Nos 10 plus belles scènes musicales au cinéma en 2021 lesinrocks.com/cinema/nos-10-plus-belles-scenes-musicales-au-cinema-en-2021-432280-29-12-2021
“Les Inrocks” se replongent dans dix scènes musicales mémorables vues cette année, dans lesquelles la musique a pris une place toute particulière et bouleversé nos sens. 1 – Annette de Leos Carax (So May We Start de Sparks) Si chaque nouveau film du rare Leos Carax (seulement six films sortis en près de 40 ans de carrière) soulève une excitation unique en son genre, ces espérances s’en sont trouvées décuplées au moment de la sortie de son ultime opus, Annette. Après neuf mois de fermeture des salles de cinéma – soit le temps d’une gestation –, ce n’était pas seulement le retour du génial cinéaste français qui étaient célébré mais bien la renaissance du cinéma tout court (un rôle de sauveur un peu plus appuyé par le choix des équipes du Festival de Cannes de le placer en film d’ouverture). 1/11
Tourné avant l’éclatement de la crise sanitaire, la scène d’ouverture d’Annette ne pouvait mieux encapsuler cette euphorie du retour au cinéma. Après une patiente mise en place, Leos Carax apparaît derrière la vitre d’un studio d’enregistrement et déclare face caméra : “Alors, on peut y aller ?”,comme s’il demandait ironiquement l’autorisation de rependre le show après ce temps de cryogénisation du cinéma. Derrière la vitre, ce leitmotiv est aussitôt repris par les Sparks et bientôt rejoint par ses acteurs, Marion Cotillard et Adam Driver. En quelques secondes, le chef d’orchestre Carax synthèse le mouvement opéré des coulisses à la fiction, de la mort à la renaissance, et signe incontestablement l’un des fragments les plus galvanisants que le cinéma nous ait offerts cette année.
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2 – Lovers Rock de Steve McQueen (Silly Games de Janet Kay) Épisode électrochoc tirée de l’anthologie Small Axe de Steve McQueen, Lovers Rock nous plonge en immersion dans une soirée blues en 1980, à l’heure où la jeunesse noire n’était pas la bienvenue dans les boîtes de nuit blanches. Déroulées avec une quiétude à laquelle l’auteur de Shame et d’Hunger ne nous avait pas vraiment habitué·es jusqu’ici, les festivités découlent jusqu’à ce que résonne les premières notes du splendide Silly Games de Janet Kay. Les corps se meuvent dans une parenthèse hédoniste mêlant transes collectives et rituels de séduction. Alors que la chanson est arrivée à sa fin, les paroles sont aussitôt reprises en cœur par les danseurs·ses. La scène change soudain de paradigme ; la prétendue innocence saisit avec acuité et douceur la naissance d’un corps politique et d’un groupe dont les revendications ne font soudain plus qu’un. Souvent, l’élan révolutionnaire surgit d’un chant.
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3 – Get Back de Peter Jackson (Get Back des Beatles) Il est rare qu’un film soit parvenu à fixer la gestation d’un chef-d’œuvre. En peinture, on se souvient du Mystère Picasso de Clouzot, scrutant la main à l’œuvre du peintre cubiste – mais quid de la musique ? Comme le rappelait Jean-Marc Lalanne, dans l’affront éternel qui sépare les Beatles des Stones, ces derniers avaient bénéficié de l’œil génial de Godard, captant la genèse du mythique Sympathy for the Devil dans One + One. Un rapport de force qui, depuis la diffusion de Get Back, long et minutieux documentaire réalisé par Peter Jackson sur la genèse du dernier album studio des Beatles, a été totalement redistribué. “Ce qui est en train d’émerger deviendra le nouveau single des Beatles”. C’est ainsi qu’un carton annonce la stupéfiante séquence de Get Back, initiée par McCartney improvisant quelques accords à la guitare. Le temps s’étire, Ringo regarde attentivement son compère tandis que George ne peut retenir un bâillement. Mais progressivement, chacun se met au travail (même Lennon, avec sa nonchalance irrésistible, s’assoit avec le groupe et se mêle à la danse). De cette masse informe et déstructurée surgit quelques bribes de la mélodie de Get Back. Telle une épiphanie, un tube accouche sous nos yeux sidérés.
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4 – Aline de Valérie Lemercier (Going To A Town de Rufus Wainwright) Récit d’amour et de musique, le film de Valérie Lemercier offre son lot de scènes musicales extrêmement réussies. Paradoxalement, ce n’est pas dans le registre de la diva qu’Aline atteint ses plus hauts sommets, mais par le biais d’autres regroupé·es dans une B.O. splendide. Si l’on aurait pu citer la scène liminaire digne d’un Scorsese, s’ouvrant sur un plan zénithal de la chanteuse endormie rythmé par Ordinaire de Robert Charlebois, notre palme revient à la déambulation d’Aline, le temps d’une journée, dans un Las Vegas vide. D’une mélancolie déchirante, la scène fixe l’insoutenable absence de l’être aimé et le double statut ambigu de Céline, superstar sur scène pourtant condamnée à l’invisibilité en privé lorsqu’un couple lui demande de les prendre en photo devant l’affiche de son propre spectacle.
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5 – Mourir peut attendre de Cary Joji Fukunaga (We Have All The Time In The World de Louis Armstrong) Peu de gens le savent, mais avant Vesper (Eva Green) et Madeleine (Léa Seydoux), l’agent le plus volatile du MI6 avait déjà connu l’amour fou dans Au service secret de sa majesté, l’un des plus beaux et étranges opus de la saga. Après les péripéties communes à chaque épisode de James Bond, l’épilogue montre cette image inespérée de 007 (incarné par George Lazenby pour une unique fois), béat d’amour, mettant la bague au doigt de Tracy (Diana Rigg). Mais bientôt, Bond est rattrapé par sa destinée. Alors que les mariés volent vers leur voyage de noces, leur voiture est rattrapée par l’iconique Blofeld qui vient abattre d’une rafale de mitraillette la jeune femme. Penché sur son cadavre encore chaud, Bond glisse à sa femme la réplique restée célèbre “Nous avons tout le temps du monde”, tandis qu’une variation de l’air de Louis Armstrong servant de chanson-titre à l’épisode débute sur la bande sonore. Nous avons beaucoup écrit aux Inrocks (ici et là) sur la puissante reconstruction qu’opère Mourir peut attendresur le mythe Bond et la toxicité dont il est frappé plus ou moins malgré lui. Jusqu’ici la saga n’avait raconté qu’un tragique mouvement : telle une fleur vénéneuse dont le simple toucher suffit à tuer, lorsque Bond aime, sa bien-aimée, par la nature même de l’alliance, devra nécessairement mourir des mains de ses ennemi·es. Mais l’épilogue de Mourir peut attendre offre pour la première fois un tout nouvel horizon. Formant un miroir inversé de la conclusion d’Au service secret de sa majesté, la dernière scène de Fukunaga fait jaillir un espoir inespéré dans lequel Madeleine, au volant d’une voiture et accompagnée de sa fille (fruit de sa relation avec Bond), glisse vers une nouvelle vie plus sûre, sur l’air chantonnant de Louis Armstrong. Après 25 épisodes, par un sublime sacrifice, Bond permet enfin à celles qui l’ont aimé de lui survivre.
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6 – Journal de Tûoa de Miguel Gomes (The Night de Frankie Valli And The Four Seasons) Après l’ouverture d’Annette qui mettait en scène le come-back inespéré du cinéma, un autre choc issu d’un film cannois est venu mettre en miroir les réminiscences encore fraîches de nos vies par temps de pandémie. DansJournal de Tûoa, témoignage d’un tournage fictif pendant la crise sanitaire, Gomes fait débuter son film par une scène montrant trois jeunes gens dansant frénétiquement dans l’espace confiné d’un salon sur l’entraînant rock de The Nightde Frankie Valli. En l’espace d’à peine quelques secondes se dessine devant le spectateur le miroir des soirées clandestines organisées pendant les différents confinements. Assez naturellement, la chanson a acquis le titre d’hymne de toutes les soirées cannoises, et plus globalement de la vie se remettant en marche.
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7 – West Side Story de Steven Spielberg (Cool d’Ansel Elgort et Mike Faist, d’après une composition de Leonard Bernstein) Remake de la mythique comédie musicale des sixties par l’un des grands-pères du cinéma hollywoodien, si cette revisite ne convainc pas à tous les étages, elle offre une formidable réussite sur les tableaux chorégraphiés. L’ouverture du film est un modèle de déplacement des corps dans l’espace et de machinerie de caméra ; mais citons également l’un des joyaux du film mettant en scène l’affrontement entre Tony et Riff, les deux frères déchirés de la bande des Jets, dans lequel Spielberg entremêle avec une virtuosité folle une chorégraphie dansante et une scène de bagarre digne d’un film d’action.
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8 – Cry Macho de Clint Eastwood (Sabor A Mi d’Eydie Gormé et Los Panchos) “Je ne sais pas comment guérir la vieillesse.” C’est par ces mots, la mine désolée, que répond Mike Milo (Eastwood) à un couple venu lui demander de porter assistance à leur animal de compagnie. Puisque qu’il ne peut lutter contre le temps qui s’écoule, le cinéaste choisit dans Cry Macho de l’enregistrer par la chimie du cinéma et de mettre en scène son propre vieillissement dans un rôle de cow-boy fatigué et au cœur tendre. La dernière scène du film est un sommet d’émotion qui n’a jamais quitté notre iris depuis sa projection, lorsque son personnage entame avec sa nouvelle compagne un slow du trio mexicain Los Panchos. Alors que le sublime pas de deux s’efface déjà dans un fondu au noir, la scène est recouverte de notre prière intérieure de spectateur, implorant en silence que ce ne sera pas l’ultime image qui nous parviendra du dernier cow-boy d’Hollywood.
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9 – À l’abordage de Guillaume Brac (Aline de Christophe) Disparu au printemps 2020, le chanteur Christophe a enveloppé le cinéma de sa présence à trois reprises cette année. D’abord frontalement avec sa musique spectrale écrite pour France de Bruno Dumont, puis de biais dans Aline,lorsque l’écoute du tube éponyme du chanteur influe sur le choix du prénom de la future super star interprétée par Valérie Lemercier. Mais citons également une très jolie scène de karaoké dans l’escale estivale de Guillaume Brac, où les deux jeunes héros du film chantent à tue-tête le célèbre tube Aline. Tournée avant le décès du chanteur des Mots bleus, cette scène à la simplicité et au charme irrésistibles s’en retrouve soudain envahie d’une vive émotion.
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10 – Bergman Island de Mia Hansen-Løve (The Winner Takes It All d’ABBA) Après la déconstruction du mythe de l’agent secret dans Mourir peut attendre, c’est celle d’une autre figure tenace du patriarcat (l’artiste génial) qui est conduite par Mia HansenLøve dans son Bergman Island. Réflexion sur l’acte de création et sa cohabitation avec la vie, le film offre un tour de force théorique en mêlant deux lignes narratives : l’histoire d’un couple qui s’écarte et le récit en train de s’écrire de retrouvailles entre deux personnages de fiction. Au sein de ce mouvement, le film produit une très belle scène de danse dans laquelle l’amoureuse Amy (Mia Wasikowska) semble se libérer un instant des chaînes de la passion, sur le toujours aussi magnifique tube d’ABBA.
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