Rani aMNIF
M INISTERE DE L'ENSEIG NEM ENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQ UE
UNI VERSI TEDECARTHAGE
ECOLENATI ONALED’ ARCHI TECTUREETD’ URBANI SME
Résumé Quand l ’ ar chi t ect ur eécout el anat ur e
Ledév el oppementdess oc i ét ésaél oi gnél ’ Hommedes onenv i r onnementnat ur el .La nat ur el uies tdev enue ét r angèr e.I ll ’ env ahien i mpos ants esc r éat i ons ,s onar c hi t ec t ur eets esv i l l es .Af i ndet r ouv er desr emèdesàc et t er el at i ont ouj our senmut at i onent r el ’ Homme,l a nat ur e etl ’ ar c hi t ec t ur e,desal t er nat i v esauxmodèl eséc onomi ques us uel sontémer gé.Ons ’ i nt ér es s eàl ’ éc ot our i s me,unmodèl et our i s t i quequi of f r euneex pér i enc eenr i c hi s s ant eauxv i s i t eur s ,t outenai dant àc ons er v erl esr es s our c esnat ur el l esdespay shôt es .Onpr opos eun pr oj etéc ot our i s t i quequi s ’ i mpl ant eàl ’ ar c hi pel del aGal i t e,c onnupour s ar i c hes s e de bi odi v er s i t ét er r es t r e etmar i ne,c ons t i t uantai ns iun gr and at t r ai t t our i s t i que au pot ent i el enc or e i nex pl oi t é.
QUANDL’ ARCHI TECTURE ECOUTELANATURE Concept i ond’ unpr oj etécot our i st i queàl aGal i t e
Pr ésent épar
Rani aMNIF
Mot scl és Nat ur e,Ar c hi t ec t ur e,l aGal i t e,Ec ot our i s me,Ec ol odge
M.Ami neHASNI
NOVEMBRE2019
Novembr e2019
Di r ect eur de mémoi r e
A mes chers parents, Que nulle dédicace ne puisse exprimer ce que je leurs dois, pour leur bienveillance, leur affection et leur soutien... Trésors de bonté, de générosité et de tendresse, en témoignage de mon profond amour et ma grande reconnaissance « Que Dieu vous garde ».
A mes chers frère et sœur, En témoignage de mes sincères reconnaissances pour les efforts qu’ils ont consenti pour l’accomplissement de mes études. Je leur dédie ce modeste travail en témoignage de mon grand amour et ma gratitude infinie.
A tous mes amis, Pour leur aide et leur soutien moral durant l’élaboration du travail de fin d’études.
«L'architecture est le combat constant entre l'homme et la nature, le combat pour submerger la nature, la posséder. Le premier acte de l'architecture consiste à poser une pierre sur le sol. Cet acte transforme une condition de la nature en condition de la culture, c’est un acte sacré. » - Mario Botta L’Homme est sans aucun doute, une partie de la nature. Certes, l’Homme a besoin de se connecter à la nature pour le bien-être des individus, des nations et bien évidemment de la planète elle-même. Des études ont montré que cette connexion entraine moins de ruminations et de déprime, plus de créativité et d’enthousiasme. Pourtant, le développement des sociétés a éloigné l’Homme de l’environnement naturel pour donner une plus grande importance aux activités technologiques. Par conséquent, la nature est devenue étrangère à l’Homme. L’urbanisation croissante à l’échelle mondiale accentue la pression des villes sur les espaces naturels. La relation entre l’Homme, la nature et l’architecture ne cesse d’évoluer et de muter. L’être humain a envahi la terre en imposant des villes et des banlieues sur les sites. Pour certains, le développement urbain et l’attachement à la nature restent encore perçus comme antinomiques. Il est ainsi pertinent d’étudier les origines et le développement des liens entre Homme, nature et architecture, et proposer des stratégies qui visent à assurer une vie saine pour les gens et préserver la nature. Si on cherche à trouver des remèdes à ces liens en détérioration perpétuelle, il est nécessaire de s’intéresser aux grands secteurs économiques. Nous devons adopter une conscience économique plus grande qui nous conduira à la création d’une nouvelle économie humaine et respectueuse de la nature. On s’intéresse spécialement au secteur touristique, étant une source de revenus importants, d’après les chiffres avancés par l’OMT (l’Organisation Mondiale du Tourisme) le total des voyages touristiques devra atteindre 1,6 milliard d’ici 2020. Néanmoins, face à un secteur touristique en mutation continue, une société en quête de nouvelles valeurs et de liens humains, plusieurs alternatives au modèle touristique de masse se développent de plus en plus. L’écotourisme est le type de tourisme idéal qui offre une expérience enrichissante aux visiteurs, tout en aidant à conserver les ressources naturelles et à améliorer la qualité de vie de la communauté d’accueil. Les voyages à la nature et l’immersion dans un environnement pur m’ont soulevé des questionnements qui m’ont interpellé et ont piqué mon intérêt sur l’importance de ces activités au niveau individuel et collectif, au niveau mondial et plus particulièrement dans la Tunisie. Dans ce cadre, on présente un projet écotouristique qui offre des expériences diverses et remet en question la relation de l’Homme avec son environnement bâti et naturel. Notre choix d’implantation s’est porté sur l’archipel de la Galite, connu pour sa richesse de biodiversité terrestre et marine, constituant ainsi un grand attrait touristique au potentiel encore inexploité.
De nos jours, l’Homme s’appuie de plus en plus sur la technologie pour son divertissement et son confort, au point d’en oublier son environnement direct. La conscience des individus d’appartenir à un cosmos naturel ne dépasse guère leur seule perception visuelle. Au-delà de la question de savoir comment l’architecture s’adaptera à ces grandes mouvances, il convient de se demander quelles conséquences elles auront sur la relation entre l’Homme, la nature et le monde bâti. Il est important d’étudier les industries qui affectent les liens entre l’Homme, la nature et l’architecture. On s’intéresse à l’écotourisme, une forme de tourisme « alternative » qui assure l’équilibre entre le développement de l’économie et la préservation de l’environnement. Avec la prise de conscience croissante envers l’importance de la préservation de la nature, plusieurs pays commencent à adopter le concept de l’écotourisme. La Tunisie dispose de plusieurs sites insulaires attrayants jouissants d’une richesse naturelle et paysagère indéniable comme kuriat, zembra et zembretta et en particulier la Galite. Cet archipel situé très loin de tout continent est le seul écosystème insulaire en Tunisie. Sa nature affleure en chacun de ses points sous multiples facettes : une topographie accidentée, une qualité de milieux marins exceptionnelle, une richesse spécifique élevée en faune et en flore. Cependant, l’état de la Galite se dégrade à cause de l’abandon total, la démolition de tout équipement urbain ou social et la destruction des vestiges archéologiques et culturels… Comment assurer un épanouissement touristique tout en rassemblant l’Homme, la nature et l’architecture ? Comment intervenir à un site aussi sensible pour le protéger et assurer sa conservation ?
Dans le cadre de ce mémoire, on propose dans un premier temps, une réflexion sur la relation entre l’Homme, la nature et l’architecture. Tout d’abord, on présentera le besoin et les effets de la connexion avec la nature sur la santé de l’Homme en passant par l’évolution de sa relation avec l’environnement naturel. Ensuite, le deuxième chapitre sera dédié à l’étude des outils de la perception de l’architecture, relatifs au corps humain. Pareillement et de plus, on va étaler les composantes d’une ambiance architecturale. Le troisième chapitre dévoilera les divers changements de la relation entre la nature et l’architecture. Au début de l’histoire, la nature était une source d’inspiration qui a fortement influencé la manière de bâtir. Avec l’avènement de la technologie et l’invention de nouvelles techniques et matériaux de construction, l’architecture semble s’éloigner de la nature. Dans un deuxième temps, on suggèrera un moyen de réunir l’Homme, la nature et l’architecture tout en assurant un épanouissement économique qui est l’écotourisme, une alternative fiable au tourisme de masse. On commencera par définir le tourisme, son importance sur l’économie mondiale et particulièrement sur celle de la Tunisie et les différents problèmes liés à ce secteur. Ces risques et problèmes nous guideront vers le tourisme durable, une activité touristique qui respecte les ressources naturelles, culturelles et sociales. Dans le cinquième chapitre, on définira le tourisme durable, on présentera ses types et ses principes. On s’intéresse dans le sixième chapitre à un des types du tourisme durable : l’écotourisme. Ce dernier est le type de tourisme qui a le moins d’impact sur la nature et qui peut sensibiliser les visiteurs sur l’importance de maintenir l’écosystème. On exposera des définitions, l’évolution, les principes et les limites de l’écotourisme. On présentera aussi l’écolodge, une forme architecturale en rapport avec l’écotourisme. Finalement, on présentera le site d’intervention « la Galite » en passant par son historique, sa richesse biologique, son patrimoine bâti et en mettant en exergue son potentiel inexploité. On propose ainsi un projet écotouristique afin de redonner vie à cet archipel et lui rendre sa vraie valeur.
Quand l’architecture écoute la nature Conception d’un projet écotouristique à la Galite
Table des matières PREMIERE PARTIE : L’Homme, un pont entre deux mondes : nature et architecture .....9 CHAPITRE I : l’Homme et la nature, un rapport à remédier ........................................13 I.1. La relation de l’Homme et la nature ...................................................................13 I.2. Le besoin de la connexion avec la nature .........................................................15 I.3. Effets de la connexion avec nature sur la santé de l’Homme ..........................17 I.4. Trouble de Déficit de Nature (Nature-Deficit-Disorder) .....................................21 CHAPITRE II : L’architecture et le corps humain ...........................................................25 II.1. Le corps humain : outil de perception sensuelle ...............................................25 II.2. L’architecture des sens ........................................................................................33 II.3. Projet de référence ..............................................................................................38 CHAPITRE III : La nature dans le monde bâti ................................................................44 III.1. L’influence de la nature sur l’architecture ........................................................44 III.2. Effets de la technologie sur la relation de l’architecture et la nature ............45 III.3. De retour à la nature : La Biophilie .....................................................................46 III.4. Projet de référence .............................................................................................55 PARTIE II : L’ECOTOURISME : UNE ALTERNATIVE FIABLE .....................................................63 CHAPITRE IV : Le tourisme...............................................................................................63 IV.1. Définitions du tourisme .......................................................................................65 IV.2. Types du tourisme ...............................................................................................66 IV.3. Situation économique du tourisme ...................................................................67 IV.5. Problèmes et risques liés au tourisme ................................................................67 IV.4. Le tourisme en Tunisie .........................................................................................70 CHAPITRE V : Vers un tourisme durable ........................................................................74 V.1. Le développement durable ...............................................................................74 V.2. Définitions du tourisme durable ..........................................................................76 V.3. Les types du tourisme durable ............................................................................76 V.4. Principes du tourisme durable ............................................................................77 CHAPITRE VI : L’écotourisme..........................................................................................80 VI.1. Définitions de l’écotourisme ..............................................................................80 VI.2. L’évolution de l’écotourisme .............................................................................81
VI.3. Principes de l’écotourisme .................................................................................82 VI.4. Limites de l’écotourisme.....................................................................................82 VI.5. L’architecture : une forme d’expression de l’écotourisme .............................83 VI.6. L’écolodge ..........................................................................................................84 Partie III : Partie analytique ................................................................................................91 Chapitre VII : La Galite, une histoire singulière .............................................................91 ....................................................................................................................................100 Chapitre VIII : Analyse du site ...................................................................................... 101 Partie IV : Partie conceptuelle ........................................................................................ 110 Chapitre IX : Démarche conceptuelle ....................................................................... 110 Chapitre X : Genèse du projet .................................................................................... 117
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PREMIERE PARTIE : L’Homme, un pont entre deux mondes : nature et architecture I.
Introduction et définitions
Le but de cette partie est d’examiner les origines et le développement des relations entre la nature et l’Homme, l’Homme et l’architecture et finalement l’architecture et la nature. L'intention est de développer une compréhension claire de ce qui lie ces trois notions et leurs significations.
Figure 1: Schéma de la liaison entre homme, nature et architecture source: auteur
1. Définition de la nature
Figure 2: Brain storming autour du mot « nature » source: auteur
La nature, au sens large du terme, fait référence à la vie dans toutes ses échelles et aux phénomènes naturels du monde physique et matériel. La nature désigne les plantes, les êtres vivants, la matière, l’énergie, les processus géologique…
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Le mot nature est polysémique: la composition et la matière d'une chose, son origine et le devenir d'une chose, ou l'ensemble des systèmes et des phénomènes naturels. Elle regroupe :
l'environnement biophysique, l'habitat et les milieux dit naturels (terrestres), aquatiques ou marin ; préservés (à forte naturalité) et dégradés les paysages sauvages, les paysages aménagés et altérés les « forces » et principes physiques, géologiques, tectonique, météorologique, biologique, l'évolution qui constituent l'univers et celles qui animent les écosystèmes et la biosphère sur la Terre les milieux (eau, air, sol, mer, monde minéral) les groupes d'espèces, les individus et les mondes qui les abritent : végétal (forêts...), animal, incluant l'espèce humaine et l'environnement humain et les autres niveaux trophiques dont le fongique, le bactérien et le microbien certains phénomènes épisodiques de la nature (crises, cycles glaciations/réchauffement climatique, cycles géologiques, cycle sylvigénétique, incendies d'origine non-humaine, etc.).
Mill1 examine ce terme : « Que signifie la «nature» d’un objet particulier? En feu, en eau, ou en quelque plante ou animal? Évidemment, l'ensemble ou l'agrégat de ses pouvoirs ou propriétés: les modes dans lesquels il agit sur d'autres choses ... et les modes dans lesquels d'autres choses agissent sur lui». La nature signifie la somme de tous les phénomènes avec les causes qui les produisent. Ce concept est une distinction entre les éléments naturels et artificiels de la Terre, (l'artificiel est ce qui a été créé par une conscience humaine ou un esprit humain). 2. Définition de l’architecture
Figure 3: Brain storming autour du mot « architecture » source: auteur
Le mot "ARCHITECTURE" vient du grec "architekton" (en latin "architecton") qui signifie "maître de la construction".
John Stuart Mill : (20 mai 1806 à Londres - 8 mai 1873 à Avignon) est un philosophe, logicien et économiste britannique. Penseur libéral parmi les plus influents du XIXe siècle 1
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Selon Larousse, L'architecture correspond à l’art de bâtir. C’est un art savant et complexe dont une des fonctions majeures est de donner des repères spatiaux et symboliques, qui varient d'une civilisation à l'autre. Reflet d'une époque, d'une culture, d'une société, l’architecture modèle les hommes et agit sur leur mode de vie : chacun, en effet, y est perpétuellement confronté. Selon le dictionnaire des néologismes, l’architecture est la science et l’art de construire des bâtiments, selon certaines proportions et règles déterminées par le caractère et la destination des bâtiments. Toutefois, il existe de nombreuses autres définitions données par des dictionnaires, des spécialistes ou même des définitions poétiques, Novalis2 dit que "l'architecture est une musique solidifiée", V. Hugo3 écrit que "l'architecture est le grand livre du genre humain" et G. Călinescu4 définit l'architecture comme "l'un des arts les plus purs, à côté de la musique et de la poésie". En fait, Vitruve était le premier à définir l’architecture en se référant à ses finalités : la solidité, l’utilité et l’élégance. Vitruve prend en considération les aspects techniques assurant la sécurité et la fermeté de la construction, fonctionnels répondant au programme recommandé et esthétique souciant de l’harmonie et l’équilibre du monument. « La définition la plus juste que l’on puisse donner aujourd’hui de l’architecture est celle qui tient compte de l’espace interne. Sera belle celle dont l’espace interne nous attire, nous élève, nous subjugue spirituellement ; sera laide celle dont l’espace interne nous fatigue ou nous repousse. Mais le point fondamental est que tout ce qui ne possède pas d’espace interne n’est pas de l’architecture. » Bruno ZEVI5 En fait, L'architecture est un processus complexe qui nécessite la connaissance et le mélange des diverses science, de la technique et de l'art. C’est un consensus entre fonction, structure et forme dans un espace, dans lequel la vie humaine peut se développer de manière organisée, une réponse par composition plastique, par expression, par une symbiose parfaite entre aspect et fonctionnalité aux besoins et exigences matérielles et spirituelles de l’Homme. Au cours du temps, l’architecture, comme toute autre science, a subi de nombreux changements et achèvements importants du fait des progrès de la société, de l’apparition de certaines technologies modernes et de certains matériaux de construction. Par conséquent, si le signe distinctif de l'architecture ancienne et de la monumentalité et l’ornementation abondante, celui de l'architecture moderne et de la simplicité, l’expression de la fonction et du rationalisme.
2 de son vrai nom Georg Philipp Friedrich (1772-1801) poète, romancier, philosophe, juriste, géologue, minéralogiste et ingénieur des Mines allemand. Il est l'un des représentants les plus éminents du premier romantisme allemand. 3 Victor Hugo (1802-1885) poète, dramaturge, écrivain, romancier et dessinateur romantique français. 4 Gheorghe Vișan (1899-1965) écrivain, critique, esthéticien, essayiste, historien de la littérature, professeur à l'université de Iași et à l'université de Bucarest, académicien roumain. 5 Bruno ZEVI (1918-2000) architecte, historien de l'art et critique d'art italien. Il est aussi connu pour être l'auteur de Apprendre à voir l'architecture.
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CHAPITRE I : l’Homme et la nature, un rapport à remédier I.1. La relation de l’Homme et la nature I.1.1. L’Homme dans son environnement Si on se demande sur la définition de l’humain, la réponse évidente sera : c’est un singe intelligent, bavard et droit, avec un penchant pour les biens matériels. Il a des particularités et des caractéristiques qui le distinguent en tant qu’espèce mais il présente de nombreuses variations individuelles et culturelles. L’être humain est vu par la religion comme le dominant sur les autres êtres vivants. Pour les biologistes, l'être humain est un superprédateur. Pour les écologistes et les anthropologues, l'être humain moderne entretient une culture qui modifie consciemment le biotope terrestre à une vitesse qui n'a jamais été atteinte par d'autres êtres vivants. C’est un animal en rupture culturelle avec son environnement naturel doté d’une capacité d'adaptation aux différents milieux dans lesquels il vit (la couleur de la peau, la forme des yeux, la morphologie du squelette...).
Figure 4: Évolution darwinienne de l’Homme Source : ubergizmo.com
I.1.2.Une relation nocive : L’Homme dénaturé, la Nature désacralisée Diverses disciplines étudient le fonctionnement de l’environnement et les ressources naturelles afin de trouver des solutions aux problèmes emblématiques tels que le changement climatique, la dégradation de la biodiversité… Peut-être que ces catastrophes ne sont finalement que des symptômes d’un problème global plus grave et plus profond, des interactions destructives de la société moderne. C’est la relation entre l’Homme moderne et la nature qui est endommagée. Par malheur, le problème n’est pas si primitif ni si simple à résoudre. Les problèmes environnementaux sont essentiellement des problèmes sociaux et comportementaux. Lorsque la société se développe, l’Homme devient moins dépendant de la nature. Grâce à l'utilisation de son intellect, l'Homme a échappé dans une certaine mesure aux contrôles de la nature. Plus il comprend les processus de fonctionnement de la nature, plus il apprend à la transformer pour ses besoins. 13
L'Homme civilisé a été plus impitoyable dans son attitude envers le monde naturel qu'il n'a servi ses intérêts matériels. L’utilité de la terre, de l’eau et de la forêt a été sérieusement réduite par notre détermination à leur permettre de ne servir qu’à nos propres fins. La nature a ses lois conçues pour maintenir l'équilibre. Si le nombre d'espèces vivantes a tendance à augmenter de façon disproportionnée, il faudra une certaine force pour le contrôler. Au cours des 50 dernières années, les activités humaines ont modifié les écosystèmes plus rapidement et plus profondément que toute autre période de l’histoire. Le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) alertent de la gravité de l’exploitation intensive et irresponsable des ressources naturelles, de la surpopulation, la pollution et la modification génétique sur l’avenir de notre planète. Avec l’augmentation et la concurrence entre les économies locales, nationales et mondiales, la culture de consommation s’est propagée partout dans le monde. La technologie ne cesse d’accentuer et d’accélérer cette culture. Auparavant, on prenait de longues heures pour couper un arbre à l’aide de scies. En raison de la technologie accrue, les taux de déforestation ont augmenté. La chasse et la pêche, autrefois pratiquées pour la nourriture qu'elles produisaient, sont aujourd'hui appréciées principalement pour leur usage récréatif. Les tueurs de la faune n’obtiennent aucune satisfaction sauf celle de dire : « Quelque chose qui voulait vivre est morte ». Ces transformations ont des effets qui s'amplifient à mesure que la surpopulation humaine se poursuit. L’une des conséquences les plus destructrices de l’expansion humaine est l’empoisonnement des rivières, qui entraîne l’extinction du poisson et de presque tous les êtres vivants. La nature souffre du réchauffement climatique, de la pollution, des marées noires, l'extinction massive, la perte de biodiversité, effondrement écologique. La biodiversité se dégrade en raison de l'élevage intensif, de l'agriculture et de la surexploitation forestière.
Figure 5: L’extinction des animaux et la pollution marine et aérienne en chiffre (en 2016) Source : www.novethic.fr, lesouffle.org et unesco.org
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Conscient des dégâts causés par ses actions, l’Homme construit des stations d'épuration qui permettent de traiter les eaux usées après leur utilisation, des réserves naturelles et exige des lois qui réglementent le rejet des déchets nocifs pour l'environnement et Le recyclage des déchets solides.
I.2. Le besoin de la connexion avec la nature I.2.1. Besoins primaux et vitaux Depuis des siècles, les sociétés humaines se sont regroupées dans des villages, des bourgs ou des villes, s’éloignant de plus en plus de la nature sauvage. Actuellement, la moitié de l’humanité habite des agglomérations. A cause du développement technologique, l’homme passe une grande partie du temps à l’intérieur souvent devant un écran (d’après David Strayer6, un américain passe en moyenne plus de 10 heures par jour devant un écran numérique et moins de 30 minutes à l'extérieur). La nature nous est devenue étrangère au sein de laquelle nous ne sommes que de passage. C’est une nature qui commence là où la ville s’arrête, une conception qui exacerbe la séparation entre l’Homme et son environnement. Aujourd'hui, beaucoup de gens soutiennent l'idée que chaque personne, en particulier chaque jeune, a le droit d'accéder à Internet. On oublie de parler de droit humain à un lien significatif avec la nature, un lien qui fait partie de notre humanité. Peu importe l’âge, la culture, l’époque et le niveau de développement, le besoin de nature chez l’Homme reste très présent et très prégnant. Il n’est donc pas étonnant, il est même tout à fait sain, qu’on sent parfois ce besoin d’aller en vacances balnéaires, de marcher, courir, grimper dans un espace vert, de s’entourer d’animaux, de cultiver nos jardins…
Figure 6: Liaison entre l’énergie, l’eau et l’alimentation selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture Source : geographycasestudysite.wordpress.com 6
La nature concerne tout. Tout est dans des systèmes naturels ou des cycles, visant à maintenir une sorte d'équilibre. Les humains ont évolué pour vivre dans cet équilibre. Notre affinité avec la nature est génétique et profondément enracinée dans notre évolution dans et avec la nature. Elle est l’essence même de notre humanité et nous lie à toutes les autres espèces vivantes. C’est pourquoi notre constitution cellulaire, notre fonctionnement biologique et même notre cerveau sont intrinsèquement imprégnés du monde naturel.
David L. Strayer : professeur de psychologie à l'Université de l'Utah
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Liaison entre l’énergie, l’eau et l’alimentation selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture Source : geographycasestudysite.wordpress.com
Les écosystèmes fournissent les ressources nécessaires en nourriture, en eau, en abris et en énergie. En outre, ils régissent les conditions dans lesquelles les gens vivent, travaillent et jouent comme la température et la qualité de l’eau. Plus fondamentalement, ils sous-tendent les processus de base et la production primaire. Ils soutiennent la vie grâce aux cycles du carbone et de l’eau. Les écosystèmes fournissent de nombreux éléments constitutifs de survie et du bien-être humain : La nourriture qu’on mange, l’eau qu’on boit, la stabilité climatique, travail et prospérité.
I.2.2. L’importance de la nature chez l’enfant « Dehors, dans la nature, tout l’être psychocorporel – corps, sens, émotion, connaissances – est en actions inter-reliées, dans un apprentissage permanent, quel que soit l’âge. » Louis Espinassous7 En très peu de temps, l’humanité est passée de la révolution industrielle à une révolution technique dans laquelle les êtres humains sont capables de vivre des vies entières sans avoir à rencontrer la nature. En fait, de nombreux aspects de notre culture enseignent maintenant aux gens de ne pas passer du temps dans la nature. Les parents ont peur pour leurs enfants qui jouent à l'extérieur et les enfants qui grandissent dans des environnements principalement construits craignent souvent la nature, en grande partie parce qu’ils la connaissent mal. Même dans les films et les journaux, la nature est souvent décrite comme le monstre destructeur et violant. On parle de conquérir la nature comme si elle était l’ennemi ce qui contribue à une attitude biophobe croissante.
Louis Espinassous : éducateur, biologiste, ethnologue, romancier, conteur et aujourd'hui berger, travaillant plus particulièrement dans l'éducation-nature. 7
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Figure 7; Enfant dans la nature Source : photo prise par Zied Mnif
Des études récentes ont montré les avantages, voire la nécessité, de passer du temps à l'extérieur, pour les enfants comme pour les adultes. La plupart des études s'accordent pour dire que les enfants qui jouent dehors sont plus intelligents, plus heureux, plus attentifs et moins anxieux que les enfants qui passent plus de temps à l'intérieur. L’immersion de l’enfant dans la nature participe à : Renforcer la confiance, favoriser la créativité, enseigner la responsabilité, offrir une stimulation, faire bouger, pousser à réfléchir, réduire le stress et la fatigue.
I.3. Effets de la connexion avec nature sur la santé de l’Homme « Plein ciel tout soudain, face aux montagnes toutes encapelées de neiges étincelantes. Je marche. Le froid sec râpe les narines, les bottes de cuir souple, fourrées de tiède, craquent sur les ornières sonnantes de glace. Le ciel, les étoiles, et les montagnes d’huile blanche luisant sous la lune. Les mains au doux des poches chaleureuses, les cuisses, les muscles qui vont leur train puissant… Et soudain cette clarification, cette pensée qui accouche au rythme des pas après tant d’années à le vivre sans le formuler : la beauté est pleinement corporelle et multisensorielle. » Louis Espinassous D'après des recherches et des observations en psychothérapie, on sait que la connexion au monde extérieur a des effets sur la santé mentale et le bien-être des gens. Les environnements peuvent augmenter ou réduire le stress, ce qui a des conséquences sur le corps humain. Ce qu’on voit, entend, vit à tout moment change non seulement notre humeur, mais également le fonctionnement des systèmes nerveux, endocrinien et immunitaire.
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Peu importe d'où nous venons dans le monde, il semble que la présence de choses vivantes nous procure une sensation de bien-être. Jules Pretty8 discerne trois niveaux d’engagement dans la nature offrant chacun des avantages pour la santé :
Figure 8: Niveaux d’engagement Figure 9: Niveaux dans d’engagement la nature Source dans: Agri-Culture la nature Source de Jules : Agri-Culture Pretty de Jules Pretty
I.3.1 Effets psychologiques, cognitifs et physiologiques Les exigences de la vie moderne peuvent souvent être épuisantes mentalement. Le travail, difficultés financières, pressions familiales… par conséquent, Le stress est devenu une constante dans la vie quotidienne des gens. Les effets cumulatifs du stress chronique peuvent avoir de graves conséquences sur la santé, notamment la dépression, l'anxiété, les cardiopathies, l'hypertension, la douleur chronique et le diabète de type 2. Le contact avec la nature peut apporter un soulagement, voire une guérison, aux personnes souffrant de maladies mentales chroniques et à court terme (Berman et autres, 2012).9 Frederick Law Olmsted10, concepteur de Central Park à New York, a longuement écrit sur les avantages du contact avec la nature pour la santé mentale. En 1865, il déclara que le temps dans la nature offrait «un soulagement des soins ordinaires, un changement d'air et un changement d'habitudes» et «augmentait la capacité ultérieure de bonheur et les moyens de l'obtenir» (Olmstead 1865). Des chercheurs ont en effet montré que ces affirmations sont très éclairantes. Une enquête de santé publique menée auprès de 11 200 adultes au Danemark, les personnes vivantes à plus d’un kilomètre des espaces verts ou des lacs et des plages déclarent une augmentation de 42% du niveau de stress et d'autres mauvais aspects de la santé en général, de la vitalité, de la santé mentale et des douleurs corporelles (Stigsdotter11 2010). Aujourd'hui, le stress et les problèmes de santé mentale sont de plus en plus courants l’Organisation mondiale de la santé (2001) estime que la dépression et les maladies associées à la dépression deviendront la principale source de problèmes de santé d'ici 2020. Le stress aussi est maintenant un problème majeur pour les personnes vivant
Jules Pretty : professeur d’environnement et de société à l’Université d’Essex et vicechancelier et ancien chef du département des sciences biologiques. 9 Biophilic and Bioclimatic Architecture (livre écrit par Amjad Almusaed) 10 Frederick Law Olmsted (1822-1903) : architecte-paysagiste américain, célèbre pour la conception de nombreux parcs urbains, dont le Central Park de New York aux États-Unis et le parc du Mont-Royal à Montréal au Canada. L’architecte-paysagiste de l'exposition universelle de 1893 et de Jackson Park à Chicago. 11 Anna Stigsdotter Neely: Professeur de psychologie, université de Karlstad 8
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dans les sociétés modernes. Cet état de santé mental est un puissant facteur de dégradation de moralité, d’augmentation des crimes et d’addiction. Des recherches ont prouvé l’importance des promenades dans la nature pour les personnes souffrant de dépression. Ils présentaient des changements d'humeur importants lorsqu'elles étaient exposées à la nature. De plus, ils se sentaient également plus motivés pour récupérer et retrouver leur état normal (Berman, Kross, Kaplan, 2012)12. Des enquêtes récentes ont révélé qu'être en plein air réduit le stress en diminuant le cortisol, une hormone du stress. En outre, cela nous rend également immunisés contre les problèmes connexes tels que l'hypertension et la tachycardie (Lee J, 2011). La nature aide à la régulation émotionnelle et améliore les fonctions de la mémoire et la concentration. Une étude sur les avantages cognitifs de la nature a révélé que les sujets qui marchaient dans la nature réussissaient mieux un test de mémoire que ceux qui marchaient dans les rues urbaines (Berman, Jonides, Kaplan, 2008). L’interaction avec la nature s'est avérée bénéfique à la fois pour l'amélioration de l'état de santé général des citadins et la guérison de certaines maladies. Les personnes vivant dans un milieu stressant et difficile à cause de la crise écologique actuelle sont encouragées au traitement à l’aide de l’écothérapie. « C’est, en tout premier lieu, une approche de développement personnel ainsi que de soins psychologiques et psycho-somatiques dont la spécificité est de se pratiquer dans l’interaction avec la nature (et/ou des éléments de nature) ; elle inclut le travail avec le corps et les 5 sens ». Jean-Pierre LE DANFF.
Figure 10: L’homme dans la nature Source : photo prise par Zied Mnif
Article du « Journal of Affective Disorders » : Interagir avec la nature améliore la cognition et affecte les personnes souffrant de dépression. Cet article explique les détails d’une étude qui vise à déterminer si la marche dans la nature pouvait être bénéfique pour les personnes atteintes d'un trouble dépressif majeur (TDM). 12
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I.3.2. Effets sociaux, spirituels et tangibles « Le contact avec la nature deviendra alors plus proche, plus profond, plus nourricier. La conscience de son calme, de sa beauté, de son harmonie, de son mystère même, nous touchera, y compris dans ce qu’il y a de beau, d’harmonieux et de mystérieux en nous ». Jean-Pierre LE DANFF13 La littérature fournit un ensemble d'exemples de l'importance des lieux sacrés et d’interagir avec la nature pour la spiritualité de certains individus et groupes. En restant proches de la nature, on se sent plus reconnaissant et appréciatif de ce qu’elle a à nous offrir. Respirer dans la nature nous donne une conscience sensorielle saine. Au Japon, conscients de l’importance de s’entourer de la nature, le «bain de forêt» (Shinrin-yoku) ce qui signifie se baigner dans l'atmosphère de la forêt ou se plonger dans la forêt à travers nos sens, est devenu un moyen populaire de se détendre. C’est un art japonais qui a vu le jour au début des années 80 après avoir été approuvée par la Forest Agency of Japan. Le bain de forêt implique généralement des promenades méditatives dans les bois dans le but de renouer avec la nature, de réduire le stress, d'élever l'humeur naturelle et de renforcer le système immunitaire. Le bain de forêt est enraciné dans des pratiques shintoïstes et bouddhistes qui favorisent l'expérience de la nature à travers les cinq sens. Les baigneurs de la forêt passent leur temps à toucher et à sentir les feuilles, l’écorce et les fleurs. Certains apportent même des huiles essentielles pour renforcer les odeurs. Les humains sont naturellement sociaux, mais la nature de la vie moderne a diminué la quantité et la qualité de nos liens sociaux. Avec sept habitants sur dix vivants dans des zones urbaines, une grande partie de notre société est exposée à différents impacts Figure 11: Parc à Montréal Source : timeout.com découlant de la forte densité de population et de l'utilisation de la technologie. Sortir contribue à la cohésion sociale et implique généralement au moins un peu d'exercice, un stimulant de l'humeur et la rencontre des voisins et des amis. Le contact social est un autre moyen de réduire le stress. Nos émotions sont souvent négligées par la culture qui tend à privilégier le mental et le rationnel. Grace au contact avec la nature, on peut nous permettre de nous approcher à nos émotions : celle de la surprise, de l’éblouissement ou simplement la joie de toucher l’épaisseur humide de la terre, la satisfaction de croiser un sentier forestier, le sourire timide d’une vielle dame assise sur le banc d’un jardin public ou émerveillement devant un coucher de soleil…
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Jean-Pierre LE DANFF, psychothérapie, Gestalt praticien, Lorient et Quistinic.
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I.4. Trouble de Déficit de Nature (Nature-Deficit-Disorder) I.4.1. Définitions Avec plus de la moitié de la population mondiale vivant dans des zones urbaines, la qualité de vie des citadins suscite de plus en plus d’inquiétudes. Le mode de vie urbanisé et la culture centrée sur l’automobile, plus de temps devant un écran, moins de temps de loisir et une pression accrue du travail ou de l'école expose l’humanité à de nombreux problèmes physiques et mentaux chez les enfants et les adultes notamment dans les pays les plus industrialisés. Richard Louv, un journaliste et auteur américain, examine dans son livre « Last Child in the Woods » (en 2006) la relation moderne entre l’enfant et le monde naturel. Il a constaté qu’à force de vivre dans des espaces urbanisés, les enfants et même les adultes développent un trouble que Louv appelle « Nature-Deficit-Disorder » traduit en « trouble déficitaire causé par une carence en nature ».
Figure 12: couverture du livre last child in the woods de Richard Louv Source : amazon.fr
Louv explique que ce trouble de déficit de la nature n’est pas un diagnostic officiel, mais une façon de voir un problème et décrit les coûts humains de l’aliénation de la nature, parmi lesquels: diminution de l’utilisation des sens, difficultés d’attention et taux plus élevés de maladies physiques et affectives. Le trouble peut être détecté chez les individus, les familles et les communautés. Même s’il n’est pas reconnu par les psychiatres, le trouble de déficit de nature engendre de vrais symptômes comme le stress, la dépression, l’anxiété, l’obésité…
« Le syndrome du manque de nature désigne les troubles psychologiques et comportementaux dont on souffre à force de vivre en milieu urbain. » Mathilde Ramadier14 D’après Wikipédia, Le trouble de déficit de la nature est l’idée que les êtres humains, en particulier les enfants, passent moins de temps à l’extérieur, et la conviction que ce changement entraîne un large éventail de problèmes de comportement.
Mathilde Ramadier : a étudié les arts appliqués, la psychanalyse, puis la philosophie à l’École normale supérieure, travaillé quatre ans en start-up. En 2017, elle publie Bienvenue dans le nouveau monde. Comment j’ai survécu à la coolitude des start-ups chez Premier Parallèle. Auteur de bande dessinée et traductrice. 14
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Selon MACMILLAN DICTIONARY, C’est la tendance des enfants à passer moins de temps à l'extérieur que les générations précédentes et la manière dont cela les influence à mesure qu'ils grandissent.
I.4.2. Causes du Trouble de Déficit de Nature Dans son livre Last child in the woods, Richard Louv cite plusieurs causes et raisons de l’apparition de ce trouble dans notre époque dont les plus importants :
On passe beaucoup de temps à l’intérieur. Avec l'avènement de l'ordinateur, des jeux vidéo et de la télévision, les enfants aussi bien que les adultes ont de plus en plus de raisons de rester à l'intérieur. Les gens passent moins de temps en famille et développent de plus en plus une peur de l’autre « stranger danger ». la sécurité, les blessures et la peur du crime poussent les parents à protéger leurs enfants en les gardant à l’intérieur au lieu de les laisser jouer dehors. L’accès à la nature est devenu difficile. Les villes ne cessent de s’étendre au déterminant des milieux naturels. Les espaces verts et les parcs ne sont pas si nombreux ni riches dans la plupart des milieux urbains
I.4.3. conséquences sur le comportement et la santé de l’Homme
Les enfants respectent peu leur environnement naturel immédiat et évidemment les enfants déconnectés de la nature ne se battront pas pour la sauver. « Le désengagement rapide entre les enfants et les expériences directes dans la nature, qui se sont accélérés au cours des trois dernières décennies, a eu de profondes conséquences, non seulement pour la santé des générations futures, mais également pour la santé de la Terre elle-même » Louv, 2006 Plusieurs troubles et maladies mentales peuvent se développer à cause du déficit de la nature telle que la dépression, les problèmes d’attention… « C'est un problème parce que les enfants qui ne connaissent pas la nature semblent plus sujets à l'anxiété, à la dépression et aux problèmes de déficit de l'attention». Louv, 2006 Les gens qui ne s’exposent pas suffisamment au soleil et respirent de l’air polluée même à l’intérieur des bâtiments souffrent de plusieurs nuisances, de carence en vitamines et plus fréquemment des allergies. En fait l'EPA (Environmental Protection Agency) classe la pollution de l'air intérieur parmi les cinq principaux risques en santé publique. En 2012, selon l’Organisation mondiale de la santé, un décès sur huit est causé par la pollution intérieure.
I.4.4. Remèdes Il est nécessaire de s’ouvrir à l’extérieur, d’augmenter sa dose de nature ! Pour remédier le trouble de déficit de nature, il est prescrit de pratiquer des sports, de se balader, de visiter les parcs…
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Il est aussi possible d’introduire la nature dans nos espaces de vie. En fait, des plantes en pot et des bacs à fleurs peuvent fournir un espace vert qui attire la faune et expose les gens aux avantages du monde naturel.
L’Homme a trop longtemps oublié qu’il fait partie de la nature. Depuis la nuit des temps, la nature a toujours était proportionnées et équilibrées. Mais l’Homme a discordé les harmonies de la nature et renversé les proportions qui assuraient la stabilité des composantes existantes. L’action destructrice de l’Homme est devenue de plus en plus cruelle au fur et à mesure de son évolution affectant gravement les espèces animales et végétales. L’appauvrissement de l’environnement naturel et l’épuisement excessif des ressources naturelles menace de même la vie de l’Homme. Pour cette raison, l’être humain a enfin commencé à prendre conscience de la nécessité de protéger ce qu’il reste, si ce n’est de rétablir ce qui a été gaspillé gratuitement. Il est nécessaire de préserver la nature non seulement pour la survie de l’espèce humaine, mais aussi parce que humeurs, comportements et émotions dépendent de la présence de la nature. S’exposer à la nature a de nombreux bénéfices sur la santé physique, psychique et spirituelle de l’Homme. Pareillement et de plus, l’Homme a envahi la nature en imposant de nombreuses villes sans hésiter à modifier le relief et les plantations du site ou même déplacer le fleuve
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qui la traverse. Il est clair que l’Homme a privilégié sa relation avec l’environnement bâti sur celle avec l’environnement naturel.
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CHAPITRE II : L’architecture et le corps humain II.1. Le corps humain : outil de perception sensuelle L'architecture, comme tout art, est fondamentalement confrontée aux questions de l'existence humaine. C’est notre principal instrument pour nous rapprocher de l’espace et du temps et pour donner à ces dimensions une mesure humaine. Elle domestique un espace sans fin et un temps infini à tolérer, habiter et comprendre par l’humanité. «Je confronte la ville avec mon corps; mes jambes mesurent la longueur de l'arcade et la largeur du carré; mon regard projette inconsciemment mon corps sur la façade de la cathédrale, où il erre sur les moulures et les contours, sentant la taille des renfoncements et des saillies […] J'habite dans la ville et la ville habite en moi » (Pallasmaa, 2005)15 Les sens ne servent pas uniquement au jugement de l’espace, ils sont aussi un moyen d'articuler l’expérience et la pensée sensorielles. Toute architecture est multi sensorielle, les qualités de la matière, de l'espace et de l'échelle sont mesurées par les yeux, les oreilles, le nez, la peau, la langue, le squelette et les muscles. L'architecture implique sept domaines d'expérience sensorielle qui interagissent et s'infusent. « Nous voyons la profondeur, la vitesse, la douceur et la dureté des objets. Si un peintre Figure 13: couverture du livre the eyes of veut exprimer le monde, son système de the skin de Juhani Pallasmaa Source : couleurs doit générer le complexe indivisible .amazon.fr des impressions, sinon sa peinture ne laisse entrevoir que des possibilités sans produire l'unité, la présence et la diversité insurpassable qui régit l'expérience et qui définit pour nous la réalité». (Merleau Ponty)16
Eyes of the Skin: Architecture and the senses (traduction : Regard des sens : l’architecture et les sens) c’est un ouvrage écrit par Juhani Pallasmaa (architecte finlandais, ancien professeur d'architecture de l'Université technologique d'Helsinki et ancien directeur du Musée de l'architecture finlandaise) 16 Maurice Merleau-Ponty (1908-1961) : philosophe français, cousin du philosophe des sciences Jacques Merleau-Ponty. 15
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II.1.1. La dominance de la vision
Dans son livre vers une architecture, le Corbusier insiste sur l’effet de la vision sur les émotions. «Nos yeux voient clairement, que notre esprit mesure. Ces formes primaires ou subtiles, souples ou brutales, agissent physiologiquement sur nos sens (sphère, cube, cylindre, horizontale, verticale, oblique, etc.) et les commotionnent. » L'art de l'œil a certes produit des structures imposantes et suscitant la réflexion, mais il n'a pas facilité l'enracinement de l'homme dans le monde bâti. La perception du monde extérieur est dominée par la vue, elle devient le principal moyen de naviguer dans un espace. En conséquence, certains architectes tentent à satisfaire ce sens en se concentrant sur le composant visuel de leurs conceptions. Les bâtiments se sont transformés en produits d'image détachés de la profondeur et de la sincérité existentielle laissant les autres sens, la culture, les rêves et l’imagination sans abri. Une nouvelle prise de conscience est projetée avec force par des architectes du monde entier qui tentent de re-sensualiser l’architecture par un sens renforcé de la matérialité, de la texture et du poids, de la densité de l’espace et de la lumière matérialisée. « J’aime les espaces nus, les plans libres, les volumes simples et je travaille beaucoup l’idée de transition. Entre le dedans et le dehors, la nature et le construit, l’individu et le monde. Mes architectures sont ouvertes au vent, à la lumière et l’ombre. Je parle beaucoup de lumière mais l’ombre aussi est essentielle.» T. Ando Les ambiances lumineuses dans l’intérieur des bâtiments de Tadao Ando évoluent, entrent dans un jeu de va et vient entre la lumière qui chasse l’ombre et vice-versa, une oscillation entre une lueur diffuse et directe.
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II.1.2. L’expérience auditive
L’écho des marches d’une rue pavée, le sifflement nocturne d’un train dans la ville endormie, le bruit des gouttes d’eau dans l’obscurité d’une ruine témoignent de l'extraordinaire capacité de l'oreille à creuser un volume dans le vide de l'obscurité. L'espace tracé par l'oreille devient une cavité sculptée à l'intérieur de l'esprit. Le son qui rebondit sur les murs environnants nous met en interaction directe avec l'espace. Le son mesure l'espace et en rend la gamme compréhensible. Nous caressons les bords de l'espace avec nos oreilles. Tandis que la vision est directionnelle, le son est omnidirectionnel. Ainsi, la vue s'isole pendant que le son s'intègre. Chaque bâtiment ou espace a son propre son de rejet ou d'invitation, d'hospitalité ou d'hostilité. La forme et les volumes d'un bâtiment et les matériaux avec lesquels il a été construit contribuent au son généré dans ses espaces intérieurs et extérieurs. Les murs tendent à étouffer le son, les hauts plafonds amplifient les effets sonores, les boiseries semblent détenir le bruit. Cependant, l'expérience auditive la plus essentielle créée par l'architecture est la tranquillité. L’architecture présente le drame de la construction silencieuse dans la matière et l'espace, l'architecture est l'art du silence pétrifié. Une fois que l'encombrement des bâtiments a cessé et que les cris des travailleurs se sont tus, le bâtiment devient le musée d'une attente et d'un silence patient.
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II.1.3. Espace de parfum
« La mémoire et l'imagination restent associées, Moi seul, dans mes souvenirs d'un autre siècle, je peux ouvrir le placard profond qui garde encore pour moi cette odeur unique, l'odeur des raisins secs qui sèchent sur le plateau en osier. L'odeur des raisins secs! C'est une odeur qui dépasse la description, une qu'il faut beaucoup d'imagination pour sentir. » Gaston Bochelard17. Une odeur particulière peut nous faire rentrer secrètement dans un espace complètement effacé de la mémoire rétinienne; les narines projettent une image oubliée et nous sommes tentés d'entrer dans un rêve éveillé. Souvent, c'est une odeur qui peut évoquer un souvenir puissant: nous reconnecter émotionnellement avec nos expériences passées, Le nez rappelle les yeux. L'odorat offre un type d'orientation qui ne fait pas seulement partie de notre expérience d'un espace, mais sert également à inciter ou à guider un comportement dans cet espace. Une odeur peut agir comme une frontière qui rappelle l’endroit où on y était ou donne une idée sur l’espace qu’on va pénétrer. L’intégration stratégique des stimuli olfactifs dans les environnements architecturaux donnera à l’architecture une nouvelle hauteur poétique qui est capable de connecter profondément les occupants, former des souvenirs et incite une réponse émotionnelle. De plus, la forme d’un bâtiment et ses matériaux jouent un rôle essentiel dans l’atmosphère des odeurs. Lorsqu’on tente de créer une atmosphère spécifique, les odeurs peuvent être utilisées plus facilement, combinées à d’autres éléments sensoriels pour obtenir cet effet.
Gaston, Louis, Pierre Bachelard (27 juin 1884-1962) : philosophe français des sciences, de la poésie et du temps. L'un des principaux représentants de l'école française d'épistémologie historique. 17
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II.1.4. Toucher, un sens profond
« Les mains veulent voir, les yeux veulent caresser.» (J. PALLASMAA, The Eyes of the Skin) Le sens du toucher est l'inconscient de la vision qui fournit également des informations en trois dimensions sur les corps matériels. Le regard caresse les surfaces et les contours et la peau lit la texture, le poids, la densité et la température de la matière. La surface d’un objet ancien, polie à la perfection par l’outil de l’artisan et les mains assidues de ses utilisateurs, séduit le caillage de notre main. La peau trace des espaces de température avec une précision infaillible; l'ombre fraîche et vivifiante sous un arbre ou la tache de chaleur caressante dans un endroit ensoleillé. Le pied peut mesurer la gravité avec la densité et la texture du sol. Le regard est le sens de la séparation et de la distance, tandis que le toucher est le sens de la proximité, de l'intimité et de l'affection. « L'œil est l'organe de la distance, tandis que le toucher est le sens de la proximité, de l'intimité et de l'affection. L'œil observe et étudie, tandis que le toucher s'approche et se sent. Ainsi, lorsque la lumière laisse de la place à l'ombre, nos autres sens sont aiguisés, y compris la sensibilité au toucher. » (Levin, D.M)18
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https://patricklim.phlarchitects.com (traduction personnelle)
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II.1.5. Le muscle et l’os
"L'architecte intériorise le paysage, le contexte et sa conception conçue dans son corps: le mouvement, l'équilibre et la balance sont ressentis inconsciemment à travers les astuces du corps dans le système musculaire et dans les positions du squelette et des organes internes." (J. Pallasmaa) Tout comme l’oiseau qui façonne son nid, l’homme primitif a utilisé son corps comme système de dimensionnement et de dosage de sa construction. La sagesse du corps et les sens musculaires et tactiles conservés dans la mémoire haptique viennent des connaissances essentielles de l’ancien chasseur, pêcheur et agriculteur, ainsi que du maçon et du tailleur de pierre. Quand on entre dans un bâtiment, il ne s’agit pas simplement une série d’images rétiniennes, c’est un bâtiment que l’on rencontre, il est abordé, confronté, rencontré, lié à un corps, déplacé et utilisé. Une réaction corporelle est un aspect indissociable de la perception de l'architecture résultant de cette action implicite. Lorsque nous ouvrons une porte, notre poids croise celui de la porte, nos jambes mesurent les marches, nous montons un escalier, notre main caresse le garde-corps et tout notre corps se déplace de manière diagonale et spectaculaire dans l’espace. Un bâtiment encadre, articule, restructure, donne un sens, relie, sépare et unit, facilite et interdit. L'authenticité de l’architecture repose sur le langage tectonique de la construction et la compréhensibilité de l'acte de construire par les sens. Nous voyons, écoutons, touchons et mesurons le monde avec toute notre existence corporelle. Notre domicile est le refuge de notre corps, de notre mémoire et de notre identité. Nous sommes en dialogue constant et en interaction avec l'environnement, au point qu'il est impossible de détacher l'image du soi de son existence spatiale et situationnelle.
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II.1.6. Le goût de l’architecture
La langue humaine ne peut distinguer que 7 à 8 types de goût distincts, tandis que le nez distingue des centaines de substances, même en quantités infimes. L'olfaction amplifie le sens du goût. Le goût de l'architecture ne signifie pas littéralement de s'agenouiller et d'essayer de manger les briques, mais cela signifie que l'architecture peut donner l'eau à la bouche juste à la vue de matériaux attrayants. «Certaines couleurs et certains détails délicats évoquent une sensation orale. Une surface de pierre délicatement colorée et polie est perçue de manière subliminale par la langue » (Pallasmaa). Adrian Stokes19 écrit à propos de l'interaction subtile des sens: « La vision est également transférée au goût, certaines couleurs ainsi que des détails délicats évoquent des sensations orales. Une surface de pierre polie délicatement colorée est perçue de manière subliminale par la langue. Il y a de nombreuses années, je me suis senti obligé de m'agenouiller et de toucher le seuil de marbre blanc de la résidence James à Carmel, en Californie, conçue par Charles et Henry Greene. L’architecture de Carlo Scarpa présente aussi fréquemment des expériences de goût similaires».
Adrian Stokes (1902-1972) esthète, critique, peintre et poète associé à John Ruskin et Walter Pater comme l'un des plus grands penseurs esthétiques de cette tradition empirique anglaise. 19
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II.1.7. L’intuition
Henry Moore20 a écrit sur la nécessité d'une identification corporelle dans l'art: «C'est ce que doit faire le sculpteur. Il doit constamment s'efforcer de penser et d'utiliser la forme dans son intégralité spatiale. Il y pense comme s'il était dans la tête, quelle que soit sa taille, comme s'il se tenait complètement enfermé dans le creux de sa main. Il visualise mentalement une forme complexe de tout autour de lui-même. Pendant qu'il regarde d'un côté, il sait à quoi ressemble l'autre. Il s'identifie avec son centre de gravité, sa masse, son poids, il réalise son volume et l'espace que la forme déplace dans l'air.» De même, l’architecture est une communication directe entre le corps de l'architecte et le corps de l’habitant, peut-être des siècles plus tard. Un architecte intériorise un bâtiment dans son corps, le mouvement, l'équilibre, la distance et la balance sont ressentis inconsciemment à travers le corps comme une tension dans le système musculaire et dans les positions du squelette et des organes internes. Lorsque l'œuvre interagit avec le corps de l'observateur, l'expérience reflète ces sensations corporelles du fabricant. Nous avons une capacité innée de mémoriser et d'imaginer des lieux. La perception, la mémoire et l'imagination sont en interaction constante. Comprendre l’échelle de l’architecture implique de mesurer inconsciemment un objet ou un bâtiment avec son corps et de projeter son schéma corporel sur l’espace en question. Nous ressentons du plaisir et de la protection lorsque le corps découvre sa résonance dans l’espace. Le sens de la gravité est l’essence de toutes les structures architectoniques et la grande architecture nous fait prendre conscience de la gravité et de la terre. L'architecture renforce la verticalité de notre expérience du monde. En même temps que l’architecture nous fait prendre conscience de la profondeur de la terre, elle nous fait rêver de lévitation et de fuite.
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Henry Spencer Moore (1898-1986) : sculpteur britannique.
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II.2. L’architecture des sens II.2.1. Définition de l’ambiance en architecture
Ensemble des caractères définissant le contexte dans lequel se trouve quelqu'un, un groupe ; climat, atmosphère. (Larousse) Atmosphère d'un lieu, d'une réunion, d'une fête... (Linternaute.com) Atmosphère matérielle et morale qui environne une personne (Robert)
Chaque bâtiment dialogue avec nos sens en proposant une expérience sensorielle et unique. L’architecture crée ce lien « charnel » ferme et mémorable entre l'Homme et le bâti. Un passage qui contribue à vivre en harmonie avec les divers lieux qu’on fréquente dans tout environnement de vie privée, professionnelle, de loisir… Le terme « ambiance » se réfère aux liens émotifs que l’Homme tisse avec son contexte de lieu et à l’expérience émotionnelle qui nait grâce à sa confrontation à la matérialité de l’espace. L’ambiance se définie par la présence de l’usager (son humeur, sa culture, sa perception…) aussi bien que par les caractéristiques physiques. On parle d’ambiance lumineuse, thermique, acoustique, olfactive mais on évoque également l’atmosphère, la tonalité et le climat d’un lieu. L’ambiance pour Thibaud 21 c’est la « basse continue du monde sensible, la toile de fond à partir de laquelle s’actualisent nos perceptions et nos sensations », Le philosophe allemand Gernot Böhme affirme que l’ambiance peut être une conjonction d'impressions personnelles et émotionnelles de l'espace, mais que cette conjonction se reproduit par l'assemblage objectif de matériaux, les proportions spatiales, le vieillissement des matériaux, les connexions des matériaux et les connexions au lieu ou à d'autres bâtiments, rythmes, lumière… Peter Zumthor22 identifie l’ambiance (ou l’atmosphère) comme principe directeur qu’il utilise dans sa pratique architecturale. En répondant à la question : qu'est-ce qui m'a touché? Peter Zumthor décrit les éléments visuels « Tout. Les choses elles-mêmes, les gens, l'air, les bruits, les sons, les couleurs, les présences matérielles, les textures, les formes aussi, des formes que je peux apprécier. Des formes que je peux essayer de déchiffrer. Les formes que je trouve belles. » Et affirme qu’il était aussi ému par « Mon humeur, mes sentiments, le sentiment d’attente qui m’avait envahi pendant que j’étais assis là. Ce qui apporte ça m'a rempli pendant que j'étais assis là». L’architecte finlandais Juhani Pallasmaa relie l’expérience de l’ambiance au concept de la qualité spatiale. « La qualité d’un espace ou d’un lieu n’est pas simplement une qualité de perception visuelle, comme on le suppose habituellement. Le jugement du caractère environnemental est une fusion multi-sensorielle complexe.»
THIBAUD Jean-Paul : Sociologue, Doctorat d’Urbanisme et Aménagement, Directeur de Recherche au Cresson. 22 Peter Zumthor: architecte suisse, lauréat du prix Pritzker 2009. 21
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II.2.2. Eléments physiques de l’ambiance architecturale II.2.2.1. La lumière « L’architecture est le jeu savant, correct et magnifique des volumes sous la lumière. » (Le Corbusier) La lumière a une grande influence sur la perception de l’architecture. Elle révèle sa forme et sa signification, définit les limites, crée des liens entre les zones et dilate et accentue les pièces. Qu'il s'agisse de lumière naturelle ou artificielle, la lumière attire l'attention sur les textures, les couleurs et les formes d'un espace, aidant ainsi l'architecture à atteindre son véritable objectif. Chaque surface, chaque matériau réagit d’une manière différente à la lumière. Tout bâtiment a la capacité d’absorber la lumière suivant la position du soleil créant ainsi des tonalités lumineuses provoquées par le monde extérieur invisible mais tellement perceptible. À la tombée de la nuit, la lumière artificielle dévoile la vie de l’intérieur de l’édifice créant une nouvelle ambiance et une atmosphère différente. La lumière donne vie à l’architecture. L’ombre découpe l’image, crée une cadre, creuse des volumes, c’est un outil de composition, déconstruction du réel pour en faire surgir de nouvelles formes. L’harmonie entre l’ombre et la lumière détermine la profondeur et la distance d’un espace. «Dans les grands espaces d'architecture, il y a une profonde et constante respiration d'ombre et de lumière; l'ombre inhale et l'illumination exhale, la lumière» (Juhani Pallasmaa). Il est donc important de concevoir en ayant conscience de la lumière afin d’arriver à un résultat juste. Mais quel que soit l'effet recherché, les concepteurs utilisent toujours les mêmes outils: luminosité, couleur, direction, contraste et durée. L’architecte suisse, lauréat du prix Pritzker 2009 Peter Zumthor aborde l’éclairage du milieu bâti dès le début de la conception, en l’imaginant comme une masse obscure ou la lumière y pénétre et s’infiltre progressivement et doucement selon les intentions conceptuelles du projet. Il accorde spécialement beaucoup d’importance à la lumière naturelle qu’il la considère d’une pureté et d’une beauté renversante. La lumière déclenche des émotions de différentes manières et a un impact profond sur la façon dont les gens perçoivent et expérimentent leur environnement. Mais la perception de la lumière et ses effets sur l'homme sont subjectifs. L’éclairage apporte une valeur émotionnelle à l'architecture et détermine l’appréciation et influe sur le comportement des gens: ce qu’ils ressentent dans un lieu, comment ils le perçoivent, s’y comportent, et comment ils l'utilisent. En fait, l’architecture religieuse des civilisations passées traduit une relation étroite de la lumière avec la vie et l’associe à la spiritualité.
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Figure 14: Effets de la lumière sur l’espace architectural Source : pinterest.com
II.2.2.2. Le son « […] le calme, l’évidence, la durée, la présence et l’intégrité, mais aussi la chaleur et la sensualité; être soi-même, être un bâtiment; non pas représenter quelque chose, mais être quelque chose. » (Peter Zumthor) Le son peut être invisible ou uniquement perçu inconsciemment, mais il demeure un élément architectural façonné et conçu qui a son rôle à jouer dans l’espace. Dans une approche architecturale sensible, l’usager est appelé à percevoir la différence des sons. Chaque espace peut fonctionner comme un instrument rassemblant les différents sons, les amplifiant et les transmettant. Il est important d’étudier les traitements nécessaires pour une bonne isolation acoustique pour des espaces calmes et confortables. Il est aussi nécessaire d’imaginer les sons que pourraient donner les matériaux lors de la conception selon leurs proportions et leurs assemblages. L'acoustique peut agir de manière profonde et viscérale, pas très différente de la musique. Il existe souvent une corrélation entre la fonction d’un lieu ou d’un objet et le son attendu. Les humains utilisent leur sens de l'ouïe pour comprendre l'espace. Le son fonctionne avec les autres sens pour aider les gens à naviguer et à comprendre les formes, les objets et les distances. Ainsi, la qualité auditive d'un espace architectural est très importante. «Vous sentez que votre vie se perd dans une pièce où le son meurt, Nous avons besoin de la réverbération. » (Renzo Piano)
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II.2.2.3. La température Chaque bâtiment se caractérise par une température déterminée. Les matériaux tirent la chaleur des corps et ces derniers dégagent leur propre chaleur. A température égale, des nuances de sensations de confort sont perçues par l’usager selon le chauffage qui se fait soit par convection ou par rayonnement, selon aussi l’humidité de l’air et le renouvellement d’air qui diffère entre le Simple Flux et le Double Flux. Il faut que le concepteur aille la conscience que c’est lui qui détermine le confort intérieur à travers les choix qu’il prenne au moment de construire. Ces choix forment par suite un environnement de paramètres qui définissent les "températures ressenties". Dans son processus de création, le concepteur est en quête de la bonne tonalité pour le corps et l’esprit. Il tente de tempérer l’espace dans le sens littéral et abstrait. Il donne de l’importance à comment le bâtiment est ressenti, vu, senti et touché.
Figure 15: Effets de la température sur l’espace Source : mydimmerswitch.com
II.2.2.4. Le contexte du lieu « La possibilité de concevoir des bâtiments qui pourront avec le temps faire ainsi corps avec la forme et avec l’histoire d’un lieu me passionne» (Peter Zumthor) Un projet bien conçu doit avoir la capacité d’entrer en rapport avec l’existant et de se lier au contexte du lieu. Les matériaux de construction doivent s’harmoniser avec l’historique du lieu. Les matérialités de la construction et du site se combinent et s’accordent, formant une mélodie harmonieuse. L’apparence d’un édifice et son insertion dans l’environnement crée une expression physique, originale et souvent remarquable de la culture. Le concepteur doit prendre en considération les divers paramètres de la relation d’insertion de l’architecture à son site : les données physiques, sociales, réglementaires, urbaines, historiques et culturelles parce que autrement, le paysage n’accepterait pas le nouveau monument. De ce fait, les bâtiments devraient pouvoir vieillir dans le paysage avec cohérence.
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II.2.2.5. La relation entre l’intérieur et l’extérieur « Toute relation entre (…) un intérieur et un extérieur procède de deux aspects de dépendance. Elle aménage à la fois séparation et liaison ou, en d'autres termes, différenciation et transition, interruption et continuité, frontière et passage. » (Pierre von Meiss, De la forme au lieu23) Tout projet a pour objet de proposer un « tout » contenu et représenté par une forme architecturale. Certains dispositifs ou éléments architecturaux se trouvent dans des espaces de transition entre l’intérieur et l’extérieur portant une fonction médiatrice entre l’homme et son espace. Le concepteur souci de l’usager, qu’il soit dedans ou dehors, comment il vit les passages, les seuils et les transitions entre ces deux mondes, comment surgit la perception de l’espace à ces points de changement, comment il ressent soudain une enveloppe autour de lui qui est celle de l’édifice. L’enveloppe réunit et rassemble l’usager collectivement ou individuellement tandis que c’est la façade qui décide ce qui sera montré de l’intérieur ou de l’extérieur de l’édifice.
Figure 16: Croquis d’un espace ouvert couvert Source : sauzet-architectes.fr
Professeur de projet et de théorie d'architecture à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (en 1993), auteur de « De la forme au lieu une introduction à l'étude de l'architecture » (publié en 1986). 23
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II.3. Projet de référence
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Les arguments de choix :
Relation entre les différents éléments de la nature Choix des matériaux et de l’éclairage Créations des diverses sensations à travers l’architecture
Relation entre les différents éléments de la nature Réponse architecturale
L’architecte veut montrer que l’Homme fait partie d’un cycle de la nature et n’est pas au sommet d’une pyramide. Tout élément de la nature dépend des autres éléments, tout est en interaction perpétuelle. Outils Une petite ouverture zénithale a permis une rencontre entre l’eau architecturaux et le soleil pour la première fois depuis 150 ans. Un espace est dédié à l’observation de la transformation de l’eau en brouillard lors de sa rencontre avec la lumière du soleil pour mettre en exergue le cycle de la nature. Illustrations
Source : pinterest
Choix des matériaux et de l’éclairage Réponse architecturale
Les matériaux choisit rappellent la culture japonaise et respecte l’emplacement du projet. L’intensité de l’éclairage dépend de chaque espace selon les sensations que l’architecte vise à projeter chez le visiteur.
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Outils Un long plafond de 120m est construit en piliers de cryptomeria architecturaux pour que les gens puissent marcher sur l’eau tout en voyant et sentant l’air et l’humidité du cyprès japonais. Tout le long d’un corridor de 120m le visiteur ne peut voir que la lumière à la fin du trajet. L’architecte a choisi de ne pas éclairer le corridor pour mettre en relief l’importance de certains éléments de la nature : l’eau, l’air et la lumière. L’installation est sombre et mal éclairé. L’architecte profite de ces ténèbres pour contrôler la lumière et choisir les espaces à éclairer. Illustrations
Source pinterest.com
Création de diverses sensations à travers l’architecture Réponse architecturale
Rendre le visiteur conscient de la beauté des éléments naturels et les admirer Attirer le visiteur aux éléments de la nature et éveiller le besoin de les approcher Sentir l’étendue de l’espace en le traversant Comprendre la relation entre l’Homme et la nature Outils Faire ressortir la beauté des éléments de la nature dans un endroit architecturaux précis Les lignes directrices du corridor de 120m guident vers la lumière au fond de la structure. Dans la dernière citerne, l’eau se transforme en brouillard. Le visiteur observe l’eau qui peut devient même plus léger que l’air. C’est la relation cyclique et dynamique qui relie ces deux éléments de la nature que l’architecte vise à dévoiler. Illustrations
Source : pinterest.com 41
La perception de l'espace est obtenue en utilisant tous les sens humains. Voir, écouter, sentir, toucher… tout contribue à la perception. L'espace possède une dimension acoustique, une dimension olfactive, une dimension tactile et une dimension thermique. Il peut même être perçu à travers la dimension du goût. La perception de l’espace n’est pas seulement sensorielle, elle est également affectée par les humeurs individuelles et les expériences antérieures, on peut donc supposer que deux personnes ne peuvent vivre un espace de la même manière. Aujourd’hui, les concepteurs ne s’intéressent pas seulement au confort de l’Homme à travers l’ambiance architecturale mais aussi en éveillant l’attraction humaine et primitive à la nature. Puisque la nature a d’innombrables bénéfices sur la santé de l’Homme, il est donc raisonnable d’essayer de chercher le sens de la nature dans l'œuvre architecturale.
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CHAPITRE III : La nature dans le monde bâti III.1. L’influence de la nature sur l’architecture Le premier abri de l’Homme primitif s’est inspiré de la nature pour façonner et construire son habitat, en commençant par la cabane de l’Abbé Laugier décrivant le premier modèle architectural d’abri primitif. Avec l’évolution de l’Homme, la nature a toujours influencé l’architecture. On retrouve l’imitation des éléments naturels dans les animaux stylisés caractéristiques du néolithique, site préhistorique du Mésolithique Göbekli Tepe; le sphinx égyptien. Les Grecs et les Romains de l’Antiquité ont incorporé des motifs naturels dans leur conception, tels que les colonnes inspirées des arbres et les feuilles d'acanthe qui ornent les temples grecs. Au-delà de la représentation, les cultures du monde entier ont longtemps introduit la nature dans les maisons et les espaces publics. Les exemples classiques sont les cours intérieures de l'Alhambra en Espagne, les bols à poisson en porcelaine de la Chine ancienne, la volière de Teotihuacan (la vieille ville de Mexico), les jardins suspendus de Babylone, les, les étangs à papyrus dans les maisons des nobles égyptiens…
Figure 17: Imitation de la nature dans l’architecture source: pinterest.com
La nature a joué un rôle clé dans l’histoire et la théorie de l’architecture occidentale, apparaissant comme un motif constant dans les textes architecturaux depuis ses débuts avec Vitruve jusqu’à Alberti et jusqu’à la Ville radieuse de Le Corbusier. Elle est considérée comme un élément fondamental dans l’élaboration de la théorie et des principes de l’architecture. Avec l’avènement de l’architecture moderne, on retrouve non plus des reproductions exactes des éléments naturels, mais des interprétations artistiques et des imitations «schématiques» de ces éléments. Ces appropriations architecturales symboliques dépassent les simples ornementations pour caractériser l'ensemble de la structure architecturale. La Sagrada Família d’Antoni Gaudi, inaugurée en 1882, est un exemple bien connu d’utilisation des formes fonctionnelles de la nature pour répondre 44
à un problème structurel. Il a utilisé des colonnes qui modélisaient les canopées de ramification des arbres. L'inspiration de la nature était bien visible dans l’Art nouveau. Les plantes exubérantes de l’architecte Victor Horta jonchant les bâtiments belges, les lampes en forme de fleurs luxuriantes. À Chicago, Louis Sullivan a créé une ornementation complexe avec des feuilles et des corniches ressemblant à des branches d’arbres. Son protégé Frank Lloys Wright a utilisé le grain du bois et la texture de la brique et de la pierre comme élément décoratif. Ses conceptions ultérieures incluent parfois des espaces exaltants, comme le balcon en porte à faux sur la cascade de la maison sur la cascade. Bien que les ornements aient été dépouillés par les modernistes européens, ils ont utilisé le bois et la pierre comme éléments décoratifs. Le Corbusier a essayé d’offrir aux habitants un lien avec la nature dans sa Cité Radiant en installant des tours dans un parc entouré d’herbe et d’arbres. D’autre part, l'architecture organique utilise des formes géométriques inspirées de la nature et cherche à reconnecter l’Homme avec son environnement en écoutant et s’intégrant au site. La forme doit suivre le flux et ne pas contrarier les forces dynamiques de la nature. Les architectes organiques optent pour une esthétique inspirée de la nature pour susciter une prise de conscience de l'environnement naturel pour répondre aux besoins de l'Homme.
III.2. Effets de la technologie sur la relation de l’architecture et la nature Historiquement, la nature a toujours été incorporée et intégrée dans le discours architectural. Cependant, avec l’évolution de la technologie de construction des bâtiments, la relation entre architecture et nature, depuis environ 500 ans, est une juxtaposition. Les architectes et les urbanistes, se référant à leur création en tant qu’«environnement bâti», ont placé la nature - cet autre environnement - dans le viseur, dans l'espoir de la réduire ou de la pousser en dehors de la ville. Nous avons conçu nos villes de manière à nous éloigner de la nature. Cherchant la facilité et non plus le respect de la nature et de l’environnement, l’architecture dépend de plus en plus des modes de construction conventionnelles telles que les structures à ossature de bois, d'empilement de pierres et de briques en terre crue. La conception ne se concentre plus sur les aspects du monde naturel qui contribuent à l’épanouissement de la santé humaine et à la productivité dans la lutte séculaire pour rester en forme et survivre. Au milieu du 19e siècle, les attitudes occidentales vis-à-vis de la nature étaient en train de changer. Les architectes sont dissuadés à utiliser les modèles de conception basés sur la nature, souvent perçus comme incompatibles avec les incitations économiques et les systèmes de production qui orientent le développement contemporain. «La construction moderne est souvent dictée par l'efficacité et les motifs économiques laissant à peine de la place pour des références symboliques et stylistiques à des contenus naturels» (Joye24, 2007). L'architecture contemporaine présente souvent un type d'organisation structurelle différent qui n'est pas enraciné dans les plans de la nature, mais qui est plutôt dérivé Philippe Joye, né le 4 juillet 1941 à Fribourg, est un architecte et une personnalité politique suisse. (Wikipédia) 24
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de concepts générés intellectuellement (rectangles, sphères, surfaces planes et lignes droites). Cela commence à changer. Les architectes considèrent de plus en plus la nature comme un élément non seulement à incorporer dans l'architecture, mais aussi comme une source d’inspiration. Ils ont pour objectif de lutter contre le style architectural dominant responsable d’endommager l’environnement naturel et construisent des bâtiments qui fonctionnent avec l’environnement plutôt que contre lui. En intégrant la nature dans l’architecture on retrouve et réintègre le lien fondamental perdu entre l’Homme et la terre. Un concept novateur est né dans le but de créer des environnements naturels propices à la vie, au travail et à l'apprentissage et soutenir la relation entre l’environnement et l’architecture, actuellement au plus bas : la Biophilie.
III.3. De retour à la nature : La Biophilie La présence des thèmes naturels dans les structures et les lieux historiques suggère que la conception biophilique n’est pas un phénomène nouveau, en tant que domaine des sciences appliquées, il s’agit plutôt de la codification de l’histoire et de l’intuition humaine. Plusieurs recherches scientifiques récentes prouvent que les liens avec la nature sont essentiels au maintien d’une existence saine et dynamique en tant qu’espèce urbaine.
III.3.1. Définitions de la Biophilie Le mot « Biophilie » est formé par la combinaison de « Bio » qui veut dire la vie ou être vivant et le suffixe « philie » qui signifie l’attraction et l’amour. La Biophilie est donc le fait d'aimer le vivant. La Biophilie est lien biologique inné de l’humanité avec la nature. Elle donne du sens et explique pourquoi les feux crépitants et les vagues qui s’écroulent nous captivent, Figure 18: Espace public biophilique Source : karibati.fr pourquoi une vue sur le jardin peut renforcer notre créativité, pourquoi les ombres et les hauteurs suscitent la fascination et la peur, et pourquoi les animaux de compagnie et les promenades dans un parc ont des effets réparateurs sur notre psychologie. La Biophilie peut également aider à expliquer pourquoi certains parcs et bâtiments urbains sont préférés aux autres et quels aspects de la nature ont le plus d'impact sur notre satisfaction à l'égard de l'environnement bâti. « Peut-être nous n'avons pas besoin de preuves aussi rigoureuses en ce qui concerne le contact avec la nature… Peut-être que nous ne savons pas tout ce qu'il faut savoir 46
sur les avantages du contact avec la nature sur l’être humain, mais nous avons une idée assez juste et nous savons beaucoup sur l’insertion de la nature dans l'environnement bâti. Et compte tenu du rythme auquel les décisions sont prises et les lieux construits, il est urgent de mettre en œuvre ce que nous savons. Nous ne pouvons pas attendre la recherche ». (Howard Frumkin, 2008, Nature Contact and Human Health, Biophilic Design). La Biophilie : un terme psychologique C’est un terme créé par le psychanalyste Erich Fromm 25 en 1964 dans son exploration de «l’essence de l’homme». Il explique que la biophilie est l'obsession psychologique d'être attiré par des choses vivantes et vitales, c’est «l'attraction vers tout ce qui est vivant». Selon Fromm, les villes deviennent de plus en plus mécanistes et industrialisées, séparant davantage les humains de la nature et augmentant l'anxiété et même la haine de la vie. Pour cette raison, la conception biophilique est d’une grande importance. Elle crée chez l’Homme la tendance à intégrer et à unir, à construire plutôt qu'à conserver, à faire l'expérience du nouveau plutôt que de rester avec la certitude du passé, à utiliser l'amour et la raison plutôt que la force et le contrôle. «La conscience biophile est motivée par son attrait pour la vie et la joie; l'effort moral consiste à renforcer le côté amoureux de la vie en soi-même » (Fromm). Fromm explique que la reconnaissance du fait que les villes mécanistes et stériles contribuent à la déconnexion de la nature, conduit à admettre le potentiel des villes pour devenir plus en harmonie avec la nature et qui nourrissent la conscience biophilique. La Biophilie : un terme biologique En 1984, le sociobiologiste Edward Wilson26 a développé et popularisé le concept de l’être humain biophilique dans son livre Biophilia (1984). Pour Wilson, la biophilie est «la tendance innée à se focaliser sur la vie et sur les processus qui en ressemblent» (Wilson, 1984, p. 1). Wilson a approfondi les recherches de Fromm. Il affirme qu’un amour biophilique de la vie est inhérent à l’Homme. Il est une propension qui se développe dans le cadre de la survie évolutive. Sans cet amour, il est inévitable de suivre un chemin de vie régressif et plus destructeur. En fait, Wilson suggère que si les humains ont le choix, ils opteront pour la construction près de l’eau sur un terrain végétalisé et élevé. Quand ce choix n’est pas possible, ils intègrent des éléments de la nature dans leurs domiciles comme les jardins, les piscines, les fontaines… ce qui laisse à penser que le développement mental de l’Homme dépend de la Biophilie.
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Erich Fromm (1900-1980) sociologue et psychanalyste américain d'origine allemande. Un des premiers représentants de l'École de Francfort. Il a greffé la thèse freudienne sur la réalité sociale. L'un des premiers penseurs du xxe siècle à parler de l'idée d'un revenu de base inconditionnel. 26 Edward Osborne Wilson : biologiste, entomologiste et myrmécologue de notoriété mondiale. Fondateur de la sociobiologie.
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« La faune et la flore d'un pays seront considérées comme partie du patrimoine national tout autant que son art, son langage et c’est cet étonnant mélange d’accomplissement et de farce qui a toujours défini notre espèce. » (Wilson, 1984, p. 145).
III.3.2. Les avantages de la Biophilie Sur la santé de l’Homme Les humains ont évolué en fonction de la sensibilité et du besoin d’autres êtres vivants dans le contexte bâti. En fait, des études récentes montrent que l’environnement bâti en relation avec la nature a plusieurs effets positifs sur notre santé : La nature peut aider à soulager de nombreux problèmes psychologiques tels que le stress et l’anxiété. La conception biophilique s’est avérée avoir un impact positif sur l’humeur des gens. Les bâtiments et les bureaux sont plus apaisants et constituent un endroit plus agréable en présence de plantes qui nous permettent de mieux percevoir notre environnement. Des recherches réalisées par Bill Browning27 et Sir Cary Cooper28, des perceptions de bien-être et d’une santé mentale saine peuvent augmenter jusqu'à 15% lorsque les personnes travaillent dans un environnement incorporant des éléments naturels, contrairement à celles n'ayant aucun contact avec la nature sur leur lieu de travail. Avoir une vue sur des éléments naturels réduit le stress. Il est important aussi d’incorporer des couleurs et des textures naturels et d’avoir un espace bien lumineux et spacieux. Sur l’économie Selon Oliver Heath29 Au cours des 35 dernières années, de nombreuses études ont été consacrées sur les avantages d’un environnement bâti en rapport avec la nature: Dans les milieux de travail : augmentation de la productivité de 8%, augmentation du taux de bien-être de 13%, augmentation de la créativité, réduction de l'absentéisme et du présentéisme. Dans les dispositifs hôteliers et touristiques: Les clients sont prêts à payer 23% de plus pour les chambres avec une vue sur les éléments biophiliques. Dans les espaces éducatifs: augmentation de la capacité d’apprentissage de 20 à 25%, amélioration des résultats des tests, des niveaux de concentration et d’assiduité. Dans les espaces de soins de santé: temps de récupération postopératoire réduit de 8,5%, réduction des analgésiques de 22% Sur l’environnement
Bill Browning: architecte, l’un des principaux penseurs et stratèges du secteur de la construction verte et de l’immobilier. 28 Sir Cary Lynn Cooper: psychologue britannique d'origine américaine et professeur du 50e anniversaire de la psychologie organisationnelle et de la santé à la Manchester Business School de l'Université de Manchester. 29 Oliver Heath Design est une pratique d'architecture durable et de design d'intérieur axée sur la recherche visant à améliorer la santé et le bien-être dans l'environnement bâti. 27
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L’intégration des éléments de la nature dans l’intérieur des bâtiments améliore également la qualité de l’air. Cela pourrait à son tour réduire la fatigue et le risque de syndrome des bâtiments malsains. Les plantes absorbent le dioxyde de carbone et rejettent de l'oxygène dans l'atmosphère. Il est important que suffisamment d’oxygène circule dans l'espace. Les niveaux de poussière sur le lieu de travail peuvent être réduits jusqu'à 20% lorsque les plantes sont introduites. Un autre avantage de la conception biophilique est qu’elle réduit le bruit ambiant. Elle peut réduire la quantité de bruit de fond jusqu’à 5 décibels. Les plantes aident à absorber le son, une source de distraction et de nuisance est donc réduite. L'urbanisation croissante souligne l'importance de la conservation de la biodiversité dans les villes. Les toits verts et les murs végétaux, avec le choix approprié d’espèces de plantes, peuvent potentiellement atténuer «la perte de services écosystémiques dans les zones urbaines» (Cook-Patton & Bauerle30). De plus ils contribuent de manière significative à la réduction de consommation de l’eau et l’utilisation de l’eau pluviale. La conception biophilique a des effets de réduction de la consommation d’énergie. Akbari (2002) indique qu’une plantation d’arbres de rue peut permettre de réduire de 25% la consommation nette d’énergie pour le chauffage et le refroidissement. Seize arbres d'ombrage ont économisé 30% du refroidissement énergétique (Leung et al. 2011). Les façades végétalisées améliorent la qualité de l'air, le confort thermique et la santé humaine, avec des économies de consommation d'électricité de 5% à 10% (Sheweka & Mohamed, 2012; Susca, Gaffin & Dell'Osso, 2011)31
III.3.3. La Biophilie et l’architecture Dans l’environnement bâti, la conception biophilique peut être représentée par différentes manières. La connexion à la nature se fait directement, indirectement ou symboliquement à travers les éléments extérieurs, l’espace intérieur, la décoration et les paysages extérieurs d’un bâtiment. Elle a pour objectif de promouvoir le bien-être physique et psychologique des habitants, comme a expliqué Kellert «L'un des plus grands défis de notre époque est de créer de bons logements pour les habitants de nos villes et d'autres environnements conçus qui répondent à notre besoin inhérent de contact bénéfique avec le monde naturel». Le design biophilique met l'accent sur le lien de l'Homme avec la nature. Cependant, il est essentiel de comprendre que la biophilie n’est guère la simple addition d'arbres et de verdure dans l'environnement construit. Le design biophilique est largement axé sur les relations de l’Homme avec la nature et l’importance de la nature dans la société, de manière culturelle et durable. Fox et Hartley32 suggèrent que la conception biophilique fournit «un nouveau langage pour interpréter l'environnement construit» et que «la biophilie représente un moment de création abondante dans la conception». La nouvelle orientation des recherches actuelles sur l'architecture biophilique vise à : Revue de la littérature. : Avantages potentiels de la diversité végétale sur les toits végétalisés. Mentionné dans la thèse de Laurie K. Taylor : Une exploration de la biophilie et de ses implications dans la conception de l'environnement bâti (traduction personnelle). 32 Mentionné dans le livre Conception biophilique: « théorie, science et pratique pour donner vie aux bâtiments » écrit par Stephen R. Kellert, Judith Heerwagen et Martin Mador. 30 31
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• plus d’interaction entre les cadres naturels et physiques • réduction de la consommation d’énergie • gestion efficace des ressources naturelles • réduction des effets négatifs du changement climatique Types de la conception biophilique :
Figure 19: Types de la conception biophilique Source : auteur
La biophilie dans le bâtiment « Lorsque la nature inspirera notre architecture, non seulement son apparence, mais également le fonctionnement des bâtiments et des communautés, nous aurons fait de grands progrès en tant que société ». (Rick Fedrizzi33) Les occupants des environnements bâtis ne veulent pas simplement travailler, jouer, manger ou dormir dans un bâtiment fonctionnel. Ils veulent être inspirés, revigorés, réconfortés et rassurés par leur environnement. Ils veulent des espaces qui les rendront plus appropriés et plus confortables. L'architecture biophilique offre une opportunité
Président de l'International WELL Building Institute, auteur, Greenthink: Comment le profit peut sauver la planète. 33
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passionnante d'obtenir des avantages environnementaux, moraux, sociaux et économiques. Selon des études récentes, les environnements bâtis intégrés à la conception biophilique assurent des résultats favorables non seulement médicaux mais aussi par rapport à la réduction du stress et l’élévation la créativité et la productivité des habitants. Cependant, la conception biophilique ne se réalise pas sans difficulté selon Clare Miflin34 et Cathcart Architects35, la difficulté liée à une approche de conception aussi holistique a nécessité la collaboration et l’engagement de plusieurs équipes multidisciplinaires dans des stratégies de conception atypiques. Tout d’abord, chaque site est défini quant à son emplacement, son relief naturel, sa végétation locale et son macro-microclimat. L’architecture biophilique fait partie d’une vision novatrice de l’architecture dans laquelle les matériaux sont reliés à la nature grâce à l’interaction entre le cadre physique et naturel, c’est-à-dire la communication des formes et la cohérence de leur propriété visuelle et les motifs naturels. L'architecture biophilique est une tentative pour éliminer l’écart entre l'architecture moderne et le besoin humain de se connecter au monde naturel en essayant d’atteindre l'autosuffisance en matière de production d'énergie, de recyclage des matériaux et d'utilisation des énergies renouvelables. Il s’agit aussi d’une approche qui souligne l’importance de la maintenance, de l’amélioration et de la restauration de l’environnement bâti. Stephen Kellert est d’avis que s’il n y a pas de relation émotionnelle entre le bâtiment et ses habitants et s'il ne peut pas favoriser une connexion innée avec l'homme et la nature, il sera abandonné et deviendra un jour obsolète. Il pose la question importante: si les gens ne sont pas «attachés émotionnellement et intellectuellement aux bâtiments, aux paysages et aux lieux qui les entourent, seront-ils motivés à soutenir ces lieux? Les occupants d'un bâtiment seront-ils suffisamment motivés pour consacrer temps, argent et énergie à la restauration de ces lieux au fil du temps? ».
Exemple d’architecture Biophilique : Entrepôt converti en une maison :
Clare Miflin: architecture au Centre pour la conception zéro déchet Fondé par Michael Cathcart: architecte depuis le début des années 90, est diplômé de l'École d'architecture et de design urbain de l'Université du Kansas en 1992 avec mention. 34 35
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Figure 20: Photos de l’entrepôt converti en une maison Source: projects.archiexpo.fr
Architectes : Corben Architects Emplacement : Australie Cette maison est dotée de plusieurs caractéristiques d’un bâtiment biophilique, il y a une connexion visuelle avec la nature grâce à l’utilisation de matériaux naturels (bois et pierre) et les couleurs d'origine naturelle (en particulier le vert). La conception de l’entrepôt s’articule autour d’une cour qui apporte lumière et ventilation naturelles dans les pièces principales et dans toutes les chambres à coucher. Les lignes de mire sont amplifiées par la perspective qui est étroitement liée à la conception ouverte. La perspective est également importante pour permettre la meilleure vision des éléments et des systèmes naturels. La Biophilie dans l’environnement urbain Grace au développement de la technologie et des connaissances des bienfaits de la nature sur la santé physique et mentale, on est capable de minimiser la dégradation de l’environnement et d’enrichir l’esprit et le corps. Kellert36 décrit cette pratique comme la «Réconciliation et l’harmonisation des environnements naturel et humain» et que la Biophilie aide à créer «une société moderne plus satisfaisante et plus épanouie, en harmonie avec la nature». C’est la conception pour l’Homme comme étant un organisme biologique qui fait partie de la nature. Pour bâtir une ville biophilique, plusieurs stratégies et outils sont utilisés à différents échelles (gouvernementales et géographiques) comme les toitures végétales, les murs végétaux, les jardins publics, l’encouragement de l’implantation des arbres…
Stephen R. Kellert un des auteurs (avec Judith Heerwagen et Martin Mador) du livre « Conception biophilique: théorie, science et pratique pour donner vie aux bâtiments » (2008). 36
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Judith Heerwagen37 affirme que le cerveau humain revient constamment à ses instincts de survie. Ce qui attire l’Homme primitif doit être introduit dans les bâtiments en utilisant la lumière, les matériaux et la ventilation naturels, des formes organiques et des vues panoramiques sur des paysages naturels. Les villes biophiliques diffèrent des villes vertes qui se concentrent plutôt sur l’énergie renouvelable et la conservation de l’environnement, tandis que la biophile se souci du bien-être et la santé de l’Homme qui a un besoin inné de se connecter à la nature. Elle n’est pas seulement définie par ce qui est conçu mais elle dépend essentiellement de la conscience des habitants et de l’importance de la faune et la flore, leur connaissance de divers espèces qui les entourent et du temps passé dans la nature. Pour Fromm38 «La conscience biophile est motivée par son attrait pour la vie et la joie, l'effort moral consiste à renforcer le côté amoureux de la vie en soi-même ». Les villes biophiliques du monde incluent Birmingham au Royaume-Uni, Milwaukee, Portland et San Francisco aux États-Unis, Oslo en Norvège, Wellington en NouvelleZélande, et Singapour. Singapour :
Figure 21: Photos de Singapour Source : biophiliccities.org
Singapour établit un modèle mondial pour combiner densité et nature. Il possède de vastes parcs et espaces verts, reliés par 200 km de connecteurs de parc, dont une grande partie se présente sous la forme de passerelles surélevées et de promenades en canopée. Il a donné la priorité à la plantation d'arbres et apporte son soutien aux jardins communautaires et à l'installation de murs végétaux et de toits.
Judith Heerwagen : chercheur en psychologie au sein du Bureau fédéral des bâtiments écologiques à haute performance de la US General Services Administration. 38 Dans son livre La Passion de détruire : anatomie de la destructivité humaine (The Anatomy of Human Destructiveness, 1973). 37
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Wellington, Nouvelle Zélande :
Figure 22: Photos de Wellington, Nouvelle Zélande source : facebook.com
Wellington établit différentes stratégies dans le but de devenir une «éco-ville». La ville compte plus de 4000 hectares de parcs et des réserves pour les loisirs, la faune et les paysages. Il compte également plus de 60 groupes de conservation communautaires qui participent à la plantation d’espèces indigènes dans les réserves. Le conseil municipal de Wellington prévoit de planter environ un million d'arbres indigènes au cours des quatre prochaines années.
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III.4. Projet de référence
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Les arguments de choix :
Insertion au site Structuration des volumes Choix de l’insertion au site
Réponse architecturale
L’architecte a choisi de s’insérer au site à l’aide d’une architecture silencieuse et discrète qui conserve l'apparence du Wadi Rum et créer une présence architecturale dissimulée et non gênante.
Outils architecturaux
En s’inspirant des fourmilières, l’architecte a choisi de mettre l'accent sur la soustraction et non sur l'addition, la soustraction des vides et des volumes spatiaux en fonction des besoins des utilisateurs en termes de fonctions, de circulation et de lumière naturelle. Ainsi, il inverse la relation entre explicite et implicite pour soustraire des espaces où on vit, expérimente et apprécie.
Illustrations
Maquette montrant le résultat de la soustraction des volumes Structuration des cours et des ouvertures Réponse architecturale
les chambres souterraines sont accessibles par des cours et ont des aménagements conçus en fonction des besoins spécifiques de la station, des suites de l’hôtel et du musée.
Outils architecturaux
Chaque cour est unique et repose également sur la topographie du site et l'intensité de la lumière naturelle nécessaire pour chaque fonction, chaque cour étant soustraite suivant des fonctions spécifiques et les exigences de la circulation. la volumétrie de toute ouverture dépend des courbes topographiques du milieu.
Illustrations
Plan montrant la structuration des cours 59
Depuis le début de l’histoire, les bâtisseurs s’inspiraient de l’environnement naturel afin de construire l’habitat soit en imitant ou en interprétant ses éléments. Avec l’évolution des matériaux de construction, la hausse de la croissance démographique et les changements des besoins humains, l’architecture s’amasse, s’entrecroise et se détache de son environnement. Elle est conçue de manière à éloigner l’Homme de la nature. En modifiant la façon dont nous concevons les villes et les bâtiments pour qu'ils se connectent plutôt que de se déconnectent de la nature, nous pouvons améliorer notre proximité et notre relation avec l'environnement. Le concept de la Biophilie traduit l’attraction biologique de l’Homme à la nature. Il a des bénéfices sur la santé psychologique et physique des humains et sur l’environnement. C’est une manière de construction qui réduit l’écart entre l'architecture et l’Homme tout en minimisant l’impact néfaste de la construction sur l’environnement.
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La nature a été omniprésente dans toutes les phases de l’humanité affectant sa culture, ses comportements et ses traditions. Le contact avec la nature a des effets psychologiques, physiologiques, sociaux et spirituels sur l’Homme. Il assure le bien-être du genre humain et le bon fonctionnement du corps humain. Mère nature a ses lois conçues pour maintenir l'équilibre et le nombre proportionnels d’espèces vivantes. Désastreusement, l’Homme a discordé les harmonies de la nature et a renversé les proportions qui assuraient la stabilité des composantes existantes. Les comportements cruels des êtres humains mettent en danger la survie de tout être vivant sur terre. L’Homme a envahi la terre en imposant des villes et des banlieues sur les sites. Il s’est éloigné de la nature pour construire un monde nouveau. L’architecture éveille dans les gens tous les sens. Voir, écouter, sentir, toucher… tout contribue à la perception de l’espace. Ce dernier est doté de diverses dimensions : olfactives, tactiles, thermiques… les concepteurs visent à assurer le confort des usagers et satisfaire leurs besoins à travers l’ambiance architecturale, chose qui n’est pas toujours simple puisque la perception d’un espace n’est pas seulement sensorielle, elle est également affectée par les humeurs et les expériences de chaque individu. Si le concepteur aspire à assurer le confort et le bien-être de l’Homme, il est raisonnable de repenser sa relation avec la terre en recherchant le sens de la nature dans l'œuvre architecturale. Le concept de la Biophilie est donc né pour balancer ce lien et satisfaire l’attraction humaine à la nature à travers une architecture en harmonie avec l’environnement qui vise l’autosuffisance en énergie, le recyclage des matériaux et l'utilisation des énergies renouvelables. La Biophilie offre divers avantages environnementaux, moraux, sociaux et même économiques. Néanmoins, il ne suffit guère de changer la manière de construire afin de rapprocher l’Homme de la nature, une conscience doit répandre au monde entier dans l’intention d’assurer une vie saine pour les gens aussi bien que sauver la nature et protéger ce qu’il reste, si ce n’est de rétablir ce qui a été gaspillé gratuitement. Une nouvelle culture dans les grands secteurs économiques est aujourd’hui indispensable tel que l’écotourisme. Ce type de tourisme est non seulement une activité génératrice de richesses, mais aussi un moyen de transformation sociale, de protection de l’environnement, et aussi de rééquilibrage des régions.
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PARTIE II : L’ECOTOURISME : UNE ALTERNATIVE FIABLE I.
Introduction
L’écotourisme représente une alternative durable au tourisme de masse. Dans cette partie, on va étudier l’évolution des types du tourisme en faveur de la nature et la protection de l’environnement.
Figure 23: Types du tourisme, du tourisme durable et de l’écotourisme Source : auteur
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CHAPITRE IV : Le tourisme IV.1. Définitions du tourisme Le tourisme est défini par Larousse comme « Action de voyager, de visiter un site pour son plaisir. » et « Ensemble des activités, des techniques mises en œuvre pour les voyages et les séjours d'agrément.. ». D’après l’OMT (l’Organisation Mondiale du Tourisme), le tourisme est défini comme «Les activités déployées par les personnes au cours de leur voyages et de leurs séjours dans les lieux situés en dehors de leur environnement habituel pour une période consécutive qui ne dépasse pas une année, à des fins de loisirs, pour affaires et autres motifs» ou aussi « Les activités des personnes qui se déplacent dans un lieu situé en dehors de leur lieu d’environnement habituel pour une durée inférieure a une limite donnée et dont le motif principal est autre que celui d’exercer une activité rémunérée dans le lieu visité » Cette définition ne met pas en évidence le caractère multisectoriel et multidimensionnel du tourisme. Il englobe le transport, l’hébergement, la restauration, les loisirs, les spectacles, le sport et les entreprises de voyages. On distingue plusieurs motifs de tourisme classés selon l’OMT en Loisirs, détente et vacances, visites à des parents et amis, affaires et motifs professionnels, traitement médical, religion et pèlerinages… D’après l’OMT, « Un touriste peut être considéré en tant que voyageur ou visiteur. Les visiteurs sont assimilés à des personnes séjournant une nuitée dans un lieu. Les voyageurs, par contre, sont des personnes qui se déplacent entre deux ou trois lieux différents, leur séjour dépassant une journée. »
Figure 24: Types des voyageurs Source : auteur
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IV.2. Types du tourisme Le tourisme balnéaire : c’est la forme du tourisme la plus répandue, c'est le tourisme des vacances au bord de mer ou les visiteurs jouissent de la côte, la plage, la mer et le soleil. Le tourisme rural : Selon Henri Grollea39: « ... tourisme d’échelle locale, il est d’initiative et de gestion locales, il vise des retombées locales, il valorise les ressources naturelles, les paysages, les patrimoines et la culture locale» Le tourisme urbain : Il s’exerce dans les villes et les espaces urbains afin de découvrir leur culture ou leur patrimoine architectural. Le tourisme culturel : c’une forme de tourisme qui a pour but de découvrir le patrimoine culturel d'une région et le mode de vie de ses habitants. Le tourisme religieux : c’est la visite des lieux saints et sacrés dans un but de pèlerinage, de rassemblements religieux ou à des fins de loisirs. Le tourisme d'affaires : il s’agit des déplacements d’objectifs professionnels. Le tourisme médical : « se faire soigner dans un pays autre que celui où l'on réside, par économie ou pour bénéficier des soins et des prix qui ne sont disponibles qu'à l'étranger. » (Wikipédia) Le tourisme sportif : un déplacement qui a pour objectif soit d’assister à un évènement sportif soit d’y participer. Le tourisme de montagne : il s’exerce dans les massifs montagneux, associé au tourisme sportif pour ses activités sportives (randonnées, rafting, trekking…). Le tourisme saharien : visite des milieux sahariens pour des buts de loisir et de découverte.
Henri Grollea (…-1999) ancien inspecteur général du tourisme en France, l’un des auteurs de « Espace rural, espace touristique » écrit rédigé en 1986 39
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Figure 25: Les divers types de tourisme Source : photos prises par Zied Mnif
IV.3. Situation économique du tourisme Le tourisme est l’une des plus grandes industries du monde. Ce secteur se place en troisième position derrière les secteurs pétrolier et automobile pour le revenu mais en première position pour le taux de croissance. En effet, le tourisme est considéré à la fois comme reflet et facteur de mondialisation et un agent particulièrement efficace de l'intégration d'espaces et de sociétés à la vie internationale. Il est Inéluctable pour la croissance de l’économie globale, exceptionnellement pour les pays en voie de développement. Cette activité représente 12% du PIB mondial (500 milliards de dollars) et 8% de l’emploi (200 millions de personnes). Ces données laissent penser que le tourisme international a la capacité de générer des capitaux dans les divers pays touristiques grâce aux commerces dynamisés, entrée de devises étrangères, popularité croissante…
IV.5. Problèmes et risques liés au tourisme « Le tourisme est l’industrie qui consiste à transporter des gens qui seraient mieux chez eux dans des endroits qui seraient mieux sans eux. » (Jean Mistler40)
IV.5.1. Sur le niveau économique Le tourisme est une source de revenus considérable tant pour l’économie locale que pour l’économie internationale. Cependant les revenus ne sont pas équitablement retenues dans l’économie locale ce qui limite et réduit l’incidence économique positive et le potentiel de développement du secteur. C’est un problème permanent
Jean Mistler (1897-1988) : Politicien français, ministre, écrivain et secrétaire perpétuel de l’Académie Française. 40
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pour la plupart des pays pauvres qui s’appuient sur le tourisme pour assurer leur développement. La part non retenue dans l’économie locale moyenne représente entre 40 et 50 % des recettes touristiques brutes dans la majorité des pays en développement et entre 10 et 20 % dans les pays développés. Certaines études ont montré qu’au mieux, entre un cinquième et un tiers des dépenses totales effectuées par les touristes sur place profitaient aux pauvres directement. Ces pourcentages modestes soulignent la nécessité d’appliquer une stratégie nationale efficace pour renforcer l’intégration des investisseurs étrangers et des entreprises nationales. Le tourisme est un secteur très dépendant de facteurs externes (les tensions politiques, les catastrophes naturelles, l’économie mondiale, le terrorisme…) de ce fait, la stagnation de ce secteur entraine une perte d’emplois. Même si ces emplois sont souvent mal rémunérés, saisonniers et sans possibilités de réelles qualifications, ils sont nécessaires pour la croissance économique. On cite comme titre d’exemple les tragiques événements du 11 septembre aux Etats-Unis qui ont engendré une perte d’environ 6,6 millions d'emplois, soit un salarié du secteur sur douze (selon l’article écrit par Dirk Belau en 2003 sur L'impact de la crise de 2001. 2002 sur le secteur de l'hôtellerie et du tourisme).
IV.5.2. Sur le niveau socioculturel Le développement du tourisme international, surtout lorsqu’il s’opère entre le Nord et le Sud, est sans doute un facteur majeur du changement sociétal puisqu’il impacte les populations d’accueil. Contrairement à la production et à l’exportation de biens ou de la plupart des services, le tourisme repose sur le déplacement du consommateur. Il implique ainsi des contacts directs entre les touristes, les travailleurs et les habitants. L’un des plus importantes conséquences du tourisme est l’érosion culturelle. Les changements de valeurs et le manque de respect envers ce qui est considéré sacré affectent les aspects de rituels religieux, rites ethniques traditionnels, les coutumes et les festivités. En fait, non seulement les expressions et les manifestations culturelles mais aussi les produits artisanaux sont de plus en plus mis en conformité au gout des touristes qui se satisfont d’un aperçu de l'atmosphère locale au lieu de chercher l’authenticité. Le contact avec des voyageurs de style de vie différents peut entrainer le choc des cultures. Certains comportements des touristes causent des ressentiments lorsqu’ils sont en décalage avec les valeurs du pays (habillement, nudité, consommation d’alcool…). Le modèle contesté est ressenti comme imposé et, parfois, comme une incitation au non-respect des traditions et religions locales. Il s’ensuit des tensions au sein de la communauté et des réactions d’extrémisme. Sur le plan éthique, Le taux de criminalité augmente avec la croissance de l'urbanisation d'un territoire et de sa fréquentation, car la présence d'un grand nombre de touristes possesseurs de liquidités et d’objets de valeur, favorise certains phénomènes tels que le vol, le commerce de la drogue et la mendicité. De plus, le recours au travail des enfants est également un problème majeur dans ce cadre: 68
selon l’Organisation Internationale du Travail (OIT) environ 10% à 15% des emplois touristiques sont dévolues à des enfants dans des conditions critiquables.
IV.5.3. Sur l’environnement Le développement touristique a dégradé de nombreux écosystèmes, particulièrement dans les régions côtières et montagnardes connues par leur vulnérabilité. En fait, les milieux les plus riches en biodiversité sont aussi les milieux les plus attractifs pour le tourisme, mais les plus sensibles à ses impacts. La sur-construction et de la sur-fréquentation des zones littorales, l’extraction de sable, l’érosion des plages et des dunes, la dégradation des sols entraînent souvent une perte de biodiversité et de qualité paysagère. Le tourisme met sous pression les ressources hydriques en concentrant la demande sur de courtes périodes, en particulier dans les régions sèches, ensoleillées, préférées des touristes. Ces derniers utilisent souvent des quantités d'eau disproportionnées. Ils peuvent consommer jusqu'à 300 litres d'eau par jour quand, en Europe, la consommation moyenne par ménage ne dépasse pas 150 à 200 litres par jour. Un parcourt de golf de 18 trous consomme environ 200 000 litres d'eau par jour (selon le Programme des Nations unies pour l'environnement). Stefan Gössling41 et Michael Hall42 ont calculé que les complexes touristiques de luxe d’une île d’Afrique de l’Est utilisaient jusqu’à 2 000 litres d’eau par touriste et par jour, soit près de 70 fois la consommation journalière moyenne des habitants locaux. La production de déchets et les systèmes de gestion de ces déchets sont un autre facteur qui a des conséquences néfastes pour l’environnement. Le tourisme produit un niveau relativement élevé de déchets et la gestion des eaux usées est souvent déplorable. Les hôtels évacuant directement dans la mer les eaux non traitées. On estime qu’en Méditerranée européenne, 30 % seulement des eaux usées provenant des villes côtières sont traitées avant d’être évacuées.
Figure 26: Effets du tourisme sur l’environnement en chiffres Source : auteur
Stefan Gössling : Professeur à l’Université de Lund et à l’Université de Linnaeus, en Suède, et coordonnateur de la recherche à l’Institut de recherche de la Norvège occidentale. 42 Michael Hall : Professeur à l'Université de Canterbury, en Nouvelle-Zélande, également affilié à l’Université d’Oulu, en Finlande et à l’Université de Linnaeus, Suède. 41
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Le tourisme est aussi un gros consommateur de produits énergétiques impliquant des dépenses très élevées et des pollutions indéniables. Le PNUE (Programme des Nations unies pour l'environnement) estime que le tourisme est à l’origine d’environ 5 % des émissions totales de GES, essentiellement du fait du transport (75 %) et de l’hébergement (21 %) des touristes. Dans le bassin méditerranéen par exemple, on estime que le tourisme est responsable de 7% de la pollution totale. Parallèlement, l'augmentation de la pollution dans ces régions a également des effets négatifs sur le secteur touristique. L’incidence du tourisme sur la diversité biologique est d’ores et déjà immense. Les destinations du tourisme de masse connaissent un cycle de vie bien déterminé comme tout produit commercial. Une fois une destination touristique commence à connaître un déclin des revenus, il est difficile de rebondir et ce qui est encore plus important, les caractéristiques naturelles de ces attractions se dégradent brutalement. Les destinations situées sur les côtes et dans les montagnes risquent d’être les plus menacées, car les écosystèmes se détériorent de façon dramatique et le changement climatique commence à faire des ravages dans ces régions du monde. Selon le PNUE, «ne pas intégrer les préoccupations relatives à la diversité biologique dans la planification des destinations et l’investissement aura des effets néfastes sur le milieu naturel, attisera les conflits avec la population locale et réduira, tant pour la destination que pour les investisseurs, la capacité de créer de la valeur».
IV.4. Le tourisme en Tunisie La Tunisie est un grand attrait touristique grâce à sa position géographique stratégique, son climat modéré, la diversité de ses paysages naturels, ses 1200Km de côtes et son patrimoine qui date des milliers d’années dont huit sites sont inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco. Depuis l’indépendance de la Tunisie, les activités touristiques ont été développées par plusieurs intervenants. En fait, c’est en 1959 que la société hôtelière et touristique de Tunisie (SHTT) a été créée. Elle exploite plusieurs hôtels dans différentes régions du pays. D’autres sociétés ont commencé à naitre comme la Société hôtelière touristique et balnéaire Marhaba (1964), Société Hôtelière et Touristique Mhenni (1969)… Suite à une étude sur la localisation et les potentialités des sites touristiques et la nécessite d’une infrastructure appropriée, l’Agence Foncière Touristique (AFT) a été créée en 1973. C’est une 70
entreprise publique et financièrement autonome dont le fonctionnement et l’organisation sont régis par le décret n° 2007-1114 du 02 Mai 2007. L’économie du pays se base en grande partie sur le tourisme. C’est un facteur de développement des différents secteurs comme le transport, l’artisanat, le commerce… Le tourisme représente une source de devise pour le pays. Depuis la révolution, les chiffres des recettes touristiques sont gravement baissés ce qui a influencé négativement l’économie nationale. L’activité touristique s’est aussi ralentie à cause de l'attaque du musée du Bardo, l'attentat de Sousse puis l'attentat de Tunis. Heureusement, ce secteur s’est amélioré ces dernières années. En 2018, il y a eu 7,903.385 de touristes de différentes nationalités, un chiffre en hausse de 17,4 % par rapport à 2017. La saison touristique de cette année a laissé dans les caisses tunisiennes 3,928.8 Milliards en Dinar tunisien. Selon les statistiques présentées par le ministère de tourisme, le nombre de nuitées le plus élevé est enregistré dans la région de Djerba-Zarzis, suivie par Sousse, Nabeul-Hammamet, Monastir-Skanes puis Carthage.
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Depuis quelques années, dans le contexte de mouvements en faveur du développement durable et du commerce équitable, on assiste à des prises de conscience au niveau international des méfaits du tourisme. Les vacanciers sont de plus en plus éveillés de l’importance du voyage responsable et à faible impact sur l’environnement. Le tourisme est l’un des piliers sur lesquels se base l’économie des pays en développement comme la Tunisie. Il est une forme d’exploitation à revenus non négligeables. Si on doit l’encourager davantage, le commerce national va en bénéficier, mais l’écosystème et la culture seront gravement endommagés. Il est temps d’investir sur la diversification et la dispersion des attractions touristiques en déplaçant efficacement les touristes des zones de concentration massive vers des destinations à petite échelle où les personnes et les ressources peuvent être réparties entre les communautés surtout avec l’augmentation de la clientèle cherchant le tourisme de la nature. Cette dispersion des ressources atténuera la pression exercée sur les écosystèmes endommagés. Ceci favorise l’émergence et la médiatisation de projets et d’acteurs engagés dans un tourisme dit « alternatif », qui prend des formes assez diverses à partir d’une base commune liée aux trois piliers du développement durable : social, économique et écologique.
72 Surtout avec l’augmentation de la clientèle cherchant le tourisme de la nature. Cette
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CHAPITRE V : Vers un tourisme durable «…Mais le touriste consomme du rêve, des espaces, une population, une culture, de la couleur locale, surtout, c'est lui qui est transporté » (Anne Amblès43)
V.1. Le développement durable V.1.1. Définitions Ce terme apparait pour la première fois dans le Rapport Brundtland publié dans le Sommet de la Terre tenu à Rio de Janeiro (Brésil) en 1992 par l’ONU. Il est définit par « Le développement durable est un mode de développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de « besoins », et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir. »
V.1.2. Piliers
La dimension écologique : préserver l’environnement, économiser les ressources naturelles, protéger la biodiversité et lutter contre le changement climatique. La dimension sociale : Satisfaire les besoins humains, lutte contre l’exclusion et les discriminations et équité sociale. La dimension économique : croissance et efficacité économique selon les principes de la protection de l’environnement et le respect du concept social. Figure 27: Piliers du développement durable Source : auteur
V.1.3. Principes
27 principes ont été énoncés à la Conférence de Rio en 1992, parmi lesquels : La solidarité : le Nord et le Sud, l’Est et l’Ouest, entre régions pauvres et régions riches profitent du développement tout en tenant compte des besoins des générations à venir. La précaution : En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, on se donne la possibilité de revenir sur des actions et agir pour rendre les choix réversibles, sans évaluer les coûts. La participation : intégrer tous les acteurs concernés à tous les niveaux de décision, du local à l’international. Anne Amblès : Co-rédactrice de www.tourisme-durable.net, site interactif, initiative civile d’information et de débat sur le tourisme solidaire et le voyage durable. 43
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V.1.4. Acteurs L’ONU a identifié neuf acteurs majeurs du développement durable :
Les organisations non gouvernementales Les salariés et syndicats Les collectivités territoriales (ou "autorités locales") Les entreprises et industries Les communautés scientifiques et techniques Les enfants et les jeunes Les femmes Les paysannes Les peuples et communautés autochtones
V.1.5. Finalités et objectifs Le développement durable s’appuie sur cinq finalités : La lutte contre le changement climatique et la protection de l’atmosphère La préservation de la biodiversité, des milieux et des ressources La cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et entre les générations L’épanouissement de tous les êtres humains Une dynamique de développement suivant des modes de production et de consommation responsables. Le 2 août 2015, 193 pays ont approuvé les 17 objectifs de développement durable :
Figure 28: Les 17 objectifs de développement durable Source : novethic.fr
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V.2. Définitions du tourisme durable L’OMT définit le tourisme durable comme étant « toute forme de développement, aménagement ou activité touristique qui respecte ou préserve à long terme les ressources naturelles, culturelles et sociales et contribue de manière positive et équitable au développement économique et à l’épanouissement des individus qui vivent, travaillent, ou séjournent sur ces espaces. » Le tourisme durable est un tourisme qui contribue au développement économique et culturel des territoires ainsi qu’au développement humain des populations qui y vivent, travaillent ou séjournent. Il permet une répartition équitable des revenus touristiques, protège l’environnement local et planétaire en préservant l’équilibre des écosystèmes et en optimisant l’utilisation des ressources. Il privilégie les écotechnologies et renforce les compétences professionnelles, la responsabilité sociale et environnementale de tous les acteurs de la filière, le partenariat et la concertation. Enfin, il favorise la diversité culturelle et adopte les principes de la Charte du tourisme durable de Lanzarote3 (1995), de l’Agenda 21 de la culture4 (Barcelone, 2004) et de la Déclaration universelle des droits de l’homme (Paris, 1948).
V.3. Les types du tourisme durable
Tourisme responsable : le tourisme responsable est une démarche volontaire du voyageur ou du voyagiste. Voyager responsable, c’est minimiser au maximum son impact sur l’environnement et sur le mode de vie local. Tourisme communautaire : le tourisme communautaire est une forme de tourisme dans lequel l’accueil est intégralement géré par les populations locales. Slow Tourisme : il consiste à découvrir une destination à son propre rythme. Plus qu’une forme de tourisme, ce mouvement est un véritable mode de vie qui va à la rencontre des populations locales et sort des sentiers battus. Tourisme équitable : concept directement inspiré du commerce équitable, le tourisme équitable permet une rémunération plus juste des communautés locales. Tourisme Participatif : il a pour but de construire des relations entre les populations d’accueil et le voyageur. Réinvention de l’hospitalité, le voyageur participe activement à la vie locale. Écotourisme : l’écotourisme est une forme de tourisme respectueuse de l’environnement et du bienêtre des populations. Il se pratique exclusivement en milieu naturel et doit être une source financière viable pour les communautés d’accueil. Tourisme solidaire : le tourisme solidaire permet la création d’un lien de solidarité entre le voyageur et les populations. Une participation financière du voyageur est reversée à des projets de développement locaux. Les communautés locales sont parties prenantes de ces projets dont la finalité est l’amélioration de leurs conditions de vie. Agrotourisme : l’agrotourisme est une forme de tourisme durable dans les milieux agricoles. Il se pratique de plusieurs façons : hébergement en chambre d’hôtes, visite de la propriété, dégustation des produits du terroir. Son but est
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de faciliter la rencontre avec le producteur et pérenniser leur activité en leur permettant de se diversifier. Tourisme humanitaire : une forme de tourisme alternatif qui consiste à mettre à profit ses compétences auprès d’une population dite défavorisée lors d’un séjour touristique, et ainsi découvrir un pays, une culture autrement
V.4. Principes du tourisme durable Les principes de durabilité concernent les aspects environnementaux, économiques et socioculturels du développement du tourisme et concernent toutes les formes de tourisme dans tous les types de destinations. Pour garantir à long terme la durabilité de ce dernier, il faut parvenir au bon équilibre entre ces trois aspects :
Exploitation de façon optimale les ressources naturelles. Étant donné sa forte dépendance à l’environnement, le secteur du tourisme a une responsabilité particulière envers la planète et peut mettre à profit cette dépendance pour promouvoir la conservation de l’environnement en préservant les processus écologiques essentiels et en aidant à sauvegarder les ressources naturelles et la biodiversité. Respect de l’authenticité socioculturelle des communautés d’accueil, conserver leurs atouts culturels bâti et vivant et leurs valeurs traditionnelles et contribuer à l'entente et à la tolérance interculturelles. La richesse du patrimoine culturel mondial est l’une des principales motivations de voyage. On estime que 40 % des touristes internationaux sont des « touristes culturels », à savoir des voyageurs qui effectuent des visites ou des activités culturelles pendant leur séjour. Offre à toutes les parties prenantes des avantages socioéconomiques équitablement répartis, notamment des emplois stables, des possibilités de bénéfices et des services sociaux pour les communautés d'accueil, et contribuant ainsi à la réduction de la pauvreté. Il est essentiel d’adopter des politiques efficaces à la planification et à une action concertée afin de garantir que les fruits du tourisme – en termes monétaires et non monétaires – soient équitablement répartis entre les sociétés.
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CHAPITRE VI : L’écotourisme L’écotourisme c’est vivre dans un milieu ou la nature est respectée, la culture est appréciée et le séjour est si authentique que l’écotouriste se sent mentalement, physiquement et spirituellement satisfait. Il ne s’agit pas d’une simple visite d’une nouvelle région mais d’une découverte réelle et profonde de la vie locale et de la biodiversité, un vrai dépaysement et une éducation environnementale, en plus des loisirs et des activités très prisés par les routards. Il n’est plus question de fouir son quotidien et chercher le luxe ailleurs mais plutôt s’éloigner de toute source de stress et s’immerger dans une nature pure et immaculée pour s’offrir de l’air pur et parfumé par les plantes sauvages odorantes et le son apaisant des vagues, accompagnés de services de soins et d'une qualité de vie exceptionnelle.
VI.1. Définitions de l’écotourisme Dans les années 1980, l’écotourisme avait l’ambition de promouvoir des voyages de découverte dans un environnement préservé, en mettant l’accent sur l’éducation et la sensibilisation au milieu. Il s’appuie désormais sur deux chartes internationales mais non spécifiques à ce type de tourisme. Plus récemment, en 2002, le Sommet mondial de l’écotourisme de Québec a adopté une déclaration qui souligne les dimensions solidaires et humaines de ce type de tourisme. Martha Honey44 propose en 1999 une définition plus développée : « L’écotourisme, c’est le voyage dans des aires fragiles et primitives, généralement protégées, cherchant un impact minimal et (en général) à petite échelle. Il aide à éduquer le voyageur; il fournit des fonds pour la préservation de l’environnement; il bénéficie directement au développement économique et à la souveraineté des communautés locales; et enfin il stimule le respect des différentes cultures ainsi que des droits humains » Selon la société internationale de l’écotourisme, l'écotourisme est «un voyage responsable dans des zones naturelles qui préserve l'environnement, contribue au bien-être de la population locale et engage interprétation et éducation». L'Union Mondiale de la Conservation de la nature (World Conservation Union) décrit l’écotourisme comme la «modalité touristique responsable face à l’environnement et qui consiste à voyager dans des aires naturelles dans le but d’apprécier et profiter de la nature (comme toute autre manifestation culturelle du présent ou du passé), tout en promouvant la préservation, en ayant un impact de visite minimal et en privilégiant une intégration active qui apporte des bénéfices socioéconomiques aux populations locales». L’OMT le définit quant à elle comme une forme de tourisme « satisfaisant aux besoins présents des touristes et des régions hôtes, tout en protégeant et en mettant en valeur les opportunités pour le futur. Il conduit à une gestion des ressources qui remplit les besoins économiques, sociaux et esthétiques, tout en maintenant l’intégrité culturelle, les processus écologiques essentiels, la diversité biologique et les systèmes qui supportent la vie. »
Martha Honey: cofondatrice et co-directrice du centre pour un voyage responsable et ancienne co-directrice du FPIF. 44
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Figure 29: L’écotourisme face aux autres formes de tourisme selon l’AFIT source: auteur
VI.2. L’évolution de l’écotourisme "Celui qui voyage sans rencontrer l'autre ne voyage pas, il se déplace" (Alexandra David-Neel45) Depuis ces dernières années, le tourisme a connu une croissance très importante, particulièrement le tourisme durable et notamment l’écotourisme qui a connu la progression la plus rapide. Il semble que plus le public est informé de la fragilité de l’environnement, plus il prend conscience des enjeux écologiques, plus il veut en savoir sur les espèces en danger et les enjeux de la conservation des écosystèmes à travers sa propre expérience sur le terrain. D’après l’OMT, environ 7% des dépenses liées aux voyages internationaux sont attribuables à l’écotourisme. Tandis que le tourisme de masse augmentait à un taux annuel de 4%, les voyages dans la nature ont atteint un taux annuel de 10 à 30%. Les gens vivant à l’intérieur et autour des aires protégées ont bénéficié de cette expansion grâce à l’effet de conservation et d’amélioration du bien-être des communautés locales.
Figure 30: L’augmentation des écotouristes, du nombre des voyages et des bénéfices de l’écotourisme en chiffre Source : euronews.com , websideholidays.fr et travelagentcentral.com
Face à cette augmentation d’intérêt pour l’écotourisme, l’industrie touristique a dû s’adapter à ces nouvelles conditions de marché en proposant, pour certaines agences, davantage d’excursions dans la vie sylvestre que de séjours à la mer. Un nouveau type d’agence est par conséquent apparu, se spécialisant dans les voyages durables et spécialement les voyages d’écotourisme.
Alexandra David-Neel (1868-1969) orientaliste, tibétologue, chanteuse d'opéra et féministe, journaliste et anarchiste, écrivaine et exploratrice, franc-maçonne et bouddhiste française. 45
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VI.3. Principes de l’écotourisme L’écotourisme repose sur les principes associés au concept de développement durable. Toutefois, il comprend des principes particuliers qui le distinguent de la notion plus large de tourisme durable :
Enrichissement.culturel L'écotourisme contribue à renforcer la sensibilisation culturelle en favorisant le respect du lieu où vous vous rendez et de la communauté que vous visitez. Un échange culturel peut avoir lieu entre le guide et le visiteur. Les visiteurs repartent avec une expérience immersive et mémorable. Expériences.éducatives L'écotourisme est un moyen d'éduquer le public sur un lieu donné et sur l'importance de prendre soin de l'environnement. L’écotourisme est une expérience pratique qui offre aux visiteurs de nombreuses occasions d’acquérir de nouvelles compétences et informations. Croissance.économique Contrairement aux circuits commerciaux qui cherchent à accroître les résultats d’une entreprise privée, les opérateurs écotouristiques se préoccupent nécessairement du bien-être de la communauté locale. La visite touristique aura été planifiée et gérée localement, avec le consentement et la participation des résidents. Cela aide à entretenir de bonnes relations et contribue à créer des emplois locaux. Les guides touristiques, les hôtes chez l'habitant, les animateurs, les traducteurs, etc. Conservation.de.l'environnement Naturellement, l'écotourisme est axé sur l'environnement. Les opérateurs écotouristes encouragent les visites qui ont un impact faible sur la nature et préservent les ressources naturelles.
En résumé, on peut faire ressortir trois dimensions qui constituent l'essence même du concept actuel d'écotourisme : La nature La composante éducative Un besoin de durabilité et bien-être des populations locales
VI.4. Limites de l’écotourisme Bien que l’écotourisme présente de nombreux avantages en ce qui concerne la protection de l’environnement, des difficultés peuvent se présenter au niveau de la rentabilité du projet. L’écotourisme est une filière toute neuve, très appréciée par les amateurs de la nature mais demeure instable comme source de revenus. Même si l’écotourisme ne peut devenir une activité hautement lucrative, il est évident que les agences de voyage seront capables d’attirer des écotouristes, rémunérer le personnel permanent et saisonnier et offrir aux investisseurs une certaine rentabilité. L’un des problèmes aussi identifié par Hamilton46 (2002) est la pénurie d’informations pertinentes puisqu’il s’agit d’un secteur d’évolution désordonnée et variable considérablement d’un endroit à l’autre. En effet, les éventuels investisseurs ne disposent pas souvent des chiffres fiables dont ils ont besoin pour évaluer les couts, les besoins en logistiques et le nombre prévu de visiteurs ce qui cause parfois des mauvaises décisions. 46
Erica Hamilton: membre du groupe Save Discovery Bay.
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Un autre problème se pose, même lorsqu’il s’agit d’une réussite économique pour les petites entreprises, celles-ci ne peuvent pas devenir de grandes entreprises, sinon ils ne font plus de l’écotourisme et retombent dans un tourisme de masse. Certains acteurs pensent même que l’écotourisme joue le rôle d’éclaireur qui localise les sites naturels exceptionnels comme site écotouristique dans un premier temps et qui se laissent envahir, par la suite, par la masse touristique (Duffy 47, 2002).
VI.5. L’architecture : une forme d’expression de l’écotourisme L’architecture est l’art d’expression de l’environnement et de la culture en espace. Elle communique non seulement l'esthétique locale, les matériaux et les méthodes de construction, mais également les modes de vie locaux. Le mode de construction varie et met en exergue les spécificités de chaque endroit. L'architecture est un outil puissant pour créer des installations d'écotourisme qui favorisent des échanges culturels respectueux et élargis. L'écotourisme offre aux visiteurs l'occasion de faire l'expérience de nouveaux climats et de la vie en plein air dans son contexte naturel. Il est donc important que l’architecture de l’écotourisme soit sensible au climat et favorise une expérience de la nature intérieure et environnante, avec des transitions harmonieuses entre les deux. Dans toutes les activités humaines, spécifiquement dans le tourisme, une nouvelle approche d’écoconception est nécessaire pour mettre fin aux dommages irréversibles pour l'environnement, à la pollution et à l'épuisement des sources d'énergie. Ce concept est défini comme «toute forme de conception minimisant les impacts environnementaux négatifs en s'intégrant dans l'écosystème environnant» (Ceballos-Lascurain48, 2002).
Figure 31: Resort conçu par Stinessen Arkitektur situé à l'archipel de Steigen- Norvège Source : inhabitat.com Lauren Duffy est professeure adjointe au département de gestion des parcs, des loisirs et du tourisme de l'Université Clemson, aux États-Unis. 48 Héctor Ceballos-Lascuráin : architecte et environnementaliste mexicain, directeur général du Programme de conseil international en écotourisme (PICE), conseiller spécial en écotourisme auprès de l’UICN (Union mondiale pour la nature), et conseiller auprès de l’Organisation des Nations Unies pour le tourisme mondial (OMT). 47
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Le lien qui lie l’écotourisme et son architecture est la durabilité. L’écotourisme et l’architecture durable cherchent chacun à répondre aux besoins d’un groupe de personnes ou une société d’une manière compatible avec l’environnement, culturellement appropriée et économiquement viable afin de maintenir l’équilibre entre les besoins humains, les politiques de protection de l’environnement, les principes de développement culturel et les stratégies de développement économique de manière durable. Jusqu’à aujourd’hui, la relation entre l’écotourisme et l’architecture n’est pas encore définie ni clarifiée. Dans les milieux d’importance écologique, même s’il n’existe toujours pas de critères définissant les spécificités de l’architecture dans le cadre de l’écotourisme, L’architecture de l’écotourisme doit, dans la mesure du possible, respecter et refléter les pratiques de construction et l’artisanat locaux. Le plus souvent, les méthodes existantes sont adaptées au climat, invitent les connaissances et les compétences locales, sont plus faciles à entretenir et peuvent être fabriquées à partir de matériaux d'origine locale, renouvelables et rentables. Les installations et les équipements touristiques doivent suivre des méthodes de traitement des déchets appropriées et opter pour les ressources d’énergie alternatives (en particulier dans les régions éloignées). Ils doivent être adaptés à l’environnement, en harmonie avec la culture locale et à l’économie de la région. Dans le domaine de l'écotourisme, il est important de fixer des normes de durabilité pour l'hébergement. La Société internationale d’écotourisme a reconnu l’importance de la création d’un tout nouveau type de structures d’hébergement - appelées «écolodges», et a organisé deux forums internationaux sur l’écolodge et des séminaires sur le terrain en 1994 et 1995 à Maho Bay, aux Îles Vierges américaines et au Costa Rica respectivement. Dans le prolongement de ces conférences, TIES a publié deux ouvrages novateurs sur le thème des écolodges: «The Ecolodge Sourcebook» et «The International Ecolodge Guidelines Book».
VI.6. L’écolodge VI.7.1. Définitions Un écolodge, éco-hébergement ou hébergement écologique est un type d'hébergement touristique qui répond aux critères de respect de l’environnement garantis par un label environnemental. Osland et Mackoy49 décrivent les écolodges comme «les installations et services d'hébergement établis dans les zones naturelles visitées par les écotouristes ou à proximité de celles-ci». Ils affirment que l’écolodge est «Un élément essentiel de l’écotourisme, car leur conception et leur fonctionnement ont une incidence sur l’environnement naturel, leurs pratiques d’emploi et leurs achats ont une incidence sur la communauté locale, et la manière dont ils servent leurs clients a un impact sur la formation et la satisfaction des écotouristes».
Gregory E. Osland et Robert Mackoy Professeurs adjoints en marketing et gestion internationale, université de majordome, indianapolis, Etats Unies 49
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Selon James C. Russell50, Le design, la nourriture et les activités sont les trois principaux facteurs qui différencient un écolodge d’un complexe de villégiature classique. Un écolodge doit être «dépendant de la nature» et partager «la philosophie et les principes de l'écotourisme». La conception doit être «intégrée au milieu naturel par opposition à une enclave», la nourriture doit être «bonne et copieuse» et les activités doivent être basées sur l'éducation à la nature plutôt que sur «la relaxation et les installations». Ces facteurs témoignent de l'ambition d'éduquer les visiteurs et d'intégrer le lodge à l'environnement local plutôt que d'essayer d'adapter l'environnement local au lodge: faire de l'environnement le principal attrait et non le lodge. Douglas G. Pearce51 rappelle que «c’est la philosophie de la sensibilité écologique qui doit sous-tendre et finalement définir chaque opération ». Pour résumer, un écolodge est décrit dans la littérature comme un établissement d'hébergement visité par les écotouristes et connecté à la philosophie de l'écotourisme. Il doit rechercher la durabilité environnementale, sociale et économique. Un écolodge est une architecture qui est en paix et en harmonie avec la nature. Il est en perpétuelle interaction avec la nature et la culture. Il donne aux écotouristes une expérience authentique, éducative et participative.
Figure 32: Crosswater ecolodge conçu par Simon Velez localisé à Guangdong, Chine Source : architizer.com
James Charles Russell: biologiste de la conservation conjointement nommé à la Faculté des sciences biologiques et au département de statistique. Doctorant en biologie et statistique à l'université d'Auckland en 2007. 50
Douglas G. Pearce: professeur de gestion du tourisme à Victoria pendant 15 ans. Membre émérite et ancien vice-président de l'Académie internationale pour l'étude du tourisme. Maître universitaire en géographie, Université de Cantorbéry, 1972 et doctorant de Troisième Cycle Université d'Aix-Marseille II, 1975. 51
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VI.7.2. Principes D’après Hitesh Mehta (dans son livre « Authentic Ecolodges ») un écolodge respectueux à l’environnement doit répondre à 8 principes :
Utiliser des moyens alternatifs et durables d’acquisition de l’eau et en même temps réduire la consommation globale d'eau. Répondre à ses besoins en énergie grâce à une conception passive et à des sources renouvelables. Prévoir une manipulation soigneuse (réduire, recycler, réutiliser) et élimination des déchets solides. Utilisez des systèmes de traitement des eaux usées respectueux de l'environnement. S'adapter à ses contextes physiques et culturels spécifiques en faisant attention à la forme, à l’aménagement paysager et à la couleur, ainsi que par l’utilisation d’une architecture vernaculaire. Utiliser des matériaux de construction et d'ameublement écologiques. Avoir un impact minimal sur le milieu naturel et utiliser les techniques de construction traditionnelles Travailler avec la communauté locale, autant que possible, dans la planification physique initiale et la conception
VI.7.3. Normes en Tunisie D’après la Publication de l’annexe à l’arrêté du ministre du tourisme du 1er octobre 2013, fixant les normes minimales de classement des établissements touristiques fournissant des prestations d'hébergement au sein du groupe « gîtes ruraux ».
Environnement/lieu d’implantation:
L’activité doit comporter une part de sensibilisation, conscience de la nécessité de préserver les richesses naturelles et culturelles. L’utilisation de produits d’entretien biologiques et des énergies renouvelables est nécessaire. Il faut prévoir des Jardin et espace ombragé, pouvant servir à se restaurer et à se reposer avec une agrémentation végétale et florale.
Accueil et services
Prévoir des Panneaux de signalisation et affichage des tarifs des prestations offertes. 1 m² / lit (Le gite doit disposer d’un espace intérieur qui pourrait servir pour l’accueil, la restauration et le repos) La salle à manger : cet espace réservé à la restauration doit mettre en valeur les produits régionaux Le salon : cet espace doit être bien aéré, éclairé, particulièrement confortable et en parfait état d’entretien. Cabinets de toilette séparés. Ces locaux doivent avoir une aération suffisante et être dotés des équipements nécessaires 86
Locaux de service
La superficie de la cuisine, les équipements et le petit matériel d’exploitation doivent être en rapport avec la capacité d’accueil de l’établissement. Evacuation hygiénique des ordures liquides et solides conformément aux bonnes règles d’hygiène et d’environnement. Prévoir des locaux du personnel contenant des casiers et des sanitaires.
Hébergement
Les chambres doivent être confortables, pourvues d’au moins une ouverture assurant un éclairage correct et les revêtements muraux et du sol doivent être en bon état. Superficie de la salle de bain pour personne à mobilité réduite (6 m2 avec un espace de rotation de 1.50m diamètre).
Personnel
Le gite rural doit disposer d’un personnel adapté aux besoins et ayant la qualification et/ou l’expérience appropriée.
Services
Service petit déjeuner Obligatoire et Les ingrédients principaux des mets doivent être issus de produits frais. Service transport assuré sur demande, service médical et service d’activités d’animation et de loisirs.
Équipements
Isolation thermique et phonique, maintenance et Lingerie La piscine est facultative, La source des eaux de la piscine doit être soit du réseau national de distribution des eaux soit d'un puits soumis au cahier des charges fixant les conditions sanitaires pour l'utilisation des eaux de puits dans les domaines industriel ,commercial et de services promulgué par l'arrêté du ministre de la santé publique du 25 octobre 1997.
Premiers soins et sécurité incendie et de panique
se référer à la législation et la réglementation en vigueur notamment le code de la sécurité et de la prévention des risques d'incendie, d'explosion et de panique dans les bâtiments, promulgué par la loi n° 2009-11 du 2 mars 2009 et ses textes d’application.
Les mesures de sûreté
La mise en place d'un programme en collaboration avec les services de sûreté régionale qui doit prendre en considération notamment la protection de toutes les issues du gîte.
Linge et petit matériel d’exploitation
Le linge et le petit matériel d’exploitation doivent être en quantité nécessaire et en rapport avec la capacité d’accueil du gite.
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Au sein des différentes activités touristiques, l’écotourisme se présente comme une forme de tourisme qui, idéalement, offre une expérience enrichissante au visiteurs, tout en aidant à conserver les ressources naturelles et à améliorer la qualité de vie de la communauté d’accueil. L’attraction de nouveaux groupes de touristes ciblés à la recherche de vacances actives au milieu des beautés naturelles dans un environnement écologique est l’un des principaux objectifs de l’écotourisme et contribuera à la préservation de l’environnement et le développement socio-économique des communautés locales. L’Ecolodge en tant que type d’hébergement écotouristique doit sûrement trouver sa place dans le développement touristique futur, et tiendra compte du fait que les installations d’écotourisme ne peuvent pas dominer la nature environnante car la préservation du patrimoine naturel, culturel et historique représente le motif principal du tourisme visité. Pour cette raison, il est réglé par des normes bien précises comme celles de la Tunisie.
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Depuis l’apparition du tourisme dit « de masse » dans les années 50, l’activité touristique n’a cessé de prendre de l’ampleur. En fait Le tourisme est la plus grande industrie du monde qui est considéré comme un mécanisme essentiel pour reconstruire l’économie du pays et renforcer l’intégration politique, culturelle et économique mondiale. C’est l’un des piliers sur lesquels repose l’économie des pays en voie de développement et la Tunisie n’a pas échappé à cette règle. Cependant, le tourisme a des impacts néfastes, majeurs et croissants sur les hommes et la nature. L’abus de l’utilisation de l’eau et l’émission excessive du gaz à effet de serre ne fait que dégrader l’environnement en particulier lorsque la gestion des ressources naturelles est mal financée et sous-dotée en personnel. Néanmoins, depuis quelques années, dans un contexte de mouvements en faveur du développement durable et du commerce équitable, on assiste à des prises de conscience au niveau international comme au niveau national, des méfaits du tourisme. L’intégration des principes du développement durable au tourisme a été suggérée comme technique pour encourager la conservation environnementale et fournir une retombée économique aux personnes vivant à côté des zones protégées. Le tourisme durable peut être considéré comme une précieuse alliée dans la protection et la conservation des ressources et des écosystèmes Au sein des différents types de tourisme durable, l’écotourisme se présente comme une forme de tourisme qui, idéalement, offre une expérience enrichissante au visiteurs, tout en aidant à conserver les ressources naturelles et à améliorer la qualité de vie de la communauté d’accueil. L’écotourisme repose sur le processus d’interaction avec l’environnement et les échanges culturels avec les communautés hôtes. Aujourd’hui, les jeunes s’intéressent de plus en plus aux randonnées et aux campings au sein des environnements naturels comme la Tunisie qui est l’un des pays qui témoignent cette nouvelle prise de conscience du tourisme naturel. Chaque jour, des visites sont organisées vers diverses destinations et réserves naturelles dont la Galite.
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Partie III : Partie analytique Chapitre VII : La Galite, une histoire singulière Le 19 Juillet 2018, j’ai eu l’opportunité et le plaisir d’assister à un séminaire organisé à Bizerte par Mr Abdelmajid Dabbar, président de l’association Tunisie écologie, qui avait comme sujet l’archipel de la Galite. Le Professeur à la Sorbonne Philippe d'Arco, né à la Galite a présenté une conférence « la Galite 2000 ans d'histoire ». Abdelkarim Boujemaa, président de la Fédération Tunisienne des Activités Subaquatiques et de Sauvetage, témoignait de la richesse du fond marin de la Galite et la mer méditerranéenne. Ce séminaire s’est déroulé pendant toute la journée. L’ouverture a été assurée par Monsieur le Gouverneur de Bizerte. L’agenda était riche. Il y a eu :
présentation du film sur la Galite. Conférence la Galite 2000 ans d'histoire par le Professeur à la Sorbonne Philippe d'Arco, qui est né à la Galite. Témoignage de notre ami Abdelkrim Boujemaa sur la richesse du fond marin de la Galite et la mer du Nord. les témoignages des galitois - Gisele D'Arco, Isabelle Gibelin et ses filles - Ali Balghagi - Achille Vitiello - Moufida Ahmed Habib
Huit Galitois sont venus spécialement de la France et autant de galitois tunisiens pour y assister. Les Galitois nous ont parlé avec beaucoup de nostalgie et de chagrin de leur enfance passée à la Galite. Gisele D'Arco, Isabelle Gibelin et Achille Vitiello, les larmes aux yeux, se souvenaient du jour où ils ont dû quitter la Galite.
Figure 33: séminaire de la Galite
Les informations que j’ai apprises sur la Galite au sein du séminaire ont piqué mon intérêt sur ce bouchon qui flotte loin de tout continent. Je m’intéressais non seulement à sa richesse biologique mais aussi à son histoire. La Galite était un espace habité, un espace de vie. Peu à peu les habitants l’ont quitté. L’ile est donc devenue abandonnée et son écosystème s’est dégradé.
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Le 24 Aout 2018, accompagnée des Galitois et de deux de mes amies, nous avions passé deux nuitées à la Galite. Nous avions parcouru les sentiers, traversé les roches et les galets, découvert ses ruines, gouté ses fruits, senti les herbes odorantes et nous avions baigné dans son eau si claire. J’admirais tellement la Galite, mais il est clair qu’il s’agit d’une ile délaissée. Après ma visite, j’ai décidé de suggérer dans le cadre de ce mémoire un projet écotouristique qui aura pour objectif de redonner vie à la Galite et la réanimer tout en préservant son écosystème.
Figure 34: camping à la Galite
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Situation gĂŠographique
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Géomorphologie de l’archipel
Occupation humaine : Plusieurs empreintes et vestiges comme les troglodytes suggèrent que les premiers pas de l’homme sur la Galite débutent depuis l’âge néolithique. Les puniques et les romains, sachant tirer profit des iles de la méditerranée et de leur position stratégique, se sont succédés a l’occupation de la Galite. Pendant leur occupation, la pêche et l’agriculture ont été développées et une puissante flotte de guerre a été créée. Les grottes troglodytes et autres caveaux funéraires puniques, vestiges de tours et bases de colonnes romaines, laissent imaginer un âge d’or de la Galite.
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Figure 35: traces historiques trouvées sur la Galite source: Philippe d'Arco
Entre 1872 et 1964, la Galite abritait des familles italiennes, originaires de l’ile Ponza. Cette occupation a commencé par Antonio D’Arco, échappant à la justice italienne. Ainsi a démarré une arrivée progressive de familles italiennes : D’Arco, Vitiello et Mazella. Maisons, école, église, cimetières, débarcadères et port sont les principales édifices crées par les Galitois qui ont aussi développé l’agriculture, la pêche au corail et à la langouste. Apres l’indépendance, des pêcheurs tunisiens se sont installés dans la Galite. La population ne dépassait pas 380 habitants d’origines italienne et tunisienne. L’origine insulaire des habitants permettait l’adaptation au lieu dont le climat est souvent capricieux et la topographie accidentée. La plupart des habitants était des pêcheurs et des élévateurs de bétail. La pêche de la langouste et du corail était l’activité la plus pratiquée. Le savoir-faire était hérité du pays d’origine et s’est passe à travers les générations. Ils se donnaient au jardinage et à la fabrication du vin. Ils pratiquaient l’élevage des chèvres et du porc. L’histoire de la Galite est marquée par un exil en 1952 pendant 2 ans par le pouvoir colonial d’un prisonnier célèbre : Habib Bourguiba. En 1964, les italiens ont été évacués de l’ile qui a été progressivement désertée. Ce n’est qu’en début des années 80 que l’armée tunisienne a réhabilité quelques maisons et a réalisé une piste d’accès du port récemment construit au village d’habitation.
Figure 36: la vie des Galitois Source : Philippe D’Arco
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La biodiversitĂŠ terrestre
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BiodiversitĂŠ marine
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Le patrimoine bâti
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Les repères bâtis à la Galite :
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Chapitre VIII : Analyse du site
Figure 37: Brain storming autour de "la Galite" Source : auteur
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Analyse géomorphologiques et fonctionnalités
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Coupes schématiques sur différents point du parcours
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Perception des espaces sur diffĂŠrents point du parcours
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Dominance de la vision
Figure 38: la perception visuelle source: auteur
L’expÊrience auditive
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Espace de parfum
Figure 39: l'odorat source: auteur
Toucher, un sens profond
Figure 40: le toucher source: auteur
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Le Gout
Figure 41: le gout source: auteur
Le mouvement
Figure 42: le mouvement source: auteur
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L’intuition L’intuition est intimement liée au corps et au sens. L’intuition est un ressenti. Mouvement et ressenti vont ensemble : quand je bouge j’ai un ressenti, si j’ai un ressenti c’est qu’il y a un mouvement (même minime) à l’intérieur de moi. Tout mouvement produit par le parcours sur la Galite produit une intuition, une sensation qui diffère d’une personne à une autre. La perception de l’espace dès l’arrivée à la Galite active des émotions. Ils peuvent être l’éblouissement devant la grandeur et la hauteur des masses montagneuses, la peur du danger, la curiosité, l’admiration… Toute émotion est liée à la mémoire de chaque personne et à sa manière de voir le monde. Le parcours tordu laisse imaginer l’étape prochaine qu’on va découvrir. A chaque fois qu’on avance dans le parcours, on devient plus curieux, on imagine et on crée des scénarios. L’imagination est étroitement liée à perception de l’espace et la mémoire de la personne. Figure 43: vue frontale de la Galite source: google earth
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Partie IV : Partie conceptuelle Chapitre IX : Démarche conceptuelle 1. Choix de la zone d’intervention :
Figure 44: zone d'intervention source : google earth et auteur
2. Décomposition du parcours en 6 zones selon les caractéristiques naturelles :
Figure 45: décomposition de la zone d'intervention source : google earth et auteur
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3. Les concepts : Un dialogue continu entre l’Homme, la nature et l’architecture : Caractéristiques naturelles de chaque zone : Zone1
Zone2
Zone3
Topographie
Pente de 13.5%
Pente de 16.5%
Pente de 15.5%
Pente de 18.5
Pente de 17%
Pente de 18%
Vue
visibilité réduite par les arbres : Courbure des montagnes
visibilité réduite par les arbres :
Vue limitée par les masses bâtis :
Vue limitée par les arbres et les masses bâti :
Vue globale dans toutes les directions
Vue globale dans toutes les directions
Vision dirigée vers les masses montagneu -ses
Ouverture sur le sommet du parcours et les iles de chien
Courbe étroit
ligne droite étroite
Ligne droite étroite
Sifflement du Vent
Sifflement fort du Vent
Vent fort et parfois on entend le cri du faucon
Mer
Vue sur mer (on voit les limites de Tabarka)
Croisement mer et terre
Zone4
Zone5
Zone6
Parcours
Tordu étroit
Tordu large
Courbe large
Odeur
Plantes odorantes
Plantes odorantes
Plantes odorantes
Son
Son des vagues
Son des vagues
Hauteur
Basse (40m par rapport au niveau de la mer)
Basse (60m par rapport au niveau de la mer)
Moyenne (78m par rapport au niveau de la mer)
Haute (126m par rapport au niveau de la mer)
Haute (220m par rapport au niveau de la mer)
Haute (240m par rapport au niveau de la mer)
Marquage des limites
Sentier
Sentier
Masses bâtis
Sentier
Sentier
Sentier
Limites végétales
Limites végétales
Limites végétales
Limites végétales
Sentier Limites végétales
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Réactions sensorielles de l’expérience personnelle en traversant chaque zone :
Figure 46: Vision depuis la zone 3 source: auteur
Zone1 Sensations admiration des énormes montagnes flottant sur la mer, mais sensation d’une Perturbation, une perte, on ne savait où aller ? que faire ? ou rester ?
Zone2
Zone3
En avançant, on regarde la mer et on pouvait voir les limites de Tabarka. Naissance d’une sensation de détachement, d’éloignement de tout pays, de tout continent sans accès au téléphone ni à quoi que ce soit d'autre.
le regard naturellement se dirige vers les masses montagneuses. Devant cette grandeur, on se rend compte, devant l’énorme différence d’échelles de la petitesse et la faiblesse des êtres humains par rapport à la nature
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Figure 47: Vision depuis la zone 4 source: auteur
Zone4
Zone5 et zone6
Sensations Essoufflé, on regarde le sommet. Une nouvelle perspective donne espoir et courage pour continuer et viser le plus haut.
En arrivant à l’espace le plus haut, on sent l’excitation, l’extravagance, la sauvagerie et la liberté.
Figure 48: Vision depuis la zone 1 source: auteur
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114
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Traduction architecturale spécifique à chaque zone :
116
Chapitre X : Genèse du projet Organigramme :
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Délimitation du parcours : On s’est inspiré des formes de la nature que contiennent les arbres (nodules) et l’Homme (neurones) pour redéfinir les limites du parcours. Sans agresser le site, le parcours suit la même ligne directrice du sentier tracé par les Galitois auparavant. Les formes choisies peuvent guider la vue du visiteur vers un point spécifique ou la diverger vers différents points.
Figure 49: étapes de la délimitation du parcours
Première esquisse du parcours
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Deuxième esquisse du parcours
Plan masse
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Les Lodges : L’entrée principale
Figure 50: entrée principale source: auteur
Insertion au site :
Figure 51: insertion au site source: auteur
Utilisation du vent pour une expérience auditive
Figure 52: exagération du sifflement du vent source: auteur
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Changement de l’échelle
Figure 53: grande échelle par rapport à l'Homme
Changement de l’expérience selon la saison
Figure 54: délimitation de la vue selon la saison
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Coupe d’un lodge semi enterré (zone2):
Plans d’un lodge dans la zone5 et la zone6 :
Coupe d’un lodge sur pilotis (zone4) :
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L’espace commun Déplacement en rompe qui suit la courbure du parcours et la topographie du terrain
Figure 55: accès à l'espace public par la rompe source: auteur
Figure 56: suivre la courbure du parcours source : auteur
Un espace ouvert à la vue mais introverti pour rassembler les visiteurs
Figure 57: fonctions de l’espace commun source : auteur
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Zone1
Zone2
Zone3
Zone4
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Figure 1: Schéma de la liaison entre homme, nature et architecture source: auteur ...9 Figure 2: Brain storming autour du mot « nature » source: auteur...................................9 Figure 3: Brain storming autour du mot « architecture » source: auteur ........................10 Figure 4: Évolution darwinienne de l’Homme Source : ubergizmo.com .......................13 Figure 5: L’extinction des animaux et la pollution marine et aérienne en chiffre (en 2016) Source : www.novethic.fr, lesouffle.org et unesco.org ........................................14 Figure 6: Liaison entre l’énergie, l’eau et l’alimentation selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture Source : geographycasestudysite.wordpress.com ........................................................................15 Figure 7; Enfant dans la nature Source : photo prise par Zied Mnif ...............................17 Figure 8: Niveaux d’engagement dans la nature Source : Agri-Culture de Jules Pretty .............................................................................................................................................18 Figure 9: Niveaux d’engagement dans la nature Source : Agri-Culture de Jules Pretty .............................................................................................................................................18 Figure 10: L’homme dans la nature Source : photo prise par Zied Mnif ........................19 Figure 11: Parc à Montréal Source : timeout.com ..........................................................20 Figure 12: couverture du livre last child in the woods de Richard Louv Source : amazon.fr............................................................................................................................21 Figure 13: couverture du livre the eyes of the skin de Juhani Pallasmaa Source : .amazon.fr ...........................................................................................................................25 Figure 14: Effets de la lumière sur l’espace architectural Source : pinterest.com ........35 Figure 15: Effets de la température sur l’espace Source : mydimmerswitch.com .......36 Figure 16: Croquis d’un espace ouvert couvert Source : sauzet-architectes.fr ...........37 Figure 17: Imitation de la nature dans l’architecture source: pinterest.com ................44 Figure 18: Espace public biophilique Source : karibati.fr ................................................46 Figure 19: Types de la conception biophilique Source : auteur.....................................50 Figure 20: Photos de l’entrepôt converti en une maison Source: projects.archiexpo.fr .............................................................................................................................................52 Figure 21: Photos de Singapour Source : biophiliccities.org ...........................................53 Figure 22: Photos de Wellington, Nouvelle Zélande source : facebook.com ..............54 Figure 23: Types du tourisme, du tourisme durable et de l’écotourisme Source : auteur .............................................................................................................................................63 Figure 24: Types des voyageurs Source : auteur .............................................................65 Figure 25: Les divers types de tourisme Source : photos prises par Zied Mnif ................67 Figure 26: Effets du tourisme sur l’environnement en chiffres Source : auteur ..............69 Figure 27: Piliers du développement durable Source : auteur .......................................74 Figure 28: Les 17 objectifs de développement durable Source : novethic.fr ...............75 Figure 29: L’écotourisme face aux autres formes de tourisme selon l’AFIT source: auteur ..................................................................................................................................81 Figure 30: L’augmentation des écotouristes, du nombre des voyages et des bénéfices de l’écotourisme en chiffre Source : euronews.com , websideholidays.fr et travelagentcentral.com ....................................................................................................81 Figure 31: Resort conçu par Stinessen Arkitektur situé à l'archipel de Steigen- Norvège Source : inhabitat.com ......................................................................................................83 Figure 32: Crosswater ecolodge conçu par Simon Velez localisé à Guangdong, Chine Source : architizer.com ...........................................................................................85 Figure 33: séminaire de la Galite ......................................................................................91 Figure 34: camping à la Galite .........................................................................................92 125
Figure 35: traces historiques trouvées sur la Galite source: Philippe d'Arco ..................96 Figure 36: la vie des Galitois Source : Philippe D’Arco ....................................................96 Figure 37: Brain storming autour de "la Galite" Source : auteur ...................................101 Figure 38: la perception visuelle source: auteur ............................................................ 105 Figure 39: l'odorat source: auteur ................................................................................... 106 Figure 40: le toucher source: auteur ............................................................................... 106 Figure 41: le gout source: auteur .................................................................................... 107 Figure 42: le mouvement source: auteur ....................................................................... 107 Figure 43: vue frontale de la Galite source: google earth ........................................... 108 Figure 44: zone d'intervention source : google earth et auteur ...................................110 Figure 45: décomposition de la zone d'intervention source : google earth et auteur ........................................................................................................................................... 110 Figure 46: Vision depuis la zone 3 source: auteur .......................................................... 112 Figure 47: Vision depuis la zone 4 source: auteur .......................................................... 113 Figure 48: Vision depuis la zone 1 source: auteur .......................................................... 113 Figure 49: étapes de la délimitation du parcours ......................................................... 118 Figure 50: entrée principale source: auteur ...................................................................120 Figure 51: insertion au site source: auteur ......................................................................120 Figure 52: exagération du sifflement du vent source: auteur ......................................120 Figure 53: grande échelle par rapport à l'Homme ...................................................... 121 Figure 54: délimitation de la vue selon la saison ........................................................... 121 Figure 55: accès à l'espace public par la rompe source: auteur ................................ 123 Figure 56: suivre la courbure du parcours source : auteur ........................................... 123 Figure 57: fonctions de l’espace commun source :auteur .......................................... 123
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et problématiques
Anne Laporte, Nicolas Tixier, Ambiance(s). Ville, architecture, paysages. Catherine Karusseit, Nico Botes, Jacques Laubscher, Sensory Architecture_ Beyond Appearances The relationship between the senses and space.
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Soirée sur la colline | Fabrica de arhitectura https://www.arch2o.com/evening-on-the-hill-fabrica-de-arhitectura/ La Galite: le point le plus septentrional d'Afrique https://www.leaders.com.tn/article/15242-lagalite-le-point-le-plus-septentrional-d-afrique L'Omrania | CSBE Student Award pour la conception architecturale http://www.omraniacsbeaward.org/omrania-csbe-student-award-architectural-design-5 Plateforme d'échange de l'atelier de 1ère année d'architecture de l'université de montréal http://arc1012-h2015.blogspot.com/2015/03/fluidite-natalia-pico-olmos.html STUDIO FORMERY http://enacit3srv5.epfl.ch/alice2/WP_2012_SP/formery/archives/7639 krakani lumi / architectes Taylor et Hinds https://www.archdaily.com/887650/krakani-lumi-taylor-and-hindsarchitects?ad_source=search&ad_medium=search_result_all&fbclid=IwAR3mGEnuyhL5kapZU 6bcUqj34_8WkSQJcSjJNF7pp8FNgqz1Diqrp3qDEUE Écotourisme : les retombées de la nature https://fr.euronews.com/2018/11/16/ecotourisme-les-retombees-de-la-nature Communiqué : Ecotourisme : 76% des Français souhaitent que des solutions durables soient mises en place rapidement, selon une étude Booking[.]com https://www.tendancehotellerie.fr/articles-breves/communique-de-presse/11321article/ecotourisme-76-des-francais-souhaitent-que-des-solutions-durables-soient-mises-enplace-rapidement-selon-une-etude-booking-com POLLUTION : des chiffres erronés ? (15 mars 2019) https://www.lesouffle.org/2019/03/15/pollution-des-chiffres-errones/ Concepts de villégiature http://www.resortconceptsco.com/ Adira Ressort, Inde https://www.theplan.it/eng/award-2017-hospitality/adira-resort-india-1 Un habitat en osmose avec la nature https://archibat.com/blog/osmosenaturekengokuma/?fbclid=IwAR0TueRaOdpQROn9bfk_IEE ssF2A8f7lDCdgVRAk88vmLclkiLRs3gTZab8 Logement de montagne avec la mâchoire offrant une vue imprenable sur la vallée de Martis https://designsforyourhome.com/mountain-dwelling-with-jaw-dropping-views-of-martisvalley/?fbclid=IwAR1a-SjJxznyUhtPlhJc-FlgH9ZKLJ6G8lSvZmpdhdy4D3oa8M7KhYXbNvs Architecture nature (17 juillet 2013) http://www.office-et-culture.fr/architecture/concept/architecturenature?fbclid=IwAR30p57YFvjg-aQvzyP38rJ4Vymt17Fa2cUmKoKDluQw55qwfyAdDD3L_qE Architecture et nature http://www.frac-centre.fr/ressources/parcours-thematiques/architecture-nature227.html?fbclid=IwAR1oWZ8tiUXrHA0qKKvR3VKqQa4DFTq6nsZ3W_UkUyQBkls5jmOSzDwaC7k Redéfinir l'architecture et sa relation avec la nature https://www.pirelli.com/global/en-ww/life/redefining-architecture-and-its-relationship-withnature?fbclid=IwAR1ffzMPfmyyIN6gWv0oYra6mBPhFRlNqjxu3bpUEDzJVScGBAiAj1XZqP8
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Architecture et nature https://www.researchgate.net/publication/312146994_Architecture_and_Nature?fbclid=IwAR 2nrAFefjanhkB7sZOxGaQw5b8L2-eHgM6pZWkro7PElTSm3Bnu0UStwiE
Dix raisons pour lesquelles nous avons besoin de plus de contact avec la nature Richard Louv https://www.theguardian.com/commentisfree/2014/feb/13/10-reasons-why-we-need-morecontact-withnature?fbclid=IwAR2uGgntrF91h_hROsJ4eYrDtRwazRmdzjgCxPEMk9_SJcWUFrUHdSepU2Y Du Japon à l’Ouganda : Des briques de terre pour la résidence universitaire ASHINAGA UGANDA par TERRAIN architects http://archicaine.org/category/architecture/architecture-en-terre/?fbclid=IwAR16Hlzya9QsXO-w1c9Nt2MFj6pXtPvcRdfBHvvgnXgBj2KpueobQLbmlo Ecolodge, Laetitia Delubac et Christian Félix architectes, Siwa, Egypte http://archicaine.org/ecolodge-laetitia-delubac-et-christian-felix-architectes-siwaegypte/?fbclid=IwAR0-ieGpI01Lrj9ZtVEpUW6PUZolsQNTh4TRtTOO76-lolCpD0LoWoFNDmI
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