'à présent, l'inflation sous-jacente tournant toujours autour de 1 %.
Il faudrait renforcer la croissance et la résilience aux futures crises Les conditions monétaires resteront très accommodantes, ce qui est opportun eu égard à la faiblesse prolongée de l'inflation sous-jacente, ainsi qu'à la nécessité de soutenir la demande intérieure et de minimiser les risques d'instabilité sur les marchés de capitaux. La Banque centrale européenne (BCE) a mis fin à ses achats nets d'actifs en décembre, comme prévu, mais le réinvestissement continu du produit des actifs arrivant à échéance concourra à maintenir les taux d'intérêt à long terme à un bas niveau. Selon la BCE, les taux directeurs devraient rester inchangés au moins jusqu'à la fin de 2019. Une nouvelle série d'opérations de refinancement à plus long terme ciblées (TLTRO) trimestrielles sera lancée en septembre 2019, ce dont il convient de se féliciter. Le premier relèvement du taux des opérations principales de refinancement ne devrait intervenir qu'au quatrième trimestre de 2020. Au niveau national, il faudrait agir sur les mesures macroprudentielles, le logement et la fiscalité pour réduire l'accumulation des risques dans le secteur du logement. L'orientation budgétaire de la zone euro dans son ensemble devrait être légèrement expansionniste en 2019-20, à hauteur d'environ ¼ de point de PIB potentiel chaque année. Un léger assouplissement de la politique budgétaire est observé dans des pays disposant de marges de manœuvre budgétaires très variables, et intègre souvent des mesures de soutien du revenu disponible des ménages. Si ce soutien est une bonne chose, il n'a guère d'effet sur le potentiel de croissance réduit de la zone ni sur l'investissement, toujours en berne. Il serait opportun de mettre à profit les taux d'intérêt historiquement bas pour prendre des mesures supplémentaires de relance, sous la forme d'augmentations conjuguées des investissements publics dans les pays caractérisés par une faible dette publique, et de déployer de nouveaux efforts de réformes structurelles dans tous les pays. Une augmentation des investissements publics contribuerait à satisfaire les besoins d'investissement des pays concernés, à générer des externalités positives pour les autres pays de la zone euro, et à faciliter l'introduction de réformes structurelles.
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123 Des efforts conjugués des pouvoirs publics sont également nécessaires pour achever l'union économique et monétaire. Tous les pays doivent poursuivre la libéralisation de leurs marchés de produits, en particulier dans les services et les industries de réseau, pour approfondir le marché unique et en recueillir les fruits en termes de productivité. Progresser vers l'instauration d'une union bancaire via la mise en place d'un mécanisme commun d'assurance des dépôts et d'un filet de sécurité́ budgétaire commun pour le Fonds de résolution unique renforcerait la résilience aux crises futures, notamment en favorisant l'intégration des marchés de capitaux. Une accélération de l'apurement des créances douteuses ou litigieuses restantes, dont l'encours demeure considérable dans certains pays, favoriserait également l'intégration financière de la zone euro et stimulerait le crédit et l'investissement. La création d'une capacité́ budgétaire commune dans la zone euro pourrait contribuer à lisser les chocs économiques et à soutenir la zone euro lorsque frappera la prochaine crise. Parallèlement, l'adoption de règles budgétaires plus simples, centrées sur la hausse des dépenses et ancrée sur un objectif de ratio d'endettement améliorerait la crédibilité et l'efficacité de la politique budgétaire.
La croissance devrait rester en demi-teinte La croissance devrait rester modeste, en deçà de 1.5 %. L'incertitude liée à l'action publique et les tensions commerciales continueront de freiner les exportations et l'investissement privé, contribuant ainsi à une progression très faible de la productivité. La consommation privée et les dépenses publiques devraient soutenir l'activité, mais seulement dans une faible mesure, tandis qu'une croissance modérée de l'emploi fera reculer légèrement le chômage. Compte tenu de la croissance seulement modérée de la demande intérieure, l'inflation sous-jacente devrait se redresser lentement et l'ample excédent courant de la zone euro ne diminuera que très modestement. Compte tenu de la forte participation des entreprises de la zone euro aux chaînes de valeur mondiales, une nouvelle exacerbation des tensions commerciales mondiales pèserait sur les exportations et l'investissement. Une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne (« Brexit ») désordonnée aurait également des effets négatifs, les pays ayant les liens commerciaux les plus étroits avec le Royaume-Uni étant alors les plus durement touchés. Un ralentissement plus marqué que prévu des économies de marché émergentes déprimerait la demande extérieure et pourrait provoquer une instabilité financière. À l'inverse, une conjonction de mesures visant à accroître l'investissement public et à mettre en œuvre des réformes structurelles sur les marchés de produits aiderait la zone euro à se remettre d'une période prolongée de croissance anémique de la productivité.
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