Vue d’ensemble de la Méridienne de forme octogonale imaginée par Richard Mique. © C. Milet – D. Saulnier Détail des bronzes finement ciselés entourant les glaces créés selon la technique mise au point par P. Gouthière qui confère au métal l’apparence de l’or. © D. Saulnier Détail des boiseries des frères Rousseau. Les paons associés à la déesse Junon évoquent le mariage. © D. Saulnier Détail de la serrurerie par Pierre Gouthière. © D. Saulnier
À VERSAILLES, LE CABINET DE LA MÉRIDIENNE POURSUIT SA RENAISSANCE Les créations des frères Rousseau semblent décidément à l’honneur cette année. En parallèle de la restauration du boudoir turc de Fontainebleau, c’est un autre joyau de ces ornemanistes virtuoses qui est en train de renaître à Versailles : le cabinet de la Méridienne, ou boudoir de Marie-Antoinette. Une opération qui s’inscrit dans un programme global de restauration des Petits Appartements. Pendant intime de la grande chambre de la reine à laquelle il s’adosse, le cabinet de la Méridienne constitua pour la dernière reine de France un refuge à l’écart de la représentation et de l’étiquette. Conçu entre février et septembre 1781 au premier étage du palais en remplacement d’un escalier, il fut réalisé en l’honneur de la naissance prochaine de Louis-Joseph-Xavier, premier dauphin et héritier du trône. UN ÉCRIN INTIME POUR MARIE-ANTOINETTE Son nom de « Méridienne » découle très probablement de l’usage qui en était fait par la reine à la mi-journée, juste avant le dîner alors servi vers trois heures de l’après-midi. Certaines de ses caractéristiques constituèrent de véritables innovations pour l’époque, à l’image de sa forme octogonale qui permettait une circulation facilitée des femmes du service de la Chambre en les dispensant d’y pénétrer, ménageant ainsi la tranquillité de la souveraine. Imaginé par l’architecte Richard Mique, cet écrin précieux réunit les meilleurs artisans : les frères Rousseau exécutèrent les motifs sculptés des boiseries en harmonie avec les bronzes finement ciselés entourant les glaces des portes et composant la serrurerie, créations de Pierre Gouthière, inventeur de la technique qui confère au métal l’apparence de l’or. Leur symbolique est clairement associée aux heureuses circonstances qui présidèrent
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à l’aménagement des lieux : s’y mêlent des évocations de l’amour (tiges de rosier qu’interrompent des cœurs percés de flèches), du mariage (paons associés à Junon, déesse du mariage), ou encore de la maternité (dauphins), dominés par les figures du roi (aigle de Jupiter) et de la reine (aigle d’Autriche). UNE PREMIÈRE PHASE DE TRAVAUX ACHEVÉE : LE DÉCOR Le décor du boudoir traversa les époques sans trop de heurts. Démonté en 1939, il fut protégé en province des soubresauts de l’Histoire jusqu’en 1947. L’absence de restauration d’envergure pré-
serva la dorure d’origine, mais n’empêcha malheureusement pas l’inéluctable dégradation de l’ensemble. Une campagne de restauration complète s’imposait afin de retrouver la finesse et l’harmonie du décor voulu par la souveraine, rendue possible grâce au mécénat de la Société des Amis de Versailles. Débutée en octobre 2013, la première phase des travaux vient de s’achever. Après une dépose de l’ensemble du décor envoyé en atelier pour restauration, les murs porteurs, le plafond et la corniche ont pu être consolidés. Minutieusement nettoyées, les boiseries n’ont subi que très peu de reprises. Grâce à la découverte de fantômes, les chiffres royaux des médaillons bûchés à la Révolution ont pu être restitués. Uniques en leur genre à Versailles, les motifs sculptés dans le marbre griotte de la cheminée et dorés afin d’imiter un décor de bronze ont été entièrement nettoyés et restaurés. Enfin, pour rendre sa pleine harmonie à la pièce, l’architecte en chef des Monuments historiques Frédéric Didier en charge de la restauration a choisi de restituer le parquet dans sa teinte d’origine « couleur de citron », dont l’existence a été découverte dans un placard après la dépose des boiseries. UNE DEUXIÈME PHASE DE TRAVAUX JUSQU’EN 2016 : LE REMEUBLEMENT Le décor de la pièce étant désormais restauré, il convenait de redonner à ce lieu discret et raffiné un ameublement digne de ce nom. Proportionnel aux dimensions réduites du boudoir, celui-ci connut trois états différents entre 1781 et 1784. Manifestement insatisfaite des livraisons du Garde-Meuble de la Couronne, Marie-Antoinette passa commande d’un troisième ensemble à son garde-meuble privé. Exécuté par Georges Jacob, il se composait d’une bergère, trois fauteuils, une chaise, un tabouret de pied, un écran, une banquette, son matelas, ses deux oreillers et ses deux rondins. Tous étaient recouverts d’une soie lilas brodée de fleurs et de rinceaux en camaïeu vert avec chutes de perles et médaillons à sujets chinois, exécutée à Lyon par Marie-Olivier Desfarges. C’est à la restitution de ce troisième meuble que s’est attelé Versailles. De l’ameublement d’origine des lieux, il a déjà pu racheter deux fauteuils et une chaise. Le programme de restitution débute cette année avec la commande d’un pou-de-soie et l’étude des bordures et couvertures des deux fauteuils. En 2016 devrait débuter le tissage des différentes bordures qui sera suivi par la broderie des couvertures des deux fauteuils. Ajoutons enfin que la réalisation des rideaux de croisée et d’alcôve en pou-de-soie devrait constituer une ultime phase du chantier et sera fondée sur le deuxième meuble livré par Capin. En redonnant toute sa cohérence à l’un des ensembles décoratifs les plus précieux et les mieux conservés de la fin du XVIIIe siècle, c’est un véritable « moment de perfection de l’art français » que restitue le château de Versailles. Il faudra cependant s’armer de patience avant de le découvrir entièrement restauré, sa réouverture au public n’étant vraisemblablement pas prévue avant 2017. O. P.-M. www.chateauversailles.fr
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