DMA
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ébénisterie
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Session 2014
L i m i t e
D o ss i e r
d e
S y n t h è s e
OKA
Pierre-Alexandre C E S B R O N cesbron.pa@gmail.com
06 71 09 30 98
École Boulle 9-21 rue Pierre Bourdan
75012 . PARIS
Partie 1 Notion de limite 04 . Champ d’action 05 . 06 . Seuil 07 . Principes
Limite vue du Japon 08 . Passage 09 . Écran 10 . 11 . Gestuelle
Rapport de Limite 12 . Ambivalence 13 . Microcosme 14 . 15 . Amalgame
Partie 3 Essais Techniques 46 . Synderme 47 . Traitements 48 . 49 . Mécanique
Documents d’Exécution 50 . Descriptif 51 . Détails 52 . 53 . Planification
Aperçu de Réalisation 54 . 55 . Semelle 56 . 57 . Casiers 58 . 59 . Cadre
Partie 2 Situation de limite 18 . 19 . Contexte 20 . Intention 21 . 23 . Positionnement
Proposition de projet 24 . 26 . Fonction 27 . 33 . Volumétrie 34 . 39 . Matérialité
Portée du projet 40 . Baguettes 41 . Oku Ma En 42 . 43 . Colline
Partie 4 Référencement 64 . Bibliographie 65 . Sitographie 66 . 67 . Documents
N o t i c e s 68 . Biographie 68 . Courants 69 . Fiche Technique
R éfl e x i ons 70 . Rencontres 71 . 73 . Questions de limite 74 . 75 . Ébénisterie
Pierre-Alexandre CESBRON DMA 2014
Dossier de Synthèse
Partie 1 Notion de Limite . Limite vue du Japon . Rapport de Limite
DĂŠmarche
Notion de limite Champ d’action . Seuil . Principes
Le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales définit la limite comme « Ce qui distingue un domaine, ce qui sépare deux domaines ». J’ai concentré mon attention sur cette barrière qui détermine un domaine d’un autre et plus particulièrement aux brèches que peut comporter cette séparation. En effet, la brèche d’une barrière donne lieu à un passage et donc à une communication des deux espaces. Cette idée s’apparente à celle du seuil, ce point de passage qui fait entrer ou sortir, qui distingue le dedans du dehors, l’intérieur de l’extérieur. L’action de traverser ce seuil m’interpelle ; l’instant charnière entre deux milieux distincts me donne à penser…
06 Partie 1
Extrait de la réflexion initiale (liée au graphique ci-dessus) Ce qui me paraît digne d’intérêt dans le sujet de la limite, c’est la dualité de plusieurs entités, milieux états… Pour saisir cette limite, il semble nécessaire de comprendre ce qui distingue ces éléments. Le rapport de l’ombre à la lumière reste tout aussi insaisissable que celui du vide au plein ou de l’extérieur à l’intérieur. La limite étant parfois indéfinissable presque insaisissable. S’agit-il de deux entités opposées (équilibre, extrême) ou
de la
présence et donc dans une autre mesure de l’absence d’une entité (potentiel, parabole) … Peut–on incorporer du contenant à du contenu ?
Il semble bon de remarquer la dimension intérieure du
« chez moi, le privé, le domestique » en opposition au domaine extérieur « les autres, le monde, le public, le
politique ». La porte intervient là comme obstacle, un cloisonnement qui « casse l’espace » (extérieur) et qui paraît nécessaire à la notion même de privé (intérieur). Cependant, bien quelle interdise le passage « ni dans
un sens ni dans l’autre », elle se présente tout de même comme symbole privilégié du passage. Elle indique la partie la plus mince de la frontière, celle par laquelle « il
faut communiquer ». Telle une porte de coffre-fort elle intervient comme outil de verrouillage de l’accès comme le précise un peu plus loin Perec : Le seuil (lien entre deux entités) fait l’objet d’un
« Il ne s’agit pas d’ouvrir ou de ne pas ouvrir sa porte, il
point stratégique qui se voit parfois, volontairement
ne s’agit pas de « laisser sa clé sur la porte » ; le problème
condamné. Georges Perec soulève cette particularité
n’est pas qu’il y ait ou non des clés : s’il n’y avait pas de
par l’image de la porte dans Espèces d’espaces ( P.77,78)
porte, il n’y aurait pas de clé. » A
« Les portes arrêtes séparent. La porte casse l’espace, le scinde, interdit l’osmose, impose le cloisonnement : d’un côté, il y a moi et mon chez moi, le privé, le domestique, de l’autre côté il y a les autres, le monde, le public, le politique. On ne peut pas aller de l’un à l’autre en se laissant glisser, on ne passe pas de l’un à l’autre, ni dans un sens ni d’en l’autre : il faut un mot de passe, il faut franchir le seuil, il faut montrer patte blanche, il faut communiquer, comme le prisonnier communique avec l’extérieur. »A
1 - Organigramme personnel, Août 2013, Paris 2 - Dessin personnel, Septembre 2013, Paris 3 - Bernard Plossu, Georges Perec, 1978, Paris A - Georges Perec, Espèce d’espace, Galilée, 1974, P.77,78
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3
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Notion de limite Champ d’action . Seuil . Principes
A contrario, Walter Benjamin traduit, dans
Le livre
des passages, l’idée d’échange que suggère le seuil notamment par l’image de la porte et des passages parisiens … « On pourrait tout aussi bien dire aux portes de sortie, car, dans ces étranges installations (les passages parisiens) qui tiennent à la fois de l’immeuble et de la rue, chaque porte est en même temps entrée et sortie »B Le seuil est vu ici comme le lien d’interaction des deux milieux. Cette interface ne relie pas plus l’un à l’autre, l’échange demeure équivalent. Par ailleurs ces écrits considèrent
différents types de seuil, certes la porte
qui traduit une limite ponctuelle, mais également le passage comparable à un corridor qui constitue une limite étendue.
08 Partie 1
4 - Photographie personnelle, Paris, 2014 5 - Photographie personnelle, Campus TASK, 2013 6 - Bernard Delvai, Les Passages Parisiens, Paris, 2006 7 - Vincent Thibert, Couloir, Paris, 2008 B - Walter Benjamin, le livre des passages, cerf, Paris, 1989
4
5
6 7
A la lumière de ces observations je tire trois grands principes qui définissent cette limite seuil. Le premier concerne la nature du point de passage, car
Seuil
si la « frontière » semble souvent nette et franche, il peut arriver qu’elle soit floue, progressive. Le passage peut donc s’apparenter à un instant charnière ponctuelle ou à un parcours entre deux eaux d’avantage progressif.
Le second point réside dans la possibilité d’ouvrir ou de fermer, mais pourquoi ne pas imaginer une situation
Passage
entrouverte qui ne laisse passer que certaines entités. Une forme de filtre ou de sas entre les deux milieux. (L’écluse image à mon sens ce principe…) L’interactivité constitue d’ailleurs le troisième point, celui de l’échange qui peut être unidirectionnel ou alternatif. Ce dernier facteur dépend des flux opérés entre les deux espaces et suggère l’idée d’un mouvement qui provoque l’action de traverser, de passer la frontière ; en somme de franchir la limite.
Sas
Limite vue du Japon Passage Cette année fut pour moi particulière dans la mesure où il m’a été possible de participer à un échange de quatre semaines dans une université japonaise. Cette expérience fut l’occasion d’un enrichissement cultuel très fort mais également l’opportunité d’observer les notions de « franchir » et de « seuil » en extrême orient. Effectivement, la culture locale traite avec singularité le lien entre le de dedans et le dehors. La transition de l’un à l’autre s’accompagne souvent de signe intuitif que je décrypte au travers d’exemples…
.
Écran
.
Gestuelle
Bien que l’occident comporte également de long passages, ce type de parcours semble très présent au Japon mais ne véhicule pas les même sensations. Sens doute par le fait que ces enfilades ne comportent que rarement de plafonds et se rythment d’une série de portes parfois très rapprochées. Il peut arriver que l’enchaînement des portes indique un sens comme par exemple le parcours Kitsune dans lequel chaque porte se voit gravée de prières visibles uniquement dans le sens descendant, comme si elle s’orientait vers un centre d’intérêt compréhensible une fois l’assertion effectuée. Comme s’il fallait s’efforcer de prendre de la hauteur avant de pouvoir espérer décrypter le sens.
Cette
série d’ouvertures forment donc un cheminement qui prépare notre état d’esprit à prendre pleinement part au milieu de destination. Pourtant, c’est à croire que la transition qu’opère ce parcours importe autant si ce n’est plus que le fait de parvenir à la destination. Comme si le temps de traverser était une destination en soi. Cette sensation de profondeur et d’intériorité pour l’usager, exprime assez bien l’idée d’OKU propre à l’esprit japonais qu’Augustin BERQUE traduit littéralement par « un lieu situé profondément dans l’intérieur des choses, loin de leur aspect externe. »C
10
Partie 1
Parallèlement certaines transitions peuvent paraîtres plus brèves, comme par exemple les cloisons d’habitat traditionnel en papier Washi dénommées Soji. En effet ces séparations peuvent faire office d’ouverture puisqu’elles sont amovibles et servent parfois de porte. Pour cause les sojis des maisons traditionnelles japonaises changeaient de place suivant les différents temps de la journée. La notion de seuil devient alors un élément de
8 - Photographie personnelle, Musée ZOHIKO, Kyoto, 2013
rythme temporel qui rend l’espace insaisissable. Bien
9 - Photographie personnelle, Parcourt KITSUNE, Kyoto, 2013 10 - Photographie personnelle, Atelier de Papier, Miama, 2013 11 - Photographie personnelle, Temple Todai-ji, Nara, 2013
qu’il s’agisse de séparation capable de déterminer deux
8
espaces bien distincts, parfois même opposés, le soji ressemble d’avantage à un tampon qui relie les deux
9 10
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12
parties. En effet sa finesse laisse transparaître l’espace 13
opposé, il suggère par des jeux d’ombre ou de bruit la
12 - Photographie personnelle, Maison traditionnelle, Kyoto,2013
nature de l’espace voisin, il le relie tout en le séparant.
13 - Photographie personnelle, Entrée de restaurant, Kyoto, 2013
par l’idéogramme EN qui traduit une continuité non pas
C - Augustin Berque, Vivre l’espace au Japon, P. U. F., Paris, 1982
Cette notion de coexistence des contraires s’exprime dans le passage graduel d’un élément à un autre, mais au contraire par une juxtaposition d’éléments bien qu’ils soient dissemblables ou de qualités opposées. Cette corrélation se lie bien souvent par un ou des éléments « tampon » qui n’appartiennent ni à l’un ni à l’autre des deux éléments, mais aux deux en même temps.
Limite vue du Japon Passage
Enfin, il semble important de soulever la notion de passage dans le comportement et la gestuelle des individus japonais. Effectivement, la culture locale regorge de gestes ou d’autres signes qui induisent le fait de franchir une étape, un seuil. L’exemple le plus flagrant demeure celui de la porte du temple Todai-ji que les passants enjambent sans en toucher son seuil, un grand pas qui insiste sur la sensation de traverser. Ce phénomène se présente également lors de l’entrée dans une quelconque habitation, puisque la coutume veut que les arrivants retirent leurs chaussures dans un espace prévu à cet effet, une sorte de sas d’entrée. Bien d’autres cas de figures illustrent ces propos, mais pour chacun il s’agit de marquer un arrêt, de prendre conscience du contexte et de la situation présente. Ces propos illustre la notion de MA propre à l’esprit japonais, le concept du MA étant « l’intervalle qui existe obligatoirement entre deux choses qui se succèdent : d’où l’idée de pause. »C Augustin BERQUE, 1982. Cet arrêt se nomme « Tome » en calligraphie japonaise, ce prompt temps de silence, de repos permet de prendre de la hauteur sur le travail encouru et de pressentir l’action à venir.
12
Partie 1
.
Écran
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Gestuelle
14 - Photographie personnelle, Regard sur TASK, Sonobé, 2013 15 - Photographie personnelle, Sas de chaussures, Sonobé, 2013 15
16 - Photographie personnelle, passage du seuil, Nara, 2013 17 - Photographie personnelle, porte de cérémonie du thé, Sonobé, 2013 18 - Photographie personnelle, Essai calligraphie , Sonobé, 2013 C - Augustin Berque, Vivre l’espace au Japon, P. U. F., Paris, 1982
16 18
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14
Pour avoir observé et parfois vécu chacune de ces notions, je constate qu’elles participent à l’idée que les occidentaux se font de l’art de vivre japonais. Elles induisent une portée plus profonde de chaque moment et donnent une valeur particulière à chaque geste. Je reste particulièrement convaincu que l’accumulation de ces trois principes contribue à la construction d’une personnalité profonde de « l’être intérieur ». Ces modes de vie participent au recentrement, au recul face au monde extérieur tout en anticipant l’action à venir. Ce sont des méthodes, parfois des protocoles, afin de ne pas subir la situation. Ce sont des démarches d’adaptation, de transition pour l’esprit, afin de vivre pleinement chaque instant, chaque étape que la vie propose.
Rapport de Limite Ambivalence . Microcosme . Amalgame
Sur cette maison Fujimoto cherche à retirer toute idée d’entrée ou de sortie. L’idée de seuil se floute, au point qu’il semble compliqué de distinguer une pièce d’une autre, l’intérieur de l’extérieur. Il cherche à donner l’illusion que l’occupant évolue partout à la fois et qu’il fait partie intégrante de la ville. Le rapport entre l’intériorité et l’extériorité devient alors ambivalent. A l’heure des réseaux sociaux et des open spaces, l’Architecte va au-delà
et propose une démarche d’extériorisation
de la sphère intime.
La transparence des parois et
l’imbrication des pièces ne permet plus de distinguer le privé du public. C’est à croire qu’il n’existe alors plus de notion de seuil, elle n’est là que suggérée.
14
Partie 1
Dans notre société, tout tend à se décloisonner qu’il s’agisse de notre habitat (duplex, open space), de nos pratiques (par exemple le design et l’architecture qui deviennent de plus en plus semblables), dans nos rapports (moyens de communications instantanée, skype,twit,fb…). Ce phénomène s’inscrit dans une démarche progressiste qui répond à des enjeux et aspirations sociétales. Ces changements impliquent cependant que nous ajustions nos modes de vie, que nous repensions les meubles en conséquence. L’essor du « tout public » engendre d’ailleurs la contreculture « cocooning »...
Le fauteuil Quiet cloisonne, il pousse l’usager à faire abstraction de ce qui l’entoure, à s’isoler. Cet espace dans l’espace permet de donner un lieu à une activité bien précise, en l’occurrence lire. Il s’agit finalement d’une sorte d’impasse, d’un cadre qui favorise la tranquillité et le confort afin qui pousse l’utilisateur à s’affranchir de toute distraction. Ce meuble renvoi l’utilisateur l’essentiel.
19 - Tilt Design, Quiet, Angleterre, 2013
Cet isoloir s’apparente à une bulle protectrice qui permet
19 20
20 - Sou Fujimoto, Transpa- rence house, Tokyo, 2010 20
à son contenu de s’affranchir du milieu environnant, une forme de microcosme. Il sépare l’usager du niveau du sol, mais également des côtés de l’arrière et du dessus.
20 19
En effet, la caisse en bois garnie de tapisserie semble prévue pour détacher l’usager du milieu qui l’entoure et générer un espace dans l’espace. Le siège pentatonique de Tilt s’apparente davantage à un gouffre auquel seule une entrée (un seuil) permet d’accéder. Quiet renvoie donc à un accès unilatéral et inclut l’idée de la poupée russe, celle de pouvoir démultiplier les espaces afin d’entrer plus en profondeur en soi-même. Il témoigne également d’une aspiration à créer un monde dans le monde.
A l’heure où le tumulte des milieux urbain s’accentue, il semble nécessaire pour les individus de prendre du recul, de se recentrer, d’exister au milieu de la population. Tilt design invite l’usager à ne faire qu’une seule tâche et à habiter un seul endroit à la fois. Cette position me semble une bonne réponse face au stress et à l’hyper activité de notre société. Il ne s’agit pas de se couper du monde, mais de trouver un juste équilibre entre ces deux milieux. Le déséquilibre dont il est question provient majoritairement de l’activité professionnelle qui, pour certaines personnes, s’immisce dans l’habitat (technologie, télétravail, surcharge professionnelle…)
Rapport de Limite Ambivalence . Microcosme . Amalgame L’ambivalence des milieux, peut s’avérer oppressante et conduire à une activité perpétuelle qui ne laisse plus de place au repos. Ces attitudes contemporaines font déjà l’objet de préoccupations puisque la fondation émile Hermes a lancé un Prix en 2013 afin d’élaborer un dispositif qui permette « un temps calme, proposer une pause, une interruption momentanée, se ménager la possibilité d’une suspension des flux dans un monde rapide, qui se nourrit du continuum ininterrompu des actes, des pensées et des obligations »
21 - Photomontage de Nicolas BAIER, Oli, Montréal, 2001
21
D - fondation émile Hermes, Appel à projet 2013,Paris, 2013 E - Patrick Jouin, Le travail au bureau comme à la maison, LeMonde, 2012 F - Gérard LAIZE, Frédéric LOEB, Les courants de l’évolution du cadre de vie et leur mode d’emploi, DOMOVISION, Paris, 2009-2014
M. Baie soulève la question de la séparation des temps de l’activité humaine, en rapprochant deux blocs distincts. L’ensemble représente un homme dormant dans un lit et dont les pieds s’activent dans un atelier. Il semble difficile de savoir si le travail hante le rêve ou au contraire les rêves hantent le travail. L’un semble nécessaire à l’autre et inversement. Pourtant ils ne paraissent pas compatibles en un même temps. Les deux images superposées ne sont d’ailleurs pas justifiées l’une vis-à-vis de l’autre, cela illustre le décalage des activités.
16
Partie 1
D
Cet appel signe la nécessité pour notre société de retrouver un équilibre, de changer nos comportement et d’adapter nos objets du quotidiens afin qu’ils soient au service de notre bien-être et non l’inverse.
Bien des outils permettent aujourd’hui au travail de s’immiscer dans la sphère personnelle, c’est un fait auquel il semble difficile de s’opposer. En effet le développement des outils de travail nomades (téléphone, ordinateur…) favorise l’ambivalence et crée de nouveaux comportements. il semble possible temps
»E.
Patrick Jouin observe qu’à ce jour de « travailler partout et tout le
Phénomène que remarque également l’APCE
Fabrication de meuble domestique en 2009 « La limite entre le professionnel et le privé existera de moins en moins, dû aux nouveaux modes de communication et de gestion des flux matériels et humains. » F
Ces questionnements me mènent à cette problématique :
Comment dissocier la sphère professionnelle du domaine familial? Comment assurer la transition du public au privé dans l’habitat?
18
Partie
Pierre-Alexandre CESBRON DMA 2014
Dossier de Synthèse
Partie 2 Situation de limite . Proposition de projet . PortĂŠe du projet
Conception
Situation de limite Contexte .
Intention
.
Positionnement
Libération - aliénation
Vitesse, ubiquité, permanence
Comme vu dans le chapitre précédent les flux et les
De là peuvent découler des comportements extrêmes
nouveaux modes de communication créent une situation
dont M. FERRARIS témoigne. « Je vais vous raconter
paradoxale. Effectivement les avancées technologiques
une histoire vraie : « celle d’un salarié qui dort chez lui
permettent le développement de nombreux outils qui
dans la nuit de vendredi à samedi. Il se réveille à 3 heures
participent à cet essor : l’aéronautique, l’informatique,
du matin, veut connaître l’heure, regarde sur son portable
et avec lui internet...
Le téléphone portable figure, à
et découvre qu’il a un e-mail professionnel urgent qui est
mon sens, comme l’emblème de cette révolution du
arrivé de l’étranger, décalage horaire oblige. Il y répond
communicatif et du nomade, car en évoluant vers le
de suite. Voilà un scénario que les pires cauchemars
smartphone il concentre à ce jour la quasi-totalité des
marxistes sur l’aliénation du travail n’auraient pu imaginer
moyens de communication (téléphonie, mail, réseau
: obtenir d’un salarié qu’il soit « mobilisable » dans la nuit,
sociaux…) et nous accompagne chaque jour dans nos
qui est censée être consacrée au repos de la semaine.»
déplacement. Le progrès sociétal
H
technologie
que permit cette
possède toutefois son revers,
Françoise
DASTUR l’évoque dans le mensuel Physiologie n°73 « L’idée même d’être constamment joignable me semble être une entorse insupportable à ma liberté. Il suffit de voir dans la rue les visages hallucinés de ceux qui téléphonent et qui ont ainsi perdu tout rapport à ce qui les entoure pour comprendre que le portable peut être un instrument d’aliénation comme de libération ». G
Il poursuit par « Libération pour celui qui l’utilise dans
son travail et qui peut répondre plus efficacement aux tâches à accomplir. Aliénation pour celui qui ne peut plus vivre sans être constamment en rapport virtuel avec les autres, ce qui implique qu’il n’a plus de rapport suffisant avec soi-même et avec son environnement. »G
20 Partie 2
Il s’agit comme le précise un peu plus loin Maurizio
FERRARIS d’une « Servitude volontaire » H .
Le téléphone peut donc s’avérer intrusif dans l’espace privé, jusqu’à en devenir contraignant comme le précise Cynthia FLEURY
« Le téléphone portable a ceci de
particulier qu’il est une technique qui a reçu un succès foudroyant, alors qu’il est étonnamment astreignant: il emmêle le temps du travail et le temps du loisir, façonne un sujet qui toujours peut être sonné, convoqué, rappelé à l’ordre du réseau. » I . Ces amalgames que suggère le portable proviennent de trois principes dont Maurizio FERRARIS fait l’explication « L’être-au-téléphone n’était qu’un fait occasionnel, être-au- mobile se caractérise par sa permanence, son ubiquité et son individualité : partout (ubiquité), tout le temps (permanence), on peut te trouver, toi et toi seulement (individualité). » H
22 - Photomontage personnel, Accumulation, Paris, 2013 23 - Phtographie de Jean Michel Thirion, Sans nom, Paris, 2013 G - Françoise DASTUR, Cet objet vous veut-il du bien? N°73, Philosophie magazine, Paris, 2013, P. 59 H - Maurizio FERRARIS, Ibidem, P. 46 I - Cynthia FLEURY, Ibidem, P. 54
22 23
Situation de limite Contexte
. Intention .
Positionnement
Elucider, responsabiliser, recentrer Ce raisonnement pousse à croire que l’émancipation des
En définitive, ce raisonnement pousse à croire que
outils multimédia implique de développer des meubles
l’envahissement de la sphère professionnelle à la
adaptés à ces nouveaux comportements. Il importe
sphère privée provient en partie des technologies des
dans un premier temps de repenser les modes de vie.
communications. Effectivement, ces dernières tendent
Trois solutions ressortent de ce développement, tout
à tout rendre plus réactif et à passer donc d’une sphère à
d’abord, aider l’utilisateur à devenir plus lucide face
l’autre sans transition voire même en les superposant (par
à l’accélération du rythme de vie que suggèrent les
exemple, pour certaines personnes, un seul téléphone
technologies. L’accompagner dans une prise de recul
peut servir à l’usage personnel et professionnel…). Le
face aux préoccupations privées et professionnelles.
DOMOVISION 2009.2014 en atteste « Sous l’influence
Par ailleurs, il convient de l’aider à prendre en main
des technologies d’information tout va de plus en plus
l’organisation et la gestion de ces activités. Enfin, face
vite, nous avons tous tendance à penser que tout doit
à l’ubiquité et l’omniprésence des
aller encore plus vite ».F Il précise à ce sujet qu’ « Une
informations, le
dispositif se doit de favoriser le recentrement afin que le sujet prenne possession de son environnement, qu’il s’approprie le cadre de vie.
Dissociation par transition Face à cette globalisation, Cynthia FLEURY préconise de prendre des distances “L’aliénation sociale a supplanté l’aliénation psychique: nous sommes donc tous amenés à négocier avec nos instruments techniques, à poser des limites, à en détourner un minimum l’usage prévu par les ingénieurs et les marketers. (…) Il y a donc un travail de mise à distance, à la fois individuel et collectif, qui nous attend. On y arrivera sans doute, même si cela promet d’être difficile”.I Les notions théorisés par augustin Berques MA, EN et OKU constituent des éléments de réponse face à ce sujet … Car elles poussent à dissocier, à marquer des temps de pause ou de retenue, à ne pas rester en superficie mais chercher la profondeur en chaque chose, à confronter des éléments opposés sans pour autant faire d’amalgame.
22
Partie 2
prise de conscience et d’intelligence est nécessaire ». F
24 - Photographie Personnelle, time is sun, Sonobe, 2013 25 - Vincent Leroux, Sans Nom, France, 2013 I - Cynthia FLEURY, Cet objet vous veut-il du bien? N°73, Philosophie magazine, Paris, 2013, P. 54 F - Gérard LAIZE, Frédéric LOEB, Les courants de l’évolution du cadre de vie et leur mode d’emploi, DOMOVISION, Paris, 2009-2014
24
25
A ce jour, les pré-requis d’une activité professionnelle ressemblent étrangement à ceux qui définissent le téléphone portable à savoir efficacité, communication, performance… A l’inverse, le temps « chez soi » se perçoit comme un temps de pause, de recentrement, de recul, comme s’il s’agissait de rééquilibrer le rythme de vie. Du contexte d’utilisation découle la nature du projet. Il s’agit donc tout d’abord de déterminer le contexte (privé ou professionnel) dans lequel le dispositif puisse s’intégrer. Comme vu précédemment, il semble plus judicieux de placer une zone de transition, du milieu professionnel au privé et non l’inverse. En analysant donc les différentes étapes par lesquelles un professionnel passe en quittant son travail pour rejoindre son habitat, trois moment se distinguent : la sortie du travail, le transport de retour et l’entrée au domicile. Tout en sachant que la démarche consiste à mettre de côté toute trace professionnelle une fois chez soi. La sortie du lieu de travail et le transport amorcent la transition du professionnel au privé. L’idéal reste donc de finaliser cette transition en rompant tout lien avec l’activité professionnelle à l’entrée du domicile. Afin que ces « restes de travail » ne prolifèrent pas dans l’habitat autant s’en dessaisir dès l’entrée. Le lieu privilégié pour ce type de transition du public au privé reste donc l’environnement qui avoisine la porte d’entrée : le vestibule. Effectivement il peut s’agir là d’une zone dans laquelle l’usager se décharge, en rentrant, des accessoires de l’extérieur (veste, portefeuille, sac…).
Il s’agit donc
d’un lieu de transit, dans le domicile, qui prédispose l’usager à entrer totalement délesté de ce qui le relie au monde professionnel,. En somme l’aider à franchir psychologiquement et matériellement le seuil de son lieu de vie.
Situation de limite Contexte
.
Intention
. Positionnement
Typologie des meubles d’entrée
D’autre part, le rôle de chacun de ces dispositifs diffère,
Le dispositif à mettre en œuvre s’apparente donc à
la console a pour but d’exposer, de montrer. Le bureau
un meuble de vestibule.
Cette typologie de mobilier
RW4 permet certes de travailler, mais aussi de cacher
de différentes manières. Trois exemples
son contenu par un abattant. Tandis que l’ensemble des
permettent de mieux comprendre les caractéristiques
casiers suggèrent le contenu en dévoilant une partie des
qui spécifient cette typologie de meuble. La console
éléments qu’il contient. Ces trois comportements font
réalisée par le maître Georges KINTZ date des années
écho au vestibule, car il s’agit là du passage le moins
se décline
1780, le bureau d’entrée RW4 de la maison d’édition Wa
intime de l’habitat puisque chaque individu arrivant de
De Be et le système mural Vola, conçu par le designer
l’extérieur voit ou traverse cette pièce (qu’il s’agisse
Grégoire de Lafforest lors d’une carte blanche
de convives, de livreurs ou de réparateurs …). Certain
attribuée par le VIA en 2013.
comprennent donc des aspects ostentatoires ou au contraire de discrétion selon ce qu’ils supportent.
Tout d’abord chacun de ces objets s’adosse à un mur, certains y sont parfois fixés ce qui permet de minimiser l’encombrement du vestibule. En observant davantage le volume de ces derniers, deux stratégies apparaissent, l’une consiste à prendre appui au sol et arrondir largement les arêtes susceptibles d’encombrer le passage. L’autre implique de minimiser la profondeur afin de faciliter le passage.
24
Partie 2
A la lumière de cette analyse, plusieurs points permettent de préciser le projet. Tout d’abord selon ce qu’ils contiennent, les meubles d’entrée peuvent exposer ou suggérer, ou cacher. Ce type de meuble concerne des meubles de passage, il convient donc d’étudier le vestibule afin que l’encombrement du meuble ne gêne pas le passage. Effectivement le scénario d’usage peut faciliter l’accès aux éléments et donc fluidifier le passage. Cependant, il semble plus judicieux que l’utilisateur marque un arrêt pour prendre le temps de faire la part des choses entre sa vie privée et son travail. L’accès aux effets professionnels doit donc impliquer une pause, avant de passer et de prendre place dans l’espace habitable. Enfin la manière d’utiliser le meuble implique différents comportements pour l’utilisateur. De fait, le système mural Vola s’apparente à un parcours rythmé de multiples éléments que l’utilisateur suit. Il accompagne donc l’usager tandis que la console de Kintz ne comporte qu’une seule surface de desserte à mi-hauteur. Quant au bureau RW4, sa structure escamotable nécessite de prendre le temps de s’arrêter, d’ouvrir, d’effectuer les tâches puis de le refermer avant de repartir. Contrairement aux deux précédents exemples dont l’usage permet de passer sans s’arrêter, ce meuble implique un temps de pause, d’arrêt.
26 - Grégoire de lafforest, vola ,système mural, V.I.A. France, 2013 27 - Georges KINTZ, Console déserte, France, vers 1780 28 - WADEBE, Robin Wood RW4 , Bureau, Wa De Be, France, 2013
27 26 26
28
Proposition de projet Fonction
.
Volumétrie
.
Matérialité
Scénario
Cible
Comme vu précédemment, le meuble doit dissimuler
Ce meuble s’adresse donc à des actifs qui rencontrent
les objets de travail et marquer un temps d’arrêt lorsque
des difficultés à s’abstraire de leurs préoccupations
l’usager les dépose. Le mouvement d’un organe de
professionnelles en rentrant à leur domicile. Ces
façade permet de cumuler ces deux notions : il permet
personnes ne possèdent pas nécessairement de bureau
d’une part de cacher ce qu’il recouvre, d’autre part il
dans leur habitat mais reviennent tout de même avec
implique de manipuler le meuble avant de se saisir des
des affaires de travail.
objets, ce qui contraint l’usager à prendre plus de temps et donc s’arrêter dans le passage du vestibule.
Après avoir procédé à un sondage (annexe page …) et longuement interrogé différents professionnels tels que
Passer le seuil d’entrée, s’arrêter face au meuble,
le
des ingénieurs, des avocats, des chefs d’entreprise…
déployer, déposer et ranger les affaires professionnelles,
Il semble que la profession la plus concernée par
refermer le meuble, passer dans l’espace de vie. Telles
ce
peuvent être les étapes qui rythment la traversée de
commerciaux. Effectivement leurs fonction implique
l’entrée au sens propre vers le domicile.
qu’ils soient couramment en déplacement parfois
dispositif
soit
celle
des
représentants
ou/et
jusqu’à des horaires tardifs, ou alors qu’ils partent de Toujours dans l’idée de renforcer l’impression de chez
bonne heure démarcher loin de leur domicile. Ces
soi, il semble intéressant de disposer sur le meuble
circonstances impliquent qu’ils ramènent régulièrement
en position fermée, des éléments de l’espace privé.
leurs outils et des documents professionnels ce qui les
Par exemple des clés, des cartes postales ou autres
contraint à travailler au sein de leur lieu de vie privée.
correspondances…
Fait notable, les outils électroniques qu’ils possèdent nécessitent d’être rechargés au retour chez soi.
1 Arriver
26
Partie 2
2 Ouvrir
3 Classer / Déposer
4 Consulter / noter
5 Fermer
6 Habiter
29 - Photographie personnelle, Retour d’activité, Paris, 2014
29
30 - Photographie personnelle, A l’aise in chaire, Paris, 2014 30
Les échanges avec des clients potentiels permettent d’établir le cahier des charges que voici : - Le meuble doit prévoir deux parties, l’une consacrée aux objets professionnels, l’autre pour les effets privés. - Le passage d’une partie à l’autre doit s’articuler par un ou des organes escamotables du meuble - Ce principe de transition permet de dissocier ces deux espaces et de passer de l’un à l’autre régulièrement puisque la fréquence de manipulation est évaluée à deux utilisations par jour.
Professionnel
Privé
- Proposer des organes de tri pour les différentes affaires, afin de les ordonner et de leur donner une place où l’utilisateur peut facilement se les réapproprier.
.. ... .
... ...
- Ces rangements doivent intégrer : une mallette, un téléphone portable, une tablette ou un ordinateur portable, un bloc note, des dossiers au format A4, des magazines ou journaux, des clefs, un portefeuille/porte monnaies, du courrier. - Le meuble permettra de faciliter l’organisation de l’usager, par l’affichage de planning et de notes - Il Intègre le nécessaire d’alimentation des appareils électroniques.
Proposition de projet Fonction
.
Volumétrie
.
Matérialité
Montrer, cacher, escamoter Parmi les objets du quotidien, certains s’exposent, d’autre se cachent, il arrive même que certains d’entre eux associent ces deux fonction pourtant opposées par le biais de système(s) d’escamotage. Cette mutation de l’objet d’un état à l’autre, véhicule un message fort que cette analyse tente de décrypter. Cette étude compare trois exemples qui illustrent ce principe. Les séparations articulées Buzziblinds dessinées par Alain Gilles, le fauteuil évolutif de Manuele Magini nommé Sosia que la marque Campeggi édite et enfin l’ensemble de tiroirs rotatifs pivot imaginé par le studio Arw-Edges pour le distributeur néerlandais Arco. D’une part, bien sûr ces objets d’intérieur déterminent une zone qu’ils peuvent rendre visible donc accessible ou au contraire l’obstruer par des principes de rabattement. Ainsi le caractère orientable de ces projets décline deux possibilités, celle de d’apercevoir et celle au contraire de dissimuler. Il importe cependant de préciser que ces
D’autre part ces projets présentent des caractéristiques
dispositifs ne peuvent mouvoir de manière autonome.
singulières, à commencer par leur construction puisque
En effet, une sollicitation humaine reste nécessaire pour
le cloisonnement du projet Buzziblinds se compose d’un
que chacun de ces projets réagisses. Ce qui traduit l’idée
ensemble d’éléments juxtaposés tandis que le meuble
d’un choix, d’une intention de l’usager afin de passer du
pivot s’apparente davantage à un réseau de casiers
montré au caché.
liées dépendants les uns des autres. Quant au fauteuil Sosia, il n’emploie aucune mécaniques compliquées pour s’escamoter, mais simplement la souplesse de son matériaux constitutif -le lycra- pour créer des mouvements parfois mixtes mais bien prémédités. Par ailleurs la barrière que forme ces objets relève de différents niveaux d’efficacité. En effet si pour le meuble pivot le « regardeur » doit nécessairement manipuler pour avoir accès, il peut, en revanche se rapprocher pour mieux distinguer dans le fauteuil ou encore contourner les paravents. Il s’agit donc davantage d’un élément de retenue psychologique plutôt que de barrière au sens
28
Partie 2
propre.
En définitive, chacun de ces dispositifs rend son contenu visible ou au contraire inatteignable par un système d’escamotage manuel. Pourtant leur construction et leur fonction diffère. Le fait de rendre l’espace libre d’accès ou au contraire interdit peut concerner différents types de contact de nature visible, auditive, tangible ou encore psychologique… Enfin cette réserve ou mise
Enfin, bien qu’il s’agisse pour chacun de la même
à nue implique l’idée d’un rapport regardant-regardé,
démarche, à savoir escamoter pour montrer ou cacher.
propriétaire-passant. Il s’agit donc de « se sauvegarder »
Il semble intéressant de constater que cela ne concourt
(je suis) ou de « sauvegarder ce qui m’appartient » (j’ai).
absolument pas à la même fonction car l’un permet de
Dans le cas de sauvegarder sa propre personne est-ce
gagner en surface de desserte, alors que l’autre décline
possible de parler d’une protection de « soi à soi » et
différentes postures et activités quand le dernier sépare
donc d’envisager se « protéger de soi-même » ou au
les espaces. En outre, comme le prouve le projet pivot,
contraire « se donner accès à une partie de soi-même
montrer et cacher n’implique pas toujours l’accord
» ? Comment le mobilier peut-il auto-responsabiliser ?
ou l’interdit mais tout simplement la praticité. Il en va de même pour la nature du contenu de pivot, car à la différence des deux autres, ce dernier sauvegarde des objets et non des personnes. Cependant le fait que ce meuble ose si bien dissimuler son contenu, prouve
31 - Alain Gilles, Buzziblinds, BuzziSpace, France, 2014 32 - Manuele Magini, Campeggi, Italie, 2011
Sosia,
32
32
qu’il n’exclut en rien l’idée qu’un regardé (propriétaire de l’espaces escamoté) soit confronté également à un
33
regardant…
33 - Yael Mer & Shay Alkalay ArwEdges, Pivot, Arco, 2011 31
31
Proposition de projet Fonction
.
Volumétrie
.
Matérialité
Mouvement Concrètement vis à vis de l’intention qui se dessine, le travail doit figurer comme regardé tandis que la vie privée constitue le regardant. Par ailleurs montrer les rangements de travail reste une opération éphémère et ponctuelle puisqu’elle ne se produira qu’à l’entrée ou
Montrer
Suggérer
Cacher
la sortie de l’habitat. Si ces rangements demeurent en temps normal cachés, les rangements d’ordre privé se voient quant à eux quasi continuellement exposés.
Le mouvement ne concerne donc que l’ensemble de casiers, après différentes recherches d’articulations, le système de balancier représenta le type de mouvement le plus évocateur afin de passer d’un milieu à un autre. Au regard des composants que le cahier des charges intègre, ils sont regroupés en six contenants représentatif de six abattants. Chacun de ces abattants dépend du mouvement général de l’ensemble, ce qui implique que leur rotation soit synchronisée.
30 Partie
Ce principe implique de fixer l’axe de ces abattants sur une semelle inclinée afin que lors de la rotation à 90° des différents éléments, aucun d’entre eux ne se percute.
Afin de renforcer l’effet de transition, il importe d’assurer un mouvement fluide et progressif. La légèreté du mouvement doit porter l’usager dans un état d’esprit de quiétude, de libération. Cela concourt également à la longévité du meuble.
Proposition de projet Fonction
.
Volumétrie
.
Matérialité
Aménagement L’aménagement
de
ces
abattants
dépend
des
sollicitations, aussi il importe de les alléger autant que possible afin d’éviter l’effet de ballant lors de la manipulation. Il importe également de rendre ces rangements structurels pour l’abattant afin que ce dernier ne fléchisse pas sous
la charge qui lui est
imposée. Toujours afin de dissocier le privé du professionnel, les casiers destinés à recevoir des effets privé se construisent différemment des casiers de travail :
- Concernant l’espace professionnel, la composition et le dimensionnement
des trois casiers dépendent
exclusivement de leur contenu. En effet, le plus grand accueille un attaché case et l’ordinateur, le moyen comprend la tablette ou des documents A4, enfin le dernier casier reçoit le téléphone portable, un bloc-notes, le portefeuille et les clés de services. l’aménagement doit également passer les câbles d’alimentation électrique, le plus discrètement possible.
L’ensemble de ces
contraintes impose une ample moulure qui vient d’une part fortifier
la résistance de l’abattant et l’organe
de rotation, d’autre part elle dissimule le passage des câbles. Cette ceinture s’affine à mesure qu’elle s’éloigne
32
Partie 2
de son axe afin d’amoindrir le poids final.
- Les casiers personnels comprennent quant à eux trois ensembles, le premier contient les clés de l’habitat, le second les correspondances postales et le dernier les journaux ou magazines. Chacun d’entre eux étant peu chargé, renforcer les organes de rotation serait donc vain. Aussi l’attention première porte sur l’adhérence des objets au support afin que ces derniers ne s’échappent pas lors des manipulations.
Pour ce faire,
une peau
de la même matière que les précédentes pochettes y sera placée afin de maintenir les objets plaqués au support. Cependant les clés nécessitent un traitement différent car le précédent principe ne permet pas de les accrocher efficacement. Il s’agit donc de les suspendre à des accroches surmontées d’une collerette qui évite qu’elles ne s’échappent.
Dans cette moulure, une pochette en matière molle et adhérente prend place afin d’accueillir et de protéger les outils électroniques. Cette pochette permet également de retenir le câble afin de faciliter le branchement. Un tissu anti-ondes peut prendre place à l’intérieur de la pochette du téléphone afin de mettre ce dernier hors de toute connexion et d’éviter ainsi qu’il ne sonne à tout moment une fois dans le domicile.
Proposition de projet Fonction
.
Structure
Volumétrie
.
Matérialité
Ci-contre, les dessins de l’évolution de la structure du projet
Le travail de mise en forme évolua de 4 pieds à 2 pieds pour au final ne pas en comporter et fixer directement l’ossature au mur. Cela en écho à l’analyse typologique (page 22) permet de faciliter amplement le passage des usagers dans les couloirs d’entrées. Cette contrainte du passage préconise également d’employer des angles arrondis qui supportent mieux les chocs. Cette prise de position permis de statuer sur l’orientation du meuble, soit horizontale de type console soit verticale ce qui se rapporte davantage au système mural. La position verticale permet de toute évidence un gain de place sur la zone de passage.
Pour insister l’effet de cloisonnement sur les effets de travail, un cadre entoure l’ensemble et lie le tout au mur. Cette image du cadre rigoureux, presque hermétique va de pair avec l’idée de se mettre des limites dans ces activités. Outre le message fort qu’il communique, le cadre permet également de consolider l’ensemble et donne le volume global à ne pas abîmer lors du passage, ainsi il évite de s’accrocher aux abattants avant. Un
34
Partie 2
évasement du profilé permet d’alléger l’impact visuel.
La semelle permet d’une part de recevoir les axes de rotation d’abattants, d’autre part d’offrir en partie arrière un tableau qui permet d’accrocher différentes notes d’organisation. Son profil en S vient mourir en partie avant dans le bas du meuble afin une fois de plus de consolider mais également de générer une réserve nécessaire dans le meuble afin d’intégrer les organes de synchronisation. L’ajustage des proportions finales dépend des formats minimum pour que les casiers accueillent leurs contenus, ainsi le meuble voit son volume déterminé selon l’espace nécessaire. Cependant l’organisation des casiers fait l’objet d’un équilibre entre la
composition la plus
harmonieuse et un usage des plus évidents.
Proposition de projet Fonction
.
Volumétrie
.
Matérialité
Les textures rugueuses
D’une part, d’un point de vue purement visuel, le micro
Pour l’ensemble des matériaux manufacturés, l’homme a
relief que présente chacune des matières confère un
bien souvent tenté de les rendre lisses au point de réfléchir
aspect mat au volume, ce qui permet à la lumière de
la lumière ou de révéler une transparence. L’obtention du
dessiner des ombres douces, et subtilement dégradées.
poli, du miroitant, tournait à une obsession et trouva son
La finesse et l’homogénéité du relief génère un état de
âge d’or aux environs du XVIIIe siècle. Depuis quelque
surface délicat dans laquelle les projections lumineuses
années pourtant, alors que les nouvelles technologies
se résorbent. Ce mat quasi-laiteux, floute quelque peu
permettent d’obtenir ces textures lisses plus aisément, il
l’objet et lui confère une expression moins agressive.
semble que de plus en plus de surfaces d’objets tendent
Parallèlement, l’ensemble de ces sujets ne comporte
à affirmer un grain peau d’orange ou toucher velours.
pas de vernis ou d’autre revêtement particulier. Ainsi
Pourquoi un tel retour au dépoli et par extension au
la surface émane du matériau de support et la texture
rugueux ? En quoi le toucher d’une matière rugueuse
authentifie alors la nature de sa matière. Il y a, dans
se révèle-t-il intéressant? Trois exemples de ce type de
cette absence de peau, un rapport fort et direct avec la
toucher se voient comparés au travers d’objets actuels.
matérialité de l’objet.
Le cuir suédé des chaussures desert boots commercialisé par la marque Opening, Le bois de chêne poncé de
D’autre part, puisque ces matières se mettent à nue, elles
l’écureuil Urtintxa dessiné par Jean-Louis Iratzoki
dégagent également un bon nombre caractéristiques.
et édité par ALKI. Enfin l’aluminium microbillé de la
Ainsi l’orientation des fibres du bois dessine des
gamme d’ordinateur Mac déposé par APPLE.
marbrures qui ne peuvent se confondre avec le maillage fin de l’épiderme du cuir. Outre cet aspect graphique l’observateur peut venir à toucher ces matières et sentir de réelles distinctions. En effet l’aluminium renvoie davantage à une texture givrée, car son toucher froid et finement perlé renvoi à des gouttes de condensation. Son soyeux affirme également la compacité du matériau. Par ailleurs le bois dégage une note plus chaleureuse et sa rugosité dépend, certes, des degrés de ponçage, mais également de la densité des cernes annuels qui composent cette matière hétérogène. Les fibres ainsi poncées peuvent être rêches au toucher dans un sens et douces dans l’autre sens, ce qui confère un caractère. En revanche, le cuir suédé, se caractérise par une adhérence de son duvet produite par le hérissement de ces fibres. A son contact ce duvet révèle sa souplesse et dégage un toucher particulièrement agréable.
36
Partie 2
En conclusion, Les surfaces rugueuses dispersent et/ ou absorbent la lumière et créent par la même occasion des ombres douces et une impression de flou. Leur exposition dénuée de revêtement permet d’authentifier la matière constitutive de l’objet. Toutefois les matières n’expriment pas le rugueux de la même manière, ce qui produit des particularités que les concepteurs n’oublient pas d’utiliser pour concourir à la fonction ou à la sémantique de l’objet. Le tangible se prédispose donc à un riche potentiel d’expressivité. A l’heure où Enfin, il paraît important de ne pas isoler ces textures de
des chercheurs développent des interfaces haptiques
leurs emplois, car leur application se veut indissociable
d’illusion tactile, la texture figure-t-elle désormais parmi
de l’usage final. En effet, bien qu’il s’agisse à chaque
les obsessions de notre temps?
fois d’objet de préhension, le rugueux ne délivre pas le même message. Par exemple, l’aluminium microbillé robustesse parée à
de l’ordinateur témoigne d’une
toute épreuve. Cela indique donc une pérennité du produit. Par ailleurs, Le grain que génère le bois du presse papier, évoque la forme de écureuil. Pour cause, Il fait écho au duvet de poil du rongeur. Mais la texture dénote également la structure massive employée en conséquence, et assure donc, du poids nécessaire au bon fonctionnement de l’objet. Quant au suédé de cuir utilisé pour la paire de chaussures, il rend compte d’un confort souple et cotonneux. La délicatesse de sa texture suggère également un entretien particulier qui prédestine les chaussures à un usage citadin.
34 Chaussure de Opening Ceremony, desert boots, USA, 2012 35 - Presse papier de Jean-Louis Iratzoki, Urtintxa, ALKI, France, 2011 36 - Ordinateur de jonathan ive, Mac Mini, USA, 2006
35
34
36
Proposition de projet Fonction
.
Volumétrie
.
Matérialité
Le bleu A ce jour, en occident le bleu semble considéré comme la couleur préférée par plus de la moitié de la population. Il possède d’ailleurs une déclinaison incalculable de dénominations qui le définissent selon ses nuances et procédés d’obtention. Ainsi le bleu de Chartres se distingue du bleu azur, de l’indigo… Bien que cette couleur fût maîtrisée tardivement par les civilisations passées, son engouement n’a cessé de croître jusqu’à nos jours. Pourtant, aux yeux de nos contemporains, cette tonalité paraît neutre, discrète. M Pastoureau en fait d’ailleurs le constat : « On a même l’impression que c’est parce qu’il est symboliquement moins marqué que d’autres couleurs que le bleu fait l’unanimité. ». Il complète son raisonnement par « Il ne choque pas, ne blesse pas, ne révolte pas ». Le bleu figure donc parmi les codes visuels presque impersonnels et
suggère l’uniformité
démocratique, une forme de paix plate. Il paraît pourtant
D’une part, bien que le support de chacun de ces
rédhibitoire que de considérer cette couleur de la sorte,
référents diffèrent clairement de l’un à l’autre, il
certains exemples (que je citerai juste après) prouvent
semble intéressant de souligner que pour chacun des
des aspects controverses. En quoi le bleu exprime-t-il le
graphismes, il s’agit presque de monochrome dans
trouble, le dynamisme, le relief et la singularité ? Afin de
lesquels le bleu interagit sur un fond plutôt neutre qui
d’éclaircir ce questionnement le Nu bleu IV de MATISSE
tend au blanc. Les bleus qui rehaussent ces supports
se verra confronté à une photographie amateur de
utilisent une composition similaire les uns des autres. En
paysages des AMIS DE SAINTE VICTOIRE ainsi qu’à
effet un phénomène d’accumulation de teinte rythme à
l’assiette Oiva conçue par Sami RUOTSALAINEN.
chaque fois les différents graphismes et les partitionne ainsi
en
plans
successifs.
Cette
caractéristique
marque particulièrement le motif de l’assiette Oiva qui s’apparente au dégradé d’une aquarelle formé par la concentration plus ou moins forte de pigment bleu. Ainsi les parties très saturées ressortent au premier plan tandis que les endroits plus dilués passent au second. Un effet de profondeur se dégage donc dans la variation de l’intensité des bleus. Cette notion s’accorde aux idées de Matisse qui considérait le bleu comme la couleur du volume et de la distance. Ces intuitions furent d’ailleurs
38
Partie 2
attestées par de récentes études scientifiques.
D’autre part, l’aspect des bleus adoptés n’exprime pas les mêmes sensations. Le nu bleu IV de Matisse se révèle au travers de feuilles préalablement gouachées d’aplas de bleus puis découpées et assemblées de façon à figurer le nu. Les contours francs que forment les aplats découpés rendent l’ensemble très vif. Le passage du fond blanc crème aux motifs nets et opaques s’effectue sans transition. Cette violence s’associe au camaïeu de bleus intenses qui contrastent avec la gestuelle voluptueuse du modèle. Par ailleurs, le bleu que procure la brume de la photographie ne résonne pas de la même manière. Tout d’abord parce qu’il parait plus éteint, tel un bleu horizon, mais également par ce que la tonalité bleutée émane de la brume qui se mêle au bleu de la nuit. Il s’agit donc d’un bleu suggéré par l’objet modulateur (la brume) et non le support (les montagnes), ce qui confère une apparence diffuse, insaisissable ; qui disparaît à mesure que le voile
Enfin, le bleu joue un rôle particulier pour chacun de
de l’aurore s’épaissit. La lumière naturelle accorde donc
ces documents. Cependant chacune de ces fonctions,
des tonalités de bleus rares car éphémères. Concernant
que remplit le bleu, semble transversale et s’articule de
l’assiette, la substance bleue ressemble, comme précisé
manière plus ou moins déterminante pour l’ensemble des
plus haut, à un lavis de pigments. Le volume nuageux
sujets. En ce qui concerne le tableau de Matisse, le rôle
qui s’en dégage laisse transparaitre à certains endroits
premier du bleu réside dans les aplats qu’il constitue,
le blanc pur de la céramique émaillée. Il s’agit d’un
afin de dessiner et composer le motif en suggérant des
bleu intense et miscible, léger et fluide qui dans son
pleins, des ombres. Le bleu dans sa vivacité donne alors
application induit le mouvement d’un précipice. Il donne
vie au modèle. Parallèlement, au travers du paysage
l’illusion d’un colorant en suspension dans un liquide que
montagneux le bleu assure davantage un rôle de guide
contient l’assiette.
qui rythme les distances et transporte l’œil. Y Klein disait à ce sujet « pour moi les couleurs sont des êtres vivants
37 - Photographie amateur des Amis de Sainte Victoire, 10h06, 2002.
37 38
38 - Collage de Henri MATISSE, Nu bleu IV, Musée Matisse, Nice, 1952. 39 Porcelaine de Sami Ruotsalainen, Oiva, Editée chez marimekko, Finlande, 2013 J - Yves Klein, 38 ème Salon des Antiquaires et de l’Art Contemporain, Bordeau, 1955
(…), les véritables habitants de l’espace. La ligne elle, ne fait que le parcourir, que voyager au travers. »J En outre, Le bleu a pour l’assiette Oiva un but d’interpellation, il tend à rehausser le produit, à attiser l’œil avant de l’immerger dans la profondeur de ces turbulences.
39
Proposition de projet Fonction
.
Volumétrie
.
Matérialité
Bois La matière bois constitue le cadre et les moulures, comme indiqué précédemment, ces parties structurent leur ensemble, elles doivent donc supporter des charges ou résister aux chocs. Le sens du fil du bois devient donc déterminant dans la construction de ces éléments, ainsi pour les moulures les fibres doivent s’orienter vers l’axe de l’abattant. Par ailleurs, la direction des fibres du cadre provient du mur afin d’une part de faciliter la construction et d’autre part pour que le bois de bout qui demeure la partie la plus efficace pour supporter les chocs soit en premier lieu exposée.
L’intention du projet consiste à aider l’usager à se libérer
Parallèlement il ne faut pas oublier que seul le mur retient
de toute pensée superflue, l’emploi de bois massif paraît
le meuble et que la rotation d’un abattant entraîne avec
idéale. En effet l’absence de placage rend la matière
elle l’ensemble des casiers du meuble, aussi il semble
plus authentique sans ajout dérisoires, il n’y a là que
plus judicieux de ne pas employer de bois lourds, et de
l’essentiel à fleur de peau. Aussi le verni employé doit
chercher à obtenir une essence offrant des propriétés à
se rapprocher de l’aspect naturel du bois. Ce principe
la fois de résistante et de légèreté.
d’authenticité requiert que le bois de structure soit donc également celui du parement, aussi le choix de l’essence
Ces contraintes de performances orientèrent le choix
et des pièces de bois massives doivent faire l’objet d’une
du bois vers le paulownia*. J’ai eu l’occasion de découvrir
sélection tout aussi rigoureuse que celle d’un placage.
cette essence durant mon séjour au Japon. De fait, ce feuillu à croissance rapide fait depuis très longtemps partie de la culture japonaise qui le nomme kiri. Il fut importé en France au XIXe siècle. Pourtant il s’agit là d’une essence peu connue qui possède l’un des meilleurs ratios résistance/poids, en effet sa densité n’excède pas les 0.40 Kg/M 3.
40 Partie 2
Le Synderme Les pochettes et la semelle du meuble doivent comporter une matière fine, souple et quelque peu molle afin d’adhérer et de ne pas abîmer les outils électroniques. Après avoir recherché du côté des feutres, des tissus ou des cuirs, le synderme apparaît comme le plus adéquat face à cet usage. Ce matériau réemploie les pièces de cuir déclassées en les broyant en particules puis en reconstituant une matière à l’aide de caoutchouc. Les plaques obtenues préservent l’odeur du cuir, elles présentent un toucher agréable et une couleur gris-brun pailleté de beige. Ce matériau peu courant, s’emploie généralement pour des doublures de sac ou de cuir. Il peut être facilement usiné même à l’aide d’une fraise ou d’une découpe laser.
La laque bleue Les supports d’abattants deviennent un panneau laqué d’un bleu horizon. Le bleu donne l’illusion de profondeur, cette profondeur renforce l’idée de prendre des distances avec les objets de travail. Afin d’insister cette impression, les éléments comprendront différentes saturations. Effectivement le bleu foncera en fonction de la position de l’abattant, de façon à ce que plus l’élément s’éloignent de l’usager, plus sa couleur fonce. .
40 - Echantillon de Paulownia, Paris, 2014 41 - Echantillon de Synderme, Paris, 2014 42 - Composition des échantillons, Paris, 2014
trois
43 - Détail de façade OKA, Paris, 2014
40 41
43
42
Portée du projet Baguettes
.
Oku Ma En
.
Colline
Aussi surprenant que cela puisse paraître, ce meuble semble comparable aux baguettes utilisées en Asie. Effectivement cette comparaison d’apparence incongrue se base sur les écrits de Roland Barthes (en annexe page …), qui décrypte l’usage des baguettes comme un moyen de désigner, de saisir et dissocier :
Désigner Tout d’abord l’idée de désigner, autrement dit d’indiquer l’endroit où se trouvent les affaires de travail, dans le
Dissocier
domicile de l’usager. Le meuble fait office de repère dans
Le meuble figure également comme une barrière de
l’habitat, une marque volumétrique. Cela revient à donner
passage à niveau où l’usager doit avant tout déposer
une place, à accorder un emplacement bien précis pour
ses effets professionnels avant que les rangements ne se
éviter le désordre mais également pour sous-entendre
redressent et libèrent l’accès à l’habitat. L’image forte
un temps d’utilisation, celui du moment où l’utilisateur
de la mise en abîme produite par le basculement des
passe du privé au professionnel et inversement.
rangements vers le mur participe également à l’effet de rupture entre les deux cadres de vies (professionnel et privé) et rejoint l’idée d’un monde dans le monde. Une façon d’imager que tout ce qui se rapporte au travail dans l’habitat, se situe dans un meuble.
Saisir Le meuble se saisit des éléments de travail puisque, d’une certaine manière l’utilisateur y dépose ses affaires professionnelles avant qu’elles ne reposent dans le meuble. La fixation du meuble au mur et le recouvrement des abattants participe à cet effet d’immobilisation, car ils donnent l’illusion que les affaires sont emmurées.
44 - Photomontage personnel sur Roland-Barthes de Ilyanna kerr, France, 2014
44
45 - Photomontage personnel, S’arrêter , Paris, 2014
42
Partie 2
45
Absorbé par l’expérience vécue au Japon et par des lectures, je constate que les principes japonais OKU MA EN (évoqués dans la première partie de ce document) se manifestent malgré moi au travers du meuble.
Pause
Coexistence
La notion de pause évoquée par le MA Japonais, s’inscrit
Enfin, OKA intervient dans le vestibule comme le signe
donc dans le scénario d’usage du meuble. L’usager doit
d’une volonté pour l’usager de faire la part des choses
en effet prendre le temps de marquer un arrêt avant de
entre ce qui est de l’ordre du privé ou du professionnel. En
déposer ces effets. Cette halte renforce l’idée du seuil et
effet le meuble propose une dissociation forte des deux
incarne le meuble comme une véritable étape d’entrée.
contextes. Ce principe s’exprime plus particulièrement par les mouvements des abattants, une façon de tourner la page, de prendre part à autre chose. Ce passage
Profondeur
conscient d’un état d’esprit à un autre implique d’être véritable
lucide sur la situation mais de faire volontairement
microcosme du travail dans l’habitat. Ce monde dans
abstraction d’une vision globale. En d’autres termes,
le monde rejoint la notion d’OKU. Elle se matérialise par
il s’agit de focaliser son attention en se mettant des
le cadre obstrué et l’insistance des effets de profondeur
limites. En ce sens, le meuble intervient donc comme un
dans les jeux d’intercalaires, la couleur bleue ainsi que
élément qui participe au concept EN.
Parallèlement
le
meuble
ses différentes saturations.
constitue
un
Portée du projet Baguettes
.
Oku Ma En
. Colline
Lors de mon passage au Japon, j’ai eu la chance de séjourner dans une région reculée où la nature préserve en grande partie ses droits. Cette région, nommée Sonobe, se rythme de multiples collines, comme bien d’autres contrées japonaises. Ces petites montages portent le nom de OKA…
Ascension / descente Curieusement collines,
lorsqu’un
son attitude
randonneur
parcourt
ces
46 - Photographie personnelle, Collines, Sonobé, 2013
illustre assez bien celle qui se
46
rapporte au meuble. Tout d’abord dans l’action de gravir, d’une certaine manière de forcer pour monter, ce qui revient à effectuer un travail, à être actif. Puis lorsque l’individu doit engager la descente, ce qui requiert moins d’effort et permet de souffler. L’une ne va pas sans l’autre et cette situation revient de façon récurrente, bien d’autres exemples d’activité humaine, comme la respiration entre inspiration et expiration ou encore le sommeil dans le repos et l’éveil…
Versant Cette recherche d’équilibre constitue l’essentiel du
Comme une colline, Oka possède plusieurs « versants »,
message que le meuble oka porte. La nécessité d’une
plusieurs angles de vision, deux pour être cohérent, l’un
alternance franche entre l’activité professionnelle et le
étant sa position courante ce qui revient aux rangements
repos que constitue la vie privée. Monsieur B. De la Croix
privés. L’autre « versant », représenté par la partie
disait à ce sujet « Il faut doser, c’est le travail de la vie »,
professionnelle après le déploiement des abattants.
preuve que
Comme la plupart des collines, chaque versant ne
l’équilibre d’une vie saine réside dans la
justesse de cette alternance.
se ressemble pas, l’un est exposé bien souvent à aux intempéries, à l’érosion ce qui peut le rendre rocailleux et lui donner des formes travaillées. Son opposé généralement moins sollicité, propose des lignes plus rondes et lisse et des teintes plus verdoyantes. Ainsi selon la place de l’observateur, la vision de la colline peut changer, il en va de même pour le projet Oka, puisque selon la position des abattants deux univers cohabitent.
44 Partie
Point culminant La
précédente
description
implique
que
l’usager
choisisse sur quel versant il souhaite évoluer. Or il est un endroit où le choix ne tient qu’à un pas, celui du sommet de la colline. Ce point de passage constitue également un panorama, un moment d’entre-deux où généralement l’observateur s’arrête, fait une pause et observe l’étendue.
Oka a également pour vocation d’aider, voire même de suggérer cette pause, cette prise de hauteur. Il invite l’usager prendre de conscience de sa propre condition et aux choix du versant à emprunter.
Pierre-Alexandre CESBRON DMA 2014
Dossier de Synthèse
Partie 3 Essais techniques . Documents d’organisation . Aperçu de réalisation
Fabrication
Essais Techniques Synderme Tests Synderme Comme précisé en partie deux, le cuir reconstitué dit synderme constitue le matériau idéal pour les pochettes et le revêtement de la semelle du meuble. Cependant son usage dans le mobilier demeure très rare, aussi a-t-il été nécessaire de procéder à certain nombre de tests pour valider sa viabilité au sein du projet :
. Traitements . Mécanique
Tout d’abord son comportement aux différents usinages, car si le fournisseur affirme que le matériau se découpe et se pare au massicot et autres cisailles il est préférable pour le projet de couper à la commande laser ou par des outils de fraisage (défonceuse). Les tests sont concluants pour ces deux types d’outils : bien que la découpe laser implique plusieurs passes la découpe reste nette. La différence de teinte entre le plat et le chant est prononcée mais moins choquante que celle d’une pièce de bois. Concernant l’usinage par fraisage, le matériau présente un bon comportement hormis le fait que cet usinage génère des boursouflures qui peuvent cependant se reprendre par ponçage. Parallèlement la mise en forme par cintrage et moulage importe également. Les tests me démontrèrent qu’audessus de 2 mm le matériau implique d’être chauffé pour un rayon de cintrage inférieur à 1cm, sans quoi la surface extérieure se déchire.
Enfin, concernant le type de colle à employer, plusieurs essais montrent que la polyuréthane et la colle blanche ne présentent pas un excellent résultat, en revanche la colle poisson utilisée couramment par les gainiers s’avère très efficace.
48 Partie 3
Tests de traitement A la différence du synderme qui ne nécessite pas de vernis, les parties en bois et les panneaux d’abattant doivent être protégés et stabilisés par des traitements particuliers.
47 - Photographie personnelle, Tests sur Synderme, Paris, 2014 48 - Photographie personnelle, Comparaison Paulownia verni (à droite) et non verni, Paris , 2014 49 - Photographie personnelle, Détail de laque microbillée, Paris, 2014
47 47
48
49
Après avoir essayé des vernis polyuréthanne extra mat
Concernant la laque, la contrainte principale fut d’éviter
qui rendaient tout de même le toucher « plastique », j’ai
qu’elle ne s’écaille avec la légère flexion des panneaux
tenté d’employer des enduits de bouche pore et des
et qu’elle supporte bien l’abrasion au frottement.
traitements de bois vermoulu. Au final le rendu idéal
discutant avec un fabricant de laque, j’oriente mon
fut un stabilisateur Polyuréthane en phase aqueuse qui
choix vers une laque polyuréthane en phase aqueuse
pénètre dans les pores du bois puis en se catalysant rend
qui permet d’absorber la flexion et renforcer par une
la couche extérieure du bois imperméable et résistante
adjonction de microbilles de verre afin d’obtenir des
tout en préservant l’aspect bois visuellement. De plus,
performances de résistance à l’abrasion. De fait l’état de
ce traitement permet d’obtenir un toucher proche de
surface devient par ces microbilles, subtilement rugueux
celui de la matière de base ce qui il évite par la même
ce qui concorde avec ma démarche de projet (cf. p34).
occasion les poinçonnements.
En
Essais Techniques Synderme
. Traitements . Mécanique
Mise au point mécanique L’idée initiale pour le projet était de décliner deux types d’abattants, les trois premiers casiers s’inclinant indépendamment du reste tandis que le mouvement des trois derniers (à l’intérieur du meuble) serait synchronisé à l’ensemble. Un principe de transmission par un câble souple aurait permis ce système mais il aurait compliqué l’objet tout en outrepassant les échéances de fabrication. Ainsi le même mouvement se synchronise à l’ensemble des abattants. Cette articulation implique toutefois des contraintes afin d’améliorer le confort et la pérennité de l’objet : une course souple assistée par un système d’amorti et de freinage. En analysant ce mouvement, trois étapes du processus sont à traiter : l’articulation axiale de chaque abattant, la synchronisation du réseau et l’assistance à la manipulation de l’ensemble.
Après avoir tenté de rassembler ces contraintes en un seul dispositif, notamment par le développement d’un ressort épingle ou de charnières en polypropylène, les professeurs d’atelier me conseillèrent de dissocier ces trois étapes
par trois composants afin d’assurer la
précision et la viabilité du système. Aussi, un système de pivot à loquet permet de cacher les axes de rotation et de rendre les abattants démontables. Cet organe de rotation s’insère dans la semelle, ce faisant l’axe de rotation se déporte dans l’épaisseur de la semelle et implique un fraisage afin d’assurer le débattement des abattants.
50 Partie 3
Pour rationnaliser la production, ce même principe de pivot permet également de lier les abattants au système de synchronisation.
Ce dispositif placé à l’arrière du
meuble doit également pouvoir se démonter pour l’intervention de maintenance à venir, aussi une fois de plus pour faciliter la production et le montage, je pris le parti d’assembler des bielles en une seule pièce constituée sur le même principe que la semelle.
Cette bielle peut venir buter contre l’arrière de la semelle et ainsi renforcer l’arrêt en fin de course du mouvement. L’amortissement de l’ensemble peut donc être assuré en insérant sur cette zone de contact une mousse d’amortissement. Enfin, afin d’assister la manipulation du système rotatif et de le rendre plus souple à l’usage, un organe de tension permanente (pouvant s’apparenter à un ressort ou un piston) s’applique à la semelle et à la bielle.
50 - Photographies personnelles, Détail de pivot à loquet, Paris, 2014 51 - Photographies personnelles, Essais de systèmes de rotation, Paris, 2014 52 - Croquis personnels, Description des trois dispositifs à appliquer, Paris, 2014
52
51
50
50
Documents d’Exécution Descriptif
Casiers
.
Détails
.
Planification
Cadre
Support
Dessus A4 Côtés A3 Arrière B3 Semelle B2 Abattants C1.C2.C3. D1.D2.D3 Emboîtures D4.D5.D6
Axes C4.D7 Bielle D9 Dessous A5
Façade B4
52
Partie 3
Crosses A1.A2
684 1040
200
Documents d’Exécution Descriptif
ORGANIGRAMME
Total
.
224,5
Détails
Plus présentoir-caisse 28h
Totaux
252,5
2,5
CADRE
4
3
2
4
2
1 2 3 4 5
2 2 2 1 1
Crosses Hautes Crosses Basses Côtés Dessus Dessous
Débiter Débiter Débiter Débiter Débiter
Corroyer Corroyer Corroyer Corroyer Corroyer
Tronçon Tronçon Tronçon Tronçon Tronçon
Coller Coller Coller Coller Coller
Mise au For Mise au For Mise au For Mise au For Mise au For
6 7 8 9 10 11
4 6 4 4 35 3
Clées Lamellos Ceinture Equerres de ceinture Vis Fixations
Débiter
Corroyer
SUPPORT
2
A
.
Planification
1
2
1
6 Tourner Tourner
Rainurer Rainurer Rainurer
Coller Coller Coller
Pentes Pentes Pentes
Ass Blanc
4
2,5
Fixer
Ass Blanc
6
Mise a Mise a
Usiner Total support
B 1 2 3 4
12 1 1 1
16
2
0,5
1
4 5 6
1 1 1
Emboiture Avant Emboiture Intermédiaire Emboiture Arrière
8
36,5
Usiner Multiplis
Mise au For Mise au For Mise au For
CN Chantourn Chantourn
feuillurer
Lamello Lamello Lamello
1
1
0,5
1
2
6
Débiter Débiter Débiter
Corroyer Corroyer Corroyer
Tronçon Tronçon Tronçon
Coller Coller Coller
Mise au For Mise au For Mise au For
CN CN CN
2
2
1
1
6
4
12
Assembler Assembler Assembler
Moulurer Moulurer Moulurer
Fixer Fixer Fixer
Ponç Ponç Ponç
Moulurer Moulurer Moulurer
Fixer Fixer Fixer
Ponç Ponç Ponç
INTERCALAIRES / CASIERS
C/D
D D D
Charnière a clips Semelle Arrière Facade de tirette
0,5
Usiner
Total emboitures 11,5
Total casier /intercalaires avant Ass Blanc
D D D
1 2 3
1 1 1
Avant Intermédiaire Arrière
Multiplis Multiplis Multiplis
profillage profillage profillage
Coller Coller Coller
Mise au For Mise au For Mise au For
CN CN CN
C C C
1 2 3
1 1 1
Avant Intermédiaire Arrière
Multiplis Multiplis Multiplis
profillage profillage profillage
Coller Coller Coller
Mise au For Mise au For Mise au For
CN CN CN
14
2
3
4 5 6 4 7 8 9 10 11
1 1 1 12 12 3 3 3 3
Langette Avant Langette intermédiaire Langette arrière Axes Axes Bares Bielles Ancrage de fixation ressort Ressorts Taction
3,5 Mise au For Mise au For Mise au For Mise au For Mise au For Mise au For Mise au For Mise au For
1
D D D C D D D D D
Découpe Découpe Découpe Découpe
Cintrage Cintrage Cintrage
Collage Collage Collage
Perçage
Synderme B D D D
5 12 13 14
1 1 1 1
Revêtement Pochette Avant Pochette intermédiaire Pochette arrière
54
Partie 3
Total fournitures 23,5
28
3
1
6
au For au For
10
1
2
6
Lamello Lamello Lamello Lamello Lamello
Coller
Rab/ajuste
1
Mise au For Mise au For
2
Percer Percer
3
1
2
3
1
0,5
Ass Blanc
Finition
Vernis
Ass Déf
Protection
12
10
4
Total ensemble 26
Ass Déf
Collage
Fixer
Total Cadre 56
Soudure
Total casier /intercalaires après Ass Blanc 12
2
2
8
6
çage çage çage
Vernis Vernis Vernis
Calfeutrer Calfeutrer Calfeutrer
Aprèter Aprèter Aprèter
Surfacer Surfacer Surfacer
Laquer Laquer Laquer
çage çage çage
Vernis Vernis Vernis
Calfeutrer Calfeutrer Calfeutrer
Aprèter Aprèter Aprèter
Surfacer Surfacer Surfacer
Laquer Laquer Laquer
43
Pour que l’estimation du temps de réalisation soit la plus précise possible, j’établis un organigramme des différentes opérations à effectuer sur le meuble OKA. Le sous-calcul des étapes fractionne la fabrication en sept temps, ce qui permet de fixer des objectifs phares, de regrouper les opérations et de vérifier la coordination des assemblages.
Aperçu de Réalisation Semelle
.
La semelle inférieure supporte l’ensemble des abattants et le mécanisme, elle requiert donc un support résistant composé d’un ensemble de lattes en contreplaqué bouleau assemblées par rainures et fausses languettes. La précision à la découpe ainsi qu’à l’assemblage doit équivaloir celle de la commande numérique. Ainis pour assurer la réussite du collage des lattes, il fallut procéder à un assemblage à blanc, au repérage des chaque positionnement, puis au collage en prenant soin d’encoller et de presser chaque latte une à une.
56
Partie 3
Casiers
.
Cadre
Une fois les différents éléments usinés, il ne reste plus qu’à les coller les uns aux autres en prenant soin d’intégrer par la même occasion les axes à loquet fabriqués auparavant en atelier de bijouterie.
Un autre processus s’applique au recouvrement de la semelle et aux deux panneaux qui composent la bielle. Le format et les occlusions de ces panneaux de MDF sont coupés à la commande laser puis profilés à la défonceuse portative, selon les références faites au laser. Ces références qui constituent également des plats
des appuis génèrent
sur les chants. Cependant, ils
disparaissent après un passage en ponceuse calibreuse, car l’épaisseur finale des panneaux implique de reprendre de 4 mm l’épaisseur initiale.
Aperçu de Réalisation Semelle
.
Concernant les casiers, trois types d’élément doivent être réalisés : les abattants, les parties en bois et les pochettes en synderme. Un multiplis de colle uréeformol et de placage de bois de samba constitue les panneaux d’abattants. Après les avoir défoncés à l’aide de gabarits, Ils sont percés sur les chants afin de placer les axes de rotation puis d’insérer des douilles métalliques pour limiter l’usure. Enfin j’ai appliqué au pistolet un après, puis suite à un égrainage méticuleux, une laque microbillée satinée.
58
Partie 3
Casiers
.
Cadre
Les aménagements en bois servent, entre autres, à rigidifier l’abattant, il fallait donc faire attention au sens du fil du bois. Après avoir collé des blocs de bois pour obtenir la masse capable, je procède à l’usinage par trois opérations, le toupillage des pentes, le rabotage de l’affinement, la défonce à la commande numérique des périphéries intérieures et des pattes de soutien.
Concernant les pochettes en synderme, un simple plan en développé de la forme souhaitée permit une découpe précise à la commande laser. Il ne restait plus qu’à les mettre en forme par un pliage et de la figer grâce au collage des points de contact à la colle de poisson.
Aperçu de Réalisation Semelle
.
Casiers
.
Cadre
Le cadre d’OKA se compose de neuf parties. Quatre côtés, quatre coudes et une structure métallique. Les côtés rainurés à l’aide une scie circulaire reçoivent une bande de stabilisation qui permet également de les rigidifier.
Concernant les coudes, j’ai fabriqué à l’aide de cerces des tubes en 12 parties faisant appel à un tourneur pour évider la matière excédante et créer des surfaces de référence. Il ne reste plus qu’alors à scier des quarts de tube et les fixer aux côtés à l’aide de tourillons.
60 Partie 3
Par la suite, je dois relever précisément les dimensions intérieures de la partie bois afin de souder un cadre composé de cornières métalliques. Ce dernier, repercé et fraisé est vissé afin assurer l’équerrage et la résistance du cadre tout en retenant l’arrière de la semelle.
Je dois beaucoup à ces deux années de DMA car elles furent pour moi l’occasion de m’initier aux Arts Appliqués,
notamment
par
la
découverte
d’une
méthode dans la démarche de projet mais également par l’ouverture cultuelle et la prise de conscience des différents facteurs d’un processus créatif. Je remercie donc plus particulièrement Mme Martin, Mme Noirot, l’intervenant de workshop M. Azambourg ainsi que mon maître de Stage M.Phelouzat pour leurs précieux enseignements. En outre, mon passage dans l’école Boulle, fut pur moi l’objet d’une meilleure compréhension de mon activité et plus généralement des métiers d’art. L’ouverture que je tiens d’elle reste sans précédent, je tiens donc à remercier le corps enseignant pour la qualité de son enseignement, le corps administratif pour l’intérêt et le soutien qu’il porte à notre égard, je remercie également l’ensemble des étudiants avec qui j’ai eu la chance de vivre durant ces études. S’il fallait qualifier cette école en un seul mot j’emploierai celui de diversité, pour la richesse des valeurs et actions qui y sont menées. Mon échange au Japon illustre bien cette idée, je me sens à jamais redevable pour les personnes qui me permirent de vivre cette expérience (je pense notamment à la fondation Bettencourt Schueller, M.Hespel , M.Shinatni, Mme Cot Bédigis, M. Bailly, ainsi que mes professeurs) et pour l’accueil qui nous fut fait sur place à l’université TASK.
Enfin le projet OKA, que je soutiens pour ce diplôme, marque une étape importante dans mon cursus. Il est pour moi la marque d’une capacité à accomplir un travail efficient pour un projet. Je remercie donc les différents professeurs qui m’accompagnèrent tout au long de ce processus, plus particulièrement les
professeurs
d’atelier M.Gaudineau, M.Vastel, M.Boirat, M. Chouar, M. Menmard, M. Leprizé. La conception à leurs côtés m’enseigna l’importance de la prise de décisions et me permis de mieux comprendre ma façon d’entreprendre et de gérer les différentes étapes de recherche et de développement d’un projet. Parallèlement la fabrication fut l’occasion de m’organiser fasse à un temps réduit et de me confronter à des situations uniques. Je remercie d’ailleurs les professeurs d’ateliers de l’école en bijouterie avec Mme Valzan, de gravure ornementale M Robert, de maquette M. Queffelou et au tourneur d’art M. Charrier. Je ne peux, bien sûr, omettre le reste des professeurs sans qui la démarche du projet n’aurait été aussi aboutie : Mme Banville pour le français, Mme Gondard en Gestion, M. Rouge en sciences, Mme Garg et Briat en Anglais et Mme Mach en modelage. Ce fut donc une expérience enrichissante, pleine de découvertes et de souvenirs, une année où sous le signe de la limite, j’ai pu m’accomplir à la mesure de mon investissement.
Pierre-Alexandre CESBRON DMA 2014
Dossier de Synthèse
Partie 4 Référencement
.
Notices
.
Réflexions
Annexes
Référencement Bibliographie . Sitographie . Documents Livres
Articles
Walter BENJAMIN,
Carmen LECCARDI,
Le livre des passages, Cerf, Paris, 1989
«Accélération du temps, crise du futur, crise de la politique», temporalites.revues.org, juillet 2011
George PEREC, Espèces d’espaces, Galilée, 1974
Sophy CAULIER, «Le travail, au bureau comme à la maison», Le Monde ,
Edward GLAESER,
Septembre 2013
Des villes et des hommes, Flammarion, USA, 2011 Margaux RAMBERT, Roland BARTHES,
«Burn-out
L’empire des signes, Editions du seuil, Paris, 2005
psychologies.com, Juin 2011
:
prévenir
l’épuisement
professionnel»,
Jun’ichirō TANIZAKI,
Olivier MARCHAND,
Éloge de l’ombre, Verdier, Paris, 1978
«50 ans de mutations de l’emploi,» insee.fr, septembre 2010
Christophe NOYER, L’utilisation de concepts traditionnels dans l’architecture
Françoise DASTUR, Maurizio FERRARIS,Cynthia FLEURY
Japonaise contemporaine, Toulouse, 2004
«Cet objet vous veut-il du bien ?» , Philosophie magazine N °73, France,2013
Augustin BERQUE, Vivre l’espace au Japon, P. U. F., Paris, 1982
Gérard LAIZE, Frédéric LOEB, «Les courants de l’évolution du cadre de vie et leur mode
Serge Salat, Françoise Labbé,
d’emploi», DOMOVISION, Paris, 2009-2014
Créateurs du Japon, Hermann, Paris, 1986 AvaI ESCHWECE, Tadao Ando,
«Mobilité, quand tu nous tiens», Marketing N°132,
Monographie, Electra Moniteur, Paris, 1985
01/06/2009 Clotilde Briard, Vivez en mode slow life, Les Echos, 29/11/2013 Sylvain Menétrey, Aurélie Toninato, Slow life vers de beaux lents demains, clés, 28/07/2013 Christophe RIOUX,
66 Partie 3
Du
slow
Made
à
la
Economiques, 01/09/2013
Slow
Economy,
Problèmes
Conférences Franck SALAMA, 17 septembre 2012, Ecole Boulle Ludovic Avenel et Pascal Leclerc, Slow Made, 2013, Puy en Velay François AZAMBOURG, Septembre 2013, Ecole Boulle Patrick JOIN, L’académie des savoir-faire, Paris, 2013/14
Référencement Bibliographie . Sitographie . Documents Témoin
Sondage
Ci-dessous,
le
témoignage
d’une
des
personnes
interrogées pour la mise au point du scénario d’usage et du cahier des charges:
A droite, le sondage qui me permit de mieux cibler mes utilisateurs potentiels.: Quel âge avez-vous ?
Où v
20-30 ans
7
70 %
Métro
30-40 ans
2
20 %
Périph
40-50 ans
0
0%
50-60 ans
1
10 %
60-70 ans
0
0%
L’entrée de son Appartement
M. Philippe MERVEILLE
Activité Professionnelle :
zone
Avez char
Ingénieur chez PSA, chef d’équipe Situation familiale : Marié, un enfant à charge
Quel poste professionnel occupezvous ?
Domicile : Région Parisienne / Meudon « Je n’ai pas réellement de bureau, mais pour le moment
oui
je n’en ai pas vraiment besoin, je travaille rarement chez moi, il arrive parfois que je ramène un magazine spécialisé ou un dossier pour l’étudier au calme durant le WE. Le soir durant la semaine il arrive également que j’envoie un e-mail à mes collaborateurs. Professionnellement je n’ai qu’un téléphone de fonction en plus de mon téléphone personnel je les ramène tous les deux simplement
non Cadre
3
Employé à responsabilité
0
30 % 0%
Travailleur indépendant
1
10 %
Chef d’entreprise
2
20 %
Autre
4
40 %
Sur temp prof prop
parce qu’il arrive que je parte en déplacement dès le
1
matin. Pour le moment le poids des responsabilités est
2
supportable mais à l’avenir si je venais à en prendre de nouvelles (cadre supérieur) ce ne serai sûrement pas pareil, d’autant plus que je souhaite voir grandir mes enfants … »
68 Partie 3
3
Où travaillez -vous?
4 5
Dans un bureau d'entreprise
7
58 %
6
En déplacement
1
8%
7
Chez moi
4
33 %
8 9 10
Votre vie professionnelle vous semble-t-elle compatible avec votre vie privée ?
Où vivez vous ?
Métropole
6
Indispensable
1
11 %
60 %
Seulement à certains moments
6
67 %
Il faut oublier
2
22 %
Périphérie urbaine
1
10 %
zone rurale
3
30 %
Avez-vous un ou des enfants à charge ?
-
C’est difficile de tout concilier
1
10 %
Je m’en sors
6
60 %
C’est parfait
3
30 %
Arrive-t-il que vous travaillez chez vous ?
Quels effets professionnels ramenez-vous dans votre domicile ? Porte document
5
23 %
Smartphone
1
5%
Tablette
1
5%
Ordinateur portable
5
23 %
Dossiers
4
18 %
Journaux / Magazine pro
3
14 %
oui
3
30 %
Clés pro
2
9%
non
7
70 %
Autre
1
5%
Sur une semaine, combien de temps allouez-vous à votre vie professionnelle? ( veuillez noter la proportion sur l'échelle de 1 à 10) 1
0
0%
2
0
0%
3
0
0%
4
0
0%
5
0
0%
6
2
22 %
7
2
22 %
8
5
56 %
9
0
0%
10
0
0%
Jamais
2
20 %
Rarement
3
30 %
Régulièrement
5
50 %
Sur quel type de pièce donne la porte d'entrée de votre habitation?
Si oui, plutôt à quel moment? Le soir en semaine
9
Le matin en semaine
1
64 % 7%
Le week-end
4
29 %
Est-ce important selon vous, de penser à votre activité professionnelle dans votre habitation ?
Un vestibule en longueur (couloir)
2
20 %
Un vestibule plutôt ample
1
10 %
Le Salon
4
40 %
Autre
3
30 %
N o t i c e s Biographie . Courants . Fiche Technique Georges Perec
Roland Barthes
Né à Paris de parents juifs polonais décédés durant la
Critique littéraire et sémiologue français né en 1915 à
Seconde Guerre mondiale, Georges Pérec suivit des
Cherbourg. Il fut l’un des principaux animateurs du
études de lettres où il rencontre Marcel Bénabou. Plus tard
structuralisme et de la sémiotique en France. Très tôt
devient documentaliste au CNRS et publie ses premiers
orphelin de père, il passe son enfance à Bayonne, puis
articles dans Partisans. Son premier roman publié en
à Paris, où il étudie et obtient une licence de lettres à
1956 Les Choses, sera couronné par le prix Renaudot. En
la Sorbonne. . Il en arrive alors à s’interroger sur le
1966, il publie un bref récit truffé d’inventions verbales,
rôle et les signes de l’écriture littéraire au sein de la
Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ?, et
société (le Degré zéro de l’écriture, 1953). Alliant la
entre l’année suivante à l’Oulipo (OUvroir de Littérature
psychanalyse à la linguistique et au structuralisme, il
Potentielle), dont il devient l’une des figures majeures.
publie encore de nombreux essais, donnant naissance
Il expérimente toutes sortes de contraintes formelles :
à une nouvelle forme de critique (Mythologie, 1957 Sa
La Disparition (1969) est un roman écrit sans la lettre e
vie sera extrêmement intense rythmée de voyages,
(lipogramme) ; Les Revenentes (1972), où la seule voyelle
d’écrit,
admise est le e. Son roman le plus ambitieux, La Vie
mais aussi de maladies. Il travaillera notamment pour
mode d’emploi (prix Médicis 1978), est construit comme
le ministère des Affaires étrangères, le CNRS, la revue
une succession d’histoires combinées à la manière des
Critique, comme directeur de l’École pratique des
pièces d’un puzzle, et multiplie les contraintes narratives
hautes études ou comme intervenant à l’université de
et sémantiques. L’œuvre de Perec s’articule, semble-
Genève, il figuera même comme acteur dans un film de
t-il, autour de trois champs différents
: le quotidien,
André Téchiné (Les Soeurs Brontë) ! En 1970 à l’issue
l’autobiographie, le goût des histoires. Le jeu est toujours
d’un voyage au Japon, Roland Barthes entra dans une
présent, tout comme la quête identitaire, et l’angoisse de
période intense d’écrit dont découle entre autre l’empire
la disparition.
des signes(1971). Il est dit que Roland Barthes « récuse la
de
dessins,de
recherches,
d’enseignement,
tentation de“scientificité” pour exalter la jouissance que le texte fait éprouver au lecteur, l’effet de “co-existence” qui en résulte et la “saveur” humaine, plus précieuse que le “savoir” même.
70 Partie 3
Slow Life
Synderme
Le terme Slow Food émergea en 1986 par le journaliste
Ce type de cuirs recyclés s’utilise principalement pour
gastronomique italien Carlo Petrini, le principe était
des renforts de maroquinerie.
alors de s’opposer à l’émergence des restaurants
Il se compose de
rapides. Depuis cette philosophie, en opposition avec
déchets de cuir broyés provenant de l’industrie de la
l’accélération de nos modes de vie, se déclina sur
chaussure, de 10 % à 20 % d’origine végétale : latex ou
différents centre d’intérêt, comme le Slow management,
caoutchouc (produit naturel venant de l’arbre Hévéa)
la Slow Economy , le Slow travel, certains parle même
et de 10 % de résine synthétique, liant, assouplissant,
d’une vision global : le Slow Life.
pigments. Ces déchets sont broyés puis malaxés avec
70 % à 80 % d’origine animale :
le latex, les liants et les pigments. Il se conditionne en Le propos du Slow n’est pas de ralentir par principe,
plaque ou en rouleau de 0.4 à 2 mm et peut se refendre,
mais de goûter plus pleinement que certains nomment
se parer, se clouer, se poncer, se coller. La couleur initiale
« la saveur des jours ». Il s’agit de lutter contre le court-
du matériau est beige mais il peut se teinter, par ailleurs
terme et la consommation frénétique pour acheter
le fabricant peut obtenir différents aspect lisse, grainé,
mieux, prendre le temps de faire bien, de « vivre en
nubuck, brut, vieux cuir ou éventuellement l’enduire.
conscience ». C’est donc une façon de se réapproprier le droit de choisir son rythme de vie et d’investir sur des valeurs durables. Certains parlent du Slow comme d’un
Paulownia Tomentosa
art de vivre du quotidien, Jolanta Bak observe à ce sujet « Les gens se situent dans la qualité du moment qu’ils
Il s’agit d’un un arbre originaire du nord de la Chine et de
vivent, du temps passé ensemble, du lieu qu’ils habitent
la Corée. On le trouve aussi au Japon.
».Le ralentissement des modes de vie ne constitue
Il a été introduit en Europe, via le Japon, en 1834. Le nom
donc qu’un moyen pour parvenir à une vie équilibrer.
actuel de cette plante provient d’un rapprochement
L’intention profonde véhiculée par le mouvement Slow
fait en 1835 par Philipp von Siebold entre la noblesse
s’apparente donc à une recherche de justesse, de
et la beauté de cet arbre et celles de la princesse Anna
pérennité, de vie maîtrisée.
Paulowna, mais aussi au fait que le Paulownia était « fort en honneur au Japon » d’après ce botaniste. En effet, Au Japon, depuis l’époque de l’empereur Go-Daigo qui a régné de 1318 à 1339, les feuilles de Paulownia constituent un des emblèmes destinées à honorer des personnages méritants. Le symbole de cette arbre (ci- à côté) orne par exemple le Le sceau du gouvernement du Japon.
R éfl e x i ons Rencontres . Questions de limite . Ébénisterie Dialogue Lors de mes recherches durant cette période estivale,
Parallèlement il me fit partager son goût pour contourner
j’ai eu la chance de rencontrer
différents intervenant
les limites en utilisant l’outil autrement que pour son
sssensibles aux questionnements que suggère la limite.
usage initial. D’une certaine manière la limite devient
Toutes ces rencontres ont considérablement orienté ma
l’outil…
démarche, je ne vous présenterai que les trois principaux Enfin, il m’a été permis durant près de deux semaines, Parmi eux, Jérôme Dayot gérant de l’atelier d’ébénisterie
de dialoguer avec un professeur de l’institut catholique
AJD à Corné dans le Maine et Loire, ainsi que ses
de Paris, très réceptif aux questions de limites. Cette
deux ouvriers. L’un issus de l’école Boulle nommé
enseignant se nomme Laurent De Villerocher, Il me
Fabien Masnada, l’autre actuellement en apprentissage
permit de mieux comprendre la manière dont je vivais
Guillaume Giraud. Leur vision de la limite se trouve
mes propres limites.
conjointement
sur les effets de la limites, celles d’ordre naturel et celles
orientés
vers
une
aspiration
au
Sa réflexion s’oriente davantage
dépassement de soi dans l’activité que l’on pratique, «
que l’homme suscite.
pour moi c’est la limite esthétique et la limite technique
allaient de la philosophie à la sociologie en passant par
Nos discussions analytiques
qui importe » précise Mr Dayot. Lors d’une conversation
la psychologie et nous dirigèrent vers la question du
avec M. Masnada je compris également qu’au travers
comportement face à la limite.
de la pratique de l’ébénisterie (mais sûrement d’autres
Je remercie l’ensemble de ces personnes, pour le temps
métiers d’art) se trouvait une véritable dimension de
et l’attention qu’elles m’ont portés, pour les échanges
contact presque charnelle avec la matière, l’objet fini.
qui ont dynamisé et élargi mes recherches.
Que le toucher constituait une place importante dans l’appréciation de l’objet. Enfin, M. Giraud me permis de
Démarche
mieux saisir la distinction entre l’industrie et l’artisanat.
Durant ce processus de recherche, je n’ai pas souhaité choisir de thématique, afin de ne pas m’induire
Ayant reçu le sujet en cours de stage, j’ai également
accidentellement sur un chemin qui ne me ressemble pas.
pu discuter du sujet avec Antoine Phelouzat designer
Aussi c’est à la lumière de ma production intellectuelle
indépendant qui pratique son activité à Paris. Ce
et expérimentale que j’ai naturellement été orienté dans
dernier contrairement à L’atelier AJD considère la limite
trois différentes thématiques : L’enveloppe, la contrainte
comme une contrainte qu’il nous faut orienter de façon
et le développement.
constructive, d’une certaine manière un cahier des
Parallèlement, j’aurai la chance, cette année de participer
charges. Au regard de l’activité que j’ai menée à ses
au partenariat qu’entretient l’école BOULLE à celle de
côtés, j’ai trouvé ces contraintes sous différentes formes,
TASK au Japon et qui s’effectuera du 15 Octobre au 17
le « less is more » Mies van der Rohe dans l’efficience
Novembre prochain. Je souhaite donc que ce mois passer
des matériaux employés et la recherche d’accessibilité
au Japon alimente et concrétise ma problématique de
au travers d’une ample diffusion et d’un prix raisonnable.
diplôme. Je ne peux, rester insensible à l’opportunité de cette expérience et souhaite préparer en amont, sur
72
Partie 3
mon projet des éléments capable de répondre de mon voyage.
L’enveloppe Le choix de cette thématique semble majoritairement
Ce qui me paraît digne d’intérêt dans le sujet de la limite,
dû à la lecture de
de Jun’ichiro
c’est la dualité de plusieurs entités, milieux états… Pour
(écrivain japonais 1886-1965), ces écrits
saisir cette limite, il semble nécessaire de comprendre
traitent du rapport qu’entretient la civilisation orientale
ce qui distingue ces éléments. Le rapport de l’ombre à la
(japonaise) face au temps, à l’espace et aux sens
lumière reste tout aussi insaisissable que celui du vide au
propres. De cette lecture je tire plusieurs conclusions, la
plein ou de l’extérieur à l’intérieur. La limite étant parfois
principale étant que le rapport à l’ombre est en extrême
indéfinissable presque insaisissable. S’agit-il de deux
orient s’apparente à ce qu’est la lumière en occident.
entités opposées (équilibre, extrême) ou de la présence
La matière possède une profondeur, une pesanteur qu’il
et donc dans une autre mesure de l’absence d’une entité
faut avant tout mettre en avant.
(potentiel, parabole) …
Tanizaki
l’éloge de l’ombre
L’ombre, la douce trace que rythme l’absence de lumière. Cette pénombre qui dessine notre existence (Peter pan),
George Perec soulève également des questionnements
cette antimatière de la lumière. Cette pesanteur qui
intéressants dans son livre espèces d’espaces, je
donne à la lumière tout son éclat et au espaces reliefs et
remarque principalement ces réflexion sur l’essentialité
leur profondeur.
et le superflu, sur la nécessité et l’absurde.
La peau cette interface du monde, qui exprime ce que
Les multiples couches de revêtements qui nous rassure,
nous sommes, ce que nous avons vécu et parfois d’où
nous sécurisent. Cette stratification successive qui rend
nous venons. Cette substance molle qui témoigne du
ce qu’elle protège totalement opaque, inaccessible. Ce
vivant, ce revêtement qui par son sens, traduit le sensible
blindage épais que l’on se construit avec le temps et
à l’affect. Cette peau qui laisse parfois transparaître notre
parfois à tord…
personnalité notre raison d’être. Ce voile qui définit notre
Enfin je me suis intéressé au phénomène de répercussion
être intime.
des énergies sous le franchissement d’une limite, la cause d’un mouvement ou de tensions trop extrême.
Conjointement, lors de la conférence
de l’architecte
La blessure, l’éclat, le mur du son, l’onde de choc. Il s’agit
Franck Salama (le 17 septembre dernier à l’école) je
à chaque fois de transpercer cette « enveloppe limite
découvrit la pertinence des travaux pour lesquels ce
», il y a dans ce moment de rapport parfois éphémère,
dernier applique une démarche basée sur la pensée
une réaction (qui peut-être directe, violente ou floue et
japonaise: l’intégrité de l’environnement extérieur dans
progressive) entre les différents états. A l’essence de
les espaces intérieurs autrement dit, la place du vide
cette réponse il y a un mouvement, un flux une tension,
dans l’objet. Du contenant à du contenu ?
une énergie volontaire ou non. L’oppression et l’individualisme de notre société tendent à nous sécuriser, nous enfermer derrière différentes peaux, jusqu’à créer l’image d’une personne qui ne nous ressemble plus. Est-il possible de susciter un véritable rapport entre le monde et ce que nous sommes afin de dissoudre peu à peu cette carapace étouffante ?
R éfl e x i ons Rencontres . Questions de limite . Ébénisterie La contrainte n’ai
Bien entendu quand il s’agit d’évoquer la contrainte,
malheureusement pas de citations, qui puisse appuyer
la référence au cahier des charges ne tarde pas. En
ma position. Si ce n’est sans doute le célèbre « less is
vérité, je considère qu’il s’agit bien là d’une contrainte
more » de Mies Van der Roh, cependant le terme de la
de maîtrise et surtout d’intention, elle devient alors le
contrainte véhicule et constitue dans ma personnalité
guide, le chemin d’essentialité qui rend la démarche
et dans mon vécu, une place particulière. Cela explique
plus efficace et souvent pertinente. Mais l’orientation
sans doute la diversité des idées que je mets en avant
de ces contraintes peu également générer un effet
ci-dessous :
contreproductif. Comment discerner, déterminer et
Concernant
le
thème
de
la
contrainte,
je
composer les contraintes afin qu’elle permette une Je commence par la limite du choix, que je considère
construction efficace qui répond réellement au attentes
comme l’un des plus belles interprétations qui puisse
initiales … Parallèlement, l’abstraction ce révèle pour moi
être faite de notre sujet. En effet, le choix, la prise de
indissociable de la contrainte, il s’agit non pas d’oublier,
décisions constitue un moment déterminant qui nous
mais de mettre de côté ou de remettre à plus tard ce qui
transporte dans une situation projeté. C’est également
ne constitue pas une nécessité pour l’activité encourue.
ce dur moment de dilemme où s’engager revient aussi
Je la nomme également focalisation ou canalisation car
à renoncer les autres possibilités. Il s’agit de trancher «
elle permet de d’orienter un maximum d’attention au
pour le moindre mal », de discerner ce qui sera le plus
sujet digne d’intérêt. Cette démarche induit un travail à
riche, le plus approprier. Se projeter dans l’avenir, fixer des
dominante mono-tâche libérer de tout superflus.
objectif ou tout simplement rêver d’un idéale. Le choix
Le concept de potentialité reste pour moi une énigme, je
fait appel à notre être dans toute sa complexité, notre
le perçois comme un contenant qu’il faut habiter dans
éducation, nos capacités, notre caractère. Il implique de
sa totalité. Il s’agit d’une démarche d’efficience ciblé
s’évaluer, de ce regarder le plus objectivement possible
ou pluridisciplinaire car elle peut concerner plusieurs
et de prendre part à des convictions. Le choix nous
niveaux qui eux même interagissent. Un terrain vierge
place dos au mur, il oblige à tourner la page à franchir
calibré que l’on peut exploiter et pour lequel nous
l’étape décisive.
tentons d’élargir la surface au risque de tomber dans le
En totale opposition au choix, je pense à la nécessité. A
vide. Ce peut également être une autonomie dont nous
ce qui reste nécessaire pour vivre et s’épanouir. Certains
devons nous contenter, une capacité en quelque sorte
besoins s’imposent comme des nécessités d’ordre vital
qui n’est en rien illimitée. Cette potentialité nous définit
d’autres de vivre mieux ou de vivre équilibré. De plus
nous détermine et seul l’expérimentation la quantifie.
au sein de ces nécessités réside une notion de rythme, de fréquence ou un repos doit suivre l’activité de
L’homme cherche depuis toujours à se dépasser, à
cette nécessité. Il s’agit là d’une justesse en perpétuel
s’affranchir de ces limites, pourtant la vie le ramène
mouvement et qui touche plusieurs niveaux.
souvent contre son gré à la réalité. Ne serait-il pas préférable d’habiter ces propres limites ?
74
Partie 3
Le développement Lors d’une conférence sur le Slow Made dirigé par des
En conséquence, je m’aperçois que l’évolution semble
praticiens tels que Ludovic Avenel ou Pascal Leclerc,
fonction de deux types de comportement, s’adapter et
j’ai le souvenir que les intervenants s’accordent à croire
adapter.
que les frontières s’effondrent entre les Arts plastiques,
S’adapter consiste à faire avec, à évoluer selon le monde,
les Arts appliqués, l’Architecture. Il s’agit-là d’un
à agir en contournant, à subir d’une certaine manière ou
décloisonnement et d’une hybridation sans précédent
plutôt à développer une discipline autour de la limite.
qui nous mène vers des horizons inconnus…
Tandis que Adapter le sujet à l’homme devient totalement
Parallèlement dans les métiers d’art, il semble que les
inverse, il s’agit de développer des outils (capable de
étudiants tentent d’élargir ou de cumuler des disciplines
modifier) afin d’ajuster le sujet limite à nos besoins,
afin d’orienter leurs profil sur une activité plus ample,
nos choix. C’est ce que beaucoup considère comme la
plus polyvalente.
grande capacité de l’homme qui lui permet d’ailleurs de prendre la 1er place en ce monde, d’être dominateur. Ce
Ce processus me pousse à croire que notre activité
rythme également, sans doute à tort ou à travers, avec le
évolue, sans doute jusqu’à perdre pied ?
sens de croissance, d’évolution, de progrès ? …
A cela s’ajoute l’arrivée du numérique et avec lui, une nouvelle ère industrielle. (Je me réfère au documentaire
Mais les historiens restent formelles, lorsqu’une espèce
diffusé par ARTE « le monde de demain vu par Stark»).
maîtrise développe ses outils, son mode de vie jusqu’à
Nous sommes à l’aube d’une révolution dont nous ne
un degré de confort, elle peut en arriver à toucher un
saisissons ni les tenants, ni les aboutissants…
seuil, celui de l’apogée au quel suivra une décroissance
Afin de mieux saisir l’étendue de ces bouleversements
en chute libre. Adapter le monde constitue donc
j’ai tenté de revenir à l’origine de notre activité et de
une responsabilité, un déséquilibre,
comprendre l’évolution qui y a été faite jusqu’à présent.
dynamique. La
Ci-joint plan de dissertation Adapter – S’adapter :
forme de mœurs qui permette de régulariser cette
mais aussi une
tradition serait-elle précisément une
démarche ? L’avancée des technologies nous dépasse-telle déjà ? Sommes nous en train de perdre tout repère, ou de prendre un train qui rend le trajet agréable, mais à une destination fatale ? La démarche d’Adapter constitue la grande capacité de l’homme, jusqu’à où cette démarche est-elle vecteur de progrès ?