1 minute read
Alzheimer : le microbiote en cause ?
L’idée de manger sain pour avoir un bon microbiote intestinal et donc une bonne santé mentale fait son chemin : de nombreuses études ont prouvé que le type de bactéries (inoffensives) qui peuplent nos intestins influe sur le cerveau. Mais comment ? L’équipe de David Holtzman, de l’école de médecine de l’université Washington, aux ÉtatsUnis, a travaillé avec des souris porteuses du gène humain de l’apolipoprotéine E, soit dans sa version ApoE3, soit dans sa version ApoE4, toutes deux étant responsables de formes génétiques de la maladie d’Alzheimer chez l’homme. En effet, ces mutations augmentent l’inflammation cérébrale et l’accumulation de protéines tau, l’une des lésions de la maladie, ce qui provoque des dommages aux neurones ; d’où, chez les souris de laboratoire âgées de neuf mois, des troubles cognitifs de type Alzheimer et une mort des neurones.
Les chercheurs ont eu l’idée d’élever une partie de ces souris mutées dans une cage stérile, dès leur naissance, afin qu’elles ne développent aucun microbiote intestinal – de toute leur vie. Résultat : elles n’ont alors presque pas souffert de la maladie d’Alzheimer à un âge avancé, contrairement aux souris ApoE3 et ApoE4 ayant un microbiote normal, presque toutes atteintes. De même avec des rongeurs nouveau-nés, âgés de deux semaines, à qui ils ont simplement donné une cure d’antibiotiques d’une semaine afin de perturber temporairement leur composition en bactéries intestinales. Pourquoi les animaux ApoE3 ou ApoE4 étaient-ils moins malades ? Parce qu’ils présentaient une inflammation de leur cerveau, ou gliose, bien moins importante que celle des souris n’ayant pas eu d’antibiotiques : les cellules gliales de leur cerveau étaient bien moins activées !
Les chercheurs ne se sont pas arrêtés là : ils ont identifié, dans le microbiote des rongeurs mutés développant la maladie, les trois acides gras à chaîne courte responsables de la gliose cérébrale, ainsi que les souches bactériennes les produisant.
C’est la première fois que l’on met réellement en cause le microbiote dans la survenue d’une maladie cérébrale. Ce qui ne signifie pas qu’il faut s’en priver totalement ! Mais on pourrait envisager des thérapies à base d’antibiotiques, de probiotiques ou de microbiote fécal (greffe de selles) – en gros des traitements régulant la composition de nos bactéries intestinales –, pour sélectionner les bonnes souches, à savoir celles qui ne produisent pas les trois acides gras, et ainsi prévenir, voire traiter, les maladies neurodégénératives… £
Bénédicte Salthun-Lassalle