Depenses des menages a cotonou

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CAHIERS DU CREC Revue d’analyse sociale, de psychologie et d’informations du Centre de Recherche, d’Etude et de Créativité (CREC) des jésuites

Trimestriel n°1—Août à Octobre 2008. 1ère année

ETUDE SUR LES DEPENSES DE CONSOMMATION DES MENAGES A COTONOU (EDCMC) Centre de Recherche, d’Etude et de Créativité Compagnie de Jésus au Bénin 06 BP 701 jesbenin@yahoo.fr


Editorial ! Le Centre de Recherche, d’Etude et de Créativité : Une mission aux frontières des défis du monde urbain Le Centre de Recherche, d’Etude et de Créativité (CREC) est le fruit d’un long discernement sur la mission de la Compagnie de Jésus (les jésuites) au Bénin. Tout a commencé par une invitation adressée le 6 août 1982 par Mgr. Isidore De Souza alors coadjuteur de l’archidiocèse de Cotonou au Père Galli, Supérieur Provincial des jésuites de l’Afrique de l’Ouest, pour la prise en charge d’une paroisse et l’initiation d’un projet de développement. Il a fallu trois années pour que les premiers jésuites Jean-Noël Crespel et Yves Richard arrivent en 1985. De commun accord avec l’archevêque, l’option était le monde rural. L’apprentissage du Fon s’imposait pour une insertion effective dans le milieu de Sèhouè tandis que les projets de développement s’entrevoyaient dans la ligne de la formation de jeunes agriculteurs. Pendant 15 ans, Sèhouè a été tout à la fois lieu d’apprentissage de la complexité de la réalité sociale et de connaissance dans l’Eglise locale. Dans un effort de relecture de l’expérience, les jésuites se sont rendu compte des mutations profondes qui ont transformé le monde rural et donné une impulsion à l’essor sans précédent du milieu urbain. Le Bénin n’est pas seulement pris par des changements sociaux et politiques mais aussi par une transformation culturelle sans précédent. Dans une dizaine d’années seulement, plus de la moitié de la population sera urbaine avec, à l’horizon, de nouveaux défis : mutation ou bouleversement des valeurs traditionnelles d’humanité, de solidarité, de respect de la vie, d’honnêteté, de justice et de vérité ; écart significatif entre les couches de la société ; précarité des conditions de vie et croissance du sens de l’insécurité. A travers ces défis, nous percevons de nouvelles possibilités qui se dessinent à l’horizon. Le Centre de Recherche, d’Etude et de Créativité veut contribuer à répondre à ces défis en puisant dans la longue tradition jésuite de recherche intellectuelle, d’éducation et d’accompagnement spirituel. Cette enquête menée au Bénin s’inscrit dans la mission de la Compagnie de Jésus aux frontières, proche des enjeux de la nouvelle société qui se construit et dans laquelle l’Eglise est appelée à porter la Bonne Nouvelle en connaissance de cause. Elle fait corps avec la mission fondamentale du CREC qui est d’être un incubateur d’initiatives et de créativité en faveur d’un développement humain et social intégral 2/24


là où la société béninoise et ses cultures passent par des « mutations difficiles ». En dépit de ses limites, l’enquête sur le coût de ce qui peut être conçu comme le « panier de la ménagère » est révélatrice de bien d’autres dimensions de la vie urbaine. Ainsi ce constat banal qui mériterait pourtant une réflexion plus approfondie : les dépenses alimentaires ne constituent qu’un tiers (1/3) des dépenses des ménages, les deux tiers (2/3) sont consacrés au logement souvent sous forme de loyer, à la santé, au transport, à l’eau, à l’électricité, à la communication (téléphone-cellulaire) et à l’éducation scolaire ou à l’apprentissage. Une autre dimension qui appelle à la réflexion, c’est la disproportion entre les dépenses et les revenus qui oblige à des « à côté » ou des « transferts d’argent ». Les gestionnaires de la société ne devraient pas rester indifférents à ces développements. Cette enquête amorce une réflexion sur la société dont l’Eglise doit être partie prenante. Eugène Goussikindey, s.j.

Contexte et objectifs de l’étude L’étude sur les dépenses de consommation des ménages à Cotonou (EDCMC) s’inscrit dans le cadre des activités du Centre de Recherche, d’Etude et de Créativité. L’EDCMC se propose de définir le panier des dépenses d’un ménage moyen à Cotonou et d’apprécier l’évolution des conditions de vie des ménages. Les prix des biens et services étant soumis à des variations conjoncturelles, une moyenne des dépenses de consommation des ménages entre deux périodes bien définies sera calculée. Outre la pauvreté monétaire, d’autres variables comme l’accès à certains services urbains seront introduits dans l’analyse. La première partie de cette plaquette traite du cadre d’étude et de la méthodologie utilisée. La seconde partie consacrée aux résultats, traite du profil des enquêtés, du revenu des ménages, de la structure des dépenses de consommation. Un relevé des prix sur les principaux marchés retenus permettra d’actualiser régulièrement ces données et de les mettre à la disposition du public.

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Description du cadre d’étude Notre cadre d’étude, Cotonou, est situé dans le département du Littoral. Ville côtière, Cotonou est limitée au Nord par le lac Nokoué, au Sud par l’Océan Atlantique, à l’Ouest par la commune d’Abomey-Calavi et à l’Est par la commune de Sèmè-Kpodji. Seule commune du département du Littoral, Cotonou compte treize arrondissements. A l’instar des autres villes du Sud-Bénin, elle jouit d’un climat subéquatorial caractérisé par deux saisons sèches et deux saisons pluvieuses. Cotonou appartient à un cordon littoral constitué d’une bande de sable alluvial qu’articule un système lagunaire qui communique par endroits avec l’Océan et qui s’étend sur environ 200 km de l’Ouest à l’Est entre la ville de Lomé au Togo et la ville de Lagos au Nigéria1. La ville est située sur un cordon littoral qui s’étend entre le lac Nokoué et l’Océan Atlantique. Ce cordon est parsemé de dépressions et de bas-fonds. Capitale économique du Bénin, Cotonou abrite la plupart des grandes infrastructures aussi bien économiques qu’administratives. La plupart des ministères et les sièges des ambassades et des organismes se retrouvent dans cette cité. Selon le Recensement Général de la Population et de l’Habitation de 2002 (RGPH 3), Cotonou compte 665 100 âmes sur un territoire exigu de 79 km2. La plupart des ethnies du Bénin y sont présentes avec une prédominance des Fons (32,9 %) et des gouns (15,2 %). On y rencontre toutes les religions. Les principales religions restent selon le RGPH 3, les catholiques (57,8%) et l’Islam (14,2%). Les activités économiques vont de la pêche au commerce en passant par les industries manufacturières. Cotonou abrite plusieurs infrastructures socio-communautaires. Mais ces infrastructures restent en deçà des besoins de la population. Au dernier recensement de 2002, on dénombrait 235 écoles primaires, 18 collèges à 1er cycle et 24 collèges à 2ème cycle. Les nombreuses écoles privées et autres centres de formations essayent tant bien que mal de compenser le déficit. Si la plupart des 140 quartiers de ville que compte la ville ont accès à l’eau potable, il existe encore des localités qui demeurent sans adduction d’eau et sans électricité. Les différentes classes sociales se côtoient dans cette ville où résident 154 346 ménages. A côté des quartiers chics de la ville se trouvent d’autres, où vivent ou plutôt vivotent des ménages très pauvres que la cherté de la vie fragilise aujourd’hui plus que jamais. 1

INSAE, 2004 : Cahier des quartiers de villes du département du littoral. 14 p. Il s’agit d’un résumé du Recensement Général de la Population et de l’Habitation réalisée par l’Institut National de Statistique et de l’Analyse Economique (INSAE) en 2002 (Cf. fichier électronique).

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Le cadre d’étude est représenté par la figure 1 :

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Figure 1 : Situation du cadre d’étude


Approche méthodologique L’approche regroupe la méthodologie de l’enquête préliminaire sur les dépenses des ménages à Cotonou, celle du relevé des prix des biens de consommation alimentaires et non alimentaires et la détermination des dépenses globales. 1. Enquête sur les Dépenses de Consommation des Ménages à Cotonou (EDCMC) La démarche utilisée s’articule autour de trois axes principaux à savoir : la recherche documentaire, la collecte des données et leur traitement. La recherche documentaire a permis de recenser les différents travaux réalisés dans ce secteur. Cette recherche documentaire s’est effectuée dans plusieurs centres de documentation dont ceux de l’Office National d’Appui à la Sécurité Alimentaire (ONASA), de l’Institut National de la Statistique et de l’Analyse Economique (INSAE) et du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Deux principales sources d’informations ont été utilisées. Il s’agit du rapport de l’Enquête Légère Auprès des Ménages (ELAM)2 V et VI de 1996 et de l’Enquête BudgetConsommation (EBC) réalisé en 1986-1987. Ces deux études ont permis d’avoir une idée des habitudes alimentaires des populations de Cotonou. A l’issue de la recherche documentaire, une enquête a été effectuée. Le caractère exploratoire de cette première enquête explique le faible échantillon retenu. Sur 200 ménages prévus, l’enquête n’a touché que 150 ménages. Des 150 questionnaires administrés, 131 ont été retenus lors du dépouillement, les autres étant incomplets ou mal remplis. Les questionnaires ont été administrés les 23 et 24 décembre 2007. Un nombre minimal de personnes a été retenu au niveau des arrondissements et interrogé de façon aléatoire. Cette enquête baptisée EDCMC (Enquête sur les Dépenses de Consommation des Ménages à Cotonou) avait pour objectif de déterminer les principaux biens de consommation surtout les biens non alimentaires couramment utilisés (quantité, qualité et types de produits) ; lesquels n’étaient pas toujours indiqués dans la méthodologie de l’ELAM3. L’EDCMC a permis également d’intégrer certains produits alimentaires essentiels (piment, sucre, sel par exemple) non pris en compte par l’ELAM et de déterminer la proportion des dépenses non alimentaires par rapport aux dépenses 2

PNUD et INSAE, 1996 : Profil de pauvreté et caractéristiques socio-économiques des ménages : ville de Cotonou. Presses CACI-Benin Cotonou, 68 p. 3

Les prix de certains biens non alimentaires et services publics ne figurent pas de façon détaillée dans les dépenses de consommation validées par l’ELAM V et VI de 1996, qui elle-même repose sur l’Enquête Budget-Consommation (EBC) réalisée en 1986-1987. Certains produits sont dans de grands ensembles, ce qui ne permet pas d’avoir une idée de leur coût.

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alimentaires. L’objectif visé était également d’avoir une idée des principaux marchés fréquentés à Cotonou. Le traitement des données a permis de retenir dans l’ordre les marchés Dantokpa, St Michel et Ganhi ; marchés les plus fréquentés et sur lesquels les prix des denrées ont été relevés. 2. Relevé des prix des biens de consommation (RPBC) C’est une phase importante de cette recherche. Les biens de consommation courante ont été répertoriés sur une fiche de relevés conçue pour la circonstance. Des agents enquêteurs formés sur les objectifs de la recherche et les méthodes de collecte ont procédé aux relevés des prix des biens de consommation alimentaires et non alimentaires sur les trois principaux marchés retenus. Le premier relevé des prix a eu lieu le 30 novembre 2007. Le second a eu lieu neuf mois après (27 août 2008) et a permis de comparer les deux résultats pour en dégager une moyenne. La technique utilisée consiste à marchander chaque bien de consommation auprès de trois (3) vendeurs différents du même produit. Après quoi, on inscrit le prix du produit et l’unité locale de mesure. Le prix transcrit sur la fiche est donc le prix conclu après un sérieux marchandage entre le revendeur et le consommateur. Un atelier a permis d’harmoniser et de déterminer les prix moyens retenus au niveau des principaux marchés. La plupart des produits ont été achetés pour les deux premières expériences. La pesée de chacun de ces produits a permis de convertir les unités locales de mesure en kilogramme afin de faire des comparaisons avec d’autres études (ELAM). Mais les différences d’ordre méthodologique ne permettent pas de faire de façon systématique tous les parallèles. 3. Détermination des seuils de pauvreté Les dépenses de consommation des ménages ont été classées en deux catégories : les Dépenses Alimentaires (DA) et les Dépenses Non Alimentaires (DNA). 3.1. Clarification conceptuelle Dépenses globales : C’est l’ensemble des ressources appliquées à l’acquisition des biens alimentaires et non alimentaires. Il se décompose en Dépenses Alimentaires et en Dépenses Non Alimentaires. • Dépenses Alimentaires (DA) : C’est la somme que débourse en moyenne un ménage par mois pour acquérir les biens alimentaires dont il a besoin pour sa survie. Ces biens correspondent aux habitudes alimentaires des Cotonois, aux produits couramment consommés par ces derniers et relevés par l’EDCMC. 8/24


• Les Dépenses Non Alimentaires (DNA) comportent les dépenses non alimentaires fondamentales et les dépenses non alimentaires additionnelles. Les Dépenses Non Alimentaires Fondamentales (DNAF) sont celles qu’un ménage engage pour obtenir les biens non alimentaires et les services publics essentiels nécessaires. Les Dépenses Non Alimentaires Additionnelles (DNAA) sont des dépenses non alimentaires importantes mais qui dépendent des réalités de chaque ménage. 3.2. Calcul des dépenses Les dépenses alimentaires sont obtenues en multipliant la quantité moyenne de chaque produit consommé par le prix moyen du produit et en faisant la somme des résultats. DA = ∑ Qi * Pi (t) où i = 1….n avec Qi, la quantité moyenne nécessaire (voir EDCMC) du produit (i) et Pi (t), le prix moyen observé du produit (i) à un moment donné (t). Les Dépenses Non Alimentaires sont égales à la somme des dépenses non alimentaires fondamentales et des dépenses non alimentaires additionnelles. DNA = DNAF + DNAA. La dépense de consommation fondamentale globale (DF) est la somme des dépenses alimentaires et des dépenses non alimentaires fondamentales. DF = DA + DNAF. Enfin, la dépense de consommation globale (DG) est obtenue en faisant la somme des dépenses alimentaires (DA) et des non alimentaires (DNA). DG = DA + DNA. Limites - Les difficultés relatives à la collecte de certaines données comme les revenus et les dépenses -difficultés communes aux études socioéconomiques comme celle-ci - constituent la première limite. Certains enquêtés ont tendance à majorer ces variables ou à les minorer (revenus ; quantité de produits consommés par mois). - La seconde limite est liée au panier alimentaire retenu. Ce panier qui est la moyenne révélée par notre étude (EDCMC) en respectant scrupuleusement les réalités des ménages s’écarte des normes nutritionnelles ; lesquelles normes déterminées par l’Institut National de Statistique et de l’Analyse Economique (INSAE) auraient pu permettre de déterminer les seuils de pauvreté. Mais cela n’entache en rien notre étude puisqu’il est question ici des dépenses de consommation moyenne. Plusieurs passages dans les mêmes ménages et un échantillon plus grand auraient permis également de mieux affiner nos analyses. 9/24


Profil des enquêtés Les caractéristiques socio - démographiques des ménages enquêtés sont synthétisées par la figure 2.

aucune

Religion

Rel. trad. musulman

0,80% 2,40% 15,90%

évangelique.

25,40%

Effectif des ménages

catho

55,60%

10 et plus

5,70%

De 8 à 10

4,90% 13,10%

De 6 à 8

37,70%

De 4 à 6

Série 1 De 2 à 4

32,80%

moins de 2

5,70%

Situation matrimoniale

Sexe

féminin

57,60%

Masc.

42,40%

Polygame

8,50% 63,60%

marié 6,20%

divorcé

8,50%

veuf Célibataire

0

13,20% 20

40

60

80

Figure 2 : Répartition des enquêtés selon les caractéristiques socio-démographiques 10/24


Sexe : Dans le cadre de cette enquête, le nombre de femmes interrogées (57,6%) est supérieur à celui des hommes (42,4%). Il ne pouvait en être autrement, vu la proportion de femmes dégagée par le dernier Recensement Général de la Population et de l’Habitation (RGPH 3) et le rôle clé joué par les femmes dans le ménage. Certains hommes chefs de ménage interrogés ont tout simplement orienté les enquêteurs vers leurs femmes, estimant que ces dernières étaient les mieux indiquées pour parler des dépenses de leur ménage. Situation matrimoniale : Plus de trois enquêtés sur cinq (63,6%) sont mariés. A ceux-ci s’ajoutent, ceux ou plus exactement celles qui vivent dans un foyer polygame. 1 enquêté sur 7 est veuf ou divorcé. Religion : 55,6% des répondants sont chrétiens catholiques, une personne sur quatre est évangélique, 15,9% sont musulmans, 2,4% appartiennent aux religions traditionnelles. Ces résultats se rapprochent de ceux obtenus au cours du recensement de 2002 (RGPH 3). (Voir description du cadre d’étude). Taille du ménage : Deux ménages sur cinq environ (38,5%) ont entre 0 et 4 enfants. La taille moyenne des ménages est de 4,5. Cette taille est légèrement supérieure à la moyenne (4,3) dégagée par le RGPH3 à Cotonou. Secteur d’activité : 73,3% des ménages vivent dans le secteur informel. Seulement un ménage sur cinq est salarié.

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Introduction Cotonou avec ses belles rues, ses quartiers chics et ses somptueux édifices attire les visiteurs. Cette ville phare que d’aucuns appellent « Cotonou-la-belle » cache aussi des poubelles. Les réalisations somptueuses masquent les conditions de vie pauvres voire misérables dans lesquelles végète une frange importante de la population Cotonoise. Si les quartiers périphériques de la ville sont souvent occupés par des pauvres et des indigents, même au centre de la ville, il y a des poches de pauvreté qui subsistent. Des quartiers comme Ladji et Vossa sont réputés être parmi les plus pauvres de Cotonou. Si le bien-être peut être défini comme un état ayant deux dimensions : une matérielle et l'autre morale, la pauvreté, elle, fait référence à une situation où les besoins ne sont pas satisfaits et donc à une insuffisance ou une absence d'une de ces dimensions, jugées utiles à une vie agréable. Mais pour la majorité des populations, c'est surtout le bienêtre matériel qui conditionne celui moral. Dans le cadre de cette recherche, nous retiendrons une des définitions classiques de la pauvreté qui estime qu’une personne est pauvre lorsque son revenu est inférieur à un certain seuil en deçà duquel il n’est pas possible de se procurer une quantité suffisante de biens alimentaires et non alimentaires y compris des services publics. A ce critère monétaire, s’ajouteront d’autres variables. Coût de la vie et revenus à Cotonou Le renchérissement des prix des produits de base dû à la hausse des produits pétroliers n’a fait qu’aggraver les difficultés de survie des Cotonois. L’enquête sur les dépenses de consommation des ménages à Cotonou (EDCMC) révèle que, de novembre 2007 à Août 2008, les dépenses fondamentales des ménages sont passées de 79 832 à 89 970 FCFA. A ces dépenses fondamentales essentielles à la survie du ménage, s’ajoutent d’autres. Ces dernières baptisées dépenses additionnelles et qui dépendent des réalités particulières de certains ménages viennent alourdir le budget déjà écrasant des dépenses de consommation. Ces dépenses porteraient en moyenne à 146 014 F les dépenses globales de consommation. Or très peu d’individus gagnent un tel montant à Cotonou. Les dépenses de consommation dépassent largement les revenus déclarés de nombre de chefs de ménages. Le graphique sur la répartition des ménages selon leurs revenus est édifiant à ce propos. 12/24


Figure 3 : Répartition des enquêtés selon le revenu du chef de ménage

Un chef de ménage sur deux, précisément (48,6 %) a un revenu mensuel inférieur à 50 000 F CFA. Parmi eux, 16,2 % sont même en dessous du Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti estimé à 27 500 F CFA lors des études. Près de 3 chefs de ménage sur 4 exercent en effet leurs activités dans le secteur informel et subissent les vicissitudes liées à ce secteur d’activités, notamment la variabilité constante des revenus et l’insécurité financière. Dans ces conditions, le recours au conjoint ou à une aide extérieure pour couvrir les charges familiales est parfois impérieux. Près d’un ménage sur cinq (18,4 %) survit à Cotonou grâce à l’appui extérieur (parents ou connaissance). En réalité, les charges du ménage sont énormes par rapport aux revenus non dérisoires et instables. Quand il n’existe pas d’appui extérieur ou d’un soutien du conjoint, seuls les « à côtés » comme on le dira vulgairement ici permettent de « joindre les deux bouts ». La corruption trouve là un terreau favorable pour étendre ses tentacules. S’il est vrai qu’à Cotonou la taille moyenne des ménages est sensiblement inférieure à la moyenne nationale, entretenir une famille n’est pourtant pas une mince affaire. « Joindre les deux bouts » n’est pas une sinécure. Environ 1 Cotonois sur 5 (19,8 %) se contente de deux repas par jour, faute de moyens. Face à l’insuffisance des revenus, il ne peut en être autrement lorsque la moyenne dépensée pour le petit déjeuner est de 250 F par personne adulte et le coût moyen des repas journaliers varie entre 1500 F et 2500 F par ménage. Pour nombre de chefs de ménages, décaisser quotidiennement de l’argent pour le petit déjeuner de tous les membres de ménage n’est pas une mince affaire. A Cotonou, tout coûte cher au point que la tasse de bouillie ne s’achète nulle part en deçà de 50 F. Pour rappel, le riz et le maïs, principales bases de l’alimentation à Cotonou font l’objet d’une inflation sans précédent. Les ménages consacrent la plus grande part de leur budget de consommation aux dépenses non alimentaires. Dans la structure des 13/24


dépenses, il faut distinguer les dépenses alimentaires (DA), des dépenses non alimentaires (DNA). Les dépenses non alimentaires prises ensemble (additionnelles et fondamentales) représentent 2/3 des dépenses de consommation globales (DG) des ménages comme l’indique le tableau I : Tableau I : Structure des dépenses de consommation des ménages Période DG DA DA/DG DNA DNA/DG Novembre 07 140945 45049 31,96% 95896 68,04% Août 08 151083 54467 36,05% 96616 63,95% Moyenne période 146014 49758 34,08% 96256 65,92% Source : Résultats d’enquêtes, CREC, 2007-2008

Les dépenses non alimentaires (65,95%) occupent la grande part des consommations des ménages. Les dépenses alimentaires occupent seulement 1/3 des dépenses. Mais cette part s’est accrue entre les deux relevés de prix à cause de la hausse des prix des denrées alimentaires. Dépenses alimentaires des ménages Les consommations alimentaires des ménages tiennent peu compte des normes nutritionnelles. Il semble que ce qui importe, c’est de manger et non de se nourrir décemment suivant ces normes. La comparaison entre les tableaux II et III illustre bien cette remarque. Tableau II : Panier alimentaire moyen par ménage (5 membres) par mois élaboré sur la base de l’ELAM 5 et 6 Produits Quantité (kg)4 Produits Maïs 11,17 Crin-crin Pain 2,83 Ananas Mil 1,25 Orange Macaroni 1,50 Haricot Riz importé 8,25 Voandzou Igname 7,75 Viande Gari 4,17 Poisson Patate douce 0,92 Œuf Manioc 0,17 Noix de palme Tomate 4,00 Noix de coco Gombo 1,83 Huile de palme Oignon 1,25 Huile d'arachide Banane 0,92 Source : PNUD et INSAE, 1996

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Quantité (kg) 1,42 0,50 0,92 2,67 0,33 0,75 7,92 1,58 9,00 2,33 1,25 2,17

Calcul fait à partir des données annuelles du panier d’un ménage de 5 membres de l’ELAM. Qté par mois = Qté du panier par an / 12. Les données d’équivalent adulte n’ont pas été intégrées pour faciliter la comparaison.

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Si le tableau indicatif II tient compte des normes nutritionnelles, le tableau III issu de l’enquête sur les dépenses de consommation des ménages à Cotonou révèle que les ménages tiennent peu compte de ces considérations d’équilibre alimentaire journalier retenu par l’INSAE (85 g de protéines, 95 g de lipides et 341 g de glucides). Tableau III : Panier alimentaire moyen par ménage (5 membres) élaboré sur la base de l’EDCMC Produits Quantité par mois Produits Quantité par mois 5 Maïs 19,4 tgl Igname 7,695 kg Riz 11,7 kg Gari 5,9 tgl Macaroni 2,2 kg Sel 1tgl Œuf de poule 1 plateau Sucre fin 1,3 tgl Tomate fraîche 5,82 kg Viande 4,2 kg Piment vert/rouge 1,65 kg Poisson 9,2 kg Haricot blanc 4 tgl Légumes 11,36 kg Haricot rouge 3,7 tgl Crin-crin 0,9 kg Huile « d’arachide » 3,6 l Oignon 3,3 kg Huile rouge 2,1 l Pain ordinaire 23 baguettes Source : Résultats d’enquêtes, CREC, 2007-2008

La comparaison des deux tableaux montre que certains aliments ne font plus partie de la consommation courante voire des habitudes alimentaires des personnes interrogées soit parce qu’ils coûtent cher soit par préférence. Seuls les produits alimentaires de base essentiels (voire incompressibles) pour la plupart font partie des produits de consommation courante de tous les ménages. Mais la valeur énergétique des aliments supprimés6 est compensée par les autres produits dont les quantités ont augmenté. C’est ce qui explique l’écart entre les dépenses alimentaires issues des études du CREC et une simulation du Seuil de Pauvreté Alimentaire basée sur les normes nutritionnelles7. En tenant compte des normes nutritionnelles, le seuil de pauvreté alimentaire des ménages (ressources minimales nécessaires à l’acquisition de biens alimentaires) peut être estimé à 38 877 contre une dépense alimentaire de 54 467 pour le même mois et une moyenne (novembre-août) de 49 758, dégagée par l’EDCMC8. Dans certains ménages, d’autres réajustements sont faits pour diminuer les dépenses. 5

Tgl : toungolo (unité locale de mesure couramment utilisée pour certains produits) Certains produits ne sont plus consommés habituellement par plus de 80% des ménages enquêtés. Ces produits sont donc considérés comme ne faisant plus partie des produits de consommation courante des ménages. C’est le cas par exemple du voandzou (plus de 90% des enquêtés) 7 Chaque produit a été pesé afin de convertir l’unité locale de mesure en kg pour faire des comparaisons avec les données de l’ELAM qui sont en kg. Dans la même logique, les prix payés pour la mesure locale ont été également ramenés au kg 8 L’écart peut aussi s’expliquer par les différences de méthodologie entre les deux études. Ce qui rend difficile certaines comparaisons. 6

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Quand on considère la structure des dépenses alimentaires, les céréales viennent en tête que ce soit à l’EDCMC 1 ou 2 comme le montrent les figures 4 et 5 :

Figure 4 : Composition des dépenses alimentaires selon les groupes d’aliments (EDCMC1 et RPBC1)

Figure 5 : Composition des dépenses alimentaires des ménages selon les groupes d’aliments (EDCMC 2 et RPBC 2) Le constat est identique à l’ELAM 5 et 6 où les céréales occupent la plus grande part. La comparaison entre les figures 4 et 5 montre que la part 16/24


des céréales s’est accrue en passant de 25,25% en novembre 2007 à 27,12% en Août 2008. Outre les légumineuses qui ont aussi connu un accroissement de leur part, les autres groupes de produits ont connu une légère augmentation, une stagnation ou une baisse de leur part relative dans les dépenses alimentaires d’une année à l’autre. Cette progression de la part des céréales s’explique par le fait que ces produits qui sont la base de l’alimentation à Cotonou ont connu une hausse de leur coût. Il en est de même des légumineuses. Les dépenses non alimentaires, une autre paire de manches Les dépenses non alimentaires sont aussi importantes. Les dépenses non alimentaires concernent le logement, les soins de santé, les frais d’éducation, le transport, les factures d’eau, d’électricité et bien d’autres frais. Ces dépenses non alimentaires sont réparties en deux grandes catégories à savoir les dépenses non alimentaires fondamentales ou usuelles et les dépenses non alimentaires additionnelles. Tableau IV : Proportion de chaque poste de dépense non alimentaire Biens et services Prix moyen dépensé par mois 2840 Savons Moyenne Moyenne Moyen de cuisson 2495 Electricité Moyenne 7208 Moyenne Eau 3254 Moyenne Santé 6918 Moyenne Loyer et autres frais 15905 Transport Moyenne 9511 Communications Moyenne 9838 Habillement Moyenne 9267 Entretiens Moyenne 6633 Obligations sociales Moyenne 11239 Charges d'éducation Moyenne 11148 Total 3 96256 Source : Résultats d’enquêtes, CREC, 2007-2008

Proportion 2,95% 2,59% 7,49% 3,38% 7,19% 16,52% 9,88% 10,22% 9,63% 6,89% 11,68% 11,58% 100,00%

16,52 % des dépenses non alimentaires des habitants de Cotonou sont consacrés au loyer et autres frais. Le logement cédé à ce coût est le type F2 « 1 chambre, 1 salon). Il convient de faire remarquer qu’il ne s’agit là que du strict minimum en matière de logements pour une famille de 5 membres (1 chambre, 1 salon). La qualité de certains logements 17/24


proposés à ce coût laisse parfois à désirer. Certains, s’ils ne sont pas inondés en période de pluie, sont déficients en infrastructures de base. Dans certains quartiers comme Vêdoko, des logements paradoxalement encadrés par des maisons de haut standing ne jouissent pas, comme on a pu le constater au cours des enquêtes, des services d’électricité et d’eau. 10,8 % des ménages interrogés utilisent encore la lampe à pétrole comme moyen d’éclairage à Cotonou. Par contre, la quasitotalité des ménages à Cotonou, même s’ils doivent parcourir une certaine distance, ont accès à l’eau courante de la SONEB. Les obligations sociales (11,68 %) apparaissent comme le 2e poste de dépense non alimentaire le plus important. Dans l’imaginaire de nombre d’habitants demeurés au village, rester à Cotonou est signe d’une certaine aisance et on est en droit d’attendre du Cotonois une certaine somme à la fin du mois. Il arrive également que des enfants envoient de l’argent à leurs parents pour couvrir leurs dépenses même si ces derniers résident à Cotonou. Les obligations sociales représentent la même part que les charges d’éducation. L’éducation est un secteur clé qui occupe 11,58 % des dépenses non alimentaires des ménages. Les mesures de gratuité des écoles maternelle et primaire décrétées par l’Etat contribueront à baisser cette part. 9,88 % des dépenses non alimentaires sont consacrées au transport. Cela s’explique en grande partie par l’étalement de la ville. Les services publics (eau et électricité) occupent une part importante (10,87 %) dans le budget des ménages. L’autre poste de dépense qui occupe également une part non négligeable dans le budget des ménages est l’habillement (9,63 %). Il dépasse de loin les parts consacrés à l’électricité, à l’eau et bien d’autres. Cela paraît bien curieux mais peut s’expliquer par une certaine pression sociale qui veut que le Cotonois ait un style vie urbain et soit donc à un certain standing. Ce comportement conformiste empreint d’un certain snobisme accentue la misère des populations vulnérables ou pauvres. La santé occupe 7,19 % des dépenses non alimentaires du ménage. Les frais de santé s’élèvent en moyenne à 6920 F par ménage. Ce montant assez excessif pour les ménages pauvres dont une bonne partie gagne un revenu mensuel de moins de 50000 F explique le faible taux de fréquentation des centres de santé par ces derniers et, par ricochet, la prolifération des pratiques d’automédication. Nul doute que des mesures comme la gratuité de la césarienne -une opération redoutée par les populations vulnérables ou pauvres en raison de son montant élevé- et la gratuité des soins de santé primaires aux enfants de moins de 5 ans contribueront à améliorer la situation des pauvres. La mise en œuvre des mesures particulières complémentaires indiquées 18/24


par les recommandations sociales des Etats Généraux de la Santé doit être initiée en faveur des plus pauvres. La plus petite part des dépenses est consacrée aux moyens de cuisson (2,59 %). Environ 2 ménages sur 3 utilisent le bois et ses dérivés (charbon, etc.) Conclusion et recommandations Au terme de cette étude, il ressort que : • les dépenses moyennes fondamentales des ménages sont estimées à 84 901 F environ. Ces dépenses ne prennent pas en compte les dépenses additionnelles estimées à 61 113 F. Les dépenses globales sont évaluées à 146 014 F ; • en considérant le revenu des personnes interrogées, seul 1 chef de ménage sur 7 a un revenu lui permettant d’acquérir les biens alimentaires et non alimentaires (fondamentaux et additionnels) et peut être considéré comme « non pauvre » à Cotonou. Les autres chefs de ménage sont vulnérables ou pauvres car incapables de satisfaire les besoins de leur famille à moins que leur conjoint ou un proche ne contribue aux charges du ménage. L’apport des « à côtés » est la nouvelle trouvaille de survie de certains ménages. On note cependant une augmentation du nombre de pauvres et une dégradation de leur niveau de vie. Il convient toutefois de noter que certains ménages de Cotonou peuvent passer d’une classe à l’autre en fonction des variations de la conjoncture. Ainsi, la proportion des ménages dans une catégorie ou dans une autre peut varier. Pour rappel, l’EDCMC s’est déroulée en novembre 2007 et août 2008, une période où on a noté une hausse généralisée des prix des produits. Quelques recommandations ont été proposées • A l’Etat, il revient de prendre les mesures suivantes : augmenter la production vivrière du pays surtout les céréales qui constituent la base de l’alimentation à Cotonou et des légumes. L’accroissement de la production permettra de satisfaire la demande nationale et de mieux maitriser les prix. Aussi faut-il mettre en valeur les terres surtout celles de la vallée de l’Ouémé, dont l’aménagement tarde à être une réalité ; encourager la recherche agricole pour la mettre au service du développement afin d’améliorer le rendement des cultures ; 19/24


encourager les investissements en prenant des mesures incitatives à l’endroit de tous ceux qui veulent investir dans des secteurs comme l’agriculture, l’agro-industrie ; promouvoir l’entreprenariat et l’emploi (à travers les travaux à haute intensité de main d’œuvre par exemple) autant pour les hommes que pour les femmes, car la charge est toujours moins lourde quand les deux conjoints apportent leur part au budget du ménage ; trouver les mécanismes nécessaires pour une redistribution équitable des richesses nationales et rendre effectif l’accès des ménages aux droits fondamentaux (éducation ; logement ; santé…) ; renforcer les mesures de sécurité sociale en faveur des plus pauvres ; faciliter l’accès des couches pauvres aux micro-crédits ; relever le SMIG (Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti) et augmenter les salaires, sinon cela encouragera les détournements et la corruption qui privent la Nation et les populations du minimum qu’ils ont. Mais l’augmentation des salaires n’est pas une panacée. La hausse des salaires, comme l’ont montrée nombre d’économistes entraîne souvent une inflation. La hausse des salaires doit être suivie d’une surveillance des prix sur les marchés ; stabiliser les prix et renforcer la surveillance et le contrôle des prix sur les principaux marchés. • Au niveau des populations Il faut que les populations dispositions à savoir :

prennent

également

certaines

investir dans de petites activités génératrices de revenus parallèles selon leurs possibilités ; développer le sens de la solidarité au sein des différents groupes de la société ; des communautés d’entraide ou des mutuelles pourront aider les ménages pauvres ou vulnérables ; promouvoir des valeurs comme l’honnêteté, la charité, le travail bien fait. 20/24


Combien coûte une famille moyenne de 5 personnes ? Nous vous donnons ici un aperçu des dépenses alimentaires et non alimentaires d’une famille moyenne de 5 personnes au Bénin. Tableau V : Dépenses globales alimentaires et non alimentaires Période DA DNAF DFG DNAA DG 61113 Novembre 2007 45049 34783 79832 140945 61113 Aout 2008 54467 35503 89970 151083 61113 Moyenne 49758 35143 84901 146014 Source : Résultats d’enquêtes, CREC, 2007-2008

Ce qu’on pourrait en déduire 84 901 F CFA. C’est la somme qu’il faut en moyenne par mois à un ménage de 5 membres pour subvenir à ses besoins à Cotonou. C’est ce que révèle l’étude sur les dépenses de consommation des ménages à Cotonou menée en novembre 2007 et en Août 2008 par le Centre de Recherche, d’Etude et de Créativité (CREC). S’il fallait moins de 40 000 F dans les années 1990 pour nourrir convenablement une famille de 5 personnes et satisfaire ses besoins fondamentaux, aujourd’hui, il en faut plus du double. Et ce montant ne cesse d’augmenter avec l’inflation. A titre illustratif, les dépenses de consommation fondamentale moyenne d’un ménage moyen étaient estimées en novembre 2007 à 79 832 F. 9 mois après, ces dépenses sont passées à 89 970 F, soit une augmentation de 12,7 %. Ceci est surtout dû à l’envolée des prix des produits de première nécessité. Si les prix des biens et services non alimentaires n’ont pas varié de façon très sensible9 (ce qui justifie que les montants moyens déterminés aient été maintenus), il n’en est pas de même des dépenses alimentaires, comme l’indique le tableau VI : Tableau VI : Evolution des prix de quelques produits de première nécessité entre novembre 2007 et août 2008 Prix en novembre Prix en août 2007 2008 Maïs 1 tgl 175 250 Riz 1 kg 400 500 Haricot blanc 1 tgl 300 600 Haricot rouge 1 tgl 250 600 Gari 1 tgl 150 200 Huile d'arachide 1L 700 800 Source : Résultats d’enquêtes, CREC, 2007-2008 Produits

Quantité

9

Augmentation 42,86% 25,00% 100,00% 140,00% 33,33% 14,29%

Certains indicateurs ont permis de mesurer l’augmentation sur la période. Pour le transport, la variation du coût d’une course par taxi, par bus ou par taxi-moto d’un point à un autre été par exemple un des indicateurs.

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Tous les produits ont connu une hausse de leur coût. Certains produits tels le haricot ont connu une forte augmentation (entre 100% et 140%). Pour mémoire, il faut retenir que les denrées de base et autres produits de grande consommation ont connu une hausse généralisée au Bénin comme ailleurs depuis le dernier trimestre de l’année 2007 ; hausse qui a été marquée, sous d’autres cieux (Burkina-Faso, Côte d’Ivoire, Cameroun, Sénégal) au second trimestre de 2008, par des manifestations souvent réprimées. Le tableau VII illustre l’évolution des prix pratiqués en juillet 2007 et en août 2008. Tableau VII: Evolution des prix de produits de première nécessité entre juillet 2007 et août 2008 Prix en Prix en août Augmentation de juillet Juillet 2007 2008 2007 à août 2008 Maïs 1 tgl 115 250 117,39% Riz 1 kg 345 500 44,93% Haricot blanc 1 tgl 275 600 118,18% Haricot rouge 1 tgl 215 600 179,07% Gari 1 tgl 150 200 33,33% Huile d'arachide 1 l / 800 / Source : ONASA (juillet 2007) et Résultats d’enquêtes, CREC, (août 2008) Produits

Quantité

L’Indice Harmonisé des Prix à la Consommation (IHPC) permet de mieux comprendre cette hausse généralisée. En effet, l’IHPC des produits alimentaires et boissons non alcoolisées est passé de 122,2 en juillet 2007 à 155,6 en juillet 200810 soit une variation de 27,3% en 12 mois. Les prix de certains biens ont connu une augmentation de plus de 150%. Cela aurait eu pour effet une croissance fulgurante du budget des ménages sur la période si certaines mesures n’avaient pas été prises. La constitution des stocks par l’Office National d’Appui à la Sécurité Alimentaire (ONASA), les mesures de défiscalisation et le contrôle des prix sur les marchés ont permis d’amortir le choc. Mais il faut reconnaître que ces mesures ponctuelles n’ont pas résolu cette crise plus structurelle que conjoncturelle. Face à la crise, si la promptitude des gouvernants est à saluer, il faut tout de même regretter que des mesures durables n’aient pas été prises. Les séminaires, forums consacrés à la stratégie de réduction de la pauvreté tenus dans des hôtels chics et salles climatisées n’ont pas amélioré le sort des populations qui continuent toujours de végéter dans la pauvreté. Le bout du tunnel paraît encore loin pour des centaines de milliers de Cotonois. Ce qui conforte les pessimistes qui pensent que la réduction de la pauvreté et tout le matraquage médiatique qui est fait autour n’est 10

L’indice Harmonisé des Prix à la Consommation (IHPC) du mois d’Août 2008 n’était pas disponible au moment où nous mettons sous presse.

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qu’une utopie et un slogan de plus pour nourrir des bouches déjà rassasiées. Si l’on s’en tient à l’étude sur les conditions de vie des ménages à Cotonou, le ménage dont le revenu est en dessous de 90 000 F peut être considéré comme vulnérable et même pauvre. Car il ne peut acquérir les biens minimaux nécessaires à la survie de ses membres ; lesquels biens et services sont évalués à 84 901 F. Or, il ne s’agit là que des dépenses fondamentales essentielles. A ces dépenses, il faut ajouter d’autres non moins importantes à savoir les obligations sociales et charges diverses surtout celles d’éducation (autres que les frais de scolarité), les frais de communication, de logements, d’habillement, d’entretiens… Ces dépenses additionnelles sont estimées en moyenne à 61 113 F. Certes, ces dépenses ne concernent pas tous les ménages. Mais en considérant à la fois les dépenses fondamentales et additionnelles, un ménage de 5 membres aura à débourser en moyenne 146 014 F par mois. Si l’on se fie aux revenus déclarés par les personnes interrogées dans le cadre de cette enquête, on remarque que 85,7% des chefs de ménage ont un revenu en dessous de 150 000 F CFA. A moins donc d’une contribution substantielle de leur conjoint ou d’une aide extérieure, la plupart des chefs de ménage interrogés ne peuvent satisfaire convenablement les besoins de leur famille. Une hypothèse confirmée par nos enquêtes qui montre que 2 chefs de ménage sur 3 bénéficient d’une contribution de leur partenaire ou du soutien d’un parent. 1 ménage sur 5 bénéficie d’une aide extérieure, c’est ce qui justifie peut être la floraison des structures de transfert d’argent (Western Union, Money Gram,…) disponible à chaque coin de rue de la capitale économique. Une piste de recherche qui reste à explorer. Le montant de la contribution aux charges ou des aides extérieures varie selon les ménages. Dans certains ménages où les membres du couple ont des emplois précaires ou des revenus qui ne sont pas fixes, « joindre les deux bouts » est parfois une véritable gageure et un véritable parcours du combattant. Ainsi, certains ménages sont contraints de faire des réajustements pour non pas vivre mais survivre. Des conclusions de l’enquête, il ressort que certains ménages ont opté pour la réduction du nombre de repas (19,8 %) ou pour la suppression de certains biens devenus inaccessibles. Si nombre de Cotonois vivent au quotidien et s’efforcent tant bien que mal de s’adapter au train de vie urbain, il en existe qui ont perdu tout espoir de vivre qui souffrent en silence et n’arrivent même pas à trouver leur pitance quotidienne. Outre le manque de moyens financiers, la pauvreté se manifeste sous plusieurs formes : habitat incommode et insalubre, alimentation pauvre difficultés d’accès aux services sociaux… 23/24


A côté de ceux qui survivent difficilement ou de ceux qui s’adaptent au contexte actuel et se contentent juste du peu pour subvenir aux besoins essentiels de leur ménage, se trouvent d’autres par contre (une minorité) qui n’ont pas été affectés et ne sont nullement inquiétés par les soubresauts de la crise. Leurs salaires et primes leur permettent de faire face aux crises et d’être considérés comme non pauvres. Le fossé entre ces derniers et les pauvres se creuse davantage. Une solidarité entre les diverses couches et une redistribution équitable des richesses pourrait aider les uns et les autres à faire face aux difficultés qu’elles soient structurelles ou conjoncturelles. Bibliographie 1. PNUD et INSAE, 1996 : Profil de pauvreté et caractéristiques socioéconomiques des ménages : ville de Cotonou. CACI-Benin. Cotonou, 68p. 2. PNUD et INSAE, 1996 : Profil de la pauvreté et caractéristiques socioéconomiques des ménages urbains : synthèse. Cotonou, 54p. 3. INSAE, 2004 : Cahier des quartiers de ville du département du littoral. 14p 4. INSAE, 2008 : Bulletin mensuel de l’Indice Harmonisé des Prix à la Consommation : juillet 2008. 4 p. 5. ONASA, 2007 : Système d’information et d’alerte rapide sur la sécurité alimentaire, LISA-SAR n° 219. 17 p.

Prix indicatif de quelques biens ou services (1er Octobre 2008) • • • •

Transport urbain et inter-urbain Ekpè Gare –Dantokpa (bus) 200 • Fidjrossè-Dantokpa (bus) Calavi Kpota-Dantokpa (Taxi) 400 • Yenawa-Dantokpa (bus) Dérivés du pétrole Essence « Kpayo » (frelatée) 375 - 400 • Gazoil à la pompe Essence à la pompe (station) 595 • Pétrole à la pompe

150 100-150

CAHIERS DU CREC Revue d’analyse sociale, de psychologie et d’informations du Centre de Recherche, d’Etude et de Créativité de la Compagnie de Jésus au Bénin (Godomey)

Rédacteurs du premier numéro Laurent GBESSI, sociologue Fidèle DELIDJI, économiste Candide ADJOVI, juriste Barnabé HOUNGUEVOU, géographe Collaborateurs pour le premier numéro Noel HINVO - Doris ASSOGBA- Antoinette ABEKE Micdadou COULIBALY - Maurice HOUEHA 24/24

595 400


Panier indicatif des dépenses d’Août 2008 d’un ménage de 5 membres (EDCMC) Produits alimentaires Maïs Riz importé (Big Joe) Macaroni (Gino / maman) Œuf de poule moyen Tomate fraîche Piment vert/rouge ordinaire Haricot blanc Haricot rouge Huile d’arachide Huile rouge Igname Gari ordinaire Sel Sucre fin Viande11 Poisson « Silivi » Légumes feuilles : (« jardin man ») Crin-crin Oignon Pain ordinaire Sous Total panier 1

Qté

prix par unité

19,4 tgl 11,7 kg 2,2 kg 1 plateau 5,82 kg 1,65 kg 4 tgl 3,7 tgl 3,6 l 2,1 l 7,695 kg 5,9 tgl 1 tgl 1,3 tgl 4,2 kg 9,2 kg 11,36 kg 0,9 kg 3,3 kg 23 baguettes

250 500 700 2200 357 500 600 600 800 800 210 200 350 400 2250 950 161 455 400 110

Prix total en F CFA 4850 F 5850 F 1540 F 2200 F 2078 F 825 F 2400 2220 2880 1680 1616 1180 350 520 9450 8740 1829 410 1320 2530 54467

Dépenses non alimentaires usuelles ou fondamentales du mois Produits Quantité Prix (F CFA) Savon Palmida 5,6 pains 150 Omo Vaisselle + nettoyage 4,8 pains 225 Savon Fanico 6,4 pains 200 Electricité 7208 Moyenne (EDCMC) Moyenne (EDCMC) Eau 3254 Moyenne (EDCMC) Transport 9511 Moyenne (EDCMC) Santé 6918 12 Hypothèse Education 2917 Moyenne (EDCMC) Moyen de cuisson 2495 Sous total panier 2 35503 Total (DF) = Sous total panier 1 + Sous total panier 2 = 89970F Dépenses non-alimentaires additionnelles Moyenne (EDCMC) Logements Moyenne (EDCMC) Communications Moyenne (EDCMC) Habillement Moyenne (EDCMC) Entretiens Moyenne (EDCMC) Obligations sociales Autres Charges d'éducation Moyenne (EDCMC) Total 3

11

15905 9838 9267 6633 11239 8231

Prix total (F CFA) 840 1080 1280 7208 3254 9511 6918 2917 2495 35503

15905 9838 9267 6633 11239 8231 61113

Prix moyen viande sans os et avec os de mouton et de bœuf Hypothèse d’une famille ayant un enfant au primaire, un autre au secondaire et un dernier à l’université publique. Frais d’éducation par mois = Frais de scolarité dans chacun de ces degrés d’enseignement / 12 12

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