LE JEU D’APPRENTISSAGE ET LES THÉORIES DIDACTIQUES
Synthèse de Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
DÉFINITION DE LA PÉDAGOGIE EN CONTRASTE AVEC LA DIDACTIQUE La pédagogie est l’ar t de conduire les élèves à apprendre. C’est un dispositif pour déployer un processus optimal d’apprentissage . Ce dispositif relève de l’intercommunication en classe , variable selon les élèves présents et l’objet de savoir à enseigner, il existe plusieurs formats pédagogiques, plusieurs situations d’apprentissages… On parle de pédagogie dif férenciée, de pédagogie fondée sur le tutorat, de pédagogie active, de pédagogie avec des situations ouver tes d’apprentissage, etc. La didactique s’intéresse aux objets de savoir dans ce qu’ils ont de spécifique relativement à leur s apprentissages : quelles sont leurs propriétés? Quels freins et leviers pour les faire acquérir? Comment faire pour rendre l’objet de savoir appropriable?
On peut aussi dire que la pédagogie est généraliste, tandis que la didactique est singulière. Elle concerne telles ou telles science ou discipline (« didactique des mathématiques », « didactique de l’histoire », « didactique du français langue étrangère »...). La pédagogie relève de la face communication et savoir et la didactique de la face appropriation et savoir (appropriation de l’objet de savoir) © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
DÉFINITION DE LA PÉDAGOGIE EN CONTRASTE AVEC LA DIDACTIQUE Ou autrement dit, la relation pédagogique se situe entre l’apprenant et l’enseignant; tandis que la relation didactique se situe entre l’enseignant et le savoir. La dernière relation dite d’apprentissage, on se trouve sur le versant de la relation d’apprentissage entre l’apprenant et le savoir – du triangle didactique défini par Houssaye Dans son modèle de compréhension pédagogique, Jean Houssaye, professeur de Sciences de l'Éducation, définit l'espace pédagogique comme l'espace entre trois sommets d'un triangle : l'enseignant, l'apprenant et le savoir. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
RÊVE DE FORMATION… À RÉALITÉ : QUELS ÉCARTS?
cours rêvé cours analysé
cours planifié
cours réalisé
cours ajusté
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
Reprenant des propos de Pastré, inspiré des travaux sur les vols aériens (Recherches et formation, quelques considérations sur l’activité enseignante), nous imaginons cette représentation qui part d’une idée, le cours rêvé, à celui qui est réalisé, passant par les phases préalables de planification et ajustement in situ. La dernière phase de cours débriefé (ou de planification post-active) correspond à l’analyse personnelle ou avec les collègues d’une séance, qui prépare la suivante grâce à la réflexivité opérée après l’action, grâce à des glissements dans la conceptualisation du métier. 4
L’ACTION DIDACTIQUE S’interroger sur les objets de savoir, en cerner les spécificités et dif ficultés… Rendre le savoir assimilable, le transposer… Imaginer un scénario didactique lié aux représentations et opérations cognitives des apprenants, contenus, stratégies, déroulements… Agencer un dispositif didactique, environnement, ressources, transfert, problématisation… Jouer « le jeu de l’apprendre », réguler… © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
TRIANGLE DIDACTIQUE enseignant
Tâche scolaire
élève (s)
savoir
Stratégie d’apprentissage, mécanique d’apprentissage © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
THÉORIE DES SITUATIONS DIDACTIQUES Brousseau (didac tic ien des mathématiques ) au travers de s a théorie des situations didac tiques (1998) a modélis é la s ituation didac tique en partant d’abord du constat qu’il existe des situations didactiques, des situations a -didactiques et des nondidactiques . Ces dernières situations non -didactiques relèvent de la vie courante , elles se différenc ie nt des premières dans la mes ure où rien n’a été construit comme milieu pour apprendre. Une s ituation non didac tique est ains i une s ituation sans finalité didactique pour laquelle le rapport au savoir s’élabore comme un moyen pour agir en s ituation de façon économique : par exemple, apprendre à faire du vélo. En revanche, les situations didactiques s ont des s ituations qui ser vent à enseigner. Une s ituation est didac tique lors qu’un individu (en général le formateur) a l’intention d’ens eigner à un autre individu un s avoir donné (l’apprenant). Une situation a -didactique est une nuanc e importante c ’est la part de la situation didac tique dans laquelle l’intention d’ens eigner n’est pas explicite au regard de l’élève. Le sujet réagit en effet comme si la situation était non didactique : l’élève prend alors des déc is ions , engage des stratégies et évalue leur efficacité. C ette importanc e ac cordée à la s ituation dans la construc tion des connaissances provient de la didactique des mathématiques en France. L’idée fondatrice est qu’une discipline qui a mis des millénaires à construire ses savoirs ne saurait être par l’apprenant à redécouvrir de manière spontanée .
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
THÉORIE DES SITUATIONS DIDACTIQUES D u coup, l’enseig nem e nt do it pro vo que r une ge nè s e a rtif ic ie l le de s c o nna is s a nc e s c hez l’a ppre na n t. C e po stula t de B ro us s e a u po s e la que stio n du fa ire s e ns de s a ppre nt is s a ge s po ur l’é lè ve , c o mme po ur un a dulte e n fo rmatio n. B ro us s e a u pré s e nte une s ituat io n dida c ti q ue pro to ty p i q ue : la c o urs e à 20 qui e st l’o rigin e de la thé o rie de s s ituat io ns dida c ti q ue s . Elle e st un po int de dé pa rt po ur e ntre r da ns le s « Fo nde me nts e t le s mé tho de s de la dida c tiq u e » , te ls qu’il le s c o nç o it : pla ç a nt c e ntre de la réf lex io n , la no tio n d’a ppre n ti s s a g e pa r a da pta t io n à de s c o nditio ns qu’o n c he rc he à dé c rire ave c rigue ur e t systé ma t ic i té . ( Thé o rie de s s ituat io ns dida c ti q u e s ( 1998) G re no ble : La Pe ns é e S a uva ge . ) Ave c c e tte thé o rie G uy B ro us s e a u c he rc he à dé mo ntre r que l’é c he c de s a ppre nt is s a ge s e n milie u s c o la ire s ’impu te e n de ho rs de s c a ra c té rist i q ue s de s a ppre na nt s , il y a ura it de s c a us e s à re c he rc he r du c ô té de s c a ra c té rist i q ue s de s s ituatio ns a uxque l le s s o nt c o nf ro nté s le s a ppre na n ts po ur a ppre nd re . C e princ ipe le c o nduit à privilé g ie r la no tio n de milie u o ù l’é lè ve va a ppre n d re e n fa is a nt : « to ut c e qui a git s ur l’é lè ve o u c e s ur quo i l’é lè ve a git » ( B ro us s e a u, 1998) . Toute situatio n dida ctique est à la fois définie d' un point de vue ex ter n e p a r s es ca ra ctér isti qu es obj ective s et d' un point de vue inter ne pa r l' inter p rét at i on q u e le s u j et éla bore subj ecti vem e nt de cette situation . Le ra is o nne me nt de l' a ppre na n t, fa c e à une tâ c he dida c ti q ue qui lui e st a s s igné e , n' e st pa s unique me n t lié a ux c a ra c té risti q u e s o bj e c tive s de c e tte tâ c he : une pa rt no n né glige a b l e e st do nné e à la s ignif ic a t io n s o c ia le qu' il lui attrib u e s ubj e c ti ve me n t ( Le vy e t G ro s s e n , 1989) . Le s ré po ns e s fo urnie s pa r un a ppre na nt dé pe nde nt po ur pa rtie de s o n infé re nc e c o ntra c tue l le de s atte nte s no rmati ve s de l' e ns e ign a nt qu' il pe ns e de vo ir s atisfa ire : c ' e st do nc e n réfé re nc e à s a re pré s e nta t io n du c o ntrat dida c ti q u e qu' il c o nvie nt de s a is ir une pa rtie du c o mpo rte me nt de l' a ppre n a nt. Le ra is o nne m e nt de l' a ppre na nt , e n s ituat io n dida c ti q ue , po rte a ins i s ur de s e nj e ux inte rs u bj e c t ifs qui dé pa s s e nt le s e ul tra ite me n t de l' o bj e t immé dia t de l' a c tivi té : le s avo ir. Ne pré s uppo s o ns do nc pa s que le s o pé ratio ns de ra is o nne me n t vis e nt unique me n t à c o nc e ptua lis e r e t à c o mpre ndre le s avo ir e n j e u. I l y a de s « inte rfé re nc e s » à re c o nna ître s ur le s que ll e s a gir. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
SITUATIONS A-DIDACTIQUES « Le maître se refuse à inter venir comme possesseur des connaissances qu'il veut voir apparaître ». Guy Brousseau L'élève sait bien que le problème a été choisi pour lui faire acquérir une connaissance nouvelle, mais il doit savoir aussi que cette connaissance est entièrement justifiée par la logique interne de la situation. » Guy Brousseau Dans les situations adidactiques, les interactions des élèves avec le milieu sont supposées suf fisamment « prégnantes et adéquates » pour qu’ils puissent construire des connaissances, formuler des stratégies d’action , valider des savoirs en utilisant les rétroactions de ces milieux sans que leur activité ne soit orientée par la nécessité de satisfaire aux intentions supposées du professeur » Gérard Sensevy La fiction du milieu construit pour apprendre est ici implicite.
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
SITUATIONS A-DIDACTIQUES
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
SITUATIONS DIDACTIQUES Situatio n de passatio n de la consigne : l’enseignant ou le formateur explicite la tâche à ef fectuer aux apprenants, Situatio n de dévolutio n : l’apprenant s’approprie la tâche proposée par l’enseig nant , il s’agit de l’ensemble des co ndit ions permettant à l’apprenant de s’approprier la situatio n (enjeux intellectuels, défi, contextes favorables…) Situatio n d’actio n : l’apprenant élabore des co nnaissances implicite s comme moyen d’actio n pour ef fectuer une tâche scolaire, individuellement et/ou collectivement , il « agit » pour résoudre une questio n en mobilisant des ressources, lesquelles sont visées par le formateur… Situatio n de formulatio n : l’apprenant explicite les procédures employées et les solutio ns obtenues, il peut démo ntrer les procédures et ressources mobilisées… Situatio n de validat ion : l’apprenant présente des pr euves intellectuelles pour convaincre de ses résultats et démarches, Situatio n d’institutionnalisatio n : la validation étant suf fisante, il est permis une généralisatio n de co nnaissances en savoir par tagé, les caractéristiques de ce nouveau savoir et savoir-faire sont précisé es par le formateur ou enseignant . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
SITUATIONS DIDACTIQUES
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LA TRANSPOSITION DIDACTIQUE Le concept de trans pos ition met en avant le fait qu’un s avoir exis te toujour s à un moment donné, dans une société et des ins titutions données . Un s avoir n’exis te que parce qu’il s e s oumet à cer taines contraintes de l’ins titution et, pour cela, s ’y modifie . La trans pos ition << didactique >> corres pond aux manipulations du s avoir dans le cas des ins titutions d’ens eig nement . La notion de trans pos ition didactique, is s ue du champ de la didactique des Mathématiques, a été introduite en 1985 par Yves Chevallard , à la s uite des travaux de Michel Verret ( 1975). Chevallard la définit ains i: << Un contenu de s avoir ayant été dés ig né comme s avoir à ens eig ner s ubit dès lor s un ens emble de trans formations adaptatives qui vont le rendre apte à prendre place parmi les objets d’enseignement. Le “travail” qui d’un objet de s avoir à ens eigner fait un objet d’ens eig nement es t appelé la trans pos ition didactique. >> (1985, p. 39.) La trans pos ition didactique décrit dès lor s l’ens emble des modifications opérées s ur le s avoir afin que celui -ci puis s e être ens eig né, afin que celui -ci puis s e être appris par les élèves, les apprenants . Ces modifications ne s e réduis ent pas à la s eule s implification du s avoir, mais relèvent fondamentalement d’un authentique travail de recons truction. Ce travail implique que soient ef fectués des actes de s élection de cer taines compos antes de ce s avoir, des choix de modalités de mis e en s cène et d’étude didactique de celuici et, enfin, des décis ions s ur les modalités par les quelles ce s avoir va être travaillé. Il s ’ens uit que le s avoir ens eig né ef fectivement, rés ultante du proces s us de transposition , présente des écar ts cons is tants par rappor t au s avoir « s avant » de référence. Ce proces s us d’apprêt didactique ou d'habillage didactique es t réalis é à traver s une s uite d’étapes décrites ci-des s ous . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
FOCUS SUR LE CONCEPT DE TRANSPOSITION DIDACTIQUE
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
DE L’OBJET DE SAVOIR A L’OBJET DE SAVOIR APPRIS Objet de savoir (issu des savoirs savants, savoirs académiques )
Objet de savoir à enseigner (issu de la transposition didactique externe)
Objet d’enseignement (issu de la transposition didactique interne)
Objet de savoir p r é v u d 'ê tr e e nse igné, p u is enseigné
(issu du travail de classe) Objet de savoir appris par l’élève (issu du travail de l’élève) © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES ETAPES DU PROCESSUS DE TRANSPOSITION DIDACTIQUE La première étape du processus de transposition didactique consiste à transformer le << savoir de référence >> en << savoir à enseigner ». Elle est assurée par les membres de ce que Chevallard nomme « la noosphère » , qui décident des contenus devant être enseignés : pédagogues, universitaires, inspecteur s, représentants des enseignants, etc. Leur activité por te sur le savoir de référence, qui est le savoir de la communauté des « savants » et des Univer sitaires. Elle consiste à décider ce qui va en être « retenu » et ce que, de ce fait, l’enseignant aura pour mission d’enseigner. Le « savoir à enseigner » ainsi élaboré est déjà le fruit de plusieur s modifications qui le singularisent et le rendent dif férent du savoir savant. En ef fet, il est décidé que cer tains concepts doivent être enseignés , alors que d’autres sont passés sous silence. Cer taines dif ficultés sont abordées, d’autres sont cachées à l’élève. Cer taines applications sont étudiées, d’autres non. Telle notion est introduite puis explicitée d’une certaine façon et pas d’une autre, etc. Ces décisions sont le fruit de la prise en compte d’une variété de paramètres: niveau d’enseignement et type de filière scolaire, complexité propre au savoir de référence, expériences passées, place au sein de l’ensemble des autres savoir s devant être abordés et lien avec les savoir s antérieurement étudiés. La deuxième étape de la transposition didactique consiste à transformer le « savoir à enseigner » en « savoir prévu d'être enseigné ». Elle est assurée par l’enseignant lui -même et vise à « compléter » la transposition précédente, encore largement inachevée. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES ETAPES DU PROCESSUS DE TRANSPOSITION DIDACTIQUE En ef fet, si le savoir à enseigner compor te un cer tain nombre d’indications et d’orientations, il se traduit par un ensemble d’injonctions aux contour s laissés libres. Il appar tient ainsi à l’enseignant d'opérer une série de choix et de décisions pratiques d’enseignement: choix des activités qui vont ser vir à introduire le savoir, choix de la progression temporelle à adopter, choix des explications et des exemples qu’il va proposer, choix des exercices et des tâches qu’il va proposer à l’élève, choix des procédures et techniques qu’il va lui demander de mettre en œuvre, etc. À nouveau, ces choix singulier s (et qui varient plus ou moins d’un enseignant à l’autre) vont tendre à satisfaire un cer tain nombre de paramètres: le matériel qu’il peut utiliser, le temps et l'organisation temporelle à sa disposition, son expérience passée d’enseignement des objets de savoir impliqués, le niveau et les dif ficultés des élèves qui lui font face, sa propre compréhension du savoir en jeu, etc . La troisième étape du processus de transposition didactique consiste à transformer le « savoir prévu d’être enseigné » en « savoir ef fectivement enseigné ». Elle est assurée à nouveau par l’enseignant; mais alor s qu’il réalisait l'étape précédente de façon anticipée à l’occasion de sa préparation de cour s, la présente étape est conduite en direct , au sein de la classe et durant son enseignement même. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES ETAPES DU PROCESSUS DE TRANSPOSITION DIDACTIQUE En ef fet l’enseignant est régulièrement confronté , dans une mesure plus ou moins forte, à un écart entre ce qu’il prévoyait d’enseigner et ce qu’il lui est ef fectivement possible de faire ici et maintenant. Cet écart, qu’il constate, a pour origine les réactions de ses élèves et les conditions effectives de la situation d’enseignement: certains élèves ne comprennent pas, des questions inattendues de leur part surgissent, les exercices ne sont pas réalisés de la façon prévue initialement, l’enseignant dispose de plus ou de moins de temps, où les élèves avancent dans le travail d'apprentissage plus ou moins rapidement que ce qu’il pensait, etc. Afin de s’adapter à ces éléments de nouveauté ou d'imprévu, l’enseignant est ainsi contraint d’ajuster son enseignement; il est conduit à opérer à nouveau un certain nombre de choix : nouvelles explications, exercices supplémentaires ou suppression de certains, passage sous silence de certains points qu’il pensait présenter, etc.
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
QUESTIONS ET IMPLICATIONS COGNITIVES ASSOCIÉES A LA TRANSPOSITION La qualité épistémologique du processus de transposition didactique doit être une p r é o c c u p a t i o n c o n s t a n te a u t r av e r s c e q u e l ’ o n a p p e l l e c l a s s i q u e m e n t u n e a t t i t u d e d e v i g i l a n c e é p i s t é m o l o g i q u e . P l u s p r é c i s é m e n t , i l c o nv i e n t d e s ’ i n te r r o g e r s u r l a n a t u r e e t l ' a m p l i t u d e d e l ' é c a r t ( n é c e s s a i r e ) e n t r e l e s avo i r d e r é f é r e n c e e t l e s avo i r e f f e c t i v e m e n t e n s e i g n é . C e t e n s e i g n e m e n t d e c e s avo i r n ’ e s t - i l p a s t r o p é l o i g n é d u s avo i r a c a d é m i q u e d e r é f é r e n c e ? L e s avo i r n ’ a - t - i l p a s é t é t r o p s i m p l i fi é o u t r o p d é n a t u r é ? C e r t a i n e s problématiques, difficultés, notions n' ont-elles pas été indûment passées sous silence ? L a q u a l i t é c o n s t r u c t i v i s te d e l a t r a n s p o s i t i o n d i d a c t i q u e d o i t ê t r e é va l u é e . D a n s l ' o p t i q u e c o n s t r u c t i v i s te , i l c o nv i e n t n o n p a s d e t r a n s m e t t r e l e s avo i r, m a i s d e l e f a i r e c o n s t r u i r e p a r l ’ é l è v e . L e q u e s t i o n n e m e n t i n d u i t c o n s i s te d o n c à s e d e m a n d e r s i l e s s i t u a t i o n s d i d a c t i q u e s proposées sont effectivement de nature à permettre une authentique activité de construction. Ceci requiert une analyse des questions posées, des problèmes proposés, du type d’activité que l‘élève a pu conduire . L a n a t u r e e t l ' o r g a n i s a t i o n d e s c o n n a i s s a n c e s q u e l e s é l è v e s o n t à s ’ a p p r o p r i e r s u i te a u x choix didactiques réalisés durant la transposition doivent être étudiées. Quelles c o m p é te n c e s l e s a p p r e n a n t s s o n t - i l s s u p p o s é s c o n s t r u i r e ? Q u e l s s o n t a l o r s l e s p r o c é d u r e s e t l e s s c h è m e s à a c q u é r i r ? Q u e l l e e s t l a c o m p l ex i t é d e c e s p r o c é d u r e s , e t d e c e s s c h è m e s ? C e t te c o m p l ex i t é e s t - e l l e a d a p t é e a u x é l è v e s ? S u r q u e l l e s c o n n a i s s a n c e s c o n c e p t u e l l e s reposent-ils? Quelle est la place de ces dernières au sein du champ conceptuel impliqué? L a p a r t d ’ i m p l i c i te a u s e i n d e s s i t u a t i o n s d i d a c t i q u e s , f r u i t d e l a t r a n s p o s i t i o n , d o i t ê t r e a n a l y s é e . l l c o nv i e n t d ’ é va l u e r l ’ a m p l e u r d e s c o m p é te n c e s q u i s o n t i n d i s p e n s a b l e s à l ’ é l è v e p o u r t r a i te r l e s t â c h e s e n j e u e t q u i n e l u i s o n t p a s p o u r a u t a n t e n s e i g n é e s ( c o m p é te n c e s " p r o to " ) . C e s c o m p é te n c e s s o n t p a s s é e s s o u s s i l e n c e e t i l e s t à l a c h a r g e d e l ' é l è v e d e l e s développer sans l’aide de l’enseignant, ce qui est souvent source de difficultés: l’élève est c e n s é l e s m e t t r e e n œ u v r e , m a i s n ’ a r e ç u a u c u n e i n d i c a t i o n fo r m e l l e e t ex p l i c i te à l e u r s u j e t . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LA CONTRE-TRANSPOSITION DIDACTIQUE Dans le cas où aucun savoir savant adéquat n’existe, Chevallard désigne par << contre -transposition >> la création d’un savoir pseudo savant dont on va montrer que le savoir à enseigner découle. La comptabilité et le français sont des exemples de contre transposition. La langue est tout d’abord une pratique sociale. Les savoirs grammaticaux ont permis, à par tir de l’institution du français comme langue nationale sous François ler, d’organiser les connaissances de cette pratique sociale. Ce savoir s’établit à distance de la pratique sociale de la langue, et désormais on peut « savoir le français » et l’enseigner à l'école.
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LE CONTRAT DIDACTIQUE Le concept de contrat didactique dés ig ne la compréhens ion des attentes du profes s eur par les élèves et la compréhens ion des attentes des élèves par le profes s eur. Ce concept a été propos é en didactique des mathématiques par Guy Brous s eau mais il a été depuis utilis é pour d’autres dis ciplines s colaires . Le concept de contrat didactique repos e s ur la mis e en évidence du paradoxe s uivant, propre à toute s ituation d’ens eig nement: l’ens eig nant cherche toujour s à obtenir de l’apprenant un cer tain compor tement, mais il ne peut lui en s ignifier les termes , sans quoi il ne pourrait y avoir apprentis s age. Le contrat didactique dés ig ne alor s « l’ens emble des compor tements ( s pécifiques du s avoir) de l’ens eig nant qui s ont attendus de l’élève et l’ens emble des compor tements de l’élève qui s ont attendus de l’ens eig nant . [...] Ce contrat es t l’ens emble des règ les qui déterminent explicitement pour une petite par t, mais s ur tout implicitement ce que chaque par tenaire de la relation didactique va avoir à g érer et dont il s era, d’une manière ou d’une autre, comptable devant l’autre » (Brousseau, 1980, p. 1 27). Le contrat didactique, qui s e manifes te explicitement s ur tout lor s qu’il es t trans g res s é, « s e nourrit des interprétations s ucces s ives que les agents s e font des attentes réciproques, ains i que des s anctions et gratifications qu’obtiennent leur s dif férents compor tements » (Schubauer -Leoni, 1986, p. 141). Plus précis ément, l’élève tente d’inférer les termes du contrat s ur la bas e de « ce que le maitre reproduit, cons ciemment ou non, de façon répétitive, dans s a pratique de l’ens eig nement » (Brous s eau, 1980, p. 1 27), c’es t -à-dire s es choix didactiques , la nature de s es évaluations et de s es corrections , s es habitudes d’ens eig nement, etc. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LE CONTRAT DIDACTIQUE Le contrat didactique permet dès lor s à l’élève d’injecter de la signification dans l’espace didactique au sein duquel il doit agir (faire des exercices et des contrôles, répondre à des questions, etc.). ll lui fournit des repères relatifs à ses responsabilités propres vis-à-vis du savoir en jeu; cela, en répondant, par exemple, aux questions: qu’est -ce qui doit être fait? De quelle façon? A quel moment? Autrement dit, le décodage du contrat didactique par l’élève lui indique la règle du jeu relative au savoir impliqué; cela, en tant que ce savoir relève d’un système de normes qu’il convient de respecter afin de satisfaire les attentes de l’enseignant. Le contrat didactique n'est pas le contrat pédagogique. En ef fet, ce dernier peut être caractérisé comme un engagement dans lequel les enseignants et les élèves contractualisent ef fectivement: ils mettent au jour leur s attentes respectives et se mettent explicitement d’accord sur les conditions de réalisation de celles-ci. Le contrat didactique, quant à lui, est largement implicite; il « n'est pas un contrat ef fectif [car il n'implique] pas de conditions explicites ni même explicitables et connues des acteur s, pas de clause de ruptures ni de sanctions véritables » (Brousseau, 1998, p. 82). De plus, le contrat didactique repose sur des objets de savoir précis: il exprime des attentes spécifiques au savoir structurant la relation entre l’enseignant et l’apprenant; alor s que le contrat pédagogique contient des règles et des conventions générales d’ordre pédagogique dépassant le cadre de telle ou telle discipline ou tel ou tel objet de savoir. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LE CONTRAT DIDACTIQUE L a n o t i o n d e d é f i n i t i o n d e l a s i t u a t i o n e s t l a s u i va n te : to u te s i t u a t i o n e s t à l a fo i s d é f i n i e d ’ u n p o i n t d e v u e ex te r n e p a r s e s c a r a c t é r i s t i q u e s o b j e c t i v e s e t d ’ u n p o i n t d e v u e i n te r n e p a r l ’ i n te r p r é t a t i o n q u e l e s u j e t é l a b o r e s u b j e c t i v e m e n t d e c e t te s i t u a t i o n . Le raisonnement de l’élève, face à une tâche didactique qui lui est assignée, n’est dès lors p a s u n i q u e m e n t fo n c t i o n d e s c a r a c t é r i s t i q u e s o b j e c t i v e s d e c e t te t â c h e ; c e r a i s o n n e m e n t e s t e n e f f e t l a r g e m e n t fo n c t i o n d e l a s i g n i fi c a t i o n s o c i a l e q u ’ i l l u i a t t r i b u e s u b j e c t i v e m e n t ( L ev y e t G r o s s e n , 1 9 8 9 ) . C ’ e s t à t r av e r s l e s i n f é r e n c e s c o n t r a c t u e l l e s , v i s a n t à d é c o d e r l e s a t te n t e s n o r m a t i v e s d e l’enseignant, que l’élève réalise la définition des situations didactiques auxquelles il est c o n f r o n t é . L e s e f f e t s t a n g i b l e s d e c e s i n f é r e n c e s s u r l e c o m p o r te m e n t d e r é p o n s e d e s élèves ont été largement étudiés; on a ainsi pu montrer les effets de titres accolés à des p r o b l è m e s p r o p o s é s , d u c h o i x d e c e r t a i n e s fo r m u l a t i o n s d e l ’ é n o n c é , d e l ’ é c a r t te m p o r e l séparant ces problèmes d’autres problèmes déjà réalisés en classe, etc. Le raisonnement d’un élève ne peut dès lors être compris qu’en référence à son i n te r p r é t a t i o n ( c o r r e c te o u n o n ) d e s d r o i t s e t d evo i r s q u i l u i i n c o m b e n t . A u t r e m e n t d i t , l e s r é p o n s e s fo u r n i e s p a r u n é l è v e d é p e n d e n t p o u r p a r t i e d e s o n i n f é r e n c e d e s a t te n te s q u ’ i l p e n s e d evo i r s a t i s f a i r e : c ’ e s t d o n c e n r é f é r e n c e à s a r e p r é s e n t a t i o n d u c o n t r a t d i d a c t i q u e q u ’ i l c o nv i e n t d e c o m p r e n d r e u n e p a r t i e d e l a c o n d u i te d e l ’ a p p r e n a n t . Les opérations de pensée de l’élève sont orientées vers le contrat: ces opérations de raisonnement ne visent donc pas uniquement, comme cela est trop classiquement p r é s u p p o s é , à c o n c e p t u a l i s e r e t à c o m p r e n d r e l e s avo i r e n j e u . E n d ’ a u t r e s te r m e s , l e r a i s o n n e m e n t d e l ’ a p p r e n a n t , e n s i t u a t i o n d i d a c t i q u e , p o r te s u r d e s e n j e u x i n te r s u b j e c t i f s q u i d é p a s s e n t l e s e u l t r a i te m e n t d e l ’ o b j e t i m m é d i a t d e l ’ a c t i v i t é : l e s avo i r. Les didacticiens des disciplines scolaires ont mis en évidence que non seulement un c o n t r a t e s t p r é s e n t p o u r to u t a p p r e n t i s s a g e d i r i g é p a r u n m a î t r e , m a i s é g a l e m e n t q u e l e contrat est nécessaire pour que les apprentissages aient lieu. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
QUELQUES EFFETS DU CONTRAT DIDACTIQUE E f f e t To p a z e ( d ’ a p r è s To p a z e d e Marcel Pagnol) Le maître s u r m o n te l a d i f f i c u l t é à l a p l a c e de l’élève afin de résoudre son p r o b l è m e d e p r o f e s s e u r. I l s u g g è r e l a r é p o n s e . P a r exe m p l e , l a d i c t é e o ù l ’ e n s e i g n a n t d i c te l e s pluriels, prononçant les « s ». En quelques instants, la dictée change de nature. Il ne s'agit plus de comprendre le pluriel, indiqué par l'article, mais d ' e n te n d r e l e s " s " q u ' i l f a u t écrire. Ef fet Jo urdain (d’après le bourgeois gentilhomme de M o l i è r e ) Po u r é v i te r l e d é b a t d u s avo i r av e c l ’ é l è v e , p a r c r a i n te d e l ’ é c h e c , l e m a î t r e i n te r p r è t e u n e réponse banale comme la m a n i f e s t a t i o n d ’ u n s avo i r. C e t effet de contrat est ainsi nommé en référence à la scène où le maître de philosophie feint d’enseigner ce qu’est la poésie à Monsieur Jourdain. C’est se saisir d’une réponse banale pour l’instituer…
CONTRAT DE COMMUNICATION La notion de contrat de communication a été développée au sein du courant de la psychologie sociale pragmatique. Ghiglione (l986) définit le contrat de communication comme un ensemble de principes et de règles sur lesquels les personnes en interaction s’accordent et à travers lesquels celles -ci gèrent et interprètent la situation de communication. Citons, à titre d’exemple, le principe de réciprocité qui implique notamment la reconnaissance du droit à la parole de chacun; ou encore, les règles situationnelles qui relèvent de l’attribution des rôles et des statuts respectifs propres à chacun des partenaires de l’interaction (ces règles vont, par exemple, conduire un adolescent à vouvoyer un adulte qui va pourtant le tutoyer). Le contrat de communication est, dès lors, un ensemble de normes culturelles, largement implicites, qui organisent et régulent toute situation de communication. En tant qu’il est une production culturelle, le contrat prend des formes particulières en fonction de l’environnement culturel au sein duquel les sujets en interaction sont immergés. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
ENJEUX DE COMPRÉHENSION DE L’ACTIVITÉ SCOLAIRE Q u e l d i a g nos t ic u n e n s eig nant p e u t - il avo i r d e l a c o m p réhens io n ( c o r rec te o u n o n ) d é ve lop pée p a r u n é l è ve a u s e i n d ’ u n e c l a s s e? L a r é p o ns e c l a s s ique, i s s ue d e l a p s yc hol og ie c o g n it ive, e s t i n s u f fis ante. Il convient de la compléter par une approche prag matique et d’ins piration anthropolog ique, approche prenant en compte le fait que l’élève tente, pour une bonne par tie, de donner une répons e qui apparais s e s ocialement conforme aux attentes de s on ens eig nant . A u s e i n d u s y s t ème d i d a ct ique , l a c o m p réhens io n e s t g é n éral ement é va luée a u t r aver s d e t â c h es à r é a l is er, c e s t â c h es p o u vant ê t r e d é fi ni es c o mme d e s s y s tèmes d ’ i n fo rma tio ns e t d e c o n s ig nes d o n n ées à l ’ é l ève d a n s l e b u t d e te s te r s o n a p t i t ude à y f a i re f a c e . Comprendre implique donc pour l’élève de mobilis er un compor tement adéquat pour les tâches qui lui s ont as s ig nées , ce qui ne lui es t pos s ible que dans la mes ure où il dis pos e de conceptualis ations s ous -jacentes ( p r é r e q u i s i n c o n t o ur n a bl e s ) . Les c o n c ep tual is at ions s o n t d e s c a t é g o ries ( c o n c epts - en-ac te) e t d e s p r opo s it io ns ( t h é o rèmes - en-ac te) . C e s c o n st ruct s p e rmet tent d ’ o p érer u n d é c oupage d u r é e l . Elles s ont des représ entations qui filtrent le réel et en extraient les paramètres qui en rég ulent les modalités fondamentales de fonctionnement. Par exemple, il n’es t pas pos s ible de comprendre et de traiter correctement le problème « Pierre dépens e 7 euros cet après - midi et il lui en res te 15 maintenant. Combien avait -il d’euros ce matin? « s ans dis pos er des conceptualis ations permettant de « percevoir » dans ce problème un état initial, une trans formation et un état final. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
ENJEUX DE COMPRÉHENSION DE L’ACTIVITÉ SCOLAIRE C e s c o n c ept uali s ati ons por tent ici directement s ur l’objet immédiat de l’activité: le problème lui -même; à ce titre, nous pouvons les qualifier d’endogènes . Dès lor s , nous pouvons dire que comprendre une notion (l’addition dans notre exemple) implique pour l’élève d’avoir cons truit les c o n c e pt uali s ati ons e n d og èn es qui s ont as s ociées à cette notion. Ce t te appro che endog ène es t in con tour nable , mais elle s e révèle incomplè te . En ef fet , à elle s eule, elle co nduit à un réduct ionnis me très fréquent en psychologie cogni ti ve, q ui co ns is te à étud ier le s ujet s eulement comme un s ys tème de traitement de la tâche immédiate qui lui es t as s ignée . O r l ’ é l è ve r é e l d a n s u n e c l a s s e r é e l le e s t b i e n p l u s q u e c e l a : il n’es t pas expos é à des tâches pures et neutres , mais à des s ituations s ociales d’évaluation , il est exposé à des situations s ociales ayant pour but de tes ter la conformité de s a conduite, de s a répons e à ce qu’es t la << culture s colaire >> de la clas s e (ens emble de s avoir s et s avoir -faire qu’il es t cens é avoir acquis ). L e p r o b lème p o u r l ’ é l è ve n ’ e s t p a s t a n t d e t r a i ter l a t â c h e q u i l u i e s t a s s ignée q u e d ’ a g i r c o n fo rmément à l a n o r m e a t te ndue p a r s o n e n s eignant ; c ’ e s t - a-di re d e r e s pec ter l e s c o n t rai ntes s o c i a les , s p é c ifiques a u s avo ir, a u s e i n d e s quel les l a t â c h e e s t i m merg ée. En d’a utres termes, i l d oi t c on ceptua lis er cor rec tement l es termes du c on trat di dac tique as s ocié à la ta che qui es t la s ienne. Ce n’es t qu’à cette con dit ion qu’il a << compris >>, c’es t-à-dire que l’ens eig nant , g arant du s avoir, déclare qu’il a compris . L es conc eptual is ations impl iquées ic i ne por ten t pas direc tement sur la tâ che i mmédiate (le prob lème ), mai s s ur les attentes normatives de l’ ens eig nant r elati vement à cet te tâ che ; o n peu t al or s les qua lifier de c on ceptu alis a ti ons c ont rac tuel les , on en core de c on ceptua lis a ti ons exo g è nes . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
ENJEUX DE COMPRÉHENSION DE L’ACTIVITÉ SCOLAIRE Q u ’ e s t - c e q u e c o m p r e n d r e ? U ne répo nse à c et te quest io n qui ne c o nsidèr er a it que l’ élève et sa t âc he immédiat e est insuf fis a nt e. ll c o nv ient de s’ int ére s s er aux mo dalit és du fo nc t io nn e m e nt du sy st ème didac t iqu e et aux c o nt raint es pro preme nt c o g nit ives que c es mo dalit és exerc ent sur l’ ac t iv it é de raiso nn em e nt de l’ élève. E t re dec laré c o mme « ayant c o mpris » requier t no n seulem e nt d’ ident ifie r les c arac t éri st i q u es fo ndam e nt al e s de la t âc he ( c o nc ept u ali s at io n endo g èn e) mais ég alem e nt , et dans une larg e mesure, d’ ident ifier les pro priét és c rit iques des no rmes at tendue s de l’ enseig n a nt que do it sat isfair e la c o nduite ( c o nc ept ual i s at io n exo g ène) . O n p e u t d é f i n i r l e s e n s a s s i g n é p a r l ’ é l è v e à u n e t â c h e c o m m e r e l ev a n t d u l i e n q u ’ i l p e r ç o i t e n t r e l e s s i g n i fi c a t io n s e n d o g è n e s e t c o n t ra c t ue l le s q u ’ i l d o n n e à c e t t e t â c h e . On dira alo r s qu’ il y a sens lo r sque c es sig nific at io n s so nt en phase, c ’ est - àdire c o mpat ible s ent re elles. A u c o nt raire, o n dira qu’ il y a pro blème o u absenc e de sens lo r squ’ il y a une c o nt radic t io n ent re c es sig nific at io n s . N o to ns que, dans c e dernier c as, la tensio n c o g nit ive ainsi g énéré e ent re les deux plans de pensée peut êt re à l’ o rig ine d’ un dévelo pp em e nt c o nc ept uel. C e d é v e l o p pe m e n t a p o u r fi n a l i t é d e m o d i fi e r so it les c o nc ept uali s at io n s endo g èn e s de l’ élève , so it ses c o nc ept ual i s at io n s c o nt rac t uell e s afin de ret ro uver une c o mpat ibilit é ent re c es deux reg ist res c o g nit if s. C o m p r e n d re i m p l i q u e , e n c l a s s e , d e t r a i t e r e f f i c a c e m e n t d e s t â c h e s ay a n t v a l e u r d e t e s t s s o c i o n o r m a t if s . A g ir d e f aç o n ef fic i e n t e n é c e s s it e d e d év e lo p p er d e ux o rd r e s d e r at io n alit é c o n c ept u ell e : u n o r dr e « e n do g è n e » , o ri e nt é s ur l e s c ar a c t é ri st i q u e s « épi st é mo lo g i qu e s » d e l ’ o b jet i m m é d i at d e l’ ac t iv it é ( l a t â c h e et l e s avo i r q u’ ell e i m pl i qu e ) , et u n o r dr e « c o nt ra c t u el » , e n di r ec t io n d e s at t en t e s s p éc i fi qu e s d e l ’ e ns e ig n a nt ( r é ell e s o u i nf é r é e s à to r t ) q u a nt à l a f a ç o n do nt il c o nv i e nt d e t r ait er c et t e t â c h e . C ’ e st au s ei n d e c et t e di al ec t i qu e c o nc ept u ell e q u ’ il e st po s si bl e d e m i e u x c e r n e r c e q u e p e u t ê t r e l a c o m p r é h e n s io n p o u r l ’ é l è v e . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
L’AGENCEMENT DIDACTIQUE
L es at tendus du disp osi tif : en termes de s avoir s , de s avoir s faire, de s avoir s être ou de dimens ion s ocia le … en fonct ion de quelle Z DP? Pos s ibilités d’ appren tis s age ni trop, ni en de çà… à s équen cer … ? Q uels s ont les rés ultat s attendus en termes de s avoir, s avoir -faire et s avoir -êt re ? Q u’es t-ce que je veux que l'apprenan t comprenne? De quoi va-t -il prendre cons cien ce? Q u'es t-c e que je veux que l’apprenan t s ache faire? De quoi doit -il ê tre capabl e? Seul ou accompagné? Q u'es t-ce que je veux que l'ap prenant s oit? Q ue peut-il être ? Devenir ? Changer? L'a ct ion de formation peu t-e ll e avoir un impact s ocial? Si oui lequel, et à quell e condition ? L es formes de s avoir s : s ous quelle forme les s avoir s vont-ils apparaître ? vais -je chois ir des fo rmes de s avoir d is cur s ives ? Sonores ? Vir tuell es ? Iconographiques ? Vais -je varier les formes de s avoir? Pour maintenir l 'in tér êt? Pour util is er les atouts et con trer les limi tes de cha cune d 'e lles ? Q uelles s eront les di f féren tes origines des formes de savoir ? O rigines réelles ? Extraites de l'environn ement? Cons trui tes s ous forme par exemple de maquettes ? Peuvent-el les être appor tées à l'app renant? L 'appr enant pe ut-i l s e déplacer pour a ller vo i r la forme de s avoir, voir le savoir dans son contexte? L es activ ités vis ées chez les apprenan ts : quelles activités cognitives ? Q uelles activ ités s ens ori-motrices ? O bs er vation ? Émission d'hypo thès es ? Expérimentations ? Comparais on? Déductions , analys es ? Mis es en relation? © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
L’AGENCEMENT DIDACTIQUE
Q uels levier s pour trans former? Q uels bonds cog nit if s ou éléments de s ec ondar is at ion ? Q uelles "a ctiv ités de pens ées " s ur le « fai re » ? (Clauzard , 2008-2014)
Pos ture du formateur : Q uel s era le rôle du formateur? Di recti f ? Contr ôleur? Étayant ? Faci li tate ur? O rganis ateur? Méd iate ur ? Q uel s era le rô le d u formateur? Dirig e - t-i l, con trô le -t -il la s éance ? Donne-t- il les cons ignes? S’as s ure -t-i l que c 'es t compris ? Recentre -t -il tou tes l es fois que c'es t nécessaire? Soutient- il l’ act ivi t é les apprenants ? Encourage -t- il les interac tio ns ? Stimule - t-i l l’ac tiv ité des apprenants et comment? Accompagne -t-i l ceux qui en ont le plus bes oin et comment? Q uelles aides à l’apprentis s age prévoit-il? Sus cite -t- il le ques ti onnement ? Propos e -t-il des rég ulat ions e n cas de di f ficul tés ? Comment org anis e -t-il le s ui vi du travai l de l’apprenan t ? Aide -t -il à cons tru ire la s ynthès e? Annonce -t-il la s uite de l'ag encement didactique?
C ons ig nes de travail e t maint ien de l’ orien tat ion ? Q uelles s ont-elles ? Les cons ig nes , org anis ent -el les la rencontr e en tre l 'app renant le s avoir? Dis ent-e lles à l’apprena nt ce q u' il doi t f aire pour comprendre s ans donner la répons e? Permettent - elles d' organis er le travai l du groupe? Sont-e lle s générales ou bien adres s ées à une per s onne en par ti cul ier? Q uelles s ont leur s précis ions ? Ef ficaci té ? Q uelle es t la c lar té des termes employés ? Les cons ignes et les orientations du travail peuvent-elles être écrites ? © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
L’AGENCEMENT DIDACTIQUE
Indi ca teur s de dif fi cul tés ? Q uelles antic ipa tions et rég ulatio ns ? Q uels s ont les indica teur s de dif ficu lté? Le formateur anti cipe -t -il en déter minant quels s ont les s ig nes qui indiqueront qu e l'ap prenan t es t en dif fi cul té ? En fonction des dif ficu ltés poten tie lles, le formateur ant ici pe - t-i l et pré voit- il un cer tain nombre de rég ulations ?
Indi ca teur s de rés ul ta ts : Les quels s ont-ils ? Le fo rmateur mes ure -t-i l l 'impac t de l'a cti on à par t ir des indica teur s qui le rens eig nent s ur la cons truct ion des s avoir s pour chaque app renan t? Les indica teur s de rés ulta t s tiennent -ils l ieu d'évaluation « en s ituation » ?
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
THÉORIE DE L’ACTION CONJOINTE Continu ons notre propos dans un e per s pect ive g énérale de lis ibil ité et pro fes s i onnal is at ion d u travai l ens eig nan t … et voyons la notion de coopérat ion ou d ’ac tion conjo i nte en tre l ’apprenan t et le fo r mateur qui do nne une intel lig ibi li té intéres s ante de la s ituation d’e ns eignement – apprentis s ag e . Nous ce faire, nous abordons les pers pectives de la théorie de l’action conjointe . L’a ct ion dida ct ique est par nat ure une a ct ion de communica ti on qui s upp os e la co opéra ti on : c’es t une ac tion d ialog ique don t les in ter acti ons peuvent être cons idérées comme des trans actions , autour d' un objet de s avoir. Résultan t d' une coopé rat io n conjoi nte en tre des in terlocu teur s qui interag is s ent , cet te in terac tio n dis s ymétriq ue ( car c ’es t l ’ens eignan t/l e formateu r qui mène le jeu) es t tribu tai re de finali tés trans ac ti onne lles et in ter s ub jec tives . O n parle p our ag ir, pour trans former une réali té, les inter locu teur s s e reconnais s ent ains i mutuel lement comme co– locute ur s aux pris es avec une s ituation par tag ée . À tou te ac ti on didac tiq ue du pro fes s eur ou de l 'élè ve corres po nd une répons e du profes s eur o u de l’él ève ; ce que s ig nifie le préfixe « trans » de « transactio ns », précise Sen s evy. Il ajoute : « tel é lève a fait cec i, mais fais ant ceci , il a acc ompli s a par t d ’une trans ac tion d ans laquelle le profes s eur était impliqué . » La notion de c o o pérat io n es t ai ns i au cœur de l’ag ir ens e ignan t . Ens eigner eng ag e une dynamique inter acti ve en termes de c o -ac tivi té pro fes s eur – élè ves . Le cadre de la clas s e de formation es t to uj our s in terac tif , des formes d e c o o p é rat ion s ’impos ent par nature . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
THÉORIE DE L’ACTION CONJOINTE L a pédag og ie c oopé rat ive en es t un bon exemple . Elle repos e s ur une façon de pens er la class e d’apprenti s s ag e qui place l'élève en tan t qu'ac teur de s es apprentissages, capable de pa r ti ciper à l'é labora tion de s es compétences en coopérat ion avec l'e ns eig nant et s es pair s . L'acq uis it ion de s connais s ances rés ulte alor s d'une « col labor ation du maî tre et des élève s , et des élèves entre eux, au s ein d'équ ipes de travai l » (Jacq ues Carbonnel, Jacques George, La Pédagogie coopérative, Cahier s pédagogiques no 347). Il s 'ag it de mettre l 'élè ve en s it uat ion vra ie d 'ac ti on, une s itua ti on où il peu t exer cer s es capaci tés de co ns t ruc ti on de répons es adap tées aux ques tions so ulevées par la mise en œuvre de pr ojets i ndividu els ou col lec tif s . Un contra t (avec l 'ens eig nant, l es autres et s oi-même) s celle la démarche coopérative . Les catég ories d’ana lys e de l’ac tion conjo in te, développé es par Sens evy, indiquen t le l i en indiss o ciab le en tre pro fes s eur/ forma teur et apprenan t , la né ces s ité de c oopéra ti on , qu'il nomme action conjoi nte au s ein d’un s ys tème didactique . L’a ct ion c onj oin te es t org aniq uement c o opérat ive écrit Gérard Sens evy. L’ense ignant est gagnant lor s que l’é lève es t gagnant au jeu d’ appren tis s age , nous dit-il. O n peut dire que l’ opéra ti on du profes s eur /formateur déc len che celle de l ’élè ve et inver sement . Il apparaît u ne fo rme de co–op ération au cœur de l ’ a g i r d e l ’ e ns e ign ant, d e l ’ a g ir d u fo r m ateur .
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LA POSITION DU SAVOIR L’ a c t i on d u p r o fes s eur/ fo rmateur n e p e u t ê t r e t r a i tée i n d é pendamment d e c e l l e d e s a p p ren ants n i d e l ' e n j eu d e s avo ir. La cons truction du s avoir par les élèves repos e s ur une a n a l ys e é p i s t émiqu e d u s avo ir (au préalable) afin de s ais ir les enjeux s cientifiques , connaître les propriétés conceptuelles de l’objet de s avoir. Ce qui permet de déterminer une s t r a t égi e d i d ac ti que e t u n e d i d a ct is at ion au moyen d’un d i s po s it if d i d a ct ique concordant, conforme et cohérent… (référence à une a n a l ys e é p i s témiqu e d u s avoi r, à l a p r o d uct io n d ’ u n d i s p os it if d ’ a p prent is s age, à l ’ é l abo rati on d ’ u n e s t r at ég ie d i d a ct ique .) Le Ges te d’ens eig nement prend toute s on épais s eur dans l a p r o d uct io n d ’ u n e é t u d e p o u r a p p rendre , le r a p po r t a u s avo ir e n j e u é l a b o ré p a r l e p r o fes s eur , la p r o d uct io n d e d i s posi ti f dans les quelles s ’actualis ent les s avoir s . L’ a c t i on d i d a ct ique c o n j o i nte es t fondée s ur une r e l at io n d e c o m munic ati on i n s c rite d a n s l a d u r é e a u to ur d ’ u n c o n te nu. La r e l a t io n a c t u alise l ' a c t i o n q u i e s t a c t u a lis ée e n r e to ur p a r c e l l e -ci . Cette relation es t intrins èquement c e n t rée s u r u n o b j e t b i e n p r é ci s : l e s avo ir q u i d o i t ê t r e t r a ns mis . Lequel actualis e aus s i la relation de communication. L’objet d’apprentissage d o n n e fo r me a u x t r a n s ac ti ons d i d a ct iques dans l’entrelacement entre les g es tes d’ens eig nement et d’étude. La p o s i t io n d u s avo ir e s t a i n s i e s s ent iel le, a u c e n t r e d ’ u ne a n a l ys e, d ’ u n d i s p os i ti f e t d ’ u ne s t r a tégie . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LA POSITION DU SAVOIR
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
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Lien action du prof + action des élèves + action du savoir
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Didactisation
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Relation de communication dans la durée autour d’un contenu
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Rapport au savoir élaboré par le professeur
LA POSITION DU SAVOIR La manière d’appréhender le savoir dans une dialectique savoir/enseignement/apprentissage renseigne sur la place transactionnelle des sujets en présence dans la classe. Une lecture de la situation d’enseignement apprentissage, en termes de théories de l’apprentissage peut s’ef fectuer comme suit. Le savoir est chez le formateur , celui-ci le transmet chez l'apprenant. On est un peu dans l'idée d'un cer veau à remplir de briques de savoir à par tir du cer veau du formateur où gît un magma de savoirs. Le savoir est chez l'apprenant , il faut le mettre à jour, ce qui est le rôle du formateur. C'est une pédagogie inductive qui se dessine ici, avec le format du cours dialogué, on cherche à faire dire aux apprenants ce que l'on souhaite entendre au moyen d'un mode de questionnement (par exemple : le questionnement limite, le questionnement indice, le questionnement focalisant). Le savoir est à l'extérieur de l'apprenant , il s'agit de construire un « milieu » pour faire apprendre avec une médiation circulaire entr e savoir, apprenants et formateur afin de permettre une appropriation du savoir. L’entrée est « socioconstructiviste »; en référence avec les théories de Rabardel, les activités constructives sont premières par rappor t aux activités productives qui ne seront que prétextes à l'apprentissage . La visée de l'activité d’apprentissage est constructive : c'est-à-dire le développement de l'individu. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LA POSITION DU SAVOIR EPISTEMOLOGIE DU SAVOIR SCOLAIRE
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
L’EPISTEMOLOGIE DES SAVOIRS Un travail d’analyse épistémologique a pour projet de préciser les contenus enseignés, les objets de s a v o i r s à e n s e i g n e r. Les objets sont les matériaux qu'une discipline utilise en vue de son enseignement (livres, objets utilisés dans les enseignements scientifiques, etc.). Les connais sances déclar atives correspondent aux connaissances formelles (une règle de g r a m m a i r e , u n e d é f i n i t i o n d e g é o g r a p h i e , u n e l o i d e p hy s i q u e , u n t h é o r è m e d e m a t h é m a t i q u e s ) , L e s c o n n a i s s a n c e s p r o c é d u r a l e s c o n c e r n e n t l e s s avo i r - f a i r e . L a m a t r i c e d i s c i p l i n a i r e c o r r e s p o n d a u c r i t è r e d' intelligibilité de la dis cipline : les représentations y jouent un rôle essentiel… Du côté profess eur , un travail sur son rap p or t au s avoir, sur ses conceptions p er sonnelles relatives a u x s a v o i r s à e n s e i g n e r, e s t a p p e l é . I l s ’ a g i t d e s e m o n t r e r a u c l a i r av e c s e s r e p r é s e n t a t i o n s s u r l e s o b j e t s d e s avo i r. C e l a e s t a u s s i n é c e s s a i r e q u e l e s b i e n m a i t r i s e r ava n t d e l e s e n s e i g n e r. D u c ô t é é l è v e s , l e r a p p o r t a u s a v o i r e t à l ’ a p p r e n t i s s a g e d e l ’ é l è v e e s t a u s s i à p r e n d r e e n c o m p te , a i n s i q u e s a c a p a c i t é à c o n s t r u i r e d u s avo i r D a n s c e q u e V yg o s t s k i a p p e l l e u n e z o n e d e p r o c h e d é v e l o p p e m e n t , o u z o n e d e p r o c h e apprentis sage, les concepts s’élaborent à par tir d’une res tructuration des repr ésentations initiales qui sont bousculées, dans les termes piagétiens d’assim ilation et accomm odation , une r éorganis ation i n te r n e d e s s c h è m e s c h e z l ’ a p p r e n a n t . C e t te z o n e p r ox i m a l e d e d é v e l o p p e m e n t e s t l ' é c a r t e n t r e l a p e r f o r m a n c e a c t u e l l e e t l a p e r f o r m a n c e a t te i n te d e va n t u n e r é s o l u t i o n d e p r o b l è m e . C ' e s t l ' e s p a c e o ù u n s u j e t e s t c a p a b l e d ' u t i l i s e r p l e i n e m e n t l ' a i d e q u ' o n l u i a p p o r te . C ' e s t l a z o n e o ù o n s a i t f a i r e . D i f f é r e n te d e c e l l e o ù o n n e s a i t p a s f a i r e m ê m e s i o n n o u s a i d e . C ' e s t l a z o n e i n te r m é d i a i r e o ù l e s g e n s o n t l ' i n te l l i g e n c e d ' u t i l i s e r l ' a i d e q u ' o n l e u r a c c o r d e . C ' e s t u n e z o n e d ' i n s t a b i l i t é o ù l ' o n n ' e s t p a s e n c o r e a p te à r é s o u d r e u n p r o b l è m e , m a i s q u e l ' o n s a u r a r é s o u d r e av e c l ' a i d e d ' u n ex p e r t o u d ' u n pair. L a c o n c e p t u a l i s a t i o n e s t l ' o p é r a t i o n d u s u j e t . L e s e n s e i g n a n t s t r a n s m e t te n t d e s r e p r é s e n t a t i o n s , mais l'activité de conceptualisation du sujet est per sonnelle. C'est le sujet qui constr uit sa conceptualisation. Un enseignant est un facilitateur qui s'inscr it dans la zone pr oximale de développement. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CO-CONSTRUCTION DU SAVOIR L es élèves peuvent êt re amenés à émet t re une hy po t hèse, à analy ser une sit uat io n o u une pro po sit io n ( po urquo i telle af firmat io n serait fausse, par exemple) o u enc o re, plus c lassiqu e m e nt , à élabo rer une pro c édure de réso lut io n. L es pro blèmes so nt t ravaillé s au c o ur s d’ une séquenc e fo rmée d’ une suite de séanc e s qui alterne nt diver ses o rg anisat io n s de t ravail. C es séanc e s, so us fo rme d’ ét apes de c hemin em e nt de la pensée, o nt po ur but de permet t re à l’ élève d’ élabo rer une réflex io n et une ex pressio n per so nne ll e, mais ég aleme nt d’ avo ir ac c ès à c elles des aut res élèves et de c o nduire dans un c adre c o llec t if des disc ussio n s c o nt radic to ir es .
Séanc e S éanc e S éanc e Séanc e S éanc e S éanc e S éanc e
1 2 3 4 5 6 7
= = = = = = =
P ROD U C T ION lN D lVlD U EL L E C OMPA RA I S ON ET D ISC U SSION SU R L ES P ROD U C T ION S IN D IVID U E L L E S P ROD U C T ION C OL L EC T IVE D ’ A P RES C ON FRON TAT I ON RA P P ORT ÉC RIT IN D IVID U EL P U IS C OL L EC T IF SU R L E D EROU L EME N T VÉC U C OMPA RA I S ON ET D ISC U SSION SU R L ES P ROD U C T ION S C OL L E C T IVE S SY N T HESE GEN ERA L E ET FIX AT ION D ES SOLU T ION S REIN VEST I S SE M EN T D ES SOLU T ION S P ERT IN EN T ES
L e c adre mét ho do lo g i qu e déc rit rapideme nt ic i est c lairem e nt po sit io nné dans un référent i el so c io c o nst ruc t iv i st e. A u sein de c e dernier, issu des t ravaux de L ev Vyg o t sk i , la c o nnais s a nc e n’ a de st at ut sc ient ifi qu e que dans la mesure o ù elle est le fruit d’ une aut hent i qu e c o c o nst ruc t io n so c iale en répo nse à un pro blème. D ’ o ù le rô le c ent ral qui est do nné à l’ arg ume nt at io n : c elle - c i permet aux appren a nt s de c o nfro nter leur s po int s de v ue pro pres; elle est alo r s so urc e d’ une élabo rat io n de c o nnaiss a n c es do nt l’ ef fic ac it é ( po ur t raiter le pro blème po sé) do it êt re démo nt ré e aux aut res, et pas simpleme nt af firmé e. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
MODELE DU JEU D’APRENTISSAGE (SENSEVY) Nous savons que le rôle de la formation est de c ond u ire le s ap p re nants à la for ma tion d e c onc e pts, à la for ma tion d e savoir s, savoir - faire ou savoir -être… et nous pensons a u t r aver s d e « je u x d ’ a p pr entissage » . Le mod è le d u je u (comme t héor ie d e l’ a c t ivité ) est per tinent, car il souligne divers aspects de l’activité humaine: d e s asp e cts af fe ct if s, cog nitif s e t p ra g matiques d e l’ a c tion ; Le modè le du « jeu » sou ligne aussi la c oopération : le jeu est fond amentalement coop é ratif, en plus d’être mobilisateur de ressources. On peut ainsi d éc rire le jeu du professeur sur le je u de l’élève par le truchement d ’u ne topogenè se , qui informe de la pla ce que chacun prend d ans la t ransaction au sein d’une g e nè se conce ptuelle visée par le cours. On peut me su rer le jeu de s élève s/app renant s sur le jeu d u profe sse ur/ formateur et inversement on peut me surer le je u du professeur/formateur sur le jeu des élèves/apprenants . On peut mesu re r également la maniè re d e r entre r dans le jeu et de se prend re au jeu tout comme la façon de jou er au jeu . Notons que pour gagner au jeu d idactique, le joueu r doit pr odu ire de s stratégie s gagnante s par lu i-même . C’est une faç on de comp rend re le trait d’union entre e nse igner et apprendre , en lie n avec la thé orie de l’action conjointe. C’e st une forme de lisibilité de la cla sse d e for ma tion. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
MODELE DU JEU D’APRENTISSAGE (SENSEVY) D ans la c o a c t iv i t é d i a l o g iq u e d e l a c l a s s e d e fo r m a t i o n , les mo t s eng ag e nt des ac t io ns et des at t it udes, les feed - ba c k des élèves amène nt à c o nduire o u à aider le jeu, à des rég ulat io n s et ét ayag es en v ue de sec o ndar is at io n , mét ac o g nit io n et inst it ut io nn a li s at io n. C o mme c o n d i t io n d e d é v o l u t io n ( 1 e r n i v e a u ) , no us avo ns « s e p r e n d r e a u j e u » e t « rentrer dans le jeu » afin de « jouer au jeu ». C o mme c o n d i t io n d e r é g u l a t io n , no us avo ns « c o n d u i r e l e j e u » en fo nc t io n d’ un sc énario o u sc ript de la séanc e . C o mme c o n d i t io n s d e l ’ é t ay a g e , « a i d e r l e j e u » c o rrespo nd à un so ut ien indiv iduel . D es représe nt at io n s, des o pinio ns et des o bser vat io n s so nt appelée s. ( 2 e n i v e a u ) C o mme c o n d i t io n d e l a s e c o n d a r i s a t io n e t d e l a m é t a c o g n it io n ( 3 e n i v e a u ) , no us avo ns « p e n s e r a u j e u e t l e j e u » . C ’ est - à- dir e ex e r c e r d e s a c t i v it é s d e p e n s é e s u r l e j e u ( p e n s e r l e j e u e t s o n o b j e t d e s av o i r ) et ainsi a b s t r a i r e l e s av o i r m a i s a u s s i s ’ a b s t r a ir e d u j e u d i d a c t iq u e ( e n p e n s a n t l e s s t r a t é g ie s d u j e u d ’ a p p r e n t is s a g e – m é t a c o g n i t io n ) . C o m m e c o n d i t io n d e l ’ i n s t it u t io n n a li sa t i o n , no us avo ns « f i n i r l e j e u » en fix ant et par t ag e a nt le savo ir en quest io n. C e s o n t d e s r e p è r e s p o u r l i r e e t b â t i r u n e s é a n c e d ’ e n s e i g n e m e n t a p p r e n t is s a g e , p o u r tenter de c o mprendr e l’ int rig ue de la c lasse : que se passe - t - i l ? À quel jeu se liv rent - ils ? Quelle est la plac e de c hac un ? Quel est le rô le de c hac un dans les t ransac t io n s ? Qui prend en c harg e les t ransac t io ns ? Quels lev ier o u ar tefac t so nt employ és po ur dévelo pp er un bo nd info rmat io n n el dans les t ransac t io n s ? L’ idée est de saisir à q u e l j e u s e l i v r e n t l e s i n d i v id us d a n s l e s t r a n s a c t io n s d e c o n s t r uc t io n d u s av o i r d a n s l a c l a s s e . D e q u e l l e m a n i è r e c o o pè r e n t - i ls ? N o u s p e n s o n s q u e c ' e s t à c e p r i x q u ' i l e s t p o s s i b l e d e s a i s i r l ' a c t i o n p r o fe s s o r a le . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
Modèle de Sensevy revisité institutionnalisation
finir le jeu :
secondarisation + métacognition
fixer et partager le savoir
penser au jeu et le jeu :
exercer des activités de pensée sur le savoir et ses stratégies
étayage
régulation
Conduire le jeu:
Aider le jeu: réponse individuelle à
l’intrigue ou script didactique, bilan d’étape, synthèse…
enrôlement
Rentrer dans le jeu
des élèves en difficultés
dévolution Se prendre au jeu
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
action Jouer au jeu
© Philippe Clauzard, MCF Université de la Réunion / ESPE
secondarisation + métacognition
SECONDARISATION = Réflexivité sur l’objet de savoir en APPRENTISSAGE : QUOI ? A QUOI CA SERT ? EN QUOI, C’EST RELIE ?
METACOGNITION = Réflexivité sur les PROCESSUS MENTAUX d’apprentissage : COMMENT ai-je APPRIS ? COMMENT LES STRATEGIES ?
DÉFENSE ET ILLUSTRATION DES BILANS MÉTACOGNITIFS ET CONCEPTUELS © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
MODELE DU JEU D’APRENTISSAGE Comp rendre l'activité du p rofesseur, c'est tenter de reconstituer une « int rigue » : comment le p rofesseur « joue le jeu » de const ruction et de régula tion du « jeu d’apprentissage » ? C'est en comprendre les déterminations : comment le professeur fait jouer le jeu in situ dans la classe ? Comment prépare-t- il le jeu en amont ? Quel sera le jeu sur le savoir qu'on peut prévoir eu égard à la spécif icité du savoir et des élèves ? Quelle part d'action intentionnelle in situ ? Quelle part d'action ajustée ? Quelle part d'action inconsciente ou incorporée à la situation ou au sujet enseig nant, dont il n’a pas la conscience ? Quel est son jeu su r le jeu de l’élève ? Quelles réactiv ités des joueurs ? Quel est le jeu sur le savoir exprimé dans les transactions didactiques ? © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
TOPOGÈNESE ET INTERACTIONS Les actions de l'élève et les actions du professeur sont reliées par un intermédiaire qui est la relation de communication . L’action didactique est par nature une action de communication qui suppose la coopération : c’est une action dialogique dont les interactions peuvent être considérées comme des transactions, autour d'un objet de savoir. À toute action didactique du professeur ou de l'élève correspond une réponse du professeur ou de l’élève ; ce que signifie le préfixe « trans » de « transactions », précise Sensevy. Il ajoute : « tel élève a fait ceci, mais faisant ceci, il a accompli sa par t d’une transaction dans laquelle le professeur était impliqué. » Résultant d'une coopération conjointe entre des interlocuteurs qui interagissent, cette interaction dissymétrique (car c’est l’enseignant qui mène le jeu) est tributaire de finalités transactionnelles et inter subjectives. On parle pour agir, pour transformer une réalité, les interlocuteurs se reconnaissent ainsi mutuellement comme co– locuteurs aux prises avec une situation par tagée qui vise une élucidation ou une résolution… © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
TOPOGÈNESE ET INTERACTIONS Au t r aver s d e s c onf lits d e c og nition a g issa nte , il s'a git b ie n d e c o - op é rer, d’opérer conjointement de manière à élucider la situation problématique dans d e s t ransactions qu i c onf r onte nt le s op inions entre les élèves et entre le professeur et les élèves, qui vont progressivement abstraire le jeu, le construire en objet de savoir (conditions de la secondarisation). Dans cette per spective, le s savoir s, qui sont des c ontenus de la relation entre enseigna nt/élève s et objet de la c ommu nic ation, c onstituent de s ob jets transa ctionnels . Ils vont prendre forme d a ns un espa ce transactionnel, passant de l'extér iorité d u su jet ver s une appr op riation p er sonne lle e nrichissant ses ressources inte rnes . Les ob jets de savoir sont d onc d es objets transactionnels d ans u ne a ir e t r a nsitionnelle d e for ma t ion d e s c onc e pts (cf. Winnicott) . Une c o– op ér ation e st a insi c oor d onné e e nt re p r ofe sseur s e t é lè ves au sein du système transactionnel, de l’aire transitionnelle, du « topos »(lieu de genèse du savoir). La topogénèse est un d e sc r ipteur d e s t r a nsactions , des forme s d e coop é ration d e la t r a nsaction . Elle sou ligne u n sy stème de rôles, de pla ces d ans la relation de l'action conjointe . Les rôles et places se compre nnent en liaison ave c une analyse épistémique, une analyse des savoir s en jeux. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
TOPOGÈNESE ET INTERACTIONS No us po uvons interroger ici à quel jeu se liv rent les acteur s de la scène d’apprentissage, dans une co-activité dialogique où les mots engagent des actions et des attitudes. Au jeu de l’un répond le jeu de l'autre et inver sement. On ne peut négliger l’influence des feedbacks des élèves que des professeur s peuvent redouter ou bien souhaiter. La tr ansaction se jo ue à la fo is sur l’épistème, sur la co nfrontation et la co ncession fo ndée par la situation didactique auto -validante , un milieu pensé et co nstruit par le didacticien . L’analyse de l'action conjointe pose alor s les questions : quelle est la par t d'action de chacun dans la transaction ? Qu'est-ce que chacun fait avec les savoir s ? Comment chacun s'approprie -t-il, reconnaît-il les savoir s ? L'env ironnement de l'act ion, le sens de la sit uation, le r appor t des interlocuteur s o u co -acteur s au pr o blème et au savo ir r encontrés dans une situat ion par t agée info r ment sur le car actère des tr ansactions au sein du « to pos ». L'act ion de chaque sujet s'explique co m me une co action o u une co – opération co ordonnée au sein du système t r ansactionnel ent r e les sujets et ent r e les sujets et leur env ironnement Co nfront at ions et co ntradictions n’em pêchent in fine de se r etrouver sur le terrain d’une co llaboration, d'une co opération po ur r éso udre le pr oblème do nt il est quest ion, ce qui pr éoccupe la classe d’apprentissage… © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
action
• individuelle • collective
confrontation
• résultats • stratégies
collaboration
• résolution • fixation
• actions de l'élève et actions du professeur reliées par un intermédiaire qui est la relation de communication; supposant la coopération • interaction dissymétrique (car c’est l’enseignant qui mène le jeu) tributaire de finalités transactionnelles et intersubjectives. •topogenèse (lieu de genèse du savoir) = descripteur de cette coopération. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
QUELQUES CATÉGORIES D’ANALYSE
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES CATÉGORIES DE BRUNER (TUTELLE) Bruner est un psychologue de l ’éducation qui a étudié une manière de rendre opérationnel le concept de Vygotski de « zone de proche développement » et montrer comment un adulte vient en aide à quelqu'un de moins expert que lui, dans une situation de tutelle auprès de jeunes enfants. La tutelle peut se définir comme l’aide judicieuse d ’un adulte qui porte sur ce que l’enfant peut déjà comprendre sans qu’il puisse encore le produire seul. Bruner définit la tutelle comme fournissant ce qui est nécessaire et suffisant pour permettre à l ’enfant de mener à bien la tâche proposée. Autrement dit, l’adulte prend en main des éléments de la tâche excédant les capacités de l’enfant, il se montre facilitateur. De manière générale, la tutelle désigne donc les moyens grâce auxquels un adulte ou un spécialiste vient en aide à quelqu'un qui est moins adulte ou spécialiste que lui. Et ainsi sont distinguées six catégories de la tutelle, dont certaines sont relativement connues et passées dans le langage courant. Ces catégories sont fondatrices de l ’étayage: on enrôle, on simplifie au besoin, on maintient le cap/l ’orientation de la tâche scolaire, on signale ce qui est pertinent pour exécuter la tâche, on montre un modèle pour dénouer la résolution de la tâche, on évite la frustration et démotivation de l ’élève. Cela étant, il convient dans la tutelle de ne pas créer une trop grande dépendance de l ’élève à l’égard de l’enseignant, il faut inter venir mais… ni trop, ni trop peu. C’est finalement ce que vous faites lorsque vous passez dans les rangs auprès des élèves ou des groupes d ’élèves s ’ils travaillent en commun. C ’est une grille de lecture de ce que peut être le soutien, l ’étayage des élèves en général. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES CATÉGORIES DE BRUNER l'enrôlement : engager l’intérêt et l’adhésion du sujet dans la tâche; c ’est-àdire soutenir l'intérêt du sujet par rapport à la tâche, la réduction des degrés de liberté : réduire l’ampleur de la tâche, simplifier la
tâc he par réduc tion du nombre des ac tes constitutifs requis pour atteindre la s olution, afin de réguler le feed -bac k de façon à pouvoir l ’utiliser comme moyen de rec tification; il s ’agit donc de s implifier la tâc he pour aider l ’apprenant à rés oudre le problème pos é avec une pris e en c harge par le tuteur des tâches les plus complexes ens uite rétroc édées à l ’apprenant pour éloigner ainsi une s urc harge cognitive en début d'ac tivité, le maintien de l'orientation : éviter que le sujet s ’écarte du but assigné par la tâc he, maintenir la pours uite d ’un objec tif défini, en fais ant que cela vaille la peine de ris quer un pas de plus , non s eulement maintenir l ’enfant dans la pours uite des buts et s ous -buts de la tâc he, mais aus s i faire en sorte qu’il s ’oriente vers des tâches plus complexes. la mise en évidence des caractéristiques déterminantes de la tâche : attirer l'attention s ur les éléments pertinents de la tâc he pour s on exécution, pendant le traitement de la tâc he par l ’apprenant, fournir des indications sur l ’écart entre le résultat obtenu et le résultat à atteindre. le contrôle de la frustration : installer un c limat de confianc e, éviter que les diffic ultés que l ’apprenant rencontre ne s e transforment en échec et le démotivent dans s on entrepris e de rés olution de la tâc he, mais ne pas c réer une trop grande dépendance de l ’élève à l’égard de l’enseignant, la démonstration : démontrer ou prés enter des modèles de s olutions pour une tâc he; comme aide pour s on ac hèvement; on peut détailler les étapes de la tâche. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES CATÉGORIES DE BROUSSEAU Le dida c tic ie n de s mathé ma t i q u e s , B roussea u ava it é ta bli un e ns e mble de s ituat io ns qui rythme nt une le ç o n, une s é que nc e e n c la s s e , da ns s a théor ie des s it u at io n s d id a ct iq u e s ( do nt c e rta ine s s o nt e ntré e s da ns le vo c a bula ire de s e ns e igna nt s e t fo rmate urs ) . Son proj et éta it d ’ enseig ner un contenu mathématiq ue tout en la is s a nt à l ’ élève la m a rge d e ma nœ uvre et d ’ initiat i ve la plus g ra nde possible . Le s type s de s ituat io ns qu’ il ide nt if i e a mè ne nt l ’ é lè ve à o bj e c tive r le s c o nna is s a nc e s utilis é e s po ur ré s o udre un pro blè me , s o us la c o nduite de l ’ e ns e ig na n t qui e n fa c ilite le dé ro ule me nt. C e s s ituat io ns c o rre s po nde nt a us s i à de s ge ste s pro fe s s io nne ls de l ’ e ns e ig na n t qui c o nduit s a c la s s e . Sit uatio n de pa ssation de la consig ne : l ’ e ns e ig na n t explic i te la tâ c he à effe c tue r a ux é lè ve s , Sit uatio n de dévoluti on : l’ é lè ve s ’ a ppro pr ie la tâ c he pro po s é e pa r l ’ e ns e ign a nt à pa rtir de s e s c o nna is s a nc e s a nc ie nne s , Sit uatio n d ’ a ction : l ’ é lè ve é la bo re de s c o nna is s a nc e s implic i te s c o mme mo ye n d ’ a c tio n po ur effe c tue r une tâ c he s c o la ire , indiv i d ue l le me nt e t/o u c o lle c tive me n t , Situat io n de for mulatio n : l’ é lè ve ex plic i te le s pro c é dure s e mplo yé e s e t le s s o lutio ns o bte nue s , Sit uatio n de va lidatio n : l’ é lè ve pré s e nte de s pre uve s inte ll e c tu e ll e s po ur c o nva inc re de s e s ré s ulta t s e t dé ma rc he s , Situat io n d ’ instit ut io nna l i sa ti on : la va lida t io n é ta nt s uff is a nte , il e st pe rmis une gé né ra lis a tio n de c o nna is s a nc e s e n s avo ir pa rta gé , le s c a ra c té rist i q ue s de c e no uve a u s avo ir e t s avo ir - fa ire s o nt pré c is é e s . B ie n s ûr, o n pe ut o bs e r ve r que c e s déf ini t io n s c o rre s po nde nt à une thé o rie de l’ a ppre nt is s a ge c o nstruc tiv i s te o ù l ’ é lè ve c o nstruit s o n s avo ir pa r de s a c tio ns , o ù il pe ut ré us s ir ava nt de c o mpre ndre c e qu’ il a fa it ( d ’ o ù l ’ é la bo ra tio n implic ite de mo ye ns d’ a c tio n po ur effe c tue r une tâ c he do nt il pre nd c o ns c ie nc e e ns uite e t pe ut ex plic i te r a u gro upe c la s s e ) . Le s no tio ns d ’ a c tio n, fo rmulatio n e t va lida tio n , s i o n a j o uta it c e lle d’ é ta bl is s e me n t d ’ hypo t h è s e s re s s e mble nt à la dé ma rc he s c ie ntif i q ue . C ela éta nt, c ’ est un ca dre collecti f qui per met de lire une situatio n d e cla s s e et d e s ’ or ienter d a ns une conduite de cla sse. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES CATÉGORIES DE SENSEVY L es gestes profession ne l s définis pa r Sensevy / C R EAD fo nt s uite à c e ux de B ro us s e a u. S a de s c ript io n dida c ti q ue e st fo rte me nt lié e a u c o nte nu d' e ns e ig n e m e nt e t à une c o nstruc tio n d' une dida c ti q ue s ingul iè re . C e tte de s c ript io n s ’ o rie nte à pa rtir de s gra nde s c até go rie s qui s o nt la mé s o ge nè s e , la c hro no ge nè s e e t la to po ge nè s e . Elle dé pa s s e l ’ e s pa c e d ’ une s é que nc e , no ta mme nt ave c la c hro no gé nè s e . L a mésogenèse re lè ve de la c o nstitu t io n d ’ un milie u po ur a ppre nd re a u s e ns de B ro us s e a u. Elle s ’ inté re s s e a ux c o nte nus . En ré po ns e a u « c o mme nt quo i ? » , il s ’ a git de dé c rire c o mme nt s ’ effe c tue la tâ c he s c o la ire , d ’ ide nt if ie r le c o nte nu é pisté mi q u e pré c is de s tra ns a c tio ns dida c ti q ue s . C ' e st une c até go ris a t io n de s c ripti ve po ur é tudie r la c o - é la bo ratio n pa r l' e ns e ign a nt e t le s é lè ve s du c o nte nu de l' inte ra c t io n .
L a chronogenès e e st la pro gre s s io n de l ’ a ppre nt is s a g e da ns le te mps , une c até go ris a t io n lié e à la pro gre s s io n de to ut e ns e igne me nt. Le c o nte nu s e mo dif ie inc e s s a mme nt , le s avo ir s e dis po s a nt s ur un axe te mpo re l. I l s ' a git de fa ire ava nc e r le te mps dida c tiq u e , de fa ire ava nc e r le s a ppre nt is s a g e s . En ré po ns e à « c o mme nt qua nd ? » , il s ’ a git d’ ide nt if i e r la te mpo ra l i té , la nature e t le s ra is o ns du pa s s a ge à c e rta ins mo me nts d' un c o nte nu é pisté mi q u e à un a utre . L a topogenèse inte r ro ge la pa rt a c c o rdé e à c ha c un de s pro ta go n is te s da ns le pro c è s d’ a ppre nt is s a g e s , le pro c e s s us de l ’ a ppre n d re ( la s uite d ’ o pé rat io ns me na nt à la c o nc e ptua lis a t io n/a p p re nt is s a g e ) . No us o bs e r vo ns ic i le pa rta ge de s re s po ns a bi l i té s de la tra ns a c tio n dida c tiq u e e ntre le s é lè ve s e t le pro fe s s e ur. C ’ e st un e s pa c e de c o c o nstruc tio n de la c o nc e ptua lis a t io n. Q ui intro d u i t te lle o u te lle ma niè re d ’ a gir, qui a va lidé la ma niè re de fa ire , qui po rte le trava il s ur le s c o nte nus d ’ e ns e ign e m e nt. La to po ge nè s e ré po nd do nc à « c o mme nt qui ? » : il s ’ a git d ’ ide ntif ie r c o mme nt le c o nte nu é pisté m i q ue de la tra ns a c tio n e st effe c tive me n t ré pa rti e ntre le s tra ns a c ta n ts . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES CATÉGORIES DE SENSEVY Catégories plus larges qui dépassent l ’espace temps d ’une leçon (correspondant aux fonctions du professeur de planificateur/animateur/évaluateur) - La mésogenèse : la con stitution d ’ u n milieu p ou r ap p rend re: la s itu ation didactique pour apprendre - La ch rono genèse : la progres sion d e l’apprentissage dan s le temps: le temps d e l’apprentissage - La top ogénèse : la part a ccord ée à cha cun d es protagonistes dans le procès d’apprentissage, pa rtage d es resp onsabilités d e la tra nsaction dida ctiqu e entre les élèves et le professeur : espace de co - construction de la conceptualisation En outre, la mésogénèse comprend 4 autres catégories d’analyse :
o 1. Définition du jeu : L’enseignant précise le but de la tâche scolaire o 2. Dévolution : Les élèves s’approprient le problème posé par l’enseignant. o 3. Régulation : E lle con siste en l’étayage, l’a ide qu’app orte l’ens eignant dans la réalisation de la tâche scolaire des élèves. o 4. Institutionnalisation : C’est l’explicitation et la généralisation de la règle. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES CATÉGORIES DE BUCHETON Didacticienne du français, Danièle Bucheton, de l’IUFM de Montpellier travaille à décrire finement les gestes qu’effectuent les enseignants dans la classe au moyen de séquences qui sont filmées .
Nous avons 4 catégories de gestes . 1- le tissage qui est une articulation entre les différentes unités de la leçon. Il s’agit d’une opération de liaison que fait opportunément l'enseignant. Ce tissage comprend les entrées en matière (mise en train, l'articulation des tâches, le bout du tunnel, l'instrument papier), les types de transition (la transition implicite, l'absence de transition, la transition conclusive), la gestion matérielle afférente ; 2- l’étayage qui se définit comme ce que l'enseignant effectue parce que l'écolier ne peut pas agir seul. Il comporte : - les fonctions de soutien où le professeur accompagne les élèves dans leur démarche d'apprentissage (appui sur les savoirs et l'expérience, le dépistage focalisation, le comment faire, le synthétiseur comme sous -catégorisations), • - les fonctions d’approfondissement où l'enseignant se focalise sur un élément du discours des élèves pour les amener à le creuser (approfondissement personnel ou collectif, effet miroir, reformulation explication), • - les fonctions de contrôle où le pédagogue veille au contrôle des réponses • (l’œil averti, la validation, l ’impatience sont des sous -catégorisations) ; © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES CATÉGORIES DE BUCHETON 3- l’atmosphère qui relève du climat cognitif et relationnel autorisant ou non la parole aux apprenants. Cette catégorie se subdivise en sous -classe avec les fonctions ludiques qui sont des diversions par rapport aux cadres didactiques (par exemple les « anecdotes » ou la « spontanéité » qui ont pour but de détendre l’atmosphère de classe et pouvant présenter un lien sous-jacent avec le travail en cours). Autre sous -classe : les fonctions d'affectivité : le « ne... pas » vise le retour à l'ordre et les « gratifications » sont les félicitations et encouragements du professeur accordés aux élèves. La fonction d’enrôlement règle la participation dialoguée des élèves (par le verbal ou le muet). 4- la quatrième catégorie est celle du spatio -temporel qui comprend la gestion du temps par l'enseignant (le timing), la boîte à outils (qui renvoie essentiellement à l'affichage en classe), le parcours du combattant qui sont les déplacements de l'enseignant pour réprimander les élèves, consolider le groupe classe, contrôler et rectifier les erreurs, préciser une consigne ou gérer le matériel scolaire en distribuant du matériel. La sous -catégorie « bougeotte » est la gestion des déplacements des élèves . La dernière et cinquième catégorie concerne les spécificités didactiques. C'est le « faire apprendre » grâce aux dispositifs conçus par le maître d'école. Cela est fonction de la discipline enseignée et non reproductible à l’identique d’une discipline scolaire à l'autre. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LES CATÉGORIES DE BUCHETON 1- le tissage qui est une ar ticulat ion entre les différentes unités de la leçon. 2-l’étayage qui se définit comme ce que l' enseignant effect ue parce que l'écolier ne peut pas agir seul. 3- l’atmosphère qui relève du climat cognit if et relationnel autorisant o u non la parole aux apprenants. 4- le spatio-temporel 5- le faire apprendre Ces catégories méritent de nous y arrêter un peu plus et de les regarder en détail, car elles « parlent » bien aux enseignants, elles sont nommées de manière imagée, mais réaliste. Le travail de catégorisation permet un décorticage de la complexité. Dans la mesure où l ’activité enseignante s ’inscrit dans une architecture psychologique dense, il convient de décomposer cette complexité. Ainsi, un ouvrage de catégorisation permet de déplier les composants de cette activité, pour mieux l ’analyser. Ce travail de catégorisation permet d ’accéder aux artefacts utilisés, aux savoirs travaillés, aux tâches scolaires, à la temporalité entre les leçons, au climat de classe ; bref à la gestion de la classe et à la gestion des savoirs. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CATÉGORIES DE BUCHETON + EN DÉTAIL Les catégories d éf in i es parais s ent recou vr ir l es évène m ents esse nti e ls du dérou lem ent d ’ une l eçon. La mis e en mot de c haqu e catégorie renvoi e à l ’ act ion ens e ignante propre me nt di te. La nomina l is at ion d e c es caté gories conceptue l les fac i l ite la com préh ens ion : on peu t as s ez a is ém ent a ins i v isual ise r l es act ions ens eignantes .
CATÉGORIE 1 : LE TISSAGE L’entrée en matière - la mise en train: « Alors maintenant on va travailler les mots qu’on entend pour savoir si on les entend au début, à la fin ou au milieu » - l’articulation des tâches: « alors, j’ai marqué juste quelques mots » - Le bout du tunnel: « Eh ben, figurez -vous que dans ce texte, il y a des mots outils. Et vous savez quoi ? il y en a 17 que vous connaissez ». - l’instrument papier : « vous prenez vos cahiers blancs ». Les transitions: l’implicite, la gestion du matériel, l’absence de transition: « Bon, alors très bien (fin d’unité). Aujourd’hui, donc on va, le texte s’appelle Dans le jardin, on va donc apprendre la lettre (…) c’est la lettre qui s’appelle comme ça. (début de l’unité suivante) »; la conclusive: « Vous laissez le texte, vous posez le texte sur le dessus, hein, sur le cahier vert… » © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CATÉGORIES DE BUCHETON + EN DÉTAIL CATEGORIE 2 : L’ETAYAGE : Les fonctions de soutien : Appui sur les savoirs et l ’expérience : « Et comment tu sais que c ’est son lit ? » Le pistage-focalisation : « Quelle autre couleur y a, où y a le jjj ? » Le comment faire : « je rappelle, vous partez de ce qui est en général, où ça se passe, qui est là, et c ’est seulement après qu’on commence à raconter l’histoire ». Le synthétiseur : « Alors, on en a trouvé deux ! on a trouvé jumelles et jaune ». Les fonctions d’approfondissement : Personnel : « Alors quel est le premier mot outil ? (à Chloé) » Collectif : « Allez, y’en a d’autres, qu’est-ce qu’on peut dire ? » Effet-miroir : « Farid dit « fou ». L’enseignant répond : « fou ». La reformulation-explicitation : « le jardin c’est ce, c’est le morceau de terrain qu’ya juste à côté de la maison ». Les fonctions de contrôle : L’œil averti : « ti, rou, ar, est-ce que j’ai dis OU ? Ti, rou, ar ? La validation : « ça se passe dans une maison, oui. » L’impatience : « mais oui, mais cactus, y ’a pas de jjj » © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CATÉGORIES DE BUCHETON + EN DÉTAIL CATEGORIE 3 : ATHMOSPHERE Le ludique : les anecdotes : « vous connaissez Zorro, Zorro ? vous savez le cowboy tout noir avec le masque là, et qui signe avec la pointe de son épée là (imite la signature avec sa baguette). » La spontanéité « Punaise, ça vaut le coup d ’être malade ! après, super forts ! » Les fonctions d’affectivité : Le ne…pas : « je vais confisquer la règle, vous me fatiguez, toi tu t’avances… » Les gratifications : « Très bien Ismaël ». L’enrôlement : Le verbal : « Alors Carmen » Le muet : Ex : l’enseignant tend la craie à Nadia qui passe à son tour au tableau. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CATÉGORIES DE BUCHETON + EN DÉTAIL
CATEGORIE 4 : LE SPATIO TEMPOREL Le timing : Par ex : l’enseignant regarde sa montre. La boîte à outils : L’enseignant montre la série d ’affiches de mots-outils accrochées au mur. Le parcours du combattant : déplacements successifs de l ’enseignant qui visent à : Réprimander les élèves, Consolider le groupe classe, Contrôler et rectifier les erreurs commises par les élèves, Gérer le matériel scolaire (par ex : l’enseignant circule dans les rangs, redonne la consigne, distribue des crayons de couleurs si nécessaire ) La bougeotte : « non, viens me montrer ». CATEGORIE 5 = LE FAIRE APPRENDRE A…
La spécificité didactique, ou le dispositif mis en place par l ’enseignant visant à faire acquérir les bases de la lecture. Par ex. concernant la lecture, la catégorie d’objectivation de la langue et celle relative aux dispositifs de lecture. C’est la catégorie la plus au cœur des apprentissages, au centre de la didactique. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
Modèle de Bucheton
la manière d'être, les habitudes d'une personne
LE MULTI AGENDA © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
POUR CONCLURE, LA « GESTUELLE » DE CLASSE
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
GESTES D’ENSEIGNEMENT & GESTES D’ÉTUDE Enseigner convoque un e nsemble d e g e stes e n d ia logue : des g e stes d ’ e nse ignement auxquels répondent des g e stes d ’ é t udes d e s ap p re nants . C’est un sy stème c omp lexe d e g e stes imb r iqué s les uns aux autres, appar tenant à l’ inventaire te c hnique d u mé tier… Ces gestes sont ob se r va bles, d e sc r iptibles, a na lysa bles dans une dimension corporelle, langagière, symbolique, sémiotique. Le g e ste e st p hy sique e t sy mbolique, sit ué e t p a r t agé . Il est piloté par d e s log ique s id e ntitair es (les invariants du sujet, Vinatier) et des log iques sit u ationnelles (configuration de la classe et des savoir s, les invariants d e la sit uation – Ve r g naud ). Enfin, le g e ste d ’ e nseignement e st r é f é r é a u savoir , il est intimement lié au savoir, il est spécifié par le savoir, la discipline d’enseignement dont il est question… Le geste d’études pour l’élève/l’apprenant est une comb inaison d e g e stes p ou r s’ e mpar er e t r é sou dr e la t â c he e t r é p ondr e a u x a t tentes d id actiques d u p r ofe sseu r/formate ur. On peut y obser ver des gestes de perception, de représentation, de catégorisation, d’inférence, de réflexivité, de secondarisation … © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
GESTES D’ENSEIGNEMENT & GESTES D’ÉTUDE Nous f a isons l’hypothè se de l’existence d’ un geste de « co-opération » à l’inte r se ction des 2 gestes d’enseignement et d’étude prenant corp s dans le s transactions du jeu d’ ap prentissage, le « top os » où se joue la conceptua lisation, l’appre ntissage, la formation de conce pts scientifique s et pragmatiques . C’e st un ge ste qui permet l’ad aptation, l’arrangement, les ajustement s en fonction des étayages sp écifiqu es r endus néce ssaires se lon le p u b lic sc ola ire . Ces gestes font tout le sel et l’e f ficie nce du jeu d’ app rentissage : lev ier, ressourc e, a r te fact d ans la co activ ité ; les postures de coopération e n tension sont à la source d’une activité conjointe… Dans notre modé lisation per sonnelle suiva nte, nou s avons déterminé des ma cr o-geste s de dida ctisation (auxquels le formateur pense lors d e la planification et qui renvoie au groupe classe) , des mé so-ge stes de régulation (qui s’adre sse nt à des grou pes d’ apprenants qu i travaillent ensemble, qu i coopère nt ense mble dans de s tâc hes d’ap prentissage e n petits groupes) , et des mic ro -gestes c oopé ratif s d ’aju stement qui suggèrent que le formateu r s’adr esse à l’ind ividu , il p er sonnalise ici l’a pprentissage dans une coopération pour co-construire l’apprentissage, la formation de concepts. Le « g r a in » d ’ intelligibilité d e la sit uation d e c la sse e st ici variab le. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
MODÉLISATION DES GESTES D’ENSEIGNEMENT Nous pouvons comme suit définir des macro-gestes de didactisation , des mésogestes de régulation (très liés à des éléments gestuels de communication verbale et non verbale), des micro-gestes coopératifs d’ajustement. La co-opération, du côté de l’enseignant, répond à un impératif d’ajustement. Le substantif « geste » conduit à penser l'inscription des actes dans le corps, mais aussi dans la pensée, se référant à Vergnaud qui dit que « la pensée est un geste ». Le concept de gestes renvoie à une activité conçue comme un processus qui mobilise une intelligence en acte. On peut considérer le « geste » à la fois dans une dimension « praxis » (les actes corporels et langagiers) et « logos » (les aspects sémiotiques sous jacents).
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
MODÉLISATION DES GESTES D’ENSEIGNEMENT EN FORMATION INITIALE ET CONTINUE
Microgestes coopératifs
d’ajustement
Macro-gestes de didactisation
PHILIPPE CLAUZARD – MCF ESPE DE LA REUNION – SEPTEMBRE 2015
Mésogestes de régulation
Un engrenage au sein d’une situation dynamique ouverte traversée par les contextes
Micro-gestes coopératifs pour s’ajuster au spécifique du public scolaire empêché de poursuivre le jeu ; geste de questionnement (indice, focalisant, limite), geste de différenciation ou diversification, geste humoristique, geste anecdotique … = Gestes qui éteignent le feu d’un empêchement de « gagner le jeu » didactique… agissant sur le cognitif et l’affectif…
Méso-Gestes de régulation : geste de tissage entre les mini-séquences, geste de maintien et orientation du travail, geste de filtrage des réponses / de mise en évidence d’affirmations, geste de guidance, geste d’étayage, geste transitionnel, geste de synthèse, geste de communication langagière, physique et spatial (déplacement, écoute, regard…), geste de gestion du temps, geste de gestion d’atmosphère (climat, gratification, reproche…), geste de contrôle de la complicité de genre, geste de reformulation, de synthétiseur-bilan, geste de pistage -focalisation, geste d’étayage neutre (effet miroir), geste de reformulation – explicitation – clarification, geste de gestion du rythme (alternance des activités, durées…), … = gestes qui s’actualisent dans le feu de l’action, le « faire classe »… c’est plus ou moins anticipé…
Tous droits réservés - Philippe Clauzard - juin 2015
MICRO-GESTES COOPERATIFS D'AJUSTEMENTS MESO-GESTES DE REGULATION
MACRO-GESTES DE DIDACTISATION Macro-gestes de didactisation : geste de contractualisation (geste de mise en route, contractualisation didactique, explicitation d’enjeu, sélection de tâche), geste d‘articulation (geste de tissage avec le « déjà là », rapprochement, appel aux représentations), geste d‘orientation (geste de définition du jeu, passation de la consigne), geste de dévolution, geste de régulation (accompagnement de l’action), geste d’arbitrage (confrontation, discussion, résolution), geste de facilitation (geste de conduite au glissement conceptuel / secondarisation, à une métacognition), geste de fixage (geste d’institutionnalisation, de consolidation, de transférabilité des acquis)... = Gestes qui s’actualisent en amont hors du feu de l’action, lors de la planification de la classe, lors de la construction d’un milieu didactique pour faire apprendre, lors d’une « didactisation », c’est le « mémo du suivi » de classe, la fiche de préparation…
• fine adaptation du prof aux élèves • co-opérer autrement • carte joker du jeu didactique • étayage particulier • artefact efficace • impératif d’ajustement
Tous droits réservés - Philippe Clauzard - juin 2015
LE GESTE DE COOPÉRATION COMME INTERCALAIRE - Nous pensons que le geste de co-opération incarne une forme de fine adaptation au public scolaire, empêché de poursuivre le jeu didactique . - Le simple arbitrage ne suffit plus , il faut co-opérer avec une autre manière de mobiliser les ressources cognitives de l’élève . - Le « jeu » exige un « joker » afin de poursuivre le jeu d’apprentissage , de lever les ambiguïtés, les empêchements, les erreurs de raisonnement… - Il s’agit de tirer son épingle du jeu didactique en tirant une « carte joker » - Nous définissons le geste de coopération comme un geste d’intersection d’attentes au sein du contrat didactique (cf. Brousseau) : celles du professeur vis-à-vis des élèves (une tâche à résoudre afin de produire du savoir) et celles des élèves (répondre aux attentes de l’enseignant, trouver des solutions). - Ce geste s’actualise dans la discipline scolaire et la tâche . C'est un intercalaire entre les gestes d'enseignement et les gestes d'études. Il forme un étayage particulier, un artefact efficace afin que l’apprentissage continue à se développer. - La coopération répond toujour s pour le professeur - formateur à un im pératif d’ajustement . © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CE GESTE DE COOPÉRATION SINGULARISE L’ACTION DIDACTIQUE -
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Ce geste de coopération singularise l’action didactique,. Il permet l’adaptation, l’arrangement, les ajustements en fonction des étayages spécifiques rendus nécessaires selon le public scolaire. Il est réponse aux préoccupations d’adaptation du professeur et aux empêchements de relever le défi du jeu didactique chez les élèves. Il offre une adaptation entre le monde comment du professeur et les mondes communs des élèves/des apprenants . Ce geste constitue ainsi la manière dont se manifeste une didactique adaptée de l’enseigna nt dans les tâches et les objets de la discipline concernée. C ’est une nouvelle co-opération dans la façon de régler son action en direction des élèves, de réguler leurs transactions, de gérer leur activité . Le geste coopération facilite le glissement conceptuel, la secondarisation . Pour reprendre le modèle théorique de l’action comme jeu, c’est un jeu adaptatif, en réponse à des cultures enfantines, familiales, sociales, régionales spécifiques… (cf. La Réunion et la question du créole à l’école) In fine, ce geste est un intercalaire entre les gestes d’enseignement et les gestes d’étude , l’expression d’un artefact que nous pouvons étudier sous divers angles de vue dans divers protocoles. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
Tous droits réservés - Philippe Clauzard - juin 2015
Matrice d‘entrelacement entre gestes d’enseignement et d’étude, essai de formalisation Ph. Clauzard Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion
FORMALISATION DES GESTES D’ENSEIGNEMENT
PHILIPPE CLAUZARD – MCF ESPE DE LA REUNION – SEPTEMBRE 2015
FORMALISATION DES GESTES D’ÉTUDE
PHILIPPE CLAUZARD – MCF ESPE DE LA REUNION – SEPTEMBRE 2015
VE RS UNE SCÈ NE D’APPRE N TIS SAGE POUR PE N SE R LE TRAVAIL E NSE IGNANT : DES GESTES POUR E NSE IGNE R E N VUE D’ACTES POUR APPRE N DRE
Philippe Clauzard – Tous droits réservés
PHILIPPE CLAUZARD – MCF ESPE DE LA REUNION – SEPTEMBRE 2015
SCRIPT POUR LA CLASSE ? Nous l’avons vu, l ’ac tivi té d’ ens eig nement, es t cara ctér is ée par un ens emble d’ac tivi tés ef fe ct ives en clas s e pour fa ire appre ndre (des at tit udes , des ges tes , des dis cour s opératoires en s ituation qu i s ont s ingulie r s , génériques et complexes ). Cette d iapos it ive montre une vue pyramidale des opéra tion s pour préparer et conduire u ne procédure d ’en s eig nement – apprentis s age, vrais emblablement ef ficac e . Je dis vrais emblable ment, car la « bonne pra tiq ue d’un ens eignement » n’exis te pas en s oi, ca r une ac tivi té d’ens eig nement es t touj our s contextu alis ée et s ing ularis ée par de nombreus es variables extérieures , mais aus s i internes , aucun ens eig nant ne s e ress emble, car on ens eig ne toujour s en fonction de ce que l’on es t. Et c ’es t tan t mieux, imag inons des ens eig nants et des formateur s tous s emblables , à l’act ivi té de clas s e identiqu e et s tan dardis ée, ce s erai t vrais emblablement un vrai ca uchemar. La diver s i té des enseignants /formateur s et de leur pratique es t une riches s e . Lor squ’on parle de modèle, de s cript pour faire clas s e, il s ’agit toujour s de balis es , de repères pour navig uer dans une pratique de la clas s e d’ens eig nement -format ion : on a bes oin de repères pour s e cons truire progressivement son style d’e ns eignement, s a manière per s onnelle d ’ens eigner. Ce s tyle s e façonne à pa r ti r d’ un g enre profes s ionnel, une manière commune de faire clas s e, un canevas que l’on va réinterpréter à s a manière … © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
VUE PYRAM IDALE DES O P É R AT I O N S P O U R P R É PA R E R E T C O N D U I R E U N E F O R M AT I O N , U N E INTELLIGIBILITÉ DES S I T U AT I O N S
D’EENSEIGNEMENT & A P P R E N T I S S AG E
(c) Philippe Clauzard, MCF Université de la Réunion-ESPE Une séance de formation planifiée, animée, évaluée
Des gestes d’enseignement et des gestes d’études à penser Une méthode d’enseignement à choisir (l’exposé, l’étude de cas, la situation problème…)
Un format pédagogique à privilégier (gestion des relations/ communications) Une transposition didactique à effectuer (gestion des savoirs) Une théorie d’apprentissage à laquelle s’adosser (béhavioriste, constructiviste, traditionnelle…)
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PHASAGE DE SÉANCE DE CLASSE Synopsis du faire classe : un exemple de phasage parmi d’autres
SYNOPSIS DE CLASSE : UN SCRIPT COMME AU CINÉMA © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CONSIGNES ET PHASAGE DES SÉQUENCES C’es t à traver s les co nsignes et leur traitement au niveau co gnitif que les élèves peuvent « entrer » dans les tâches et pro blèmes pro posés. La consigne et sa prise en charge sont des é l é m e n t s c l é s p o u r c o m p r e n d r e l ’ a c t i v i t é d e t r a i te m e n t d e t â c h e o u d e r é s o l u t i o n d e problème des apprenants . Une introduction à un exercice s co laire co mpor te généralement deux par ties . L a p r e m i è r e p a r t i e e s t i n f o r m a t i v e : e l l e p r é s e n te l e s d o n n é e s c o n s t i t u t i v e s d e l ’ exe r c i c e ; c e l l e s - c i p e u v e n t ê t r e ex p r i m é s s o u s l a fo r m e d ’ u n tex te o u d ’ u n é n o n c é o r a l , d ’ u n e i m a g e , d’une représentation graphique ou schématique ou d’une combinaison de ceux -ci. La s econde par tie es t injonctive (elle se traduit alors par une phrase à l’impératif ou i n te r r o g a t i v e ; e l l e c o n s t i t u e l a c o n s i g n e d e l ’ exe r c i c e . D ’ u n p o i n t d e v u e s é m a n t i q u e , l e s m o t s q u i c o n s t i t u e n t l a c o n s i g n e r e l è v e n t d u l ex i q u e r e l a t i f a u s avo i r v i s é à t r av e r s l ’ a c t i v i t é requise. L e s c o n s i g n e s p r e n n e n t d e s f o r m e s t r è s v a r i é e s . E l l e s p e u v e n t s e p r é s e n te r s o u s u n e fo r m e o r a l e o u é c r i te . L o r s q u ’ e l l e s s o n t s o u s fo r m e i n te r r o g a t i v e , e l l e s p e u v e n t ê t r e o u v e r te s ( l o r s q u e , p a r exe m p l e , e l l e s s o n t fo r m u l é e s s o u s u n e fo r m e i n te r r o g a t i v e i m p l i q u a n t d e s mots du type: combien, quand, pourquoi, etc.) ou fermées (elles induisent alors une réponse d c t y p e o u i / n o n ) . E n fi n , e l l e s p e u v e n t ê t r e à f a i b l e o u fo r t g u i d a g e d e l ’ é l è v e ; d a n s c e dernier cas, elles contiennent alors des conseils pour la réalisation. Une co nsigne peut exprimer une tâche o n un pro blème. Une tâche es t un but à atteindre dans des co nditions déterminées telles que l’apprenant dis pose des pro cédures néces saires. Un pro blème, quant a lui, es t caractéristique des s ituations po ur les quelles l’élève ne dis pose pas des pro cédures requises: il lui appar tient alo rs de les co nstruire à traver s une activité dite de rés o lution de pro blème. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CONSIGNES ET PHASAGE DES SÉQUENCES La co nstruction d’une représ entation de la co nsigne es t une activité centrale du traitement de tâche co mme de la rés o lution de pro blème : elle permet à l’élève d’entrer dans la tâche e t , d è s l o r s , d ’ a g i r. À u n p r e m i e r n i v e a u , e l l e i m p l i q u e u n e i d e n t i fi c a t i o n d u b u t à a t te i n d r e , u n e r e d é fi n i t i o n é v e n t u e l l e d e c e b u t ( o n p a r l e é g a l e m e n t d e t r a n s p o s i t i o n d u b u t ) e n fo n c t i o n d e s c o n d i t i o n s e t d u c o n tex t e a i n s i q u e d e s c o m p é te n c e s d e l ’ é l è v e . À u n s e c o n d n i v e a u , l a c o n s t r u c t i o n d ’ u n e r e p r é s e n t a t i o n d e l a c o n s i g n e i m p l i q u e l ’ a c t i va t i o n ( vo i r e l a f a b r i c a t i o n a d h o c ) d e c o n n a i s s a n c e s - e n - a c te ; c e s d e r n i è r e s p e r m e t te n t u n « d é c o u p a g e » e n c a t é g o r i e s o p é r a to i r e s d e p e n s é e d e l a s i t u a t i o n à l a q u e l l e l ’ é l è v e e s t c o n f r o n t é . C e d é c o u p a g e p e u t , p a r exe m p l e , r e n d r e p o s s i b l e u n e c a t é g o r i s a t i o n d e l a t â c h e , c ’ e s t à d i r e s o n a s s i g n a t i o n à u n e c l a s s e d e t â c h e s r e l eva n t d ’ u n c h a m p c o n c e p t u e l c o n n u . l l r e n d également possible des opérations de sélection des données nécessaires, de tri et de c l a s s e m e n t d e c e s d o n n é e s a fi n d e t r a i te r l a t â c h e . N o to n s q u e l a c o m p l ex i t é s é m a n t i q u e ( p r é s e n c e t r o p fo r te d e vo c a b u l a i r e s p é c i a l i s é ) o u g r a m m a t i c a l e ( p r é s e n c e d e to u r n u r e s c o m p l exe s ) , s i e l l e n ’ ex p l i q u e c e r t a i n e m e n t p a s e n t i è r e m e n t l e s d i f f i c u l t é s d e c o n s t r u c t i o n d ’ u n e r e p r é s e n t a t i o n d e l a t â c h e , p e u t ê t r e d e n a t u r e à m e t t r e e n d i f f i c u l t é c e t te é l a b o r a t i o n , vo i r e à l ’ e m p ê c h e r. La s élection, vo ire la co nstruction, d’une pro cédure d’action co nsiste à cho isir (si elles sont p r é s e n te s d a n s l e s to c k d e p r o c é d u r e s à d i s p o s i t i o n d e l ’ a p p r e n a n t ) o u à é l a b o r e r ( l o r s q u e c e n ’ e s t p a s l e c a s ) l ’ e n s e m b l e d e s r è g l e s c o n d i t i o n n e l l e s d ’ a c t i o n q u i vo n t g é n é r e r l ’ a c t i o n p r o p r e m e n t d i te d e l ’ é l è v e ; c e s r è g l e s p e u v e n t s ’ ex p r i m e r s o u s l a fo r m e s u i va n te : S I [ c o n d i t i o n ] A LO R S [ a c t i o n ] . Cette activité relève entre autres d’une planification , c’es t-à-dire d’une déco mposition du but en s o us-buts à atteindre s uccessivement: que faut -il faire dans un premier temps , puis ens uite, etc. N o to n s q u e l ’ a c t i v i t é d e p l a n i fi c a t i o n e s t d ’ a u t a n t p l u s n é c e s s a i r e q u e l e g u i d a g e p r é s e n t d a n s l a c o n s i g n e e s t f a i b l e , l a i s s a n t a i n s i l a c h a r g e à l ’ é l è v e d e s e m o u vo i r s e u l d a n s l ’ e s p a c e d e l a t â c h e . A j o u to n s é g a l e m e n t q u e l a p l a n i fi c a t i o n p e u t r e p o s e r, d ’ u n p o i n t d e vue pratique mais largement effectif, sur une gestion et une organisation du matériel à utiliser s’il y en a. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CONSIGNES ET PHASAGE DES SÉQUENCES ll est fréquent de constater que des concepts et des procédures, souvent maitrisés par l’élève, ne se trouvent pas mis en œuvre face a cer taines consignes dont ils relèvent pour tant. Dans ce cas , ce n’es t plus alor s le s avoir et le développement conceptuel de l’apprenant qui peuvent p e r m e t t r e d ’ e x p l i q u e r s o n c o m p o r te m e n t . U n c o n t r a t d i d a c t i q u e : L e p r o b l è m e s u i va n t , p o s e p a r G u y B r o u s s e a u à d e s e n f a n t s d e l ’ é c o l e pr imaire, illustre la notion de contrat didactique : << Un berger a 360 m outons et 10 chiens. Quel est l’âge du berger? >> La major ité des élèves répondent en additionnant les nombr es ou en proposant une évaluation de l'âge; mais très peu s’autorisent à répondre que ce problème es t i m p o s s i b l e à t r a i t e r. l l s ’ a g i t l à d ’ u n e f f e t d u c o n t r a t d i d a c t i q u e : s i l ’e n s e i g n a n t p r o p o s e u n é n o n c é , c ’ e s t q u e c e d e r n i e r e s t c o r r e c t e t d o i t p e r m e t t r e l e t r a i te m e n t d e l a t â c h e o u l a r é s o l u t i o n d u p r o b l è m e i m p l i q u é ; p l u s e n c o r e c e t te t â c h e ( o u c e p r o b l è m e ) d o i t ê t r e t r a i t é e av e c l ’ a i d e d e s a v o i r s e t s a v o i r - f a i r e r é c e m m e n t a b o r d e s e n c o u r s . To u te i n te r a c t i o n s o c i a l e , d o n t l ’ i n te r a c t i o n d i d a c t i q u e , e s t r é g i e p a r u n c o n t r a t q u i r è g l e l e s é c h a n g e s e n t r e l e s p a r te n a i r e s ( i c i élèves et ens eignants); ce contr at leur assigne des dr oits et des devoir s en instaurant un code de c o m p o r te m e n t q u i p r e n d va l e u r d e n o r m e . Or, le contr at es t p our p ar tie lar g ement im p licite, c’es t -à-d ire qu’il es t à la char g e d es élèves d e l e d é c o d e r. To u t e c o n s i g n e e s t d è s l o r s l e v e c t e u r d ’ u n c o n t r a t d o n t l ‘ é l è v e d o i t i n f é r e r l e s t e r m e s a fi n d e l e s r e s p e c t e r. L e s i n f é r e n c e s r é a l i s é e s , a u - d e l à d e l a s e u l e q u e s t i o n d e l a « c o m p r é h e n s i o n » d u s avo i r i m p l i q u é , s o n t s o u v e n t s o u r c e d e r e p r é s e n t a t i o n s e r r o n é e s d e l ’ a c t i v i t é a t te n d u e p a r l ’ e n s e i g n a n t . U n e c o m p l ex i t é s t r u c t u r e l l e : U n e c o n s i g n e e s t d i t e c o m p l e x e l o r s q u ’ e l l e i m p l i q u e , p o u r l ’ é l è v e , p l u s i e u r s a c t i o n s à e f f e c t u e r. C e t te c o m p l ex i t é s e t r a d u i t s o u v e n t a u n i v e a u s y n t a x i q u e , c e q u i r e n d a r d u e l ’ i d e n t i f i c a t i o n d e to u s l e s b u t s à a t te i n d r e . L e s c o n s i g n e s c o m p l exe s g é n è r e n t s o u v e n t d e s n o n - t r a i te m e n t s d e c e r t a i n s b u t s p r e s c r i t s , p o u r t a n t i n d i q u é s d a n s l ’ é n o n c é . D a n s c e r t a i n s c a s , i l e s t p o s s i b l e d ’ i nvo q u e r u n p r o b l è m e d e s u r c h a r g e c o g n i t i v e : l a m é m o i r e d e travail de l’apprenant est saturée, elle ne peut supporter toutes les informations à traiter ( tâches as s ignées, inf ormations conceptuelles, inf ormations pr océdurales, etc.).
L a c o n s i g n e e s t u n f a c t e u r d é t e r m i n a n t d e l ’ a c t iv i t é d e l ’ é l è v e . E l l e p e u t é t ay e r s o n a c t i o n e t l e r a i s o n n e m e n t q u i l u i e s t s o u s - j a c e n t l o r s q u ’ e ] le c o m p o r te d e s é l é m e n t s d e g u i d a g e . M a i s e l l e p e u t é g a l e m e n t ê t r e s o u r c e d e d i f f i c ult é s d e p a r s a c o m p l ex i t é m ê m e c o m m e e n r a i s o n d e s i n f é r e n c e s c o n t r a c t u e lle s e r r o n é e s q u e l ’ é l è v e p e u t réaliser a son sujet. © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
TOUT COM M E NCE PAR UN TRAV AI L SUR LE S RE PRÉ SE NT A TI O N S RE LATI V E S À L’OBJE T DE SAV OI R SÉ ANCE S « OUV E RTE S »…
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
… ET SE POURSUIT EN PRENANT EN COMPTE LA ZPD…
« la distance entre le niveau de développement actuel, tel qu’on peut le déterminer à travers la façon dont l’enfant résout les problèmes, seul, et le niveau de développement potentiel, tel qu’on peut le déterminer à travers la façon dont l’enfant résout les problèmes lorsqu’il est assisté d’un adulte ou collabore avec d’autres enfants plus avancés ». PHILIPPE CLAUZARD, MCF UNIVERSITÉ DE LA RÉUNION/ESPE LABORATOIRE LCF ICARE 10/2014
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
… ET LES PARAMETRES DE LA MÉDI ATI ON Négocier la référence commune :
éla b orer, a vec ses élèves, une « coréf érence » où a p p rena nts et f orma teurs s'a ccord ent sur une d éf inition d es ca ra ctéristiq ues d e l'ob jet d e sa voir étud ié, on p a rle d e la même chose
Intervenir:
Mais… ni trop ni trop peu .
Équilibrer , l’étayqge et le format :
trouver un équilibre entre s'adapter à l'apprenant et respecter le format/le modèle de raisonnement attendu
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CONFLIT SOCIO-COGNITIF Sachant qu’apprendre crée un conflit entre ce que l’on sait ou croit savoir et ce qui est transmis, provoquant au sens de Piaget déséquilibre et adaptation, le conflit sociocognitif est la confrontation à un problème entre plusieurs apprenants. Il est formateur dans la mesure où il permet la prise de conscience du point de vue d'autrui et de reformuler le sien. In fine, il permet de réaménager ses cadres de pensée après avoir pris du recul sur le problème, sur la situation, sur de nouvelles solutions possibles…
DÉFINITIONS
CE QUE FAIT L'ÉLÈVE
CONFLIT COGNITIF Il y a conflit, déséquilibre, face à de l'inconnu ... Il y a un problème avec mes cadres de pensée, Fait des essais pour mes représentations qui m'amènent à décider: résoudre le problème « Je dois faire quelque chose... » Recherche des réponses à « Il y a des choses à apprendre » la situation Il y a tension entre ce que je perçois et ce que je suis- entre là où je suis et ce que je veux faire ... CONFLIT SOCIOCOGNITIF Dans une situation d'interaction sociale il y a une confrontation des représentations qui provoque leur modification et améliore la compétence de chacun. Il y a tension entre des représentations, des équilibres provisoires ...
RÔLE DU PROFESSEUR
Crée une situation complexe adaptée aux possibilités des élèves Fait émerger les représentations Complexifie les situations successives
Echange, confronte, Organise les groupes, compare avec d'autres. Veille au respect des contraintes, Réalise, avec des pairs, Reformule les consignes, une tâche commune pour N'apporte pas d'information prendre conscience qu'il y Met à disposition des ressources, a des alternatives. Choisit le mode de confrontation le plus Prendre consciences de efficace. conceptions autres
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
CONFLIT COGNITIF ET CONFLIT SOCIO-COGNITIF Un conflit cognitif se développe lorsqu’apparaît, chez un individu, une contradiction ou une incompatibilité entre ses idées, ses représentations, ses actions et ce que le formateur propose. Cette incompatibilité, d’abord inconsciente, devient la source d’une tension qui peut jouer un rôle moteur dans l’élaboration de nouvelles structures cognitives. Le conflit sociocognitif est la confrontation à un problème entre plusieurs enfants/ ou des adultes. Il est formateur dans la mesure où il permet à l'enfant /l’adulte de prendre conscience du point de vue d'autrui et de reformuler le sien. Après avoir pris du recul sur le problème, l'enfant ou l’adulte va construire sa réponse en jaugeant laquelle des solutions est la plus adéquate.… Doise et Mugny présentent les interactions entre pairs comme source de développement cognitif à condition qu'elles suscitent des conflits sociocognitifs. Selon ces deux auteurs, l'interaction sociale est constructive dans la mesure où elle introduit une confrontation entre les conceptions divergentes . 90 © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
SECONDARISATION ET MÉTACOGNITION En ps ychologie, la métacognition est la « cognition s ur la cognition ». Autrement dit, la m é t a c o g n i t i o n c o n s i s te à a v o i r u n e a c t i v i t é m e n t a l e s u r s e s p r o p r e s p r o c e s s u s m e n t a u x , c ' e s t - à dire « penser sur ses propr es pens ées », penser en l’occurrence s ur ses propres procédures et stratégies per sonnelles d’apprentiss age. Secondariser revient à pens er à l’objet de s avoir même q u i p e u t s e c a c h e r d e r r i è r e l a t â c h e s c o l a i r e o u l e p r o b l è m e à r é s o u d r e , q u i n ’ e s t q u e p r é t ex te p o u r a p p r e n d r e . C ’ e s t e xe r c e r d e s a c t i v i t é s d e p e n s é e s u r l a t â c h e , s u r c e q u ’ o n a f a i t , s u r l ’ o b j e t d e s avo i r …
DÉFINITIONS
CE QUE FAIT L'ÉLÈVE
RÔLE DU PROFESSEUR
METACOGNITION Prendre conscience des méthodes de pensée, Réguler ses propres processus de pensée.
Verbalise la méthode de Aide à formuler, pensée qu'il vient Stimule, encourage, accepte toutes les d'appliquer propositions, En prend conscience et peut Multiplie les prises de parole. agir dessus.
SECONDARISATION Verbalise ce qu’il a fait, Conduire les élèves à exercer des activités dequelles furent ses difficultés Aide à formuler pensée, à réfléchir sur leur « faire », sur la sens quiet facilités devant la tâcheStimule, encourage l’explicitation existe derrière l’effectuation de la tâche scolaire: ilscolaire, quelles furent sesMultiplie les prises de paroles chez les ne s’agit pas de faire pour faire mais de faire pourstratégies pour réussir, ce« bons » élèves ET les « moins bons » théoriser, il faut sortir de la matérialité de la tâchequ’il retient-il, à quoi celaélèves scolaire/abstraire va t-il lui servir ? © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
GESTE DE SECONDARISATION C’est un geste d’étude pour l’apprenant, un geste d’enseignement pour le formateur Que fait-on? De quoi parle-t-on? Comment as-tu fait? Qu’en retiens-tu? A quoi ça sert? = EXERCER UNE ACTIVITE DE PENSEES SUR CE QUI EST FAIT, PENSER LE FAIRE AFIN DE THEORISER , ABSTRAIRE, CONCEPTUALISER © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
M O U VE M E N T GÉ NÉ R AL D E C O NS TR U C TI O N DE L ’ AB S TR AC TI O N , M O U VE M E N T D E C O NC E PTU AL I S ATI O N
Philippe CLAUZARD MCF Université de la RéunionESPE Laboratoire LCF ICARE 10/2014 © Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
SAUT INFORMATIONNEL BOND COGNITIF = SECONDARISATION = GLISSEMENT CONCEPTUEL
PHILIPPE CLAUZARD, MCF UNIVERSITÉ DE LA RÉUNION/ESPE LABORATOIRE LCF ICARE 94 10/2014
LE GLISSEMENT CONCEPTUEL Le glissement conceptuel est un moyen d’étayer la dynamique développementale du « réussir et comprendre » à condition de l’accompagner de la mise en œuvre d’un dispositif pédagogique approprié comme les écrits réflexifs des apprenants. L'enseignant est conduit à user d’indices pour obtenir une idée du cheminement de la conceptualisation dans la tête des apprenants. À ce titre, le journal des apprentissages est une procédure favorable pour amener les apprenants à dire comment ils ont exécuté la tâche scolaire, ce qu’ils en retiennent et comprennent. De manière à rectifier au besoin, à compléter, à reprendre… C’est aussi lutter contre tous les implicites qui malmènent la tâche de former, tous les malentendus qui s’immiscent dans la formation : c’est expliciter, clarifier et accompagner. Des bilans métacognitifs et conceptuels réguliers sont aussi très utiles.
FAIRE, LA MATERIALITE DU FAIRE ASPECTS OPERATOIRES
DIRE ET PENSER LE FAIRE, SORTIR DE LA MATERIALITE DU FAIRE EXERCER DES ACTIVITES DE PENSEE SUR LES ASPECTS OPERATOIRES, REFLEXIVITE ET CONCEPTUALISATION
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LA CONCEPTUALISATION : PILOTER DOUBLEMENT LA TÂCHE ET LA SECONDARISATION POUR FORMER Comme premier moyen, il a le choix des tâches scolaires. Mais cela ne suffit pas, car une tâche scolaire n'est pas une fin en soi : la réussite de la tâche proposée par le formateur ne suffit pas pour qu'il se développe également une assimilation du savoir qui y est impliqué. Il faut que la réalisation de la tâche scolaire soit l'objet de ce que Bautier et Goigoux appellent une « secondarisation » (2004) en s'assurant que ce qui a été acquis par l'adulte en formation n'est pas seulement une réussite de la tâche proposée, mais une réelle appropriation du savoir. C'est ainsi que le formateur dispose d'un deuxième moyen pour entraîner ce saut épistémique: mettre l'accent sur les « épisodes de glissement » qui font passer de la réussite à la conceptualisation (Clauzard, 2005). D’après Pastré La didactique professionnelle, PUF, 2011 PHILIPPE CLAUZARD, MCF UNIVERSITÉ DE LA RÉUNION/ESPE LABORATOIRE LCF ICARE 10/2014
LA TÂCHE N’EST QU’UN PRÉTEXTE
« Qu’en est-il de l’objet de la co-activité entre un enseignant et des élèves ? On peut s’accorder pour dire que l’objet partagé par les deux interlocuteurs est le savoir, à condition d’ajouter que c’est un savoir à apprendre. Comme le souligne Sensevy (2007), la règle de base du jeu » de l’enseignement est que le maître gagne quand l’élève gagne, c’est-à-dire assimile le savoir à apprendre motu proprio. Le savoir n’est pas un objet matériel... Certes, lui aussi possède une double face, c’est une double face qui est présente chez les deux interlocuteurs. En effet, le savoir a deux significations. Selon la première, le savoir est un ensemble d’énoncés qui portent sur un domaine, sont non contradictoires et reconnus valides par une communauté scientifique ou professionnelle. Selon cette première acception, le savoir constitue un patrimoine, représenté par un corps du savoir, transmis d’une génération à l’autre. La mission d’un enseignant est de transmettre ce savoir patrimonial à ses élèves. Mais le savoir désigne aussi toutes les ressources, scientifiques ou empiriques, dont dispose un sujet. On a coutume pour distinguer ces deux sens, de parler de savoir pour le premier et de connaissances pour le second. Mais la question reste de comprendre comment on peut articuler savoir et connaissances, c’est -à-dire de saisir comment un savoir patrimonial, extérieur à un sujet, peut devenir par appropriation une ressource cognitive à disposition de ce même sujet. Et ce passage de l’un à l’autre est justement l’enjeu de l’apprentissage, comme Sensevy le rappelle par sa règle du motu proprio. C’est pourquoi cette ambivalence relative au savoir est présente chez l’enseignant comme chez l’élève, mais sous une forme totalement différente : chez l’enseignant, on peut supposer que l’appropriation a eu lieu. Pour reprendre les termes de Rabardel (1995), le savoir-artefact est devenu savoir instrument. Chez l’élève, le savoir n’est qu’un artefact au moment de l’apprentissage. Et si l’enseignant se propose une transmission directe de ce savoir patrimonial, il ne va transmettre qu’un savoir -artefact. On est donc en plein paradoxe : pour assimiler le savoir à apprendre, l’élève a besoin de la médiation du maître. Mais cette médiation ne peut être qu’indirecte, car le savoir-artefact ne deviendra savoir instrument que si l’élève le construit. Ainsi, il y a un constructivisme indispensable dans tout processus d’apprentissage où sont impliqués un maître et un élève. Pour accomplir sa fonction sans se substituer à l’élève, l’enseignant dispose d’un premier moyen : le choix des tâches scolaires. Mais cela ne lève pas complètement l’ambivalence, car une tâche scolaire n’est pas une fin en soi : il ne suffit pas de la réussir pour qu’il y ait assimilation du savoir qui y est impliqué. Il faut que la réalisation de la tâche scolaire soit l’objet de ce que Bautier et Goigoux appellent une « secondarisation » (2004) : il faut s’assurer que ce qui a été acquis par l’élève n’est pas seulement une réussite de la tâche, mais une appropriation du savoir. C’est pourquoi l’enseignant dispose d’un deuxième moyen pour entraîner ce saut épistémique : mettre l’accent, comme l’a montré Clauzard (2005), sur les « épisodes de glissement » qui font passer de la réussite à la conceptualisation. Dans une situation de diagnostic automobile, la dialectique qui se joue entre les deux interlocuteurs est simple et égalitaire : le réceptionnaire apporte sa connaissance technique, le client apporte sa connaissance d’usage. Si le dialogue arrive à dépasser le malentendu, les deux objets, objet technique et objet d’usage, échangent jusqu’à un certain point leurs déterminations. Dans la situation d’enseignement apprentissage, il y a d’une part chez l’enseignant un savoir devenu connaissance, d’autre part chez l’élève un savoir- artefact qu’il doit transformer en savoir -instrument. Il y a bien une dialectique, mais elle est inégalitaire. L’enseignant n’a pas seulement à prendre en compte le point de vue de l’élève ; il a à susciter une secondarisation, dont on pourrait dire qu’elle correspond à une conceptualisation de ce qui est transmis. Il faut que l’enseignant use d’indices pour se faire une idée du cheminement de la conceptualisation dans la tête de son (ses) élève(s). » Pier r e Pastr é, La d id actique p r ofessionnelle, PUF 2011
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
LA TÂCHE N’EST QU’UN PRÉTEXTE
« Ceci nous conduit à la deuxième dimension caractéristique de la co - activité : la prise en compte de la relation à autrui. On l’a déjà vu rn filigrane pour ce qui était de l’objet de l’interaction. Nous avons vu que cette prise en compte de la relation à autrui était présente aussi bien dans le diagnostic automobile que dans l’enseignement. On pourrit ajouter que dans l’enseignement elle prend une forme particulièrement cruciale. C’est Isabelle Vinatier (2009) qui a particulièrement développé cette dimension. Tout d’abord elle distingue ce qui, dans une interaction, relève de la « résolution » et de la « satisfaction ». La résolution vise l’objet de l’interaction, le diagnostic automobile ou l’appropriation d’un savoir. Il y a résolution quand l’interaction a été efficace : le but de la co-activité est atteint. La satisfaction porte sur l’échange lui -même, en ce sens que la résolution peut atteinte, alors même qu’un des deux interlocuteurs, peut se sentir frustré, non reconnu, manipulé par l’autre. À l’inverse, la résolution peut échouer, alors que la satisfaction est raisonnablement atteinte et permet la poursuite de l’échange. Pour que la satisfaction soit assurée, c’est -à-dire pour que l’échange puisse se poursuivre, il faut que les deux interlocuteurs respectent la « face » de l’autre au sens que Goffman donne à ce terme (1973) : il faut que soit assuré « le respect réciproque du narcissisme et du territoire de parole et de pensée de chacun des interlocuteurs » (Vinatier, 2007). On voit bien, comme l’a montré Yves Schwartz (1992), que la prise en compte de la relation à autrui donne une place considérable à la question des valeurs dans l’organisation de l’activité. Elle donne également une place essentielle à l’histoire personnelle, qui va colorer les relations intersubjectives que le sujet entretient avec autrui. C’est ce qui amène I. Vinatier à parler d’« invariants du sujet » (2009), à côté des invariants relatifs aux situations. Ces invariants du sujet « recouvrent les catégories du jugement, des valeurs, des intérêts et motivations de la personne. L’acteur les a construites en fonction de son histoire interactionnelle et des contraintes relationnelles de la situation » (Vinatier, 2009, p. 96). On peut remarquer une nuance entre le diagnostic automobile1 et 1’enseignement -apprentissage : c’est dans ce dernier cas que la référence aux valeurs et à ce que Vinatier appelle « l’identité en acte » est la plus essentielle. En effet, l’enseignant est un médiateur qui doit provoquer des mouvements d’apprentissage chez les élèves, sans être intrusif, c’est -à-dire en respectant la face et le territoire des élèves. Ceci m’amène à souligner un dernier point concernant la posture de l’enseignant dans sa relation intersubjective avec l’élève : le respect de l’autre ne suffit pas ; il faut encore que l’enseignant crédite l’élève d’un réel pouvoir d’agir. I. Vinatier en donne de nombreux exemples dans ses analyses, notamment quand elle observe les interactions entre un enseignant et un élève en grande difficulté de lecture : il faut que le maître épingle toutes les situations où l’élève échappe à la tâche (Tu ne lis pas), tout en l’assurant qu’il a la capacité de le faire (tu peux le faire, vas -y. Vygotski disait qu’il y a développement quand un sujet parvient à penser « une tête au-dessus de lui-même ». Le rôle d’un enseignant est aussi de créditer autrui du pouvoir de penser une tête au -dessus de lui-même. Dans les activités à dominante relationnelle, il y a des situations qu’on peut qualifier d’égalitaires, où les deux interlocuteurs partent chacun de leur point de vue ; et il y a des situations plus inégalitaires, où un des interlocuteurs agit non seulement avec l’autre, mais sur l’autre, pour « le changer en échangeant » (Vinatier, 2007). C’est dans ces cas-là que l’analyse de la co-activité demande à être particulièrement subtile . » Pierre Pa s tré, L a d id actique p r ofessionnelle, PU F 2 0 11
© Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE
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