Comprendre la portée, la définition et l’incidence du moratoire de l’OMC sur le commerce électronique L e renouvellement du moratoire de l’OMC sur le commerce électronique devant être abordé lors de la Conférence Ministérielle (CM13) organisée au début de l’année 2024, les pays membres examinent actuellement sa portée, sa définition et son incidence. es possibles répercussions budgétaires du moratoire sont limitées, puisqu’elles représentent en moyenne L environ 0.1 % des recettes publiques totales. Dans la plupart des pays, le manque à gagner serait compensé par l’augmentation des recettes de TVA tirées des importations de services numériques. a levée du moratoire entraînerait des pertes de compétitivité et une hausse des coûts commerciaux, lesquelles L toucheraient le plus durement les pays en développement et les acteurs de moindre envergure, dont les PME et les entreprises détenues par des femmes. D e nombreux arguments économiques plaident en faveur d’un renouvellement du moratoire sur le commerce électronique à l’occasion de la CM13.
Le possible renouvellement du moratoire de l’OMC sur le commerce électronique sera décidé en 2024 lors de la CM13 Depuis plus de vingt ans, le moratoire de l’OMC sur les droits de douane applicables aux transmissions électroniques (ci-après le « moratoire ») a contribué à l’instauration d’un environnement stable, prévisible et exempt de droits de douane qui a facilité l’essor des échanges numériques. Ces dernières années toutefois, plusieurs membres de l’OMC se sont interrogés sur les coûts d’opportunité de ce moratoire. Leurs principales préoccupations ont ainsi trait au manque de clarté concernant la portée et la définition du moratoire, mais aussi à ses implications en termes de pertes potentielles de recettes douanières ou encore au maintien souhaité d’une certaine marge de manœuvre pour les pouvoirs publics compte tenu de l’évolution rapide des technologies.
Ces débats ne sont toutefois pas nouveaux et les préoccupations liées aux contours et aux répercussions du moratoire font l’objet de réflexions depuis près de 25 ans. Or, à l’occasion de son dernier renouvellement lors de la 12e Conférence Ministérielle de juin 2022 (CM12), les membres de l’OMC ont également décidé d’intensifier les discussions sur la portée, la définition et l’incidence du moratoire. À la prochaine Conférence Ministérielle de l’OMC (CM13) qui aura lieu en février 2024, les membres de l’OMC détermineront à nouveau s’il convient de renouveler le moratoire.
Les accords commerciaux régionaux apportent un éclairage sur la portée et la définition du moratoire Il existe une divergence d’opinions entre les membres de l’OMC sur la question de savoir si le moratoire doit s’appliquer au contenu des transmissions (par exemple, les films ou livres électroniques téléchargés) ou au support de transmission (c’est-à-dire les bits et les octets qui transportent le contenu). Certains se demandent par ailleurs si le moratoire joue sur la capacité des pays à augmenter les impôts au-delà des droits de douane ou encore s’il concerne d’autres engagements pris auprès de l’OMC. La formulation des dispositions relatives à la non-imposition des droits de douane applicables aux transmissions électroniques (ciaprès la « NIDDTE ») dans les accords commerciaux régionaux (ACR) de plus de 100 pays offre un éclairage nouveau sur certaines de ces
questions. L’une des clarifications les plus courantes vise à préciser que la fiscalité interne est exclue du champ de l’engagement de NIDDTE, lequel n’affecte donc pas les taxes non discriminatoires comme la TVA. Les règlements consacrés au commerce numérique dans les ACR réaffirment aussi généralement que les dispositions de NIDDTE n’ont pas d’incidence sur les réglementations plus larges en matière de fourniture électronique de services (autrement dit, les engagements et aménagements décidés dans le cadre des ACR ou de l’Accord général sur le commerce des services de l’OMC restent inchangés). De plus en plus, les membres précisent également que les engagements de NIDDTE s’appliquent au contenu des transmissions électroniques. À l’inverse, aucun accord commercial ne stipule que les dispositions de NIDDTE s’appliquent aux supports de transmission.
www.oecd.org/trade
tad.contact@oecd.org
@OECDtrade
Comprendre la portée, la définition et l’incidence du moratoire de l’OMC sur le commerce électronique Les possibles répercussions budgétaires du moratoire sont limitées Certains membres de l’OMC s’inquiètent du fait que les droits de douane applicables aux transmissions électroniques puissent entraîner des pertes de recettes douanières. Ainsi, un pays qui importe un film au moyen d’une transmission électronique renonce aux recettes douanières associées à l’importation du même film sur un support physique (DVD, par exemple). Ils font valoir que le rythme rapide de la transformation numérique ne fait qu’accroître l’ampleur du problème, notamment pour les pays en développement qui ont tendance à imposer des droits de douane plus élevés sur ce type de produits. Toutefois, les importations de « biens numérisables », soit de biens physiques pouvant être numérisés puis transférés de manière électronique au-delà des frontières (CD ou livres, par exemple),
ont dans l’ensemble augmenté dans les pays en développement au cours des dix dernières années, continuant par là même de générer des recettes douanières. En d’autres termes, même si nous importons aujourd’hui un volume moins élevé de DVD, nous importons à la place davantage de clés USB et de disques SSD. Des études récentes donnent à penser que le manque à gagner en recettes douanières résultant du moratoire est globalement faible, puisqu’il équivaut en moyenne à 0.68 % du total des recettes douanières ou à 0.1 % de l’ensemble des recettes publiques. Par ailleurs, dans la plupart des cas, la TVA appliquée aux importations de services numériques compenserait intégralement les effets du moratoire sur les recettes budgétaires.
Le moratoire offre des avantages pour les pays en développement, pour les PME et pour la compétitivité intérieure Si les pays appliquaient les droits de douane existants sur les biens numérisables aux services numériques (sur la base desquels les transmissions électroniques sont mesurées dans les statistiques commerciales actuelles), les importations et les exportations des pays à faible revenu chuteraient respectivement de 32 % et 2.5 %. Dans le cas des pays à revenu intermédiaire, ces pertes s’élèveraient à 6 % et 0.4 %, et à 0.04 % et 0.5 % dans les pays à revenu élevé. En termes d’effets sur les échanges, ce sont les pays à faible revenu qui seraient le plus pénalisés par une levée du moratoire. L’application de droits de douane aux transmissions électroniques entraînerait également une baisse de la compétitivité domestique. Pour réaliser leur transformation numérique, les entreprises adoptent de plus en plus de solutions numériques, qu’il s’agisse de
logiciels ou de services informatiques, souvent obtenues auprès de fournisseurs étrangers (par l’intermédiaire d’un support physique ou importées de manière électronique). Une augmentation des prix de ces intrants numériques se traduirait par une baisse de compétitivité. Dans le cas de la TVA, les effets seraient différents dans la mesure où ces taxes sont acquittées sur la consommation finale et non sur la consommation intermédiaire. Si des obstacles plus importants devaient peser sur les transmissions électroniques, leurs effets seraient vraisemblablement asymétriques et toucheraient plus durement les PME. Les petites entreprises capables d’assurer des échanges de manière numérique ont davantage tendance à être exportatrices.
De nombreux arguments économiques plaident en faveur d’un renouvellement du moratoire sur le commerce Il conviendra, lorsque les pays membres de l’OMC décideront du prolongement du moratoire lors de la prochaine Conférence Ministérielle, de tenir en compte des premiers éléments accréditant
le fait que les pertes potentielles de recettes fiscales résultant du moratoire restent limitées et qu’une levée de ce moratoire se ferait au détriment de gains plus importants pour l’économie.
Référence: Andrenelli, A. et J. Lopez Gonzalez (2023), « Understanding the potential scope, definition and impact of the WTO e-commerce Moratorium », Documents de travail de l’OCDE sur la politique commerciale, nº 275, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/59ceace9-en.
Cet ouvrage est publié sous la responsabilité du Secrétaire général de l’OCDE. Les opinions exprimées et les arguments employés ici ne reflètent pas nécessairement les vues officielles des pays Membres de l’OCDE. Ce document, ainsi que les données et cartes qu’il peut comprendre, sont sans préjudice du statut de tout territoire, de la souveraineté s’exerçant sur ce dernier, du tracé des frontières et limites internationales, et du nom de tout territoire, ville ou région. L’utilisation de ce contenu, qu’il soit numérique ou imprimé, est régie par les conditions d’utilisation suivantes : http://www.oecd.org/fr/conditionsdutilisation
www.oecd.org/trade
tad.contact@oecd.org
@OECDtrade