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La Veine Bleue du Sud-Kivu

LA VEINE BLEUE DU SUD-KIVU

C’est pour alimenter quatre villages de cette province de la RD Congo en eau propre qu’Oxfam s’est lancée dans un de ses plus ambitieux projets à ce jour : la construction d’une conduite d’eau de plus de 120 kilomètres de longueur. Cet approvisionnement en eau est vital et permettra de réduire fortement le risque de maladies et d’épidémies.

À Sebele, plus de 40.000 personne n’ont pas accès à l’eau potable.

Pour les habitants de Sebele – un des villages concernés par le projet – l’accès à l’eau est un défi quotidien. Leur village ne dispose que d’un puit, dont l’eau est impropre à la consommation. Pourtant, chaque jour, Rebaka Kashindoro se lève à 4 heures du matin pour s’y rendre, un jerrycan de 20 litres à la main. L’aller-retour lui prend une heure, et se répète au moins deux fois dans la journée. En espérant qu’il reste de l’eau…

Une absence d’eau potable propice aux épidémies

A Sebele, ce sont 40.280 personnes qui vivent sans accès à de l’eau potable. La rivière – dont l’eau est tout aussi impropre à la consommation - est située à 4 km du village. Certains habitants creusent des puits de fortune à proximité de leur maison afin de s’épargner la marche. Le problème est que ces puits sont rapidement contaminés par des latrines trop proches. Les pluies aggravent encore ce problème en entraînant de nombreux déchets vers les puits de fortune. Et les eaux stagnantes sont propices aux moustiques, vecteurs de malaria. Les habitants de Sebele sont bien conscients des risques liés à ces puits. Mais c’est malheureusement souvent leur seul moyen d’avoir un accès relativement pratique à de l’eau.

Résultat, la clinique de Sebele ne désemplit pas. Chaque jour, c’est une quinzaine de nouveaux patients atteints de choléra qui se présentent. Parfois, il est nécessaire d’installer des patients sous des tentes, dans la cour, car l’hôpital manque de place pour les accueillir. « C’est terrible, mes enfants sont constamment malades, » explique Lwako Okelwa, la cinquantaine, hospitalisé à cause du choléra. « Mais que puis-je faire ? Ça fait 15 ans que j’habite Sebele, et jusqu’ici rien n’a changé ».

Il manque 125.000 euros pour finaliser le projet.

Un pipeline communautaire

La solution, c’est Oxfam qui l’a trouvée : capter l’eau propre et potable à la source de la rivière Mukera, située à 80km environ de Sebele. Pour amener l’eau jusqu’aux villages concernés par le projet, c’est l’énergie la moins chère du monde qui est utilisée : la gravité. La source étant située à 1.500 mètres d’altitude, aucune pompe n’est nécessaire pour acheminer l’eau vers les réservoirs.

Pour la pose des conduites, Oxfam a fait appel aux communautés locales. Amnazo Kiza, énergique trentenaire et mère de 5 enfants, est secrétaire du ‘Water Committee’ (comité de l’eau) mis en place pour gérer ce projet. « Toutes les personnes qui travaillent pour ce projet sont volontaires, et ont été désignées par vote au sein des communautés, » explique-t-elle. « Un des rôles du comité est d’organiser le travail des bénévoles qui creusent la tranchée pour le pipeline. Une fois la conduite terminée, les familles devront payer une petite participation pour avoir accès à l’eau. Cela permettra d’entretenir le système. Et nous prévoyons une caisse de solidarité pour les personnes qui n’ont pas les moyens de payer cette cotisation, comme les personnes âgées. »

Cela fait déjà 14 mois que le projet est en cours, et 106 km de conduites ont été posés. Des plateformes destinées aux réservoirs sont déjà construites également. Chacune pourra accueillir une citerne d’une capacité de 70.000 litres. Ces citernes sont à leur tour reliées à des robinets, où les habitants des villages de Segele, Fizi, Katanka et Malinde pourront venir s’approvisionner en eau propre.

Mais le projet se heurte à des difficultés de financement. Il manque 26 km de conduites pour finaliser le pipeline. Le problème principal réside dans le fait que les conduites sont achetées en Ouganda, et doivent être transportées dans les zones concernées, souvent difficiles d’accès. Le coût pour ce transport est énorme et n’est souvent pas couvert par les subsides publics d’aide au développement.

C’est pour cela que l’apport de fonds par des ONG comme Oxfam est si important. Leur utilisation est généralement moins restrictive que celle des fonds publics et permet de régler des dépenses comme celle du transport de matériel. La générosité des donateurs est donc le dernier coup de pouce pour mener ce projet à terme. Actuellement, on considère que 125.000 euros manquent pour le finaliser. Quand l’eau s’écoulera, c’est une veine bleue qui fera battre à nouveau le cœur de toute la région.

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