Cours adapté à partir de celui de Claude DEVICHI, Laboratoire de Psychologie, Université Paul Valéry, Montpellier.
Épistémologie génétique Introduction à la psychologie du développement L’apprentissage dans l’interaction sujet – objet Piaget 1896-1980
Le modèle piagétien Comment se développe la pensée chez l’homme? Comment se construisent, se structurent les connaissances?
Etude scientifique des conditions de la connaissance et des lois de son accroissement Appréhension de la genèse de la connaissance dans l’interaction du sujet épistémique avec l’objet.
La psychologie du développement La psychologie étudie les conduites, décrit et explique les états et les processus mentaux des individus. z z
Pour comprendre les comportements des enfants à un âge donné, il faut comprendre la logique de l’ensemble du développement
Piaget = interactionniste L’intelligence est la résultante de deux processus interne et externe, transitoirement équilibrée
Méthodologie: l’entretien clinique Interrogation guidée (questions précises) Observation et analyse du contenu verbal Adaptation des expressions et de la logique de la situation aux attitudes et au vocabulaire de l’enfant Mise en question systématique des affirmations de l’enfant. z
z
mettre en évidence les raisonnement utilisés par l’enfant lorsqu’il est confronté à des situations de complexité croissante Dégager les structures des raisonnements
Différentes méthodes Différentes populations
La psychologie cognitive étudie l’ensemble des activités qui se rapportent à la connaissance (= cognition). La psychologie du développement étudie l’organisation psychologique de l’individu au cours du temps
L’enfant comme objet d’étude L’enfance: concept récent, contemporain du développement d’institutions historiquement déterminées : la famille et l’école z
c’est seulement à partir du XVIIème siècle qu’il y a une valorisation de l’enfance et une réflexion explicite (Rousseau)
avec la diffusion des théories évolutionnistes: « l’étude de l’enfant va apparaître comme une voie royale pour connaître et expliquer la genèse de l’organisation psychologique, pour comprendre comment s’est constitué progressivement le psychisme humain au cours de l’histoire des espèces et au long de l’humanité » (Bréal)
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Constructivisme
Application à l’apprentissage et à l’enseignement
l’objectivité n’est pas donnée d’emblée.
c’est l’activité de l’élève (traiter l’information, la transformer mentalement). Rôle des connaissances antérieures. Toute activité s’appuie sur le fonctionnement des schèmes, donc des savoirs et savoir-faire antérieurs. l’erreur n’est plus considérée comme une déficience de l’élève, ni comme un phénomène aléatoire. c’est en terme d’obstacle qu’il faut penser l’apprentissage et le développement. Le conflit cognitif est la source du développement. l’apprentissage doit être conçu comme une activité de résolution de problème.
La perception n’est pas la réelle source de la connaissance, car l’objet réel est différent de l’objet perçu. La connaissance n’est pas une copie du réel, c’est une construction
z z
la source de la connaissance, c’est la coordination des actions de l’enfant sur le réel Le constructivisme prône l’interaction entre les facteurs internes (innés) et les facteurs externes (acquis) L’enfant n’est pas un découvreur, il est un inventeur
L’épistémologie de Piaget Ancrage épistémologique z
recherche dans l’enfant un modèle explicatif de l’organisation psychologique adulte
Les concepts centraux L’intelligence, c’est l’adaptation à une situation nouvelle… z
Ancrage biologique z
Le développement se fait par adaptations successives du sujet à son milieu, par régulations internes
Ancrage logico-mathématique z
l’intelligence est structurée de façon logique, mathématique comme le monde auquel elle permet de s’adapter
z
Tout au long de sa vie l’individu est confronté à la résolution de problèmes variés et la solution produite est considérée comme un moyen d’adaptation à son environnement. L’intelligence est la forme la plus aboutie des moyens d’adaptation biologique
Le développement est normé z
Il comporte un point d’achèvement: la pensée formelle
Le développement est structuré z
4 niveaux de structuration
limites Observation de ses enfants (Jacqueline, Lucienne et Laurent), de ceux de ses collègues… Influence du milieu socio-culturel ? Les conditions de la transférabilité ?
L’intelligence comme adaptation
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La notion de schème « ce qui, dans une action, est transposable, généralisable ou différenciable d’une situation à la suivante, autrement dit, ce qu’il y a de commun aux diverses répétitions ou applications de la même action » (Biologie et connaissance, 1973, p. 23) Le schème désigne la structure générale de l’action (pas l’action elle-même) Le schème se conserve au cours des répétitions, se consolide par l’exercice et tend à se généraliser au contact du milieu (différenciations, coordinations)
Evolution des schèmes pendant les deux premières années de la vie, les schèmes sont des schèmes d'action (tirer, pousser, frapper…) z
Schèmes d’actions: « systèmes de mouvements et de perceptions coordonnés entre eux, qui constituent toute conduite élémentaire susceptible de se répéter et de s’appliquer à de nouvelles situations : par exemple saisir un objet, le déplacer, le secouer, etc. » (F.S. 1946 p. 288).
Ensuite ces schèmes d'action vont progressivement s'intérioriser (pensée représentative), pour donner les schèmes opératoires (schèmes additifs, multiplicatif..)
Assimilation Action du sujet sur les choses. Assimiler, c’est rendre familier ce qui ne l’est pas. Processus par lequel un objet du milieu est appréhendé par la structure actuelle du sujet. Mécanisme par lequel le sujet applique ses schèmes déjà existants sur le réel pour incorporer, s’approprier les éléments du milieu. Modification du milieu par le schème
Exemple de schème le schème de préhension (différent du réflexe) désigne la structure commune à toute activité consistant à saisir, quelles que soient par ailleurs les particularités propres à l’objet saisi (sa position dans l’espace, sa forme, sa dimension, etc.). z
Ex : tendre le bras puis ouvrir la main puis refermer la main… c’est une organisation séquentielle d’actions qui peut être appliquée de manière répétitive…
Le réflexe = action automatique liée de manière innée à une fonction initiale, mais qui se répète de façon indifférenciée quelles que soient les circonstances. z
Exemple de la succion : ce réflexe devient un schème à partir du moment où il remplit une fonction différenciée de la fonction initiale (se nourrir) : la succion devient alors un moyen d’appréhender les objets.
Assimilation / Accomodation L’adaptation n’est pas un ajustement à quelque chose qui serait indépendant du sujet. L’adaptation est un équilibre dynamique mettant en jeu 2 mécanismes distincts et complémentaires : l’assimilation et l’accommodation
Accommodation Activité par laquelle la structure actuelle du sujet se modifie en retour pour s’ajuster à une modification de l’environnement. Accommoder c’est différencier un schème pour l’adapter à un objet particulier Processus de modification d’un schème préexistant inadapté (échec de l’assimilation) en fonction des caractéristiques du nouvel objet ou de la nouvelle situation à s’approprier. Modification du schème par le milieu.
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Assimilation et accommodation: mécanismes complémentaires et indissociables Exemple: assimilation d’un nouvel objet avec schèmes préexistants z z
l'objet n‘est pas tout à fait identique aux objets déjà rencontrés accommodation L'application du schème à l'objet le transforme plus ou moins en retour. Possibilité de caractériser les conduites en fonction des pondérations entre assimilation et accommodation à chaque étape du développement.
Toute conduite a un pôle assimilateur et un pôle accommodateur Les conduites intelligentes (à visée adaptative) se caractérisent par un équilibre global entre assimilation et accommodation.
Exemple d’accommodation Un enfant qui manipule un tuyau dans son bain Il traite le tuyau initialement comme un récipient: il cherche à le remplir (plonge dans le bain, ou transvase) z
Echec
Il essaye de boucher le trou z
Echec
Il finit par s’intéresser à l’écoulement en tant que tel z
Accommodation à l’objet
Il cherche à reproduire les effets produits involontairement : jets d’eau en soufflant dans le tuyau… z
L’objet n’est plus confondu avec les récipients, mais comme un dispositif servant à faire passer…
Adaptation
Processus de la connaissance
assimilation des objets par les schèmes. adaptation du sujet au milieu z
organisation des conduites z z
z
plan fonctionnel, externe, relations sujet- milieu plan structural, interne, relations schème- schème Les schèmes une fois constitués ne vont pas rester indépendants les uns des autres.
« c’est en s’adaptant aux choses que la pensée s’organise et c’est en s’organisant elle-même qu’elle structure les choses »
le sujet va appliquer un schème de préhension à un objet quelconque (ex : une bille) : l’objet ainsi saisi est assimilé par le schème.
accommodation des schèmes aux objets. z
z
si l’objet saisi présente des particularités telles que le schème mis en jeu ne peut pas lui être directement appliqué (ex : un ballon de basket), le schème va devoir se modifier, s’accommoder à l’objet. L’accommodation conduit le schème à se différencier au contact du milieu.
Organisation assimilation réciproque = assimilation d’un schème par un autre. z
Chaque schème devient capable d'intégrer, d'assimiler le domaine d'application de l'autre. z
z
Exemple: l’assimilation d’un schème sonore par un schème visuel consiste à tourner les yeux dans la direction du son entendu. Ce qui était seulement entendu va maintenant être regardé
Mise en correspondance de différents espaces sensoriels
Organisation accommodation réciproque = accommodation d’un schème à un autre. z
Lorsque deux activités distinctes, deux schèmes doivent se coordonner, s’accommoder l’un à l’autre pour pouvoir s’appliquer simultanément à un seul et même objet z
Exemple : vision et préhension. L’enfant va pouvoir attraper ce qu'il voit et regarder ce qu'il attrape. Les schèmes vont ainsi devoir se modifier l'un l'autre.
coordination des 2 schèmes
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L’équilibration
Un jeu d’interactions Organisation (interne)
Accommodation
Assimilation
Adaptation
L’équilibration désigne le jeu d’interactions continuelles assimilation/accommodation dans les processus d’adaptation et d’organisation L’équilibration explique le passage d’un mode d’organisation à un autre (plus évolué) au cours du développement
processus dynamique qui sous-tend le passage d’un état d’équilibre à un autre qui lui est supérieur
(externe)
Exemple Enfant de 5/6 mois qui tente de mettre en mouvement des objets éloignés en se contentant de remuer bras et jambes
Inadéquation du schème utilisé
Définition de l’équilibration L’équilibration désigne l’ensemble des réglages effectués pour rétablir l’équilibre lorsque celui-ci a été détruit z z
Pour que la conduite devienne efficace, le sujet devra z
introduire des intermédiaires entre lui et l’objectif (utiliser un autre objet à titre de moyen)
pour rétablir l’équilibre entre les schèmes et le milieu Ces réglages peuvent intervenir de façon z
ou
z z
établir un contact entre les mouvements du corps et les objets.
par des perturbations par des modifications provenant du milieu
Rétroactive: lorsque la modification a déjà eu lieu Anticipatrice: pour prévenir une modification prévue ou anticipée par le sujet
Régulations compensatrices, source de rééquilibration
L’équilibration majorante Les compensations vont consister à intégrer à la structure même des conduites du sujet les accommodations nouvelles suscitées par les exigences du milieu extérieur nouvelles conduites passage d’un niveau d’adaptation moindre à un niveau d’adaptation supérieur
« …dans le développement intellectuel, il intervient un facteur fondamental. C’est qu’une découverte, une notion nouvelle, une affirmation, etc. doivent s’équilibrer avec les autres. Il faut tout un jeu de régulations et de compensations pour aboutir à une cohérence. Je prends le mot « équilibre », non pas dans un sens statique, mais dans le sens d’une équilibration progressive, l’équilibration étant la compensation par réaction du sujet aux perturbations extérieures… » (Problème de psychologie génétique, 1972)
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Facteurs endogènes Les normes du développement
Le développement se réalise sans que le milieu intervienne z
Ex: le schème de la permanence de l’objet n’est pas fonction du milieu
Le milieu ou l’apprentissage peut accélérer ou ralentir le développement mais ne participe pas à son organisation. Les processus sont universels et indépendants de la culture. Nous héritons de structures communes à tous les hommes, mais qui ne sont pas déterminées !
L’enfant épistémique ni l’enfant individuel, ni l’enfant moyen mais l’enfant « connaissant ou théorique », conçu comme l’ensemble des mécanismes communs à tous les enfants d’un même niveau
Les structures du dévelopement
(Piaget, le Structuralisme, 1968, p.58)
Les caractéristiques individuelles sont mises à l’écart. Le développement contraint, prime sur l’apprentissage, le rythme et non l’inverse
Terminologie on utilise indifféremment le terme de « période » ou de « stade » pour qualifier ces quatre principales étapes du développement de l’intelligence z z z z
sensori motrice Préopératoire Opératoire formelle.
Remarque: dans un papier de 1956, intitulé « Les stades du développement intellectuel de l’enfant et de l’adolescent », Piaget propose de parler de « périodes » pour désigner les grandes unités, et de stades puis de « sous-stades » pour décrire leurs subdivisions. Cela dit, on trouve dans la littérature aussi bien le terme de stade que celui de période
Les grandes périodes 4 niveaux de structuration se succèdent dans la construction de l’intelligence un niveau sensori-moteur z z
0-18 mois/2ans le groupe pratique des déplacements
un niveau pré-opératoire et opératoire concret z z
18mois/2 ans- 11/12 ans le groupement des opérations concrètes
un niveau opératoire formel z z
11/12 à 14/16 ans le groupe des opérations formelles
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La définition des stades
Aspect dynamique
L’ordre de succession (pas la chronologie) des acquisitions dans le temps du développement est constant. Hiérarchie
Le stade n’est pas un état, c’est une dynamique On peut être à tel stade pour une notion et à un autre pour une autre notion
z
Les acquisitions d’un stade sont caractérisées par une structure d’ensemble. Une structure étant atteinte, on peut déterminer toutes les opérations qu’elle recouvre.
Il faut contraindre l’élève à accommoder, puis progressivement il va assimiler. Dans les processus d’enseignement nous sommes dans une dynamique, il faut placer l’élève dans un déséquilibre.
Les structures caractéristiques d’un stade donné deviennent partie intégrante de celles caractéristiques du stade suivant. caractère intégratif Un stade comporte un niveau de préparation et un niveau d’achèvement. Dans chaque stade, il faut distinguer les processus de formation et les formes finales d’équilibre
Synthèse: l’intelligence pour Piaget Aspect fonctionnel
Synthèse
z z
Assimiler c'est intégrer les données extérieures à soi, c'est s'approprier le réel : "comprendre". Accommoder c'est transformer ses propres outils de connaissance, ses schèmes pour les adapter au réel : "inventer".
Aspect structural
En quoi consiste l’intelligence pour Piaget?
z z
organisation des instruments de connaissance dont dispose le sujet à un moment donné de son développement (les schèmes). construction par l'enfant de ses outils de connaissance par stades z z z
Hiérarchie (l'ordre des acquisitions doit être constant) Intégration (chaque niveau est intégré dans le niveau suivant) Structuration (les conduites, les schèmes propres à un stade sont organisés en structure d'ensemble).
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