Mémoire de fin d'étude en architecture

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Promotion 2013-2014

Mémoire de master 2

Séminaire : FARE, Fabriquer et représenter, outils, recherches et actions pour les territoires d’aujourd’hui.

QUELLES EVOLUTIONS DU RÔLE DE L’ARCHITECTE DANS LES OPERATIONS FRANÇAISES D’HABITAT GROUPE PARTICIPATIF, DE 1970 A NOS JOURS ?

Présenté par : Raphaël RADILOF

Encadré par : Valérie Foucher-Dufoix





L’habitat groupé participatif émerge de nouveau à travers toute la France.

* Carte situant les différents habitats groupés participatifs ayant ouvert leurs portes en 2013, lors des de la journée portes ouvertes nationale – Production personnelle, source : le site d’Eco Habitatparticipatif.net


Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

SOMMAIRE AVANT PROPOS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.9 INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.11 CHAPITRE 1 - LA PARTICIPATION EN ARCHITECTURE . . . . . . . . . P.17 UN MOUVEMENT PLURIEL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.18 APPARITIONS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.20 - Dans le temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.20 - Dans l'espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.23 DEUX GRANDES EPOQUES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.26

. . . . . . . . . . . . . . . . . . P.26 - Le vide des années 1990 - 2008 . . . . . . . . . . . . . . P.27 - Les années 2008 - 2013 . . . . . . . . . . . . . . . . . P.29 - Les années 70 et 80

AUTOPROMOTION VS COOPERATIVES . . . . . . . . . . . . . . . P.31 - Autopromotion et coopérative d'habitants . . . . . . . . . . P.31 - Habitat Groupé Participatif . . . . . . . . . . . . . . . . P.35 CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.37

CHAPITRE 2 - CONSTITUTION DU GROUPE, DEFINITION DU PROJET . . . P.39 LES INITIATEURS DU PROJET . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.40 - Les habitants à la barre. . . . . . . . . . . . . . . . . . P.41 - Les institutions à la barre . . . . . . . . . . . . . . . . . P.43 STRUCTURATION. . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . - Cohésion de groupe et leadership. . . . . . . . . . . . . - La charte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . - Comment structurer la pensée, quel accompagnement préalable ? . - Quel montage juridique et financier ? . . . . . . . . . . .

. . . . .

P.46 P.46 P.50 P.52 P.55

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. . . . . . . . . . . . . . . . . . P.56 - Comment le choisir, à quel moment le faire intervenir ? . . . . . P.57 - Quelles missions, quel contrat ? . . . . . . . . . . . . . . P.62

L'ARRIVEE DE L'ARCHITECTE

CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.65

CHAPITRE 3 - MENER LE PROJET A TERME . . . . . . . . . . . . . . P.69 MOTIVATIONS DES MAITRES D'ŒUVRE . . . . . . . . . . . . . . . P.70 - Des opérations "risquées" . . . . . . . . . . . . . . . . P.71 - Quels intérêts représentent ces opérations pour les architectes ? . . P.73 METHODES DE TRAVAIL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.79 - Travail des accompagnateurs . . . . . . . . . . . . . . . P.79 - Des outils conventionnels, des outils particuliers . . . . . . . . P.81 LA GESTION DU CONFLIT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.85 - Intérêt de la thématique conflictuelle . . . . . . . . . . . . P.85 - Des moments générateurs de conflits, mode de résolution . . . . . P.86 LE CHANTIER . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.90 - Modalités de suivi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.90 - Autoconstruction

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.92

CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.93

CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.95 ANNEXES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.101 BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.139

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AVANT PROPOS

Avant toute chose, il me semble important de préciser le pourquoi de ce mémoire, le pourquoi de son sujet. A l'origine de cet écrit, il y a en fait une question: quelle est, doit et peut-être la place d'un futur "utilisateur" dans le processus de projet architectural ? A l'origine de cette même question, il y a une forme d'incohérence, probablement la plus importante qu'il m'ait été donné de constater durant mes études d'architecture. En effet, lors des quatre premières années d'étude qui m'ont été dispensées à l'Ecole Nationale Supérieure d'Architecture de Paris-Belleville, j'ai eu l'occasion de suivre un grand nombre de professeurs différents, que ce soit dans le cadre de l'enseignement du projet ou d'autres matières telles que l'histoire, la théorie, la construction, la Résistance Des Matériaux ou la sociologie. Autant d'individus et de sujets traités que d'idées développées. Il va bien sûr de soi qu'au vu de l'histoire et de la sensibilité de tout un chacun, un même sujet, s'il est abordé par plusieurs professeurs, pourra alors l'être sous différents angles, avec différents points de vue potentiellement contradictoires. Cette multiplicité des points de vue au regard d'un sujet donné est à mon sens une source de richesse. Quand bien même les discours tenus çà et là seraient contradictoires, ils sont source de questionnements personnels voire de prises de position. Pour ma part, j'ai pu constater une terrible discordance au sein du corps professoral qui m'a entouré jusqu'à présent, au sujet du rôle dans le projet des "habitants" pour les uns, "utilisateurs" pour d'autres, et "non sachants" pour les derniers. Je me suis alors longtemps posé la question de savoir comment inclure l'utilisateur dans le projet, quelles modalités, quels risques, quel "prix" ? Lors des exercices d'architecture que j'ai suivis, on aura alors su alternativement m'inviter à suivre puis à réfréner cette propension que j'ai à vouloir chercher le contact et l'opinion du futur utilisateur. En somme, j'en suis arrivé à me demander quel est le juste positionnement d'un architecte vis-à-vis de celui pour qui il construit. C'est pourquoi la démarche d'habitat groupé participatif m'intéresse énormément. Non pas que je rêve d'habiter une opération de ce genre, pas non plus que je sois franchement intéressé par le fait d'appartenir à l'un de ces groupes d'habitants, ni même qu'en tant que futur architecte je souhaite m'orienter vers ce genre de projet. Mais bien que son étude soit pour moi l'occasion d'observer une pratique "déviante", une pratique qui sort de la norme et qui nous permet par là même de la réinterroger.

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INTRODUCTION Alors que la loi ALUR (pour l'Accès au Logement et un Urbanisme Rénové) portée par la ministre du logement Cécile Duflot a été adoptée en première lecture à l'Assemblée Nationale le 11 Septembre 2013 et au Sénat le 26 Octobre 2013, la question de l'habitat participatif est plus que jamais une question d'actualité. Cette notion d'habitat participatif n'est pour autant pas nouvelle. Nous aurons l'occasion de constater qu'en effet l'engouement que rencontre aujourd'hui l'habitat groupé trouve des antécédents dans l'histoire, et notamment dans le siècle dernier. Nous nous intéresserons tout particulièrement à la période des années 1970 et 1980 durant laquelle on a pu constater une dynamique favorable à ce type d'habitat dit "alternatif". Ce mémoire se structure donc sur une analyse comparative de l'élan constaté durant les années comprises entre 1970 et 1990 d'une part, avec, d'autre part, celles qui nous séparent de 2008. L'un des intérêts et objectifs d'une telle comparaison et de mettre en évidence la filiation de ces deux périodes, de comprendre leurs variations et de les interroger. L'angle que mes études m'ont invité à suivre est bien entendu celui du rôle de l'architecte dans ces opérations d'habitat participatif. C'est-à-dire quelle relation, quel positionnement l'architecte décide-t-il de prendre vis-à-vis du groupe d'habitants, quelle place lui donne-t-il ? Ou peut-être que la question qui se pose est: quelle place le groupe donne-t-il à l'architecte ? En somme, ce mémoire cherche à éclaircir et comparer la position et le rôle des architectes de l'habitat groupé participatif entre deux périodes, en s'appuyant sur des cas concrets, et notamment des entretiens avec plusieurs types d'acteurs qui interviennent dans le processus de projet, à savoir entre autre : les habitants, les architectes, les accompagnateurs, les réseaux associatifs etc. A travers l'Europe l'habitat groupé participatif a été envisagé, mis en place et remis en question de nombreuses façons et à des époques différentes. Du fait de la multiplicité des contextes économiques de chaque pays à telle ou telle période de l'histoire, et suivant les choix retenus par les populations et décideurs politiques de ces dits pays, on constate qu'il existe des dizaines d'histoires différentes de l'habitat groupé participatif. Une étude comparative de ces histoires aurait beaucoup d'intérêt, et Yann MAURY ne l'oublie pas en écrivant son livre sur les coopératives d'habitants1. Dans le cadre de ce mémoire, il a été fait le choix de se cantonner à l'étude du cas français et de ne pas développer le cas de nos voisins européens. Certaines mises en parallèle et comparaisons sont toutefois inévitables. _________________________________________________________ 1

Il est ici fait référence au livre de MAURY, Y. (dir.) (2009), Les coopératives d’habitants: méthodes, pratiques et formes d’un autre habitat populaire. Bruxelles, Bruylant.

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La première partie de ce mémoire est consacrée à la notion d'habitat groupé participatif. Elle est dédiée à la définition de l'habitat en autopromotion, à celle de groupe d'habitants et de coopérative. Elle interroge aussi la sémantique qui cherche aujourd'hui à réunir sous une même bannière une série de pratiques et de revendications diverses. Dans un premier temps il s'agit de comprendre ce qu'est historiquement le mouvement d'habitat groupé participatif, et dans un second, de le regarder et de l'analyser sous le prisme des deux périodes qui nous concernent. La seconde partie traite des modalités de travail et de collaboration entre le groupe d'habitants et les architectes de l'habitat participatif, toujours dans les deux périodes qui nous intéressent. La métaphore de la vie du projet sert alors de trame d'étude. Aussi, dans le premier temps de cette partie, est décrite et recherchée une évolution entre 1970-80 et 2008-13 dans les méthodes de constitution des groupes, dans la manière de définir le projet et de trouver un architecte. Dans un second temps, la question mise à l'épreuve est de savoir comment mener à bien le projet. Quel intérêt alors pour un architecte de se lancer dans un tel projet, quelles sont les méthodes de travail, ont-elles évolué ? Quelles sont les sources de conflit, les modes de résolution ? Comment gérer la phase de chantier ? Autant de questions qui amènent à des solutions pouvant et ayant évolué au cours du temps. L'étude de ces solutions permet de mieux comprendre le rôle de l'architecte dans une opération d'habitat groupé participatif. Quant à l'étude de son évolution entre deux périodes, il semble qu'elle trahisse quelque chose de l'évolution du contexte professionnel des architectes.

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- L’habitat groupé participatif, un sujet qui évolue Évolution du registre sémantique déployé autour de la question de l’habitat groupé participatif, des années 1970-80 (ci-dessus) aux années 2000 (ci-dessous).

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Chapitre 1 - La participation en architecture

- CHAPITRE 1 LA PARTICIPATION EN ARCHITECTURE

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UN MOUVEMENT PLURIEL La question de l'habitat groupé participatif se retrouve aujourd'hui au cœur des démarches militantes pour l'habitat de plus en plus de citoyens. Si d'une manière générale on définit l'habitat groupé participatif comme un processus visant à produire du logement avec au cœur de la démarche les habitants, les intéressés n'ont pour autant pas tous les mêmes revendications, et ne s'investissent pas toujours pour les mêmes raisons. Au cours de mes visites et entretiens il me semble avoir remarqué, sinon quatre profils types, quatre grands centres d'intérêt, quatre grands thèmes récurrents : - Celui de la durabilité, du respect de l'environnement et de la recherche de performances énergétiques des constructions. - Celui de l'économie de projet, avec la recherche d'un circuit court de production1, supprimant certains acteurs tels que le promoteur par exemple. - Celui de la recherche d'une sociabilité différente, offerte par une expérience de groupe d'une part (celle du projet) et soulignée par la présence d'espaces partagés particuliers demandés par le groupe lors de la phase de projet: salle commune, atelier, potager etc. "Avec le vieillissement de la population et la réduction de la taille des ménages (éclatement des familles, jeunes personnes vivant seules), se pose une vraie question de l’isolement des personnes dans leur logement avec un vrai enjeu du développement de relations sociales de proximité en substitution des relations interfamiliales du foyer (solidarité, entraide, compagnie)"2 - Celui d'une réaction anti-spéculation immobilière, cherchant à extraire les biens immobiliers de cette logique si rependue de l'offre et de la demande. "Dans la société de marché, c'est la société toute entière qui est devenue « un auxiliaire du marché » et non l'inverse. La société de marché "est un système économique, régulé et orienté par les seuls marchés; la tâche d'assurer l'ordre dans la production et la distribution des biens est confiée à ce mécanisme autorégulateur. On s'attend à ce que les humains se comportent à gagner le plus d'argent possible: telle est l'origine d'une économie de ce type". Finance et marché immobilier, devenus sphères autonomes et incontrôlables, apparaissent bien comme "désencastrées" du reste des relations sociales [...] D'une façon plus générale, il apparaît que cette notion de "désencastrement" permet de comprendre selon quelle logique le marché, "loin d'être une entité naturelle et intemporelle, s'est constitué en institution autonome, détachée de l'emprise du social et du politique."3 _________________________________________________________ 1 2 3

BACQUE, M.-H., BIAU, V. (2010), Habitats alternatifs: des projets négociés ? Rapport au PUCA. p89 MEYER, A. (2007), Pour une autopromotion en France. Strasbourg, Europe et Environnement. p.14 MAURY, Y. (dir.) (2009), Les coopératives d’habitants: méthodes, pratiques et formes d’un autre habitat populaire. Bruxelles, Bruylant. P.21, Yann Maury, citant Karl Polanyi et un ouvrage de Jérôme Maucourant (2009) intitulé: Pourquoi Polanyi ?

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Chapitre 1 - La participation en architecture

En général, chaque membre d'un groupe lancé dans une opération actuelle d'habitat groupé participative partage avec sa propre pondération l'ensemble de ces thèmes (cf. figure 1). Toutefois nous verrons plus tard qu'historiquement il était question de plusieurs mouvements, qui persistent encore aujourd'hui en deux branches: celle de l'autopromotion et celle de la coopérative d'habitants. (Scission que l'on retrouve par ailleurs dans la loi ALUR qui permet la création de deux formes juridiques différentes de sociétés d'habitat participatif : les coopératives d'habitants et les sociétés d'autopromotion, cf. Chapitre VI).

figure 1 - Résultat d'une étude menée auprès d'habitants de coopératives québécoises 1

En somme, il convient aujourd'hui de parler d'un mouvement pluriel pour évoquer l'habitat groupé participatif. Nous allons en effet voir qu'il s'agit d'un mouvement qui prend ses racines dans divers courants de pensée, dans divers pays et à diverses époques.

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Document extrait du Livre blanc de l'habitat participatif, ouvrage collectif (2011). p.10

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

APPARITIONS DANS LE TEMPS En France, l'histoire de l'habitat groupé participatif débute avec les premières politiques publiques d'aide au logement, soit à partir de la fin du XIX ème siècle1. C'est notamment ce que soutiennent Marie-Hélène Bacqué et Claire Carriou : "Une enquête généalogique sur la participation dans le champ de l’habitat, s’attachant à suivre le fil de la notion dans le passé selon la démarche proposée par Robert Castel (1995), montre ainsi que la question de la participation, formulée de façons diverses selon les périodes, accompagne les débats sur la construction des politiques du logement. On peut ainsi dater ses débuts de la fin du XIXe siècle et non des décennies 1960 et 1970 comme on a tendance à le penser communément."2 Il n'était pas encore question "d'habitat participatif" formulé ainsi, mais on constate que certaines dynamiques mises en marche dès 1850 nous rappellent vivement certaines préoccupations contemporaines, telle que la tentative de suppression d'intermédiaires dans le processus de promotion immobilière, ou la requête d'une place plus importante pour les habitants lors de la phase d'étude du projet par exemple. Au cours du XXème siècle et jusqu'à aujourd'hui, on compte au moins quatre périodes d'émergence des questions relatives à l'habitat participatif. La première voit le jour avec la loi Siegfried du 30 novembre 1894, loi qui crée l’appellation HBM (Habitation à Bon Marché). Nous sommes alors à la fin du XIX ème siècle. Cette loi soutient la construction d’habitats à prix sociaux, on pourrait parler aujourd’hui, et depuis 1949, d’HLM (Habitation à loyer modéré). Dans le cadre de cette loi, les investisseurs de tous types sont alors aidés, tout comme les ouvriers : "Le dispositif juridico-financier adopté est destiné non seulement aux investisseurs privés, industriels, philanthropes, mais aussi aux travailleurs eux-mêmes par la création de sociétés coopératives de construction."3 On constate alors avec cette loi, la première manifestation française d’une logique de production participative de logements, au sens ou le futur habitant participe au projet autrement que par l’achat ou la location du produit fini. _________________________________________________________ 1

Voir en annexe la chronologie de la politique du logement sociale en France de 1948 à 2011. Bacqué, M.-H. et Carriou, C. (2012), La participation dans l'habitat, une question qui ne date pas d'hier. Article disponible en ligne sur le site http://www.metropolitiques.eu

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Chapitre 1 - La participation en architecture

La seconde période d’émergence de questions similaires à celles qui entourent aujourd’hui la notion d’habitat participatif s’inscrit sur près de 4 décennies. Elle débute dès la fin de la 1ère guerre mondiale et s’achève dans le début des années 1970. Durant cette période on constate en effet une montée en puissance de l’état dans la question de la production de logements. On se souviendra en effet que si la reconstruction suivant la guerre de 1914-18 fut envisagée sous l’œil régionaliste, celle suivant la guerre de 1939-45 s’est vue plus largement conduite par l’état. Cette prise de contrôle par l’état suscite alors une vague contestataire de laquelle découle des questionnements sur les modes de production alternatifs, et l’on constate, comme une réponse à certaines lenteurs d’action imputées à l’état, que la question de l’auto-construction gagne du terrain. On voit par exemple se structurer certains mouvements comme celui des CASTORS. "Le terme Castor semble apparaître à la fin de la Seconde guerre mondiale. On voit alors des familles se regrouper dans différentes villes de France (dont Lyon et Villeurbanne) autour d’expériences d’auto-construction coopérative fondées sur le principe de l’apport-travail : le travail collectif, effectué pendant les heures de loisirs, vient pallier l’incapacité des personnes ainsi associées à financer l’achat ou la construction d’un logement."1 La troisième période nous intéresse particulièrement puisqu’il s’agit de celle qui prend racine dans les années 1970 à 1980. Cette période s’encre parfaitement dans la continuité de la précédente. Au-delà de la question des dates cette remarque semble tout à fait fondée puisque la quête d’alternatives à l’interventionnisme public1 reste l’un des moteurs de la réflexion et du questionnement qui conduiront à la production d’opérations dites d’habitat groupé, comme peuvent l’être par exemple « Hélix » au Meylan, « Le Lavoir du Buisson St Louis » à Paris ou « Le Sarment des Bénards » à Châtenay-Malabry. Nous aurons toutefois l’occasion de voir que cette période intègre aussi des questions nouvelles, ayant trait d’une part à une critique sociale quant au rapport à l’autre, et d’autre part à une critique culturelle de l’architecture et de l’urbanisme moderne. Pour finir, la quatrième et dernière période d’émergence est celle que nous vivons actuellement, prenant racine entre 2005 et 2008. "Depuis 2005, l'habitat groupé intéresse à nouveau l'opinion publique."2 _________________________________________________________ 1 2

Article sur l’histoire des castors, disponible en ligne : http://www.castorsrhonealpes.fr/index.php/lescastors/lhistoire Site d’Eco Habitat Groupé : http://www.ecohabitatgroupe.fr/page.php?categorie_id=100

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

Nous tacherons de mettre en évidence que cette période découle des précédentes et emprunte à ce titre nombre des préoccupations que nous avons commencé à évoquer, comme la recherche d’alternatives à la production de logements notamment. Nous verrons aussi ce qu’elle questionne de nouveau, comme le rapport au développement durable par exemple. En somme, en plus des deux périodes qui concernent notre étude, deux autres, plus anciennes, font figure de socle historique sur lequel se développent certains questionnements, certaines recherches, et où s’agrègent de nouvelles problématiques.

Synthèse des évènements relatés précédemment – production personnelle

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Chapitre 1 - La participation en architecture

DANS L'ESPACE "L’habitat groupé autogéré est déjà bien implanté à l’étranger : Pays-Bas, Suède, Québec, Suisse… En France, on ressent les prémices d’un système avéré qui constitue une alternative plus solidaire à l’habitat actuel en réaction à l’individualisme croissant, aux défis écologiques et à la difficulté d’accès à la propriété."1 Comme nous l’indique Pauline Meyniel, l’habitat groupé "autogéré", ou participatif, n’est pas une notion franco-française, bien au contraire. Si l’on s’attache à comprendre les origines du mouvement dans lequel s’inscrit notre problématique, il faut que nous remontions le temps, comme nous l’avons fait, mais il nous faut aussi franchir nos frontières. Nous rappellerons ici que ladite problématique traitée dans ce mémoire se restreint à l’étude du cas français. Toutefois, et comme nous l’avions dit, un détour par l’étranger semble nécessaire pour replacer au mieux la question de l’habitat groupé participatif. Aussi, il est important de comprendre qu’aujourd’hui, sur la question de l’habitat groupé participatif, la France ne fait en aucun cas office de pionnière. "C’est au Danemark que le co-habitat a vu le jour. Le premier co-habitat fut établi en 1972 pour 27 familles, près de Copenhague, par un architecte et une psychologue. A l’origine, il y avait un article de Bodil Graae’s, paru en 1967 et dont le titre était : « Chaque enfant devrait avoir 100 parents. » Depuis lors, le mouvement s’est répandu rapidement, et aujourd’hui 1,5% de la population danoise - soit environ 50000 personnes - vit dans des co-habitats."2 Il est question de "co-habitat" dans cet article, comprenons ici : habitat groupé participatif. En effet, si le vocable est déjà très diversifié en France, l’ouverture de l’étude à l’internationale tend à complexifier d’autant plus la donne. On pourra alors parler de co-habitat, de cohousing, de centraal wonen ou encore de baugruppen en fonction de si l’on parle du cas Danois, Anglais, Néerlandais, Allemand etc. L’idée sous-jacente à ces différents termes reste sensiblement celle que nous cachons derrière la question d’habitat groupé participatif. Nous les tiendrons donc pour synonymes malgré qu’un tel aplatissement puisse gommer nombres de subtilités propres au développement de la notion dans chaque pays.

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Meyniel, P. (2011), L’habitat participatif renaît en France. Article disponible sur le site http://www.developpementdurable.com Lietaert, M. (2008), Le Co-Habitat et l’Habitat Groupé en Europe. Article disponible sur le site suivant : http://soleil-levant.org/le-co-habitat-et-l-habitat-groupe-en-europe/

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

Dans la citation rapportée de Matthieu Lietaert, on comprend que si le Danemark est tenu comme l’un des pays européen les plus avancés sur les questions d’habitat groupé c’est pour avoir développé la question de l’habitat groupé sans interruption des années 1970 à nos jours, et non pas pour avoir concrétisé des opérations prématurément : 1 ère opération en 1972, quand en France était réalisée l’opération "Les Verdiers" par exemple (1971 – 7 logements). Cette continuité, accompagnée des portages politiques adéquats, a permis de faire de l’habitat groupé participatif au Danemark un mode de production du logement devenu banal.

figure 2- Photographie de l’opération Les Verdiers à Palaiseau – Architecte Guy Yacheret1

Avec le Danemark, la Suède fait aussi office de leader dans le domaine de l’habitat groupé. Dans ce pays c’est dès les années 1960, sous l’impulsion de mouvements féministes, que se développe la réflexion sur le partage des espaces et la répartition des tâches ménagères au sein d’un groupe qui pourrait être plus grand que celui constitué par une famille. De la même façon qu’au Danemark, l’habitat groupé participatif a trouvé une vraie place parmi les modes de production du logement, à la différence près qu’en Suède les opérations sont le plus souvent publiques en non privées. Cela permet entre autre d’imaginer une occupation d’autant plus partagée des locaux communs. Durant la journée certains d’entre eux peuvent être utilisés comme locaux pour des agences publiques, de santé notamment, puis rendus à la jouissance des habitants de l’opération considérée une fois la nuit tombée. 1

Illustration extraite du livre de BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives

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Chapitre 1 - La participation en architecture

Pour compléter le trio de tête des pays européens les plus avancés en matière d’habitat groupé, il nous faut citer les Pays-Bas. Dans ce pays, dès 1977 on peut remarquer des opérations à plus de 200 habitants. La particularité du système développé aux Pays-Bas est de diviser les grandes communautés en "faisceaux" , groupe de 5 à 10 unités partageant alors quelques espaces communs, en plus d’un bâtiment partagé de l’ensemble des faisceaux. Pour finir, nous pourrions regarder l’exemple allemand. On aura alors l’occasion de trouver de nombreux discours donnant les Allemands comme en avance, au même titre que les Danois, Suédois ou Néerlandais, en matière d’habitat groupé. Il semble en effet que le terrain allemand soit plus propice que le nôtre au développement d’opérations d’habitats groupés participatifs. Par exemple : "La ville de Freiburg [en Allemagne] est un laboratoire de la promotion d’habitat participative à ciel ouvert. Aujourd’hui, un tiers des constructions émanent d’une volonté citoyenne et 150 projets ont déjà vu le jour. Le concept des Baugruppen s’essaime petit-à-petit en Allemagne, des municipalités réservent jusqu’à 15 % du foncier pour des projets d’autopromotion. L’idée et la volonté sont bien ancrées, la démarche devient un modèle politique."2

Cette mise en perspective géographique, accompagnant celle historique, permet de comprendre que l’habitat groupé participatif a été traité de façons diverses au-delà de nos frontières. On remarque que certains pays embarquent aujourd’hui, presque naturellement dans leur culture de la promotion immobilière, cette question de l’habitat groupé participatif. Il est important de le constater car au travers des échanges professionnels de la France avec ses voisins européens, ainsi qu’au travers de l’immigration, on arrive à comprendre comment, dans une certaine mesure, nous constatons aujourd’hui et depuis 2005, un regain d’intérêt quant à la démarche de projet d’habitat groupé participatif.

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Lietaert, M. (2008), Le Co-Habitat et l’Habitat Groupé en Europe. Article disponible sur le site suivant : http://soleil-levant.org/le-co-habitat-et-l-habitat-groupe-en-europe/ Dreyfus, T. (2010), Baugruppen : habitat groupé, autopromotion. Article disponible en ligne sur le site suivant : http://www.lecolibri.org

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

DEUX GRANDES EPOQUES LES ANNEES 70 ET 80 C’est durant les années 1970-80 et jusqu’au tout début des années 1990 que l’on voit apparaitre les premières opérations qui concernent notre étude. Notons ici que nous parlons d’une centaine de projets sortis de terre environ. Après avoir vu quelles sont les origines possibles de ces opérations, il convient, pour pouvoir comprendre pleinement les rôles joués par les architectes dans ces opérations, de comprendre quelles étaient les motivations des initiateurs de projet. Nous sommes à cette époque au sortir des trente glorieuses. L’Europe est devenue une réelle société de consommation et la reconstruction faisant suite à la guerre de 1939-45 touche à sa fin. Par ailleurs, les manifestations de mai 1968 viennent d’avoir lieu, et sont un parfait indicateur des nouvelles aspirations sociales que connait alors la France. C’est cette recherche de rapports sociaux différents qui caractérise l’habitat groupé participatif à cette époque. Précisons une fois encore que ce terme d’habitat groupé participatif n’est pas d’usage à l’époque et constitue donc un anachronisme. On parle alors d'habitat autogéré, comme en témoigne le nom de l’association principale œuvrant en faveur de ce type d’habitat dans les années 1970-80 : Mouvement de l’Habitat Groupé Autogéré (MHGA devenue ECO Habitat groupé ne 2008) ou le titre du livre de Philippe Bonin, (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives. Nous sommes donc dans une époque de rupture, autant sociale qu’économique, que la question de l’habitat autogéré cristallisera dans son ADN pour la durée de cette période. "Celle-ci [une opération type des années 1970-80] s’engage dans une transformation du cadre de vie et du cadre bâti fondée sur « les changements intervenus dans le rapport au travail, les modes de vie, la consommation, la socialisation des enfants, l’appropriation de l’espace, les modes de gestion et enfin, dans le rôle et la place attribués à l’architecte ». La rencontre se fait donc tout naturellement avec les architectes, dont la génération active à cette période est largement issue de la re-fondation de l’enseignement et de l’insertion professionnelle. "1 Cette citation nous invite à mettre en évidence un autre fait important découlant des manifestations de mai 1968. Il s’agit de la refonte du système de formation des architectes, après l’explosion du système beaux-arts. Ce point est on ne peut plus important pour comp_______________________________________________________ 1

BIAU, V., D'ORAZIO A., IOSA, L., NEZ, H. (2010), Habitat en autopromotion, étude de six cas franciliens. Rapport final au PUCA-Batex 2. P.41

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Chapitre 1 - La participation en architecture -rendre le rôle et les aspirations des architectes de l’habitat autogéré à cette époque. Retenons alors que dès 1968-69 la formation des architectes rompt donc avec l’académisme des beaux-arts par la création d’une multitude d’unités pédagogiques relativement autonomes disséminées de par la France. L’architecture s’enseigne alors différemment d’une unité à l’autre et propose aux jeunes architectes des voies de réflexions qui contrastent avec celles offertes à l’école de beaux-arts. Une nouvelle génération d’architecte arrive donc sur le marché du travail sensiblement en même temps que l’apparition des premières opérations d’habitat autogéré.

LE VIDE DES ANNEES 1990 - 2008 Pourquoi 2008 ? En réalité il est assez délicat de dater avec précision la dernière reprise de l’engouement envers l’habitat participatif, mais une date souvent utilisée est celle de l’apparition de l’association ECO Habitat Groupé, résurgence du MHGA, soit en 2008 (publication au Journal Officiel des Associations le 16 avril 2009). La question que nous allons alors aborder et de savoir ce qui s’est passé entre la fin des années 1980 et 2008. Durant ces presque vingt ans on constate une absence totale de nouveaux projets. Nous pourrions considérer que cette période est celle de l’incubation, au sens d’un développement embryonnaire plutôt que celui d’une multiplication d’entités . En d’autres termes, c’est une période durant laquelle les différents groupes formés, des différentes opérations menées à bout, sont confrontés à la mise en pratique de leurs idées. Cet entre-temps nous apprend beaucoup sur l’habitat groupé participatif. Il permet d’avoir un réel recul quant à l’étude de l’évolution des groupes. On remarque d’ailleurs que près de 75% des dits groupes, ayant franchi le pas de la construction dans les années 1970-80, sont toujours en activité aujourd’hui. Ils représentent une source d’information et de conseils très précieux pour les nouveaux intéressés du XXIème siècle. A ce titre on comprend tout l’intérêt que prennent les opérations portes ouvertes qui se multiplient ces dernières années. En 2013, une journée portes ouvertes nationale de l’habitat participatif a motivé l’ouverture au public de plus de 100 habitats participatifs, construits dans les années 1970-80, 2000, en chantier ou en promesse de chantier. (cf. figure 3) En somme, dès la fin des années 1980, la question de la participation de manière générale n’étant plus aussi présente sur la scène publique qu’à la suite des évènements des années 1960, le Mouvement pour l’Habitat Groupé Autogéré (MHGA) perd son souffle et les groupes de projets se font de plus en plus rares, jusqu’à disparaitre dans les années 1990. Les enfants ayant grandi dans ces habitats particuliers ne reproduirons pas ce mode de vie et la question de l’habitat participatif tombe alors dans l’oubli pour près de deux décennies.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ? Lors d’un entretien, Michel Broutin, ancien directeur du MHGA et membre du bureau Éco Habitat Groupé déclare : "Les réunions continuaient, on se regroupaient ici, dans cette salle. On a essayé de relancer le truc tous les cinq ans à peu près. Mais ce n’est qu’en 2008 que ça a mordu."1

figure 3- Affiche de promotion des journées portes ouvertes des 19 et 20 octobre 2013

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Extrait du témoignage de Michel Broutin, recueilli le 20 octobre 2013 dans l’habitat groupé participatif Le sarment des bénards, lors des journées portes ouvertes de l’habitat participatif.

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Chapitre 1 - La participation en architecture

LES ANNEES 2008 - 2013 La seconde période qui nous intéresse, dans le cadre de notre étude, débute donc aux alentours de 2008 avec le regain d’intérêt pour la démarche d’habitat participatif et la résurgence du MHGA. En changeant de raison sociale pour "Eco Habitat Groupé" ainsi que d’objet statutaire, cette association qui fait office de référence en matière d’habitat groupé participatif donne de précieux indices sur le pourquoi de ce renouveau. Ainsi la nouvelle association doit : "permettre aux habitants de s’approprier la conception, la construction, la gestion et l’amélioration de leur habitat, promouvoir les approches sociales, environnementales et économiques de l’urbanisme et de l’habitat, piliers d’un développement durable, rassembler l’expérience des groupes de projet des ressources, favoriser les liaisons et les actions communes, œuvrer à la fédération du mouvement associatif dans ce champ de l’urbanisme et de l’habitat à travers notamment l’élaboration et la diffusion d’une charte de l’éco habitat groupé, promouvoir le développement du mouvement auprès de l’état, des collectivités territoriales et de tous les organismes pouvant y concourir, et plus généralement, mener toutes actions non commerciales destinées directement ou indirectement à la réalisation de l’objet."1 Elle garde donc toutes ses prérogatives de valorisation de l’expérience, de développement et de diffusion des modèles d’habitat groupé participatif, mais intègre également de nouvelles notions telles que celle du développement durable et plus généralement de "l’approche environnementale". C’est en effet un point très important car revendiqué par un grand nombre de groupes actuels comme en témoigne Anne d’Orazio : "Les éléments de la valeur ou de l'utopie sociale se fondent sur des registres qui sont ceux de la solidarité et de l'entre-aide, et qui sont issus des mouvements anciens et entre autre des mouvements coopératifs, mais aussi qui trouvent des fondements dans l'idéologie de la revendication d'une économie sociale et solidaire, donc sur des considérations anticonsuméristes et anti-spéculatives, particulièrement dans ce qu'on appelle les coopératives d'habitants... Et puis cette idée aussi qu'on pourrait produire du logement dans des formes de circuit courts. On voit bien qu'il y a là quelque(s) part une vocation ou un impératif dans cette alternative économique qui est recherchée et très clairement aussi une revendication à s'inscrire dans le cadre d'une écologie dans laquelle il s'agit d'agir sur le cadre de vie, ce que j'appelle une écologie du quotidien, et la volonté de prendre très au sérieux la performance environnementale et énergétique des bâtiments." 2 _______________________________________________________ 1 2

CARIOU, E. (2011), Habitat Groupé et organismes HLM : une utopie réalisable et reproductible ? Brest, IAE de Bretagne Occidentale. P.32, (synthèse de l’objet statutaire d’Eco Habitat groupé). Propos d’Anne D’orazio, recueillis le 25/03/2013 lors d’une intervention à la Maison de l’Architecture d’Ile-de-France dans le cadre de l’ICEB Café sur l’habitat participatif.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

Cette question environnementale n’est pas pour autant le seul motif à l’origine de la réapparition de groupes d’habitants. Claire Carriou nous offre une autre piste de réflexion : "En temps de crise, les gens cherchent à redevenir acteurs de leur vie. Et ça passe par le lieu d’habitat, c’est une manière d’être maître de soi, une façon de retrouver du sens."1 A travers ces propos, elle nous invite à interroger la responsabilité du contexte économique des années 2008 quant à la résurgence du mouvement. Pour appuyer cette proposition, remarquons qu’historiquement le développement de modes de vie utopiques ou alternatifs s’est souvent intensifié dans les périodes de crises : reconstruction poste conflit armé, manifestations culturelles, sociales et/ou politiques (mouvement des castors dans les années 1950, ou vague de projets suivant mai 68 etc.) Sylvène Denèfle, professeure de sociologie à l'Université Rabelais de Tours pense d’ailleurs "qu’à l’inverse, si le contexte économique devient plus clément, l’utopie de vivre ensemble risque de disparaître". En conclusion, il semble que la période 1970-80 se voit être une période de questionnement et d’effervescence autour de l’habitat alors dit "autogéré" motivé notamment par une recherche de sociabilité du quotidien différente, mais qui s’essouffle dans la fin des années 1980. Cette recherche reste par ailleurs présente dans la reprise du mouvement dans les années 2000, mais il intègre de nouvelles préoccupations qui peuvent venir jusqu’à remplacer cette recherche d’une nouvelle sociabilité. Les habitants revendiquant alors davantage le droit à une responsabilité locale, d’intervention sur leur environnement proche et sur la maitrise des questions relatives au développement durable. Ce glissement de l’intérêt et de la motivation des groupes vers une dimension technique voir technologique impacte directement le rôle que tient l’architecte dans ce genre d’opération, et nous concerne alors directement dans le cadre de cette étude. Les nouveaux problèmes qu’il s’agit finalement de résoudre relèvent d’un domaine qui échappe parfois aux architectes d’aujourd’hui, et que la profession tente de conquérir. De ce point de vue, on comprend le caractère de défis qui motive maintenant certains architectes à prendre part à ce genre d’opérations.

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D’après les propos de Claire CARRIOU, FONTAIN, P. et CHRÉTIEN, J. (9 Aout 2013), Le grand retour de l’habitat participatif. Article disponible en ligne sur le site : http://www.youphil.com

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Chapitre 1 - La participation en architecture

AUTOPROMOTION VS COOPERATIVES Autopromotion, coopératives d’habitant, habitat groupé, participation, habitat autogéré… Dans les média d’aujourd’hui, dans les textes et études parues, dans la bouche des déférents acteurs de l’habitat, un large vocabulaire a fleuri au cours du temps. Il convient donc ici de préciser pourquoi et comment. Nous avons déjà vu que le terme d’habitat groupé autogéré était celui en vigueur dans les années 1970-80, mais déjà à l’époque, tout comme aujourd’hui, nombre de termes étaient employés. Les quelques pages qui suivent tentent d’éclaircir ce qui se cache derrière cette nébuleuse de termes et de justifier celui en vigueur de nos jours, et que nous avons ici retenu : habitat groupé participatif.

AUTOPROMOTION ET COOPERATIVE D'HABITANTS. L’autopromotion est en définitive l’une des deux grandes tendances désignées par le vocable d’habitat groupé participatif. Cette tendance, par rapport à celle de coopérative d’habitants, découle plus directement des opérations datant des années 1970-80, en ce sens qu’il s’agit alors pour un groupe d’habitants de revêtir les habits du promoteur et de faire bâtir pour lui-même un immeuble qui soit en adéquation avec le projet dudit groupe. Dans son mémoire, Alain MEYER1 fait état de quatre formes de promotion type, allant de la promotion la plus classique à l’autopromotion. Il les dénomme ainsi : 1) Promotion classique, promoteur-vendeur :

Dans ce modèle, le plus rependu, l’habitant est un consommateur final et l’architecte ne dialogue qu’avec le promoteur maitre d’ouvrage. 2

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MEYER, A. (2007), Pour une autopromotion en France. Strasbourg, Europe et Environnement. P. 26-27.

2 Schémas d’après le mémoire d’Alain Meyer, graphisme d’après celui de Nicolas Mohoric : MOHORIC, N. (2011), Le rôle de l'architecte dans la démarche d'habitat groupé en autopromotion. Nancy, ENSAN

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ? 2) Promotion sur commande, promoteur-mandataire :

Dans ce modèle, c’est le client qui achète un terrain et propose son programme. Ici encore l’architecte ne dialogue pas avec l’habitant mais avec le promoteur désigné par ce dernier. Il semble malgré tout que dans les faits ce modèle soit assez difficile à mettre en œuvre. Le contrat de promotion immobilière en France donnant beaucoup de responsabilité au promoteur, très peu acceptent ce genre de marché.

3) Autopromotion, groupe libre :

Dans le cas de l’autopromotion le groupe d’habitants est lui-même maitre d’ouvrage. Par voie de conséquence, il est amené à dialoguer et collaborer avec l’ensemble des différents intervenants. Aussi l’architecte est-il confronté directement au groupe. C’est en cela que ce modèle s’inscrit dans le cadre de l’habitat participatif. L’habitant est bien au centre du projet, comme en témoigne le schéma suivant :

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Chapitre 1 - La participation en architecture 4) Autopromotion, groupe guidé :

Ce dernier mode de promotion s’inscrit toujours dans le domaine de l’habitat participatif. Il est en fait très proche du système d’autopromotion en groupe libre. Simplement, dans le cas d’un groupe guidé, un intervenant se rajoute dans le processus. Il s’agit d’un AMO (Assistant à la Maitrise d’Ouvrage). Son rôle n’est pas de prendre en charge la maitrise d’ouvrage, mais d’accompagner le groupe dans cette tâche. L’architecte dialogue et travaille toujours en directe avec les habitants formant groupe, mais reste cantonné à sa mission de maitrise d’œuvre du fait de la préparation du groupe à l’échange réalisé en amont par l’AMO. Dans le cas d’un groupe libre, il arrive très souvent que les architectes doivent sortir du cadre de leur mission de maitrise d’œuvre pour permettre le bon déroulement du projet : cette mission complémentaire doit alors être préparée et budgétée en termes de coût et de temps pour éviter toute rupture potentielle.

En somme, l’autopromotion est un modèle de production d’habitats qui vise à évincer l’intervenant "promoteur" du processus. De cette manière l’habitant est au cœur de la démarche de projet et peut théoriquement en maitriser tous les aspects. De plus, d’un point de vue financier la supression du promoteur implique une économie substantielle sur un poste qui n’est plus à prévoir. Par ailleurs, la supression de cet intervenant transfère les résponsabilités qui lui incombaient directement sur le groupe, groupe qui doit dans le même temps assumer la compétence perdue. En ce qui concerne les coopératives d’habitants, le mécanisme reste identique à celui de l’autopromotion. La différence fondamentale réside dans les revendications : lutte contre la spéculation immobilière, favoriser l’accès au logement etc. Dans la pratique, le point de divergence se situe à la dernière étape de la chronologie type d’un projet en autopromotion (cf. figue 4). Les membres d’une coopérative d’habitants cherchent en effet à devenir collectivement propriétaires d’une opération. Ils ne trouvent donc pas leur intérêt dans la fonte de leur mode d’associassion vers une coopérative classique, or depuis la parution de la loi ALUR en date du 26 mars 2014, son chapitre VI, article 22 propose notamment une forme juridique adaptée de société d’habitat participatif : les coopératives d’habitants.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

figure 4- Chronologie type de la vie d’un projet en autopromotion 1

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Adaptation d’après MEYER, A. (2007), Pour une autopromotion en France. Strasbourg, Europe et Environnement. P.37.

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Chapitre 1 - La participation en architecture

HABITAT GROUPE PARTICIPATIF On comprend alors qu’autopromotion et coopérative d’habitants sont deux courants de pensée connexes rattachés à la question de la participation des habitants dans le processus de montage et de projet quant à la production de lieux de vies. "Aujourd’hui, le recours au même vocable d’habitat participatif signe la construction d’une alliance. En effet, alors que les tensions relatives aux positionnements et aux effets de concurrence pouvaient exister dans les débats internes, entre partisans de l’autopromotion et ceux de la coopérative, il est apparu nécessaire de trouver une forme de cohérence au-delà de la diversité. Cette posture d’unité participe à rendre crédible la démarche, à s’afficher comme acteur légitime et à revendiquer le statut de « mouvement »."1 En effet, même si les aspirations des uns et des autres, suivant qu’ils soient partisans de l’autopromotion ou de la coopérative d’habitants, diverge sur certains points, on remarque que les groupes sont souvent à mi-chemin entre les deux concepts. Aussi, pour obtenir des législateurs un climat plus favorable à la multiplication des opérations en autopromotion et coopérative d’habitants, il a fallu aux différents acteurs engagés faire montre d’unité. C’est de cette façon qu’on emploie aujourd’hui le terme d’habitat participatif. D’aucun est libre par la suite d’y adjoindre "en autopromotion" par exemple, mais le rassemblement de diverses idées derrière un vocable unique témoigne de l’envie d’être entendu. Si dans ce mémoire nous utilisons la dénomination d’habitat groupé participatif, c’est notamment pour ne pas manquer de faire référence aux opérations des années 1970-80 qui se retrouvaient sous la bannière de l’habitat groupé autogéré.

En conclusion, l’habitat groupé participatif fait référence à un ensemble d’idées suivant lesquelles un groupe d’habitants peut produire par lui-même une opération de logement qu’il va ensuite habiter et entretenir, qu’il s’agisse de déboucher sur une copropriété conventionnelle ou sur un mode d’attribution différent, que ledit groupe soit accompagné dans cette tâche ou non, du moment que c’est lui qui est au centre du processus mis en place. Ce mode de promotion permet alors au groupe d’imaginer un produit immobilier qui n’existe pas sur le marché et qui lui correspond, comptant le plus souvent certains espaces communs à partager entre ses membres.

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D’ORAZIO, A. (2012), La nébuleuse de l’habitat participatif. Article disponible en ligne sur le site http://metropolitiques.eu

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

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Chapitre 1 - La participation en architecture

CONCLUSION

L’habitat groupé participatif est une question d’actualité. Pour autant elle n’est pas nouvelle et possède une histoire propre que l’on peut faire remonter au milieu du XIXème siècle. Il s’agit d’un mouvement qui englobe plusieurs idéologies pour défendre des valeurs particulières, telle que la recherche de liens sociaux renouvelés, entre autres avec son voisinage, telle que la recherche d’une certaine forme d’économie du projet, telle qu’une volonté d’extraire la question du logement de toute logique spéculative (fer de lance des coopératives d’habitants) et, plus récemment, d’introduire et de défendre la notion d’écologie et de développement durable. On parle alors d’habitat groupé participatif dans le sens où il s’agit pour un ensemble d’individus de se rassembler et de faire groupe autour d’un projet commun, puis de se constituer maitre d’ouvrage de leur futur habitat. Ainsi le groupe "participe" très activement au projet du fait qu’il se retrouve au centre du processus de promotion. Il doit alors gérer l’ensemble des intervenants et propose par là même un cadre de travail assez particulier pour les architectes. Cette position centrale et la perte de certains intervenants, tel que le promoteur par exemple, met le groupe dans une position délicate. La responsabilité qu’il porte alors est très lourde. Si l’on ajoute à cela le manque de compétences dont il fait généralement montre pour remplacer le promoteur, on comprend que les projets d’habitats groupés participatifs soient des projets souvent très longs et qui n’arrivent que rarement à terme. Finalement, n’offrant a priori aucune garantie d’aboutissement, il s’agit aux yeux des intervenants extérieurs, et notamment des architectes, de projets que l’on peut qualifier de risqués.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

- CHAPITRE 2 CONSTITUTION DU GROUPE, DEFINITION DU PROJET

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

LES INITIATEURS DU PROJET Cette seconde partie est dédiée à l’étude de l’évolution du rôle de l’architecte, entre les années 1970-80 et aujourd’hui, dans le cadre de la première moitié de la vie d’un projet d’habitat groupé participatif, à savoir la constitution du groupe et la définition du projet à proprement parler. La toute première étape étant bien sûr l’initiation de la démarche, nous commencerons par là. "Construire une maison individuelle, c'est acheter un terrain, puis passer chez un architecte et se mettre d'accord sur les surfaces, la répartition des espaces et bien sûr l'aspect général de "sa" maison. Ce mode d'emploi, il est désormais possible de l'appliquer pour son appartement dans son immeuble à construire, plaide l'association éco-quartier, dont le projet bouleverse les règles traditionnelles de la construction du neuf à Strasbourg." 1 Voici ici une tentative de vulgarisation très intéressante. Elle remplit parfaitement son rôle en proposant que la démarche d’habitat groupé participatif permette de produire "son appartement dans son immeuble à construire ". Par ailleurs elle élude complètement la question du groupe, et prétendre que le mode d’emploi suivi pour réaliser une maison individuelle soit applicable pour un projet d’habitat groupé participatif gomme malgré tout certaines particularités de la démarche. En effet, avant l’achat du terrain, un long travail de formation du groupe autour d’un projet et de valeurs partagées est à mener. Ce travail est dans la plus grande majorité des cas motivé par un ou plusieurs individus, futurs habitants, initiateurs du projet. On parle alors d’une démarche Bottom-up2, c'est-à-dire émanant des habitants et allant vers une interpellation de(s) professionnels et institutions. Toujours est-il que dans certains cas, plus rares, le processus est inversé. Ce sont alors les institutions, collectivités territoriales ou associations qui motivent le projet d’habitat groupé participatif, avant même d’avoir un groupe constitué de futurs habitants. On parle alors de logique Top-down2.

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Bruno PARASOTE président de l’association ECO-QUARTIER, Article "petits immeubles entre amis", DNA du 14.04.2007 Bottom-up et Top-down, expressions couramment employées, que l’on retrouve notamment chez BACQUE, M.-H. et BIAU, V. (2010), Habitats alternatifs: des projets négociés ? Rapport au PUCA.

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

LES HABITANTS A LA BARRE Le cas d’une opération motivée dès l’origine du projet par les futurs habitants euxmêmes (Bottom-up) est le plus rependu, mais aussi le plus emblématique de l’habitat groupé participatif. Cela correspond tout à fait à ce que constitue ce mouvement en termes de revendications : redevenir un acteur de la production de son cadre de vie, et en particulier dans le courant actuel : redevenir localement responsable de notre impact environnemental. Yann Maury parle alors de la formation d’un "capital social" qu'il définit ainsi : "La notion de capital social revêt la forme de liens sociaux, de forces sociales issues de la société civile, qui permet à des groupes d’individus « d’agir ensemble et de s’auto-organiser pour répondre collectivement à un besoin clairement identifié ». […] La notion de capital social, voisine avec la notion anglo-saxonne de l’empowerment ; laquelle correspond à une démarche de prise de pouvoir des habitants sur eux-mêmes, sur leur condition de vie réelle, puis à l’exercice d’un travail d’influence (de lobbying) opéré en direction des élus (en direction de la sphère politique), afin de faire aboutir un projet." 1 De manière générale chaque nouveau projet d’habitat groupé participatif prend forme autour d’un noyau dur constitué le plus souvent par des individus entretenant déjà une relation particulière. Amis, collègues de travail, voisins… C’est par exemple le cas du groupe de Domisilami à Grenoble (cf. figure 5) qui s’est formé autour d’un couple et de deux femmes, tous les quatre étant d’ores et déjà bons amis. Ces amis, qui partageaient déjà des vacances par exemple, avaient en tête de s’installer ensemble quand leurs vieux jours arriveraient. Ils décident finalement d’avancer la date d’exécution de leur plan et fédèrent autour de leur projet d’habitat groupé deux personnes supplémentaires.

figure 5 - Bâtiment et groupe du projet de Domisilami Crédit photographique : D. LeBrun, T. Braive et CAUE de l’isère

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MAURY, Y. (dir.) (2009), Les coopératives d’habitants: méthodes, pratiques et formes d’un autre habitat populaire. Bruxelles, Bruylant. P.37. D’après DONZELOT, J. (2005), Faire société. Le Seuil.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

Cette idée de noyau dur n’a pas significativement évolué entre nos deux périodes d’étude. Déjà en 1974, dans le cadre de la formation du groupe motivant l’opération Kolkhoze, le noyau dur se compose de deux couples ayant pour habitude de se fréquenter. "A l’occasion d’une rencontre de leurs enfants à l’école maternelle, deux familles se demandent « comment vivre un quotidien plus chaleureux en dehors du cercle restreint de la famille nucléaire ». Très vite, lors de cette année 1974, naît l’idée de trouver une grande maison à partager." 1

figure 6 – axonométrie par Claude Bouvier de l’opération Kolkhoze2

En somme, un projet d’habitat groupé participatif implique la présence d’un groupe d’individus duquel découle une forme de capital social, somme des savoirs, compétences et revendications de chaque membre. Ce groupe se forme la plupart du temps de lui-même, autour de ce que l’on a appelé un noyau dur. Nous allons voir maintenant qu’il peut aussi se former sous l’impulsion d’un acteur extérieur, qu’il soit institutionnel ou professionnel. _________________________________________________________ 1 2

BIAU, V., D'ORAZIO A., IOSA, L., NEZ, H. (2010), Habitat en autopromotion, étude de six cas franciliens. Rapport final au PUCA-Batex 2.P.63. Document extrait du livre de BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives.P.63

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

LES INSTITUTIONS A LA BARRE "La préexistence d’un noyau n’est toutefois pas une règle absolue : la proposition initiale peut venir aussi de professionnels. Soit des architectes, comme à Nantes, Cannes, Toulouse, Ville d’Avray, Créteil, etc., soit des membres du MHGA qui ont constitué des Ateliers d’habitants avec l’appui de Municipalités. Les habitants répondent alors à une initiative certes extérieure, mais celle-ci n’aurait pas eu de suite, si la demande sociale n’était là, prête à se manifester." 1 Comme nous le rappelle Jacques ODIER dans le livre référence du MHGA, le projet d’habitat participatif, même si cela arrive moins souvent, peut tout à fait être initié par une institution, une association ou un professionnel plutôt que par les habitants eux-mêmes. Par exemple : dans le cas de l’opération 15 rue des Chevremonts à Nanterre datant de 1979 (cf. figure 7), c’est l’architecte de l’opération qui motive le projet. Il trouve un terrain et le propose par l’intermédiaire d’un article dans le Nouvel Obs’ pour la réalisation d’un projet d’habitat groupé autogéré. Le groupe se forme alors autour de cette initiative. Aussi, la place prise par le groupe n’est pas immédiatement prépondérante. L’architecte a d’abord la main sur les orientations du projet. Il faudra du temps pour que le groupe gagne en confiance et en cohésion pour finalement faire valoir correctement ses droits. De cette façon, même si l’idée de départ de l’architecte était de produire un ensemble bâti fonctionnant sur le modèle d’une copropriété conventionnelle, le groupe obtient petit à petit l’adjonction au projet d’espaces communs partagés qui correspondaient à sa volonté.

figure 7 - Opération à Nanterre de 1979 - Planche extraite du livre de BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives.P.65

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BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives.P.50

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

On constate à travers cet exemple que l’architecte de l’opération tient un rôle assez particulier. On aurait presque tendance à rapprocher sa démarche de celle d’un promoteur, mais il n’en est rien. En effet, le terrain n’a pas été directement acheté par l’architecte, mais bien par deux des membres du groupe d’habitants. Aussi l’architecte devient alors une sorte d’entremetteur, rendant le projet possible. Est-ce une façon d’accéder à la commande ? Probablement, c’est d’ailleurs ce qui est soutenu dans le rapport final au PUCA-Batex : "Outre l’écho que donnent les pratiques participatives à leur revendication d’une posture sociale et politique, celles-ci permettent à de jeunes architectes confrontés au sous-emploi voire au chômage un premier accès à la commande." 1 En ce qui concerne les opérations contemporaines, et plus largement, celles qui s’inscrivent dans notre seconde période d’étude, il semble que les architectes tiennent bien moins souvent ce rôle. D’une manière générale, les architectes des opérations d’habitat groupé participatif récentes sont très peu souvent futurs habitants, alors que dans les années 1970-80, près d’un tiers des opérations comptaient l’architecte parmi les membres du groupe. L’architecte et donc aujourd’hui plus considéré comme prestataire, au même titre que le banquier ou le notaire, que d’un réel partenaire. De ce point de vue-là, entre nos deux périodes d’étude, on constate une évolution du rôle de l’architecte. Nous préciserons quand même qu’à titre exceptionnel, il arrive encore que l’architecte intervienne en amont de la mission de maitrise d’œuvre pour faciliter le projet et obtenir la commande. C’est par exemple ce qui s’est produit dans le cas de l’opération du Verger de Sylvestre (cf. figure 8 et 9) où l’équipe d’architectes a acheté le terrain pour s’assurer de le bloquer. (Équipe hollandaise qui sera par la suite remplacée pour n’avoir pas maitrisé le coût de sa proposition après la phase d’Avant-Projet Définitif). Les architectes sont donc moins souvent initiateurs que dans les années 1970-80. Pour autant, la dynamique Top-down reste malgré tout d’actualité. Ce sont alors les associations et communes qui initient ces démarches allant vers les habitants et non depuis eux. Dans le cas de l’opération du Grand Portail à Nanterre par exemple, c’est la ville associée à un organisme publique d’aménagement (l’Epasa) qui initie le projet. Autre exemple : celui du Verger de Sylvestre que nous avons déjà évoqué (cf. figure 8 et 9). Ce projet d’habitat participatif est en effet né de l’initiative de la ville de Palaiseau. Un couple découvrant un jour que le terrain voisin du leur allait être mis en vente, décide de sensibiliser la mairie à la question de l’habitat groupé participatif pour éviter que le terrain en question ne soit récupéré par un promoteur pour être loti. La mairie décide de tenter l’expérience et _________________________________________________________ 1

BIAU, V., D'ORAZIO A., IOSA, L., NEZ, H. (2010), Habitat en autopromotion, étude de six cas franciliens. Rapport final au PUCA-Batex 2.P.41.

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

organise des réunions d’informations qui déboucheront sur l’engagement des quatre premiers membres d’un groupe qui sera bientôt suffisamment conséquent pour occuper dixsept logements. Notons ici qu’il s’agit partiellement de réhabilitation. Le bâtiment présent sur site se voit reprendre mais demeure et est alors accompagné de deux nouveaux bâtiments.

Figure 8 - Opération Verger de Sylvestre à Palaiseau – insertion1

figure 9 - Opération Verger de Sylvestre à Palaiseau - élévations1

En guise de conclusion, on retiendra qu’entre les années 1970-80 et 2000 les projets sont toujours le plus souvent initiés par les futurs habitants, ce qui est le plus cohérent avec la démarche d’habitat groupé participatif. Les projets s’inscrivant dans une démarche Topdown persistent malgré tout. En dépit de ces constances, l’architecte est quant à lui de moins en moins amené à être initiateur du projet. C’est un rôle qu’il ne se prête presque plus, à moins d’être un futur habitant inclus dans le noyau dur du groupe, ce qui est aussi plus fréquent durant notre première période d’étude, à savoir les années 1970-80. _________________________________________________________ 1

Documents trouvés sur le site de l’opération concernée : http://www.levergerdesylvestre.fr

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

STRUCTURATION COHESION DE GROUPE ET LEADERSHIP Une fois rassemblé autour d’un projet commun, le groupe commence donc son long périple vers la construction d’un projet qui lui ressemble et qui reste à définir. A ce stade, les membres se connaissent déjà un peu, pour s’être rencontrés, présentés et choisis. Toutefois ils ne sont qu’au tout début de leur aventure et la première étape qu’il leur faudra franchir sera de créer puis de conserver une importante cohésion de groupe, ce qui leur permettra plus tard de résister aux différentes épreuves qui les attendent. Cette cohésion, il leur faudra la défendre et l’entretenir tout au long du processus, soit pendant des années ; or dans ce genre d’opération qui place la sociabilité et le fait d’être "ensemble" au cœur du projet, réussir ce tour de force est le premier, et l’un des plus significatifs marqueurs de cet "être ensemble" réinventé. Le projet d’habitat groupé participatif représente en effet une importante série d’étapes et de difficultés à franchir, et partager une telle expérience en groupe en franchissant tant d’étapes pas à pas, crée inévitablement des liens particuliers. Viens alors la question de savoir comment se structure le groupe. En effet, la mise en place d’un système cohérent de prise de décisions est primordiale pour la pérennité du groupe. Cette remarque nous conduit à la notion de leadership. Savoir par qui et dans quelles conditions vont être détenues les commandes du groupe conditionne très souvent le succès ou l’échec de ce dernier. On remarque à travers les exemples que constituent les opérations des années 1970-80, ainsi que celles achevées dans les années 2000, qu’il existe plusieurs scénarios possibles. Il est des groupes dans lesquels aucun membre ne possède de compétences afférentes à la construction. Ces groupes, s’ils ne sont pas accompagnés par un professionnel de type AMO par exemple, développent leurs savoirs et compétences "sur le tas". La prise d’un leadership trop important par tel ou tel membre ou sous-groupe a alors moins de raisons de se produire qu’en présence de membres détenant au préalable des compétences particulières (dont dispose par exemple un ingénieur du BTP, un entrepreneur du bâtiment, un promoteur ou encore un architecte). "Tout comme d’autres chercheurs, nous avons relevé que, à la phase du projet tout au moins, tous les savoirs ne sont pas reconnus de la même façon. Des formes de leadership peuvent se créer au sein du groupe, légitimées par des savoirs professionnels." 1

_________________________________________________________ 1

BACQUE, M.-H. et BIAU, V. (2010), Habitats alternatifs: des projets négociés ? Rapport au PUCA.P.131.

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

Le risque engendré par une prise caractérisée du leadership au sein d’un groupe est de le voir se déséquilibrer entre les "sachants" menant et les "non-sachants" menés. Dans le cadre du projet Eco-logis mené à Strasbourg entre 2004 et 2010 (cf. figure 10), Brice, membre du groupe d’habitants, témoigne ainsi quant à la prise de leadership : "Moi j’avais une position un peu particulière parce que je connaissais les services à la CUS [Commune Urbaine de Strasbourg]. Je savais ce qu’il fallait faire, donc j’ai pris… sans que j’aie… j’avais pas de position réelle, mais ça se passe toujours comme ça dans les groupes : il y a toujours une sorte de leadership qui se monte. Donc j’avais une sorte de leadership tout simplement parce que quand il y avait des questions ils venaient me les poser à moi. Mais ça s’est fait comme ça. J’ai toujours fait énormément gaffe à ce que ce soit partagé, ce qui m’a demandé beaucoup de boulot parce que sur toutes les étapes j’ai fait beaucoup de pédagogie, de faire en sorte que tout le monde puisse participer et que personne ne soit largué en route." 1 On comprend ici que la position du leadership au sein d’un groupe soit parfois naturelle ou évidente. Pour garder une bonne cohésion il convient alors d’engager du temps et de l’énergie pour que le groupe avance d’un même pas. (cf. annexe n°3.2)

figure 10 - Opération Eco-logis à Strasbourg – élévation Nord

_________________________________________________________ 1

Portion d’entretient avec Brice, du groupe Eco-logis de Strasbourg, extrait de : DEBARRE, A. et STEINMETZ, H. (2010), Des expérimentations à l'épreuve de la négociation : des projets collectifs d’habitat pour un pour un développement durable. Rapport au PUCA.P.34

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

Le leadership, sa position et son partage au sein d’un groupe est donc une question déterminante dans la structuration de ce dernier. Notons par ailleurs qu’on retrouve cette question du leadership à une autre échelle, plus élargie : en effet, dans le système d’acteurs complexe que génère la promotion et la production d’un habitat groupé participatif, le groupe d’habitants lui-même doit trouver sa juste place. Au cœur de la démarche, il se doit de posséder le leadership pour faire valoir ses opinons et désidératas auprès des professionnels auxquels il aura inévitablement affaire. Il semblerait qu’il y ait trois facteurs principaux qui interviennent dans l’établissement de ce leadership : -

"le fait, pour le groupe d’habitants de disposer ou non des savoirs et savoir-faires qui vont permettre de convaincre les partenaires lors des négociations." 1 Architectes, constructeurs, juristes, promoteurs, banquier, employés municipaux etc. Autant de fonctions qui apportent au groupe des compétences à faire valoir devant les différents interlocuteurs extérieurs. -

"le fait d’être en position de choisir les principaux partenaires institutionnels et professionnels du projet et d’en gérer les interfaces, ou du moins d’y être présent." 1 Ce qui implique notamment que dans le cas d’un projet motivé par des institutions, professionnels ou associations (démarche Top-down), le poids du groupe dans le processus de projet sera a priori moindre que dans le cas d’un groupe lui-même initiateur, du moins dans un premier temps. Ce fut par exemple le cas dans les deux opérations réalisées à Nanterre que nous avons déjà évoquées, celle du Grand Portail et celle 15 rue des Chevremonts. Dans la dernière, le groupe prend peu à peu le leadership de lui-même, alors que dans la première, le groupe gagnera brièvement en importance de par un désintéressement progressif de la ville envers le projet, mais restera malgré tout mené par un promoteur qui rejoint l’aventure sans que le groupe n’ait été consulté. "le fait d’être le principal référent du projet dans la communication et/ou la médiatisation sur le projet et son image." 1 Ce dernier point découle souvent du degré d’implication des habitants dans le projet, mais de manière plus générale dans le mouvement pour l’habitat groupé participatif. Il est en effet des groupes dont les membres sont très sensibles à la démarche d’habitat groupé participatif mais n’en font pas pour autant un combat personnel. Dans le cas du projet des Frontailles à St Pierre d’Albigny (cf. figure 11), le petit groupe (3 familles), sensible à la question de l’habitat groupé participatif, décide d’engager une démarche. Ils confient la maitrise d’œuvre à Tangentes architectes, dont l’un des associés est issu d’un ancien groupe de projet, et est très -

_________________________________________________________ 1

BACQUE, M.-H. et BIAU, V. (2010), Habitats alternatifs: des projets négociés ? Rapport au PUCA.P.59.

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

engagé envers le mouvement pour l’habitat groupé participatif. Lors d’une visite du chantier, le groupe, qui à souhaité se réserver dans cette opération beaucoup d’autoconstruction, présente et défend ardement ce mode de construction. On se rend compte au fils du temps que c’est l’architecte qui promeut le projet comme celui d’un habitat groupé participatif et semble maitre de la communication à ce sujet. A l’inverse, lors d’une visite de l’opération le Verger de Sylvestre, l’un des membre se confit : " Bon c’est vrai que nous, si on s’organise pour participer aux journées portes ouvertes c’est aussi pour promouvoir un peu l’habitat participatif. Quelque part on est un peu militants et on veut convaincre les gens du bienfait de la chose. D’ailleurs, en fait le plus souvent on prêche des convertis." Dans ce cas-ci, on note une prédominance plus établie du groupe dans la communication extérieure que dans le cas du projet à St Pierre d’Albigny. Notons finalement que ce dernier point, relatif à la prédominance ou non du groupe dans la communication et médiatisation du projet, tend à expliquer en quoi une démarche Top-down prive spontanément le groupe d’une partie du leadership. En effet, il est d’une certaine façon légitime que l’initiateur du projet soit aussi l’un des représentants médiatiques de ce dernier. Ce qui n’empèche pas en soi le groupe de promouvoir sa démarche, mais le relègue malgré tout à un second plan.

figure 11 - Opération Aux Frontailles, St Pierre d’Albigny – photo personnel

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

LA CHARTE Comme une forme d’engagement, la charte qu’éditent et paraphent l’ensemble des membres d’un groupe de projet d’habitat groupé participatif témoigne d’une première entente préalable au projet. A ce stade, le groupe s’est entendu sur une idéologie commune, une intention de bâtir, et un mode de fonctionnement théorique qui seront bientôt à éprouver. Les points généralement traités dans la charte d’un groupe sont les suivant : - Objet du groupe ; Construire un ensemble immobilier avec telle ou telle caractéristique, l’entretenir et le gérer de telle ou telle façon etc. - Mode de décisions et de résolution des conflits ; Etablissement de règles de fonctionnement du groupe, décisions prise à la majorité absolue, majorité au 2/3, unanimité, consensus etc. - Structuration juridique, et questions financières ; Au moment de rédiger la charte, le groupe, encore jeune dans sa démarche, ne sait que rarement quelle forme juridique il adoptera. Toutefois il est courant de voir s’y profiler des intentions et prises de position. - Rapport et existence du groupe en interne, ouverture au quartier ; Il s’agit ici pour les membres d’établir comment ils définissent le groupe et dans quelles mesures ce groupe sera représenté comme tel en dehors du cercle de ses membres : existe-il dans la vie du quartier ou est-ce simplement un ensemble de membres ? - Gestion des départs et arrivées ; Un groupe se laisse en effet souvent la possibilité d’avoir un avis sur qui peut ou non le rallier et dans quelles conditions : ratifier la charte, accepter de partager le mode de vie du groupe, accepter de vendre ou d’acheter à tel prix du m² etc. - Modalités de révisions ; La charte faisant office de véritable constitution quant à la chose publique du groupe (res publica), il est alors souvent abordé la question de son éventuel mode de révision. - Intentions particulières ; Il arrive fréquemment de trouver un chapitre relatif à ce qui fait l’originalité du groupe ou à ce qui constitue sa plus grande cause. Il peut alors s’agir d’écologie, d’enjeux architecturaux ou sociologiques : mixité sociale, revendications intergénérationnelles etc.

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

A ce stade de la vie du projet, le rôle de l’architecte n’est pas encore une question d’actualité. Il n’est en effet, dans la plupart de cas, pas encore désigné. Dans l’exemple de charte proposé en annexe, (cf. annexe 2.2 et 2.3) c’est Paul Giaume, membre du groupe d’habitants de l’opération Hélix (cf. figure 12) et architecte de profession, qui la rédige. Il s’avère qu’il deviendra l’architecte du projet, mais au moment de rédiger la charte il n’en est pas fait mention. "Le groupe s’adjoint des compétences professionnelles qu’il juge nécessaires. Il recourt obligatoirement à un architecte et éventuellement à un conseil juridique et fiscal. […] Le groupe et l’ensemble de ses membres s’engagent assurer le paiement des intervenants professionnels dès que besoin." 1

figure 12 - Opération Hélix 1980-85, jardin partagé

_________________________________________________________ 1

Annexe 2.2, Charte du groupe Hélix, p.4 chapitre « la phase de préparation ».

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

COMMENT STRUCTURER LA PENSEE, QUEL ACCOMPAGNEMENT PREALABLE ? Tous les membres se sont maintenant fédérés autour d’une charte qui fige une première fois les attentes et objectifs du groupe qu’ils forment. Ce document constitue par ailleurs une ébauche du système de fonctionnement et de prise de décisions du groupe. D’après la chronologie type de la vie d’un projet tel que nous avons déjà vu (cf. figure 4), pour pouvoir prétendre passer en phase 2, c'est-à-dire la phase d’étude et de dépôt du permis de construire, le groupe doit s’engager dans une prospection foncière (si le terrain n’est pas déjà identifié, comme cela peut par exemple être le cas dans une logique Top-down), mais aussi dans l’établissement du préprogramme qui permettra notamment au groupe de fixer un dossier de financement. Il s’agit a priori des dernières étapes à franchir avant de devoir faire concrètement appel à une maitrise d’œuvre. Trois configurations peuvent alors se présenter : le groupe pourra réaliser ce préprogramme seul, avec un professionnel en son sein, ou bien encore en faisant appel à un accompagnement extérieur sous la forme d’une Assistance à la Maitrise d’Ouvrage (AMO). AMO qui peut être l’architecte de l’opération, désigné en amont de sa mission de maitrise d’œuvre. Toujours est-il que quel que soit l’accompagnement du groupe, pour se préparer à assumer la construction de son opération, il doit finir de se structurer et d’organiser le travail qu'il doit fournir. On trouve alors d’un groupe à l’autre, pléthores d’organisations différentes. Chaque groupe s’organise comme bon lui semble et il n’existe pas de méthode type permettant de faire aboutir à coup sûr le préprogramme rapidement et sans crises. Il est question pour le groupe de s’entendre sur les différents espaces communs qu’il envisage (atelier, salle polyvalente, potager, buanderie, cave, parking, chambre d’amis, pièce de réception etc.) ainsi que sur les besoins et aspirations de chaque membre pour identifier le contenu idéal et réaliste du futur projet, c’est-à-dire en tenant compte des possibilités réelles de financement de chaque ménage et finalement, du groupe. Régler au mieux ce préprogramme n’est pas chose aisée. Il semble que cette étape demande au groupe d’avoir deux qualités majeures : - La première donne souvent lieu à divers ateliers, plus ou moins ludiques, permettant d’identifier au mieux les envies et besoins de chacun. En effet, le groupe doit mettre en place un système d’indentification de ses capacités et besoins. - La seconde est celle d’être capable de se donner un environnement de travail contraint par des règles. Ce qui permettra aux membres d’avancer pas à pas ensemble en limitant le nombre d’éléments pouvant être remis en cause, notamment le système décisionnaire, la fréquence des réunions par exemple ou la méthode de travail. (cf. annexe n°3.1)

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

Dans son ouvrage1, Bruno Parasote donne quelques exemples de méthodes de travail :       

Le Bâton de parole : qui a le bâton a la parole. Le World café : discussions par tables séparées. Le 2-4-8 : technique de discussions par sous-groupe. Le jeu de rôles : procédé par mise en situation. Les cartes heuristiques : procédé par établissement de cartes de pensée. Les débats croisés : méthode consistant à donner son idée à l’autre qui la restitue alors. Le brainstorming : débat à bâtons rompus pour faire émerger toutes les idées possibles.

A titre d’exemple de règles, jeux ou questionnaires ludiques proposés aux membres d’un groupe de projet d’habitat groupé participatif, voir l’annexe n°2.1 dont il est fait un résumé dans l’encadré ci-dessous, et l’annexe n°2.4 qui propose un exemple de questionnaire ayant circulé au début des années 1980 au sein du groupe de projet Hélix au Meylan.

1/ Généralité : Nécessité d’une méthode permettant une élaboration INDIVIDUELLE et COLLECTIVE (sousgroupe / groupe). Par suite la mise en place d’une AUTOGESTION immédiate effective élargie à une gestion globale 2/ Propositions : - Pour chaque rencontre, REFLEXION ECRITE de chacun sur un ou plusieurs thèmes précisés à chaque fin de séance précédente. - COMPTE RENDU établi à chaque séance. - PRESENTATION à chaque séance d’un sujet travaillé auparavant en sous-groupe. […] 4/ Quelques jeux pour nos rencontres. a) Enumérer la liste de ce que je n’aime pas personnellement ex : la fumée de cigarette, absence de verdure etc. b) Prendre l’un après l’autre les éléments de l’habitat et préciser ce que le mot veut dire pour moi. ex : Couloir = passage, étranglement Bruit = musique cf. annexe 2.1 – Méthode de travail, document relatif au projet Hélix au Meylan

_________________________________________________________ 1

PARASOTE, B. (2011), Autopromotion, Habitat Groupé, Écologie et Liens Sociaux. Gap, Editions Yves Michel.P.88

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

En somme, l’établissement d’un préprogramme très précis est un atout pour le groupe au moment de constituer son ou ses dossiers de financement, mais aussi au moment de contacter et désigner la maitrise d’œuvre. Un véritable enjeu réside donc dans l’établissement de ce document. Cette remarque et d’autant plus vérifiée car il va s’agir pour le collectif de franchir les premières difficultés que représente le travail en groupe, tel qu’un besoin de structuration, de règles, de hiérarchie, de rigueur, d’écoute et de compréhension. Un accompagnement professionnel pour le groupe peut donc être un véritable atout. Ce rôle est aujourd’hui rarement attribué aux architectes, alors que c’était plus souvent le cas dans les années 70-80, du fait de la présence plus systématique des architectes au sein des groupes. Toutefois il arrive que certains architectes écopent d’une partie de cette mission : "L’architecte, dans une telle situation [de groupe non accompagné], a souvent en face de lui un maître d’ouvrage qui n’est pas prêt à définir des exigences pour un projet architectural, mais qui en est encore à la définition d’un projet de groupe et qui a besoin d’aide pour définir un programme." 1 Dans cette situation, l’architecte doit alors outrepasser sa mission de maitrise d’œuvre pour accompagner le groupe pour éviter qu’il ne s’égare.

_________________________________________________________ 1

MOHORIC, N. (2011), Le rôle de l'architecte dans la démarche d'habitat groupé en autopromotion. Nancy, ENSAN.P.79

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

QUEL MONTAGE JURIDIQUE ET FINANCIER ? Dans le cadre de notre étude, un développement sur les différentes options de structurations juridiques offertes aux groupes n’est pas nécessaire. Aussi, pour plus d’information sur cette question, il est possible de se référer aux différents ouvrages présentés dans la bibliographie, et notamment à celui de Bruno Parasote au chapitres intitulé : « la question des structures juridiques » 1. Pour un comparatif des statuts, cf. annexe n°4. Il convient malgré tout de comprendre que cette étape représente un véritable enjeu dans le cadre du combat des partisans de l’habitat groupé participatif, et en particulier des défenseurs du modèle de la coopérative d’habitants, pour faciliter la réalisation des opérations. Avec la nouvelle loi ALUR, ce volet de la structuration juridique a fait un bond considérable législativement parlant. S’offrent alors aux intéressés des possibilités d’associations particulières, réservées aux projets d’habitats groupés participatifs, résumées ainsi par l’association Les HabILeS (Habitats Isérois Libres et Solidaires) : 

Les coopératives d’habitants, dont l’objet social de ces sociétés est :

-

De fournir à leurs associés personnes physiques la jouissance d’un logement à titre de résidence principale (un décret précisera les conditions dérogatoires), D’entretenir et animer des lieux de vie collective, D’ouvrir la possibilité d’offrir des services à des tiers, associés ou non associés, dans un cadre défini (par décret en Conseil d’Etat), De prévoir la conclusion d’un contrat coopératif entre la coopérative et chaque associé, ainsi que les modalités de sa cessation.

les sociétés d'autopromotion, dont l’objet social de ces sociétés est :

-

D’attribuer à leurs associés la jouissance ou la propriété d’un logement à titre de résidence principale et d’entretenir et animer les espaces et locaux collectifs partagés qui y sont attachés. Un état descriptif de division décrit les lots qui constituent l’ensemble immobilier : certains lots sont à usage privatif (les logements) et d’autres lots sont à usages partagés (les locaux et espaces communs partagés). Les lots sont affectés aux parts sociales : acte d’« attribution des lots aux parts ».

Pour avancer, les groupes choisiront donc l’une, l’autre ou une tierce structure juridique : "Le choix du montage juridique et financier constitue un délicat dosage entre la volonté de transcrire les valeurs du groupe dans la forme de la propriété choisie et la nécessité de rendre faisable le projet en tenant compte de la situation financière de chacun." 2 ______________________________________________________ 1 2

PARASOTE, B. (2011), Autopromotion, Habitat Groupé, Écologie et Liens Sociaux. Gap, Editions Yves Michel.P.126 à 140. Article (2010), Le montage juridique et financier. Disponible sur le site de l’association Regain à l’adresse suivante : http://regain-hg.org

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

L'ARRIVEE DE L'ARCHITECTE Dans l’idéologie commune des groupes, c'est-à-dire celle partagée par la plupart d’entre eux, faire entrer un architecte dans la démarche de projet signifie une forme de passage à l’acte, souvent assimilé à un bond en avant vers la réalisation du projet. Dans tous les cas il s’agit d’une étape importante pour le groupe. Il est en effet question pour ses membres de réussir à soumettre leurs ambitions et projets de vie suffisamment clairement pour que le projet s’en ressente. L’efficacité de la collaboration avec l’architecte maitre d’œuvre sera par ailleurs fonction, au début du moins, de la pertinence du travail mené en amont par le groupe, seul ou accompagné, quant à la définition de ses besoins et attentes. Se pose dans un premier temps la question de savoir comment le choisir, sur quels critères, quelles références ? Comment procéder ? Nous nous attacherons ici à savoir s’il existe une manière plus ou moins conventionnelle de procéder ou non, éventuellement propre à chaque période, ou non. Dans un second temps le groupe devra identifier qu’elle sera la mission de cet architecte, ainsi que la manière de négocier son contrat… Autant de questions auxquelles les groupes sont confrontés et qu’il faut solutionner. Pour poursuivre notre étude, nous allons donc nous intéresser à ce qui se fait de nos jours tout comme à ce qui s’est pratiqué dans les années 1970-80 pour pouvoir identifier quelles sont les constances et les divergences entre ces deux périodes.

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

COMMENT LE CHOISIR, A QUEL MOMENT LE FAIRE INTERVENIR ? Le panel d’opérations menées dans les années 1970-80, ainsi que depuis la reprise du mouvement dans les années 2000, constitue aujourd’hui l’une des matières principales dans toutes études sur l’habitat groupé participatif. Considérant un tel habitat en projet, et d’après ce panel, il semble qu’il existe cinq méthodes répandues de sélection du futur architecte maitre d’œuvre. - La première se démarque particulièrement des quatre suivantes dans le sens où l’architecte n’est pas un intervenant extérieur au groupe, mais membre à part entière du collectif de futurs habitants, et porte la maitrise d’œuvre pour ce dernier. Il peut par ailleurs avoir été à l’origine du projet, tout comme intégré dans un second temps. On pourrait penser ici qu’il ne s’agit pas pour le groupe d’un réel choix de maitre d’œuvre, et que dans ce genre de situation c’est une évidence que de choisir l’architecte qui s’investit d'ores et déjà à ses côtés. Pourtant on constate que de nombreux groupes décident de ne pas confier le projet à l’architecte ou aux architectes qui pourraient être présents au sein du groupe. C’est par exemple ce qui s’est produit au "Lavoir du Buisson St Louis" : "En 1979, la promesse de vente du lavoir est signée, suivie de l’étape du choix d’un architecte. Pour des raisons d’égalité entre les membres, ces derniers décident de ne pas confier le projet à l’un des architectes du groupe et portent leur choix à l’unanimité sur l’architecte Bernard Kohn, suite à l’évaluation d’une douzaine de candidatures. Ce dernier avait un parcours particulier et une grande expérience de travail à l’étranger (Etats-Unis et Inde). De plus il semblait être très à l’écoute et convaincu de l’utilité d’une « démarche participative », comme il a pu le prouver à l’occasion de plusieurs projets." 1 On comprendra aussi que certains architectes membres d’un groupe de projet puissent d’euxmêmes refuser d’assumer la maitrise d’œuvre, le risque étant de voir la relation professionnelle entacher la relation amicale ou partenariale qui existe entre les membres d’un tel groupe. Par ailleurs, nous avons déjà eu l’occasion de remarquer que le nombre d’opérations comprenant en interne l’architecte diminue de plus en plus avec le temps. Notons que cette remarque se vérifie d’une part entre nos deux périodes d’étude, mais aussi au sein de chaque période. Par exemple, en ce qui concerne les années 70-80, déjà en 1983 Pierre Lefèvre écrit : "Les années passent, les groupes se multiplient et sont de plus en plus nombreux à devoir choisir un architecte à l’extérieur. L’architecte qui habite dans un groupe ne va pas déménager à chaque fois qu’un nouveau groupe sollicite ses services. _________________________________________________________ 1

BIAU, V., D'ORAZIO A., IOSA, L., NEZ, H. (2010), Habitat en autopromotion, étude de six cas franciliens. Rapport final au PUCA-Batex 2.P.81.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

Par ailleurs, d’autre architectes sont intéressés à travailler avec un groupe en formation." 1 Cette remarque donne toute la mesure de l’incongruité que représentait dans le premier temps des années 1970-80 le fait d’aller chercher un architecte en dehors du groupe de projet. - La seconde méthode, la plus répandue, de sélection d’un architecte pour un groupe de projet d’habitat groupé participatif consiste à demander aux intéressés des références ainsi que de quoi juger de leurs affinités envers la démarche engagée. C’est par exemple la méthode retenue par le groupe d’habitant du "Lavoir du Buisson St Louis" (cf. citation utilisée précédemment quant au choix de Bernard Khon comme architecte de l’opération). En général cette méthode de sélection sur référence pose un problème : "Les références des architectes français en matière de participation des habitants sont peu avérées, voire absentes de leur CV, faute d’avoir pu la pratiquer. Sur quels critères se négocie alors dans le collectif d’habitants le choix du maître d’œuvre ? " 2 Les habitants doivent finalement le plus souvent baser leur choix sur l’écriture architecturale des différents architectes qu’ils consultent ainsi que sur leurs positionnements quant à la question de la participation ou l’expérience dont il font montre sur des sujets divers et variés qui importent particulièrement au groupe, tel que la performance énergétique des bâtiments par exemple. D’une manière générale, l’expérience, à défaut d’être propre aux projets d’habitat groupé, sera toujours valorisée. - La troisième méthode est celle du concours. Plusieurs groupes d’habitants ont déjà eu recours à ce système, qui se rapproche de la procédure de la commande publique, pour pouvoir désigner leur maitre d’œuvre. On pourrait alors citer l’opération Strasbourgeoise d’Eco-Logis, qui met en place un « mini-concours » pour la réalisation de son bâtiment, comme en témoigne François Desrues, habitant du projet: " C’est un objet [le bâtiment du groupe Eco-Logis] qui a été conçu par un architecte allemand qui a répondu à un concours qu’on avait organisé en 2005, en groupement avec un architecte français qui suivait le chantier. " 3 _________________________________________________________ 1 2 3

BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives.P.122 DEBARRE, A. et STEINMETZ, H. (2010), Des expérimentations à l'épreuve de la négociation : des projets collectifs d’habitat pour un pour un développement durable. Rapport au PUCA.P.134. Extrait d’un entretien filmé avec François Desrues, habitant d’Eco-Logis, mené par Carole CONTANT le 4 décembre 2009 lors de la 4ème rencontre nationale de l’habitat coopératif et des coopératives d’habitants. Entretient disponible en ligne à l’adresse suivante : https://www.youtube.com/watch?v=S8YHPSgVFMo&feature=related

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

Dans le cas du projet Diapason avorté en 2012, le collectif habitants désigne une première équipe d’architectes puis se rétracte et organise un concours d’architecte duquel l’équipe Karawitz sortira lauréate (cf. figure 13 et 14). Ce mode de sélection par concours semble être une pratique plutôt développée durant notre deuxième période d’étude. Très peu d’opérations des années 1970-80 auront motivé de tels concours, la grande proportion d’architecte-habitants étant probablement l’un des facteurs de cette absence.

figure 13 – Vue du canal, réponse de l’équipe Karawitz au concours pour le projet Diapason

figure 14 – Vue du jardin, réponse de l’équipe Karawitz au concours pour le projet Diapason

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

- La quatrième méthode concerne les projets initiés par l’architecte lui-même. Dans ce cas deux hypothèses existent : dans la première, l’architecte s’envisage comme membre du groupe, ce qui nous ramène au cas précédemment abordé d’un architecte en interne, alors que dans la seconde, il demeure extérieur à celui-ci. Du fait de la fédération du groupe autour de cet architecte déjà en place, le groupe se voit privé, d’une certaine façon, du choix de son maitre d’œuvre. Nous avions déjà évoqué le projet du 15 rue des Chevremonts à Nanterre. Dans ce projet l’architecte achète le terrain et fédère un groupe d’habitants autour de ce dernier. D’une certaine façon, chaque membre choisit donc l’architecte en choisissant de faire partie du groupe. Du fait de la diminution du nombre de projets initiés par les architectes entre les années 197080 et 2000, cette méthode de sélection (qui dans le fond n’en est pas une), se fait plus rare de nos jours. Toutefois elle persiste, c’est l’un des enseignements que nous apporte un projet comme celui du Praxinoscope (cf. figure 15), projet en locatif social initié par un duo : ville (de Montreuil) et Thomas Huguen, architecte de l’opération via l’équipe d’Archi Ethic.

figure 15 – 3D du projet Praxinoscope à Montreuil. Source : site de l’agence d’architecture « Archi Ethic » http://www.archi-ethic.fr

La cinquième et dernière méthode parmi les plus utilisées par les groupes de projet d’habitat groupé participatif pour faire le choix d’un architecte est une méthode très privilégiée qui s’emploie aussi lors du recrutement de nouveaux membres dans un groupe en formation. Il s’agit en effet de prospecter dans le cadre familial, amical ou relationnel des membres déjà engagés dans le projet. Dans le cas de la désignation du maitre d’œuvre, il ne

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

s’agit pas tout à fait de cooptation car l’architecte n’intègre a priori pas l’opération en tant que membre du groupe, mais bien en tant que prestataire de ce dernier. C’est le cas par exemple de l’opération Couleur d’Orange (cf. figure 16), réalisée dans les années 1980 sur le territoire de la ville de Montreuil. L’architecte, qui exprime alors le souhait de ne pas habiter l’opération en question, est un ami de l’habitant initiateur du projet.

figure 16 – vue sur la cours du projet Couleur d’Orange à Montreuil.

Nous venons donc de voir cinq des méthodes les plus couramment employées par les groupes d’habitants pour sélectionner leur maitre d’œuvre. Cette énumération n’est bien entendue pas exhaustive et il existe des modes et critères de sélection moins répandus. On retiendra par exemple cette désignation assez particulière dans les années 1970-80 : "Le groupe de Poitier-la-Soléane veut d’abord se dispenser d’architecte. L’administration refuse le permis de construire et lui rappelle l’existence d’une corporation nécessaire pour tout projet autre qu’individuel. L’heureux élu habite à 300km de là, ce qui limite beaucoup les risques d’abus de pouvoir. « Nous l’avons choisi parce qu’il préparait la bouffe pendant que nous dessinions les plans. »" 1 Retenons donc que le choix de l’architecte reste le plus souvent du ressort du groupe et que par voie de conséquence, c’est ce dernier qui dicte les règles et critères qui mèneront à la désignation de tel ou tel architecte. Il pourra alors être intégré dans la démarche de projet dès les premiers instants, ou bien plus tardivement, avant ou après l’établissement du préprogramme, avant ou après avoir trouvé le terrain, pour réaliser une étude de faisabilité ou un avant-projet, ou bien encore pour la constitution du dossier de permis de construire etc. Tous les scénarios sont envisageables, l’important étant de bien identifier, dès le début de la collaboration, la ou les missions confiées à l’architecte. _________________________________________________________ 1

BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives.P.122

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QUELLES MISSIONS, QUEL CONTRAT ? La définition de la mission de l’architecte maitre d’œuvre et de son contrat engendre une série de questions que tout groupe doit résoudre, que l’architecte en question soit présent depuis le début de l’opération, pour avoir initié le projet et/ou pour en être futur habitant, ou qu’il soit intégré plus tardivement en tant que prestataire. Du fait de la maitrise d’ouvrage très particulière des projets d’habitat groupé participatif, multiforme et multi-incarnée, l’architecte se retrouve souvent projeté dans une pratique non conventionnelle de la maitrise d’œuvre, à laquelle s’ajoute bien souvent un accompagnement « en cours de route », c'est-à-dire non programmé et nécessaire, des groupes de projet :

C’est avec le souci d’éviter « que ça s’échappe un peu », que Michael Gies établit son contrat avec l’association Eco - Logis de façon claire en définissant le nombre et le temps des entretiens, collectifs et individuels. Ce cadre n’a pas empêché qu’il assiste à des réunions supplémentaires le week – end. De fait, son investissement important dû aux aléas du projet sur une longue durée, a fragilisé économiquement son agence. Le groupe Eco Logis n’en a pas pris conscience : " Il faut que les contrats soient clairs. Pas “on s’arrange à la fin”, pas “je te paie si ça aboutit”, des choses comme ça. Nous on voulait à chaque fois : tout travail fait est payé. L’archi, on lui paye sa planche, on le paie à l’avancement, il fait une modif de PC, on lui paie sa modif’ de PC. Et c’est vrai que pour ça en Allemagne, Gies est très dans ce système - là. Plus qu’en France. En France on a l’habitude que les archis bossent un peu à l’œil. En Allemagne, en tout cas dans sa philosophie, sa déontologie, pas du tout. On lui paie chaque truc, parfois même un peu trop, parfois même ça nous agace un peu parce qu’il va vraiment jusqu’au bout du truc. " - Entretien Brice Témoignage sur la relation contractuelle entre l’architecte et le groupe de l’opération Eco-Logis1

Le constat que nous pouvons faire à ce stade est que pour un architecte, travailler avec un groupe d’habitants comme maitre d’ouvrage d’une opération de logement induit inévitablement quelques spécificités dans la manière de procéder. Deux écoles s’affrontent donc. La première défend que, pour la pérennité de la collaboration architecte-groupe ainsi que pour celle du projet, il convient d’identifier les dites spécificités et de les prendre en compte au moment de rédiger le contrat qui liera l’architecte au groupe. Cette démarche, retenue par exemple, comme nous venons de le voir, par l’architecte Michael Gies pour l’opération d’Eco-Logis à Strasbourg, implique un contrat qui s’éloigne d’un contrat classique _________________________________________________________ 1

DEBARRE, A. et STEINMETZ, H. (2010), Des expérimentations à l'épreuve de la négociation : des projets collectifs d’habitat pour un pour un développement durable. Rapport au PUCA.P.137.

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

de maitrise d’œuvre. Ce caractère "déviant", ou "hors norme" semble représenter un frein à la réplicabilité des opérations d’habitat groupé participatif. Ce qui nous amène au combat de la deuxième école qui, cherchant justement à maximiser cette réplicabilité, prône l’utilisation de contrats "classiques", et propose d’absorber les spécificités de la démarche par le développement de l’accompagnement associatif et professionnel des groupes. L’idée étant de faire des opérations d’habitat groupé participatif, des opérations "comme les autres". A travers une publication de Février 2013, le Conseil National de l’Ordre des Architectes (CNOA), sous la plume de Cloud De Grandpré, s’inscrit dans cette dynamique de conservation d’un contrat "classique", quitte à développer une nouvelle mission "AAMOOP". En effet, parmi les quatre propositions imaginées par le CNOA pour soutenir le développement de l’habitat groupé participatif, voici la première : "Proposition 1 : Former, sensibiliser les architectes, et créer les conditions de leur exercice : favoriser l'émergence de pratiques professionnelles d'aide à l'autopromotion, « une AAMOOP », en créant une mission complémentaire dans les contrats d’architectes de marchés publics et privés d’« assistance et maîtrise d'œuvre architecturale auprès de la maîtrise d'ouvrage occasionnelle participative », afin d'apporter une compétence professionnelle respectueuse de la spécificité de la démarche, depuis la formation du groupe de futurs habitants, jusqu'à la gestion coopérative en passant par le montage opérationnel, la programmation, le projet dans ses différentes phases." 1 Cette attitude de promotion que tient aujourd’hui le CNOA envers la démarche d’habitat groupé participatif pour "inscrire les opérations dans le champ des montages courants" 2, tranche avec certaines postures tenues plus tôt, dans les années 50, 60 et 70 : "Ce système [mandarinat de l’ordre des architectes] s’est par ailleurs remarquablement prêté à la politique des grands ensembles qui permettait de multiplier les honoraires tout en diminuant les études. Avec l’habitat groupé autogéré, le processus s’inverse au point que les architectes concernés se demandent jusqu’à quel point héroïque il est possible d’augmenter les études tout en réduisant la commande au plus petit ensemble." 3

_________________________________________________________ 1 et 2 3

De Grandpré, C. (2013), Note sur l’habitat participatif. Publication du Conseil National de l’Ordre des Architecte.P.5. BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives.P.127

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En somme, la question du contrat est une question ouverte. Si dans les années 1970-80 cette question ne semble pas avoir motivé de grands débats, récemment on constate qu’une réflexion s’installe. Contrat classique avec mission complémentaire et optionnelle ou accompagnement extérieur, contrat particulier et négocié au cas par cas, les deux écoles argumentent et coexistent. Une attention se porte aujourd’hui sur la question du contrat de maitrise d’œuvre dans les opérations d’habitat groupé participatif car ces opérations particulières sont souvent longues et n’aboutissent que rarement. Il convient donc de trouver un contrat qui protège au mieux chaque partie et favorise la réussite de ces projets "risqués".

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, définition du projet

CONCLUSION L’habitat groupé participatif est une démarche, un processus. Il peut être initié par un futur habitant, un couple, un petit groupe, autour duquel va se rassembler d’autres membres pour constituer un collectif de futurs habitants et de projet. Cette démarche, ce processus, peut aussi être initié par une ville, un professionnel de la construction, une association etc. Cette initiation par le haut (Top-down), qui s’oppose à une initiation par les habitants (Bottomup), est plus rare mais se développe de plus en plus. A titre d’exemple, il est devenu possible de trouver au détour d’une rue des affiches d’appel à projet, comme cet exemple à Paris : Cette affiche, combinée à un site internet dédié dont sont extraits les bandeaux d’accroches présentés ci-dessous en figue 17, propose trois terrains pour trois constructions d’habitat groupé participatif. La désignation des groupes et de leurs projets se fera par jury successif. Cette démarche initiée par la ville de Paris montre au combien la question de l’habitat groupé participatif gagne du terrain et s’installe petit à petit dans la conscience collective. En effet, une telle campagne d’affichage, menée dans l’espace publique, dans les mairies, bibliothèques etc., contribue à diffuser la notion d’habitat participatif auprès d’un grand nombre de citoyens.

En ce qui concerne la structuration du groupe de projet, primordiale pour que ce dernier puisse tenir dans le temps et surmonter les épreuves qui l’attendent, nous avons vu que plusieurs forces sont à l’œuvre et doivent être comprises par le groupe. D’une part, il lui faudra s’organiser et se rassembler autour d’une charte, comme une forme de contrat passé entre les différents membres d’un groupe pour figer ses attentes et valider un système de fonctionnement interne qui fera office de règle. D’autre part, il lui faudra assumer un certain leadership de l’opération pour avoir un pouvoir décisionnaire prioritaire sur les intervenants extérieurs au groupe, administrateurs, financiers, maitres d’œuvre, constructeurs etc. Pour que le dialogue entre le groupe et lesdits intervenants soit efficace et productif, le groupe doit formuler un préprogramme le plus concis et le plus pertinent possible. Il organise alors en interne des sessions de travail et d’échange tout en étant ou non accompagné par une personne extérieure. Cet accompagnement, qui tend à être professionnalisé, constitue potentiellement pour les architectes une nouvelle mission contractuellement négociable avec les groupes. Dans les années 1970-80, ce rôle d’accompagnement était soit absent, soit tenu par les architectes ou autres professionnels du bâtiment présents dans les groupes d’habitants ; par ailleurs, tout comme aujourd’hui, le

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

réseau associatif de l’habitat groupé participatif pouvait tenir en partie ce rôle d’accompagnateur. Comme nous l’avons déjà évoqué, les architectes sont de moins en moins membre des groupes de projets. Ce faisant, on constate une forme de récupération de la mission d’accompagnement, quand elle existe, par d’autres professionnels du bâtiment comme les bureaux d’étude par exemple. En somme, en ce qui concerne l’évolution du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif entre nos deux périodes d’étude, on constate non pas une évolution du rôle d’accompagnateur qu’il a pu tenir, mais un déplacement de la position depuis laquelle s’effectue cet accompagnement quand il incombe encore aux architectes.

figure 17 – Bandeaux d’accroche du site internet : www.habitatparticipatif-paris.fr

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Chapitre 2 – Constitution du groupe, dÊfinition du projet

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

- CHAPITRE 3 MENER LE PROJET A TERME

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

MOTIVATIONS DES MAITRES D'ŒUVRE "Les six opérations étudiées, qui s’échelonnent au cours des trente dernières années, sont très significatives d’une évolution dans les motivations qui conduisent les habitants vers ce type d’initiative, d’une part, et d’une évolution dans les partenariats qu’ils tissent, avec les architectes et avec les collectivités publiques, d’autre part." 1 Les raisons et motivations des habitants à s’engager dans des opérations d’habitat groupé participatif auraient donc changées. En effet, nous avons vu qu’entre les années 197080 et aujourd’hui, la volonté de réinventer le lien social qui lie habituellement deux voisins ne disparait pas mais évolue et les habitants intègrent à leurs projet de nouvelles revendications et notamment écologiques, thème par ailleurs déjà existant lors de notre première période d’étude, mais alors encore tout à fait marginal. Les motivations habitantes ont donc évolué. Qu’en est-il alors des motivations professionnelles ? Est-ce qu’en trente ans les motivations des architectes à s’engager dans un projet d’habitat groupé participatif, auprès d’un groupe d’habitants maitre d’ouvrage, ont elles aussi évolué ? Dans un premier temps, nous verrons pourquoi les architectes ont un besoin de motivations particulières pour répondre à une commande d’habitat groupé participatif. Nous verrons ensuite quelles sont généralement ces possibles motivations et quelles furent-elles. Cette comparaison nous indiquera beaucoup sur l’évolution, entre nos deux périodes d’étude, du rôle de l’architecte dans le processus de projet d’un habitat aussi particulier que celui qui nous concerne.

_________________________________________________________ 1

BIAU, V., D'ORAZIO A., IOSA, L., NEZ, H. (2010), Habitat en autopromotion, étude de six cas franciliens. Rapport final au PUCA-Batex 2.P.41.

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

DES OPERATIONS "RISQUÉES" En France, le caractère expérimental des projets d’habitat groupé participatif, l’incertitude qui règne quant au bon achèvement des démarches engagées, la longue durée des opérations, la faible confiance généralement accordée aux groupes par les créanciers etc. sont autant de raisons qui peuvent inviter un architecte à bien réfléchir avant de s’engager dans une telle opération. S’ajoute à cela les expériences menées dans les années 1970-80 autour de l’habitat groupé participatif. Elles servent aujourd’hui à dresser un constat qui fait office d’argument d’autorité pour affirmer que la probabilité qu’une opération soit menée à terme est très mince. Anne Debarre et Hélène Steinmetz en témoignent ainsi : "De nombreux projets architecturaux participatifs sont aujourd’hui abandonnés, ou au point mort, et d’autres, qui ont pourtant abouti, ont connu de longues phases d’arrêt ou ralentissement. L’aboutissement est évidemment d’autant plus incertain que les acteurs aux intérêts divergents se multiplient et que des nouvelles façons de faire sont expérimentées dans le projet." 1 L’instabilité intrinsèque d’un groupe constitue une autre menace très importante pour le bon déroulement d’un projet d’habitat groupé. Il suffit par exemple qu’un membre décide de quitter le groupe en cours de route, quelle qu’en soit la raison (et il en existe de très nombreuses), pour que le montage financier de l’opération entière soit suffisamment ébranlé pour aller jusqu’à s’écrouler dans certains cas. Or ces départs impromptus sont légions dans l’histoire des groupes d’habitants. En effet, la réunion sous un même étendard de citoyens aux profils variés et aux revendications diverses, devant travailler ensemble pour emmener une opération immobilière, est sans aucun doute génératrice de conflits. L’un des membres de l’opération Anagram témoigne ainsi de sa première expérience d’habitat groupé : "Aux Crieurs, notre premier habitat groupé, il n’y avait pas une réunion sans clash, sans qu’une personne ne parte en pleurs !" 2 Les opérations d’habitat groupé participatif sont donc par essence risquées. Malgré tout, avec l’évolution du cadre législatif (adoption de la loi ALUR), et plus généralement avec l’engagement public grandissant en faveur de ce type d’opérations, nous sommes en droit d’espérer que les opérations pourront aboutir plus aisément. Par ailleurs, l’apparition d’un réseau d’AMO s’organisant, se professionnalisant, et se démocratisant au sein des groupes de projet, tend aussi à diminuer le caractère "risqué" des opérations d’habitat groupé participatif. (cf. figue 18) _________________________________________________________ 1 2

DEBARRE, A. et STEINMETZ, H. (2010), Des expérimentations à l'épreuve de la négociation : des projets collectifs d’habitat pour un pour un développement durable. Rapport au PUCA.P.199. PARASOTE, B. (2011), Autopromotion, Habitat Groupé, Écologie et Liens Sociaux. Gap, Editions Yves Michel.P.84

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

figure 18 – schéma indicatif du risque de non-aboutissement d’une opération au regard du système de promotion choisi1

C’est à cette instabilité latente du groupe, couplée à la longueur des démarches, ainsi qu’à la multitude des intervenants et des négociations à mener, que l’on doit le caractère "risqué" des projets d’habitat groupé participatif. On comprend alors qu’un architecte, avant de s’engager auprès d’un groupe de projet, doit trouver une ou plusieurs bonnes raisons de prendre la commande. Cette remarque est d’autant plus fondée que ces opérations ne sont que très peu rémunératrices. "Les architectes qui s’investissent dans ces opérations ont des motivations diverses à le faire." 2 _________________________________________________________ 1

2

Production personnelle, appuyée sur la publication de BESSIS, B. et BAILEY, G. (2013), L’habitat participatif : une solution pour le logement abordable ? Dossier du Centre d’Études Techniques de LYON, pour le ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie P6. BIAU, V., D'ORAZIO A., IOSA, L., NEZ, H. (2010), Habitat en autopromotion, étude de six cas franciliens. Rapport final au PUCA-Batex 2.P.49

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

QUELS INTERETS REPRESENTENT CES OPERATIONS POUR LES ARCHITECTES ? Nous voilà donc en présence d’opérations risquées et peu rémunératrices qui attirent malgré tout certains architectes. Pour en comprendre la raison, et en cerner l’évolution, nous avons regroupé les différentes motivations trouvées par les architectes en fonctions de nos deux périodes d’étude. Ainsi, nous avons des motivations plutôt propres aux années 1970-80, d’autres aux années 2000, et pour finir, des motivations qui se seront clairement maintenues d’une époque à l’autre. Notons ici qu’il s’agit de tendances et que l’énumération ci-dessous n’est pas exhaustive. En effet, on comprendra qu’il existe une myriade de raisons qui peuvent motiver un architecte à se lancer dans une opération, fut-elle risquée.

Motivations trouvées par les architectes, valables dans nos deux périodes d’étude : 1) Questionner l’habitat, les typologies.

L’habitat groupé participatif propose en effet aux architectes d’élaborer un bâtiment de logement en connaissant a priori les futurs habitants et usagés. Il ne s’agit donc plus de projeter un produit immobilier standard mais bien un habitat, un lieu de vie sur lequel peut être portée une véritable réflexion quant au bien-être d’un ensemble d’habitants spécifiques. Par exemple, on sent bien cette réflexion se développer à travers les documents d’analyse et questionnaire que produit Paul Giaume, architecte et membre du groupe Hélix dans les années 80 (cf. figure 19 ci-dessous).

figure 19 – Dessin produit par Paul Giaume, extrait de l’annexe n°2.7 : l’architecte, p.1

L’envie de travailler sur une opération permettant une recherche sur la question de l’"habiter" et offrant la possibilité d’inventer ou de réinventer des typologies peut s’avérer être, pour un architecte, une raisons suffisante pour s’investir auprès d’un groupe d’habitants.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

Inès Lauer en témoigne ainsi : "Travailler avec des autopromoteurs, c’est à la fois un risque, mais aussi un atout. On est sûr de l’intérêt que les futurs habitants portent à leur projet, à leur habitat, et à sa qualité. Alors que ce n’est pas toujours le cas avec des promoteurs, qui cherchent le bénéfice." 1

2) Rapprochement idéologique avec les valeurs portées par un groupe / militantisme. Cette idée d’un rapprochement idéologique a conduit dans les années 1970-80 nombre d’architectes à s’inscrire au sein même du groupe. Aujourd’hui, nous l’avons vu, les architectes sont moins systématiquement membre des groupes pour lesquels ils construisent. Toutefois : "Quelques-uns [des architectes] sont alternativement, dans ces projets, des professionnels exerçant une activité rémunérée et des militants d’une nouvelle cause, celle de l’habitat participatif, dont ils assurent bénévolement la promotion." 2 Sans s’inscrire directement dans un groupe, il existe donc aujourd’hui des architectes qui partagent certaines valeurs portées par le mouvement de l’habitat groupé participatif et s’engagent alors auprès de groupes pour pousser au développement de ces opérations, quitte à le faire en sachant qu’elles seront très peu rémunératrices et potentiellement difficiles à aboutir. D’où le qualificatif d’un travail fait "bénévolement" employé par Anne Debarre et Hélène Steinmetz dans la citation précédente. Par ailleurs, Véronique Biau, dans son article "Les architectes de l’habitat participatif, entre militance et compétence", publié le 30 janvier 2012 sur le site internet métropolitiques.eu, propose que ces architectes, sensibles à la démarche d’habitat groupé participatif, ont souvent déjà travaillé sur l’un des trois sujets suivants : - Le logement collectif social. - Le projet urbain dans des dispositifs de concertation. - Plus récemment, les éco-quartiers.

_________________________________________________________ 1

2

D’après un entretien avec l’architecte Inès Lauer, architecte de l’agence Gies Architekten mené par Nicolas Mohoric et présenté dans : MOHORIC, N. (2011), Le rôle de l'architecte dans la démarche d'habitat groupé en autopromotion. Nancy, ENSAN.P121. DEBARRE, A. et STEINMETZ, H. (2010), Des expérimentations à l'épreuve de la négociation : des projets collectifs d’habitat pour un pour un développement durable. Rapport au PUCA.P.20.

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

Motivations trouvées par les architectes dans les années 1970-80 :

1) Un moyen de rénover le lien social. Rappelons ici que le mouvement initié dans les années 1970, que l’on appelait alors l’habitat groupé autogéré, découle en partie des revendications de mai 1968. En effet, c’est entre autre l’envie de rénover les liens sociaux qui existent entre les différents membres d’une société qui, dans le domaine de la construction et spécifiquement dans celui de l’architecture, a donné forme à ce mouvement. Les architectes, à qui incombe une certaine responsabilité sociale 1, s’emparent alors de la problématique et certains s’engagent finalement dans des opérations d’habitat groupé autogéré. Notons que leur marge de manœuvre pour traiter cette question du renouveau des liens sociaux se situe alors moins dans la programmation au travers du partage d’espace particulier tel qu’une buanderie, une salle commune, ou un potager, mission qui revient plutôt au groupe en lui-même, que dans la recherche d’une "intensification des relations par les circulations et les imbrications" 2. Il convient ici d’apporter une précision. Dans les années 1970-80, le caractère risqué des opérations qui nous concernent n’était pas établi de la même manière qu’aujourd’hui. Le matériel de comparaison alors à disposition, offert par l’histoire, était bien moins étoffé qu’aujourd’hui. Il faudra attendre la fin des premières opérations pour commencer à mesurer leur complexité. Aussi, le plus grand challenge des architectes de cette époque ne réside peutêtre pas dans le fait de s’engager dans une opération peu rentable et non sécurisante, mais bien de remettre en cause une partie de leur autorité professionnelle : "Ils font partie, il faut le préciser, d’une nouvelle génération d’architectes, sans nœud papillon et ne se prenant pas pour les démiurges mégalomanes qui mettaient la société au cordeau dans les années passées. Ils n’ont plus rien non plus du grand bourgeois éclairé ou de l’aristocrate-artiste d’antan. Ils sont eux aussi sensibilisés aux contradictions de leur profession, et ont cherché à les résoudre en revendiquant ou en provoquant le contact direct avec le client, d’autant plus qu’il était collectif, quitte à une perte de leur pouvoir de spécialistes." 3

_________________________________________________________ 1

Thème très défendu dans l’ouvrage de LA CECLA, F. (2010), Contre l’architecture. Traduit de l’italien par Ida MARSIGLIO. 2 et 3 BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives.P.125 puis P.22.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

2) Un moyen d’accéder à la première commande. Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer le contexte très tendu de l’emploi à cette époque. Nous sommes au sortir des trente glorieuses, et vient d’être enregistré le premier choc pétrolier. Le gain de popularité de la question de la participation génère des opportunités, comme offertes aux architectes, de constituer des groupes de projet pour réaliser une première construction. Ces opportunités sont alors saisies par certains d’entre eux.

Motivations trouvées par les architectes dans les années 2000 : 1) Se positionner en passeur.

Depuis la reprise du mouvement dans les années 2000, on constate une assez forte présence d’architectes d’origine allemande, belge, danoise ou néerlandaise dans les projets d’habitat groupé participatif. Du fait du plus fort développement dans ces pays des questions relatives la participation des futurs habitants dans le projet architectural, ces architectes qui arrivent en France pour des raisons diverses et variées y sont souvent plus sensibilisés que les architectes français. Parfois même ont-ils déjà d’ores et déjà eu l’occasion de mener une opération d’habitat groupé dans leur pays d’origine, ce qui leur permet d’offrir aux groupes à la recherche d’un maitre d’œuvre des références intéressantes. Il arrive alors que cette sensibilisation les invite à s’investir en France dans une opération d’habitat groupé participatif. Ils se retrouvent finalement dans une position de "passeur", transférant dans le contexte professionnel français un savoir-faire acquis ailleurs. Ce fut par exemple le cas de l’opération Eco-Logis à Strasbourg, avec pour architecte Michel Gies, un Allemand ayant déjà pratiqué la participation auparavant. Ce fut aussi le cas de l’opération Diapason, liée à l’agence Karawitz qui regroupe notamment des d’architectes allemands et bulgares.

2) Médiatisation de l’agence / Introduction auprès des institutions / Occasion de se diversifier. L’une des raisons les plus convaincantes qu’ont trouvées les architectes pour s’engager dans une opération d’habitat groupé participatif réside dans le fait que ces opérations soient très "à la mode". "La nouveauté (ou le renouveau) du phénomène, qui donne lieu à une certaine amplification par les médias, n’est pas sans attrait non plus pour les architectes qui coopèrent à ces opérations. Ils y voient un effet de tremplin, soit pour faire connaître leur agence débutante, soit pour faire identifier dans le domaine de l’habitat une agen-

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

-ce plus confirmée, mais tournée vers d’autres programmes. […] Nombre d’opérations se font d’ailleurs dans un partenariat très étroit entre le groupe d’habitants et les élus et techniciens locaux. Dans ce contexte, accéder à une commande privée de ce type apparaît comme une occasion privilégiée d’accéder aux décideurs publics locaux et à une éventuelle commande ultérieure." 1 En effet, avec la parution d’ouvrages tels que celui d’Yves Connan en 2012, titré : Habitat groupé participatif, ou celui de Bruno Parasote en 2011, titré : Autopromotion, Habitat Groupé, Écologie et Liens Sociaux, ou bien encore celui de Christian La Grange en 2008 : Habitat Groupé, les opérations d’habitats groupés participatifs semblent être systématiquement publiées. Cette occasion de faire médiatiser son agence à travers un projet pour sa particularité semble comme effacer les difficultés induites par cette même particularité. Ainsi, pour cette raison, même s’ils l’avouent rarement, nombre d’architectes s’engagent auprès de groupes pour réaliser une opération de ce type. On remarque d’ailleurs que dans l’immense majorité des cas, les architectes ne réalisent qu’une seul opération. Rare sont ceux qui rempilent comme l’a fait Michel Gies ou, dans les années 1970-80, Claude Bouvier.

3) Défi constructif / performance. Du fait des revendications contemporaines, alors souvent mises en avant par les groupes d’habitants, de vouloir construire un bâtiment très respectueux de l’environnement et le plus performant possible du point de vue de l’énergie, certains architectes prennent la commande de ces groupes avec en tête l’idée de pouvoir réaliser un bâtiment qui fera office de référence, voire de carte de visite, pour accéder ultérieurement à d’autres programmes axés sur la performance technique et/ou l’écologie. En effet, la question de la performance énergétique prend de plus en plus de place dans le monde de la construction. Si dans les années 1970-80 certains architectes voyaient les projets d’habitats groupés participatifs comme l’occasion de contracter leur première commande, il semble qu’aujourd’hui ces projets soient alors plutôt vus comme l’occasion de réaliser une première commande intégrant une vraie démarche environnementale, à valoriser dans un second temps.

_________________________________________________________ 1

BIAU, V., D'ORAZIO A., IOSA, L., NEZ, H. (2010), Habitat en autopromotion, étude de six cas franciliens. Rapport final au PUCA-Batex 2.P.50.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ? 4) Espoir de voir les projets d’habitat groupé participatif se multiplier et pouvoir alors se positionner en tant que spécialiste pour s’assurer la commande. Le système français d’attribution des commandes aux architectes repose essentiellement sur la question des références. Une agence qui veut se positionner sur la réalisation d’une salle des fêtes municipale par exemple n’a que très peu de chances de l’obtenir si elle n’a jamais réalisée de programme similaire auparavant. De la même manière, dans le cas des projets d’habitats groupés participatifs, la question des références tient encore une fois un rôle prépondérant. On constate alors que certains architectes "misent" sur une croissance de ce type de commande, et s’engagent fortement auprès de groupes d’habitants, espérant probablement faire office de référence auprès des futurs groupes de projet, au moment de désigner l’architecte. C’est notamment le point de vue exprimé par Anne Debarre et Hélène Steinmetz : "D’autres [architectes] ont clairement le souhait d’inventer une nouvelle niche professionnelle dont ils espèrent obtenir le quasi-monopole." 1

5) Démonstration d’une capacité à construire, même dans un cadre "difficile". Cette cinquième et dernière motivation que nous allons citer, trouvée par les architectes des années 2000 pour investir le champ des opérations d’habitat groupé participatif, consiste en la formation d’une "preuve" de confiance. En effet, le caractère complexe ou difficile du travail en collaboration avec un groupe d’habitants n’échappe aujourd’hui à personne. Aussi le fait d’avoir réussir à mener à terme une opération d’habitat groupé participatif peut contribuer à établir une certaine marque de confiance dont pourra jouir ultérieurement l’agence pour remporter des commandes. En conclusion, si les opérations d’habitat groupé participatif sont qualifiables de "risquées", entre 1970-80 et aujourd’hui les architectes auront toujours trouvé des motivations et raisons de s’engager dans les différentes opérations. D’après l’analyse desdites motivations types entre nos deux périodes d’étude, on remarque que très peu d’entre elles ont subsisté de l’une à l’autre (2/9), et qu’un véritable glissement s’opère, allant de la figue de l’architecte militant à celle de l’architecte sympathisant et "calculateur". Ce glissement pourrait-il expliquer en partie l’évolution du rôle de l’architecte dans ces opérations d’habitat groupé participatif ? _________________________________________________________ 1

DEBARRE, A. et STEINMETZ, H. (2010), Des expérimentations à l'épreuve de la négociation : des projets collectifs d’habitat pour un pour un développement durable. Rapport au PUC

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

METHODES DE TRAVAIL LE TRAVAIL DES ACCOMPAGNATEURS Pour pouvoir aborder convenablement la question des méthodes de travail mises en place entre les groupes d’habitants et leurs architectes, faire un point semble nécessaire quant à la définition du rôle de l’Assistance à la Maitrise d’Ouvrage (AMO). Nous avons déjà eu l’occasion de croiser cet acteur, il convient maintenant de le présenter et de comprendre ce qu’il apporte dans le cadre d’un projet d’habitat groupé participatif. En effet, comprendre son rôle est essentiel car il s’agit d’un acteur "nouveau". Sa présence, même si elle est encore loin d’être systématique, représente donc un changement entre nos deux périodes d’étude. Une première hypothèse nous inviterait à penser que cette présence est susceptible de justifier, dans une certaine mesure, l’évolution du rôle de l’architecte dans les opérations qui nous concernent. Une autre hypothèse serait que son apparition fait justement suite à cette évolution, une partie du rôle tenu par les architectes n’étant plus assuré par ces derniers, l’AMO viendrait alors se charger de la mission vacante… L’AMO aide le groupe à préciser ses besoins et le conseille en termes juridiques et financiers pour :     

Expliciter leurs règles de fonctionnement et rédiger une charte de gouvernance ; Poser les bases de la forme juridique qu’ils jugent pertinente pour mener à bien leur projet ; Concrétiser la faisabilité financière du projet et envisager les sources de financement complémentaires possibles ; Établir un programme détaillé du projet qui servira de base aux échanges avec une équipe MOE ; Faciliter la relation avec l’équipe MOE afin de garantir le respect du cahier des charges.

Cette présentation faite du rôle de l’AMO est extraite du site dédié à l’appel à projet pour trois habitats groupés participatifs à Paris : http://www.habitatparticipatif-paris.fr

L’AMO ne prend donc pas la responsabilité de la maitrise d’ouvrage. C’est un conseil, un accompagnateur, a priori professionnel de la construction ou du bâtiment, qui veille à ce que le groupe soit productif d’une part, et d’autre part, efficace au moment de dialoguer avec les intervenants extérieurs tels que les architectes, administrateurs ou banquiers par exemple. En d’autres termes, il contribue à faire du groupe un porteur de maitrise d’ouvrage le plus conventionnel possible. Bien entendu, et malgré la présence d’un AMO, cette maitrise d’ouvrage garde toujours certaines particularités, dont le caractère multi-incarné, mais permet de proposer aux maitres d’œuvre un cadre de travail proche du cadre "classique". Ce qui permet aussi d’envisager plus raisonnablement une forme de réplicabilité du modèle de production de logement qu’est l’habitat groupé participatif.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

Le schéma ci-contre retrace étape par étape l’accompagnement proposé par la CUADD au groupe d’habitants du projet Le Grand Portail à Nanterre. On se rend compte que pour permettre au groupe d’être complétement autonome dans sa démarche, il lui faut passer par une phase de "sensibilisation", et même de "formation". Ce rôle de "formateur", s’il n’est pas assuré par un AMO ou par un membre du groupe, revient alors la plupart du temps aux architectes, qui doivent mettre en place des méthodes de travail et de communication particulières. Quant à savoir aujourd’hui d’agir en précisons qu’il n’existe formation conduisant à Toutefois :

qui se propose qualité d’AMO, encore aucune cette fonction.

"Une formation spécifique à ce métier d’accompagnateur est à l’étude actuellement à l’échelle européenne." 1 Ce sont alors soit des architectes soit des bureaux d’études techniques qui se proposent pour cette mission. Par ailleurs, on note ces dernières années l’apparition de structures plus ou moins spécialisées dans l’assistance à maitrise d’ouvrage, telle la société INSULA PLACE par exemple, ou la structures de conseil CUADD crée en 2006.

figure 20 – Autonomisation du groupe d’habitants2

_________________________________________________________ 1 2

DEBARRE, A. et STEINMETZ, H. (2010), Des expérimentations à l'épreuve de la négociation : des projets collectifs d’habitat pour un pour un développement durable. Rapport au PUCA.P.20. Document produit par la CUADD, bureau d’étude qui a joué le rôle d’AMO pour le projet du Grand Portail à Nanterre (cf. plaquette : Chronique d’un projet d’habitat participatif, produit par la CUADD).

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

DES OUTILS CONVENTIONNELS, DES OUTILS PARTICULIERS Dans le cadre le plus rependu de l’exercice de sa profession, l’architecte, pour échanger et travailler avec ses clients et autres intervenants extérieurs, est un producteur de pièces graphiques. Pour travailler, tout comme pour rendre compte de l’avancement de son travail, il produit essentiellement des plans, coupes et élévations. Ces documents, dont il dispose, sont de véritables outils, très utiles pour communiquer un projet, à la condition expresse que l’interlocuteur qui les reçoit soit à même de les interpréter. Dans la plupart des cas cela ne présente pas de difficulté particulière puisque que le porteur de la maitrise d’œuvre est un professionnel du bâtiment. Dans le cas de la production de maisons individuelles, la question de la communication commence alors à se poser. Heureusement, la présence d’un interlocuteur unique (ou d’un unique couple) permet d’envisager la construction d’une méthode d’échange assez facilement, comme en témoigne Bernard Kohn : "Ce qui se passe c’est que quand ils [le groupe d’habitants du Lavoir du Buisson St Louis] se réunissent entre eux, comme c’est tous des gens qui on étudié le droit… ou qui ont des affinités avec un tas de sujets, ils reviennent à la prochaine réunion avec des questions pour lesquelles on n’est pas préparés. C’est très différent d’une relation avec un client où, après un certain temps, on commence à parler un langage commun. Là ça rajoutait une dimension beaucoup plus… je ne dirais pas conflictuelle, mais où l’architecte doit être un petit peu sur le qui-vive et accepter d’être sur le qui-vive. Moi je trouve cette situation-là très enrichissante." 1 On comprend alors que la présence d’un groupe comme interlocuteur demande à l’architecte de développer certains outils de communication à ajouter à sa panoplie habituelle. Ce besoin d’outils adaptés est d’autant plus important que le groupe ne dispose ni d’un accompagnement de type AMO, ni de compétences en interne à travers un ou plusieurs membres qui pourraient tenir un rôle de formateur ou d’interlocuteur privilégié. Entre les deux périodes qui nous concernent dans le cadre de cette étude, il est possible de constater une certaine évolution des outils utilisés par les architectes pour travailler et échanger avec les groupes. Toutefois il convient d’apporter une précision : cette évolution ne semble pas trahir un glissement du rôle de l’architecte dans ce genre d’opération. Il s’agit en effet d’une évolution directement induite par l’apparition des modes de représentations numériques qui ont bouleversés la profession entre nos deux périodes d’étude. Dans certains cas, le croquis et le plan comme outils de communication s’est alors vu remplacé par la maquette numérique. Cependant, malgré l’importance de la place prise par l’outil informatique, les architectes de l’habitat groupé participatif en utilisent bien d’autres. _________________________________________________________ 1

Extrait d’une interview filmée de Bernard Kohn au sujet de l’opération du Buisson Saint-Louis, vidéo disponible en ligne à l’adresse suivante : https://www.youtube.com/watch?v=YLzX2oLlC1I

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ? Outils conventionnels -

Le Géométral : plan, coupe, élévation Le schéma (cf. figure 21) Le croquis (cf. figure 22) La maquette La maquette 3D / avec ou sans rendu (cf. figure 23) Les échantillons de matériaux L’entretien individuel L’exposition de références

Outils particuliers -

L’organisation d’ateliers L’organisation de "voyages d’études" Les visites de chantiers L’entretien collectif Le questionnaire à compléter (cf. annexe n° 2.4) La mise en situation, le jeu de rôle

figure 21 – Ensemble de schémas produit par Paul Giaume, architecte du groupe Hélix. (cf. annexe n°2.7)

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

figure 22 – Ensemble de croquis produit par Laurent Bonne, architecte du projet Ecolline achevé en 2011.

figure 23 – Maquette 3D du projet du Verger de Sylvestre – projet en cours.

En cherchant à comparer quels outils ont effectivement été utilisés par les architectes dans les années 1970-80 puis dans les années 2000, on constate qu’hormis l’impact produit par la démocratisation de l’ordinateur dans les agences d’architecture, il n’y a pas d’apparition ni d’abandon significatif d’aucun outils. "Au début on a beaucoup travaillé en 3D parce que c’est ce qu’il y a de mieux pour se rendre compte de l’imbrication des volumes et de la position des logements les uns par rapport aux autres. Du coup à chaque séance on venait avec des axonométries et on expliquait pourquoi on avait fait ces choix-là. Après on a travaillé en plan, mais plus avec chaque famille sur leur projet personnel…" 1 _________________________________________________________ 1

Propos recueillis en 2013 lors d’un entretient avec l’équipe de l’agence Tangentes architectes, maitre d’œuvre de l’opération des Frontailles à St Pierre d’Albigny.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

Du point de vue des méthodes de travail, il n’existe aucune norme, tout au plus des tendances. En effet, chaque projet d’habitat groupé participatif semble être un cas particulier. Ce caractère exceptionnel résulte notamment de la singularité de chaque groupe, mais aussi de son type d’accompagnement (quand il existe), de l’implication et du positionnement de l’architecte mandaté quant à la démarche d’habitat groupé etc. Chaque architecte va alors imaginer sa relation au groupe de manière différente, utiliser les outils qui lui semblent adaptés et finalement mettre en place des méthodes de travail personnalisées. "Michael Gies élabore ces dispositifs architecturaux, dans une forme de bâtiment qui allie performances énergétiques et économie du projet, et cette méthode pour donner un cadre aux interventions de chacun des co-producteurs d’une opération en autopromotion : s’il est respecté, il n’y aurait alors plus de négociations entre le maître d’œuvre et les futurs habitants, mais une simple participation de leur part." 1 Comme Michael Gies, certains architectes proposent rapidement au groupe un ensemble de principes architecturaux indéformables, offrant l’occasion aux habitants d’agréger leurs envies et leurs projets à ce cadre figé. D’autre commencent en étant plus didactiques et proposent la mise en place de divers ateliers. Ces ateliers ont généralement pour but de permettre au groupe d’entrer petit à petit dans l’univers de la construction et d’en acquérir les codes pour finalement ériger les membres en quasi-professionnels2. Par ailleurs, ces deux approches peuvent tout à fait se combiner. On remarque en effet que toutes les méthodes de travail sont potentiellement bonnes à partir du moment où elles permettent l’échange entre le groupe et l’architecte. Tout comme pour l’évolution des outils utilisés par les architectes dans ce genre de projet, les méthodes de travail mises en places semblent n’avoir que très peu évolué ; de plus, comme en pendant à l’introduction de la représentation informatisée dans les outils à disposition de l’architecte, la principale évolution que nous devons remarquer quant aux méthodes de travail réside dans l’introduction grandissante d’AMO au sein des groupes. En effet, dans le cadre d’un groupe de projet encadré par un AMO, ce n’est théoriquement plus à l’architecte d’imaginer ces méthodes ou de les mettre en place. Cette remarque va dans le sens de notre constat précédent, à savoir que la présence d’une Assistance à Maitrise d’Ouvrage permet d’absorber en partie les particularités d’un projet d’habitat groupé participatif pour proposer aux maitres d’œuvre des missions de plus en plus conventionnelles. En cela on constate, dans le cadre des opérations qui nous concernent, une évolution du rôle de l’architecte entre les années 1970-80 et 2000. _________________________________________________________ 1 2

DEBARRE, A. et STEINMETZ, H. (2010), Des expérimentations à l'épreuve de la négociation : des projets collectifs d’habitat pour un pour un développement durable. Rapport au PUCA.P.144 D’après la formule utilisé chap.4 de la publication : BACQUE, M.-H., BIAU, V. (2010), Habitats alternatifs: des projets négociés ? Rapport au PUCA. p83

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

LA GESTION DU CONFLIT INTERET DE LA THEMATIQUE CONFLICTUELLE L’étude de la question du conflit, des sujets sensibles aux modes de résolution, est un thème très révélateur de la place et position de chaque acteur au sein du projet. C’est donc un sujet qui semblait tout à fait intéressant et sur lequel je plaçais beaucoup d’espoir. Or au fils des rencontres et des divers entretiens menés, j'ai pris conscience d’un phénomène très puissant et tout à fait sous-estimé, à savoir : la "mystification"1 du récit. "Comment améliorer les relations entre groupes et architectes ? Peut-être en faisant connaître à eux qui démarrent, l’histoire non-idéalisée des autres réalisations et les problèmes rencontrés pour leur permettre de mieux situer les leurs. Etre conscient de l’existence des problèmes, c’est déjà presque les résoudre." 2 En effet, que le projet soit en cours ou a fortiori conclu, on constate que le récit délivré par les membres de groupes de projet s’entache naturellement d’une forme d’adoucissement et semble pâtir d’une mise à plat générée par le temps, sans aucun besoin d’un acte réfléchi, à mesure que le récit se délivre encore et encore. Il est important de préciser qu’ici cette "mystification" n’est pas un acte calculé, mais bien une altération progressive des faits que l’on peut constater en de nombreuses occasions. De manière générale il semble que ce soit une déformation produite d’une part par la répétition, et d’autre part par un ajustement inconscient opéré après chaque récit en fonction de la façon dont il est reçu ou par confrontation avec une autre personne livrant sa version du même récit. Autrement dit, le simple fait que les habitants de ces opérations d’habitat groupé participatif soient invités à livrer leurs expériences à de nombreuses reprises, cumulé à l’effet de groupe qui induit une forme de reconstruction du récit personnel pour approcher un récit commun, renvoie le témoignage authentique des habitants dans des sphères cachées de l’esprit que seul le temps et la confiance permettent d’atteindre. C’est donc grâce aux différents travaux de recherches qui se sont inscrits dans la durée que nous disposons aujourd’hui de la matière d’étude suffisante pour rédiger ce chapitre dédié à la question du conflit. Nous allons donc pouvoir aborder les différents sujets identifiés comme potentiellement conflictuels, ainsi que certains modes de résolution. _________________________________________________________ 1

2

Définition proposée par le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL) : Action d'abuser (une personne ou une collectivité) en déformant, en embellissant la réalité. Notons que cette définition invite à regarder l’action d’abuser comme un acte conscient, mais ne se retreint pas à ce cas uniquement. Nous utilisons ici ce terme avec en tête l’idée d’un acte inconscient. BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives.P.127

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

DES MOMENTS GENERATEURS DE CONFLITS, MODE DE RESOLUTION La première remarque que nous devons faire quant à savoir quels sont les sujets et moments générateurs de conflits dans la vie d’un projet d’habitat groupé participatif, est que bien entendu tout sujet est susceptible d’engendrer du conflit. Nous ne nous sommes donc intéressés qu’aux moments et sujets les plus propices à l’apparition de tensions. Il s’agit alors de voir la responsabilité de l’architecte quant à la génération ou l’apaisement de ces tensions dans les différents cas. La seconde remarque que nous pourrions faire est que ces sujets de discorde potentielle sont assez nombreux. D’ailleurs, rappelons que le premier rapport sur la question de l’habitat groupé participatif rendu au PUCA en 2010 par Marie-Hélène Bacqué et Véronique Biau se titrait : Habitats alternatifs: des projets négociés ? Or il nous est précisé, dès les premières pages du rapport, que la notion de négociation est appréhendée dans son acception la plus large et s’envisage notamment comme "un mode de résolution des conflits"1. Ce qui tend à corroborer l’hypothèse d’un très grand nombre de sujets et moments conflictuels, et permet de mesurer une fois encore le caractère risqué, car difficiles à conduire, des opérations d’habitat groupés participatif. Pour pouvoir aborder ces différents sujets et moments en question, nous les avons regroupés en trois catégories, selon que la responsabilité du bon déroulement des opérations concernées soit plus ou moins celle du groupe. Nous avons donc :

I/ Des sujets et moments conflictuels inhérents à la démarche d’habitat groupé participatif :

1) Les projets d’habitat groupé participatif s’inscrivent dans une temporalité rallongée par rapport à une opération de promotion "classique". En général, la phase de conception avec les architectes est l’une des plus courtes de la vie du projet. La marge de manœuvre des architectes pour aider à réduire cette temporalité se situe donc lors de la construction à proprement parler. Malgré tout, il faut comprendre que la véritable origine de cette temporalité rallongée réside dans la phase de constitution du groupe puis de réalisation du programme, rôle qui échappe de plus en plus aux architectes, qui gardent seulement un rôle de "rattrapage en vol" et de recadrage de certains points du programme parfois simplement organisationnels. _________________________________________________________ 1

BACQUE, M.-H. et BIAU, V. (2010), Habitats alternatifs: des projets négociés ? Rapport au PUCA.P.6.

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme

2) Les futurs habitants sont contraints de prendre des décisions et de se confronter à des sujets dont ils ne connaissent rien. L’architecte doit alors, dans la mesure où personne ne l’a fait avant (membre qualifié du groupe ou AMO), former a minima le groupe pour lui permettre d’aborder son rôle de maitre d’ouvrage le plus sereinement possible. 3) La multitude des partenaires et la diversité de leurs attentes et objectifs mènent à des situations où les intérêts de chacun sont difficiles à concilier. L’architecte, qui contribue par sa présence à complexifier ce jeu d’acteurs, a pour rôle de simplifier au possible la relation entre le groupe et les entreprises. En revanche, entre 1970-80 et aujourd’hui, on constate qu’il constitue de moins en moins un allier du groupe au moment de monter la forme juridique, ou au moment de trouver le foncier, ou encore au moment de dialoguer avec les établissements bancaires. L’architecte est de plus en plus relégué au rang de prestataire, au même titre que le notaire, le banquier ou les bureaux d’étude technique par exemple. 4) La multitude des membres et la diversité de leurs revendications et attentes personnelles fragilisent en permanence la cohérence et cohésion du groupe de futurs habitants. Nous avions déjà évoqué cette fragilité structurelle du groupe. L’architecte, qui n’a pas pour mission de surveiller la bonne cohésion du groupe, se voit parfois contraint de travailler à la conserver, pour le bien de l’opération et de la cadence de travail. Cette mission non officielle, l’architecte l’avait déjà dans les années 1970-80. Pierre Lefèvre choisit même une tournure presque humoristique pour en témoigner, précisant dans l’ouvrage du MHGA de 1983 que l’architecte, lui qui aime tant construire, ne saurait supporter de voir le groupe s’effondrer. On comprend par ailleurs l’intérêt que représente pour les architectes le fait de maintenir le groupe à flot.

II/ Des sujets et moments conflictuels dépendant directement de certains partenaires :

1) L’obtention du terrain, conditionné notamment par l’accord du propriétaire du foncier convoité, qu’il soit privé ou publique est pour les groupe l’une des étapes les plus durs à franchir. Le foncier est rare et cher, et la démarche d’habitat groupé participatif parfois assez méconnue des vendeurs (encore une fois, privé ou publique). Tous ces facteurs rendent la recherche du foncier terriblement difficile, et génèrent très régulièrement des tensions et frustrations qui conduisent parfois à l’éclatement du groupe. Dans cette recherche du foncier, l’architecte, qui dans les années 1970-80 se constituait parfois initiateur de projet, pouvait alors à l'époque tenir un rôle certain. De nos jours il arrive encore de voir des architectes bloquer un terrain ou prospecter auprès des groupes pour assurer un avenir aux différents projets, mais comme nous l’avions déjà précisé, ce rôle leur est de moins en moins attribué. La tendance est plus à l’initiation de projets par les communes, qui proposent alors un terrain à construire.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ? 2) L’obtention du financement, conditionné par l’aval des banques en fonction du degré de crédibilité du groupe, est l’autre sujet majeur dont le déroulement repose en grande partie sur un intervenant extérieur. Dans le cadre de la demande de crédit, le rôle de l’architecte se résume à la production d’une étude de faisabilité la plus convaincante possible. Toutefois cette étude de faisabilité n’est pas systématiquement commandée, ni même réalisée par le futur architecte de l’opération. Aussi, la bonne conduite de la demande de prêt repose essentiellement sur la forme d’association juridique retenue par les membres du groupe, ainsi que sur leurs différents profils bancaires.

III/ Des sujets et moments conflictuels dont la conduite est, entre autre, imputable au groupe :

1) La réalisation du programme de l’opération, avec notamment un choix à porter sur la proportion de surfaces privées et partagées, est une étape qui concerne directement les architectes. Dans les années 1970-80, il était pratiquement systématique de réaliser ce programme avec les architectes. C’est encore, il semble, une réalité aujourd’hui. Les groupes qui réalisent leur programme seuls avant de désigner l’architecte offrent souvent à ce dernier l’opportunité de le réviser. C’est un rôle que l’architecte endosse dans la plupart de ses missions ; un adage prétend d’ailleurs que dans le cadre d’un projet, le premier élément que l’architecte doit réinterroger est son programme. La remise en question de ce rôle de pseudoprogrammateur se fait par l’introduction des AMO dans les projets d’habitat groupé participatif depuis 2005. Il est probable qu’avec le temps et la professionnalisation des AMO, les groupes seront de plus en plus accompagnés et la question du programme génèrera moins de conflit, notamment entre le groupe et les architectes. 2) Le choix du positionnement de chaque membre du groupe dans les différents modules de vie créés est l’un des plus complexes à négocier. L’architecte qui travail son plan masse a alors deux solutions : aider les habitant à se positionner directement lors du travail en plan masse, ou après que ce dernier vienne d’être figé. La première option inscrit généralement la réalisation du plan masse dans une très longue durée, la seconde en revanche minimise le caractère participatif du dessin de ce plan. C’est alors le rôle de l’architecte de trouver le meilleur compromis qui permettra un travail efficace tout en limitant le risque de conflits. Dans le livre du MHGA, Pierre Lefèvre nous livre son point de vue : "L’essentiel est que le plan-masse soit élaboré dans son principe avant que chacun ne s’y positionne. Sinon, on risque de tourner en rond : le groupe de Cergy-La Hayette a passé beaucoup de temps à déplacer chaque habitation comme autant de pions sur un terrain, transformé en échiquier. Les architectes ont dût mettre les « holà ». « C’est aberrant de changer le plan masse parce que la fenêtre d’une maison donne chez le voisin » " 1 _________________________________________________________ 1

BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives.P.125

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Chapitre 3 – Mener le projet à terme 3) Le choix du statut juridique ne dépend pas tant du notaire que des revendications du groupe et de son positionnement quant à la notion de propriété, notion notamment réinterrogée par les coopératives d’habitants. Dans le cadre de ce choix décisif, l’architecte n’a aucun rôle à jouer, d’autant qu’il ne soit pas membre du groupe. La présence d’un AMO pour conseiller le groupe semble la meilleur option disponible aujourd’hui. Généralement, les groupe consultent leur notaire pour être aiguillé sur ce sujet, ou font appel aux prestations d’un juriste. 4) La conception du projet à proprement parlé, écriture et définition architecturale, est le dernier grand thème générateur de conflit. On verra alors des groupes se déchirer pour la couleur de la façade par exemple, comme c’est arrivé au groupe de l’opération Les Toits Liés à Pontcharra (cf. figure 24), où le groupe a réussi à se maintenir de justesse seulement. Du fait de l’important nombre de décisions à prendre dans un temps le plus court possible, cette phase de travail privilégiée avec les architectes conduit quasi-inévitablement le groupe audevant de conflits internes qu’il faudra résoudre le plus rapidement possible. Il est donc du devoir de l’architecte de prévenir ces conflits en proposant des méthodes pour choisir ou en tranchant quand cela devient nécessaire.

figure 24 – Opération Les Toits Liés à Pontcharra – photo personnelle (2013)

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

LE CHANTIER MODALITES DE SUIVI La phase de chantier, après avoir constitué un projet de groupe, obtenu des financements et un terrain, après avoir réalisé toutes les études et démarches administratives, après avoir arrêté un projet architectural, après toutes ces étapes franchies par le groupe, cette phase de chantier est la dernière qui lui reste à mener pour enfin pouvoir commencer à habiter. Evidement cette dernière étape présente quelques particularités, tout comme les précédentes, du fait d’une maitrise d’ouvrage multi-incarnée qui construit pour elle-même. Ce dernier point est important car, du fait de la construction en vue d’un usage personnel et non d’une revente, les entreprises ne peuvent pas se permettre de réaliser les choses "un peu rapidement" ; les membres désignés pour assurer le suivi de chantier sont d’autant plus "tatillons" qu’il s’agit d’un bien qu’ils occuperont eux-mêmes. La question de l’organisation du suivi du chantier est primordiale pour pouvoir : d’une part prévenir toutes dérives budgétaires ou temporelles du chantier, et d’autre part assurer la qualité de l’ouvrage ainsi que sa correspondance aux attentes initiales du groupe. La maitrise d’ouvrage implique certaines responsabilités, que le groupe a accepté de prendre en charge, aussi il est essentiel que les futurs habitants soient conscients de ces responsabilités avant d’envisager pouvoir suivre leur chantier. Il leur faut ainsi comprendre, à titre d’exemple, qu’en dépit de l’engagement des entreprises et de la maitrise d’œuvre quant à la durée du chantier, tout interventionnisme de la part des habitants devient un alibi potentiel pour excuser divers retards. Il leur faut aussi intégrer que, et particulièrement en cas d’autoconstruction, toutes interventions pratiquées sur l’ouvrage impliquent sa réception – au moins partielle – sans réserves. Passer une couche de peinture équivaut donc à une prise de responsabilité dont il faut absolument être conscient. Il est un autre point qui mérite d’être soulevé : bien que le groupe construise pour luimême, les différentes familles n’ont théoriquement aucun pouvoir sur la construction en cours. En effet, légalement, ce ne sont pas les différentes familles qui font bâtir, mais la structure juridique qu’elles ont constituée. Aussi seuls les membres représentant officiellement cette structure peuvent intervenir en tant que maitres d’ouvrage à proprement parlé. Par ailleurs, et de manière générale, il vaut mieux que la maitrise d’ouvrage pointe sur le chantier les sujets dont elle voudrait discuter, puis les transmettent par le biais du maitre d’œuvre. Il s’agit en effet de préserver la légitimité de ce dernier et par là même la bonne marche du chantier. Dans son ouvrage de 2011, Bruno Parasote s’exprime ainsi à ce sujet : "Il faut toutefois veiller à garder un recul entre les entreprises et le maitre d’ouvrage. La conduite du chantier doit rester la prérogative du maitre d’œuvre. A for-

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-ce d’implication soutenue, il peut y avoir ingérence et finalement désengagement du maitre d’œuvre en raison de l’omniprésence du/des maitre/s d’ouvrage. Malgré les émotions, la tentation de vouloir participer, il faut respecter un certain devoir de réserve du fait des compétences et responsabilités de chacun." 1 Du point de vue strict de l’organisation, la phase de chantier invite généralement les groupes de projet à se diviser pour mettre en place différents sous-groupes. Communément il y en a au moins deux : l’un responsable du suivi financier de l’opération, cette phase étant celle où l’argent s’échange et où les appels de fonds se concrétisent, l’autre assurant le suivi technique. A propos de l’organisation de ce suivi technique, Reine, membre de l’opération à Vanves des années 1980 dite La Fonderie (cf. figure 25) témoigne : "Trois gérants sont délégués et représentent le groupe à l’extérieur. Au moment de la construction, les trois gérants assistent aux réunions de chantier hebdomadaires avec architecte et entreprises. Tous les membres allaient au moins une fois par semaine sur le chantier pour également contrôler. […] Nous avons été cependant obligés de prendre un coordinateur de chantier, trop de retard se prenant. Malgré un retard d’un an sur la construction, il y a eu peu de dérives budgétaires – moins de 10%. " 2 En somme, que ce soit dans les années 1970-80 ou 2000, l’architecte a un rôle proche de l’ordinaire au moment de suivre le chantier. En plus de sa mission habituelle, il semble qu’il doive simplement aider le groupe à comprendre les jeux d’acteurs à l’œuvre durant cette phase ainsi que l’aider à faire "bloc" pour pouvoir prendre des décisions pertinentes dans un temps le plus court possible. De son côté, le groupe a lui un important travail d’organisation interne à fournir pour mener son rôle de maitrise d’ouvrage le plus correctement possible.

figure 25– Opération La Fonderie à Vanves

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PARASOTE, B. (2011), Autopromotion, Habitat Groupé, Écologie et Liens Sociaux. Gap, Editions Yves Michel.P.176. Témoignage de Reine habitant du projet la fonderie à Vanves, extrait du livre de PARASOTE, B. (2011), Autopromotion, Habitat Groupé, Écologie et Liens Sociaux. Gap, Editions Yves Michel.P.91.

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AUTOCONSTRUCTION

Pour clore ce chapitre sur la question du chantier, une précision sur celle de l’autoconstruction s’imposait. En effet, il n’est pas rare de constater dans les média ou dans certains discours un amalgame entre la notion d’habitat groupé participatif et celle d’autoconstruction. On comprend d’ailleurs cet amalgame quand on constate l’étendu du vocabulaire employé entre les années 1970-80 et 2000 autour de ces questions : autoconstruction, autogestion, autopromotion etc. L’autoconstruction consiste en la réalisation de l’ensemble ou d’une partie des travaux de construction d’un édifice par "soi-même". Ce procédé permet entre autre de réduire certains coûts de construction. Il permet aussi dans le cadre d’un projet de logement d’offrir la possibilité aux futurs habitants de personnaliser fortement leurs appartements, évitant par là même d’avoir à organiser et conduire les entreprises pendant le chantier vers une très grande diversité de prestations. Les entreprises fournissent alors un ensemble de prestations communes à tout l’immeuble et ce sont les habitants qui se chargent de terminer le cloisonnement et/ou l’installation d’éléments sanitaires et/ou la peinture… L’autoconstruction est alors parfois utilisée dans les projets d’habitat groupé participatif, mais peut aussi être envisagé dans d’autres types de projets. Si cette démarche d’autoconstruction est assez appréciée par les groupes de projets de l’habitat groupé participatif, c’est, qu’au-delà des économies réalisables, l’idée de pouvoir participer jusqu’à la construction elle-même du projet satisfait intellectuellement nombre de membres. Plusieurs groupes envisagent alors de se réserver certains travaux à réaliser en autoconstruction, avec l’idée que le travail à fournir pourra l’être par le collectif dans son ensemble, et non que chaque famille se cantonnera uniquement à son logement personnel. On retrouve derrière cette pratique une autre forme de partage, celle de la force de travail et des moyens humains. Du point de vue du rôle de l’architecte, on notera que son concours à l’opération se termine généralement avec la réception de l’ouvrage par le groupe. Sa présence n’est donc plus nécessaire dès le lancement de la phase d’autoconstruction potentielle. En effet, le groupe, pour pouvoir terminer ses travaux en autoconstruction, doit faire acte de réception de l’ouvrage. Cette procédure fixe la limite des garanties et responsabilités de chacun. En somme, l’autoconstruction est un moyen pour simplifier l’organisation du chantier quant au travail des entreprises de construction, tout en permettant une très forte personnalisation des unités de vie (appartements, maisons etc.). D’autre part, cette pratique permet de réaliser des économies sur la construction et satisfait à l’idée de partage et de solidarité qui accompagne et motive généralement les projets d’habitat groupé participatif. En cela, l’autoconstruction est assez plébiscitée par les groupes de tous temps, mais ne constitue en rien un phénomène propre à la démarche d’habitat groupe participatif.

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CONCLUSION La phase de travail sur la définition du projet architectural est le moment privilégié de la relation architecte – groupe. Il s’agit d’une période de la vie du projet durant laquelle l’architecte à un rôle prépondérant à jouer. La teneur de ce rôle semble découler de plusieurs facteurs. J'ai alors retenu les deux qui me semblaient primordiaux : -

Le premier réside dans la ou les motivations de l’architecte qui s’engage dans un projet d’habitat groupé participatif. Ce qui anime et pousse l’architecte à se saisir d’un tel dossier, a priori "difficile", conditionne fortement l’étendu de la mission et de la place de ce dernier dans l’opération. En somme, il me semble que l’idée que se fait l’architecte de la participation ainsi que les raisons qui l’invitent à se lancer dans une telle opération, certainement peu rémunératrice, sont autant d’éléments qui prédéterminent la façon qu’il aura de se positionner par rapport au groupe et par rapport au projet. En d’autres termes, cela prédétermine les rôles dont il va vouloir ou ne pas vouloir se doter.

-

Le second facteur influençant fortement le rôle de l’architecte dans une opération d’habitat groupé participatif est la présence ou l’absence d’un accompagnement du groupe de projet. En effet, le travail d’une Assistance à Maîtrise d’Ouvrage a pour effet d’absorber les particularités de la démarche de projet d’habitat groupé participatif. L’architecte a alors un rôle à jouer qui se rapproche de celui qu’il a dans le cadre de sa pratique habituelle.

On constate entre 1970-80 et les années 2000 une évolution des motivations qui poussent les architectes à s’engager dans les opérations d’habitat groupé participatif. Tout comme, en ce qui concerne l’accompagnement des groupes, nous somme forcés de constater une évolution prenant la forme d’une professionnalisation des "accompagnateurs", couplée à une démocratisation à l’œuvre de la présence de cet acteur dans les projets contemporains. Par ailleurs, l’étude ici menée au sujet des outils à la disposition des architectes ainsi que sur les méthodes de travail nous a permis de mettre en évidence cette démocratisation des AMO dans les projets d’habitat groupé participatif. Ces évolutions pourraient-être responsables, tout du moins en partie, de celle du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif.

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Conclusion

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L'habitat groupé participatif est un mouvement qui englobe plusieurs courants de pensée. Dans sa forme actuelle, dont on constate les prémices au travers de la réalisation d’une centaine de projets dans les années 1970-80, l’habitat groupé participatif est un processus qui permet à divers individus de s’associer autour d’un projet de construction d’un habitat collectif, au nom d’un projet de vie. Ce processus de projet très particulier trouve son équivalent dans nombre de pays européens, ainsi qu’au Canada par exemple. On constate que dans la plupart de ces pays la question de l’habitat groupé participatif est plus ancrée culturellement qu’en France. Par ailleurs, les opérations réalisées dans ces pays sont plus nombreuses et plus aisées à aboutir. Cette différence de l’état de développement de l’habitat participatif entre le France et ses voisins ne s’explique pas par un intérêt tardif à la question, mais par une césure de cet intérêt entre la fin des années 1980 et 2000-2008. Cette césure nous a permis de mettre en comparaison le rôle de l’architecte dans les années 1970-80 avec celui des années 2000, et ce d’une façon très nette. Il en ressort une évolution certaine de ce rôle entre la première période d’intérêt pour la démarche et la seconde. Toutefois on constate aussi des constantes, des éléments invariants, ce qui semble raisonnable. Aussi, parmi ces invariances, on retrouve notamment les méthodes de travail, c'est-à-dire les astuces développées pour communiquer et travailler avec un maitre d’ouvrage qui s’avère être un groupe, non professionnel de surcroit. De la même façon, et hormis l’impact généré par l’apparition des modes de représentation assistée par ordinateur, les outils à disposition des architectes pour mener le travail n’ont pas fondamentalement évolué. La question de la 3D informatique, qui constituerait la principale évolution de ces outils, n’est pas imputable à l’évolution de la démarche d’habitat groupé participatif, et par conséquent ne traduit rien de l’évolution du rôle de l’architecte dans le cadre de ces opérations. L’étude que nous avons menée montre que les projets d’habitats groupés participatifs sont des projets qui attachent beaucoup d’importance à l’individu, à ses envies, à ses idées et à ses revendications. En premier lieu parce qu’il s’agit de faire groupe, de rassembler des personnes au nom d’idées et de volontés communes. Ensuite parce que, pour les partenaires du projet, il s’agit de construire autrement, et autre chose. De ce point de vue-là, les raisons et motivations des architectes pour s’engager dans ces projets représentaient un point d’étude très important. En effet, ces projets n’offrent que peu de garantis d’aboutissement et ne sont pas rémunérateurs. Ces faits sont aisément constatables : un architecte qui choisit alors de s’engager auprès d’un groupe doit certainement le faire au nom d’une ou plusieurs motivations qu’il identifie, or ces motivations semblent avoir évolué entre nos deux périodes. C’est d’ailleurs l’une des plus grosses évolutions qu’il nous ait été donné de constater : les architectes de l’habitat groupé participatif semblent s’être détournés des postures de milit-

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-ants en quête de valeurs sociales réformées, très en vogue dans les années 1970-80, pour devenir plus pragmatiques et ne s’engager qu’à la condition d’obtenir une contrepartie qui peut alors être médiatique, de l’ordre du réseautage ou de la démonstration. Cette question de l’évolution de la motivation des architectes est, on l’a dit, l’une des grosses évolutions que nous avons constatées, mais elle s’accompagne d’au moins trois autres. L’une des questions qui restera en suspens après cette étude est de savoir comment ces évolutions s’imbriquent les unes les autres, c’est-à-dire, laquelle découle de laquelle ? En plus de l’évolution des motivations, notre étude met donc en avant trois autres évolutions significatives en relation avec le rôle de l’architecte dans les opérations qui nous concernent : -

La première constatation est que l’architecte n’est plus qu’exceptionnellement membre du groupe de futurs habitants. Cette évolution par rapport aux années 197080, où dans bien des opérations l’architecte était aussi membre voir initiateur du projet, est tout à fait cohérente avec l’idée d’un glissement allant de la figure de l’architecte militant à celle de l’architecte sympathisant et "calculateur".

-

La seconde constatation est que l’architecte ne constitue plus l’allié par excellence du groupe et du projet, comme c’était le cas dans notre première période d’étude. Aujourd’hui, il endosse plutôt un rôle de prestataire. En tant que tel, l’architecte continue bien sûr de défendre les intérêts du projet, mais il n’est plus la personne qui aidera le groupe quelle que soit l’étape à franchir. Cette évolution du rôle et de la position de l’architecte, par rapport au groupe et son projet, est une fois de plus tout à fait cohérent avec l’idée d’une extériorisation de ce dernier par rapport au dit groupe. La question commence alors à apparaître :est-ce que l’architecte perd cette tendance à être l’allié absolu du groupe parce qu’il en sort ? Sort-il justement du groupe parce qu’il perd petit à petit ce statut privilégié ? Est-ce une autre raison qui a engendré ces évolutions ?

-

La dernière évolution majeure que nous avons constatée concerne l’introduction progressive depuis les années 2005 d’un nouvel acteur dans le processus de projet. Il s’agit des Assistances à Maîtrise d’Ouvrage dit AMO. Cet acteur a pour rôle d’accompagner les groupes à devenir des porteurs de maitrise d’ouvrage performants. Il met en place un système de travail interne au groupe, guide la production du programme, prépare le groupe aux différents échanges qu’il va devoir avoir avec les acteurs extérieurs, et veille, de manière générale, à préserver le groupe de l’éclatement. En somme, c’est lui qui devient l’allié de prédilection du groupe. La question se pose alors clairement : est-ce un acteur qui apparait pour occuper un rôle laissé vacant par les architectes ? Est-ce, à l’inverse, l’introduction de cet acteur qui éc-

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-arte petit à petit les architectes des groupes ? Ou peut-être que l’apparition de cet acteur est une tentative de réponse à l’échec répété de l’immense majorité des groupes entre hier et aujourd’hui ? Peut-être est-ce aussi une solution émergeante pour permettre la réplicabilité de certaines opérations ? En effet, jusqu’à aujourd’hui aucune opération n’a été conduite suffisamment "normalement" pour que nous puissions prétendre détenir un model réplicable de processus de projet pour l’habitat groupé participatif. L’introduction de cet acteur, qui absorbe nombre des particularités de cette démarche de projet, permet alors d’envisager des partenariats et des contrats plus conventionnels entre les groupes et leurs prestataires.

Finalement est-ce cette question de la réplicabilité, dont semble avoir besoin le mouvement pour ne pas s’essouffler une nouvelle fois, qui a motivé ou provoqué toute cette série d’évolutions ?

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ANNEXE n°1:

Chronologie de la politique du logement sociale en France. Documents disponible en ligne sur le site de vie-publique à l'adresse suivante: http://www.vie-publique.fr/politiques-publiques/logement-social/chronologie/

Ce n’est qu’à partir de la seconde moitié du XIXème siècle que naît l’idée d’une possible intervention publique dans le domaine du logement. Les premières lois visent d’abord à lutter contre l’insalubrité des logements puis des mesures sont prises pour faire face à l’exode rural et à la pénurie de logements qui s’en suit. Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, les besoins en logements sont tels qu’une intervention massive de l’Etat s’impose. 1948 La loi sur la limitation des loyers réglemente les loyers des logements achevés avant sa promulgation. Elle a pour ambition d’assurer une hausse régulière et raisonnable des loyers compatible avec les ressources des occupants. 1949 Loi sur les habitations à loyer modéré (HLM) qui fixe de nouvelles normes pour les logements sociaux et reconnaît ainsi un droit au logement décent. 1953 Création du « 1% patronal », contribution obligatoire des entreprises à l’effort de construction (1 % de la masse des salaires pour les entreprises de plus de 10 salariés). 1954 Le 1er février, l’Abbé Pierre lance un appel sur Radio Luxembourg pour aider les sans-abri. A sa suite et sous la pression de l’opinion publique, le gouvernement adopte un programme de 12 000 logements neufs en cités d’urgence destinées à accueillir les familles ou les isolés qui sont à la rue. 1957 La loi cadre du 7 août initie la politique des zones d’urbanisation prioritaire (ZUP). Pour la première fois, on prévoit, parallèlement à la création de logements, la création d’équipements publics. Un programme quinquennal de construction de logements HLM est mis en place dont l’objectif est de réaliser 300 000 logements par an. 1960 Un arrêté initie les cités de transit, logements de transition pour les mal-logés.

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Annexes 1965 La loi n° 65-556 du 10 juillet 1965 reconnaît aux locataires d’immeubles HLM la faculté d’acquérir leur logement. 1971 Le Premier ministre, Jacques Chaban Delmas, lance une politique de résorption des bidonvilles et de relogement des immigrés. 1977 La loi n° 77-1 du 3 janvier réformant le financement du logement a pour objet de favoriser la satisfaction des besoins en logements et en particulier de faciliter l’accession à la propriété, de promouvoir la qualité de l’habitat, d’améliorer l’habitat existant et d’adapter les dépenses de logement à la situation de famille et aux ressources des occupants, tout en laissant subsister un effort de leur part . La loi crée les prêts d’accession à la propriété (PAP), les prêts locatifs aidés (PLA), les prêts conventionnés et l’aide personnalisée au logement (APL). 1982 Lois de décentralisation : les communes sont désormais responsables de la planification urbaine et du logement social. 1983 La loi n°83-953 du 2 novembre 1983 revoit les modalités d’acquisition des logements HLM par leurs occupants. La loi affirme le principe selon lequel l’initiative de la vente revient au seul organisme propriétaire, elle impose aux candidats à l’acquisition des conditions très strictes. Octobre 1989 Publication du rapport de François Geindre, maire PS d’Hérouville-Saint-Clair (Calvados) sur l’attribution des logements sociaux. Ce rapport met en évidence les catégories "d’exclus de l’accès au logement social" : les titulaires du RMI, les familles monoparentales titulaires de l’Allocation de parent isolé (API), les salariés précaires et les étrangers. Le rapport préconise notamment la création de programmes départementaux d’accueil et d’un fonds départemental unique "logement-solidarité". 8 novembre 1989 Présentation en Conseil des ministres d’un projet de loi visant la mise en œuvre du droit au logement : notamment établissement dans chaque département d’un plan départemental d’action pour le logement des personnes défavorisées. Juin 1990 Promulgation au Journal officiel du 2 juin de la loi n°90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement. Un fonds de solidarité pour le logement, cofinancé par l’Etat et le département, peut accorder des aides financières aux personnes et familles en difficulté. Septembre 1990 Publication du décret n°90-779 du 31 août 1990 tendant à favoriser l’investissement locatif, l’accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l’offre foncière ; du décret n°90-780 du 31 août 1990 tendant à améliorer les supports locatifs ; du décret n°90781 du 31 août 1990 relatif à la fixation des loyers ; du décret n 90-782 du 31 août 1990 relatif

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ? aux normes minimales des logements ; du décret n° 90-783 du 31 août 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement. Mars 1992 Le 2, annonce par le gouvernement de quatre mesures en faveur du logement : utilisation des ressources des livrets A et des livrets d’épargne populaire (LEP) pour un "important programme de logements locatifs sociaux" ; création d’un fonds de garantie des prêts accordés aux ménages les plus modestes (préconisé par le rapport sur le financement du logement rédigé en juin 1991 par Daniel Lebègue) ; renforcement de l’épargne logement par l’augmentation du plafond des prêts et la réduction de la durée des plans ; mise à l’étude de "diverses mesures - notamment fiscales - destinées à favoriser la réhabilitation et l’entretien du parc de logements existants". Décembre 1992 Création du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées par le décret n° 921339 du 22 décembre. Novembre 1993 Création du Samu social de Paris. 14 juin 1994 Présentation de deux rapports de la Cour des comptes, consacrés l’un aux aides au logement dans le budget de l’Etat (1980-1993), l’autre aux HLM. La Cour relève des incohérences dans la politique du logement et suggère plusieurs réformes pour y remédier, en matière notamment d’aides financières publiques (allocations logement, aides à la pierre et à la personne). 21 juillet 1994 Promulgation de la loi n° 94-624 relative à l’habitat qui vise notamment à faciliter l’acquisition des logements à loyer modéré par leurs occupants et à permettre l’hébergement d’urgence des personnes sans abri. 15 septembre 1995 La Cour d’appel de Paris autorise les 180 occupants d’un immeuble de la rue du Dragon (Paris 6ème) à rester dans les lieux jusqu’au printemps 1996, mentionnant que "Le droit au logement est considéré comme un droit fondamental et un objectif de valeur constitutionnelle". 31 octobre 1995 Présentation en Conseil des ministres d’un projet de loi relatif au supplément de loyer de solidarité (surloyer). 4 mars 1996 Promulgation de la loi no 96-162 relative au supplément de loyer de solidarité (publication au JO no 55 du 4-5)

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Annexes 4 mars 1998 Communication en Conseil des ministres sur le programme de prévention et de lutte contre les exclusions, présenté par Martine Aubry, ministre de l’emploi et de la solidarité. Dans le domaine du logement, le programme prévoit la mise en place d’une taxe sur la vacance de logement, d’un dispositif de prévention des expulsions et réforme de l’attribution des logements sociaux. Septembre 1999 Le prêt locatif à usage social (PLUS), nouveau nom du logement locatif social subventionné par l’Etat, remplace le prêt locatif aidé dont les caractéristiques financières sont devenues peu intéressantes. L’objectif est de favoriser la mixité sociale en permettant à diverses catégories de ménages d’accéder à ce type de logement. 22 octobre 1999 Publication du décret n°99-897 relatif aux plans départementaux d’action pour le logement des personnes défavorisées et au fonds de solidarité pour le logement. 8 novembre 2000 Publication du décret n° 2000-1079 relatif à l’enregistrement départemental des demandes de logements locatifs sociaux et de l’arrêté relatif au numéro unique départemental d’enregistrement des demandes de logement locatif social. 13 décembre 2000 Promulgation de la loi n° 2000-1208 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (« Loi SRU ») dont les maîtres mots sont mixité urbaine et offre d’habitat diversifiée. La loi réaffirme le rôle du logement locatif social et des organismes HLM dans la mise en oeuvre du droit au logement et de la mixité. Le texte réforme les procédures de lutte contre l’insalubrité et le péril, instaure le droit à un logement décent, renforce les capacités d’intervention dans les copropriétés dégradées et unifie les modes d’interventions publiques en faveur de l’habitat privé. A compter du 1er janvier 2002, les communes qui n’atteignent pas le seuil de 20% de logements locatifs sociaux doivent à la fois payer une contribution et s’engager dans un plan de rattrapage pour tendre vers l’objectif de mixité sociale. 1er juin 2001 Entrée en vigueur du nouveau dispositif d’enregistrement des demandes de logements locatifs sociaux. Toute demande de logement social réunissant les informations de base (l’identité du demandeur, son domicile, le nombre de personnes à loger, et le secteur géographique souhaité - seuls éléments à fournir) est obligatoirement enregistrée et donne lieu dans le délai d’un mois à l’attribution d’un numéro. Ce dispositif, doit permettre de garantir les droits des demandeurs et faciliter la connaissance de l’état réel de la demande.

3 octobre 2002 Devant le congrès annuel des HLM réuni à Lyon, Gilles de Robien, ministre de l’équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, affirme son attachement à l’obligation de mixité sociale contenue dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain de 1999, mais souhaite l’ajuster afin de lui donner un caractère plus contractuel.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ? 5 décembre 2002 Le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées remet son 8ème rapport annuel au Président de la République :" Vers un droit au logement opposable". Il y présente une analyse et des orientations visant à créer, pour tous les citoyens, les conditions d’exercice de ce droit fondamental qu’est le droit au logement. 1er août 2003 Promulgation de la loi 2003-710 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine (JO 177 du 2). La loi prévoit un programme de reconstruction urbaine sur 5 ans (objectif de construction de 200 000 logements locatifs sociaux, 200 000 réhabilitations ou reconstructions lourdes, 150 à 200 000 démolitions de logements vétustes). 1er février 2004 Commémorant son appel contre l’exclusion du 1er février 1954, l’abbé Pierre, fondateur des compagnons d’Emmaüs, lance un nouvel appel pour " éviter que l’inaction ne devienne un crime contre l’humanité ". Lors d’un entretien avec Jacques Chirac, président de la République, il plaide en faveur de l’économie solidaire et le droit au logement pour les plus pauvres. 26 octobre 2005 Présentation en Conseil des ministres d’un projet de loi portant engagement national pour le logement : TVA réduite à 5,5 % pour les opérations d’accession à la propriété d’un logement neuf dans les quartiers faisant l’objet d’une convention de rénovation urbaine ; facilitation des procédures de reconstruction (transfert de la délivrance du permis de construire au préfet, et non au maire) ; accroissement du pouvoir des communes pour imposer la construction de logements locatifs sociaux ; fusion des offices publics HLM et des OPAC dans un statut unique d’Office public de l’habitat (OPH) ; instauration d’un supplément de loyer de solidarité (SLS) ; sursis aux coupures d’eau, d’électricité et de gaz en hiver pour les personnes de bonne foi entre le 1er novembre et le 15 mars. Décembre 2006 A la suite de la mobilisation des Enfants de Don Quichotte, une association nouvellement constituée qui a installé 200 tentes le long du canal Saint-Martin à Paris, Jacques Chirac, lors de ses vœux pour l’année 2007, se prononce pour « un véritable droit au logement opposable » et demande au gouvernement d’avancer sur ce point « dans les toutes prochaines semaines ».

17 janvier 2007 Présentation, en Conseil des ministres, d’un projet de loi portant sur le droit opposable au logement et des mesures en faveur de la cohésion sociale : l’État devra garantir le droit au logement de toute personne qui, résidant sur le territoire français de façon régulière et stable, n’est pas en mesure d’accéder par ses propres moyens à un logement décent et indépendant ou de s’y maintenir ; 5 catégories de « demandeurs les plus prioritaires » pourront, à partir du 1er décembre 2008, présenter un recours administratif si leur demande de logement n’a pas reçu une réponse correspondant à leurs besoins et leurs capacités, dès lors que cette deman-

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Annexes

-de a été regardée comme prioritaire et urgente par une commission de médiation ; création d’un Haut Comité de suivi de la mise en œuvre du droit opposable au logement. Le projet de loi crée par ailleurs une prestation d’aide à la réinsertion familiale et sociale des immigrés ayant vécu au moins 15 ans en France mais n’ayant ni ascendant ni descendant présent sur le territoire français et dont les revenus sont modestes ; il met en œuvre une directive européenne qui permet aux États membres de ne pas accorder le droit à une prestation d’assistance sociale aux citoyens de l’UE entrés sur leur territoire pour y chercher un emploi, pendant la période de recherche d’emploi. 5 mars 2007 Promulgation de la loi n° 2007-290 instituant le droit au logement opposable (« Loi DALO ») et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale. 11 décembre 2007 A Vandoeuvre-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle), Nicolas Sarkozy, président de la République, annonce une modification des règles d’attribution des HLM pour en faire profiter en priorité les ménages les plus modestes : réévaluation des revenus des locataires de HLM tous les 3 ans et paiement d’un loyer supplémentaire en cas de dépassement du plafond autorisé. 18 décembre 2007 Michel Delebarre, président de l’Union sociale pour l’habitat, et Christine Boutin, ministre du Logement et de la Ville, signent un accord portant sur la vente de logements sociaux à leurs locataires : le mouvement HLM s’engage à augmenter le nombre de logements mis en vente en échange de constructions neuves dans les mêmes communes. 5 juin 2008 Deux décisions du Conseil de l’Europe jugent que la France viole la Charte des droits sociaux en matière de logement en raison de l’"insuffisance manifeste" de l’offre de logements sociaux. 28 juillet 2008 Christine Boutin présente, en Conseil des ministres, un projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion qui comprend, notamment, le dispositif de la « maison à 15 euros par jour ». 20 octobre 2008 Lors de l’examen du projet de loi de mobilisation pour le logement, le Sénat rejette les dispositions visant à assouplir la loi SRU qui impose 20% de logements sociaux dans plus de 700 communes (le projet de loi initial prévoyait d’assimiler à du logement social certaines habitations vendues à des familles modestes). 1er décembre 2008 L’application de la loi sur le droit au logement opposable entre dans sa seconde phase : les personnes qui remplissent les critères du droit au logement et qui ne se sont pas vues proposer de solutions peuvent déposer des recours devant le tribunal administratif contre l’Etat.

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25 mars 2009 Promulgation de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion. La loi réforme le 1% logement en lui attribuant deux nouvelles missions : la rénovation urbaine et l’amélioration de l’habitat. En outre, pour favoriser la mobilité dans les HLM, elle tend à autoriser les bailleurs sociaux à faire partir les locataires dont les revenus sont devenus deux fois plus élevés que le seuil fixé pour avoir droit à un logement social. De même, elle prévoit que les ménages en sous-occupation doivent être relogés dans des logements plus petits. 10 juin 2009 Dans son rapport annuel, le Conseil d’Etat met en évidence les difficultés d’application du droit au logement opposable. 6 juillet 2010 François Baroin, ministre du budget, annonce la fin de l’exonération de la contribution sur les revenus locatifs pour les organismes HLM. Octobre 2010 En Ile-de-France, des élus locaux s’inquiètent des conséquences du droit au logement opposable sur la mixité sociale. La répartition des logements sociaux étant inégale, la loi tend à concentrer les populations les plus pauvres dans les quartiers les plus sensibles. 28 décembre 2010 Le secrétaire d’Etat au logement, Benoist Apparu, rend public le montant des amendes infligées en 2010 aux communes qui ne respectent pas le quota de 20% de logements sociaux : 426 communes ont été sanctionnées et le total des sanctions s’élève à 31 millions d’euros. 20 janvier 2011 Benoist Apparu annonce que 131 509 logements sociaux ont été financés en 2010, soit une augmentation de 9,7 % par rapport à 2009

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Annexes

ANNEXE n°2:

Ensemble de documents produit par monsieur Paul Guiaume, architecte-habitant de l’opération Hélix au Meylan, France Documents récupérés de la main de monsieur Guiaume lors d’une visite de l’opération Hélix. Annexe 2.1 / Méthode de travail – document de 1980 (1 page scannée) :

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Annexe 2.2 / Charte initiale de 1981 du groupe Hélix (4 pages scannées) :

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Annexe 2.3 / Charte modifié en 2003 du groupe Hélix (3 pages scannées) :

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Annexe 2.4 / Questionnaire proposé par Paul Giaume au groupe Hélix (3 pages scannées) :

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Annexe 2.5 / Programme de l’opération Hélix – Février 1980 (1 page scannée) :

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Annexes

Annexe 2.6 / Mise au point par Paul Giaume en 1981 (2 pages scannĂŠes) :

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Annexes

Annexe 2.7 / L’architecte, production de Paul Giaume, groupe Hélix (6 pages scannées) :

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Annexes

ANNEXE n°3:

Sélection de quelques diapositives proposées par l’association Regain dans son document : la dynamique de groupe, édité en vue de constituer un premier accompagnement des groupes d’habitants dans leurs démarches. Documents récupérés sur le site de l’association, à l’adresse suivante : http://regain-hg.org

Annexe 3.1 / Question de la règle au sein d’un groupe slide n°7, 8 et 9 :

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Annexes Annexe 3.2 / Question du leadership au sein d’un groupe slide n°12 et 13 :

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Annexe 3.3 / Résumé caricatural de la vie d’un groupe, slide n°16 :

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Annexes

ANNEXE n°4 : Tableau comparatif des statuts juridiques (4 pages). Documents produit par Emilie Cariou et présenté dans : CARRIOU, E. (2011), Habitat Groupé et organismes HLM : une utopie réalisable et reproductible ? Brest, IAE de Bretagne Occidentale.

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Annexes

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Annexes

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Bibliographie

- BIBLIOGRAPHIE -

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

PREMIÈRE PÉRIODE, TRAITANT PLUTÔT DES ANNÉES 1970-1980. Articles et ouvrages ARNAUD, C. et DRIANT, J.-C. (1985), Habitat coopératif en France. Éléments pour une comparaison internationale. Paris, MULT. ATTAR, M., LOURIER, V. et VERCOLLIER, J.-M (1998), La Place de la forme coopérative dans le secteur de l’habitat en France. Paris, FNSCHLM, Plan urbanisme construction architecture. BERNFELD, D. (1983), Un nouvel en jeu la participation. Paris, UNESCO. BERNFELD, D. (1982), Les utopistes du m². Toulouse, Privat. BERNFELD, D. (1980), Architecture et urbanisme participatifs. Venise, CIEDART. BONNIN, P. (1983), Habitats autogérés. Paris, Syros Alternatives. BONNIN, P. (1985), Rôle de l’architecte dans un processus de maîtrise d’ouvrage et de maîtrise d’oeuvre collectives. Paris, MECV. BOURDON, D., GAJDOS, C., RAGGI-PASTRANA, M. et VACHETTE, A. (1984), Étude sur les spécificités des logements élaborés en concertation avec les habitants. Paris, ABAC. CONAN, M. (1988), Le souci et la bienveillance, Regard sur la participation des habitants à la conception de leur habitat. Paris, Centre scientifique et technique du bâtiment. FATHY, H. (1970), Construire avec le peuple. Paris, Jérôme Martineau. TURNER, F. C. (1979), Le logement est votre affaire. Paris, Seuil. MOLLET, A. (1981), Quand les habitants prennent la parole. Paris, Plan Construction.

Mémoires CASTANIE, R. (1979), Un habitat de groupe: l’habitat groupé semi-communautaire et autogéré. Clermont-Ferrand, EA Clermont-Ferrand.

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Bibliographie

SECONDE PÉRIODE, TRAITANT PLUTÔT DES ANNÉES 2000-2013. Articles et ouvrages BACQUE, M.-H. et BIAU, V. (2010), Habitats alternatifs: des projets négociés ? Rapport au PUCA. BACQUE, M.-H., BIAU, V. et D’ORAZIO, A. (2010), Habitat coopératif: une troisième voie pour l’accès au logement. Territoires, n°508, mai, p.23-p.27. BIAU, V., D'ORAZIO A., IOSA, L., NEZ, H. (2010), Habitat en autopromotion, étude de six cas franciliens. Rapport final au PUCA-Batex 2. BOUCHAIN, P. (2006), Construire autrement. Arles, Actes Sud. CONNAN, Y. (2012), Habitat groupé participatif. Rennes, édition OUEST-FRANCE. DEBARRE, A. et STEINMETZ, H. (2010), Des expérimentations à l'épreuve de la négociation : des projets collectifs d’habitat pour un pour un développement durable. Rapport au PUCA. D’ORAZIO, A. (2011), L’habitat participatif, perspective et enjeux. Dans, le livre blanc de l’habitat participatif, Strasbourg, p.55-P.57. ERM, P. (2009), Vivre ensemble autrement: écovillages, habitat groupé, écoquartiers. Paris, E. Elmer. MAURY, Y. (dir.) (2009), Les coopératives d’habitants: méthodes, pratiques et formes d’un autre habitat populaire. Bruxelles, Bruylant.

PARASOTE, B. (2011), Autopromotion, Habitat Groupé, Écologie et Liens Sociaux. Gap, Editions Yves Michel.

TOUCAS-TRUYEN, C. (2005), Les coopérateurs: deux siècles de pratiques coopératives. Paris, édition de l’Atelier.

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

VERDIER, P. (2009), Le projet urbain participatif, apprendre à faire la ville avec ses habitants. Gap, Paris, Yvers Michel, Adels.

Mémoires BRUNET, P. (2010), Architecture participative et sociale: étude de cas au Chili et en France. Paris, ENSAPB. FROMENTIN, B. (2004), Participation: entre implication des habitants et sensibilisation à la ville. Paris, ENSAPB. KHARCHAFI, R. (2010), Participer, partager, parfaire: les différents modes d’association de l’habitat à l’architecture. Paris, ENSAPB. MACAIRE, E. (2006), Action pédagogique et participative en architecture. Paris, EHESS. MEYER, A. (2007), Pour une autopromotion en France. Strasbourg, Europe et Environnement. MOHORIC, N. (2011), Le rôle de l'architecte dans la démarche d'habitat groupé en autopromotion. Nancy, ENSAN. TROUVET, F. (2010), Habitat coopératif, Aubière, Puy-de-Dôme. Clermont-Ferrand, ENSAC-F. CARRIOU, E. (2011), Habitat Groupé et organismes HLM : une utopie réalisable et reproductible ? Brest, IAE de Bretagne Occidentale.

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Bibliographie

DE MANIÈRE GÉNÉRALE. Sites web Association regain – habitat groupé http://regain-hg.org Echo Habitant : http://lechohabitants.org/ Eco Habitat Groupé (suite du MHGA) : http://ecohabitatgroupe.fr/ HABICOOP : http://habicoop.fr/ Interview de BOUCHAIN, P. et article de D’ORAZIO, A. (2012), la nébuleuse de l’habitat participatif : http://www.metropolitiques.eu/ Réseau Inter-régional de l’Habitat Groupé : http://www.habitatgroupe.org/ Site de l’appel à projet de la ville de Paris http://www.habitatparticipatif-paris.fr/ Toits de choix : http://www.toitsdechoix.com/ Vidéos de Bernard Kohn : http://www.bernardkohn.org/fr/films.html

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Quelles évolutions du rôle de l’architecte dans les opérations françaises d’habitat groupé participatif, de 1970 à nos jours ?

RADILOF Raphaël 2014 144


Bibliographie

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Séminaire FARE, Fabriquer et représenter, outils, recherches et actions pour les territoires d’aujourd’hui

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