GLEISDREIECK Transition du site vers un nouveau modèle d’espace vert à Berlin
GLEISDREIECK Transition du site vers un nouveau modèle d’espace vert à Berlin
GLEISDREIECK
Transition du site vers un nouveau modèle d’espace vert à Berlin
Mémoire de fin d’études Pauline Théobald, sous la direction de Benoit Moritz
Faculté d’Architecture La Cambre-Horta Septembre 2015
Résumé Ancienne zone ferroviaire abandonnée, Gleisdreieick se trouve en friche au cœur de Berlin après la réunification. Dans la nécessité de redynamiser cette zone de la ville, le site a été reconverti en espace vert et connecteur urbain, le Park am Gleisdreieick. Ce mémoire s’attache à analyser la démarche mise en œuvre pour sa reconversion et notamment son processus de participation citoyenne. Il étudie sa pertinence et ses limites pour répondre aux objectifs attendus et à son acceptation par les citoyens.
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Avant-Propos Lors de ma première visite de Berlin en juillet 2013, je n’ai pas été immédiatement sous le charme de la ville. A cette occasion, j’ai visité des lieux emblématiques comme Alexanderplatz, Museuminsel, Unter den Linden, Brandenburger Tor, etc. J’étais face à un paysage « décousu » avec de nombreux bâtiments à l’architecture stricte et froide héritée du bloc de l’Est, entremêlés de réalisations contemporaines. Cependant, la nature aérée de la ville avec ses larges avenues et ses nombreuses zones vertes, y faisaient régner une atmosphère de quiétude. Aucun coup de klaxon, pas d’embouteillages, d’ailleurs très peu de voitures mais beaucoup de vélos… Je me suis demandée, « Où sont donc les Berlinois ? Sont-ils tous partis en vacances ? ». Après y avoir vécu mon année d’étudiante Erasmus, je peux témoigner que cette atmosphère paisible demeure tout au long de l’année. Mais ce qui marque le plus le nouvel arrivant à Berlin, c’est l’empreinte dans les mentalités, du vent de liberté qui a soufflé suite à la réunification, balayant tabous et préjugés.
Ma découverte de Gleisdreieck… [A 17h00, en cette fin d’après-midi de printemps, il est temps pour moi de quitter la faculté d’Architecture et d’enfourcher mon vélo pour me rendre aux abords du Zoologischer Garten à mon cours d’Allemand… 20h, je quitte le bâtiment de la TU et hésite à traverser le Tiergarten pour rentrer. Aujourd’hui, j’aimerais emprunter une nouvelle route. Je pédale ainsi le long de la Kurfürstenstraβe ne sachant pas très bien ce que je vais découvrir. L’ambiance est d’abord très commerçante. Au fur et à mesure que je progresse, le quartier devient plus résidentiel. Puis la route s’arrête et bifurque vers la gauche. Cela m’ennuie car j’aimerais pouvoir continuer tout droit en direction du Sud-Est pour rejoindre la Yorckstraβe. Un petit chemin s’ouvre devant moi, il semblerait que ce soit l’entrée d’un parc. Des cyclistes me dépassent et continuent dans cette direction. Je décide donc de les suivre…]
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C’est ainsi que je découvre pour la première fois le parc de Gleisdreieck. Je suis d’ailleurs étonnée de ne pas l’avoir parcouru plus tôt. Aujourd’hui ce lieu propice pour se relaxer, faire du vélo ou du beachvolley, est très apprécié par la population. Découvrant à Berlin, toute la multiplicité des reconversions et usages alternatifs de friches, j’ai souhaité dans le cadre de mon mémoire de fin d’études, analyser plus en détail un exemple de requalification. J’ai ainsi retenu l’étude du Park Am Gleisdreieck.
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Remerciements
Ce mémoire clôture la fin de mes études universitaires dans le domaine de l’Architecture. Durant ces années, nombreuses sont les personnes qui ont fait tout leur possible en me soutenant, me soulageant et m’accompagnant dans les nombreuses « charrettes » qui ont émaillé ce parcours universitaire. Je remercie donc : L’ensemble des professeurs de la faculté d’Architecture La Cambre-Horta pour leur enseignement et les connaissances qu’ils m’ont transmises, Monsieur Benoit Moritz, mon promoteur, qui m’a aidée dans mes démarches pour la rédaction de ce mémoire, Les enseignants de la TU Berlin, pour m’avoir fait découvrir le paysage berlinois et toutes ses facettes, Monsieur Pfeuffer, le manager du parc de Gleisdreieck, pour avoir pris le temps de répondre à mes questions, et ainsi approfondir ma connaissance du parc, Aux employés des archives du Technisches Museum Berlin, pour m’avoir aidé dans mes recherches et permis de comprendre l’histoire complexe de Gleisdreieck, Aux usagers du parc que j’ai interrogés et qui ont répondu avec enthousiasme, A ma famille, qui m’a soutenue avec beaucoup d’énergie tout au long de mes études, A Lucie, qui m’a accueillie chaleureusement à Berlin et aidée dans mes démarches entreprises sur place,
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A mes amis de la faculté qui ont vécu les fous rires et moments difficiles de « charrette » avec moi, A tous mes amis, qui m’ont accompagnée durant toutes ces années.
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Table des matières Résumé ...........................................................................................
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Avant-Propos .................................................................................
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Remerciements .............................................................................
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Table des matières ........................................................................
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Liste des abréviations utilisées....................................................
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Liste des annexes .........................................................................
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Introduction générale ....................................................................
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I] Les éléments précurseurs à Berlin: origine, histoire et urbanisme .................................................................................
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1) Les traces d’un lourd passé historique ................................ 23
2) L’urbanisme berlinois et ville en décroissance .................... 26 3) Émergence de la Baukultur ................................................. 30
II] Gleisdreieck: avant son aménagement en parc urbain 1) Zone ferroviaire et dégâts de la guerre................................
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2) Gleisdreick : zone en suspens ?........................................... 42
3) Redécouverte du terrain et de son biotope ......................... 44
III] Les prémices du parc et l’aboutissement du projet
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1) La zone en mouvement après la période post-réunification 53
2) Concours lancé pour l’aménagement d’un parc .................. 59
3) Concept mis en œuvre et analyse du processus pour la réalisation du parc .............................................................................. 62
IV] Park am Gleisdreieck : son impact dans la ville contemporaine .............................................................................
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1) Le parc et ses activités actuelles ......................................... 71
2) Vivre à Gleisdreieck : enjeux et impacts .............................. 79
3) Réactions et avis des usagers ............................................. 84
Conclusion ......................................................................................
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Promenons-nous à Gleisdreieck ................................................
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Bibliographie ...................................................................................
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Annexes ..........................................................................................
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Liste des abréviations utilisées RDA : Deutsche Demokratische Republik : République Démocratique allemande RFA : Bundesrepublik Deutschland : République Fédérale d’Allemagne AG : Aktionsgemeinschaft Gleisdreieck : une association de citoyens se battant pour la zone de Gleisdreieck U-Bahn : Untergrundbahn : métro souterrain de Berlin S-Bahn : Stadtschnellbahn : métro aérien de Berlin SPD : Sozialdemokratische Partei Deutschlands : le parti social-démocrate d’Allemagne DB : Deutsche Bahn : société des chemins de fer allemands
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Liste des annexes (Interviews dans le parc) Rencontre avec un membre de la « Kleingärtenkolonie » .......................... 107 Rencontre avec des septuagénaires installés sur un banc à l’entrée de Ostpark, près du petit café et de l’espace de jeu pour enfants .................. 109 Interview avec un habitant du quartier venu s’installer avec une petite charrette sur roues pour vendre des crêpes indiennes et du thé à la menthe 109 Interview avec Herr Pfeuffer, un des acteurs dans la participation de l’élaboration du parc, travaillant pour Grün Berlin ..................................... 111 Entretien avec une personne des archives du Technisches Museum Berlin 113 Constat personnel sur le terrain ............................................................. 115 (Prix remporté par l’atelier Loidl pour le Park am Gleisdreieck)..................... 117
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Introduction générale Dans une ville comme Berlin, nombreux sont les terrains laissés à l’abandon, les vides qui s’immiscent dans l’espace urbain. Ayant vécu à Berlin pendant une année, j’ai eu le loisir de coexister avec de tels espaces quotidiennement. Je les ai ressentis comme l’une des spécificités de la ville, qui en font son caractère si particulier et improbable. Au détour d’une rue, il n’est pas rare de se retrouver devant une vieille bâtisse réutilisée en squat ou encore, une friche verte utilisée chaque week-end pour accueillir un Flohmarkt, une immense brocante qui mêle vieux meubles, petits créateurs, etc. Certains espaces témoignent également du sens de la solidarité et de la collectivité, comme le Prinzessinnengarten, parcelle de terrain vague réinvestie par deux amis qui ont développé un jardin communautaire. Ainsi les habitants investissent des lieux tombés en déshérence et leur insufflent une nouvelle vie. Ces lieux redeviennent des points d’attractivité et réactivent des zones parfois en décrépitude. Toutes ces interventions dans la ville, font de Berlin le lieu de la culture alternative par excellence et du recyclage urbain. Pour ce mémoire, je me suis intéressée à une friche verte particulière. Sans limite très claire et très étendue, riche en biodiversité et située au coeur de la ville, la friche de Gleisdreieck. L’histoire a fortement imprégné ces lieux. Elle est même, en partie, à l’origine de cet état d’abandon. Anciennement utilisée comme gare de transport de passagers et de marchandises, elle a subi les destructions des deux guerres mondiales. Puis à la séparation de Berlin lors de la guerre froide, la zone ferroviaire de Gleisdreieck sous la gouvernance de l’ex- RDA, mais située du coté Ouest du mur, a été abandonnée. Après la chute du mur, dans le processus de réunification et la nécessité de redynamiser certaines zones de la ville pour palier au phénomène de Shrinking city, l’État de Berlin a mis en place une série de démarches et notamment la réhabilitation de cette zone, proche de la Potsdamer Platz, un des centres dynamiques de Berlin. A quelques pas des lieux historiques comme le Brandenburger Tor, le quartier des vestiges de la Guerre Froide, le musée Topographie Des Terrors ou Checkpoint Charlie, Gleisdreieck a une situation privilégiée. Connecter cette zone avec 16
la Potsdamer et la Leipziger Platz est donc devenu une des priorités du gouvernement. Ainsi de nombreux projets sont lancés et se concluent par l’aménagement d’un parc servant de connecteur urbain. Ce phénomène de reconversion d’espaces à l’abandon, chargés d’un fort passé historique, est assez spécifique à la ville de Berlin. L’étude de cette ‘’pause’’ verte au centre de la capitale m’amène à m’interroger sur la manière de gérer la réactivation d’un tel espace en tenant compte des éléments historiques, environnementaux, sociologiques et urbains. Comment établir la « juste » reconversion, quels sont les éléments à conserver, comment les inclure dans le processus global de redynamisation, faut-il les supprimer totalement, les conserver partiellement ? Comment reconstruire, sur une zone au fort passé historique et quelles sont les attitudes à adopter sur une friche de cette envergure ? Comment passer de la « jungle verte » a un parc recevant l’approbation des citoyens et l’intégrer de la meilleure manière possible avec la ville? Ce mémoire s’attachera à analyser la méthode employée pour réhabiliter Gleisdreieck et sa pertinence comme processus pour réunifier des territoires, les intégrer, les redynamiser et jouer un rôle en tant que connecteur urbain. Pour répondre à ces questions, je développerai dans une première partie, les prémices de l’histoire de la capitale allemande qui sont à l’origine des no man’s land présents dans la ville. Je mettrai également en évidence le système urbanistique de la ville et les conséquences d’une période de décroissance. Puis j’analyserai les points de la Baukultur émis pour construire de façon judicieuse et efficace la ville de demain. Dans une deuxième partie, je présenterai Gleisdreieck, sujet de mon étude, qui a subi ce phénomène. Ce cas est tout à fait particulier dans la ville, de par son histoire et sa position. Ce développement présentera les différentes phases et évènements qu’il a subis et quels en ont été les impacts. La troisième partie s’attachera à présenter les changements qui ont élevé Gleisdreieck vers un nouveau statut de parc après la réunification et analyser les moyens urbanistiques et architecturaux mis en place pour 17
donner un nouvel essor à cette immense étendue. Pour finir, je définirai le parc dans son état actuel tout en dégageant les impacts de l’aménagement d’un tel espace pour les quartiers adjacents et sa population. Je présenterai les avis et réactions récoltés auprès des utilisateurs du parc, interrogés durant mon voyage à Berlin. Je terminerai mon développement en mettant en exergue les méthodes efficientes mises en œuvre à Gleisdreieck, ou qui auraient pu l’être, dans le processus de requalification afin de façonner au mieux l’environnement pour les générations actuelles et futures et offrir ainsi un cadre de vie agréable dans la ville contemporaine.
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◇ I‑ Les éléments précurseurs à Berlin: origine, histoire et urbanisme
Photo ci-avant: prise de vue personnelle
Plusieurs phénomènes ont été à l’origine de l’apparition de friches vertes ou industrielles à Berlin. Les causes de ce phénomène sont d’ordre historique mais aussi de changement politique d’où les modifications des plans pour la construction de la capitale allemande. Certaines méthodes ont été établies en Allemagne pour palier à ces effets et assurer un développement urbain en accord avec la société et ses besoins.
1) Les traces d’un lourd passé historique
Plus que toute autre ville, Berlin a été marquée par une succession d’évènements historiques qu’elle a subis au XXème siècle. Après les démolitions durant la Seconde Guerre Mondiale, la dégradation des constructions anciennes et la division de la ville avec la construction du Mur, Berlin a fait face à une situation de stagnation.
Dans les années 70, le Land de Berlin (Ouest) adopte une solution urbaine, la Kahlschlagsanierung1,qui vise à démolir tous les bâtiments vétustes et à reconstruire à neuf de nouveaux quartiers. Les objectifs urbanistiques de reconstruction sont redéfinis en étroite collaboration avec les habitants. Cela donne lieu à une rénovation urbaine douce la behutsame Stadterneuerung2. A partir des années 1980, le Land de Berlin (Ouest) instaure une cellule de « coordination et de pilotage » de manière à optimiser la rénovation douce entre les différents acteurs. A la chute du Mur, Berlin (Est) est submergé par une vague de destructions et tout ce qui marque la présence de l’ex-RDA doit disparaître. Les destructions et les transformations du paysage urbain sont vues comme nécessaires afin de « faire place nette »3, une sorte d’oubli volontaire de l’existence d’un passé trop lourd. L’objectif étant de faire disparaître la présence de la RDA, comme si ce moment dans l’existence de la ville n’avait pas eu d’impact sur l’architecture. A cela, s’ajoute une désindustrialisation 1‑ Terme tiré du livre de BERNARD Hélène, Paroles d’acteurs : Participation des habitants au renouvellement urbain à Berlin, Lyon, Collection « Recherches » du PUCA n°164, 2006. 2‑ voir ci-dessus (cf.1) 3‑ Livre de COMBE Sonia, DUFRENE Thierry et ROBIN Régine, Berlin : l’effacement des traces, Fage Editions, 2009.
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massive, par rapport à la zone Ouest. Berlin reflète ainsi son histoire par une addition de fragments contradictoires de destructions-reconstructions, ce qui a mené à terme à une hétérogénéité du tissu urbain. Cette réorganisation constante et radicale a laissé de vastes zones non-définies dans le tissu urbain. Ces espaces ont vu leur valeur économique diminuée, ils ont été privés de leur cycle de croissance, ce qui a également agi sur le niveau de la vie quotidienne de la population. Se sont ainsi créés des espaces sans fonctions, qui ont formé de vastes terrains vacants. Face à ce phénomène, la ville de Berlin se questionne sur la manière de gérer ces espaces. Ce potentiel de « vide » offre une nouvelle perspective dans la démarche de création d’espace public. De nombreux urbanistes et architectes s’intéressent à ces lieux marginaux, comme par exemple Rem Koolhaas qui s’est fortement intéressé au thème de la vacuité. En effet, le «vide» occupe une place essentielle dans son étude, The Berliner Wall as Architecture, car il présente une «qualité d’incertitude programmatique»4. Selon lui, «Où rien n’existe, tout est possible».Il pense aussi qu’il ne s’agit plus de réfléchir selon une opposition public-privé. L’ouverture du Mur a laissé le gouvernement de l’Ouest, la coalition rotgrün, totalement désemparé. Ainsi le schéma directeur, Flächennutzungsplan, n’est plus d’actualité et la nouvelle coalition, qui succède à rotgrün, met en place un nouveau schéma directeur qui répond « aux critères en faveur d’une “transparence” du processus de planification »5. Volker Hassemer, le Sénateur pour l’urbanisme, instaure un lieu de débat pour discuter des questions de l’aménagement berlinois, le Stadtforum. Lors de ces réunions se rencontrent des architectes, des ingénieurs, des politiques, ainsi que des citoyens où se confrontent des approches techniques à des images sur le caractère esthétique de la ville. Ces rencontres bimensuelles, au Stadtforum, ont permis de dégager les grands axes pour le nouveau schéma directeur de Berlin. Dans ce 4‑ Extrait de: SGRO-GENNARO Antonio, Friches urbaines vs. ville: Berlin, archipel d’usages intermédiaires, énoncé théorique de Master d’Architecture, sous la direction de Jacques Lucan, Lausanne EPFL, 2009. 5‑ Extait de: JAQUAND Corinne, Portrait de ville : Berlin, Édité par l’Institut Français d’Architecture, Abonnement 1992.
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dernier, le principe fondamental est de conserver et densifier les centres de la ville. Ainsi le département du Sénat pour le développement urbain et l’environnement souhaite garder la polycentralité de la ville « héritée des anciennes communes indépendantes avant la formation du Grand Berlin »6. Sur l’ancienne zone du mur, de nombreuses opérations de grande envergure sont lancées et notamment le projet d’aménagement de la Potsdamer Platz, qui fait l’objet d’un concours d’urbanisme en 1991. Les grandes décisions concernant l’aménagement se font de pair avec l’Etat fédéral, le Bund. Les décisions entre la ville (Land de Berlin) et le Bund n’ont pas toujours été faciles, avec de nombreux points de désaccord. Toutefois la recherche d’un consensus avec des débats, des discussions, des concertations a toujours été présente, même au dépend des autorités qui ont dû parfois retarder ou mettre de côté certaines de leurs priorités, face à une prise de décisions impopulaire. « Force est de constater qu’à Berlin planification urbaine ne rime pas seulement avec technocratie »7.
6‑Extait de: JAQUAND Corinne, Portrait de ville : Berlin, Édité par l’Institut Français d’Architecture, Abonnement 1992. 7‑ voir ci-dessus (cf.6)
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2) L’urbanisme berlinois et ville en décroissance
Un autre phénomène est responsable des zones isolées, laissées à l’abandon : il s’agit de la désurbanisation soudaine des villes allemandes. Même si l’augmentation de la population se concentre dans les villes, il a été relevé que le nombre des villes en décroissance a augmenté plus rapidement que celui des villes en expansion. On parle de phénomène de Shrinking cities. En Allemagne de l’Est, la réunification a eu des effets néfastes. Christiane Hanneman parle de « déséconomisation »8 car les villes de l’ex-RDA ont perdu leurs fonctions. Cela s’est traduit par « une perte considérable d’emplois, non seulement industriels, mais aussi dans l’administration, l’armée ou l’agriculture »9. Cette décroissance se manifeste par l’abandon de logements et la multiplication de friches. Face à cette situation, l’État allemand met en place un programme fédéral de rénovation urbaine, Stadtumbau Ost, pour tenter de palier ce déclin en « retendant le marché immobilier est-allemand à travers des actions de démolition ou de revalorisation »10. Dans ce phénomène de décroissance, certains urbanistes et architectes voient la possibilité d’inventer un nouveau modèle d’urbanité, loin des dynamiques d’étalement urbain et de congestion, comme Philip Oswalt, qui établit un travail de recherche sur les Shrinking cities dans un manifeste ville-archipel. De nombreuses autres réflexions sont associées à ce manifeste ville-archipel comme la théorie de « ville réseau » de Franz Oswald ou les interprétations de Ungers et Koolhaas. Ces derniers pensent qu’à partir de cette problématique de ville en décroissance, il est possible « d’extraire une théorie et une stratégie de planification alternative »11. Quand à Jansen, il voit apparaître dans ce développement divergent, des espaces « entre-deux » qui n’appartiennent à aucune partie de la ville. D’après lui, 8‑ Extrait du livre: ROTH Hélène, « Les “Villes rétrécissantes” en Allemagne », extrait du livre Geocarrefour, vol. 86/2, 2011, (URL : http://geocarrefour.revues.org/8287). 9‑ tiré du site internet: http://www.franceculture.fr/blog-globe-2011-02-23-nos-villes-sont-mortelles. html 10‑ voir ci-dessus (cf.8) 11‑ Extrait du livre: HERTWECK Florian et MAROT Sébastien, La ville dans la ville : Berlin, un archipel vert : un manifeste (1977) d’Oswald Mathias Ungers et Rem Koolhaas avec Peter Riemann, Hans Kollhoff et Arthur Ovaska, Zürich, Lars Müller Publishers, 2013.
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il est important de conserver ces espaces et de ne pas les aménager mais plutôt de les utiliser comme des fragments de nature animés par diverses activités. Les espaces publics verts de proximité revalorisent « l’attractivité et la viabilité des quartiers résidentiels dans les centres villes »12. Ils ont également une fonction écologique, ils refroidissent les voieries ou les façades des habitations, ce qui atténue « l’échauffement des espaces urbains à forte densité »13. Dans de nombreux cas, ils s’articulent les uns avec les autres et sont intégrés dans un concept de bande verte dans la ville. Ils embellissent l’environnement résidentiel en créant une alternance entre espace bâti et non-bâti. La ville de Berlin est caractérisée par ses nombreux espaces verts. La capitale regorge de parcs, de forêts, de petits jardins potagers privés ainsi que de jardins communautaires. Le Tiergarten, véritable poumon vert au cœur de la ville, n’est pas le seul à proposer de nombreux espaces de détente et de loisirs. En fait, chaque parc possède une atmosphère particulière et à chacun son utilisation. On ira plutôt à Mauerpark se promener le week-end pour faire un tour au Flohmarkt ou encore écouter le karaoké qui a lieu tous les dimanches. Si c’est le tour en barque qui nous attire, on ira sans doute se promener sur les petits canaux qui irriguent le Tiergarten. Et si l’envie nous tente d’aller voir un film en plein air pendant la belle saison, on se dirigera très certainement vers le Hasenheide Park. Et bien entendu, le fameux aéroport de Tempelhof qui accueille sur ses pistes une immense zone de loisirs, où il n’est pas rare d’apercevoir des skateboarders munis d’une voile de ‘’kite’’ ou d’une planche à voile glissant à toute allure sur l’asphalte. Pendant les soirs d’été, il est aussi très facile d’aller se baigner dans les lacs qui bordent la ville à l’Est comme à l’Ouest. Ils sont très accessibles via le S-Bahn, le dépaysement est garanti. L’espace de quelques heures, on s’imagine en pleine montagne au beau milieu d’une forêt clairsemée par de grandes étendues d’eau. Mais aujourd’hui l’un des parcs très fréquenté par les Berlinois est le nouveau parc de Gleisdreieck. Il occupe une position stratégique dans le centre de 12‑ Publication: Bundesstiftung Baukultur, « Rapport sur la Baukultur : le cadre de vie bâti de demain », mars 2015, (URL : http://www.bundesstiftung-baukultur.de/fileadmin/user_upload/PDFs/Rapportsur-la-Baukultur.pdf) 13‑ voir ci-dessus (cf.12)
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la ville, ce qui a contribué à sa notoriété. Tous ces espaces de nature sont une véritable ressource pour les habitants ainsi que les touristes. Au total ces parcs et zones libres publiques représentent à eux seuls 44% de la ville14. Cette abondance de vert est une réelle richesse économique pour la métropole mais cela implique une participation de la part des citoyens qui doivent contribuer à la préservation de la qualité de ces espaces dans le futur. Pour faire part de cette participation citoyenne, culturelle, sociale, le parc de Gleisdreieck est un très bon exemple. Son histoire tout à fait particulière, sa position centrale et sa végétation rare ont été des éléments clés pour maintenir le caractère identitaire durant la phase de planification du parc. De nombreux citoyens se sont battus face à des personnalités politiques pour assurer sa survie et ont été une grande source d’idées concernant les réaménagements pour l’amélioration de la friche verte. Cette évolution au niveau des mentalités, avec des échanges entre citoyens et acteurs publics, a été un apport positif à la politique de la ville. En effet le « Berlin-vert » 15 a plusieurs visages : il est la résultante d’un ensemble de coopérations et d’engagements de différents acteurs de la ville. Gleisdreieck en est l’exemple même avec un modèle de participation innovant à partir du processus de planification du parc jusqu’à sa fabrication. En 2011, l’Union européenne adopte une stratégie pour la biodiversité et s’engage à stopper « la perte de la biodiversité et la dégradation des écosystèmes d’ici 2020 »16. Un ensemble d’actions a été mis en place et parmi celles-ci une initiative qui garantit qu’il n’y a pas « de perte nette d’écosystèmes et de leurs services »17. Ainsi l’Allemagne a instauré le « principe de compensation » dans les années 1970 au niveau de la réglementation de l’environnement. Le Land de Berlin est en effet face à 14‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013. 15‑ voir ci-dessus (cf.14) 16‑ Extrait du livre: LEVUREL H., FRASCARIA-LACOSTE N., HAY J., MARTIN G. et PIOCH S., Restaurer la nature pour atténuer les impacts du développement, Analyse des mesures compensatoires pour la biodiversité, collection Synthèses, Editions Quae, 2015. 17‑ voir ci-dessus (cf.16)
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la question de l’impact des aménagements urbains sur l’environnement sur une zone « riche en espaces verts et agricoles » mais fortement peuplée. Ainsi le programme de protection et de développement de Berlin applique la « séquence Eingriffsregelung »18 (éviter-réduire-compenser : ERC) aux projets et aux documents d’urbanisme qui peuvent avoir un impact sur la nature ou le paysage urbain. Des méthodologies ont été développées afin d’harmoniser les calculs de compensation. Cette mesure compensatoire doit assurer le maintien des écosystèmes, du paysage visuel urbain, des espaces ouverts et des zones récréatives ainsi que des lieux d’habitat pour les espèces menacées. Cette mesure compensatoire est inscrite dans le code de la construction depuis 1993 et s’ajoute au Landschafts-und Artenschutzprogramm (le programme de protection du paysage et des espèces vivantes) en février 2004. Ce dernier a pour objectif de localiser les compensations sur le territoire afin de renforcer et protéger la biodiversité et les espaces récréatifs existants. Il identifie à Berlin des axes verts qui forment un corridor et connectent, écologiquement, le centre de la ville à une « bande verte » à la périphérie élargie. Les terrains sélectionnés sont regroupés dans un « pool » de compensation et doivent répondre à plusieurs critères : « être localisé dans une zone prioritaire, avoir un potentiel significatif d’amélioration de leur fonctionnement écologique et des services écosystémiques fournis à la ville, et être disponible du point de vue des droits d’usage »19. La mesure compensatoire s’applique lorsqu’une opération de construction a causé des dommages à la nature ou au paysage. Il faut alors dédommager celui-ci par le maintien d’une surface libre dont le coût est assumé par le constructeur qui a opéré le chantier de construction. Les mesures prises, qui augmentent la qualité de vie dans le paysage, sont contrôlées et inscrites dans un registre tenu par le Département du Sénat ce qui assure la protection et la pérennité du site recevant des mesures compensatoires.
18‑ Extrait du livre: LEVUREL H., FRASCARIA-LACOSTE N., HAY J., MARTIN G. et PIOCH S., Restaurer la nature pour atténuer les impacts du développement, Analyse des mesures compensatoires pour la biodiversité, collection Synthèses, Editions Quae, 2015. 19‑ voir ci-dessus (cf.18)
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3) Émergence de la Baukultur
En 2000, un ensemble de chambres et d’organisations professionnelles, comme la Chambre fédérale des architectes, la Chambre fédérale des ingénieurs et la Fédération des architectes Allemands, ont proposé au ministère chargé des transports, de la construction et du logement, « de créer une initiative en faveur de la Baukultur »20. Avant la création de la fondation en 2006 par la mise en vigueur d’une loi fédérale, deux rapports ont été nécessaires (un premier en 2001, le deuxième en 2005) pour établir un état des lieux de la Baukultur. La Baukultur ou culture architecturale fait le lien entre des devoirs architecturaux et la considération d’aspects sociaux, économiques et écologiques. L’objectif de cette culture est de bien planifier et bien construire. Elle est donc indispensable pour former « un environnement qui soit perçu comme agréable à vivre»21. La fondation pour la Baukultur a pour mission de faire connaître les principes et thèmes de cette culture au grand public. Cette mission d’ordre public a également le droit de soumettre un état des lieux sur l’état de la culture architecturale au Gouvernement ainsi qu’au Parlement. Le troisième rapport de 2014/2015 établit une base de méthodes et conseils pour développer la culture du bâti en Allemagne, sur base de trois thèmes centraux : l’habitat et les quartiers mixtes, l’espace public et les infrastructures, la culture de la planification et la qualité des processus. En ce qui concerne l’habitation, les enquêtes réalisées pour ce rapport annoncent qu’au cours des quatre ou cinq années à venir, environ un million de logements devraient émerger dans les villes allemandes en plein essor. Le modèle d’habitations mixtes favorisera la diminution d’utilisation de l’espace et contribuera à diminuer l’étalement urbain. Le XXIème siècle apparaît aussi comme étant celui « de l’espace public citadin et de la verdure urbaine ». Notre société opère des transformations, c’est donc le 20‑ Publication: Bundesstiftung Baukultur, « Rapport sur la Baukultur : le cadre de vie bâti de demain », mars 2015, (URL : http://www.bundesstiftung-baukultur.de/fileadmin/user_upload/PDFs/Rapportsur-la-Baukultur.pdf)
21‑ voir ci-dessus (cf.20)
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moment pour agir au niveau de l’environnement urbain. Les défis pour la société de demain résident au niveau de l’entretien et la rénovation des espaces verts et des infrastructures. Mais la fédération pour la Baukultur met aussi l’accent sur la manière d’aborder le processus de planification et de construction. Sans une qualité du processus, le projet risque de ne pas s’intégrer au sein des structures existantes. Toute proposition doit donc découler d’une planification compétente et d’une bonne communication afin de s’implanter avec cohérence dans le paysage urbain préexistant de manière à l’embellir. Dans ce rapport, plusieurs critères sont énoncés pour qualifier les espaces publics « de qualité ». Tout d’abord, il est important qu’ils soient accessibles à tous car ils sont dédiés à l’ensemble de la collectivité. L’espace public doit également présenter une certaine urbanité, c’est-àdire, répondre à la présence de divers groupes d’âge ayant des attentes différentes. Ainsi il doit fournir des lieux propices au repos, à l’activité sportive, à la conversation et au développement d’utilisations imprévisibles. Les nouveaux lieux mis à disposition des citoyens doivent être conçus en coexistence avec les quartiers adjacents. Ils doivent répondre de manière cohérente aux besoins des résidents, avec une « utilisation ouverte et plurifonctionnelle »22. Les aménagements mis en place sont aussi très importants au niveau de l’identité de la ville. Enfin l’espace public nécessite un entretien et un suivi régulier afin de conserver son apparence soignée et « devenir un élément d’identification »23 qui valorise la ville. La Baukultur s’intéresse aussi à la culture du processus, c’està-dire aux méthodes à utiliser lors de l’aménagement d’un projet, pour arriver au meilleur résultat possible. La bonne intégration d’un habitat ou d’un espace public dans son environnement ne dépend pas seulement des critères énoncés précédemment. La coopération des divers acteurs à tous les niveaux de planification est un élément clé pour une bonne réussite du projet. Dans le rapport d’état des lieux, plusieurs phases sont proposées pour une planification intercommunale et interdisciplinaire. La
22‑ Publication: Bundesstiftung Baukultur, « Rapport sur la Baukultur : le cadre de vie bâti de demain », mars 2015, (URL : http://www.bundesstiftung-baukultur.de/fileadmin/user_upload/PDFs/Rapportsur-la-Baukultur.pdf) 23‑ voir ci-dessus (cf.22)
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première est intitulée « phase zéro » 24: elle consiste à définir les besoins et les objectifs du projet. Une fois ce cadre d’orientation fixé, le concept de planification est clarifié et la gestion du projet sera simplifiée par la suite. Dans une perspective idéale, un ensemble d’acteurs devrait être convié à débattre sur le projet dès la phase zéro afin de trouver la meilleure solution. Mais l’implication précoce des différentes personnes concernées par les travaux est préconisée pour atteindre des objectifs clairs, une planification remarquable et une mise en œuvre réussie avec succès. La transparence et l’ouverture sont donc des critères à ne pas négliger tout au long du processus accompagné par les pouvoirs publics. Après cette étape viennent les phases de un à neuf qui définissent les bases du contrat, l’esquisse, « la mise en cohérence de l’ensemble des pièces écrites et plans avec les ouvrages exécutés »25. La dernière étape, la phase dix, consiste à prévoir un budget pour l’après-chantier et ainsi prévenir les ajustements ou évolutions. La qualité d’un projet de construction est reconnaissable par une planification efficace, une communication publique et une réalisation de caractère qui intègrent et enrichissent son environnement urbain.
24‑ Publication: Bundesstiftung Baukultur, « Rapport sur la Baukultur : le cadre de vie bâti de demain », mars 2015, (URL : http://www.bundesstiftung-baukultur.de/fileadmin/user_upload/PDFs/ Rapport-sur-la-Baukultur.pdf) 25‑ voir ci-dessus (cf.24)
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Les démolitions durant la Seconde Guerre Mondiale et la division de Berlin instaurent une situation de stagnation. La chute du Mur ajoute une désindustrialisation et une décroissance de Berlin (Est), conjuguées à une vague de destruction pour faire « place nette ». Cette histoire laisse la ville avec de vastes zones à l’abandon et offre des possibilités de création d’espace urbain. L’Allemagne réunifiée, met en place un schéma directeur d’urbanisme à Berlin, basé sur une large concertation et lance des opérations de grande envergure. L’abondance du vert est une réelle richesse à Berlin et de nombreux citoyens s’engagent face aux politiques pour les préserver. Un principe de compensation envers l’environnement est légiféré, en cas de projet impactant la nature ou le paysage. La compensation est attribuée à Berlin pour l’amélioration d’axes verts. En 2006, un ensemble d’organismes et de professionnels du bâtiment fondent la « Baukultur » pour bien planifier et construire. Elle émettra notamment des recommandations pour une qualité des processus de réalisation et de résultat des espaces publics
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La Potsdamer Platz après les destructions de la deuxième Guerre Mondiale
Vue sur la Leipziger Platz depuis Berlin Ouest
Photo en haut: https://fr.wikipedia.org/wiki/Potsdamer_Platz Photo en bas : http://histoire-geo-remiremont.blogspot.fr/2009/11/la-potsdamer-platz-berlin-symbole-des.html
La construction du Mur engendre des no man’s land
La Potsdamer Platz vue depuis le bloc de l’Est
Photo en haut: http://www.independent.com/news/2014/nov/09/east-berlin-through-10-year-old-eyes/ Photo en bas: https://fr.wikipedia.org/wiki/Potsdamer_Platz
〕 II‑ Gleisdreieck: avant son aménagement en parc urbain
Photo ci-avant gauche: http://www.publicspace.org/en/works/g047-park-am-gleisdreieck Photo ci-avant droite: http://dedale10.ocular-witness.com/?paged=3
L’histoire de Gleisdreieck est longue et complexe. Au XIXème siècle, la zone est attribuée à la gare la plus importante d’Europe et connaît un essor phénoménal. Mais la guerre arrive et détruit tout sur son passage, laissant la gare en état de ruines. La zone est peu à peu laissée dans l’oubli, la végétation envahit les friches ferroviaires encore présentes donnant naissance à un fabuleux biotope au coeur de Berlin.
1) Zone ferroviaire et dégâts de la guerre
Depuis la construction de la première gare de Anhalter en 1841 jusqu’à la fin de la deuxième Guerre Mondiale, la zone de Gleisdreieck servit au transport ferroviaire jusqu’à Anhalter Bahnhof et plus tard jusqu’à la Potsdamer Bahnhof. Gleisdreieck était à l’époque un « monde de béton et d’acier »1 (eine Welt aus Beton und Stahl) par lequel arrive des marchandises venues de toute l’Europe pour alimenter la métropole grandissante. Même dans une ville comme Berlin, qui est un chantier en permanence, l’histoire de Gleisdreieck est tout à fait particulière. Peu de temps après le règne du Kaiser apparut un nouveau centre dans la ville avec la construction de la Anhalter Bahnhof et la Potsdamer Bahnhof. Situé entre les quartiers de Kreuzberg et Schöneberg, le croisement des voies de chemin de fer donnera le nom à la zone « Gleisdreieck » qui signifie une « jonction ferroviaire triangulaire ». D’un côté la zone est limitée au Nord par le Landwehrkanal et au Sud par des ponts, Yorckbrücken. A l’intérieur du site, un enchevêtrement de voies ferrées s’accumule. Pendant la construction, l’ensemble de la zone a été rehaussé de trois mètres. Cette mesure coûteuse était indispensable pour que le trafic ferroviaire puisse s’effectuer sans perturber le trafic des bateaux sur le Landwehrkanal ou encore le transport routier. L’ère des gares a commencé à Berlin et en Prusse à l’automne 1838 avec l’ouverture d’une correspondance de trains entre les résidents 1‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
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de Berlin et les habitants de Potsdam. C’était une réelle avancée facilitant le rythme de vie de la population en diminuant les temps de parcours. Seulement quatre ans après l’ouverture de la gare entre Berlin et Potsdam, quatre nouvelles gares ont vu le jour et parmi elles, la gare de Anhalter. Puis a émergé une extension de gare spécifique pour le transport de marchandises. Cet agrandissement apparut en même temps que la vision du directeur des Jardins Royaux, Peter Joseph Lenné. Il avait déjà prévu un remodelage urbain de l’ancien territoire de Gleisdreieck en 1840 en connectant des rues comme Bülow ou Hornstraβe par de grands boulevards et une série de places ornementales. Cette idée a été reprise par l’architecte du gouvernement James Hobrecht, mais il n’a pas réussi à mener son plan jusqu’au bout. La gare et l’ensemble de ses voies avaient déjà recouverts une grande partie de la zone. A la tête de la zone de Gleisdreieck, la gare de Anhalter, proche du Landwehrkanal est reconstruite peu de temps après la fondation de l’Empire allemand en 1871, d’après un dessin de l’architecte Franz Schwechten. Le bâtiment est réalisé en brique rouge dans un style Néo-Renaissance avec de nombreuses décorations en terre cuite. Schwechten avait même prévu des chambres personnelles pour le Kaiser. Le toit en porte-à-faux est conçu avec une envergure de 61 mètres, une hauteur de colonnes de 34 mètres positionnées sur une longueur de 170 mètres. Conçue par Hans Seidel, cette structure avait été perçue comme une avancée technologique. Durant la guerre, de nombreuses parties ont été détruites. Il ne reste désormais que les ruines du portail d’entrée, préservées en 1959 du dynamitage grâce à une protestation citoyenne. Durant la fin de la Seconde Guerre Mondiale la zone ferroviaire de Gleisdreieck est fortement bombardée. A la fin du conflit, les accords entre Alliés et Russes attribuent la gouvernance de la zone ferroviaire de Gleisdreieck au bloc de l’Est. Après quelques réhabilitations de voies entre les deux blocs, elles seront totalement désaffectées en 1951 pour recentrer tous les transits entre l’Est et l’Ouest vers d’autres passages fortement contrôlés. Finalement, la gare de Potsdam complètement cloisonnée de l’Ouest sera démolie en 1957. Ainsi la Anhalter Bahnhof
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reste « orpheline »2. La construction et localisation du Mur en 1961, laisse la zone de Gleisdreieck dans une situation ambigüe, située côté RFA, mais sous administration est-allemande. Elle reste dans l’ombre pendant plus de 30 ans. Pendant cette période, un biotope se développe de manière informelle parmi ce monde d’acier et de béton. Il y pousse bien plus que de l’herbe. Une nature sauvage composée d’églantiers, de groseilliers, de vignes, etc., se développe. Une étude des espèces présentes découvre une faune et une flore assez extraordinaire pour un centre de ville avec des plantes rares transportées grâce aux trains venus de pays lointains. Sur ces nouvelles formes de sols, les animaux sont aussi très diversifiés comme des renards, des écureuils, des lapins, etc. De nombreuses espèces d’oiseaux comme des pies, des mésanges ou encore des merles sont également recensées. En 1980, plus de 413 sortes de plantes différentes sont répertoriées. Trois ans plus tard, lors d’un deuxième recensement, 112 sortes de papillons sont découvertes.
2‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
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2) Gleisdreick : zone en suspens ?
Cette faune et flore extraordinaire, en plein cœur de Berlin, ont été menacés par un projet de voies de transport. En effet, le Sénat avait développé un concept pour accéder au vieux centre de Berlin-Est via des autoroutes. Les plans d’utilisation de la zone de Berlin-ouest voient apparaître en 1965, la création de tangentes Nord-Sud et Est-Ouest avec la construction de 52 tunnels qui devaient rejoindre le centre historique de Berlin. La première partie de la tangente Ouest entre la Birkbuschstraβe à Steglitz jusqu’à la Sachsendamm à Schöneberg a été inaugurée en 1968. Mais une résistance se forma pour l’extension en direction du Nord, empruntant la zone de Gleisdreieck. Un « comité pour la politique des transports »3 engagea des actions contre la croissance du réseau automobile dans la ville. L’extension prévue de la rocade Est avait déjà soulevé de nombreuses plaintes. Puis une nouvelle initiative se forma contre la construction d’une autoroute à Kreuzberg et Neukölln, en rédigeant des pétitions et en exprimant leurs préoccupations dans la presse.
L’initiative citoyenne, contre le projet Westtangente, va organiser des visites de la ville et des expositions itinérantes en appelant régulièrement à des manifestations. Ils proposent même leur propre conception pour le développement de la jonction d’autoroutes à Schöneberg, avec laquelle ils remportent le prix Lenné d’architecture paysagère. Le projet développé par cette association citoyenne amènera deux idées alternatives dans la discussion pour connecter la ville : • réaliser le croisement des autoroutes via des tunnels et par une montagne sur laquelle s’organiserait un parc de loisirs, • réaliser le croisement entre la « tangente » et le S-Bahn venant de Wannseebahn en prenant l’apparence d’un corridor vert dans la traversée de Schöneberg.
3‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
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Cette proposition de « coulée verte » a séduite, car les deux communes qui devaient être traversées sont construites sur un sol en cailloux et en béton. Ces communes présentaient peu d’espaces verts, seulement 3% pour Kreuzberg et 5% pour Schöneberg. Cette idée a émergé notamment de la volonté de proposer de nouveaux moyens de transport comme l’expliquait Norbert Rheinlaender, membre de l’association citoyenne AG Gleisdreieck, dans une interview : « Nous pensions que si nous supprimions les voies routières, nous devions offrir aux gens d’autres moyens de transport et des espaces de loisirs ».4 Face à ces propositions, les plans du Sénat obtenaient de plus en plus de rejets. Pour finir, en 1977, l’association citoyenne AG Gleisdreieck récolta 4500 signatures contre la construction de l’autoroute et la même année 8000 personnes protestèrent lors d’un rassemblement. Devant cette contestation croissante, le gouvernement SPD réagit et décida en 1981 d’abandonner les objectifs initiaux du projet.
4‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
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3) Redécouverte du terrain et de son biotope
La zone a été redécouverte en 1970 par l’association citoyenne AG Gleisdreieck. Elle lance en 1979 un concours d’idées « Grüntangente statt Westtangente » qui signifie « Tangente verte au lieu de Westtangente ». Pour sensibiliser un maximum de citoyens, elle organise plusieurs actions sur la friche de Gleisdreieck comme des visites du site, des fêtes, des pique-niques, des chaînes humaines et des stands d’information. A partir de là, de plus en plus d’habitants découvrent ce lieu en marge de la société avec des relations de propriété compliquées entre l’Est et l’Ouest. A la fin des années 70, le Sénateur pour la construction et l’habitat, Harry Ristock, propose plusieurs plans et rapidement les études sur site commencent. Le débat de ce projet s’articule autour de la question programmatique, c’est-à-dire la construction de logements, d’une zone industrielle et commerçante, de zones de loisirs, d’une gare de bus et d’un parc pour la ville. En 1982, Gleisdreieck est remis en valeur avec la création du musée de la Technique, qui se trouve actuellement entre l’Est et l’Ouest du parc. Avant la Seconde Guerre Mondiale, les musées techniques sur les transports étaient éparpillées dans toute la ville, mais après les bombardements, il ne restait que quelques vestiges et l’ensemble des musées de l’air, maritime, de la construction, des trains et des voitures ont été rassemblés dans un seul et même lieu à Gleisdreieck. Le musée technique se situe sur l’ancien domaine industriel et ferroviaire de 1874, proche du Landwehrkanal, dans la Trebbiner Straβe. Certains éléments du passé ferroviaire sont encore présents avec une plateforme de l’ancienne gare de marchandises et deux halls servant à modifier la direction des locomotives. Ces deux hangars en forme de demicercles sont toujours présents ainsi que les anciens bâtiments administratifs de la société des marchés et des halles contenant des chambres froides. Situé à côté de l’ancienne gare pour « la Poste » de Berlin et de la gare de U-Bahn, le musée a intégré des éléments des différentes gares. Parmi eux on compte des vieux rails, la maison des fonctionnaires, des hangars pour locomotives et une tour d’eau. Ainsi selon les paroles du Sénateur 44
de la construction, Harry Ristock, « Kreuzberg devient plus beau de 63 hectares ».5 En 1980, des biologistes et des écologistes sont mandatés par le Sénat pour faire un inventaire de la biodiversité présente sur le site. Sur ce plateau, autrefois recouvert de sable, s’est développée une végétation extraordinaire. Plusieurs phénomènes peuvent expliquer cela : • Un développement « libre » de la végétation pendant plusieurs décennies • Le climat spécialement doux du centre ville • Le transport via les trains de plantes originaires d’autres pays Malgré un accès difficile, en zone interdite, de plus en plus de Berlinois repérèrent ces terrains abandonnés. Son contrôle étant difficile, de nombreux visiteurs indésirables flânent sur le lieu en admirant les multiples plantes rares qui avaient poussées entre les rails de chemin de fer. Les visiteurs en avaient fait un lieu de rendez-vous estival ou de barbecues et de fêtes. Ainsi un paysage tout à fait inattendu s’est développé dans cette zone ferroviaire où plus de soixante sortes d’arbres ont poussé dans les décombres des hangars, des postes d’aiguillages ou encore dans de vieux wagons rouillés, pourris par le temps. Les écologistes souhaitaient que la nature continue à se développer de cette façon et que les ruines restent. Ils étaient contre l’idée de créer des sentiers pour vélos et pour piétons. L’écologiste et actuel superviseur de la protection de la nature pour le Land de Berlin, le professeur Ingo Kowarik écrivait « ce sera une Nature du quatrième art ».6 Il entendait par là, une nature spécifique qui ne soit ni planifiée, ni cultivée, tout simplement laissée à l’abandon. 5‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013. 6‑ voir ci-dessus (cf.5).
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Les quelques visiteurs qui sont passés sur ce terrain ont succombé au charme de ce « paysage chaotique et sauvage »7. Les adeptes de la friche de Gleisdreieck ressentaient ce désordre comme une qualité tout à fait particulière. Tout cet enthousiasme pour cette nature foisonnante s’est soldé comme déjà évoqué, par la renonciation d’une voie rapide de la part du SPD. Mais la chute du Mur et les élections de 1989 sont les éléments déclencheurs qui ont redonné force au projet de construction d’un parc.
7‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
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Depuis la construction de la première gare Anhalter en 1841, cette zone ferroviaire de Berlin se développe et la jonction triangulaire de ses lignes lui donnera son nom Gleisdreieck. La zone est rapidement recouverte de voies et sa gare est reconstruite en 1871 à la création de l’Empire Allemand. Le bâtiment de brique style Néo-Renaissance avec son toit en porte-à-faux sera perçu comme une avancée technologique. A la fin du conflit de la Seconde Guerre Mondiale, la zone est fortement bombardée et les accords entre les Alliés et les Russes attribuent la gouvernance de Gleisdreieck au bloc de l’Est. La construction du Mur de Berlin, laisse la zone ferroviaire dans une situation ambigüe coté Ouest et la mène à son abandon. Au travers de ces vestiges ferroviaires en zone urbaine, se développent une faune et une flore exceptionnelles. Elles seront découvertes et protégées par des initiatives citoyennes notamment AG Gleisdreieck contre les projets autoroutiers qui menacent le site. La chute du Mur en 1989 et la réunification de l’Allemagne seront les éléments déclencheurs pour sa reconversion en un parc.
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Anhalter Bahnhof
https://farm3.staticflickr.com/2395/2337153257_8bf7d843d5_o_d.jpg
http://www.bahnstatistik.de/Gleisplan/Ahb_1944.gif
Photo personnelle de l’actuel vestige du porche d’entrée de Anhalter Bahnhof
Photo personnelle de l’ancien site de la gare Anhalter, aujourd’hui investi par le Tempodrom
〕 III‑ Les prémices du parc et l’aboutissement du projet
Photo ci-avant: http://www.reisen-in-berlin.de/allgemein/der-park-am-gleisdreieck-berlins-neuer-city-park/ attachment/img_0258
Après la réunification, la friche est peu à peu redécouverte, intéressant les pouvoirs publics et investisseurs. Mais il faudra encore quelques années, avant que le sort de ce territoire soit scellé. Finalement, après les batailles des citoyens pour le maintien de la zone verte de Gleisdreieck, il est décidé d’aménager un parc.
1) La zone en mouvement après la période postréunification
Tard dans la soirée du 9 novembre 1989, les gens à Berlin Est rient, font la fête et se serrent dans les bras. Le Mur est tombé ! C’est une nouvelle ère qui commence pour l’Allemagne et notamment les Berlinois qui ont subi l’énorme déchirure d’une ville coupée en deux. Six semaines plus tard, de grands changements s’annoncent et le journal allemand Spiegel prévoit un grand avenir pour la ville : « Berlin croit à nouveau en un Berlin réunifié, en une métropole de demain, un centre de vie et d’économie avec 5 millions d’habitants ».1 Le centre de cette métropole prendra place sur la Potsdamer et la Leipziger Platz, autrefois les places les plus animées de Berlin, avant d’être des zones « vides » séparées l’une de l’autre par le Mur. C’était il y a maintenant plus d’un demisiècle, mais cette place d’une surface initiale de 500 000 m² était devenue le symbole de la Guerre Froide. Un nouvel essor s’annonçait désormais pour ces places centrales dans la ville de Berlin. Pour leur redonner une toute nouvelle image et en faire une zone d’effervescence des architectes et urbanistes s’y intéressèrent et imaginèrent de nombreux projets. Trois mois après cette déclaration, Edzard Reuter, le fils du maire de l’Après-Guerre, et président de l’Entreprise Daimler Benz, proposa d’installer son siège sur la Potsdamer Platz sur une surface de 62 000 m². Le sénat enthousiaste devant cette proposition lança un concours d’urbanisme l’année suivante. Tout a été prévu très rapidement, des dates de construction jusqu’à la finalisation. Le premier prix du concours a été 1‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
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remporté par le bureau d’architecture munichois « Hilmer und Sattler » qui avait développé une structure de la ville traditionnelle, compacte avec des îlots, des routes et des places. Durant ce projet de développement de la Potsdamer et Leipziger Platz, les pouvoirs publics ont pris en charge les espaces collectifs dans un souci de répondre aux besoins des habitants et des touristes. Quant aux investisseurs, ils se sont concentrés sur la concrétisation des bâtiments. Les entrepreneurs (Deutsche Bahn AG, debis, Sony/Tishman Speyer, Daimler AG, ABB et le «Land» de Berlin) ont fondé et organisé l’ensemble de la logistique et la construction à Potsdamer Platz. Toute cette agitation et ces discussions autour de l’apparition d’un troisième centre à Berlin relèguent l’idée d’un parc à Gleisdreieck en arrière-plan. En 1992, il devient une zone d’accueil pour la logistique de tous chantiers entrepris sur la Potsdamer Platz et la construction d’un tunnel dans le Tiergarten. La privatisation en 1992 par le gouvernement d’ Helmut Kohl transformant la Deutsche Bahn en une société privée amène de nouvelles difficultés pour le domaine de Gleisdreieck. Ainsi la DB vend les zones de rails abandonnées à des investisseurs privés. Il est également demandé à la DB de revendre des terres inutilisées aux communes. Un de ces terrains est le domaine de Gleisdreieck. Les partenaires du contrat se sont mis d’accord que la DB laisserait au «Land» de Berlin seize hectares pour la construction d’un parc. En contrepartie, le «Land» a autorisé la Deutsche Bahn à vendre une partie de ses parcelles comme terrains constructibles. Une bataille s’en suit pour chaque mètre carré, les citoyens exigeant une surface supérieure pour aménager l’espace vert par rapport aux lotissements et constructions aux abords de la zone. Les investisseurs sont assujettis à verser une indemnité compensatoire, qui servira au financement de l’aménagement du parc en contrepartie des nuisances occasionnées à la nature et à l’environnement. Le chemin a été difficile et «mouvementé» avant d’arriver à la création définitive du Park Am Gleisdreieck, car il a fallu prendre en compte les souhaits des différents acteurs intervenant dans sa définition, sa conception et sa mise en œuvre.
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Dans les années 1960, l’État fédéral accorde une participation limitée aux citoyens, lors de la définition de projets de rénovation. Plus tard, le gouvernement de Willy Brandt exige plus de démocratie au travers d’une plus grande transparence et d’une plus grande participation citoyenne, lors de la mise en place de projets de constructions publics et urbains. Cette nouvelle orientation politique est traduite dans la loi d’urbanisation de 1971. En 1980, dans les communes proches de Gleisdreieck, des initiatives citoyennes proposent des projets socioculturels. Ces projets sont reconnus et soutenus financièrement pour certains. Ils permettent l’acceptation progressive par les représentants politiques et l’administration de la participation citoyenne, accueillant ce foisonnement d’idées comme un élément bénéfique dans la politique paysagère. Mais ce n’est pas pour autant que la collaboration s’effectua sans heurts. En 1991, un rassemblement de différentes initiatives crée la IG Gleisdreieck qui porte plainte au tribunal administratif contre l’urbanisation de la Potsdamer et Leipziger Platz. Il conteste une surface trop petite du parc, offrant une sécurité insuffisante. Leur demande n’aboutira pas, ni leur plainte contre la construction d’un parking pour la Potsdamer et Leipziger Platz. Ce n’est qu’à partir de septembre 1997 que la participation citoyenne obtient davantage de reconnaissance. Pour la première fois l’administration du Sénat présente son concept pour l’évolution de la zone de Gleisdreieck. Il s’engage au développement d’un parc à Gleisdreieck « en reconnaissance de l’engagement inépuisable de toutes les initiatives citoyennes » et en promettant de les intégrer davantage dans le processus de planification. En juin 1999, le quartier de Kreuzberg présente un projet d’urbanisation de la zone âprement discuté entre les différentes initiatives. Quelques mois plus tard, pour faciliter l’organisation générale, l’ensemble des initiatives s’intéressant à Gleisdreieck - IG Gleisdreieck, der Kreuzberger Horn e.V., die BI-Westtangente, die Grünen Radler, der BUND, die Bürgerinitiative B 101, der Stadtteilverein Tiergarten Süd - se regroupe pour former une seule société d’intérêt : la AG Gleisdreieck. Ce nouveau regroupement présenta son propre concept de « jardins internationaux des
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cultures du monde »2 en démontrant que les quartiers de Kreuzberg et de Schöneberg avaient toujours été pauvres au niveau des espaces verts par rapport aux autres communes de Berlin. Ce rassemblement citoyen porte essentiellement son intérêt sur la défense des friches vertes. Ils se sont donc énormément confrontés et battus contre la Zwischennutzung3 (entre-deux usages) qui s’est installée sur la zone de Gleisdreieck à de nombreuses reprises. En effet pendant de nombreuses années, le hangar à locomotives de l’ancienne gare de marchandises a abrité un vendeur de ferraille. Pendant ce temps, un concessionnaire automobile enrichissait son business sur l’actuel zone du Flaschenhalspark. Durant l’été 2001, un restaurant et théâtre Pump Duck and Circumstance Gmbh s’est installé sur la parcelle du côté de la Möckernstraβe pendant une période de seize mois. Enfin, un investisseur a voulu installer la plus grande roue du monde à côté du musée technique. Cette idée a fait l’objet d’un rejet unanime de l’AG Gleisdreieck, des représentants politiques et du musée. Le projet a été abandonné. En 2006, la AG Gleisdreieck propose un nouveau concept pour le parc. A partir de la question : « Qu’est-ce qu’un nouveau parc au XXIème siècle ? Est-ce une prairie homogène pour 300 000 habitants ? Ou un cadeau de l’État aux citoyens, entretenu par une administration responsable des espaces verts ? ».4 Toutes les démarches mises en oeuvre auparavant pour les autres parcs à Berlin n’étaient pas adéquates pour ce futur espace vert. L’association mène ainsi une réflexion sur un nouveau concept d’organisation. Sa préconisation sera basée sur un paysage diversifié, dans lequel la nature sauvage sera préservée ainsi que les éléments historiques. Elle propose de compléter la diversité écologique présente par une diversité culturelle des jardins, des interventions artistiques, etc. 2‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und
Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013. 3‑ Terme tiré de: LANGE Bastian,Urban pionneers: Berlin: Stadtentwicklung durch Zwischennutzung = Temporary use and urban development in Berlin , collectivité-auteur : Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, Editeur Jovis, 2007. 4‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
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Afin que les citoyens prennent conscience de leur rôle et responsabilité dans la préservation et l’entretien du parc, elle préconise d’organiser des îlots verts qui soient gérés par les utilisateurs et qui soient en connexion avec les autres espaces du parc. Cette participation ne doit pas remplacer l’entretien des espaces verts mais le compléter de manière coopérative. Elle les appellera plus tard les Naturräumen qui signifie : « espaces naturels ». Le 20 mars 2005, le parc ouvre ses portes provisoirement et accueille plusieurs centaines de personnes. Quelques semaines plus tard, des activistes investissent les lieux de manière provisoire et installent des petites parcelles de jardins au bord du mur qui délimite la zone avec la Möckernstraβe. Cette zone inspire également des artistes : un atelier de sculpture s’organise une fois par semaine et une canadienne crée un galerie d’herbes sauvages. Ainsi l’appropriation de la friche par les habitants prend désormais des formes concrètes. Pendant que naissent ces interventions temporaires, un concours d’idées se met en place pour le futur Park Am Gleisdreieck. Dans le processus de développement du projet, la participation citoyenne a été un facteur important d’avancement et d’amélioration. Mais cette interaction avec le public ne s’est pas faite sans la propagation d’informations. Les résidents proches de Gleisdreieck ont été informés et leurs avis ont été recueillis au travers de diverses interventions : un sondage auprès des citoyens représentant le quartier, un site Internet avec de nombreuses explications sur la zone et la possibilité de laisser des commentaires, des promenades « guidées » pour explorer la friche, des réunions publiques pour présenter l’avancement de la conception du projet, et pour finir un week-end d’échanges entre les citoyens et les onze bureaux finalistes sélectionnés pour se présenter à l’étape finale. La population des quartiers aux alentours de Gleisdreieck est très diversifiée. A l’Est, on trouve de nombreux jeunes diplômés et à l’Ouest du parc, dans le quartier de Schöneberg se concentrent de nombreux migrants de la troisième génération avec une proportion importante de jeunes. La part des étrangers représente 34% de la population dans ce quartier et le nombre de personnes au chômage ou bénéficiant d’une aide sociale est plus important que dans d’autres quartiers de la ville. 57
Pour connaître les besoins de cette population, le Sénat a mené une enquête auprès des résidents proches du parc, dans un rayon maximum à vingt minutes de marche du parc. Pour informer les futurs voisins de l’espace vert, des dépliants ont été distribués en Allemand, en Turque et en Arabe. Le sondage montre que 50% des personnes ne savaient pas qu’un parc allait être construit, certains même ne connaissaient pas le site. L’enquête a mis en lumière la difficulté de communication et d’information de la population et permis de l’amoindrir. Durant l’expertise du site, deux groupes d’intérêt sont nés présentant des envies pour le moins contradictoires. Un des groupes prônait un parc avec une nature calme et paisible, l’autre demandait un parc dynamique et animé avec des activités variées pour tous. Ces attitudes différentes se sont reflétées dans l’énonciation de thèmes éloignés et ceci a eu pour conséquence, l’apparition d’une vision d’un « parc à deux vitesses »5 (Park der zwei Geschwindigkeiten). La démarche adoptée par le Sénat, d’intégrer largement les citoyens dans la conception et construction du futur espace vert a été parfois compliquée mais a été d’un grand bénéfice pour connaître les souhaits et les besoins de chacun. Ceci a permis de construire un parc, pas seulement pour avoir du « vert » dans la ville, mais un lieu de vie et de rencontre entre citoyens pour se divertir, se relaxer et faire du sport.
5‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
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2) Concours lancé pour l’aménagement d’un parc
Une des exigences importantes posée par les autorités était de prendre en compte les souhaits et les besoins énoncés par les futurs utilisateurs du parc. Face à une zone morcelée en plusieurs parties par les voies de chemin de fer et la route, il était aussi important que le parc fonctionne dans un système global. Les voies de transport présentes sur le site ne devaient pas faire office de limites, de barrières entre les différents terrains. Le parc devait également répondre aux besoins divers de chaque habitant. Il était demandé de conserver le caractère de « plateau » du site et de relier le parc à la « structure verte » de Berlin, ainsi que d’assurer les liaisons entre les différents quartiers limitrophes afin de supprimer les barrières existantes. D’autres exigences ont été posées comme : la prise en compte des bâtiments historiques et des éléments ferroviaires, la création d’atmosphères variées pour satisfaire les besoins multiples des utilisateurs et répondre à la capacité d’adaptation pour une progression future. Au total, 86 bureaux d’architectes et urbanistes ont soumis leur projet de manière anonyme. En 2006, à Munich, onze projets ont été sélectionnés à leur étape d’esquisse, après analyse des propositions par un jury, sous la direction de l’architecte suisse Christophe Girot. Ces esquisses ont ensuite été présentées à maintes reprises au public et notamment lors du weekend du 29 et 30 avril 2006, où les travaux sélectionnés ont été exposés. Les urbanistes et architectes étaient présents et répondaient aux questions posées par les citoyens. Après cette présentation officielle, le jury, composé de neuf personnes, a donné des recommandations à suivre pour chaque participation afin d’améliorer les esquisses, le but étant de pouvoir départager les projets et d’élire un vainqueur lors du « deuxième tour ». En parallèle, des forums de discussion se sont organisés sur des thèmes spécifiques comme par exemple : les accès et leur mise en valeur, l’intégration d’espaces de loisirs, l’avenir des Kleingärten (petits jardins). Tous ces éléments ont donné de la matière aux architectes et urbanistes pour retravailler leur projet.
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Depuis les années 70, une initiative des citoyens se bat pour préserver le biotope de cette nature incroyable laissée à l’abandon. Il a fallu 25 années de discussions sur ce parc pour arriver au parc d’aujourd’hui. C’est un lieu spécial où plusieurs histoires se rencontrent et qui représente beaucoup de souvenirs pour la population. Ce parc à Berlin possède une histoire tout à fait particulière. Jamais auparavant, les citoyens se sont investis avec une telle énergie pour la planification d’un espace urbain. Il y a eu un énorme engouement de la part de la population qui a proposé de nombreuses idées. Bien entendu, cela s’est accompagné de discussions difficiles et de compromis. Plus le nombre d’intéressés est grand, plus les idées se mêlent et il devient difficile de satisfaire chacun. C’était l’un des enjeux de ce projet où plusieurs acteurs ont participé à son développement : • Die Senatsverwaltung für Stadtentwicklung und Umwelt (le sénat pour le développement urbain et l’environnement), • La commune de Friedrichsain-Kreuzberg, • La commune de Tempelhof-Schöneberg, • Les nombreux bureaux d’urbanisme et d’architecture participants au concours, • la société Grün Berlin, futur gestionnaire du parc • des organisations citoyennes Le Sénat de Berlin avait en charge la mise en œuvre du projet, sa planification et la gestion du budget. Il était responsable de gérer les lignes directrices. Les architectes s’occupaient du design du parc. Quant aux citoyens, ils voulaient faire valoir leurs idées. Enfin Grün Berlin devait régler les problèmes relatifs au lieu et superviser Gleisdreieck comme projet officiel de la ville, de la conception jusqu’à la construction. Cette société à but non lucratif a été fondée en 1980 suite à la prise en compte d’un double challenge : « celui d’espaces verts uniques à Berlin et de finances limitées »6 dans la capitale appauvrie. Ainsi beaucoup d’intérêts personnels se sont mêlés au travers des différents groupes de travaux, ce qui a amené à de nombreuses solutions 6‑ Extrait de l’article: « Wild Berlin » : dans Landscape Architecture Magazine, Mars 2014.
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de compromis, avec une conduite de projet longue et difficile. Malgré ces difficultés, le travail d’équipe n’a jamais été stoppé. Jusqu’à l’ouverture du Westpark, pas moins de 70 réunions de rassemblement ont eu lieu. Cette participation pluridisciplinaire a été totalement nouvelle, mais toutes les critiques et conseils ont permis d’améliorer et d’enrichir l’aménagement du parc. La participation citoyenne est un « fondement solide »7 (solides Fundament) de ce projet. La construction du parc s’est organisée en trois temps. Après l’aménagement du Ostpark s’est ensuivi l’ouverture du Westpark. Mais la construction ne s’est pas arrêtée là, le Flaschenhalspark a été inauguré en 2014. Il relie désormais le centre de ville avec le Sud, grâce au parc NordSüd-Grünzug qui est actuellement en phase de finalisation. L’aménagement de voies piétonnes et cyclables termine le processus d’une tangente NordSud dans la ville.
7‑ Extrait de: WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
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3) Concept mis en œuvre et analyse du processus pour la réalisation du parc En prévision du deuxième tour, le jury a proposé aux architectes et urbanistes d’approfondir leur projet sur certaines réflexions. Il leur a été vivement conseillé de faire évoluer leur projet pour intégrer de manière parfaitement claire ce caractère de parc « à deux vitesses ». Le rapport entre les nouveaux éléments contemporains avec l’histoire du site et la végétation déjà existante fut aussi un des objectifs importants à respecter. Le dernier point spécifié impliquait la nécessité de créer une connexion entre les différentes parties du parc, séparées jusque là par des voies de trains. A l’issue de ce deuxième tour, trois prix ont été attribués. Le troisième prix a été assigné au bureau GROSS.MAX., qui a trouvé dans le site de Gleisdreieck, l’image d’un cœur. Dans cette comparaison, les lignes de chemin de fer qui traversent le site, représentent l’aorte. La structure du parc était faite de jardins, de forêts et de prairies urbaines. Leur concept a été retenu par sa démarche atténuant les oppositions et les irrégularités du site sans pour autant les renier. Ce projet a reçu des applaudissements pour son côté créatif, mais de l’avis des membres du jury le concept était difficile à transposer à la réalité. Le bureau hutterreimann + cejka a remporté le deuxième prix. Ils ont proposé une vision romantique du lieu, en créant des boulevards, des forêts et des prairies tout en conservant le caractère ferroviaire. L’élégance et la légèreté de leur travail a séduit mais certains éléments semblaient trop gracieux et poétiques pour le lieu. C’est donc le bureau d’architecture du paysage berlinois Loidl qui a remporté le concours avec son concept de parc flexible mais tout en comportant un cadre de base clair composé avec de larges chemins et d’espaces de végétation. Le jury a apprécié les différents paysages présents dans le projet permettant ainsi de se projeter dans différentes atmosphères selon les usages de chacun. Les architectes ont proposé de grandes surfaces vertes pour des activités sportives et des endroits paisibles pour se reposer. Les possibilités d’utilisation proposées répondaient très 62
clairement à ce caractère de parc « à deux vitesses » souhaité. Le réseau des chemins permet de connecter les quartiers rapidement tout en offrant la possibilité de se promener en toute quiétude. L’idée principale adoptée par les architectes, « La pause verte dans la ville », a trouvé beaucoup de partisans. Ce concept a été salué par la possibilité des « futurs ». En effet ce concept laisse la « porte ouverte » à des probables modifications dans la construction urbaine. Lors d’interviews de Leonard Grosch, Bernd Joosten, Andreas Lipp et Felix Schwarz8, les architectes concepteurs du Park am Gleisdreieck du bureau Loidl ont expliqué d’où provenaient les idées pour la conception du parc. D’après eux le site possédait des caractéristiques importantes à prendre en compte, comme la présence d’une ancienne gare de marchandises, la végétation dense et la différence de niveau entre le site et les quartiers adjacents. A ces caractéristiques intrinsèques du parc, les architectes ont décidé d’ajouter une composante identitaire complémentaire à l’ensemble. Pour cela, ils ont travaillé l’organisation des espaces verts, les accès, les déplacements à l’intérieur du site et le type de matériaux à utiliser dans le contexte ferroviaire préexistant. Ces différents aspects ont été déclinés de manière similaire dans chaque partie du parc. Les spécificités de chaque zone, pour leur part, n’ont pas été gommées, mais mises à profit pour particulariser leur usage. Westpark valorise son accessibilité vers la ville par sa proximité avec la Potsdamer Platz et ses stations de métro. Ostpark assure son ouverture à l’échelle du quartier par des forêts, d’anciens rails de chemin de fer et une grande plaine centrale ouverte, accessible par de nombreuses rues de Kreuzberg. Quant à Flaschenhalspark, il confirme son caractère de parc de liaison. La méthode adoptée pour aménager le parc s’est voulue différente de celle des autres parcs construits auparavant dans la ville. Les besoins des utilisateurs étant diversifiés leur objectif a été de juxtaposer intimité et espaces ouverts. Une structure claire a été conçue pour lier tous les éléments et ainsi donner aux usagers un cadre dans lequel les différents composants ont été intégrés. Le réseau de route a donc été un enjeu 8‑ Interviews extraites du livre: LICHTENSTEIN Andra et MAMELI Flavia Alice, Gleisdreieck/ Parklife Berlin, Berlin, transcript Verlag, 2015.
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majeur pour les déplacements d’un endroit à l’autre. En plus de satisfaire les besoins et les souhaits des résidents, ils ont voulu que ce parc attire d’autres visiteurs et rayonne sur une grande superficie de la ville. Quant à l’impact de la participation citoyenne dans le processus, le bureau Loidl reste circonspect. Il n’était pas préalablement informé qu’elle interviendrait de la phase conceptuelle jusqu’à la fin de la construction, aucune règle n’avait été établie. Dans leur esprit, la participation citoyenne cesserait une fois le concours remporté. Mais le déroulement a été différent. Loidl affirme que le processus a été difficile pour chacune des parties prenantes avec de nombreuses discussions et critiques. Deux phases distinctes au niveau de la participation citoyenne peuvent être identifiées. Au début, chaque citoyen était heureux de pouvoir donner son avis sur Gleisdreieck et proposer des idées. Une fois le vainqueur du concours désigné, seul un petit groupe de citoyens a continué à s’investir dans le projet en formulant des demandes répondant à des intérêts personnels. Une majorité de citoyens voulait garder l’état du terrain tel quel, en ne touchant pas à la végétation existante. Judicieusement, l’organisation Grün Berlin GmbH a réussi à jouer un « double rôle »9 de client et de médiateur. Face à une telle ampleur de participation citoyenne, le cabinet Loidl estime qu’une meilleure organisation aurait été nécessaire. « Mais comment organiser cela, quels sujets à mettre en discussion et comment aboutir à des décisions? Est-ce les architectes, le client, un certain nombre de citoyens avec des intérêts individuels qui décident ou ce devrait être une résolution à la majorité ?»10 Pendant un long moment des efforts ont été faits pour atteindre des accords au travers des échanges. Mais un gros conflit est apparu à plusieurs reprises entre les citoyens et les architectes. Les résidents souhaitaient mettre la nature et les éléments existants du site au centre de toutes les attentions et relayer les autres points de conception au second plan. Cette vision était bien divergente de celle des architectes qui n’ont jamais perçu cette modernité comme une rivalité avec l’ancien, mais plutôt comme l’addition d’une nouvelle identité en coexistence avec les traces du passé.
9‑ Extrait du livre: LICHTENSTEIN Andra et MAMELI Flavia Alice, Gleisdreieck/Parklife Berlin, Berlin, transcript Verlag, 2015. 10‑ voir ci-dessus (cf.9).
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Cette démarche d’intégrer les initiatives citoyennes tout au long du processus depuis la conception jusqu’à la construction a sans aucun doute enrichi le projet du parc. Il est très certainement un élément clé de sa réussite et de sa bonne acceptation par une majorité de la population. Les résidents ont apporté une dimension plus « réelle » par leur collaboration. Ils étaient les mieux à même de savoir quels étaient leurs besoins vis-à-vis de leurs usages dans un parc. Leurs propositions constructives ont eu un grand impact sur l’état actuel du parc. Ce procédé de participation a eu une dimension unique à Berlin. C’est la première fois qu’autant de citoyens se sont battus pour conserver un terrain et ont été à ce point inclus dans le processus de requalification. Il s’agissait donc d’un projet « pilote » pour tous ceux qui ont participé à son aboutissement. C’était une terre jusquelà inconnue pour tous les groupes de travaux. Au final pour Gleisdreieck, ce qui satisfait l’ensemble des acteurs du projet, c’est l’accueil fait par la population au parc. Cette mise en œuvre d’un projet, avec une large consultation citoyenne montre de manière claire, la nécessité préalable de préciser les règles retenues pour intégrer les propositions qui en émanent aux différents stades du processus. Le niveau d’autonomie du cabinet d’architecture entre l’esquisse, le projet sélectionné et le plan final se doit d’être précisé, avec une clarification des circuits décisionnels.
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http://www.german-architects.com/ de/projects/48297_Park_am_Gleisdreieck
Documents présentés par le bureau d’architecture Loidl lors du concours lancé par la ville en 2005 pour le parc de Gleisdreieck
http://www.stadtentwicklung.berlin.de/pix/pressetool/wettbewerbe/
http://www.stadtentwicklung.berlin.de/aktuell/wettbewerbe/ergebnisse/2006/gleisdreieck/1_preis.shtml
〕 IV‑ Park am Gleisdreieck : son impact dans la ville contemporaine
Photo ci-avant: http://www.uncubemagazine.com/blog/10113415
Désormais le parc est achevé depuis environ un an et accueille chaque jour de nombreux visiteurs. « C’est le nouveau parc tendance à Berlin » d’après les propos d’une amie qui vit là-bas. Mais quelles sont ses caractéristiques qui attirent tant de monde ? Fonctionne-t-il si bien ou présente-t-il des défauts cachés ?
1) Le parc et ses activités actuelles Au vu des nombreuses observations que j’ai pu faire, le parc de Gleisdreieck est peu commun et spécifique. Ce qui a attiré mon attention en premier lieu, c’est son intégration dans la ville. A la lecture du plan, les limites ne semblent pas définies et n’arborent pas la structure d’un parc habituel. Il ne s’agit pas d’une grande étendue claire comme par exemple Tempelhof. Ici, le vert s’immisce entre les bâtiments et s’étend de manière totalement aléatoire. Le parc «s’éparpille» de manière irrégulière et la coexistence avec d’autres éléments comme le Technisches Museum et les lignes de trains alimentent cette division de l’espace. Le parc de Gleisdreieck est ainsi composé par trois parties: une première étendue, Ostpark, inaugurée en 2011, suivie par la construction du Westpark ouvert en 2013 et enfin Flaschenhalspark qui s’est achevé en mars 2014. Le parc est bordé par trois quartiers importants de Berlin : Tiergarten, Schöneberg et Kreuzberg. Il se trouve aussi à proximité du quartier central de la ville, Mitte. Auparavant la friche de Gleisdreieck constituait une barrière entre ces différents quartiers, mais aujourd’hui, elle permet de les connecter rapidement grâce à son réseau de voies piétonnes et cyclables et ses nombreux points d’accès. Mitte, le cœur historique, touristique et politique de la ville, communique avec le reste de la métropole grâce à de nombreuses lignes de U et S-Bahn ainsi que des bus et trams. C’est ici qu’il faut se rendre pour visiter les musées tels que le Pergamon Museum, le Bode Museum,… 71
ou encore déambuler dans l’Avenue « des Champs Elysés berlinois », la Unter den Linden. Ce long boulevard relie deux points très attractifs dans la ville : l’Alexanderplatz et le Brandenburger Tor. Le premier est plutôt d’ordre économique tandis que le deuxième est définitivement d’ordre politique. En effet, ce dernier regroupe les institutions politiques comme le Reichstag, le Sénat (Bundesrat), la chancellerie (Kanzlei) ainsi que les ambassades. L’arrondissement comprend aussi le plus vaste et populaire parc de Berlin, le Tiergarten. En se dirigeant vers le Sud de le Brandenburger Tor, on rejoint la Potsdamer Platz, également un point névralgique dans la ville. Schöneberg est quant à lui un quartier d’habitation appartenant au district de Tempelhof-Schöneberg. Avant la réunification, il faisait partie de Berlin-Ouest. Il est connu pour être le quartier gay de la ville. La population qui habite dans ce quartier est jeune et accueille de nombreux immigrés. Vient ensuite le quartier de Kreuzberg, l’un des plus en vogue à Berlin. Il fait partie de l’arrondissement de Friedrichshain-Kreuzberg depuis 2001. Malgré une gentrification avec la croissance de bars à la mode et de lofts de luxe, Kreuzberg accueille beaucoup de familles de migrants, issues notamment de la communauté turque. Une grande partie du quartier est caractérisée par de hautes tours d’habitation des années 1970, même si elles s’effacent quelque peu au niveau de la Mehringplatz pour laisser la place à de beaux bâtiments anciens. Les différences culturelles des habitants associées à un faible revenu ont favorisé les conflits. Le quartier attire aussi de nombreux étudiants avec de nombreuses soirées animées. Désormais le parc lie tous ces lieux d’intérêts divers et assure une connexion des quartiers d’habitation vers les zones commerciales et culturelles. Cette liaison est effective par une multitude d’accès via le Park am Gleisdreieck. Après avoir parcouru le parc à plusieurs reprises, j’ai distingué deux types d’accès. Certains assurent une connectivité à l’échelle de la ville, quant aux autres, ils permettent une liaison de proximité, c’est-à-dire une connexion directe avec les habitants environnants. Le U et S-Bahn 72
assurent également le bon fonctionnement au niveau de la mobilité. Afin de percevoir clairement tous ses accès et leur intégration dans l’espace, j’ai établi un inventaire en effectuant une analyse pour chaque partie du parc. Commençons par le Westpark qui semble pouvoir fonctionner en tant qu’entité unique. Il présente un accès au Nord dans le prolongement du parc de la Potsdamer Platz. Je le qualifierais d’accès « principal » de par sa configuration. En effet, la perspective est ouverte vers toute l’étendue du parc, laissant percevoir l’ensemble du paysage de verdure et d’immeubles d’habitation. En progressant dans le parc, plusieurs allées séparent les nouveaux îlots d’habitation et revêtent un caractère plus secondaire. Il en existe quatre qui proviennent de Lützowstraβe, Pohlstraβe, Kurfürstenstraβe et Bülowstraβe. A l’est, l’accès s’effectue via une petite route en macadam encore en travaux qui s’engage dès la sortie de l’arrêt de métro « Gleisdreieck ». L’entrée au Sud par la Yorckstraβe est très bien desservie grâce à des arrêts de U et S-Bahn. Cet accès, pour arriver dans le parc, débute dans le parking d’une grande surface de bricolage. Ce n’est donc pas très attrayant. Il n’est pas très visible et difficile à repérer malgré la petite pancarte indiquant : « Zugang Westpark » (accès Westpark). De plus, après s’être engagé sur le chemin bétonné, on traverse une zone mal entretenue qui longe la voie ferrée. Les autres entrées du parc étant intégrées avec soin dans le paysage, celle-ci est décevante et clairement une « mauvaise entrée en matière ». Une fois franchie cette zone qui semble en suspens, le paysage se dégage et ouvre la perspective vers de grandes étendues vertes embellies par les bâtiments de la Potsdamer Platz en arrière-plan. Parvenu dans Westpark, la connexion avec Ostpark a été un des points clés lors de la conception du projet. Le terrain coupé par plusieurs voies de chemin de fer, se devait d’intégrer ces éléments dans le paysage du parc sans en faire une barrière. Le bureau Loidl a planifié habilement une route bétonnée rythmée par un mur en acier et béton, investi par les tags au fil du temps, et par des entrepôts réhabilités le long de la voie ferrée. Malgré le bruit des trains régionaux et des métros, le parcours est 73
varié et nous emmène à Ostpark en se continuant vers Flaschenhalspark. En provenant du quartier de Kreuzberg, Ostpark est accessible par plusieurs entrées le long du mur de la Möckernstraβe. Les passages vers le lieu public s’organisent par le biais de rampes ou d’escaliers permettant l’accessibilité à tous types d’usagers. Le tracé le plus clair est très certainement celui situé au niveau de Hornstraβe. Un autre accès principal se matérialise plus au Nord au croisement du Landwehrkanal avec la Möckernstraβe,qui débute sur une entrée de parking. Au niveau de la Yorckstraβe, deux grandes rampes d’accès desservent de part et d’autre de la route Flaschenhalspark et Ostpark. Il s’agit là de l’entrée principale du Flaschenhalspark, desservi uniquement au Nord et au Sud. D’un côté il est bordé par les voies de train en service et de l’autre par les anciens rails de Anhalter Bahnhof. Le parcours depuis la Yorckstraβe se termine par une place de jeux qui débouche sur la Monumentenstraβe. La connexion du parc avec la ville s’organise de manière claire et selon une multitude de points de sorties/entrées. Les liaisons entre Est/Ouest et Nord/Sud sont assurées et ceci grâce à la bonne liaison entre chaque partie du Park am Gleisdreieck. Imaginons que le Flaschenhalspark fonctionne de manière indépendante, ceci mettrait à mal le bon fonctionnement de cet espace vert et ne permettrait plus la liaison vers des points d’attractivité. Ainsi chaque entité est importante et ne peut fonctionner sans l’autre. Le parc de Gleisdreieck n’est pas un parc contemporain habituel. En évoquant son premier principe pour la construction d’un espace vert, lors du 33ème conseil des villes en 1910 dans le Brandebourg, Ludwig Lesser disait: « un parc public peut seulement être décrit comme un "Parc du peuple", en contraste avec la plupart des parcs publics, lorsqu’il ne sert pas seulement occasionnellement pour des promenades, mais fournit aussi assez d’espaces et d’opportunités pour un grand nombre de personnes 74
provenant de divers milieux sociaux. Pour profiter d’espaces de plein air tout au long de l’année, pour le plaisir de faire du sport et jouer aussi bien que se relaxer ou contempler.» Gleisdreieck a été construit sur ce type de modèle. Il n’est pas aménagé avec une simple étendue verte sur laquelle les usagers peuvent venir s’asseoir. La participation active des citoyens durant tout le processus d’élaboration a permis d’arriver à un ensemble cohérent, répondant aux besoins réels des habitants proches de la zone. « Berlin était et continue d’être un endroit idéal pour les volontaires, les riverains et les actes spontanés qui augmentent à une échelle sans précédent »1 dans des lieux ouverts à l’abandon par suite des conditions économiques et politiques difficiles d’Après-Guerre. Gleisdreieck a été attentivement étudié et détaillé par l’atelier Loidl pour éviter toute confusion sur « où marcher, où jouer, où faire du vélo et où se détendre ». Le premier parc a été ouvert en 2011, et s’étend sur une plus grande surface que les autres parcs. Il est limité au Nord par le Landwehrkanal et le Deutsches Technikmuseum, à l’Est par le mur le long de la Möckernstraβe, et au Sud par la Yorckstraβe. Si on considère Ostpark comme une seule entité, il revêt un caractère de parc de quartier et ne s’ouvre pas vers la ville comme Westpark. Tout seul, il n’aurait pas pris une telle envergure et aurait accueilli globalement la population de Kreuzberg. Dans cette partie du parc la végétation est alternée entre grandes plaines et bosquets. Les plaines de jeux se concentrent essentiellement à l’entrée du parc en provenant de Hornstraβe. Un kiosque, des tables de ping-pong, des jeux pour enfants sont installés dès l’entrée dans l’espace vert. Devant ces éléments s’offre un paysage de prairie au premier plan sublimé par une forêt en arrière-plan. Cette prairie de Kreuzberg (Kreuzberger Wiese) offre le cadre parfait pour se détendre et se relaxer loin du bruit de la grande ville. La surface est telle que chaque usager peut profiter en toute quiétude de son périmètre, sans le dérangement des autres utilisateurs. En continuant sur le Generalszug, de longs bancs et gradins sont aménagés comme des plates-formes d’observation tournées vers le paysage dégagé. Ostpark est structuré par des chemins, en béton coloré ou en asphalte, ponctués par des aires de 1‑ Extrait de l’article: « Wild Berlin » : dans Landscape Architecture Magazine, Mars 2014.
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jeux personnalisées. Mais le caractère tracé et quelque peu réglementé des chemins, ainsi que la planéité du site, ne laisse que peu de place pour le mystère et la surprise. L’histoire fait également son apparition avec la présence d’une ligne de chemin de fer qui traverse le parc du Nord au Sud. Le Museumzug (train historique) quitte le hall d’exposition du musée et circule sur le rail conservé, chaque dimanche de septembre, pour rejoindre le dépôt du musée situé près de la Monumentenstraβe. En continuant son chemin sur le Generalszug, on découvre, cachées derrière les arbres, d’anciennes fosses de maintenance pour les trains. Elles ont été coupées en deux par le chemin bétonné mais sont toujours présentes. En atteignant la ligne de train où passe le S-Bahn et les trains nationaux, un carrefour d’activités s’organise avec un skatepark, un terrain de basketball et de football. Une ancienne tour d’aiguillage réhabilitée est également présente et accueille les gestionnaires du parc, ainsi qu’une buvette. L’atmosphère est différente de Kreuzberger Wiese, désormais c’est un lieu de flux et de croisements rythmé par le bruit constant du passage des trains. A partir de là, il est possible de bifurquer à gauche pour rejoindre Flaschenhalspark ou à droite en direction de Westpark. Ostpark propose aussi une Naturraum (zone naturelle) qui renferme une nature sauvage et le jardin interculturel Rosenduft. Il est regrettable cependant que ces zones « naturelles » soient entourées de grillages donnant à ces espaces une allure un peu trop réglementée et un caractère « d’exposition » pour cette nature sauvage. D’autant plus que chaque espace proposé est présenté par une pancarte comme dans un musée qui expliquerait son existence mais aussi ce que l’on peut ou ne peut pas faire ! Westpark, est moins défini que Ostpark mais présente aussi différentes aires de jeux, situées au niveau des entrées. En effet, accueillir les visiteurs du parc par un espace de jeux était l’un des critères énoncé par les architectes du bureau Loidl. Ainsi en venant de la Potsdamer Platz, le parc nous accueille par une zone aménagée pour les skateurs. L’entrée 76
située au niveau de l’arrêt de U-Bahn présente une surface en caoutchouc aménagée en terrain ludique avec des trampolines, un panier de basket, etc. ou encore des tables de ping-pong, des éléments de fitness en plein air et une aire de jeux pour les enfants, située à l’entrée de Kurfürstenstraβe. Westpark, ouvert en 2013, additionne des éléments de manière intensive sur un espace plus petit que Ostpark, au travers d’une circulation structurée. La notion d’observation est aussi présente dans cette partie du parc, avec l’installation d’escaliers en bois le long du chemin central. L’espace est propice à la récréation et à la discussion, avec de grandes étendues de pelouse qui sont investies par des groupes d’amis. Des terrains de beachvolley sont également intégrés au parc. Le club Beach 61 existait déjà avant l’aménagement et offre aujourd’hui « une belle perspective sur les prairies de Schöneberg et son célèbre gazomètre .»2 En progressant vers le Sud du parc, on découvre une atmosphère plus intime et verdoyante. Un chemin nous emmène vers la Kleingärtenkolonie POG qui sont des parcelles de jardins privés typiques de l’agriculture urbaine en Allemagne. En progressant sur le sentier, l’image de la ville s’efface peu à peu pour laisser la place à des jardins fruitiers ou des potagers organisés autour de petites maisonnettes. Leur sauvegarde étant menacée durant la planification du projet, les propriétaires se sont battus pour garder leur parcelle de verdure3 et sont arrivés à un compromis avec les architectes. Ces jardins privatifs entrecoupés de petits sentiers apportent une atmosphère plus intimiste et sereine au Westpark. Celui-ci, tourné vers la ville et avec une concentration d’activités, lui confère avant tout un caractère dynamique et communautaire. La dernière partie du parc a été ouverte au public en mars 2014 et s’étend sur une moindre surface que Ost- et Westpark. Il s’agit du Park im Flaschenhals qui est accessible depuis Ostpark par un pont qui surplombe Yorckstraβe. Ce nouveau parc revêt un caractère différent des autres, il assure avant tout une fonction de liaison. Même s’il propose une 2‑ Extrait du site internet: http://www.berlin-en-ligne.com/visite/parcs-jardins/park-am-gleisdreieck. html 3‑ cf.annexes: Interview avec un membre du Kleingärtenkolonie POG.
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aire de jeux et un terrain de basket à son point d’entrée au niveau de la Monumentenstraβe, il n’assume pas un rôle de parc récréatif. Dans ce lieu, ce sont les vestiges de l’ancienne activité ferroviaire et la nature sauvage qui prédominent. L’ambiance n’est pas propice pour s’arrêter et contempler le paysage, mais plutôt un lieu de passage qui termine la jonction entre le Park am Gleisdreieck et l’axe Nord-Sud avec le parc Nord-Süd-Grünzug.
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2) Vivre à Gleisdreieck : enjeux et impacts Le parc de Gleisdreieck étant aujourd’hui terminé, il est donc pragmatique de s’intéresser aux enjeux et impacts qu’a généré le lieu dans une approche typologique, écologique et socio-économique. Grâce à l’ouverture du Park Am Gleisdreieck, une grande étape a été menée concernant l’aboutissement de l’ensemble des connexions des espaces verts à Berlin. Intégré dans ce processus de finalisation d’une « coulée verte » dans la ville, le parc termine cette relation entre l’Est et l’Ouest avec le Volkspark Hasenheide, le Tempelhofer Feld, le Viktoria Park, le Cheruskerpark, l’Heinrich-Lassen-Park/Rudolph-Wilde-Park et enfin le Volspark Wilmesdorf. Ce chemin vert à l’intérieur de la ville est une vieille idée que Peter Jospeh Lenné avait exposée, mais non réalisée à cause de l’arrivée de la guerre. Plus tard, la ville a repris ce projet ambitieux dans le programme d’urbanisation à Berlin qui avait imaginé un réseau de seize parcs et d’espaces verts pour améliorer le climat urbain et augmenter la qualité de vie. Beaucoup de ces parcs sont nés en compensation de toutes les constructions massives engendrées dans la ville après la réunification. Terrain en friche depuis des années, Gleisdreieck devient un point central et l’intérêt de sa revalorisation, lors de la construction de la Potsdamer et Leipziger Platz, suscita un consensus. La zone a été intégrée dans les mesures compensatoires en tant que « zone protégée de la nature » ce qui a permis aux services publics de conserver le site en tant qu’espace public. Le parc assure désormais une liaison verte Nord-Sud. Au Nord, il assure une liaison dynamique avec les parcs de la Potsdamer Platz et le Tiergarten. Au Sud, il est le lien entre le centre ville et le quartier de la gare de Schöneberg-Südkreuz assurant le prolongement avec le HansBaluschek-Park, le Natur-Park Schöneberger Südgelände et l’Insulaner. Le Flaschenhalspark en connexion avec le parc Nord-Süd-Grünzug permet 79
de relier Berlin à Leipzig et Dresden grâce à une piste cyclable. Gleisdreieck répond aux enjeux écologiques en conservant une nature diversifiée et en permettant d’apporter de la fraicheur à la ville. Cet air frais véhiculé le long des voies de chemin de fer à partir de la périphérie permet d’évacuer en partie l’air chaud chargé de pollution et de favoriser le climat dans la ville dense. Au niveau typologique, il assure une alternance entre paysage et bâti, et garantit de nombreuses liaisons entre différents points de la ville. Parmi « les couches d’histoire et d’utilisation »4, Gleisdreieck se développe comme un ensemble de plusieurs « pièces » qui a rapidement connu un grand succès « en terme de nombres de visiteurs, et de réponse critique positive »5. La question de l’entretien des espaces publics est un point difficile dans la majorité des villes et particulièrement à Berlin où la contrainte économique s’est intensifiée après les changements d’Après-Guerre et de la réunification. Même si le célèbre Tiergarten est relativement bien entretenu du fait de sa renommée, ce suivi n’est pas obligatoirement appliqué pour les autres parcs de Berlin. Beaucoup craignaient que Gleisdreieck s’ajoute à la liste des parcs « délabrés » et perde donc tout intérêt. C’est la société publique Grün Berlin, qui a été chargée de la gestion et de l’entretien du parc, car les communes n’en n’avaient pas les moyens. D’après les propos rapportés de Leonard Grosch, architecte chez Loidl: « Les quartiers adjacents n’ont pas prévu d’ajouter du personnel et maintenir Gleisdreieck par eux-mêmes. Ils luttent déjà pour maintenir ce qu’ils ont maintenant et Gleisdreieck aurait encore ajouté 20 hectares à cela ! »6. Grün Berlin assure donc cette fonction et bien plus encore puisqu’elle fournit des fonds pour les modifications et améliorations du parc. Au début du processus, 200 000 euros ont été réservés pour répondre à tout changement futur. Ces fonds d’après-construction permettent une approche plus flexible et diminue les contraintes de temps pendant la conception et la construction. 4‑ Extrait de l’article: « Wild Berlin » : dans Landscape Architecture Magazine, Mars 2014. 5‑ voir ci-dessus (cf.5) 6‑ voir ci-dessus (cf.5)
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Cette entité publique organise aussi le développement de nouveaux espaces publics et développe des opportunités et des partenariats. C’est une société qui attire et elle a su tirer parti de cette image de marque pour obtenir des financements. Ce n’est donc pas un hasard, si le parc de Gleisdreieck agit comme « un catalyseur pour les investissements et les développements dans les zones adjacentes »7 où s’organisent la construction de nouveaux complexes d’habitation et la rénovation d’anciennes bâtisses. Devant cet engouement pour le plus jeune parc de Berlin, populaire et multifonctionnel et qui semble avoir peu de barrières sociales, il convient de garder un avis critique au vu des premiers changements qui s’opèrent dans les quartiers adjacents. L’apparition du parc a engendré une revalorisation de la zone attirant les investisseurs. C’est tout un nouveau quartier qui a émergé au niveau de la Flottwellstraβe proposant des logements dans des immeubles de luxe avec pour certains un accès direct depuis la cour de l’immeuble. Cette influence d’un nouveau quartier riche rayonne vers les rues voisines comme Pohlstraβe, où « à ce jour, la plupart des noms à consonances arabes et turques ont disparus »8 d’après les propos de Matthias Bauer, un des membres de AG Gleisdreieck. Ce départ de population a également été observé autour de Flaschenhalspark et Hornstraβe avec la rénovation d’immeubles qui a augmenté la plusvalue, forçant le départ de certains citoyens face à des loyers trop élevés. Ce développement de quartiers durables se développe aussi au niveau de la Möckernstraβe où une coopérative d’habitation lance la construction d’un lotissement Möckernkiez eG qui a cependant été stoppé à cause d’un manque de financement9. N’y-a-t-il donc pas un risque de gentrification ? La revalorisation du parc engendre des mutations au niveau de ses limites obligeant certains résidents à quitter les lieux pour des quartiers plus éloignés du centre mais aux loyers plus modérés. Dans une société 7‑ Extrait de l’article: « Wild Berlin » : dans Landscape Architecture Magazine, Mars 2014. 8‑ LICHTENSTEIN Andra et MAMELI Flavia Alice, Gleisdreieck/Parklife Berlin, Berlin, transcript Verlag, 2015. 9- Information provenant d’un essai de Uwe Rada dans le livre: LICHTENSTEIN Andra et MAMELI Flavia Alice, Gleisdreieck/Parklife Berlin, Berlin, transcript Verlag, 2015.
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où la Baukultur préconise des quartiers mixtes, est-ce vraiment vers cet idéal que s’opèrent les changements autour du parc de Gleisdreieck? Bien entendu le parc est accessible à tout le monde et son aménagement est organisé pour accueillir une population variée et provenant de divers milieux sociaux, mais « le message envoyé par les bâtiments chics est clair »10. Cette « ligne » de bâtiments à l’image chic et luxueuse a peutêtre été aménagée pour palier au scénario prédit pour Gleisdreieck : « A Kreuzberg, la scène alternative conquiert les bosquets ou les pelouses, à Schöneberg, ce sont les trafiquants de drogue ». N’était-ce donc pas un moyen d’éviter cette scission entre les deux parties du parc dont le danger était de créer une limite entre la population aisée de Kreuzberg et celle plus appauvrie à Schöneberg ?»11. Mais comment s’organisera la rencontre entre les habitants des immeubles chics et les usagers du parc ?
10- Information provenant d’un essai de Uwe Rada dans le livre: LICHTENSTEIN Andra et MAMELI Flavia Alice, Gleisdreieck/Parklife Berlin, Berlin, transcript Verlag, 2015. 11‑ voir ci-dessus (cf.11)
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Le Park am Gleisdeieck n’est pas un espace vert commun. Il propose d’un bout à l’autre de ses promenades des lieux insolites. Par la préservation et la mise en valeur de ses biotopes et de ses vestiges du passé, il sait surprendre, interroger, détendre son visiteur. Au cœur de la ville, il assure parfaitement son rôle de carrefour et de circulation entre les quartiers et les citoyens tout en leur offrant une grande diversité de lieux pour la rencontre, la relaxation, la récréation, le jardinage, le sport. Si certaines mises en œuvre peuvent être controversées et quelques traitements d’approche trop ordonnés et réglementés pour un espace de liberté, il n’en reste pas moins que le Park am Gleisdreieck répond aux objectifs attendus. L’apparition d’un nouveau parc au centre de Berlin a eu des conséquences bénéfiques pour connecter les territoires de la ville, préserver les enjeux écologiques, mais il induit de nombreuses questions sur l’évolution de la situation socio-économique et le risque de gentrification autour de la zone dans les années à venir.
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3) Réactions et avis des usagers
Synthèse des interviews (cf. annexes)
Les réactions des citoyens sur le Parc de Gleisdreieck sont positives montrant sa bonne acceptation et validant sa nécessité pour la ville et les quartiers aux alentours. Bien entendu chaque citoyen tient à cœur son intérêt personnel et quelques oppositions préalables au projet initial ont été exprimées lors de mes interviews. Le processus de consultation des intéressés et la négociation ont visiblement permis d’obtenir un compromis acceptable pour tous (cf. annexes). Certains sont nostalgiques et regrettent l’époque de la « friche » où la dimension illégale apportait un caractère excitant. Ils se plaignent de la composition trop ordonnée et réglementée du parc, qui semble être « affecté à des zones ». Ceci ne laisse plus la place à des rencontres en marge et inattendues ! Pour d’autres citoyens, c’est un réel gain pour la ville de Berlin. Le parc présente de nombreuses plaines de jeux pour les enfants et diverses espaces pour se relaxer, observer ou faire du sport. Les autres parcs de Berlin ne présentent pas toute cette diversité d’activités et ne sont pas tous aussi grands. Les habitants apprécient les atmosphères variées que l’on peut ressentir en traversant l’ensemble du parc et la manière dont se mêlent histoire et aménagements contemporains. Le fait que le parc réponde à ce besoin d’un parc à « deux vitesses » est aussi très apprécié par les citoyens.
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Conclusion Cette étude de la reconversion du site de Gleisdreieck, montre tout l’intérêt de mettre en œuvre une démarche participative citoyenne dans un processus de requalification d’un site et confirme sans aucune ambiguïté l’enrichissement qu’elle apporte au résultat. Ce processus de redynamisation nécessite de mettre en œuvre une démarche qui tienne compte des éléments historiques, écologiques, sociologiques et de veiller à l’acceptation par la population. Le Park am Gleisdreieck présentait tous ces enjeux lors de sa reconversion et les promoteurs, architectes et citoyens ont collaboré afin d’établir les objectifs de cette « juste reconversion ». Ils étaient les plus à même de savoir quels étaient leurs besoins vis-à-vis de leurs usages. L’étude que j’ai menée sur les solutions mises en œuvre à Gleisdreieck pour répondre à ces différentes exigences montre la qualité du résultat. Son acceptation et son succès auprès de la population le confirment malgré quelques aspects controversés. Cette mise en œuvre d’un projet, avec une large consultation citoyenne, nécessite de préciser au préalable, de manière claire, les règles retenues pour intégrer les propositions qui émanent aux différents stades du processus. Le niveau d’autonomie du cabinet d’architecture entre l’esquisse, le projet sélectionné et le plan final se doit d’être précisé, avec une clarification des circuits décisionnels. Ce point nécessiterait une analyse complémentaire à partir d’études de cas similaires et de recherche sur les travaux en la matière. Dans une société où la Baukultur préconise des quartiers mixtes, le succès de ce nouveau parc occasionne une forte revalorisation des quartiers limitrophes d’où le risque de gentrification autour de la zone, dans les années à venir, en l’absence de mesures particulières.
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Il est également à noter l’originalité de la solution mise en œuvre pour gérer, entretenir, budgétiser et prévoir l’avenir du Parc de Gleisdreieck au travers de la société publique Grün Berlin. Ce qui satisfait tous les acteurs de l’investissement important qu’ils ont consacré à ce projet, c’est l’accueil et le succès du Park am Gleisdreieck. Pour ma part, je suis heureuse d’avoir pu développer ce sujet. Il m’a permis de découvrir la face cachée de la genèse de ce très bel endroit. L’étude de son mode de management pour arriver à sa concrétisation me sera forcément des plus utiles dans mon futur métier pour aborder des projets difficiles ou d’envergure.
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〕 Promenons-nous à Gleisdreick...
Dans cette séquence, l’ensemble des photos sont des clichés personnels.
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WESTPARK
KLEINGARTENKOLONIE
Jeune Berlinois interrogĂŠ Ă Ostapark (cf. annexes interviews)
Westpark: Entrée dans le parc en venant de l’arrêt de U-Bahn (en venant de Luckenwalder Strasse)
Aire de jeux en caoutchouc à Westpark installée sous les rails de métro
WESTPARK
OSTPARK
TRACES DU PASSE
LES ACCES
Bibliographie Ouvrages BERARD Ewa et JAQUAND Corinne, Architectures au-delà du Mur : Berlin-Varsovie-Moscou, Éditeur Picard, 2009. BERNARD Hélène, Paroles d’acteurs : Participation des habitants au renouvellement urbain à Berlin, Lyon, Collection « Recherches » du PUCA n°164, 2006. COMBE Sonia, DUFRENE Thierry et ROBIN Régine, Berlin : l’effacement des traces, Fage Editions, 2009. HERTWECK Florian et MAROT Sébastien, La ville dans la ville : Berlin, un archipel vert : un manifeste (1977) d’Oswald Mathias Ungers et Rem Koolhaas avec Peter Riemann, Hans Kollhoff et Arthur Ovaska, Zürich, Lars Müller Publishers, 2013. JAQUAND Corinne, Portrait de ville : Berlin, Édité par l’Institut Français d’Architecture, Abonnement 1992. LANGE Bastian,Urban pionneers: Berlin: Stadtentwicklung durch Zwischennutzung = Temporary use and urban development in Berlin , collectivité-auteur : Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, Editeur Jovis, 2007. LEVUREL H., FRASCARIA-LACOSTE N., HAY J., MARTIN G. et PIOCH S., Restaurer la nature pour atténuer les impacts du développement, Analyse des mesures compensatoires pour la biodiversité, collection Synthèses, Editions Quae, 2015. LICHTENSTEIN Andra et MAMELI Flavia Alice, Gleisdreieck/Parklife Berlin, Berlin, transcript Verlag, 2015. R.McGEE Mark, Berlin 1925-1946-2000, Berlin, Verlagsbuchhandlung Beuermann GmbH, 2000.
Nicolaische
101
SCHULT Tanja et VISSCHER Jochen, Der Leipziger Platz- Leipziger Platz Carré- Lennédreieck, Berlin, Editeur Jovis, 2002. VON RAUCH Yamin et VISSCHER Jochen, Der Potsdamer Platz, Berlin, Editeur Jovis, 2002. WENDLER Frank, Der Park am Gleisdreieck : Idee, Geschichte, Entwicklung und Umsetzung, collectivité-auteur: Senatsverwaltung für Stadtentwicklung, Berlin, 2013.
Articles de périodiques « Berlin: Créative & branchée: la ville se réinvente » : dans DESTINATION Magazine, n°17. « Berlin: La Capitale du nouveau siècle » : dans GEO Voyage, n°15, Septembre-Octobre 2013. « Friches » : dans A+, n°183, Aout-Septembre 2003. « Wild Berlin » : dans Landscape Architecture Magazine, Mars 2014.
Travaux de fin d’études et mémoires CHHUN Nathalie, Gleisdreieck où la Vallée du Sport : Vivre à l’interface de la trame verte avec les infrastructures de la ville de Berlin, rapport de présentation de projet de fin d’études, sous la direction de NIDRICHE Christian et ELLEBOODE Alain, École Nationale Supérieure d’Architecture Paris Val de Seine, Juillet 2011. CHIROL Julie, Courir après l’horizon, travail personnel de fin d’études- Paysage, École Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Lille, 2011. DAUSQUE Aline, Avez-vous déjà squatté un aéroport ? De l’architecture nazie au parc urbain, mémoire de fin d’études sous la direction de SCHAUT Christine, Faculté d’Architecture La CambreHorta, Bruxelles, 2014. 102
SGRO-GENNARO Antonio, Friches urbaines vs. ville: Berlin, archipel d’usages intermédiaires, énoncé théorique de Master d’Architecture, sous la direction de Jacques Lucan, Lausanne EPFL, 2009.
Publications et articles de recherche BEYER Birgit, « Le parc Gleisdreieck », Fachbereich Grünflächen, Bezirksamt Friedrichshain-Kreuzberg, Mai 2014. (URL:ww.vibe.be/downloads/Project-duurzame-wijken/Klankbordgroepen/KBG5/TA140527_Beyer_Parc-Gleisdreieck.pdf) CLOOS Ingrid, « Ein Auftrag wird 25 Jahre alt », Source : Stadt + Grün, Octobre 2004. (URL:http://www.stadtentwicklung.berlin.de/umwelt/landschaftsplanung/lapro/download/lapro-25jahre.pdf) Deutsches Technikmuseum : « Gleisdreieck, a railway site in Berlin », 2014. ( U R L : h t t p : / / w w w. s d t b . d e / G l e i s d r e i e c k - a - r a i l w a y - s i t e - i n Berlin.2267.0.html) FLAMME Philippe et ISACF- La Cambre, « Vade Mecum », p.74-75. (URL:https://urbanisme.irisnet.be/pdf/CAM003_VadeMecum_ FR.pdf) OSWALT Philipp, _ Article « Berlin, City of the 20th Century », publié dans le catalogue de la Biennale de Berlin, Ed. Miriam Wiesel, Berlin, 1998. (URL : http://www.oswalt.de/en/text/txt/berlin_p.html) _ Article « Berlin_City without Form’ | Automatic Urbanism », publié dans Berlin-Stadt ohne Form, Munich, 2000. (URL : http://www.oswalt.de/en/text/book/b_autourb1_p.html) Publication: Bundesstiftung Baukultur, « Rapport sur la Baukultur : le cadre de vie bâti de demain », mars 2015. (URL:http://www.bundesstiftung-baukultur.de/fileadmin/user_ upload/PDFs/Rapport-sur-la-Baukultur.pdf)
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Publication « URBAN ACT : A handbook for alternative practices », Éditeur aaa-PEPRAV, Paris, 2007. ROTH Hélène, « Les “Villes rétrécissantes” en Allemagne », extrait du livre Geocarrefour, vol. 86/2, 2011. (URL : http://geocarrefour.revues.org/8287)
Sites internet consultés http://www.archdaily.com/592245/gleisdreieck-park-atelier-loidl www.atelier-loidl.de http://www.berlin-en-ligne.com/visite/parcs-jardins/park-am-gleisdreieck.html http://blog.choisirquartierlibre.com http://www.franceculture.fr/blog-globe-2011-02-23-nos-villes-sontmortelles.html http://geocarrefour.revues.org/8294 http://gleisdreieck-blog.de http://www.gruen-berlin.de/parks-gaerten/park-am-gleisdreieck/ http://www.lagazettedescommunes.com/120690/«-les-friches-culturelles-sont-un-acte-de-reconquete-du-territoire-»-francoise-lucchinigeographe-universite-de-rouen/ http://www.publicspace.org/en/works/g047-park-am-gleisdreieck http://referenzbauten.de/bauprojekt/westpark-des-parks-am-gleisdreieck-in-berlin.html http://www.stadtentwicklung.berlin.de http://www.uncubemagazine.com/blog/10113415 104
http://www.univ-rouen.fr/version-francaise/projet-axe-2-la-frichecadre-d-une-aventure-culturelle-et-espace-urbain-polyvalent-et-durable-131192.kjsp http://www.visitberlin.de/fr http://worldlandscapearchitect.com/bottleneck-park-flaschenhalspark-opens-in-tempelhof-schoneberg/
Presse Berliner Morgenpost Berliner Zeitung Der Tagesspiegel La Gazette de Berlin Zitty
Vidéo « Berlin baut: Park am Gleisdreieck », un film du Senatsverwaltung für Stadtentwicklung und Umwelt. (URL : https://www.youtube.com/watch?v=VQ3vg7U6gUw) Film muet, Berlin : Die Sinfonie der Groβstadt, de RUTTMAN Walther, 1927. (URL : https://www.youtube.com/watch?v=wY5GdeqOkfc) Shortlisted EUMiesAward2015 - Park am Gleisdreieck - Berlin - Atelier LOIDL. (URL : https://www.youtube.com/watch?v=gXyRWBc6Gq0) Gleisdreieck, Berlin (1/3)/ Gleisdreieck, Berlin (2/3)/ Gleisdreieck, Berlin (3/3), de SUMO Film Berlin. (URL : https://www.youtube.com/watch?v=pGjZ-qGfDG0) 105
Annexes (Interviews dans le parc)
• Rencontre avec un membre de la Kleingärtenkolonie
En me promenant au travers des sentiers de Gleisdreieck du côté des parcelles de jardins de Westpark, j’ai pu rencontrer un homme qui est propriétaire d’une parcelle depuis maintenant six ans. Étant venu de Bavière pour s’installer à Berlin, il est là depuis plus de 32 ans. Désormais à la retraite, il était important pour lui de pouvoir cultiver ses propres fruits et légumes. Habitant dans le quartier voisin du parc, Kreuzberg, il est venu s’installer dans ce jardin communautaire depuis 6 ans. Il n’habite pas là bien sûr. Mais ayant vu quelques maisons très entretenues avec toutes les commodités d’une maison principale et de taille imposante, je lui ai demandé si certaines personnes vivaient dans ces jardins. Selon ses dires, il semblerait que certaines personnes résident là une bonne partie de l’année! Après l’avoir interrompu dans sa cueillette pour lui poser quelques questions concernant les jardins, il m’a gentiment proposé de rentrer dans son petit paradis vert. Nous avons parlé des jardins communautaires en Allemagne en général. Cette tradition allemande proviendrait d’un médecin du nom de Pfeiffer au 19e siècle qui prônait le fait que la ville avait besoin d‘espaces de respiration. Il m’a indiqué, qu’auparavant, il y avait plusieurs gares présentes sur la friche, une du nom de Potsdamer Bahnhof, qui était l’une des plus importantes gares d’Europe, et l’autre, Güterbahnhof, qui servait au transport de graines et de marchandises. Il existe toujours des silos sur le site mais leur accès est désormais impossible. Avec l’aménagement du parc, les locataires des jardins ont perdu un peu de tranquillité. Désormais des sentiers publics s’insèrent entre les différentes parcelles de potagers. Mais ils ont failli perdre plus que cela! Lors du lancement du parc, le Sénat allemand et les architectes voulaient complètement supprimer ces parcelles et les « délocaliser », la ville ayant besoin d’espaces pour installer les étendues prévues pour le parc. Après de nombreuses négociations, il a été finalement décidé, que les parcelles seraient conservées. Leur projet initial prévoyait de créer des sentiers entre chaque parcelle pour que le public puisse avoir un accès tout autour des 107
« enclos ». Les locataires ont refusé cette intervention, affirmant qu’ils n’étaient pas « des animaux dans un zoo ». En plus de cette intervention paysagère, les architectes voulaient normaliser chaque parcelle, ce qui a mis les membres de la Kleingärtenkolonie en colère. Après résistance et discussion, les deux parties ont réussi à trouver un compromis et les locataires des jardins n’ont plus de soucis à se faire concernant une « exclusion ». Finalement, l’aménagement du parc ne le dérange pas. Il lui semblerait même que c’était une nécessité pour la ville, vu le taux de fréquentation très important le week-end. La présence des touristes à l’intérieur de la Kleingärtenkolonie ne le gêne pas. De toute façon il est habitué au bruit des trains sur les voies de chemin de fer, même si avec l’aménagement du parc, certaines restrictions ont été établies concernant la vitesse des rames de métro et de S-Bahn. Ils sont obligés de circuler à moindre allure quand ils traversent la zone de Gleisdreieck pour réduire l’intensité sonore.
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• Rencontre avec des septuagénaires installés sur un
banc à l’entrée de Ostpark, près du petit café et de l’espace de jeux pour enfants
Ils se rendent dans ce parc, uniquement quand ils ont la visite de leurs petits-enfants. Ils n’habitent pas le quartier mais à environ trois arrêts avec le S-Bahn. Ils viennent ici car ils n’ont pas d’espaces verts près de chez eux avec de grandes et belles aires de jeux. Cependant, ils ne connaissent pas la totalité du parc. Ils se rendent ici avec un objectif précis: les parcs de jeux. Quand je leur ai posé la question s’ils connaissaient Westpark, ils m’ont répondu que non. Ostpark leur suffit car il est facilement accessible avec le S-Bahn et tout y est fait pour les enfants.
Interview avec un habitant du quartier venu s’installer avec une petite charrette sur roues pour vendre des crêpes indiennes et du thé à la menthe
•
Contrairement à ce que je pensais, ce trentenaire Berlinois habitant à côté du parc, ne semblait pas très bien connaître ce lieu. Il s’est installé le long du sentier bétonné proche d’une entrée qui donne sur la Möckernstraβe, c’est-à-dire le plus proche de son logement. Il ne profite pas de la proximité du parc pour venir se relaxer ou faire du sport. Aujourd’hui, c’était son premier jour « test » pour son petit « business » ! Ce qui le dérange dans ce parc, c’est le côté trop soigné, les allées en béton, les chemins déjà tracés, le tout trop « moderne » à son goût. Il dit être conscient que le développement moderne est nécessaire pour la ville, mais il semblait nostalgique du temps passé de la friche de Gleisdreieck. Un de ses amis s’est joint à la discussion et ils m’ont raconté qu’avant la zone était plus attractive : « It was exciting because it was illegal ». Ainsi pénétrer dans cette zone illégale était plus excitant avec de nombreuses soirées autour d’un feu dans cette « jungle verte ». Ils m’ont raconté quelques anecdotes notamment la présence d’une cabane en bois qui était « fun », construite sur l’un des ponts qui traverse la Yorckstraβe. Tout le monde ramenait des choses et y cachait ce qu’il voulait. C’était quand même dangereux car ils y avaient parfois des armes, … Nous avons aussi parlé de l’impact du parc sur leur quartier et l’augmentation des loyers. Pour le moment, il est sous un ancien contrat, mais les propriétaires du quartier veulent rénover
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les bâtiments. Il sait que le jour où il partira le propriétaire effectuera des travaux et louera l’appartement deux fois plus cher qu’avant. Berlin n’est plus cette capitale si bon marché, désormais les loyers sont plus chers. Les loyers devenant plus élevés, les étudiants habitant les quartiers de Kreuzberg, Prenzlauer Berg ou Friedrichsain doivent se délocaliser vers des quartiers plus excentrés de Berlin Mitte, comme Pankow ou Wedding présentant encore des loyers modérés. Le Berlin bon marché disparaît petit à petit, et de nouveaux bâtiments de luxe naissent autour de nouveaux lieux d’attractions comme Gleisdreieck Park.
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avec Herr Pfeuffer, un des acteurs dans la participation de l’élaboration du parc, travaillant pour Grün Berlin
• Interview
Grün Berlin n’est pas une association. Il s’agit d’une société qui appartient au gouvernement et qui s’occupe de gérer les espaces verts à Berlin. Outre Gleisdreieck Park, ils ont en charge d’autres parcs comme Tempelhofer Feld, Britzer Garten, … D’où vient cette idée de parc ? Il était question d’un projet d’autoroute avant la construction du parc. Oui effectivement, pendant une courte période il était question qu’une autoroute traverse la friche, mais cette idée a été rapidement abandonnée après la résistance des citoyens et pour des raisons écologiques. L’idée d’un parc a donc été quasiment toujours à l’ordre du jour. Certains citoyens étaient contre la réhabilitation de la zone. Les Berlinois sont réticents à l’idée du changement et aiment cet espace. Certains aiment ce côté illégal à l’idée qu’une promenade dans cette friche était à chaque fois une « découverte ». Mais il existe toujours des protestataires contre le développement. Ce n’est pas pour autant que cela doit stopper la planification future, qui est bénéfique sur de nombreux points pour la ville et ses citoyens.
Comment et par qui a été lancé le concours ?
Le lancement du concours a été lancé en 2005 et gagné par le projet du bureau Loidl. Plusieurs acteurs étaient présents dans le jury du concours : le Sénat pour le développement à Berlin, des représentants du quartier de Kreuzberg, des personnes de la société Grün Berlin et enfin des citoyens impliqués dans une initiative citoyenne. Pourquoi le bureau Loidl a-t-il été choisi ? Quelles étaient les qualités que les autres plans ne présentaient pas ? Il a été choisi car c’est le seul bureau qui a réussi à allier passé et aménagements modernes. Ils ont gardé des éléments du passé tout en aménageant des espaces de qualité pour les habitants. Le concept était aussi de varier les espaces verts et d’offrir divers types d’aires de loisirs et de détente. Ainsi, ils ont décidé d’accueillir le promeneur à chaque 111
entrée par des aires de jeux et d’alterner plus à l’intérieur du parc les plaisirs verts entre forêts et vastes étendues de pelouses. Mais chaque partie du parc présente des atmosphères particulières. La conception de Ostpark n’a pas été pensé de la même manière que celle de Westpark et Flaschenhalspark. Chacun présente des caractéristiques particulières et des aires de loisirs diverses. La construction du parc a débuté en 2008 par l’aménagement de Ostpark qui s’est terminé en 2011. La mise en œuvre de Westpark a démarré plus tard en raison de problèmes d’ordre administratif. Le parc de Gleisdreieck a été achevé en 2014 avec la liaison vers le Sud de Flaschenhalspark. Aviez-vous des attentes particulières exposées lors du lancement du concours ? Non pas vraiment des attentes précises, nous voulions que ce soit un parc avec des espaces de jeux qui connecte le Nord au Sud et l’Est à l’Ouest. Les architectes étaient libres d’organiser le parc comme ils le voulaient, mais en intégrant les divers types de loisirs souhaités par les habitants et en intégrant les éléments déjà existant comme les «Kleingärtenkolonien». La construction de ce parc s’est faite en association avec des initiatives de citoyens qui se sont battus pour leurs idées. Cela n’a pas toujours été facile à réaliser avec les idées de tous et certains compromis ont du être faits. Quel est le suivi du parc ? Comment envisagez-vous l’évolution du parc ? Nous sommes ici dans un ancien poste d’aiguillage de la gare, aujourd’hui le lieu de management du parc. Je travaille ici 3 jours par semaine et nous nous occupons mon collègue et moi de gérer la maintenance du parc. Ainsi la sécurité du parc est assurée, tout comme sa propreté. De futures constructions sont à venir, nous attendons juste d’avoir les fonds nécessaires. Car cela coûte cher ! La prochaine étape consiste à remettre en état les quatre ponts qui surplombent la Yorckstraβe et d’avoir divers points de connexion entre Ostpark et Flaschenhalspark. Un jour, nous établirons aussi une connexion plus directe entre la Potsdamer Platz et Gleisdreieck Park, sans devoir traverser la route et ses six bandes de véhicules ! 112
• Entretien avec une personne des archives du Technisches
Museum Berlin
L’histoire du site de Gleisdreieck est très compliquée. Il s’agit d’une zone qui a subi de nombreux changements au fil des années. Actuellement, ils sont en train de digitaliser les anciens plans de la zone, qui date d’avant les années 1870 et personne ne sait exactement qu’elle était sa fonction avant de devenir un site occupé par des voies de chemin de fer. Mais cette station a servi de gare de marchandises et de passagers pendant plusieurs années. Il y avait la Anhalter Bahnhof dont il reste un vestige sur l’actuel site du Tempodrom. Il s’agissait d’une gare importante d’arrêt des voyageurs. Celle-ci était complétée par une autre gare pour les personnes, la BerlinPotsdamer Eisenbahn, mais aussi la Dresdener Bahnhof uniquement utilisée pour le transport des lettres et courriers, tout ce qui fait référence à la poste. Il existait une dernière gare, la Güterbahnhof qui était utilisée seulement pour le transport de marchandises comme des graines,… Le site était donc constitué par un ensemble de quatre gares, chacune ayant une fonction bien spécifique. A la fin des années 50, la Anhalter Bahnhof est détruite. Pour une perception de « comment cela fonctionnait dans le passé », il faut regarder le film de Walther Ruttmann dont le titre est : « Berlin- die Sinfonie der Groβstadt-». L’histoire est d’autant plus compliquée que pendant la guerre froide, le site de Gleisdreieck était un endroit « ex-territorial » car situé dans la zone Ouest mais appartenant aux voies de chemin de fer de la RDA. Dans les années 80, la friche est le lieu de nombreuses « partys » et des artistes « squattent » les lieux. Une radio illégale s’installe dans le « Wasserturm » toujours présente sur le site et qui appartient aujourd’hui au « Technisches Museum Berlin ». Les voies de chemin de fer qui rejoignaient la Potsdamer Eisenbahn se situent sous le talus vert qui se prolonge de la Potsdamer Platz en direction de Gleisdreieck Park. Des pistes cyclables ont été construites dans ce parc qui connecte Berlin à Leipzig et Dresden. Après le projet d’autoroute lancé sur le site de Gleisdreieck, il a été interdit de construire sur la zone pour des raisons écologiques. En effet, les rails de chemins de fer apportent de l’air frais vers cette zone verte au cœur du centre de Berlin. Ainsi cette arrivée d’air frais lève vers le haut la 113
chaleur et la pollution qui stagnent dans le centre ville. Il a donc toujours été question de conserver cet espace en parc afin de permettre à l’air chaud de remonter. Le développement de la ville est nécessaire et ce parc est un bel exemple de cette évolution. Avant la zone était squattée, la police n’y avait pas accès pendant la guerre froide et personne n’osait y passer après cinq heures de l’après-midi, par manque de sécurité. Selon son opinion, ils ont réussi à faire un très bon parc, qui fonctionne bien. Mais lors de l’aménagement du parc, des gens qui vivaient aux abords ont été expulsés car les bâtiments ont été soit détruits, soit réaménagés en logements luxueux. Les loyers étant devenus trop élevés, certains habitants n’ont pas pu rester par manque de moyens financiers.
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• Constat
personnel sur le terrain
A l’heure où le parc est terminé, il m’est difficile d’apprécier par comparaison avec la friche sauvage qui existait auparavant. Cependant, je suis certaine, que la zone de Gleisdreieck profite désormais à une plus grande majorité de la population. Même si tout projet présente ses défauts, je pense que le parc de Gleisdreieck a vraiment réussi avec succès le pari de connecter les quartiers et même davantage. Ce n’est pas simplement un parc où l’on va pour se reposer ou faire du sport, il possède un réel enjeu de connecteur urbain. Il assure bien deux fonctions : celle du loisirdétente et celle de carrefours circulatoires. En ce qui concerne la notion de flux circulatoire, j’ai pu observer l’énorme intérêt de ce parc. Postée à huit heures du matin sur un banc au niveau du croisement des trois parcs près de l’ancienne tour d’aiguillage, le flux de cyclistes et piétons se dirigeant vers la Potsdamer Platz ou en direction de Mitte est important. Si quelques sportifs du matin en profitent pour faire leur jogging, le parc revêt clairement, dans ces lieux, un caractère de connexion au niveau de ses voies circulatoires. Dans d’autres zones du parc, c’est une autre dynamique qui apparaît, celle de la détente, du jeu, de la promenade. La population est diversifiée tant au niveau de l’âge que des cultures représentées. En même temps qu’un groupe de sportives termine son jogging près des terrains de pétanque pour faire des exercices, des enfants jouent au basket et font du skate sur le terrain de jeu en caoutchouc de Westpark. J’ai donc été séduite par les différentes atmosphères qu’il est possible de ressentir tout au long de la déambulation dans le parc. En très peu de temps, il est possible de passer d’un univers très dynamique alimenté par l’effervescence de la ville, à un univers tout à fait différent, plus rural, en déambulant au travers des minuscules sentiers qui s’immiscent entre les parcelles de jardin de la Kleingärtenkolonie. Le seul point sur lequel je suis réticente vis-à-vis des aménagements du parc concerne le caractère parfois trop réglementé. Les Natürraumen sont entourés par du grillage où une pancarte vous précise ce qu’il est possible de faire mais aussi les interdictions. S’il s’agit d’une zone naturelle, autant ne pas créer de frontières matérielles et laisser à tout un chacun la possibilité de l’exploiter comme il l’entend ! Même le parc pour chiens est établi et délimité par un grillage. Il est certain que des réglementations sont nécessaires pour conserver la cohésion entre la nature et ses usagers mais certaines limites n’auraient pas besoin d’être soulignées, laissant plus de place à l’imprévu. Quant à la présence 115
de l’histoire, elle n’est pas toujours très visible. A Westpark elle est quasiinexistante. Seule la vue d’un butoir et d’un début de rail, au club de volley Beach 61, rappellent l’existence d’un site ferroviaire. A Ostpark, les friches ferroviaires sont plus perceptibles mais c’est sans doute à Flaschenhalspark que l’interaction avec les éléments du passé est la plus visible. On pénètre dans la forêt en quittant le sentier bétonné et on marche au milieu des anciennes voies ferrées. Le monde ordonné et réglementé semble s’être volatilisé l’espace de quelques instants !
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Prix remporté par l’atelier Loidl pour le Park am Gleisdreieck _ Récompensé par l’Urban Quality Silver Award 2011 _ Finaliste du European Garden Award 2012 _ Finaliste dans la catégorie « Built » pour Urban Intervention Award Berlin 2013 (UIAB 2013) _ Architekturpreis Berlin 2013 _ Deutscher Städtebaupreis Award 2014 _ Deutscher Landschaftsarchitekturpreis 2015
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