OH 08 : Des Cambodgiennes luttent pour leur forêt sacrée

Page 1

h O

MAGAZINE TRIMESTRIEL D’OXFAM BELGIQUE

8 12

#OX-FILES L’EAU SOUS PRESSION AU BURKINA FASO #PROJECT Des Cambodgiennes luttent pour leur forêt sacrée N° 8 - JUIN - JUILLET - AOUT 2021


tx! Tom & Jan

« Restez fidèles à vos valeurs » ©Savann Oeurm

Jan Dewitte et Tom Wolff soutiennent Oxfam depuis 1970. « Pour nous, il est essentiel que les droits basiques de tout le monde soient respectés. Oxfam y travaille de manière créative et utilise son influence politique avec discernement. Le fait qu’Oxfam implique des groupes locaux dans son fonctionnement renforce notre adhésion. »

La forêt sacrée Pour les femmes originaires de la province cambodgienne du Ratanakiri, la forêt est un lieu sacré. Depuis des siècles, elles dépendent de la générosité de ses ressources pour vivre. Elles y trouvent des légumes, des fruits, des champignons, du bois ou encore de l’eau. Khwas Blov et Sol Preng font partie de la communauté Toumpoun. Il y a 9 ans, de lourds engins de chantier ont fait irruption dans leur village. Une grosse société vietnamienne de caoutchouc venait s’emparer de leurs terres. Du jour au lendemain, Khwas et Sol ont perdu leurs anacardiers et bananiers, mais aussi leurs poulets et leur maison. Et pire que tout : leur forêt sacrée.

« Notre message est : ne vous laissez pas berner par les puissants. Restez fidèles à vos valeurs. »

La résistance des femmes

Khwas et Sol ne sont pas restées les bras croisés. Elles ont rassemblé les femmes du village et organisé la résistance. Elles ont introduit une plainte officielle contre la société auprès des autorités. Ont-elles réussi à récupérer leurs terres ? Lisez la suite de leur combat en page 13.

OH-magazine n° 8 - revue trimestrielle d’Oxfam Belgique - juin - juillet - août 2021. Rue des Quatre Vents 60, 1080 Bruxelles, 02-501.67.00, www.oxfamsol.be, info@oxfam.be Publié par Direct Operations - Editrice responsable : Eva Smets – Rédaction et relecture : Mark Anthierens, Sotiris Gassialis, Fei Lauw, Thomas Maertens, Leen Speetjens – Rédaction d’images & photos : Tineke D’haese – Mise-en-page : Efraim Sebrechts – Coordination : Mark Anthierens – Impression : Gevaert Graphics Vous désirez vous abonner, obtenir le magazine en version digitale ou ne plus le recevoir ? Envoyez-nous un mail à maquestion@oxfamsol.be. Oxfam respecte votre vie privée. Vous avez la possibilité de modifier vos données personnelles, de les supprimer ou de retirer votre consentement à tout moment. Contactez-nous sur maquestion@oxfamsol.be ou téléphonez au 02/501.67.33. Consultez notre charte de confidentialité sur www.oxfamsol.be/vieprivee. Oxfam-Solidarité et Oxfam-Wereldwinkels/Fair Trade unissent leurs forces sous le nom d’Oxfam Belgique.

@OxfamBE

oxfamsol

Oxfam.BE

Ce magazine est imprimé sur du papier FSC - MACO SILK 135 Gr

ed.OB 070 - mai21

Tom (47) ET Jan (74) • Mariés à Leuven en 2016 • Tom est né à Leuven, Jan à Kuurne • Jan est psychothérapeute, Tom est coordinateur de sécurité, compositeur, producteur et conseiller en alimentation • Ils aiment la nature et les aventures quotidiennes • Ils détestent l’injustice et la discrimination


3

CARTE BLANCHE

Aurore Guieu

Responsable de l’équipe « Inégalités et justice fiscale », Oxfam Belgique

«

«

La Belgique doit annuler la dette des pays du Sud

En mars 2020, lorsque le coronavirus commence à se propager, 46 pays surendettés consacrent en moyenne quatre fois plus d’argent au remboursement de la dette qu’au financement des services de santé. La pandémie a porté un coup sévère à des systèmes de santé et de protection sociale déjà fragiles. Les gouvernements ont dû beaucoup emprunter pour faire face à la crise. Au Kenya, la dette a augmenté de 21 % en un an et la Zambie est devenue le premier pays à faire défaut sur sa dette à cause du coronavirus en décembre dernier. Du Ghana au Sénégal, les appels à annuler le fardeau des dettes se sont multipliés, avec le soutien de la société civile. Aucune dette n’a été annulée Ces appels ont été ignorés. Le G20 et d’autres pays créanciers dont la Belgique ont tout juste concédé de suspendre le paiement des dettes de 73 pays, de mai 2020 à juin 2021. Un an de sursis donc. Exclus le Soudan ou le Zimbabwe car ils ne sont pas à jour de leurs paiements au Fonds Monétaire International. Exclus aussi certains pays à revenus intermédiaires comme le Liban, qui frôle pourtant la faillite.

VOUS VOULEZ SOUTENIR OXFAM ? Scannez le QR-code ou visitez oxfamsol.be/faitesundon

Trop petite la Belgique ? Dans son accord de gouvernement, la Belgique s’était engagée à considérer l’annulation des dettes que notre pays détient directement sur les pays du Sud. Il est urgent d’effacer les 9 millions de dollars de remboursement de dettes que lui doivent ces 73 pays en 2021 pour les aider à surmonter la pandémie. Ce serait un acte de solidarité fort. D’autant qu’il s’agit d’un faible montant comparé à la fraude fiscale qui fait perdre chaque année à la Belgique 3,2 milliards d’euros ! Signez notre pétition Oxfam et cinq autres ONG ont lancé une pétition pour demander à la Belgique d’annuler la dette des pays pauvres. Signez la pétition sur annulerladette.be.


4


5

SNAP Shot

50 ANS

D’INDIGNATION Il y a 50 ans, le premier des magasins équitables « Oxfam Wereldwinkels » ouvrait ses portes en Flandre. À l’origine de sa naissance, une indignation vis-à-vis des modèles dominants mettant le profit avant tout. « Nous étions farouchement idéalistes », se souvient Jan Rachels, le premier président des Wereldwinkels. « Nous étions convaincus que le commerce équitable pouvait rendre le monde plus juste. » Aujourd’hui comme à l’époque, Oxfam s’engage pour la paix et contre l’exploitation sous toutes ses formes. La récente union d’Oxfam Wereldwinkels et Oxfam-Solidarité au sein d’Oxfam Belgique nous permet de lutter encore plus efficacement contre les inégalités et pour une économie plus juste.


6

TRENDS & TRIGGERS

C’est

© I lv y

l’heure du pique-nique ! Scannez ce QR-code pour trouver un magasin près de chez vous

Pandémie ou pas, nous pouvons heureusement nous évader dans la nature et profiter du soleil. Avec l’été à nos portes, c’est le moment parfait pour organiser un pique-nique. Il vous manque un peu de matériel ? Qu’il s’agisse d’une nappe, de serviettes, de coussins, de couverts, de verres, d’assiettes ou d’un thermos, vous trouverez votre bonheur à prix doux dans nos magasins de seconde main.

Oxfam-Magasins du monde lance son e-shop ! Dorénavant, vos produits d’artisanat équitables préférés sont disponibles 24h/24 sur notre boutique en ligne. Nous vous y proposons une sélection des plus beaux produits de nos collections et ajoutons régulièrement des nouveautés en fonction des arrivages. En ligne ou en magasin, vos achats soutiennent nos partenaires commerciaux aux quatre coins du monde. Une seule adresse pour (vous) faire plaisir : shop.oxfammagasinsdumonde.be

Njiokiktjien

COMBATIF Agus R. Tatu est à la tête d’une association d’agriculteur.trice.s du Sulawesi central, en Indonésie. Ensemble, ils ont récupéré 150 des 180 hectares de terres accaparées par la compagnie internationale d’huile de palme Wira Mas Permei. « Oxfam nous a soutenus par son expertise dans le domaine des droits fonciers et humains, des méthodes agricoles ou encore de la comptabilité. Grâce à cela nous avons pu faire des autorités notre allié plutôt que notre ennemi. »

14 millions de personnes aidées Un peu plus d’un an après son début, la pandémie de COVID-19 a infecté plus de 100 millions de personnes. Grâce au soutien de nos donateurs, donatrices et partenaires, nous avons déjà pu venir en aide à plus de 14 millions d’entre elles à travers le monde tout au long de cette année difficile.

Merci !


7

Une nouvelle vague de COVID-19 a porté le nombre de décès à plus de 200.000 en Inde. Les hôpitaux souffrent d’une pénurie de médicaments et d’oxygène. Les personnes les plus pauvres sont particulièrement touchées car elles manquent d’eau, de nourriture et de matériel de protection pour se protéger du virus. Nous aidons la population sur place avec de la nourriture, des médicaments et de l’oxygène.

Faites un don sur BE37 0000 0000 2828 avec la communication “INDE” Ou sur oxfamsol.be/inde

« Nous n’avons pas le temps de culpabiliser les générations précédentes. Pointer du doigt n’est pas la solution. Pour sortir de la crise (climatique) que nous connaissons, nous devons collaborer. » Marinel Ubaldo, activiste philippine.

2 familles sur 5

au Yémen vivent à crédit Épuisées par six ans de guerre, ces familles dépendent de la bonne volonté des commerçants de leur faire crédit pour acheter des produits de base comme le pain et le riz. Les foyers qui réussissent à obtenir crédit sont ceux qui peuvent justifier d’un revenu mensuel, le plus souvent de l’aide humanitaire sous forme de transferts d’argent, comme ceux d’Oxfam. Les autres ont les plus grandes difficultés à se nourrir. Depuis 2015, Oxfam est venue en aide à 3 millions de Yéménites.

Découvrez comment vous soutenez notre action en scannant ce QR code.

FACT

FACTS & FIGURES

CHECK

SAUVEZ DES VIES EN INDE

Du chocolat sans travail des enfants, est-ce si difficile ? La promesse faite par l’industrie du chocolat d’éliminer le travail des enfants dans le secteur du cacao remonte à 2001. Le dernier rapport sur le sujet publié par l’institut de recherche américain indépendant NORC indique que ... pratiquement aucun progrès n’a été réalisé. Selon cette étude, environ 1,48 million d’enfants effectuent encore un travail lourd ou dangereux dans le secteur du cacao en Côte d’Ivoire et au Ghana. Ces deux pays représentent ensemble 40 % de la production mondiale de cacao. D’une part, les parents ont besoin de l’aide de ces jeunes enfants sur les plantations. D’autre part, l’école coûte trop cher aux familles. De plus, le travail des enfants est loin d’être le seul problème auquel est confronté le secteur du cacao. Les planteurs peinent surtout à nourrir leurs enfants et à accéder aux soins de santé. En d’autres termes, le travail des enfants n’est “que” le symptôme d’un problème sous-jacent, à savoir la pauvreté cyclique des producteurs de cacao. Ces producteurs gagnent toujours trop peu (le tiers d’un revenu décent) pour vivre. En raison de la faiblesse des prix du cacao, ils ne disposent pas d’un revenu viable garantissant leurs besoins quotidiens tels que l’accès au logement, l’éducation, la nourriture et les soins de santé.

Conclusion : Le travail des enfants existe toujours dans la filière cacao. Avec notre projet pilote “Bite to Fight for a fair income” en Côte d’Ivoire, nous payons aux producteurs de cacao un prix nettement plus élevé, ce qui leur permet de subvenir durablement aux besoins de leur communauté et de leur famille. Nous reversons cette prime supplémentaire directement à la coopérative CPR Canaan. Nous espérons que d’autres entreprises de chocolat suivront notre exemple !


Au Burkina Faso, la saison des pluies se raccourcit et les sécheresses s’éternisent.


9

OX-FILES

L’EAU SOUS PRESSION AU BURKINA FASO texte

Sotiris Gassialis -

photos

Samuel Turpin

Depuis 2015, les attaques djihadistes ont forcé un million de personnes à fuir leur foyer au Burkina Faso. Pour les personnes déplacées et les communautés qui les accueillent, s’approvisionner en eau est un défi quotidien, auquel Oxfam tente de répondre.

C

lémence a les traits tirés. La nuit a été courte. Elle s’est levée à une heure du matin pour venir à la fontaine dans l’espoir de pouvoir remplir ses deux jerricans d’eau. Tous les jours depuis six ans, elle attend assise au pied de l’une des bornes-fontaines de Kaya, la capitale de la région Centre-Nord, que l’eau veuille bien couler. Les racines de la crise « Le problème a commencé en 2015 », se souvient Clémence. « Au début, il y avait des coupures en fin de journée mais maintenant il arrive que le robinet soit à sec pendant des jours ». Impossible pour Clémence de s’acquitter de cette corvée plus tard dans la matinée car les files sont trop longues et elle enseigne dans une école de la ville dès huit heures. « Je suis obligée de veiller la nuit avant d’aller en classe », dit-elle, visiblement épuisée. Car sans eau, impossible de boire, cuisiner ou faire la lessive. Pression climatique et démographique Avec l’arrivée des personnes déplacées, la population de Kaya a triplé en six ans. « Les forages d’eau ont été prévus pour une population bien plus modeste », concède Binta Sawadogo, la maire adjointe de Kaya. « En plus, la crise climatique aggrave la situation. Il commence à pleuvoir en juin et les pluies s’arrêtent en septembre. La plupart de nos puits se tarissent avant la fin de l’année ». Pour compenser, Kaya s’approvisionne en eau potable dans le lac Dem, à quinze kilomètres de là. Mais le lac a déjà perdu 40% de ses capacités à cause de la surconsommation et de l’évaporation, conséquence du changement climatique. En trente ans, la température a augmenté de deux degrés au Burkina Faso. Les eaux de surface de la région se sont réduites à peau de chagrin. Sécuriser les ressources en eau est donc une question de survie pour les Burkinabè.


10

OX-FILES Soulager les populations L’eau est devenue la priorité absolue des organisations humanitaires. Noël Zigani, chef des opérations d’Oxfam à Kaya énumère les projets qu’il a supervisés depuis le début de la crise : « Nous avons commencé par convoyer de l’eau par camions aux habitants de la ville et aux 105.000 déplacés, pour subvenir à leurs besoins quotidiens ». Mais Noël s’est vite aperçu que le chemin vers une paix durable serait long et que les personnes déplacées n’étaient pas près de rentrer. « Il fallait combler un déficit de 2.500 mètres cubes d’eau par jour. Nous avons donc foré dans les villages avoisinants et raccordé les puits au système municipal de distribution d’eau ». Grâce à ces aménagements, la situation est viable mais demeure tendue. Dans le secteur dans lequel vit Clémence, l’eau coule toujours sporadiquement. Oxfam prévoit la construction d’une nouvelle station en ville, ainsi que deux nouveaux forages en périphérie pour répondre à la demande.

L’eau, source de tensions Kaya n’est pas la seule localité à court d’eau au Burkina Faso. À 45 kilomètres de là, se trouve Balbouma, un village Peul qui accueille depuis un an des personnes déplacées de la même communauté mais aussi des Mossis, l’ethnie majoritaire du pays. Autour de l’unique point d’eau, les activités sont organisées : le bétail est prioritaire car ici, la population vit de l’élevage. « Toutes les familles ont accueilli des déplacés. La plupart sont des éleveurs, dont certains ont pu sauver leur bétail en prenant la fuite », raconte Abdoulaye Pafarnam, président de l’association des villages de la région. Or les eaux de surface sont à sec et les bœufs sont obligés de s’abreuver au point d’eau qui sert aussi aux besoins domestiques et agricoles. Cette pression autour de l’eau crée parfois des tensions. Mais Abdoulaye Pafarnam se veut rassurant : « Nous n’avons fait aucune distinction entre les Peuls et les Mossis. Les chefs coutumiers et

Une hausse de la température de 2 degrés augmente le besoin en eau des plantes de 15%. Aguiratou Ouédraogo (droite) puise de l’eau pour arroser ses champs qu’Oxfam a rendus plus résilients au changement climatique.


11

OX-FILES les humanitaires ont fait un travail titanesque pour que les populations hôtes ne considèrent pas les déplacés comme la cause de leurs malheurs ». Un travail de prévention essentiel dans un pays où les tensions dégénèrent périodiquement en violences entre communautés. L’agriculture doit s’adapter Si le conflit perdure, les forages ne suffiront bientôt plus car les stocks souterrains d’eau sont limités. Oxfam a donc lancé un projet d’agriculture résiliente au changement climatique dans le nord du pays, comme à Soubo, où vit Aguiratou Ouédraogo, une agricultrice de 39 ans. Oxfam et l’ONG burkinabé A2E ont appris à Aguiratou à construire des cordons pierreux qui retiennent l’eau dans les champs quand il pleut et à fertiliser les sols appauvris par une pluviométrie de plus en plus faible avec du compost. « Ma production de choux, d’oignons et de pommes de terre a augmenté. Je passe moins de temps à aller chercher de l’eau, ce qui me permet de vendre une partie de ma production sur les marchés. Les bénéfices sont tels que je parviens à nourrir ma famille toute l’année », témoigne cette mère de sept enfants. Mais la résilience d’Aguiratou ne doit pas nous faire oublier qu’au Sahel, les températures augmentent 1,5 fois plus vite que dans le reste du monde. D’après les climatologues, si le réchauffement climatique n’est pas freiné, les rendements agricoles diminueront de 20 % tous les dix ans au Burkina Faso.

Soutenez des femmes comme Aguiratou et Clémence Faites un don sur

oxfamsol.be/fr/don

20 millions DE PERSONNES vivent au Burkina Faso

40%

des BURKINABÈ vivent sous le seuil de pauvreté

5%

de baisse du PIB national en raison de la COVID

50%

de L’HUMANITÉ vit dans des zones où l’eau est rare

Magali de Biolley Chargée de programmes humanitaires, Oxfam Belgique

« J’ai rarement vu une telle solidarité » « Le Burkina Faso a longtemps été un îlot de paix et de stabilité au Sahel. La frustration des gens, surtout des jeunes, face au manque d’emplois et aux inégalités ont fait du Burkina un terreau fertile pour le recrutement de djihadistes qui ont à leur tour attisé les conflits entre communautés. Malgré cela, les chefs de terre et les populations autochtones ont offert l’hospitalité à des centaines de milliers de déplacés fuyant les violences. Notre rôle, et celui des associations locales que nous soutenons, a été de les aider à gérer les conflits autour des terres mais aussi d’apporter eau, nourriture, soins de santé et de garantir des conditions d’hygiène acceptables. »


Les femmes leaders de Malik visitent leur forêt sacrée.


13

PROJECT

Des Cambodgiennes luttent pour leur forêt sacrée Dans les forêts de la province du Ratanakiri au Cambodge, des communautés indigènes vivent ensemble sur des terres collectives. Depuis que des entreprises étrangères se sont emparées de leurs territoires, les femmes de ces villages reculés se battent pour récupérer leurs terres, leur forêt et leurs sites sacrés. Avec nos partenaires, nous soutenons le combat de ces femmes.

texte

L

a nouvelle a mis le village de Padol en émoi. Des inconnus étaient en train de couper des arbres dans la forêt protégée de l’autre côté de la rivière Sesan. Le village se devait de les arrêter. Les anciens du village ont immédiatement organisé une réunion. Les femmes ont présenté les propositions les plus raisonnables et ont donc été désignées pour représenter la communauté. Ces femmes déterminées ont traversé le Sesan, un cours d’eau à fort courant, en bateau. « Je n’avais pas peur », explique Romas Phlul. « Je voulais juste les arrêter. Si nous n’avions pas eu de bateau, j’aurais traversé à la nage. » À leur arrivée, les femmes ont demandé aux trois travailleurs s’ils avaient les documents appropriés. Ce n’était pas le cas, alors les femmes ont confisqué leur matériel et les ont invités au village afin de discuter de la question. Le lendemain, un représentant de la société s’est rendu au village dans le but de négocier avec les femmes. Mais elles n’ont pas cédé et la

Leen Speetjens -

photo

Savann Oeurm / Oxfam

société n’est plus jamais revenue sur leurs terres. Accaparement de terres AU Ratanakiri Les communautés indigènes de la province peu peuplée du Ratanakiri, au nord du Cambodge, sont sous pression. Elles essaient de préserver leurs terres communales dans les forêts, mais le gouvernement cambodgien attribue de vastes zones à des entreprises agricoles et minières. Cela se fait sans aucune consultation des communautés locales. Cet accaparement pur et simple des terres constitue une grave violation de leurs droits. Pour les femmes indigènes, la forêt est sacrée. « Nous dépendons des ressources naturelles de la forêt depuis des siècles »,

Chanthy Dam: « La forêt est notre marché. »

déclare Chanthy Dam. Cette femme indigène Toumpoun est directrice de l’association Highlander, partenaire d’Oxfam, qui représente les intérêts des communautés. « La forêt est notre marché. Nous y cherchons des légumes, du bois ... en réalité de tout. » Le leadership des femmes Avec l’association Highlander, nous aidons les communautés indigènes à revendiquer leurs droits fonciers, à protéger leurs ressources forestières et fluviales et à préserver leur culture. Dans les communautés indigènes du Ratanakiri, ce sont généralement les hommes qui dirigent. Mais l’association Highlander les aide à remettre en question les schémas traditionnels de répartition des rôles entre hommes et femmes. L’organisation apprend aux hommes et aux femmes à travailler ensemble et les encourage à reconnaître le leadership féminin. Les femmes suivent des formations afin de s’affirmer en tant que leader.


14

PROJECT

Sol Preng: « Je suis allée de maison en maison pour recruter des femmes. »

Des bulldozers sur la plantation d’anacardiers Sol Preng, du village de Malik, se souvient parfaitement du jour où les bulldozers ont fait irruption sur la plantation familiale. La société vietnamienne de plantation d’arbres à caoutchouc Hoang Anh Gua Lai (HAGL) avait obtenu une concession de terres de la part du gouvernement cambodgien et a commencé à défricher les terres en 2012 sans consulter la communauté. « La société a déraciné nos anacardiers juste avant la récolte », dit-elle. « J’ai perdu quatre hectares de terre, tous mes arbres et même ma maison. Mais le pire, c’est que nous avons perdu notre forêt. Nous y allions pour chercher des champignons et des légumes. » Khwas Blov a elle aussi perdu. ce jour-là ses anacardiers et ses bananiers, ses poulets et sa maison. « J’ai quand même essayé de les arrêter pour pouvoir sauver ma récolte. Mais je n’ai pas réussi. » Les femmes travaillent ensemble Une fois la poussière retombée, Sol, Khwas et les autres femmes ont fait front. « J’étais tellement en colère, mais je ne savais pas quoi faire », se souvient Sol. « Je voulais une compensation pour la perte de mes anacardiers. »

« Nous avons commencé à chercher des ONG qui pourraient nous donner des conseils et nous avons atterri à l’association Highlander. Je suis allée de maison en maison pour recruter des femmes. Ainsi, nous pouvions coopérer pour récupérer nos terres. » Une plainte formelle Avec l’aide des ONG, les femmes de Malik ont enquêté sur l’entreprise qui a détruit leurs plantations. Elles ont appris qu’une agence de la Banque mondiale avait investi 16,4 millions de dollars dans une entreprise vietnamienne liée à la plantation de caoutchouc. Cela a ouvert une perspective : Malik et 16 autres communautés affectées par la concession foncière ont déposé une plainte officielle de 36 pages auprès de la Banque mondiale en 2014. Elle détaillait la perte de terres, de sources d’eau, de zones agricoles, de forêts sacrées et de lieux de sépulture. Après des années de négociations, l’entreprise a été contrainte d’arrêter le défrichage et a dû payer une compensation. Fin mars 2019, le gouvernement provincial du Ratanakiri a annoncé que la société devait encore restituer 742 hectares de terres.

Accaparement de terres AU Ratanakiri

10

communautés indigènes tentent de préserver leurs terres

20%

des terres ont été attribuées à des entreprises agricoles et minières

5000

HECTARES DE TERRES PERDUS


15

Une visite à…

YUNUS

Notre nouveau centre de tri pour la seconde main YUNUS •

YUNUS •

YUNUS •

30/04 #VÊTEMENTS #DONATIONS

30/04 #TRIAGE #SECONDEMAIN

30/04 #CONTRÔLE #QUALITÉ

Chaque jour nous recevons des sacs remplis de vêtements. Ceux de bonne qualité sont destinés à nos magasins de seconde main. Leur vente permet de financer nos projets dans le monde entier.

En plus des vêtements, nous recevons aussi des jouets, des ordinateurs, de la brocante, des CD… Tout est minutieusement trié avant d’être envoyé dans les magasins.

Omr, Mostafa, Rachid et David ont le coup d’œil : ils savent très vite déterminer si un vêtement est de qualité suffisante pour nos magasins.

YUNUS •

YUNUS •

YUNUS •

30/04 #TRIAGE #PRIXJUSTE

30/04 #CODECOULEUR #EXPORT

30/04 #EFFICACE #CENTRALISATION

Fatemeh trie les vêtements selon plusieurs critères : pour homme ou femme, enfant ou adulte mais aussi en fonction de la saison et de leur valeur.

Mourad et Alaa Edin empilent les vêtements en suivant un code couleur. Le blanc signifie que les vêtements partent à l’exportation.

Mansour et Gökhan supervisent tout le processus. Grâce à la centralisation du tri, nous pouvons travailler de manière plus rapide et plus efficace.


OH - magazine trimestriel d’Oxfam-Solidarité juin - juillet - aout 2021 P501325 - Bureau de dépot Gand X

4 idées

POUR UN APÉRO ÉQUITABLE La saison des apéros ensoleillés est enfin ouverte ! Sur un balcon, dans un parc ou sur une terrasse, voici 4 idées pour concilier plaisir et commerce équitable avec les délicieux produits Fairtrade d’Oxfam. Ils sont disponibles sur shop.oxfammagasinsdumonde.be ou dans les magasins Oxfam et certains autres commerces.

1

2

Des chips de yuca pour craquer de plaisir

Connaissez-vous le yuca ? Également appelée manioc, cette plante développe des racines tubéreuses largement consommées dans de nombreuses régions du monde, de l’Amérique du Sud à l’Afrique. Oxfam en a fait de délicieuses chips disponibles en version sel, paprika ou taco.

Une crème de noix de cajou pour vos toasts

Mixez 100 g de noix de cajou Oxfam préalablement trempées dans l’eau avec 2 cc de jus de citron, 2 cc d’eau, 1 pincée de raifort moulu, un peu de poivre et de sel, jusqu’à obtenir une texture crémeuse. Couronnez les toasts avec un peu de ciboulette ou d’aneth.

Bulles ou pas bulles ?

3

Avec les boissons Oxfam, vous n’avez que l’embarras du choix. Alors, plutôt un petit mousseux bio Torrontés ? Une Juste bien fraîche, la bière à base d’orge belge et de quinoa bolivien ? Vous préférez sans alcool ? Tentez le Worldshake, une combinaison originale de pommes, pamplemousses, oranges, bananes… et betteraves rouges !

4

Dans quoi mettre tout ça ? Les magasins de seconde main Oxfam proposent de nombreux objets de brocante. L’endroit idéal pour dénicher votre matériel de piquenique ou d’apéro : un joli panier en osier, une nappe à carreaux, quelques verres assortis ou même une jolie tenue estivale.


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.