ICEBERG SERIES #2 - Amira (French)

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Chacun a droit à l’éducation. Aucun enfant ne devrait être empêché d’aller à l’école du fait de son sexe, de sa race ou de son handicap, quel qu’il soit, ou pour des raisons d’accessibilité. L’histoire d’Amira donne à des lecteurs de tous horizons la possibilité de comprendre quelques uns des obstacles rencontrés par les enfants handicapés. Elle permet de se mettre à la place de ces enfants qui vivent des situations comparables ou plus difficiles et d’apprendre à être plus attentifs à leurs besoins. Cet ouvrage doit être une source d’inspiration, d’espoir et d’action, parce que l’éducation est l’affaire de tous.

STORY BY KIRSTEN DEALL

ILLUSTRATIONS BY HANNAH BARR


La série de publications Iceberg a été inspirée par les infographies « Iceberg » du projet de changement de la perception, qui mettent en contraste l’action réelle des Nations Unies face aux problèmes mondiaux et la manière dont les médias choisissent d’en rendre compte.

La production du présent ouvrage n’aurait pas été possible sans le concours financier de la Fondation pour Genève. Nous remercions tout particulièrement la Division de la gestion des conférences de l’ONU Genève pour l’édition, la traduction et l’impression des ouvrages, et l’Union University de Jackson (États-Unis) pour les illustrations.

Imprimé en 2018 par la Section de l’impression de l’ONU Genève.

Auteur : Kirsten Deall Directeur de publication : Daniel Sanderson Illustratrice : Hannah Barr


STORY BY KIRSTEN DEALL

ILLUSTRATIONS BY HANNAH BARR

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La collection « Iceberg » Iceberg Éducation Pauvreté Jeunesse Changements climatiques Genre Santé Droits Paix La collection a été créée par l’équipe chargée du projet de changement de la perception, qui relève du Cabinet du Directeur général de l’ONU Genève.

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Éducation inclusive Dans le cadre d’une éducation inclusive, tous les enfants, y compris ceux qui sont généralement marginalisés (tels que les enfants handicapés, les filles, les enfants vivant dans des villages reculés et les enfants issus de familles très pauvres) reçoivent une éducation de qualité. L’éducation inclusive repose sur l’idée simple que chaque enfant compte et doit bénéficier des mêmes enseignements, des mêmes opportunités et doit pouvoir participer aux activités de la vie quotidienne, quels que soient sa race, son sexe, son origine ethnique, son origine sociale, sa situation économique ou son handicap, visible ou invisible. L’éducation inclusive consiste à adapter la vie scolaire aux besoins individuels, de sorte que chaque enfant suive un enseignement de qualité. Les enfants handicapés ne sont qu’un groupe marginalisé parmi d’autres ; ils sont mis sur le devant de la scène dans l’histoire d’Amira. Par le passé, ils fréquentaient des classes ou des écoles distinctes, si bien que l’on avait généralement admis que l’enseignement spécialisé qu’ils recevaient supposait de les séparer des autres enfants. Or, les enfants handicapés qui fréquentent des écoles ordinaires améliorent leurs relations sociales et leurs résultats scolaires. Être simplement en contact avec des élèves sans handicap ne permet pas d’obtenir ces bienfaits ; il faut que cette mixité fasse l’objet d’un engagement sans faille et soit constamment entretenue par des activités de sensibilisation, de planification et d’appui. Les enfants handicapés ont besoin de pouvoir apprendre et de pouvoir participer efficacement à la vie de la classe. Dans certains cas, l’aide apportée par leurs amis ou leurs enseignants est l’option la plus appropriée. Dans d’autres cas, les nouvelles technologies ou des supports pédagogiques spécifiques peuvent leur être utiles. Il est important que les écoles accueillent tous les enfants, indépendamment de leurs particularités physiques, émotionnelles ou sociales, de leur langue ou d’autres facteurs, car l’éducation est un droit de l’enfant, et non un privilège.

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Mon nom est Amira. J’enseigne à des enfants pas tout à fait ordinaires. Voici mon histoire. Lorsque j’étais enfant, les écoles du voisinage étaient surtout fréquentées par des garçons, pas par des filles. Dans mon pays, les garçons reçoivent une éducation, les filles sont données en mariage. Comme mon père respectait les traditions, il avait décidé de trouver celui qui deviendrait mon mari lorsque j’aurais atteint l’âge de 10 ans. Je ne savais pas ce qu’était le mariage, mais j’étais impatiente d’avoir 10 ans, à cause de ce que mon père m’avait dit de son projet. Ce qu’il ne m’avait pas dit, en revanche, c’est que je ne serais pas autorisée à aller à l’école.

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Ma mère ne voyait pas les choses de la même manière que mon père. Lorsque j’ai eu trois ans, elle s’est mise à me faire la lecture. Elle disait que j’adorais observer les mots sur le papier, ce qui n’a jamais changé. Elle savait que mon père ne voulait pas que j’apprenne à lire, alors elle cachait les livres avant qu’il ne rentre à la maison. Au bout de quelque temps, ma mère a pensé que ce serait une bonne idée que j’aille à l’école. Cela supposait que je fréquente un établissement qui soit loin de chez nous, pour ne pas être vue des voisins. C’est ainsi que, chaque jour après le départ de mon père pour le travail, ma mère m’accompagnait à l’école des petits. J’avais toujours très peur que mon père nous surprenne sur le trajet du retour, entre l’école et la maison.

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Il était parfois trop dangereux pour moi d’aller à l’école. Tous les matins, je me réveillais avec l’espoir que je ne serais pas obligée de rater la classe. J’aimais apprendre, me faire des amis et manger à l’école. Tous les jours, les enseignants nous distribuaient un repas. Il y avait différentes sortes de sandwiches et de fruits et, le vendredi, quelque chose de spécial, comme du poulet et du riz. J’ai toujours aimé la nourriture qu’on nous servait, parce qu’elle était différente des plats que ma mère préparait à la maison. Maman travaillait à la ferme de son cousin. Elle plantait, transportait les récoltes au moulin et s’occupait des poules. On la conduisait en voiture de la maison à la ferme, et de la ferme à la maison, une femme n’étant pas autorisée à se déplacer seule. Quand je ne pouvais pas aller à l’école, je l’aidais souvent dans ses travaux à la ferme.

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Je me souviens très bien d’avoir joué au « téléphone arabe », un jour à l’école. Les enfants s’assoient en cercle, l’un d’eux chuchote une phrase à l’oreille de son voisin, que celui-ci doit transmettre à son tour à la personne à côté de lui. Le message est censé circuler entre les enfants sans subir aucune altération, mais il est souvent bien différent une fois achevé le tour du cercle. C’est très amusant. Du moins, ça l’est pour la plupart des enfants. Dans mon cas, ce jeu est associé à un souvenir désagréable. Voilà venu mon tour de connaître le message à faire circuler, mais je n’entends rien de ce que ma voisine me chuchote. Celle ci répète plusieurs fois. Mes camarades m’observent et attendent. Certains ricanent. Ma voisine décide de parler à mon autre oreille. J’entends mieux ce qu’elle me dit, mais elle ne chuchote plus et parle quasiment à voix haute.

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Les enseignants ont été les premiers à se rendre compte que j’avais un problème auditif et m’ont conseillée d’aller à l’hôpital public. Là, les médecins ont confirmé que je ne pouvais pas entendre comme le pouvaient les autres enfants. Ma mère a fait part du diagnostic à mon père, sans pour autant révéler que j’allais à l’école. Par la suite, j’ai subi plusieurs opérations. La situation était très pesante pour ma famille en raison des coûts très élevés qu’elle devait supporter, mais mon père insistait pour que je sois soignée. Selon lui, toute forme de « handicap » limiterait mes chances de me marier rapidement. J’ai de nombreux souvenirs des cliniques dans lesquelles j’ai séjourné. Je me souviendrai toujours des bips des machines et de l’odeur des cabinets médicaux. L’hôpital public n’était pas terrible. J’y ai souvent contracté des otites à cause du manque d’hygiène. Les patients étaient si nombreux et les docteurs, si rares. Les médecins n’avaient pas le temps de s’occuper de moi ou d’être à l’écoute de mes besoins.

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Grâce aux opérations, mon audition s’est améliorée, même si certaines situations venaient sans cesse me rappeler qu’elle restait quand même limitée. Je devais souvent quitter la cour de récréation pour me rendre chez une spécialiste des troubles du langage et de l’audition. Je m’éloignais de mes camarades, la tête baissée. Je ne voulais pas croiser leurs regards et les voir demander au professeur où j’allais. J’étais courageuse. Je ne me plaignais jamais. Mais je savais que j’étais différente. La spécialiste que je consultais était une dame aimable et amicale, qui faisait tout pour me rendre les séances agréables. Il n’empêche. Je ne voulais pas être là.

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Il était d’usage que mes parents s’entretiennent avec les médecins de la clinique de l’état de mon audition, pendant que j’attendais à l’extérieur de la pièce, assise sur un banc. Ma mère transmettait les informations obtenues à mes professeurs, mais me cachait bon nombre d’entre elles pour me protéger. Elle faisait ce qu’elle pensait être le mieux pour moi ; elle considérait que j’étais une enfant et qu’elle m’aurait inquiété inutilement en me donnant des détails, si bien que je n’ai jamais vraiment compris de quoi je souffrais. Ni vraiment su de quoi j’étais capable.

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Le sentiment d’exclusion ne se limitait pas au fait d’être écartée des conversations des adultes. Même si j’allais dans une école primaire ordinaire, je me sentais « en dehors du cercle ». Les enseignants ne savaient pas comment faire la classe à des enfants avec un handicap, lourd ou léger, n’ayant reçu aucune formation en la matière. La maîtresse me faisait asseoir au premier rang et me demandait de confirmer, devant toute la classe, que je pouvais l’entendre. C’était très embarrassant. Bien que curieux, mes amis ne savaient pas non plus comment se comporter avec quelqu’un comme moi, qui avait sans doute besoin de plus d’attention.

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Lorsque j’ai achevé le cycle d’enseignement primaire, mon père s’est mis à évoquer de plus en plus la perspective de mon mariage. Les hommes dont il parlait étaient tous très vieux, presque aussi vieux que lui. J’ai tout de suite su qu’il était hors de question que je me marie si jeune. Je ne pouvais plus cacher à mon père que j’allais à l’école. Je le lui ai donc dit. Je lui ai annoncé que je choisissais l’éducation, plutôt que le mariage. Ma mère disait souvent que j’avais une très forte personnalité, mais elle ne se rendait pas compte qu’en fait j’étais complètement terrifiée. Mon père a réagi comme on pouvait s’y attendre. Il m’a averti que si je choisissais l’éducation, il me renierait. C’était une terrible menace. Je n’avais personne d’autre au monde. Si mon père me reniait, j’aurais à quitter mes amis, ma maison, tout ce qui m’était familier. Je ne pouvais pas supporter l’idée de devoir faire mes adieux à ma mère. C’était elle qui m’avait donné le goût d’apprendre. Je savais aussi que mon père la punirait de m’avoir envoyée à l’école à son insu. Sur l’insistance de ma mère, et vivement encouragée par celle-ci, je partis.

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J’ai terminé mes études secondaires grâce à l’argent que ma mère m’a donné et à celui que j’ai gagné en travaillant comme éducatrice pendant les vacances scolaires. J’ai poursuivi un cursus universitaire grâce à des bourses d’études. J’ai obtenu mon diplôme d’enseignante en me classant parmi les meilleurs étudiants de ma promotion et, peu de temps après, je me suis vue offrir un emploi dans une école primaire qui accueillait des enfants avec des besoins éducatifs spéciaux. Forte de ce que j’avais vécu, j’ai pu accomplir beaucoup, mais la plus grande récompense a été de m’occuper de ces enfants. Mon « handicap » n’a pas restreint mes choix. Il ne me définissait pas. J’étais capable de vivre pleinement, d’exploiter un potentiel dont, pendant longtemps, je n’avais pas soupçonné l’existence.

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Je m’appelle Amira. Je ne suis pas une superhéroïne. Le monde n’a pas besoin de superhéros. Le monde a besoin de gens ordinaires, comme vous et moi, qui savent être à l’écoute. Si nous n’écoutons pas les autres, nous ne pouvons pas les comprendre ; or, il est essentiel de comprendre les besoins des autres pour savoir comment y répondre.

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« L’essentiel est que les enfants avec des besoins spéciaux soient scolarisés et qu’ils soient associés à toutes les activités éducatives de la journée ainsi qu’aux activités périscolaires. » Ed Polloway, Professeur émérite en éducation « Rosel H. Schewel »

« Nous luttons pour l’inclusion, nous luttons contre les inégalités qui empêchent 263 millions d’enfants et de jeunes, majoritairement des filles, d’aller à l’école ». Irina Bokova, Directrice générale de l’UNESCO « L’éducation inclusive est l’affaire de tous, elle suppose la capacité d’être à l’écoute des communautés et des familles et de répondre à leurs questions sur les environnements d’apprentissage les mieux adaptés aux enfants. » Renato Oppertti, Spécialiste principal de

programme, Bureau international d’éducation

« Un enfant sur sept a des besoins spéciaux. Les enfants avec des besoins spéciaux sont privés de leurs droits et marginalisés. Ils ne peuvent pas aller à l’école parce que les établissements scolaires ne sont pas équipés de rampes d’accès ; quant aux toilettes, elles ne sont pas adaptées aux situations de handicap. Les enseignants n’ont pas reçu de formation spécifique et font donc comme ils peuvent pour enseigner à des enfants sourds ou avec un handicap visuel. Les enfants autistes vont dans des écoles spécialisées. En septembre 2015, les décideurs mondiaux ont convenu de promouvoir l’éducation inclusive et de faire en sorte que tous les enfants aillent à l’école. Chaque école doit être dotée des moyens et des ressources pour garantir à tous l’accès à l’éducation et un apprentissage efficace. Les enfants avec des besoins spéciaux auront accès à l’éducation, à tous les niveaux d’enseignement, d’ici à 2030. Ils pourront acquérir les compétences professionnelles qui leur permettront d’avoir un travail décent. » Mosharraf Hossain, Directeur de pays, ADD International


À la rencontre des

vrais héros

L’histoire d’Amira est une fiction. Cependant, il existe bon nombre d’histoires semblables qui sont bien réelles, dans lesquelles le chemin de l’éducation s’est révélé semé d’embûches. Michaela « Chaeli » Mycroft est née avec une paralysie cérébrale et une motricité réduite des membres supérieurs et inférieurs. En 2012, à l’âge de 17 ans, elle a reçu le prix international des enfants pour la paix, en récompense de son action en faveur des droits des enfants handicapés en Afrique du Sud. En 2004, alors qu’elle avait 9 ans, Chaeli a fondé avec sa sœur et trois amies « Campaign Chaeli », pour les droits et l’inclusion des enfants handicapés dans toute l’Afrique du Sud. Cette organisation propose des dispositifs d’assistance, des séances de physiothérapie et des programmes adaptés aux enfants handicapés. Elle élabore aussi des programmes éducatifs qui contribuent à la scolarisation des enfants handicapés dans les écoles ordinaires. « Nous pensons que l’éducation inclusive peut devenir une réalité, pour autant qu’un appui soit fourni aux personnes handicapées », a déclaré Chaeli. Elle a ajouté que les familles, les enseignants et les camarades des enfants handicapés avaient aussi besoin d’être soutenus. « Intégrer les enfants handicapés dans les écoles ordinaires est la première étape vers l’éducation inclusive ».

Source : UNICEF. Malik, âgé de 6 ans et de nationalité togolaise, est né avec une pathologie qui l’empêche de marcher. L’organisation « Plan International » a financé les soins chirurgicaux et les services de réadaptation dont il avait besoin pour se rétablir et pouvoir aller à l’école. Elle a formé les professeurs de l’école de Malik à l’enseignement aux enfants handicapés. Selon le professeur du jeune garçon, M. Koula, « lorsque Malik est venu à l’école pour la première fois, il a été victime de beaucoup de discrimination ». « Depuis que nous leur avons expliqué le handicap de Malik, les élèves l’apprécient tout autant que les enseignants ». Les professeurs de Malik ont reçu une formation pour que Malik bénéficie d’une éducation de qualité.

Source: Plan International. Sabina, 12 ans, qui a grandi dans la province rurale de Balkh, en Afghanistan, dit que « [sa] sœur a décidé de ne plus aller à l’école au bout de sa première année de scolarité. Elle était trop fatiguée. Elle devait marcher 4 heures chaque jour, aller et retour, pour s’y rendre ». Sabina a pu commencer ses études à l’âge de 10 ans, lorsque sa famille s’est installée dans la ville de Mazar-e-Sharif. Sa sœur, déscolarisée, s’est mariée à l’âge de 15-16 ans.


En Afghanistan, de nombreuses filles se démènent pour étudier. D’autres peuvent compter sur leur famille, qui les soutient dans leur lutte − en déménageant à l’autre bout de la ville ou du pays pour leur trouver une école ou en les envoyant chez des parents qui habitent à proximité d’un établissement scolaire. Des familles entières ont conspiré pour que leurs filles aillent à l’école, sans que le père, opposé à cette entreprise, n’en sache rien. Des filles encore en âge de jouer avec des jouets peuvent parler avec compétence de la campagne des Taliban contre l’éducation, des bombardements et des opérations de l’armée afghane. Des membres de leur famille ont été tués ou blessés, d’autres ont fui le pays pour leur sécurité, et certains ne se sont jamais remis de la mort d’un enfant. Le plus souvent, lorsqu’elles travaillent, les filles tissent des tapis, font de la couture et de la broderie, ou s’occupent du foyer − ce qui les empêchent d’étudier. Elles sont bien trop nombreuses à se marier alors qu’elles ne sont pas encore sorties de l’enfance, et le mariage, voire simplement les fiançailles, réduisent à néant tous leurs espoirs d’éducation. Lorsque des filles ont la chance d’aller à l’école, elles sont généralement séparées des garçons. Or, il y a moins d’écoles pour les filles que d’écoles pour les garçons. Dans un cas solidement documenté, les garçons étaient scolarisés dans des bâtiments neufs, financés par des donateurs internationaux, tandis que les filles étudiaient sous des tentes, dans un terrain vague voisin. Il arrive aussi que des parents interdisent à leur fille d’aller à l’école, parce que les enseignants sont des hommes. Seulement la moitié des provinces afghanes ont des écoles dont plus de 20 % des enseignants sont des femmes. La pauvreté joue un grand rôle dans l’accès des enfants à l’éducation. L’enseignement public est gratuit, mais les crayons, les cahiers, les cartables et les uniformes ne le sont pas, ce qui le rend hors d’atteinte pour beaucoup. Source: Human Rights Watch. Zarifa, 17 ans, suivait des cours avec une trentaine d’autres filles, dans son quartier de Kaboul. La classe dont elle faisait partie, qui avait été créée par une organisation non gouvernementale, a ensuite été transférée dans une école publique. La plupart des élèves se sont dispersées. « Très peu sont restées », indique Zarifa. « Certaines se sont mariées, d’autres se sont vues interdire par leur famille de poursuivre leur scolarité, d’autres encore ont craint pour leur sécurité… Il y a trop d’élèves ; c’est difficile de les superviser. On manque de chaises, de professeurs, d’espace. Les salles de classe sont bondées, au point que l’on étudie sous des tentes. On manque de livres. Il m’est arrivé de ne pas avoir de livres ». Six années plus tard, seulement 8 à 10 des 35 élèves initiales allaient encore à l’école. « Je n’ai pas le droit d’abandonner. J’ai pris l’engagement d’aller jusqu’au bout », dit Zarifa. Source: Human Rights Watch.


Francisca n’a pas eu le choix. Elle a dû quitter l’école alors qu’elle était en troisième année du cycle d’enseignement primaire. Elle s’est mise à travailler dans les champs et à s’occuper de ses frères et sœurs, pour aider ses parents. Au Guatemala, pour la plupart des filles autochtones issues de familles nombreuses et pauvres, étudier est hors de question. Depuis 2018, le Fonds Malala de l’UNESCO pour le droit des filles à l’éducation contribue à la mise en place d’un modèle éducatif pour les filles et les jeunes femmes de Totonicapán, avec la création de deux centres Malala. L’objectif de ce nouveau projet, dirigé par le Bureau de l’UNESCO au Guatemala, est de mettre en œuvre le droit à l’éducation, en particulier de ceux qui sont mis à l’écart du système éducatif en raison de leur sexe, de leur origine ethnique, de leur origine rurale et de leur pauvreté. Lorsque Francisca a eu 19 ans, des représentants du projet sont venus dans sa communauté et lui ont proposé de l’aider à poursuivre ses études dans le cadre du programme d’enseignement primaire accéléré du Ministère de l’éducation. Grâce à cette aide, Francisca a pu terminer l’école primaire. Aujourd’hui, elle travaille comme cuisinière dans une cafétéria et gagne de l’argent pour elle et sa famille. Son rêve est d’aller au lycée et de poursuivre ses études pour devenir un grand chef. Pour Francisca, « l’éducation est une nourriture qui nous fait grandir ». Source : UNESCO. Fardowsa Bile Abdullahi, Somalienne de 17 ans, dit qu’elle est « très différente depuis qu’elle sait lire et écrire ». « Ma famille me confie ses affaires parce que, grâce à ce que j’ai appris au centre, je sais compter l’argent et faire des transactions commerciales », explique-t-elle. Fardowsa est l’une des jeunes femmes qui ont bénéficié d’un projet d’alphabétisation et de préparation à la vie active, financé par la Fondation Al Maktoum et mis en œuvre par l’UNESCO. En raison des troubles civils et des affrontements dans son pays, elle n’a pas eu la possibilité d’accéder à l’éducation et d’apprendre pendant son enfance. L’éducation de base n’était accessible qu’aux rares personnes qui en avaient les moyens, la plupart des établissements d’enseignement étant privés. « Un jour, alors que je me rendais au marché, un ami m’a parlé du centre de formation communautaire pour les femmes de Somalie. J’y suis allée immédiatement et me suis inscrite aux cours d’alphabétisation, de calcul et d’entreprenariat », raconte Fardowsa. « Pour des gens comme moi, qui n’ont jamais eu la chance de faire des études, ce centre offre une occasion unique d’apprendre ».

Source : UNESCO.


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Derrière chaque

donnée statistique, ilA y

Voici juste quelques exemples de données statistiques encourageantes, qui mériteraient d’être mises en avant par les médias. Certains des chiffres ci-après pouvant évoluer de jour en jour, il convient de se reporter aux sites Web des organisations concernées pour obtenir les informations les plus récentes. • Le 20 janvier 2016, le Zimbabwe a interdit le mariage d’enfants ; • Depuis 2016, la République de Moldova impose que les hommes et les femmes représentent respectivement au moins 40 % des candidats désignés par les partis politiques et des candidats aux postes ministériels (ONU Femmes) ; • Au Bangladesh, 1,24 million de filles, scolarisées dans 6 700 écoles secondaires, ont bénéficié du projet de la Banque mondiale visant à améliorer l’accès à l’enseignement secondaire et la qualité de cet enseignement ; • Au Ghana, dans le cadre du projet d’amélioration de l’enseignement secondaire, 3 450 lycéennes de 15 à 17 ans reçoivent des bourses, qui couvrent leurs frais d’inscription et leurs autres dépenses, notamment pour les livres et les uniformes, pendant trois années d’études secondaires ; • Au Pakistan, le nombre de filles scolarisées dans des établissements publics d’enseignement secondaire a augmenté de 9 %, grâce aux projets de la Banque mondiale en faveur de l’éducation dans le Pendjab. Dans le cadre de ces projets, des bons d’études ont été distribués à 150 000 adolescentes de la région en situation de vulnérabilité et sans véritable accès à

l’éducation et des allocations en espèces ont été versées à 400 000 filles vivant dans des régions peu alphabétisées, dans le but de favoriser l’assiduité scolaire ; • Au Nigéria, le pourcentage de filles ayant achevé le premier cycle de l’enseignement secondaire est passé de 7 % à 34 % entre 2007 et 2011 − période d’exécution du projet de la Banque mondiale en faveur de l’enseignement public ; • En 2016, 1,2 million d’enfants ont été scolarisés dans le monde, grâce au programme de parrainage de l’organisation Plan International ; • En 2016, 2,8 millions de personnes ont reçu une formation d’enseignant avec l’aide de Plan international ; • En 2016, 17,1 millions de filles ont bénéficié des programmes éducatifs de Plan International ; • En 2016, 15,5 millions de garçons ont bénéficié des programmes éducatifs de Plan International ; • En 2016, 97 millions d’euros ont été investis dans le droit à l’éducation, par l’intermédiaire de Plan International.


La Genève internationale Si elle ne représente qu’une petite partie du territoire helvétique, Genève peut s’enorgueillir de certains des principaux atouts de la Suisse. La beauté de ses paysages subjugue dès la première visite, le dynamisme de son centre financier attire des personnes de toutes cultures, sa qualité de vie est connue de tous ses résidents, mais surtout, Genève est la ville qui compte le plus grand nombre d’organisations internationales. C’est pourquoi l’on parle de la « Genève internationale ». Tout a commencé en 1863, lorsque la Croix-Rouge a été créée dans le but de protéger la vie des blessés et des victimes de conflits armés. Aujourd’hui, la Genève internationale s’occupe non seulement des besoins humanitaires, mais aussi de la paix, de la santé, de la science, des droits de l’homme, des migrations ou des changements climatiques. Elle regroupe des organisations internationales, des établissements universitaires, des entreprises internationales, de nombreuses organisations non gouvernementales et les représentants permanents de 178 États membres de l’ONU. L’action de la Genève internationale est perceptible bien au-delà de la ville elle-même et est guidée par le Programme de développement durable à l’horizon 2030. En poursuivant les 17 objectifs de développement durable, la Genève internationale et ses nombreux partenaires dans le monde luttent contre la pauvreté, préviennent les violences et protègent la planète, entre autres actions. Genève est peut-être petite par la taille, mais elle est grande par son rayonnement. C’est la ville la plus petite et la plus grande au monde. C’est la ville de la paix, où le monde se donne rendez-vous pour trouver des solutions.

Les objectifs de développement durable À une époque où nous sommes bombardés par les mauvaises nouvelles, nous pouvons facilement nous sentir découragés et démunis pour améliorer le monde dans lequel nous vivons. Heureusement, pour remédier à ces nombreux problèmes, les dirigeants mondiaux ont adopté le Programme 2030, un document d’orientation consistant en 17 objectifs pour transformer notre planète et en faire un meilleur lieu de vie. Ces objectifs concernent tout le monde, ils ne laissent personne de côté, ils sont tous interdépendants et leur réalisation est de la responsabilité de chacun. Nous avons tout ce dont nous avons besoin pour aider chacun à s’épanouir et à exprimer pleinement son potentiel. Ensemble, créons un monde de paix, de droits et de bien-être.


Le projet de changement de la perception Souvent, lorsque les gens entendent parler de l’ONU pour la première fois, leur regard s’illumine. C’est surtout vrai s’il s’agit d’enfants. Savoir qu’il existe une organisation capable de réunir le monde entier au nom de la paix, des droits et du bien-être offre un réconfort incomparable. Il n’est nul besoin d’expliquer pourquoi cette organisation est nécessaire. Nous savons tous pourquoi. Elle existe, pour nous tous. Et elle fait partie de la Genève internationale. Dans le même temps, ce sentiment d’émerveillement et de sécurité se dissipe rapidement, car l’époque est tumultueuse et, évidemment, la réalité est différente. Nous avons des hauts et des bas, et nous devons aussi sans cesse nous adapter pour relever de nouveaux défis. Il est d’usage que les médias attirent l’attention sur les éléments négatifs et que nous considérions les éléments positifs comme acquis. Il est dans notre nature d’insister sur les problèmes à résoudre, plutôt que de louer nos mérites. Pourtant, l’ONU et ses partenaires maintiennent leurs objectifs, et leur action continue d’avoir des répercussions profondes, ce dont nous n’avons pas toujours conscience dans notre vie quotidienne. La bonne nouvelle est que cette constellation d’organisations qui constitue la Genève internationale est toujours en place et qu’elle poursuit sa noble mission. La Genève internationale appartient à chacun de nous. Pour qu’elle puisse se développer, il faut que sa valeur et son influence soient reconnues et qu’elle soit assurée de pouvoir mener à bien son mandat. C’est dans ce but que le projet de changement de la perception a été créé, et il l’atteint chaque fois qu’il parvient à rallumer cette étincelle dans les yeux à l’évocation de l’ONU.


La série de publications Iceberg a été inspirée par les infographies « Iceberg » du projet de changement de la perception, qui mettent en contraste l’action réelle des Nations Unies face aux problèmes mondiaux et la manière dont les médias choisissent d’en rendre compte.

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Auteur : Kirsten Deall Directeur de publication : Daniel Sanderson Illustratrice : Hannah Barr


Chacun a droit à l’éducation. Aucun enfant ne devrait être empêché d’aller à l’école du fait de son sexe, de sa race ou de son handicap, quel qu’il soit, ou pour des raisons d’accessibilité. L’histoire d’Amira donne à des lecteurs de tous horizons la possibilité de comprendre quelques uns des obstacles rencontrés par les enfants handicapés. Elle permet de se mettre à la place de ces enfants qui vivent des situations comparables ou plus difficiles et d’apprendre à être plus attentifs à leurs besoins. Cet ouvrage doit être une source d’inspiration, d’espoir et d’action, parce que l’éducation est l’affaire de tous.

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