Austerité tour de l'Europe

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19 octobre 2010 17:25 |

Plans d'austérité :: Tour d’Europe Solidaire est parti en reconnaissance, pour un aperçu des plans d’économie et de la résistance des citoyens. En Belgique, les discussions communautaires cachent les visions des grands partis sur les 24 milliards qu’il faut économiser et surtout dans quels secteurs – ni les banques, ni les grosses fortunes, ni les fraudes fiscales – il faut économiser : le social, la sécurité, les chômeurs, les travailleurs… Comme dans le reste de l’Union européenne.

Grande-Bretagne Plan du gouvernement Economies de 94 milliards d’euros d’ici 2014 • Salaires, allocations et pensions : relèvement de l’âge de la pension à 70 ans, diminutions des montants de pensions pouvant aller jusqu’à 30 %, gel des salaires et des allocations familiales pendant 2 à 3 ans. • Secteur public : économies de 22,7 milliards d’euros dans les soins de santé d’ici 2014 : 60 000 jobs sont supprimés, 2,5 milliards de moins d’allocations-maladie, et privatisation des hopitaux publics. Privatisation probable de la poste et 10 000 licenciements chez les pompiers; un seul département public reste plus ou moins épargné: celui de la défense nationale; fermeture de nombreuses bibliothèques publiques, piscines et services de placements. • Emploi : le plan d’économies entraîne la suppression de 1,5 millions d’emplois d’ici 2014 dont 600 000 dans les services publics. • Divers : économies de 25 milliards d’euros sur les allocations familiales, allocations de logement et de chauffage et sur la gratuité des services publics pour les 60+. Résistance La Fédération syndicale TUC prévoit des manifestations de masse dès la fin de ce mois quand seront connus les détails du plan d’économies, mais déjà des protestations se font entendre. Le mercredi 29 septembre de Glasgow à Londres, des dizaines de militants syndicaux ont envahi les rues. Le mois dernier, le trafic des trains et metro s’est arrêté à plusieurs reprises en protestation contre les licenciements qui menacent la sécurité; ceci également début octobre.

France Plan du gouvernement Le gouvernement veut économiser 100 milliards d’ici 2013 (en réduisant le déficit public de 8 à 3 %). • Pensions : une réforme prévoit le recul de la pension (de 60 à 62 ans) et l'allongement de la durée de cotisations pour une pension complète de retraite, ce qui conduit, dans la pratique, à obtenir celle-ci à 67 ans plutôt qu'à 65 ans. Les périodes d’inactivité ne sont pas comptabilisées. • Dépenses publiques : les dépenses passeront de 319 en 2010 à 268 milliards en 2011. 31 638 postes de fonctionnaires seront supprimés. Un gel des salaires est prévu dés l’année prochaine. • Sécurité sociale : économie de 2,5 milliards en 2011 en diminuant le remboursement sur les médicaments et sur les soins de longue durée. Résistance Dès le mois de juin, les syndicats ont mobilisé leurs affiliés pour des manifestations de masse : 2 millions le 24 juin, 2,5 millions le 7 septembre, 3 millions le 23 septembre, etc. Vu le refus du gouvernement de modifier ou de retirer le projet de loi et le vote de cette réforme par le parlement, les syndicats les plus radicaux (Sud, CGT, FO, …) ont décrété les grèves reconductibles le 12 octobre et des manifestations des secteurs privé et public ont eu lieu dans


tout le pays. Les lycéens se sont joints aux militants et des citoyens ont bloqué la plupart des raffineries de pétrole, causant une pénurie aux stations d’essence.

Portugal Plan du gouvernement Plan de restrictions de 11,7 milliards d’euros d’ici 2013 • Salaires et allocations sociales : gel des salaires dans le privé et baisse des salaires des fonctionnaires entre 5 et 10 %, baisse des allocations sociales. • Pensions : gel de toutes les pensions, hausse de l’âge de départ à la retraite de 65 à 67 ans. • Secteur public : diminution du nombre de fonctionnaires de 10 % ce qui revient à la perte de 65 000 postes. Des entreprises d’Etats comme la poste , les chemins de fer, les entreprises de gaz et électricité, les télécoms, les autoroutes, les aéroports,… seront en tout ou en partie privatisés. • Impôts : 6 milliards d’euro de revenus supplémentaires par la hausse de la TVA de 21 à 23 % et hausse des impôts sur tous les revenus ; fin de la déduction fiscale pour les dépenses d’enseignement et de santé. Résistance Il y a déjà eu trois jours d’action nationale. Le 5 février, 50 000 personnes manifestaient dans les rues de Lisbonne. Le 29 mai, il y en avait 300 000. Lors de la journée européenne syndicale du 29 septembre, plus de 100 000 personnes manifestaient dont 50 000 à Lisbonne et 20 000 à Porto. Les manifestations se sont faites à l’initiative du CGTP/IN, syndicat proche du Parti Communiste du Portugal. Le 24 novembre, une grève générale aura lieu dans tout le pays suite à une décision unanime de la CGTP/IN.

Espagne Plan du gouvernement Plan de restrictions de 15 milliards d’euros en 2011 • Diminution du budget de l’État de 7,7 % (en comparaison avec 2010) en 2011 (15 milliards d’euros de restrictions) avec baisse du budget de l’enseignement de 8,1 %, de la recherche de 7 %, de l’environnement de 31,8 %, des travaux publics de 34,6 % et de l’administration des impôts de 5 % • Baisse des salaires des fonctionnaires de 5 % • Pensions : gel des allocations, hausse de l’âge de départ à la retraite de 65 à 67 ans. • Impôts : hausse des tarifs TVA de 16 à 18 % et de 7 à 8 % Résistance Le 29 septembre, trois quarts des travailleurs espagnols étaient en grève : il y avait plus de 10 millions de grévistes et 1,5 million de manifestants. L’industrie espagnole était paralysée. C’était la première grève générale depuis huit ans à l’appel de deux grands syndicats espagnols- la socialiste UGT et les Commissions ouvrières, historiquement proche du PCE (le Parti communiste espagnol). En Andalousie, le bastion du mouvement communiste en Espagne, 50 000 personne sont manifesté à Séville, 20 000 à Huelva et Córdoba, 18 000 à Málaga 18 000 et 12 000 à Grenade. Il y avait encore 100 000 personnes à Oviedo, capitale des Asturies et 70 000 à Vigo en Galice. Les plus grandes manifestations ont eu lieu à Barcelone (400 000) et à Madrid (500 000).

Italie Plan du gouvernement Économie de plus de 24 milliards d’euros lors de la période 2011-2012 • Pensions : allongement de l’âge de la retraite pour les femmes de 61 à 65 ans, un minimum de 41 années de cotisations pour obtenir une retraite complète, passage de la retraite à 67 ans


en 2018, gel des pensions dans le secteur public. • Salaires : gel des salaires des fonctionnaires pendant trois ans; modération et baisse des salaires, qui selon le syndicat CGIL toucheront principalement les revenus d’environ 1 200 euros. • Secteur public : baisse de plus de 400 000 postes dont 140 000 dans l’enseignement et 160 000 dans les soins de santé; en outre, des économies de 1,4 milliard d’euros dans l’enseignement. Résistance Le vendredi 08/10 il y a eu une grande grève dans l’enseignement, avec des manifestations dans plus de 80 villes. Les 13 en 15 octobre, encore des grèves dans l’enseignement. Les 21 en 22 octobre c’est le tour des bus, train et tram. Les 14 en 25 octobre tous le secteur des transports aériens. Le syndicat des metallos organise également la lutte contre les projets d’allongement du temps de travail et la flexibilité. Samedi 16 octobre, à Rome, un million de personnes manifestaient: les secteurs métal et d’autres secteurs, ainsi que des étudiants et des politiciens de l’opposition sous le slogan « grève, grève, grève » studenten

Pays-Bas Plan du gouvernement Plan d’économies de 18 milliards d’euros • Salaires et allocations : gel des salaires des fonctionnaires et réduction de diverses allocations de remplacement • Economies sur l’accueil des enfants • Coupes dans les aides sociales, le travail adapté et la loi pour les jeunes handicapés • Le gouvernement veut affaiblir les syndicats par une nouvelle loi qui ne rend plus nécessaire leur approbation sur les accords salariaux auprès de l’administration Résistance Le syndicat et des organisations progressistes ont prévu une première manifestation le 23 octobre sous le slogan « Nous n’allons pas payer la crise ! »

Allemagne Plan du gouvernement Plan d’économies de 82 milliards d’euros d’ici à 2014 dont 11,2 milliards dès 2011 • Emploi : suppression de 15 000 jobs dans l’administration • Réduction de l’allocation de chômage • Allocation parentale : réduction de l’allocation parentale pour les hauts salaires (versée aux parents qui restent à la maison pour s’occuper de leur enfant) et suppression de l’allocation pour les personnes qui ont le revenu minimum • En 2006, l’âge de la pension a été repoussé jusqu’à 67 ans. Si l’âge de la pension n’est pas atteint, alors le montant de la pension diminue de 100 euros par mois • Secteur public : coupes dans l’enseignement, la culture et la santé Résistance En Allemagne, l’industrie du lait bavaroise a eu un rôle déterminant dans la résistance contre la crise politique de Merkel. Les semaines précédentes, des grèves d’avertissement ont eu lieu. Les agriculteurs et les travailleurs de l’industrie du lait ont tenu des piquets dans les 20 plus importantes entreprises laitières. Ils ont reçu le soutien de syndicalistes métallurgistes et des services publics. Ils revendiquent une augmentation salariale de 5 %, un même salaire pou un même travail dans les entreprises sous-traitantes et la possibilité pour les plus anciens de prendre leur retraite en échange de l’embauche de jeunes. Dans le secteur du lait en Bavière, on travaille en feu continu, ce qui affecte la santé des agés. Le syndicat du secteur de l’alimentation a reçu le soutien d’une grande partie de la population. Hans Hartl, responsable


syndical, s’attend à un automne chaud. (Junge Welt, 15/10)

Grèce Plan du gouvernement Plan d’économies de 30 milliards en 3 ans • Salaires : diminution de 10 % des salaires des fonctionnaires, blocage des salaires dans le privé, salaire minimum passé de 740 à 500 euros • Pensions : diminution des allocations de pensions, recul de l’âge de la pension et suppression des départs en retraite prévus • Impôts : augmentation de la TVA de 11 à 23 % sur un tiers des biens et services et augmentation de 63 % des accises sur le carburant • Secteur public : réduction de 35 % du personnel du rail, augmentation des tarifs des transports publics et fermetures de plusieurs ligne ; libéralisation du marché de l’énergie, augmentation des tarifs de l’énergie de 40 à 100 % • Libéralisation du travail : suppression des conventions collectives de travail et de la journée de 8 heures, mesures qui vont favoriser la flexibilité Résistance Le PAME, le front militant de lutte des travailleurs, animé par le Parti communiste de Grèce (KKE) a déjà organisé avec succès 12 grèves générales depuis l’annonce des mesures d’austérité. C’est la force syndicale de loin la plus militante du pays. Le 7 octobre, il y avait de nouveau une grève générale dans les services publics et ce ne sera pas la dernière. 7 janvier 2011

Irlande :: Le peuple irlandais va payer la facture. Après la Grèce, l’Irlande aura donc été la deuxième nation de l’Union Européenne à subir les conséquences des plans d’austérité du Fonds Monétaire International (FMI). Ali Ruckert (*) Les communistes irlandais sont au coeur de la lutte contre les mesures d’austérité prises par le gouvernement de centre droit irlandais. Eugène Mc Cartan, secrétaire général du Parti communiste d’Irlande, nous explique les mesures antisociales que le peuple irlandais va subir. Interview par Tony Busselen. Le Parlement irlandais a pris récemment des mesures de restrictions dans les dépenses budgétaires. Quelles en sont les conséquences les plus importantes pour le peuple irlandais ? Eugene Mc Cartan. Le budget de 2011 est un prolongement des budgets d’« austérité » des trois années précédentes. Ce budget a été élaboré sous le contrôle et la conduite de l’Union européenne et, en particulier, de la Banque centrale européenne. La stratégie de l’UE et du FMI réclamait une correction de 6 milliards d’euros sur les quatre prochaines années pour un budget annuel de 15 milliards d’euros et avec une économie luttant déjà pour se maintenir à flot. Dans les trois budgets précédents, 14,5 milliards d’euros avaient déjà été coupés. La priorité politique et économique instaurée durant ces trois dernières années et qui se poursuivra dans le futur consiste à faire porter par les pauvres, les personnes dépendant de l’aide sociale, les modestes hommes d’affaires, les petits indépendants et les exploitations agricoles familiales, le fardeau de la crise et le problème structurel profond au cœur de


l’économie du pays. Il n’existe aucune stratégie de création d’emplois pour les quelque 500.000 chômeurs ni pour les dizaines de milliers de personnes qui émigrent dans l’espoir de trouver du travail. L’État a socialisé et transformé les dettes des banques privées en dette publique. Les communistes l’appellent la dette illégitime. Le salaire minimum légal a été réduit de 11,5 % (passant de 8,65 euros à 7,65 euros de l’heure) en guise de prélude à une attaque de longue haleine contre les conventions officielles de travail. Celles-ci avaient fixé le salaire minimum et les normes pour les travailleurs de toute une série d’industries, pour des travailleurs déjà mal payés. La véritable ventilation du budget n’apparaîtra que lorsque le projet de loi sur les finances sera publié en février. C’est là que les véritables coupes sombres apparaîtront nettement. Qu’est-ce que cela signifie pour une famille de travailleurs ? Eugene Mc Cartan. Les trois quarts des économies projetées de 1,8 milliard d’euros viendront du département de la Protection sociale (873 millions), du département de la Santé et de l’Enfance (746 millions) et du département de l’Éducation (170 millions), et le reste viendra d’autres départements gouvernementaux. Le minerval des universités et des collèges a également été augmenté, accroissant encore les difficultés et les obstacles auxquels sont confrontés les jeunes de familles des travailleurs. De nouvelles mesures de taxation augmenteront le niveau de l’inégalité. Elles comprennent une réduction des paiements de l’aide sociale de 8 euros par semaine en plus de la réduction déjà proposée du salaire minimal. Les allocations familiales ont été réduites de 312 euros par an. La réduction des crédits d’impôt annoncée dans le budget est régressive, parce qu’elle réduit le revenu de toutes les personnes gagnant plus de 18.000 euros par an de 12 %. Elle aura un impact plus grand sur les petits et moyens salaires que sur les groupes à revenus élevés. Les coupes sombres dans l’aide sociale signifieront que les familles qui reçoivent des indemnités sociales perdront entre 619 et 1.115 euros par an. Plus de 14 % de la population de la République vit en dessous du seuil de pauvreté. Ce nombre augmente, de même que celui des pauvres au travail. Le gouvernement irlandais s’attend-il réellement à ce que cela contribue à sortir de la crise ? Eugene Mc Cartan. Sous le plan de sauvetage des banques du gouvernement, les dettes privées de six banques et institutions financières irlandaises ont été socialisées. Ceci pourrait avoir pour conséquence que le peuple irlandais devra supporter une dette non acquittable de 240 milliards d’euros, voire même, finalement, de l’ordre de 500 milliards d’euros – pour une population de 4,5 millions d’habitants. Cette stratégie a été imaginée et imposée par la Banque centrale européenne et par la Commission Européenne. Au cœur même de cette stratégie se trouve l’objectif de soutenir le système bancaire et financier allemand, de même que les banques britanniques et françaises. On estime que les banques irlandaises doivent aux banques allemandes un montant de l’ordre de 130 milliards d’euros – et c’est désormais au peuple irlandais qu’il incombe de payer cette facture. Tout ceci se fait dans le but de sauver l’euro, ce qui explique pourquoi les communistes irlandais ont fait campagne contre l’adhésion à l’euro de l’État irlandais. Aujourd’hui, en réclamons publiquement la rupture avec l’euro. Quelles sont vos propositions de solution au problème, en tant que communistes irlandais ? Eugene Mc Cartan. Nous avons réclamé l’instauration d’une Banque publique de développement, sous contrôle démocratique et sous garantie de la constitution, afin d’assurer les économies et les pensions des gens. Nous avons également proposé la création d’une Société économique de développement pour


toute l’Irlande, afin d’étendre le secteur d’État aux secteurs des nouvelles technologies, afin de gérer et de développer toutes les ressources naturelles, et tout particulièrement le pétrole et le gaz (l’État irlandais estime qu’il existe des réserves d’une valeur de 500 milliards d’euros au large de la côte ouest du pays) et les ressources de la mer. Les forces en faveur du changement ont progressivement pris de l’ampleur, avec plus de 100 000 travailleurs lors d’une manifestation de masse en novembre dernier. Une conférence qui s’est tenue en octobre a rassemblé plus d’un millier de militants sous le slogan « Réclamons notre avenir ». Après le budget, des milliers de militants de la communauté ont participé à un carnaval de rue sous le slogan « Vous coupez, nous saignons ». Tout récemment, le Parti communiste d’Irlande a tenu un meeting public sur le thème « Après le budget, que faire maintenant ? ». Certains membres de la direction du mouvement syndical y ont participé, et cela représente une rupture importante vis-à-vis de l’idéologie anticommuniste qui a infecté la majeure partie du mouvement syndical durant des décennies). Les communistes irlandais renouvellent leur campagne sous le slogan « Bâtissez la résistance du peuple, construisez l’alternative du peuple ». (*) Ali Ruckert est rédacteur en chef de "Zeitung vum Lëtzebuerger Vollek", journal du Parti Communiste de Luxembourg.

Irlande :: La crise et le plan d’économies font des victimes Les Irlandais sont furieux. Après la crise de septembre 2008 déjà, ils avaient dû endurer un plan d’austérité draconien. Le gouvernement veut à nouveau imposer des économies, encore plus dures. Samedi, 100 000 Irlandais sont descendus dans la rue. Tony Busselen « Marionnettes des États-Unis et du FMI » (Fonds monétaire international). Ils étaient 100 000, samedi dernier, à crier leur colère contre leur gouvernement. (Photo Communist Party of Ireland)

« Émigrez en Australie pour un emploi et un avenir » « Nos enfants sont menacés, et jusqu’à nos arrière-petits-enfants », entendait-on samedi dans les rues de Dublin. Les Irlandais éprouvent déjà les conséquences de la crise depuis deux bonnes années. Ils savent bien que le quatrième plan d’austérité va entraîner beaucoup d’entre eux dans une pauvreté sans issue. Le plan prévoit de diminuer le revenu de chaque ménage de 4 600 euros en moyenne pour 2014. Irina Malenko, une Russe qui habite Dublin, nous écrit : « La crise saute aux yeux. Des cafés et des boutiques bondés jusqu’il y a peu sont maintenant vides. Dans certaines rues, tous les immeubles de bureaux sont à louer. Des bus affichent la réclame : “Émigrez en Australie pour un emploi et un avenir”. » Et de fait, 65 000 personnes ont fui l’Irlande l’an dernier, 40 % de plus que l’année d’avant, et ce chiffre continue à augmenter. Un jeune manifestant a raconté samedi à l’Irish Times : « Il y a cinq ans que je suis diplômé et j’ai déjà été mis à la porte deux fois. J’ai travaillé d’abord dans une institution de soins privée, notre entreprise a été reprise et j’ai été licencié dans une restructuration. Mon employeur suivant a fait faillite. Je travaille maintenant en intérim, mais j’ai demandé un visa pour l’Australie. Je ne peux tout simplement pas rester. Moralement, je ne supporterais pas un troisième licenciement et l’avenir est devenu beaucoup trop incertain ici. Je suis très fâché contre le gouvernement. Nous devons avoir un autre gouvernement, mais surtout une autre politique. On nous retire tout des mains. Cela devient insupportable pour les gens. »


De plus en plus de gens dorment dehors Les économies annoncées ont été inspirées par le Fonds monétaire international. Le FMI avait déjà préconisé la diminution du salaire minimum et des revenus de remplacement (chômage, maladie de longue durée…) Le gouvernement de Dublin obéit : il abaisse de 11,5 % le salaire minimum et réduit de 2,8 milliards d’euros le budget des revenus de remplacement. En exerçant une plus forte pression sur les chômeurs, il prétend abaisser le taux de chômage de 13,5 % à moins de 10 %. Le responsable de Social Justice, une organisation de lutte contre la pauvreté, dit à ce propos : « Cela va précipiter les travailleurs les plus pauvres dans une plus grande pauvreté. Obliger les gens à travailler, c’est absurde. Quels emplois doivent-ils occuper ? Il y a déjà 450 000 chômeurs. Il n’y a pas d’emplois. » En pratique, plus de 110 000 personnes risquent l’exclusion du chômage. « On entend à la radio des appels d’organisations charitables pour “assurer à de pauvres familles irlandaises au moins de bonnes fêtes de fin d’année”. Il y a peu, on n’entendait cela que pour l’Afrique », écrit Irina. Le nombre de sansabri augmente. La semaine dernière, deux refuges de Dublin ont annoncé accueillir 66 % de visiteurs en plus. « Quand on se promène, on voit de plus en plus de gens dormir dans des halls d’entrée, tentes ou parcs », déclare au journal Independant Ireland Tony Geoghegan, de l’organisation charitable Merchants Quai. Olive Loughnan de l’organisation charitable Focus Ireland explique dans le même journal que la pauvreté qui ne devient visible qu’aujourd’hui remonte à plusieurs années : « Les gens commencent par perdre leur travail. Ils compensent en vidant leur livret d’épargne. Ensuite, ils s’adressent à la famille et quand tout ça échoue, ils perdent finalement leur logement et se retrouvent sans abri. » La froideur des chiffres de 2009 Le revenu moyen des ménages a diminué de 7 % par rapport à 2008. 24 % des ménages ont un retard de paiement dans une ou plusieurs dettes. En 2008, ce n’était encore que 10 %. 48 % des ménages ne seraient pas en état de faire face à une dépense imprévue de 1 000 euros. Le taux de pauvreté est monté de 1,3 à 5,5 %. 14 % des Irlandais risquent de tomber dans la pauvreté. Pour les familles monoparentales, c’est 17 %.


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