Portrait de Xavier Aknine - médecin accroc à l'humain

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Addict à l'humain "Altruiste de naissance", Xavier Aknine a choisi d'être médecin généraliste pour recevoir et soigner les gens, tous les gens, même ceux que la société aimerait ne pas voir. Révolté par les inégalités, il accompagne ceux qui en ont le plus besoin, notamment les toxicomanes, avec un objectif simple : les aider à s'en sortir. Spécialiste des addictions, il reste avant tout un médecin généraliste et un médecin de quartier avec toute la diversité et la richesse que recouvre cette profession qui continue de le passionner. Coincé entre la pharmacie, la cordonnerie et le bureau de tabac, une porte vitrée laisse entrevoir une salle d'attente. C'est là, dans ce cabinet médical situé à proximité de la gare du Chenay Gagny que le docteur Xavier Aknine exerce depuis plus de dix ans. Dans ce quartier populaire, tout le monde connaît le médecin que l'on salue amicalement et qui n'hésite pas à prendre une pause rapide au snack du coin, entre deux consultations, pour déguster un poulet frites savoureux en buvant – avec modération – un ballon de rouge. Diversité ethnique et culturelle, mélange des générations et des classes sociales : ce quartier, comme ceux où il a vécu et où il a exercé auparavant, est vivant, riche sur le plan humain, malgré les problèmes auxquels Xavier Aknine, qui n'hésite pas à se qualifier luimême de médecin de quartier, est particulièrement sensibilisé. De la banlieue rouge aux amphis de la Pitié Années 60. Vitry-sur-Seine, en banlieue parisienne. Xavier Aknine naît dans une famille ouvrière. Son père, de confession juive, est rectifieur en pièces d'avion ; il travaille chez Dassault puis à la SNECMA. A l'époque, changer d'entreprise n'est pas un problème. Sa mère, catholique, est secrétaire de direction au marché de Rungis. Avec ses deux frères, Xavier Aknine grandit dans une résidence du centre-ville de Vitry. Pendant son temps libre, il est très impliqué dans le tissu associatif local. Sportif, il joue au foot puis devient responsable et entraîneur de son club, affilié à la FSGT (Fédération sportive et gymnique du travail), association sportive d'éducation populaire liée au Parti communiste. Bon élève, son tempérament altruiste le conduit à embrasser une carrière de médecin. Il part donc étudier à l'université de la Pitié-Salpêtrière. L'humain avant tout Afin de rester proche des gens et d'agir pour tous et en particulier pour ceux qui sont le plus en difficulté, Xavier Aknine fait le choix de ne pas se spécialiser mais de rester médecin généraliste. Attaché à la dimension humaine de son métier, il se défend de remplacer les psys tout en étant conscient de son rôle essentiel d'écoute et de conseil. Le rôle d'accompagnement que joue le médecin généraliste est primordial pour lui. En effet, le médecin de famille, comme on a coutume de l'appeler, suit l'individu sur des générations, connaît son environnement, son mode de vie, parfois ses difficultés personnelles, ses antécédents - pathologiques ou non - et ceux de sa famille. Au-delà de l'aspect purement médical, de ses connaissances scientifiques et techniques, Xavier Aknine estime faire un métier avant tout humain. Spécialiste des addictions Les drogues, les addictions, Xavier Aknine n'y était pas particulièrement sensible ni sensibilisé pendant ses études de médecine. C'est en commençant à exercer qu'il est confronté aux maladies et aux difficultés psychiques et sociales causées par les addictions, en particuliers chez les toxicomanes.


Au début des années 90, une fois son diplôme en poche, le jeune médecin ne souhaite pas s'installer tout de suite en libéral. Il choisit donc de travailler en centre de santé, d'abord à Champigny-surmarne puis, dès 1993, à Tremblay-en-France. Dans son cabinet de banlieue, il observe la détresse et les maladies qui déciment les toxicomanes (en particulier le Sida et les hépatites) et se désole du manque de traitements de substitution disponibles en France. Il se bat notamment pour l'introduction, en France, du Subutex destiné aux héroïnomanes en cours de sevrage. Il se spécialise alors dans la prise en charge des patients souffrant d'addictions. Depuis lors, il travaille à temps partiel au centre de soins Emergence Paris Tolbiac où il reçoit en consultation des patients souffrant d'addictions. Il suit aussi de près, à titre individuel et au sein d'un collectif échangeant des expériences et des bonnes pratiques, toutes les avancées scientifiques permettant de mieux prendre en charge les toxicomanes, les alcooliques et toutes les personnes dépendantes. Il n'a toutefois pas souhaité se concentrer uniquement sur les toxicomanies et les addictions car il reste très attaché à la médecine générale qui lui permet d'être en contact avec la population dans son ensemble. Médecin et homme engagé Issu d'un milieu populaire et ayant grandi dans une "banlieue rouge", Xavier Aknine a en quelque sorte l'engagement politique dans le sang. A 18 ans, il adhère au parti communiste et, bien que n'étant plus "encarté", il ne reniera jamais ses convictions. Le jeune étudiant en médecine s'intéresse rapidement à l'action de l'UNEF (Union Nationale des Etudiants de France) à laquelle il adhère et dont il est élu président en 1987. Devenu médecin, il n'abandonne pas son engagement politique, devenant, dès 1993, conseiller municipal en charge de la santé et des sports à la mairie de Vitry-surSeine. Lorsqu'il commence à exercer à Tremblay-en-France, il se rapproche de François Asensi, député-maire de la ville. Sans être membre de l'équipe municipale, il devient le conseiller du députémaire sur les questions ayant trait à la santé et à la prévention. C'est dans une optique de prévention que Tremblay-en-France sera l'une des premières communes de France à installer des distributeurs de kits de seringues stériles destinés aux toxicomanes. Et c'est pour lutter contre les inégalités d'accès aux traitements contre le Sida que le député François Asensi prendra position à l'Assemblée nationale pour encourager l'introduction des trithérapies dans les pays du Tiers monde, et en particulier en Afrique. Avec le député-maire, il se rendra même à Loropeni, commune du Burkina Faso jumelée avec Tremblay-en-France, pour y lancer un plan santé qui permettra la création d'une coopérative pharmaceutique et le développement d'actions en faveur de la prévention du Sida et de la prise en charge des malades. Après quelques années d'abstinence, Xavier Aknine a été de nouveau touché par le virus de la politique puisqu'il a rejoint le groupe d'appui à Mélenchon de Gagny lors des élections présidentielles de 2017, troquant la sacoche de médecin pour les tracts qu'il a distribués devant la gare. "Ca a un peu surpris certains patients qui m'ont croisé mais ils ont compris que j'étais dans mon rôle de médecin citoyen et au fond d'eux-mêmes, je crois que ça leur a plu que je sois engagé pour une cause plus large que la médecine", observe-t-il. La confiance, clé de la réussite Conscient d'avoir souvent été perçu comme "le médecin qui attirait la racaille", Xavier Aknine poursuit, dans sa vie comme dans son métier, un seul et même combat : lutter contre les inégalités et les injustices et aider ceux qui sont le plus en détresse. Tout en tâchant de maintenir avec ses patients une distance, indispensable selon lui pour conserver sa position de praticien, Xavier Aknine sait qu'en


entretenant un climat de confiance avec ses patients, ceux-ci sont plus enclins à lui confier non seulement leurs pathologies mais aussi leurs autres souffrances, celles que les médicaments ne peuvent pas toujours soigner. Pour lui, la médecine est la rencontre entre deux personnes : l'une qui a un savoir scientifique et l'autre qui a un savoir sur son corps et les spécificités du fonctionnement de celui-ci puisqu'il le connaît et l'expérimente au quotidien. Loin de sermonner ses patients ou de les culpabiliser, Xavier Aknine tente de leur faire prendre conscience de l'importance de leurs comportements et de leurs modes de vie. Et c'est souvent naturellement que les patients se confient à lui et osent enfin aborder le sujet du tabac, de l'alcool ou d'une autre difficulté qu'ils savent être la cause principale de leurs maux. Pour Xavier Aknine, la prise en charge du patient, notamment lorsqu'il souffre d'addictions, doit nécessairement être globale et se faire sur le temps long. Et qui mieux que le médecin généraliste, référent médical au quotidien, peut assurer cette prise en charge globale et sur le long terme ?


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