RESTITUTION
2e Congrès Régional des Experts-Comptables de l’UEMOA 2018 L’EXPERT À VOTRE SERVICE Zoom sur le statut de l’entreprenant
ACTUALITÉ La FIDEF renforce les capacités des Experts-Comptables
ONECCA DANS LA CITE Le rôle de l’Expert dans la prévvention des conflits
LE CONSEIL DE L’ordre Membres du Bureau president
SERIGNE MOUSTAPHA KA OUMAR FALL
VICE-president SECRETAIRE GENERAL
ABDOULAYE MOHAMED LO
tResorier
IBRAHIMA TURBE GUEYE
SECRETAIRE GENERAL adjt
EL HADJI ABDOULAYE GUEYE
tresorier adjoint
PAPE ALBOURY NDAO IBA JOSEPH BASSE OUMOU WANE TOURE AMADOU ARAME DIAGNE
ABDOUL AZIZ GUEYE, COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT
Editorial « Recentrer les activités de l’Ordre au cœur de sa mission d’intérêt public pour faire émerger une profession comptable forte, attractive, crédible et respectée, au service du développement du sénégal »
V
ous l’avez sans doute compris, une nouvelle ère s’ouvre avec l’élection du nouveau Président de l’Ordre des Experts-Comptables et Comptables Agréés du Sénégal.
Les Experts-Comptables et comptables agréés m’ont fait confiance en me confiant un mandat de trois (03) ans pour présider aux destinées de l’ONECCA. Je rends grâce à Dieu et adresse ma gratitude à l’ensemble de la M. Serigne Moustapha KA Profession comptable sénégalaise. Président de l’ONECCA Cette élection intervient au moment où la profession comptable, tant au plan international qu’au plan national, connait d’importantes mutations liées : au renforcement des normes, à la révolution digitale et numérique, à la concurrence déloyale et l’exercice illégal, à la baisse de l’attractivité du métier, à la baisse de nos honoraires, etc. De ces mutations, doit naitre une profession comptable plus forte, plus crédible dont les actions quotidiennes doivent participer à renforcer la confiance de nos partenaires aux professionnels. Le temps est venu de recentrer les activités de l’Ordre au cœur de sa mission d’intérêt public.
Le moment est venu de restaurer la confiance de nos partenaires en la profession comptable.
Le temps de la construction d’une profession comptable interlocutrice crédible des pouvoirs publics et actrice majeure du développement économique de notre pays est arrivé. C’est pourquoi, le projet que nous avons présenté et qui a emporté votre adhésion est articulé autour de cinq (5) axes majeurs : 1. Accompagner la profession (information, formation, outils) ; 2. Mieux protéger notre profession (exercice illégal, protection sociale) ; 3. Favoriser le développement des missions ; 4. Mieux faire connaître la profession à travers une communication professionnelle de masse ; 5. Réaffirmer la place de la profession sur le plan national et international. Je suis accompagné dans ce mandat par une équipe constituée de professionnels motivés, mobilisés et déterminés à réaliser un saut qualitatif. Nous comptons sur la participation de toute la profession pour la réussite de ce mandat.
Nous savons bien qu’aucun d’entre nous, agissant seul, ne peut obtenir la réussite. Nous devons donc agir ensemble en tant qu’Ordre professionnel uni, pour la construction d’une profession plus forte et pour la restauration de la confiance seule gage d’une profession plus crédible.
sans réfléchir sur les conséquences de cette signature sur l’économie, sur la crédibilité de notre profession. Car le monde a changé, et nous devons changer avec lui. Nous devons toujours incarner la compétence et avoir la volonté de prouver en permanence notre indépendance.
Les défis de la profession sont, certes, nouveaux, les instruments que nous comptons utiliser pour les relever, également nouveaux, mais les principes qui fondent notre profession (intégrité, objectivité, compétence, indépendance, secret professionnel, respect des règles professionnelles) restent les mêmes.
Ce que nous devons faire à présent, c’est de reconnaître, et chaque membre de l’ONECCA doit le faire, que nous avons des devoirs envers nous-mêmes, envers nos partenaires et envers le pays. C’est pourquoi, le deuxième Congrès Régional des Experts-Comptables de l’UEMOA a été une occasion pour les Experts-Comptables de dresser le bilan de l’apport de leur profession à l’économie et à la société, aux côtés de leurs clients que sont les entreprises, les Etats, les investisseurs, partenaires au développement, bailleurs de fonds et d’autres acteurs impliqués dans le processus de création de valeur. Ce Congrès Régional a été l’occasion pour les professionnels de s’adonner à un exercice d’introspection sur leur responsabilité régalienne vis-à-vis d’entités économiques jusqu’ici marginalisées dans leurs interventions comme les PME du secteur informel et les entreprises en difficulté.
Ils se sont aussi livrés à un exercice de prospective sur l’ExpertComptable de demain. Le 2ème Congrès Régional a assurément suscité auprès des professionnels comptables, une prise de conscience collective sur les enjeux de l’heure et révélé de nouvelles motivations. Les participants ont pu mesurer les forces et faiblesses de la profession face à ces enjeux de type nouveau, identifier les nombreux défis, les opportunités et les menaces qui leur sont associés, et redessiner les contours du périmètre d’intervention des cabinets d’expertise comptable de demain. Un consensus général s’est dégagé à l’issu des travaux pour s’accorder sur l’élargissement des missions des cabinets et l’inéluctable repositionnement stratégique de la profession comptable dans le nouvel environnement qui se dessine fait de ruptures, de vitesse et d’anticipations. C’est à ce prix que la profession comptable pourra se hisser à la hauteur des attentes placées en elle par des clients soumis à de nouvelles exigences de performance et de croissance durable. Elle pourra dès lors continuer à revendiquer son statut de tiers de confiance et d’acteur majeur de l’économie.
Nous devons agir ensemble pour sauvegarder la qualité et la crédibilité de notre « signature ». Nous ne pouvons plus nous permettre de signer w w w. o n e c c a . o r g
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Sommaire
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Actualité La FIDEF renforce les capacités des Experts-Comptables
L’Info de l’expert
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DOSSIER
Restitution du 2e Congrès Régional des Experts-Comptables de l’UEMOA
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L’ONECCA dans la cité
Le rôle de l’Expert-Comptable dans la prévention des conflits
L’Expert à votre service
Zoom sur le statut de l’entreprenant
LA REVUE DE L’EXPERT-COMPTABLE
Le Magazine d’information de l’Ordre National des Experts-Comptables et des Comptables Agréés du Sénégal
Directeur de publication Contributions Serigne Moustapha KA Serigne Moustapha K, Secrétariat ONECCA Rédacteur en Chef SEYDI Bacary
Édition RCG West Africa
Périodicité Trimestrielle
Tirage 1000 exemplaires
36, Rue Victor Hugo X Joseph Gomis Immeuble Bleu de France - BP 4568 Dakar-RP, Dakar-Sénégal Tél.: +221 33 849 14 80 / Fax : +221 33 849 14 73 E-mail : onecca.senegal@onecca.org
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Actualité
La FIDEF renforce les capacités des Experts-Comptables dans la transformation numérique de leurs Cabinets « La transformation numérique est une source d’opportunités de développement des activités de demain des Cabinets ». C’est la principale conclusion tirée par Madame Marie BA, la Présidente de l’ONECCA, et qui semble être la mieux partagée par les membres de l’ordre, au terme d’un séminaire de renforcement de capacités organisé à leur profit avec l’appui de la FIDEF.
L
e séminaire a été animé par Monsieur Philipe Barré du Cabinet Pluriel, ExpertComptable, spécialiste en transformation numérique. Il était axé sur l’activité des cabinets impactée par le numérique, l’ampleur de l’onde de choc sur les métiers et misions traditionnels des cabinets, les implications sur les business modèles, sur les ressources et compétences internes des Cabinets, sur leurs offres commerciales ainsi que les opportunités afférentes.
L’étude réalisée par l’Université d’Oxford en 2014, sur les professions impactées par le numérique, révèle que la profession comptable fait partie des 5 professions les plus impactées par la révolution numérique. L’étude analyse l’impact du numérique sur 700 professions et le pourcentage de risque que la profession soit remplacée par des robots dans les 20 ans à venir. Elle a montré que d’ici à 2034, 94 % des métiers traditionnels de l’Expert-Comptable seront remplacés. Les
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activités les plus concernées par l’automatisation sont : tout ce qui a trait à la saisie comptable et l’audit classique, le commissariat aux comptes, et le contrôle des comptes. Il est possible de réaliser un audit exhaustif grâce à un procédé de chargement de fichiers Excel. En une touche, la machine avale toutes les données de l’année et détecte les anomalies. Tout ce qui est écriture de banque, écriture achats, notes de frais, salaires, sera impacté. Seules les activités d’inventaire et les provisions, ne le seront pas, quoique certaines provisions soient automatisées. Les segments les plus concernés sont les segments légaux notamment le commissariat aux comptes, les missions de procédures communes, les missions standards comme la tenue de compte et l’audit classique qui vont être remplacées par les logiciels. Dans les grands Cabinets, la démarche d’audit est déjà entièrement dématérialisée. D’autres études comme celles de BBC et de Deloitte confirment que la tenue de compte va
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Actualité
assez rapidement être automatisée. L’horizon 2025 est avancé pour consacrer l’automatisation totale. Le Président de l’Ordre des Experts-comptables de France prévoyait déjà au mois d’octobre dernier le remplacement des comptables en entreprise et en Cabinets dans les trois ans à venir. Ce qui est sûr, c’est que toutes le fonctions du Cabinet vont être impactées depuis le processus de production, le management, l’offre des cabinets, la relation client, les ressources humaines, jusqu’au modèle économique des cabinets. Aujourd’hui, la question n’est plus de savoir s’il faut embarquer ou pas dans le train du numérique, mais comment remplacer la chute du chiffre d’affaire perdu du fait de l’automatisation des tâches traditionnelles, par de nouveaux chiffres d’affaires avec de nouvelles missions, de nouvelles compétences et de nouvelles offres commerciales. La gestion de la relation client, un élément moteur du changement Les développements de Monsieur Barré laissent apparaitre que le Cloud et le Smartphone constituent des éléments déclencheurs importants des ruptures les plus disruptives. « Le client numérique », tout le temps connecté, hyper bien informé, hyper sollicité, biberonné à l’UX (User Expect) ou (l’expérience client) veut disposer de toutes ses pièces et états dans son Smartphone et pouvoir interagir avec son Expert-Comptable, en tout lieu, en tout moment et sur tout support. Avec son Smartphone, il peut scanner et envoyer une facture à son Expert-Comptable pour qu’il passe
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l’écriture. Cette possibilité qu’offrent le Cloud et le Smartphone lui permet de gagner au quotidien, un temps précieux et de se passer du paiement d’un salaire au Book Keeper. Le Cloud lui permet aussi de réaliser des économies sur l’investissement logiciel. L’accès à l’application se fait par le paiement d’un coût d’accès de quelques dizaines d’euros seulement. Ce client de type nouveau a repris sa couronne et il est sans états d’âme. Il a une capacité de négociation et va voir ailleurs quand il n’est pas content. Avant, même si les clients étaient déçus des prestations, les Experts-Comptables ne tiraient pas les conséquences de leur déception. Plus maintenant ! Les clients changent d’experts sans regret quand ils ne sont pas contents. Ils sont devenus moins fidèles, et ne sont plus prêts à payer pour des prestations qu’ils ne jugent pas utiles.
Avec le numérique, les connaissances techniques sont banalisées. La première conséquence logique à tirer de cet état de fait, c’est le renversement de la démarche traditionnelle des Cabinets : partir du client pour définir le rôle des Cabinets. Le client est redevenu roi avec le numérique et il doit être replacé au cœur de la stratégie des Cabinets. Le numérique facilite le partage et le collectif (part$l$$age de ressources, des données et des biens). Le numérique s’affranchit aussi des règles et des équilibres sans se préoccuper des acteurs du marché. Par exemple, 90% des Start-up s’installent sur des marchés sur lesquels ils n’étaient pas auparavant. Ce ne sont pas des gens du métier. Avec le numérique, la masse est remplacée par la multitude
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Actualité
qui appelle une personnalisation de la prestation de services, avec un traitement différencié du besoin du client. Les nouvelles solutions numériques simplifient la vie des clients. Face à cela, les Cabinets n’ont pas beaucoup de choix : ou ils leur font gagner du temps et de l’argent, ou ils disparaissent. Les plateformes qui trouvent leurs clients cartonnent et prennent des parts de marchés aux acteurs historiques. Il n’y a pas de retour en arrière possible avec le numérique selon le présentateur qui explique « qu’une invention ne peut pas être désinventée ». Exemple, il y a dix ans, il y’avait environ 5000 applications. Aujourd’hui, c’est plus de 10 000 applications. C’est donc une révolution qui va crescendo se développer. La transition implique une rupture profonde qui doit amener les cabinets à repenser leur existence et leur métier. Ils doivent se poser les bonnes questions. Qu’est-ce que nous apportons au client qu’il ne trouve pas ailleurs ? Pas seulement de la prestation de services, mais de l’expérience client. Comment valoriser l’expertise des cabinets autrement ? Que va-ton vendre demain ? Avec quelles ressources humaines ? Comment on apporte du conseil, du traitement au client qui se pose la question de quelle expérience unique vat-il bénéficier ? « Le Cabinet est une entreprise comme les autres »
« Le Cabinet est une entreprise comme les autres qui doit passer du produit/service à l’expérience client ». C’est la conviction du présentateur. La question n’est plus de savoir s’il faut digitaliser ou pas mais comment s’adapter. Le débat doit être recentré sur « l’urgence à s’adapter pour ne pas connaitre le sort de KODAK ». La belle formule du doyen Alia Diène DRAME résume parfaitement la nouvelle réalité des Cabinets. « Avant c’était les grosses entreprises qui écrasaient les petites. Aujourd’hui, ce sont les entreprises les plus rapides qui écrasent les autres ». Que faire alors pour ne pas être écrasé? Les recettes pour rester en vie sont données par le présentateur pour qui les cabinets doivent d’abord redéfinir leur business model en se fondant sur une formation qui permet de toucher à plusieurs choses. Ils doivent néanmoins avoir une focalisation nouvelle par exemple sur le travail de contrôle et le travail de bouclage et laisser à la machine les tâches rébarbatives. Relativement aux 80 % d’activités qui vont disparaitre, les Cabinets doivent investir des niches qui sont méconnues ou dans lesquelles ils étaient peu outillés et facturer des services qu’ils ne facturaient pas avant comme le service juridique et le fiscal. Les participants au séminaire y ont ajouté les conseils non facturés jusqu’ici comme l’analyse de résultat, le contrôle w w w. o n e c c a . o r g
de gestion et d’autres à venir, comme le rôle de l’Expert-Comptable dans l’accompagnement des entreprises à la RSE. Le gros de l’investissement, c’est l’investissement dans les compétences, c’està-dire sur les hommes. Comment passer d’un modèle récurrent de chiffre d’affaires à un modèle cabinet-conseil ?
Il est clair que chaque cabinet doit proposer ses services propres et packager ses offres. Un Cabinet peut décider d’offrir un service haut de gamme, par exemple, des missions de conseil en gestion du patrimoine, en fusions acquisitions, en risk management, en stratégie, etc. Chacun doit former ses collaborateurs, inventer de nouvelles missions. Chaque cabinet devra donc définir une organisation qui va permettre d’avoir un chiffre d’affaires récurrent réalisé avec une équipe pluridisciplinaire et des ressources humaines aptes à créer les missions de demain dont une bonne partie proviendra de recrutement d’expertise externe (comme dans l’actuariat). Les dirigeants doivent relever un nouveau challenge : vendre de nouvelles missions et savoir que ne pas disposer d’un site web est un handicap qui fait perdre la chance d’avoir de nouveaux clients. Une des difficultés de la conduite du changement, c’est d’embarquer les collaborateurs dans le changement. Il n’y a pas de transformation possible sans l’adhésion de l’équipe qui doit comprendre, se former, s’adapter. Une recommandation forte de la rencontre a été de beaucoup travailler sur l’entreprise, sur le prévisionnel, sur l’avenir. Les collaborateurs doivent travailler sur la nécessité de changer le client avec en bandoulière une devise « seul on va plus vite, ensemble on va plus loin ! » qui constitue la règle de base du travailler ensemble.
Les Cabinets doivent se réinventer un avenir dans un univers nouveau ; savoir tirer son épingle du jeu entre la menace et les autres activités de substitutions, sachant que la transformation numérique est aussi source d’opportunité de développer les activités de demain. Le mot d’ordre c’est « s’y mettre ou s’y perdre ! » Le processus est long, mais c’est à ce prix qu’il est possible de réussir sa transformation numérique et d’exploiter les opportunités qu’elle charrie dans sa marche à pas de géants.
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Congrès Dakar 2018
Restitution du 2ème Congrès Régional des Experts-Comptables de l’espace UEMOA
L’INFO DE L’EXPERT
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DOSSIER
COUVERTURE
Info de l’Expert
Restitution du 2ème Congrès Régional Pari réussi des organisateurs ! Par la RÈdaction
L
e 2ème Congrès Régional des ExpertsComptables de l’espace UEMOA tenu à l’hôtel King Fahd de Dakar du 20 au 21 septembre 2018 a été un satisfecit à tout point de vue. Au plan organisationnel, le deuxième Congrès Régional des Experts-Comptables de l’UEMOA a tenu toutes ses promesses. Elle a réussi à mobiliser plus de 500 participants venus d’Afrique, d’Europe, et d’Amérique. Au départ, il ambitionnait d’être un Congrès Régional des Experts-Comptables de l’UEMOA. A l’arrivée, les huit ordres d’expertise comptable de l’UEMOA ont été rejoints par leurs pairs d’Afrique francophone et anglophone et du Maghreb, ce qui en a fait un Congrès africain de la profession comptable. Un autre défi relevé par les organisateurs, c’est la qualité de la représentation des organisations partenaires de la profession comptable africaine et internationale. Cette édition a été rehaussée par la présence remarquée du Secrétaire Permanent de l’OHADA, du représentant de la commission UEMOA, de hauts responsables d’organisations professionnelles africaines (PAFA, CCOA, CPPC) et internationales (IFAC, FIDEF), du Vice-Président de
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l’Ordre des Experts-Comptables de France et de son Président d’honneur. Ce niveau de représentation témoigne de l’appartenance des ordres de l’UEMOA aux organisations internationales de référence de la profession comptable et de leur ancrage dans les valeurs, les bonnes pratiques et le respect des normes standards qu’elles promeuvent. D’un point de vue contenu, les participants ont beaucoup apprécié la pertinence du thème choisi « l’Expert-Comptable créateur de valeur » ; de par son actualité, son caractère fédérateur et sa pertinence dans le contexte africain actuel. Ils ont salué la qualité des présentations et des interventions qu’elles ont suscitées dans l’assistance. Les ateliers et panels furent d’intenses moments de réflexion sur des sujets qui interpellent aussi bien la profession comptable que leurs clients. En cela ce fut un Congrès avant-gardiste. Au plan communicationnel, un plan de communication a été conçu et déroulé de main de maître depuis la phase préparatoire jusqu’après les deux jours qu’ont duré les travaux contribuant ainsi à donner au 2ème Congrès un prestige certain et à valoir à la Présidente de L’ONECCA et à son équipe w w w. o n e c c a . o r g
Info de l’Expert
d’organisation les félicitations de ses pairs.
Cérémonie officielle d’ouverture du Congrès Présidée par le Premier Ministre du Sénégal, Monsieur Mahammad Boun Abdallah DIONNE, la cérémonie officielle d’ouverture a été l’occasion pour les Experts-Comptables de dresser le bilan de leur apport fécond à l’économie aux côtés de leurs clients que sont les états, les entreprises, les bailleurs et partenaires au développement, les investisseurs, les collectivités territoriales etc. Il y a été décliné la panoplie de missions autres que celles traditionnelles de la tenue de compte, du commissariat aux comptes et d’audit qu’ils accomplissent au profit des clients mais restées jusqu’ici inconnues du grand public. Ces missions de conseils représentent 60 % à 85 % des activités des Cabinets aujourd’hui et participent essentiellement à améliorer la performance globale des clients y compris les nouvelles missions engendrées par les mutations technologiques et les transformations économiques en cours en Afrique et dans le monde. La collaboration entre les Experts-Comptables et l’administration fiscale magnifiée Les Experts-Comptables sont engagés aux côtés des Etats dans plusieurs chantiers. Cette relation déjà exemplaire est en train de franchir un nouveau palier. L’application de la Directive UEMOA instituant le visa des Experts-Comptables sur les états financiers des entreprises préalablement à leurs dépôts auprès des administrations fiscales est en train de connaître un franc succès en Cote d’ivoire et connait un début d’application au Sénégal grâce à la forte implication des ordres d’expertise comptable de ces deux pays avec des retombées importantes attendues sur les recettes fiscales et sur la performance des entreprises. Un autre résultat prometteur, fruit d’une collaboration exemplaire entre l’Etat et l’Ordre des Experts-Comptables a été enregistré au Benin dans la promotion du « statut de l’entreprenant » auprès des entrepreneurs individuels et des micros entreprises, TPE et PME du secteur informel. Le Premier ministre du Sénégal ne s’y est pas trompé en invitant les Experts-Comptables à aider les Etats à vulgariser ce « statut de l’entreprenant » taillé sur mesure par l’OHADA pour formaliser le secteur informel. Tout porte à croire que cette collaboration Etatsprofessionnels du chiffre a encore de beaux jours devant elle avec l’implémentation du Plan Comptable de l’Etat (PCE) fortement inspiré de la comptabilité privée, la poursuite de la dématérialisation des procédures de déclaration et de paiement des impôts, la mise en œuvre du SYSCOHADA révisé, le passage d’une gestion budgétaire basée sur les moyens à une gestion budgétaire axée sur les résultats, autant de chantiers qui appellent l’implication des Cabinets d’Expertise-Comptable. w w w. o n e c c a . o r g
Une exposition permanente riche en solutions technologiques et services dédiés aux Cabinets et à leurs clients Des offres de solutions logicielles de comptabilité, aux offres d’outils technologiques de dernière génération en passant par les offres de Business Développement services (BDS), les offres de formation aux métiers connexes (actuariat, assurances) et les offres de services d’intermédiation boursière et de gestion de patrimoine, l’exposition permanente a été une véritable vitrine de tout l’écosystème d’appui des Experts-Comptables dans leur travail au quotidien et de leurs clients entreprises. Au total, plus de vingt exposants ont fait confiance aux organisateurs du Congrès, parmi lesquels, on peut citer : CGF Bourse, Banque de Dakar (BDK), des écoles de formation comme IFAGE, EUA et UCAO, des Cabinets d’audit, de contrôle et d’expertise comptable comme : le Cabinet Aziz Dieye, Deloitte Sénégal, OSMOSE, Kyriex/Optesis et des prestataires de services OBS, AKIL Technology, Gest On Line, FFI, Nord SUD Technologies Services, Horus, Cabinet Pierre ABADIE et le Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique, GIABA etc. Un diner de Gala aux sons et couleurs africaines Pour joindre l’utile à l’agréable et fêter les retrouvailles entre collègues et amis, les organisateurs ont gratifié les participants d’un copieux diner de gala animé par des artistes africains avec en première partie une prestation de danse traditionnelle et pour terminer en beauté la soirée, l’artiste sénégalais de renommée Ismaël LÔ dont les rythmes et sonorités africaines sont délectés au-delà du pays de la Teranga.
Un panel, quatre ateliers d’échange et une conférence de très hautes factures Un panel et des ateliers d’échanges et de discussion de haut niveau ont permis aux panelistes de dresser le portrait-robot de l’Expert- Comptable africain de demain et de redessiner les contours de son périmètre d’intervention à la lumière des grandes mutations économiques et technologiques qui traversent le continent et des nouveaux enjeux de développement durable de leurs clients. Ces mutations et nouveaux enjeux conduisent inexorablement à l’élargissement et à la redéfinition des missions et métiers des Cabinets d’expertise comptable. Les réflexions menées durant ces travaux ont aussi permis de situer la responsabilité de la profession comptable dans le sauvetage des entreprises en difficulté, et de définir son rôle dans la transformation structurelle de l’économie africaine largement dominée par un tissu de TPE, de Micro entreprises et PME du secteur informel, sans oublier leur rôle dans le développement des 05 • Avril-Mai-Juin 2019
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Info de l’Expert
marchés financiers.
Les travaux scientifiques ont démarré par un panel en plénière sur le Thème : « l’Expert-Comptable acteur majeur de l’économie », sous la direction du doyen Aziz DIEYE, ancien Président de l’ONECCA. Ce panel de haut niveau a permis de camper le décor et de revenir sur l’apport historique de la profession à
l’économie au Sénégal. Des expériences mémorables de restructuration de banques en pleine période d’ajustement structurel, et d’accompagnement de fleurons nationaux comme l’AGETIP ont été rappelées. Ce panel a été suivi par des ateliers très ciblés étalés sur les deux jours du Congrès, et par une conférence sur le thème « Quelles propositions pour la croissance
Restitution du Congrès : ATELIER 1
L’Expert-Comptable et la performance durable de l’entreprise de la Création à la transformation L’atelier sur l’Expert-Comptable et la performance durable de l’entreprise a été animé par trois présentateurs : M. Patrick PETIT, M. Pascal QUIRI, et le Professeur Aly MBAYE sous la direction de M. Nouhou TARI, Président de l’Ordre des Experts-Comptables du Niger. Les facteurs clés du succès de la performance durable de l’entreprise selon Patrick PETIT
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onsieur Patrick PETIT a tenté de déterminer les paramètres qui permettent de caractériser la performance durable de l’entreprise. Dans son développement, M. PETIT a montré qu’une entreprise est avant tout une organisation qui évolue dans un environnement en pleine mutations dans un monde globalisé. Cet environnement a des impacts sur les business model et présente de nouvelles exigences : exigence de croissance et de consommation responsable et pression de la société civile et de la communauté. Cet environnement est aussi marqué par plus de réglementation, et par l’apparition de nouveaux risques (pérennité des entreprises, hausse des coûts etc). La création de valeur veut dire une génération de profit, une augmentation de la rentabilité. L’entreprise dans cet environnement mouvant se doit de créer plus de valeur intrinsèque pour être performante durablement. Les quatre axes qui définissent la recherche de performance durable.
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Pour inscrire avec succès sa performance dans la durabilité, l’entreprise doit rechercher la convergence des ressources financières et extra financières. Pour ce faire, l’Expert-Comptable l’aide à s’appuyer sur quatre axes : (I) l’économie et la finance (business modèle et outils de pilotage); (II) le social, les lois et règlements, (sécurité, santé, salaires) ; (III) l’environnement et la gestion responsable (consommation d’énergie, gestion des déchets etc) ; et (IV) l’éthique et le sociétal (respect
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Lois et règlements, respects des valeurs éthiques qui font vivre l’entreprise). Paramètres clés d’une performance durable.
L’Expert-Comptable accompagne l’entreprise à inscrire ses activités dans un processus de création de richesse qui tient compte de paramètres clés d’une performance durable. Premier paramètre, la cohérence du projet de l’entreprise et des valeurs qu’elle veut incarner. C’est le rôle de l’ExpertComptable d’apprécier la cohérence du Business modèle et de doter l’entreprise d’outils de pilotage participatif. Pour une performance durable de l’entreprise l’Expert-Comptable veille particulièrement à la pertinence, à la qualité et à la régularité de l’information financière. Mais il doit maintenant accompagner de plus en plus l’entreprise à définir les paramètres extra financiers pertinents et à se doter d’un système d’information et de gestion (SIG) à même de générer des tableaux de bord qui intègrent ces paramètres. L’intervention de l’Expert-Comptable dans la gouvernance de l’entreprise autrefois limitée est devenue essentielle. Elle consiste à lui faire adopter les outils de bonne gestion et d’aider à réfléchir sur le degré d’appétence aux risques. Il s’assure que l’entreprise et ses dirigeants mettent en place des dispositifs de gestion des risques pour protéger les actifs mobiliers et immobiliers de l’entreprise.
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Info de l’Expert
Restitution du Congrès : ATELIER 2
L’Expert-Comptable et la performance durable de l’entreprise de la Création à la transformation PEUT-ON COMPTER LA PERFORMANCE DURABLE DE L’ENTREPRISE ? Le Professeur Aly MBAYE, Président de l’Association Sénégalaise des Sciences et de Gestion, Doyen de la FASEG UGB, a une approche plutôt prudente sur la conception classique de la notion de performance durable de l’entreprise.
L
e professeur MBAYE a souligné le caractère complexe de la performance. En bon universitaire, Il a revisité les différents aspects de la performance de l’entreprise dans une perspective analytique visant à remettre en question les déterminants classiques de la performance. Fautil appréhender la performance selon les moyens ou selon les fins ? Est-il possible d’apprécier la performance sans système de valeur ? S’est interrogé le professeur MBAYE.
Pour répondre à ces interrogations, le professeur MBAYE identifie deux approches : une approche qui vise l’atteinte des objectifs de l’entreprise et une approche pour faire fonctionner les processus.
Les entreprises informelles ne sont-elles pas performantes parce qu’elles ne répondent pas à ce que les Experts-Comptables considèrent comme étant le bon processus avec les normes ? La question reste posée. Il a rappelé l’existence d’une économie digitale florissante mais informelle qui constitue une défiance vis-à-vis de l’Etat pour fonder ses doutes sur ce que d’aucuns considèrent comme étant les critères immuables d’appréciation de la performance de l’entreprise.
Restitution du Congrès : ATELIER 3
L’Expert-Comptable dans l’évolution de son environnement Cet atelier a été animé par le Pr Felix ZOGNING, l’enseignant chercheur, Alioune Badara MBENGUE, Hervé GBEGO, Philippe ARRAOU et Ernest SENOUVO. L’environnement économique dans lequel évolue l’Expert-Comptable est en pleine mutation. La globalisation des marchés et des flux financiers et la révolution technologique ont placé l’Expert-Comptable dans un univers nouveau où il doit s’adapter et ajuster ses missions aux besoins nouveaux de ses clients pour rester cet acteur majeur de l’économie.
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’Expert-Comptable numérique A l’ère de la signature électronique, de la dématérialisation des procédures de télé-déclaration et de télépaiement, du Cloud computing, l’internet mobile, et des Smartphones, le numérique et le digital s’imposent à tous les acteurs économiques. Les entreprises ont découvert de nouvelles façons de créer de la valeur et d’interagir avec leur environnement. L’Expert-Comptable africain de demain doit devancer ses clients dans cette révolution pour pouvoir les accompagner à optimiser son apport tout le long de la chaine de création de richesse. Acteurs majeurs du changement, les professionnels des chiffres doivent piloter la transformation numérique et digitale des PME pour d’une part sécuriser le processus et d’autre part
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rendre performantes les solutions technologiques envisagées.
L’Intelligence artificielle (IA) ; un allié sûr des Experts-Comptables L’Expert-Comptable de demain ne peut pas se passer de l’IA s’il veut tirer le meilleur bénéfice de la transformation numérique et se repositionner dans le prévisionnel. L’intelligence artificielle est une machine de destruction massive d’emplois. Selon certaines estimations, elle sera à l’origine de 75 millions d’emplois détruits d’ici 5 ans dont des comptables. En revanche, 133 millions d’emplois seront créés pendant la même période. Le digital est fondamentalement un facteur de menace, mais aussi d’opportunité. L’avenir 05 • Avril-Mai-Juin 2019
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Info de l’Expert
pour la profession comptable, c’est une montée en compétences des Experts-Comptables dans deux domaines : le Conseil en stratégie, et en finance, grâce à l’intelligence artificielle. Même sans background, les Experts-Comptables disposent pour cela d’atouts évidents dont la relation client, et les données sur l’entreprise. La bonne nouvelle pour les Experts-Comptables, ce sont les opportunités de formation rendue plus accessible par le E-Learning, avec les cours digitaux. Opportunité de survie des Cabinets
L’Intelligence artificielle est un allié sûr pour les Experts-Comptables. Elle offre une opportunité de survie aux Experts-Comptables face aux déclins de la plupart de leurs missions traditionnelles. Ils peuvent s’en servir dans leur nouvelle mission de « Conseillers » pour assister les entreprises à se projeter dans un futur voulu et maitriser, à travers la mise à disposition d’outils décisionnels pertinents aux dirigeants des entreprises conseillées. L’intelligence artificielle permet de faire parler les données et de générer des indicateurs décisionnels pointus. La mesure d’appréciation de la bonne utilisation du conseil et des outils par l’entreprise c’est un (1) appel du client par semaine (Family office). Le Modèle économique des ExpertsComptables à l’heure de la transformation digitale
Ce thème a été traité par Monsieur Philipe ARRAOU, Président d’Honneur de l’Ordre des Expertscomptables de France et auteur de l’ouvrage « l’Expert-Comptable et l’économie numérique » préfacé par le Président français Monsieur Emanuel Macron. Monsieur ARRAOU fait partie de ceux qui pensent que le numérique est une chance à saisir par les Experts-Comptables et non un danger, pour conforter leur mutation : devenir de plus en plus expert, de moins en moins comptable. Sa présentation a porté sur la transformation digitale et la nouvelle économie, la révolution de la data et son incidence, le développement de technologies disruptives : l’intelligence artificielle et la blockchain, le modèle économique de l’ExpertComptable et des cabinets, le développement de l’internet, des objets connectés. La digitalisation selon Monsieur ARRAOU, représente un bouleversement certain pour les Experts-Comptables. Plusieurs de leurs activités traditionnelles sont impactées les amenant à revoir leur business modèle. Il informe que 100 000 nouveaux emplois vont être détruits mais c’est une destruction créatrice. La nouvelle économie basée sur la Data représente un marché important. L’intelligence artificielle permet de confier aux ordinateurs la tâche de mimer ce que fait notre
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cerveau (apprendre et restituer fidèlement ce qui est appris). Des réseaux de neurones virtuels (programmes capables d’apprentissage) sont utilisés pour cela. Un exemple très banal d’application de l’intelligence artificielle ; c’est l’utilisation du Big data pour reconnaitre l’image d’un chien parmi des millions de photos. La blockchain permet une comptabilité triple qui menace le tiers de confiance en établissant un protocole d’accord entre le vendeur et l’acheteur et un tiers de confiance, la blockchain qui valide le protocole. Elle est de nature à supprimer le tiers de confiance. Monsieur ARRAOU a rappelé les résultats de l’étude de l’Université d’Oxford qui révèlent que 94 % des métiers sont menacés de disparition parmi les 700 métiers testés. Les Experts-Comptables occupent la deuxième position parmi les métiers testés qui seront les plus impactés. Il a rassuré, cependant, les participants sur le fait que la plupart des technologies à l’origine des menaces sont à la portée de la profession. Qu’il s’agisse de l’IA (l’Intelligence Artificielle) ou de la Data. « Les données nous les avons à condition de les centraliser, et d’en faire des données structurées propres à l’utilisation ». Les Experts-Comptables doivent préparer leur propre destruction avec l’intelligence artificielle selon Monsieur Philippe ARRAOU qui rappelle les risques pour les commissaires aux comptes.
Quel modèle économique pour les cabinets de demain ? Le modèle économique répond aux questions suivantes : quelles partenaires, quelles activités, quelles cibles, quels moyens ? Les cabinets doivent évoluer vers plus de valeur ajoutée. Cela implique de former les collaborateurs, d’avoir de nouveaux partenaires, d’aller vers des sujets transversaux, se servir de l’intelligence artificielle, des outils biface, du portail client, de pouvoir faire de la saisie en temps réel pour avoir un bilan dynamique, et d’aller à l’élargissement vers le conseil.
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Restitution du Congrès : ATELIER 3 • Partie 2
L’Expert-Comptable dans l’évolution de son environnement LA ROAD MAP VERS LE SUCCÈS DE PHILIPE ARRAOU EN 6 ÉTAPES POUR CONDUIRE LE CHANGEMENT DANS LES CABINETS D’EXPERTISE COMPTABLE 1ère étape : Travailler différemment Se concentrer sur ce qui ne va pas disparaitre parce que la tenue de comptabilité a perdu de la valeur ajoutée.
2ème étape : Analyser les impacts Analyser les impacts sur les méthodes de production, la stratégie, l’offre de services, la relation client, les ressources humaines, l’ensemble du modèle économique.
3ème étape : avoir une stratégie Un Cabinet est une entreprise ; ce qui fait de l’ExpertComptable un entrepreneur. 70% des cabinets n’ont jamais formalisé leur stratégie. Avoir une stratégie demande de faire un diagnostic, choisir ses cibles, définir un périmètre d’intervention plus large pour couvrir une demande plus diversifiée, et se spécialiser sur des domaines spécifiques (social, patrimoine, ONG etc). 4ème étape : revoir son offre Les Cabinets doivent anticiper sur le déclin des missions traditionnelles, lancer une nouvelle offre répondant aux attentes des clients notamment des PME (conseil et transition numérique).
5ème étape : Manager l’équipe Le staff sera plus que jamais la ressource stratégique. Comment le faire évoluer devient une question primordiale. 6ème étape : cibler le client Former l’équipe au conseil, disposer des bons outils, lancer une offre de nouvelles missions. Le facteur clé de succès : s’intéresser au Système d’information du client y compris l’information non financière à manager.
Applications digitales de comptabilité pour le secteur informel Selon Monsieur Alioune Badara MBENGUE, enseignant chercheur a l’Université Gaston Berger, le digital est un puissant outil de formalisation du secteur informel et des PME-PMI, TPE et Microentreprises. Le secteur informel est comme une girafe facile à identifier mais difficile à décrire. Les entreprises du secteur informel se singularisent par : un défaut d’enregistrement, des entreprises de petite taille et de grande taille ; l’absence de tenue de comptabilité (15,2 % seulement des entreprises tiennent une comptabilité, 80,3% utilisent des carnets de recettes dépenses) ; la mobilité de l’activité ; le faible niveau d’instruction des promoteurs (28% des entrepreneurs sont des analphabètes à l’exception w w w. o n e c c a . o r g
des entreprises de la branche BTP), un faible accès au crédit ( 5,8% des entreprises du secteur informel se sont vus attribués des crédits bancaires…). Le secteur informel représenterait 60% du PIB en 2016, et compterait 6,5 millions d’acteurs. Le Sénégal connait un taux de pauvreté élevé de 47% et un taux de chômage des personnes âgées de 15 ans et plus tout aussi élevé de 15,7% en 2017 (ANSD). La combinaison pauvreté élevée et chômage élevé fait du secteur informel un refuge naturel pour des millions de personnes. Le taux d’accès à la commande publique 28% des PME (source ADEPME). Au regard du poids de ce secteur dans l’économie, peut-on continuer de dire que l’Expert-Comptable est un acteur majeur de notre économie si son intervention ne touche que 3% des entreprises du tissu économique et moins de 45% du PIB ? Il y a nécessité d’élargir le périmètre d’intervention de l’Expert-Comptable pour qu’il puisse réclamer valablement d’être un acteur majeur de l’économie. L’Expert-Comptable pourrait ainsi s’attaquer à la cible secteur informel et PME en l’accompagnant dans leur transformation digitale.
L’environnement technologique est favorable pour cela. En effet, L’ARTP a dénombré 15 557 000 lignes téléphoniques mobiles, et un parc d’abonnées entreprises à l’internet de 4,4% entre 2016 et 2017. L’arrivée du 4 G en 2016, et la généralisation du M-Banking ne font que confirmer cette tendance, et consacrer le boom de l’internet mobile. Au même moment, des sociétés comme Orange Business Services (OBS) ont mis au point un certain nombre d’applications digitales à la portée des entreprises de petite taille. Ces applications utilisent le Cloud pour rendre possible une dématérialisation sur internet des données de l’entreprise et mettre à la disposition des entreprises de petites taille des outils de gestion simples. (SUNU ERP, TIGO SMARTH) On note une émergence d’une offre d’applications dédiées au secteur informel mises au point par des prestataires technologiques locaux (WEEBI, SOUNTOU) qui permettent la dématérialisation du Système minimum de trésorerie, une comptabilité d’une simplicité déconcertante. OBS a identifié récemment un marché potentiel de 125 695 PME et TPE informelles à digitaliser. Un défi, cependant reste celui de la protection des données, un domaine ou une intervention publique efficace est nécessaire.
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L’Expert-Comptable acteur incontournable du marché financier L’Expert-Comptable est bien présent en arrière plan des marchés financiers et bourses mondiales. Il a mission de faire parler les chiffres pour projeter dans l’avenir une entreprise et fonder une prise de décision d’investissement. C’est devenu une des missions importantes de l’Expert-Comptable. Les gestionnaires de fonds d’investissement
et investisseurs boursiers ont témoigné de l’importance de recueillir les conseils de leurs commissaires aux comptes avant toute prise de décision d’investissement dans une entreprise. Les banques qui ont fait de la gestion de patrimoine et du placement une nouvelle ligne de business ont aussi recours au service de l’ExpertComptable avant toute prise de décision ou engagement financier.
Restitution du Congrès : ATELIER 4
L’Expert-Comptable socialement responsable Développement Durable et RSE enjeux et missions de l’Expert-Comptable
Ce thème a été traité à travers une présentation faite par le vice-président de l’Ordre des Experts-Comptables français, Monsieur Hervé GBEGO.
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l est apparu dans cette présentation que le développement durable est un concept universel qui compte plusieurs définitions. Il est souvent associé à l’écologie ou le changement climatique. Le rapport Brundland donne une définition du développement durable en tenant compte de trois enjeux essentiels : écologique, économique et social. Pour inscrire leurs activités dans la durabilité, les entreprises économiquement et socialement responsables sont celles qui développent des capacités à concilier ces trois enjeux en tenant compte des spécificités et réalités locales de leurs régions d’implantation.
La RSE est apparue dans la présentation de Monsieur GBEBO comme une réponse des entreprises aux différents enjeux du Développement Durable en tenant compte de leurs enjeux au niveau micro. En effet, les entreprises font face à un certain nombre de pressions dans leur processus de création de valeur. Elles sont de plus en plus sommées d’assumer leur part de responsabilité élargie qui engage les actionnaires de l’entreprise, les clients et les salariés et d’autres parties prenantes comme la société civile, qui vont demander des comptes au nom des populations, les communautés qui exigent une répartition des richesses qui ne créent pas d’inégalités sociales, sans compter la pression exercée par les défenseurs de l’environnement qui, dans certains pays, jouit d’une personnalité juridique.
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Pour faire face à ces pressions, les entreprises ont l’habitude d’adopter quatre postures : en profiter (vendre des produits bio par exemple), jouer la prudence en faisant tout pour éviter des catastrophes, y aller avec conviction à travers l’adoption d’une démarche RSE adaptée et des MDP (Mécanismes de Développement Propre) ou faire dans la tartufferie ou le « green Whasing ».
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En tout état de cause, il est communément admis que l’adoption par une entreprise de la norme ISO 26 000 qui définit la responsabilité sociétale et environnementale de l’entreprise et sa mise en œuvre adéquate, est une bonne pratique internationalement reconnue pour une entreprise qui veut assumer sa responsabilité vis-à-vis de ses parties prenantes. L’internalisation dans leur management de la gestion de leurs externalités négatives liées au processus d’exploitation est devenue un enjeu de taille pour les entreprises. Elle leur permet au delà de la préservation de l’environnement, l’accès aux marchés, l’accès à des financements socialement responsables, et à des fonds d’impact qui commencent à voir le jour un peu partout dans le monde y compris en Afrique. Les entreprises engagées dans des démarches de production et de consommation responsables ont plus de chance que celles qui ne le sont pas à bénéficier de ce qu’on pourrait appeler un retour sur investissement ou une contrepartie de leur engagement responsable. Les métiers du contrôle et de l’audit ont un atout pour accompagner les entreprises à intégrer dans leur gestion le développement durable et à en récolter les fruits à travers le reporting RSE.
De nouvelles missions pour la profession comptable Il est bon de rappeler que la directive européenne sur la RSE qui comporte une quarantaine d’indicateurs et fait suite à une perte de mandat des commissaires aux comptes rend obligatoire le reporting RSE pour les entreprises de 500 salariés et plus, qui réalisent 600 000 euros et plus de Chiffre d’Affaires. Les fonds d’investissements socialement responsables sont très sensibles à ces reportings dans leurs prises de décisions d’investissement dans une entreprise.
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Ces évolutions amènent les professionnels du chiffre à développer de nouvelles missions. Ils ont la possibilité d’accompagner les entreprises à tenir une comptabilité environnementale, c’està-dire, une comptabilité matière permettant de générer d’autres indicateurs extra financiers au delà des chiffres. Ils ont la possibilité d’assister les entreprises à réaliser leur bilan carbone (la mesure de l’empreinte écologique locale) à faire le reporting RSE (la vérification des informations RSE dans les rapports de gestion), la mesure de l’empreinte économique locale (nombre d’emplois créés, taxes payées, achats locaux etc). Pour la réalisation de bilan carbone, ADENE en France a mis au point une méthodologie qui intègre 80 à 90 % des données qui existaient déjà dans la comptabilité classique. Cette comptabilité environnementale participe à l’élargissement des activités des cabinets et l’élargissement des indicateurs utilisés dans les rapports de gestion à différents autres agrégats dont le capital nature. Pour réussir ces nouvelles missions, les cabinets d’expertise comptable doivent mobiliser des moyens pas forcement opérationnels, mais de l’investissement dans la recherche appliquée.
La Green finance pour quitter le brun et aller au vert La finance verte était au cœur des travaux de l’atelier sur l’Expert-comptable socialement responsable. Ce thème a été présenté par Monsieur Diene Kamara à travers trois points : la définition de la finance verte, l’état des lieux sur la finance verte, et un tour d’horizon de la finance verte (les enjeux, les perspectives, les places financières vertes). La finance verte, une finance de reconversion des actifs qui finance finalement tout. Pourvu que l’activité soit menée en tenant compte des aspects écologiques, environnementaux et de Développement Durable. La finance verte est un instrument, en même temps le gasoil qui fait
marcher les choses. Les fonds disponibles sont estimés à 100 milliards USD dont 7 milliards d’euros engagés lors de l’accord de paris sur le climat, la COP 21. Au Sénégal par exemple, on note l’existence d’une ligne verte logée à la SGBS pour les entreprises engagées dans les mécanismes de développement propre comme l’efficacité énergétique. Les places financières vertes se sont multipliées : Paris via la Cop 21 et Luxembourg qui a prévu dans sa bourse un compartiment réservé à la finance verte. Pourquoi telle obligation est brune et telle autre green ? Comment faire le reporting vert ? Comment les Experts-Comptables peuvent faire pour obtenir et avoir la connaissance fine de l’information sur la finance verte ? Ce sont là quelques questions essentielles que la profession comptable doit se poser. En conclusion, la finance verte est certes une niche mais qui ne va pas se développer facilement. Elle fait face à un certain nombre d’obstacles. Il s’agit des difficultés de disponibilité de l’information, les canevas de financement identiques pour des cibles différentes, des procédures longues de décaissement, des difficultés d’uniformisation de l’information, le problème d’orientation des flux financiers vers les investissements socialement responsables. Une Banque à Dakar est en contact avec un fond allemand Bunch bank. Mais la question qui se pose est de savoir comment s’assurer que cette banque va orienter les fonds vers des investissements socialement responsables ? Quel impact pour le bailleur si les fonds ne sont pas utilisés dans le sens voulu ? En revanche, son développement va beaucoup impacter les métiers de contrôle et d’audit. Il restera à relever le défi de la compliance de la comptabilité avec la réglementation
Restitution du Congrès : ATELIER 4 • Partie 2
L’Expert-Comptable socialement responsable LA COMPTABILITÉ VERTE : MODE D’EMPLOI Ce sous-thème a été introduit par les professeurs Jacques RICHARD co-auteur d’un ouvrage sur la comptabilité écologique et par le professeur Boniface BAMPOKY qui a beaucoup travaillé sur les enjeux de l’internalisation de la gestion des externalités négatives par les entreprises dans des pays en développement.
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l est ressorti de leurs présentations qu’Il existe aujourd’hui une pression qui s’exerce sur les entreprises d’équité intergénérationnelle. Cette pression fait que les entreprises sont obligées d’intégrer les questions de développement durable dans leur management. Les parties prenantes à la prise en charge de cette problématique sont : l’Etat, les ONG, les entreprises, les organisations de la société civile.
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L’adoption par les Etats de réglementations instituant le principe pollueur payeur permet aux entreprises d’aller vers des certifications pour lever des fonds, notamment les entreprises qui acceptent de se conformer à la réglementation et de remplir leur obligation de gérer les externalités négatives de leurs activités en minimisant leurs coûts environnementaux. Ces entreprises intègrent le concept de comptabilité verte dans leur gestion et 05 • Avril-Mai-Juin 2019
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peuvent se servir de plusieurs outils et de travaux disponibles sur cette matière parmi lesquels, on peut citer : les travaux de COOSE (COOSE, 1960) sur les possibilités d’intérioriser les externalités négatives par les prix, le recours à la comptabilité analytique comme outil de gestion des externalités négatives ; les travaux de Boniface BAMPOKY (BAMPOKY 2015) sur des solutions autres qui existent en dehors de celles imposées par l’Etat. Comme toute comptabilité, le rôle de la comptabilité verte, c’est de rendre compte (notion d’Accountility). Elle consiste en un ensemble de techniques pour améliorer l’information des parties prenantes et améliorer la gestion environnementale. En somme, c’est un ensemble des techniques pour améliorer la gestion de l’entreprise. Il existe trois catégories d’outils : les outils comptables à finalité externe, les outils à finalité interne, et les outils à finalité interne et externe.
Parallèlement il y a les rapports annuels d’activités, les rapports environnementaux (l’écobilan qui mesure l’empreinte carbone de l’entreprise), les procédures budgétaires associant les coûts verts, les tableaux de bord verts, et autres outils d’évaluation (sustainability balanced scorecard). Méthodes et outils pour la comptabilité verte La comptabilité verte utilise des comptes verts comme le compte vert de risque (exemple remise en état de site d’exploitation minière), les provisions vertes, le compte de résultat (avec une valeur ajoutée négative). Il existe par ailleurs, des obligations vertes. La grande question c’est comment intégrer ces comptes dans les comptes de l’OHADA ?
Repositionnement stratégique et ambitions renforcées des cabinets d’expertise comptable
secteur informel, dans le cadre de leur mission de service public au service de l’intérêt général. Pour accomplir ces nouvelles missions, les Cabinets doivent relever les défis suivants : défi de la compliance de la comptabilité avec la réglementation ; défi informationnel : obtention et uniformisation de l’information ; défi de la mobilisation et de l’orientation des flux financiers de la finance verte vers le financement des projets de transition écologique des entreprises ; défi de la transformation numérique des Cabinets euxmêmes.
IL EXISTE UNE BIBLIOGRAPHIE ABONDANTE SUR LA COMPTABILITÉ VERTE : - Travaux de SCHOB 2003 « the double dividend hypothèses of environnental taxes a servey », http://www.wiwiss.fu berlin.de/fachbereich/vwl/schoeb/forschung/forschung_ dateien/taxation02.pdf - Molho et Fernandez poisson (2003), Tableaux de bord ; outils de performance, Molho/ Fernandez, Fernandez-Poisson D. , Fernandez-Poisson - Louise Martel : LA COMPTABILITÉ ENVIRONNEMENTALE : UN OUTIL DE PRISE DE DÉCISION https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00587815/document - Nicolas Antheaume, Bernard Christophe, La comptabilité environnementale, des outils pour évaluer la performance écologique, e-theque, 2005 - Jean-Philippe Lafontaine, Les techniques de comptabilité environnementale, entre innovations comptables et innovations managériales, Comptabilité-Contrôle-Audit, Mai 2003 - Marina Teller, Développement durable et comptabilité, cahiers de droit de l’entreprise n°3, Mai 2010
- Ordre des Experts-Comptables, La gestion environnementale, Dunod, octobre 2008 - CMA, Manuel des pratiques en comptabilité de management, Outils et techniques de comptabilité environnementale appliqués aux décisions de gestion, Politique de comptabilité de management 40, 1996. - CONSEIL CANADIEN DES CHEFS D’ENTREPRISE, Les principes d’entreprises pour un avenir durable et compétitif. - FORTIN, J.; MARTEL, L.; RAKOTOSOA, E «Enjeux comptables de la question environnementale : dans un contexte de vérification financière», Cahier de recherche no 95-02, décembre 1994. - GRAY, R. H.; OWEN, D.L.; ADAMS, C. Accounting and Accountability : Social and environmental Accounting in a Changing World, Hemel Hempstead : Prentice Hall), 1996. - GRAY, R.H., BEBBINGTON, K.J., WALTERS, D. Accounting for the Environment : The Greening of Accountancy Part II, London : Paul Chapman), 1993
Dans un contexte de rupture, d’agilité, et de résilience face aux menaces de toute sorte, les cabinets d’expertise comptable n’ont d’autres choix que de précéder leurs clients dans ces anticipations pour rester le tiers de confiance qu’ils ont été jusqu’ici et accompagner les entreprises à réussir leur double transition numérique et écologique. Le temps est venu de définir les modalités de réorganisation des Cabinets et du métier de l’expert comptable pour pouvoir accompagner les clients dans leur double transition numérique et écologique de façon à pouvoir assister les entreprises à : -tenir une comptabilité environnementale permettant de produire de l’information restructurée, de l’information extra financière ; - créer de la valeur avec des externalités positives ; - accéder aux ressources de la finance verte devenue le gazoil pour faire marcher la transition écologique. Le temps est venu pour les Experts-Comptables d’étendre « la contagion des valeurs » aux entreprises en difficultés, aux PME-PMI et TPE du
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Quelques recommandations fortes du Congrès
Relativement à la Transition écologique, le Congrès a invité les Experts-Comptables à dégager une piste de réflexion tangible pour amener les entreprises à se doter d’un tableau de bord vert leur permettant d’assumer leur responsabilité sociétale et environnementale. Pour ce qui est de la transition numérique, les Cabinets doivent se doter d’une stratégie numérique, et conduire en interne les changements requis (investissements dans les nouveaux outils technologiques, formation et mise à niveau du w w w. o n e c c a . o r g
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personnel, recrutement de nouvelles compétences etc). Concernant les entreprises en difficulté, le Congrès a recommandé de privilégier une intervention plus en amont de l’Expert-Comptable avant la survenance d’une situation de non-retour : l’Expert- Comptable doit faire de la détection précoce des situations de crise et de la prévention pour éviter à l’entreprise d’en arriver au règlement préventif. Relativement au secteur informel et aux PME, l’Expert-Comptable doit se dire que « Le petit client d’aujourd’hui peut devenir le grand client de demain ». Il doit par conséquent changer de fusil d’épaule, et de paradigme pour étendre la « contagion des valeurs au secteur informel ». Les Cabinets doivent s’engager avec enthousiasme dans cette évolution en « prenant par la main les entrepreneurs du secteur informel pour les faire monter au 1er étage et non rester au 2ème étage et leur demander de grimper les escaliers jusqu’à eux ». Son discours doit être orienté accompagnement de l’entreprise informelle à la création de richesse. C’est l’ère de « l’Expertcomptable, actionnaire minoritaire dans le capital de la petite entreprise informelle », qui veut dire : « je vous aide à gagner de l’argent et vous me rémunérez avec une partie de ce que je vous ai fait gagner ». Au niveau communautaire(UEMOA), le Congrès a recommandé de - Créer une Commission en charge de produire le Livre blanc sur les TPE, PME, PMI en zone UEMOA ; - Créer avec les ministères en charge du secteur informel une commission en charge d’implémenter « le Statut de l’entreprenant ». Les messages clés du Congrès selon le Président du CPPC
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Premier message : « semons autour de nous la contagion de notre prospérité notamment aux entreprises en difficulté, au secteur informel qui est très peu présent dans notre portefeuille ». Le deuxième message : « reconnaitre que la transformation digitale est un nouveau paradigme qui constitue une opportunité et une menace en même temps. Elle pousse la profession à s’ajuster pour rester à la hauteur des attentes des clients. L’Expert-comptable tiers de confiance a un rôle de premier plan dans cet univers. Nous devons ajuster nos actualités pour pouvoir accompagner nos clients à saisir ces opportunités nouvelles, de créer de la richesse générées par la transformation numérique. La transformation touche les outils, les méthodes, et l’organisation des cabinets et entreprises. Mais audelà des outils, c’est une culture ». Perspectives : Cap sur Cotonou 2019 !
Le prochain congrès se penchera justement sur le thème : « la digitalisation : enjeux et retombées» afin de voir les dispositions à prendre pour un basculement sécurisé vers le digital, et qui soit profitable ; comment faire de la digitalisation un ascenseur de l’économie ? Ce congrès cherchera à apporter des réponses sur comment sécuriser les procédures de basculement, comment grandir dans cet environnement de façon sécurisée, et comment faire de cet environnement digital un environnement porteur, comment l’Expert-Comptable pourra continuer à apporter de la valeur si les choses vont toutes seules dans un univers technologiques Etc.
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Réactions de participants : Mahammad Boun Abdallah DIONNE Premier Ministre de la République du Sénégal « l’Expert-Comptable est au cœur des économies de nos pays en assurant la production d’informations comptables et financières fiables, destinées aux décideurs et acteurs de l’économie… L’Expert-Comptable demeure un des premiers conseils de l’entreprise qui est au cœur de l’activité économique. Et nos pays aujourd’hui ont besoin d’entreprises compétitives, performantes, innovatrices, génératrices de richesses, de croissance et d’emplois durables, donc de cohésion durable pour nos nations. Pour réussir ce challenge, l’entreprise a besoin de se faire accompagner par l’Expert-Comptable, depuis sa création, la recherche de financement, la restructuration, l’évaluation et la transmission. L’Expert-Comptable peut donc être considéré comme créateur de valeur. ». Pr Dorothé C. SOSSA Secrétaire permanent de l’OHADA, «Il faut de la volonté politique pour l’adoption du statut de l’entreprenant. Par exemple, Il faut l’accompagnement du ministre des finances pour le volet statut fiscal. Le Ministère des finances doit proposer un impôt spécial libératoire pour que cela puisse marcher. J’invite les Etats à aller voir l’expérience du Benin qui a adopté le statut de l’entreprenant. C’est un statut transitoire et optionnel. L’expérience du Benin distingue l’informel de production, l’informel d’art, l’informel de services, d’échanges et distribution. Pour que le Statut de l’entreprenant marche, il faut aussi travailler sur la sécurité sociale, travailler avec les Centres de Gestion Agrées, les Centre de Gestion Agréé comme accompagnateur et médiateur fiscal, il faut de la formation, de l’alphabétisation, le soutien des banquiers (dépôts de recettes chez le banquier), l’inscription aux institutions de sécurité sociale, un statut fiscal stable, etc. Des gens sont sortis de l’informel au Benin. Le Statut de l’entreprenant est un statut prometteur pour évoluer vers un statut plus stable. » Alia Diène DRAME, à propos de la transition numérique « Il ne faut pas qu’on se prenne pour des faiseurs de miracles. Il faut que l’Expert-Comptable refuse d’être une machine, mais il doit apporter de la valeur aux entreprises et à tous ceux qui utilisent les comptes pour prendre leurs décisions. Connaitre l’entreprise et des métiers de l’entreprise. 80% de nos activités devront être consacrées à cela. »
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ils ont dit !
Monsieur Marc WABI, Directeur Général de Deloitte Côte-Ivoire, « Notre apport n’est pas bien évalué par les Etats et les clients. Aujourd’hui, la question essentielle pour nous, c’est comment rester cet acteur majeur de l’économie en prenant en compte la complexité des environnements et les comportements des clients ? » Aujourd’hui, le conseil représente 60% des activités de Deloitte. Une concentration bien orientée créée de la valeur. Le conseil joue un rôle clé qui va se développer, qui va changer mais qui ne va pas disparaitre. La force de la profession, réside d’abord dans la compétence technique qui est importante. Le rôle de l’éthique et notre code déontologique constituent l’élément majeur. Le respect des règles déontologiques c’est ce qui va faire la différence sur le marché du conseil. L’éthique occupe une place importante dans la profession. Nous engageons notre responsabilité et notre indépendance. » Hervé GBEGO, Vice-président de l’Ordre des Experts-Comptables de France « La RSE est une réponse des entreprises aux différents enjeux du Développement Durable en tenant compte de leur enjeu micro. Les entreprises adoptent quatre postures vis-à-vis de la RSE : en profiter (vendre des produits bio par exemple), jouer la prudence ; tout faire pour éviter des catastrophes, faire de la tartufferie ou green Whasing, ou y aller avec conviction. ». Marie BA, Présidente de l’ONECCA « La politique de l’autriche ne permet pas de survivre à la transition digitale. Nous devons élargir notre périmètre d’intervention, nous repositionner, nous adapter, appuyer les entreprises dans la gestion et leur transformation digitale. Pour accompagner la performance durable des entreprises, nous devons garder à l’esprit les critères de la performance déclinée par l’OCDE : la performance économique, sociale, sociétale, environnementale, l’engagement RSE. »
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Cosme GOUNDETE, Président de l’OECCA du Benin Président de la Fédération Régionale des ExpertsComptables de l’UEMOA « Le Congrès Régional est l’arbre à palabre, un lieu de complémentarité où se discutent les affaires de la cité. C’est une occasion de s’enrichir mutuellement en mettant ensemble nos savoirs et expériences. Les cabinets sont des cliniques normées pour les entreprises qui leur prodiguent des soins et vaccins contre les risques stratégiques, opérationnels et financiers pour leur assurer un développement voulu et non un développement subi. Cinq leçons majeurs sont à tirer de la deuxième édition : Les mutations économiques et technologiques doivent amener l’Expert-Comptable à faire sa mue ; l’Expert-Comptable est menacé mais il a une capacité d’adaptation à la digitalisation des économies qui constitue une opportunité pour démultiplier l’ensemble des prestations aux entreprises et appuyer leur croissance ; la contagion des valeurs doit concerner les entreprises en difficulté et les entreprises du secteur informel au grand bénéfice de tous ; il y a nécessité d’élargir le périmètre des interventions de l’Expert-Comptable pour conforter son rôle dans l’économie». Drissa KONE, Président de l’Ordre des Expertscomptables de Côte-D’ivoire Président du Conseil Comptable Ouest Africain « L’Expert-Comptable est le garant de la qualité des informations financières, un faiseur de développement qui assure l’entreprise contre la mortalité précoce. Il est le garant de la bonne gouvernance. C’est un accompagnateur de l’entreprise sur le plan administratif, fiscal, social et de gestion. L’Expert-Comptable doit aider l’entrepreneur à dire : j’ai besoin d’indicateurs pour piloter mon entreprise. ». Philippe ARRAOU, Past Président de l’Ordre des Experts-Comptables de France. « La révolution numérique est une tendance générale. Ce sont nos clients qui changent ; ce qui nous amène à nous adapter. N’essayons pas de freiner l’automatisation. En Italie la facture électronique est obligatoire à compter de janvier 2019. En France la Loi Macron facilite de conseiller une entreprise sans être son comptable. L’évolution de la prestation des Cabinets va se faire avec des compétences diverses. ».
Adrien DIOUF, Directeur UEMOA TITRE « Ce qu’on attend de l’Expert-Comptable de demain, c’est trois choses : la réputation (c’est à dire une personne digne de confiance et exempte de tout reproche) ; de la technicité (qu’il soit bon techniquement) et du conseil (pour créer de la valeur). Je recherche que mon commissaire aux comptes m’accompagne à créer de la valeur. Nous avons besoin des Experts-Comptables pour
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travailler sur le Prizing. Le marché détermine la valeur des titres. Nous avons besoin de vous pour tirer ce prizing, pour déterminer que vaut ou pourrait valoir un Titre ».
Quand les banquiers parlent du rôle de l’ExpertComptable de demain 1er Banquier « La qualité de l’information financière est déterminante pour le banquier. C’est un élément important du processus décisionnel. Sans compétence, il n’y a pas de confiance. L’ExpertComptable de demain doit avoir une compétence diversifiée. Dans le juridique, dans le fiscal, dans l’organisation, en informatique. On passe de l’exercice individuel vers un exercice collégial. Quand les demandes de crédit sont bien ficelées, les couts de crédit sont moins élevés. La réglementation de Bale ouvre un boulevard et demande un besoin d’accompagnement plus diversifié des ExpertsComptables. » 2ème Banquier « Le modèle économique des banques est en train d’évoluer. Nous évoluons vers la banque emprunteur, arrangeur et placeur. Avec la nouvelle réglementation de Bale en particulier, le ratio de fonds propres, la qualité de l’information financière des clients qui se présentent à nous, et l’évaluation de risques sont fondamentales. Les banques de l’espace UEMOA détiennent dans leur bilan 10 000 milliards de FCFA d’actifs à valoriser à la discrétion des banques. Nous attendons des ExpertsComptables qu’ils nous proposent des modèles économiques de valorisation de ces actifs. » Quand les Investisseurs parlent des Expertscomptables THIABA CAMARA SY d’AFRIC FUNDS, ex-membre de Deloitte « Les Experts-Comptables représentent un creuset de talents pour nos recrutements. La nature de notre complémentarité avec les Experts-Comptables est spécifique. Sans les Experts-Comptables, nous ne pouvons pas faire notre travail. Sans vous, nous ne décaissons pas. » Un autre Investisseur « Avoir une personne à qui tout le monde fait confiance est important. La déontologie de l’ExpertComptable a un effet sur tout le système financier. Elle permet d’éviter que la base ne soit faussée. Toutefois, il y a un boulot à faire sur les normes IFRS par les Experts-Comptables en rapport avec la vitesse d’intégration des économies et pour faciliter la lecture des Etats financiers de part et d’autre, entre pays anglophones et francophones »
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PUBLI Reportage
FOCUS : Une entreprise, une histoire
La Loterie Nationale Sénégalaise (LONASE)
la rennaisance dans l’excellence Il y a quelques années, avant qu’Amadou Samba KANE n’en prenne la direction, La LONASE était en grande difficulté. Aujourd’hui, grâce à la politique d’excellence de son Directeur Général, elle est devenue un modèle pour le continent africain et plus encore.
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ès son arrivée, Amadou Samba KANE s’est mobilisé sur tous les fronts. Convaincu que la renaissance de la LONASE était l’affaire de tous, il a associé dans ce combat de reconquête l’ensemble du personnel, optant résolument pour un management participatif, aux côtés de cadres compétents, qui entendaient eux-aussi relever le défi et lui ont entièrement fait confiance. Ainsi, lorsqu’ Amadou Samba KANE a pris ses fonctions, la situation était catastrophique. Les parieurs gagnants ne percevaient plus leurs gains, le portefeuille produit était
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La revue de l’expert-comptable
réduit à un seul jeu qu’est le PMU, les fournisseurs n’étaient plus payés. L’entreprise devait ainsi 700 millions de dettes dûes à ses fournisseurs, sans compter les tickets de paiement de 2009 non honorés et les retards de salaires qui avaient largement affecté le moral des travailleurs. Après une retraite stratégique avec toutes les entités de l’entreprise, un diagnostic approfondi de la situation a été posé et des solutions de sortie de crise proposées : la diversification des produits a été mise en place. De nouveaux produits ont ainsi vu le jour, qu’il s’agisse de jeux de grattage, sms, virtuels ou encore plus tard Parifoot et LOTO ont très rapidement permis à la société d’accroitre son chiffre d’affaire annuel qui est passé de 31 milliards en 2010 à 100 milliards en 2018. Cette diversification s’est accompagnée d’une modernisation et c’est ainsi que 2016 a marqué l’entrée de la Loterie Nationale Sénégalaise dans l’ère de la dématérialisation, avec le lancement d’un nouveau jeu de loto instantané « cash chrono ». Ce produit a été lancé avec le concours des Groupes français
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Partouche et Digital Virgo, qui ont mis à disposition leur plateforme de gestion de solutions de paiement opérateur (mobile, FAI, télécom). Cette révolution numérique est née de la volonté du Directeur Général qui a très tôt senti les mutations profondes qui étaient en train de s’opérer à la faveur du développement des Technologies de l’information et de la communication . Elle a également permis de répondre au besoin de compétitivité de la LONASE, face à la concurrence des jeux qui se développent à travers le net. Parallèlement à ces mesures, le réseau de vente a été modernisé et développé, entrainant une croissance significative du chiffre d’affaire. Dans le même temps, le Directeur Général a pu mettre en place une stratégie de dimininution drastique des charges de fonctionnement dont l’objectif était de rétablir les équilibres financiers de l’entreprise. Aujourd’hui, la LONASE est gérée selon les standards internationaux identiques à ceux des sociétés de loterie en Europe ou aux Usa. En effet, elle est certifiée ISO 27001, WLA-SCS 2016 et ISO 9001 version 2008 puis version 2015. w w w. o n e c c a . o r g
PUBLI Reportage
Par ailleurs, dans la continuité de sa démarche constante de responsabilité sociétale, elle mène une importante politique de promotion du Jeu Responsable, qui lui permet d’offrir un environnement de jeu sain et sécurisé à ses parieurs sur toute l’étendue du pays et de prévenir une pratique excessive du jeu. Tous les employés de la LONASE et ses parties prenantes sont associés et impliqués dans cette démarche par le biais de formations, d’une large campagne d’information et de sensibilisation interne et externe. Il faut aussi souligner dans ce cadre, que des partenariats ont été noués avec des structures médico-sociales telles que la faculté de médecine ou encore les centres hospitaliers. Aussi, la LONASE participe à la construction de salle de classe, luttant ainsi contre les abris provisoire, véritables freins à l’éducation scolaire. Parallèlement, les pratiques de jeux sont évaluées et analysées en continu avec des indicateurs pertinents et des contrôles réguliers. Par ailleurs, la LONASE a élaboré un plan stratégique de dévelopw w w. o n e c c a . o r g
pement pour la période 20172021 avec comme principal objectif, l’atteinte de 120 milliards de Chiffre d’Affaires à terme. Ce plan est adossé à un contrat de performance signé avec l’Etat du Sénégal.
La LONASE jouit aujourd’hui d’une notoriété internationale indiscutable, en témoigne le congrès de l’Association des Loteries d’Afrique qui s’est tenu à Dakar en 2014 et au cours duquel, Amadou Samba Kane a été porté à la tête de cette prestigieuse organisation continentale. En 2018, il a été reconduit par ses pairs pour un deuxième mandat ; ce qui dénote de la confiance qu’ils lui portent. Le congrès de Dakar a connu un franc succès avec une participation 05 • Avril-Mai-Juin 2019
record et la présence du président de la World Lottery Association (WLA). A l’issue de ces assises, parmi les objectifs assignés au comité directeur, figuraient en bonne place l’élargissement de l’organisation aux loteries anglophones et lusophone mais aussi, l’adoption des standards internationaux par les membres. Comme pour la LONASE, Amadou Samba Kane, en sa qualité de Président de l’ALA, a réussi à relever les défis qui semblaient insurmontables. En effet, d’autres Loteries du continent ont rejoint l’association, qui a même enregistré l’adhésion de sociétés privées qui gèrent parfois les loteries dans certains pays mais a aussi réussi la prouesse de les engager toutes sur la voie des certifications. Ainsi, aujourd’hui, les pages sombres de la LONASE sont tournées. Elles sont ouvertes sur un avenir durable dans lequel elle rayonne sur la scène nationale et internationale. La revue de l’expert-comptable
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L’ONECCA dans la cité
Restitution atelier 2 du Congrès :
Rôle de l’Expert-Comptable dans la prévention des conflits et la sauvegarde des entreprises Les entreprises jouent un rôle essentiel dans la création de richesse et d’emploi pour l’économie nationale. Toutefois, l’environnement des affaires, très concurrentiel et les problèmes structurels de l’économie induisent auprès des entreprises des contraintes qui peuvent entraver leur développement ou menacer leur survie. Le recours aux services de l’Expert-Comptable apparait souvent comme la seule alternative pour éviter une mort certaine à l’entreprise en situation de difficulté. Pour autant, le succès de son intervention n’est pas garanti d’avance.
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armi les nombreuses missions des cabinets d’expertise comptable auprès des entreprises, la prévention des conflits et la sauvegarde des entreprises apparaissent comme des missions périlleuses et des plus délicates. La littérature nous renseigne que 9 entreprises sur 10 ne survivent pas à leur 10ème anniversaire en Afrique. Au Sénégal, 65% des nouvelles créations d’entreprises meurent dans les trois premières années (RGE 2016, ANSD). La même source indique que 85,2% des entreprises en difficulté sont des PME. Aussi, l’intervention de l’Expert-Comptable suscite beaucoup d’espoir mais elle est généralement source de préoccupations ; tellement les enjeux sont énormes et le nombre de défaillance d’entreprises élevé. Il n’est donc pas étonnant que ce thème d’une brulante actualité dans le contexte africain et sénégalais, ait fait l’objet d’un atelier de haut niveau lors du 2ème Congrès Régional des Experts-Comptables de l’UEMOA. Animé par deux praticiens expérimentés dans le domaine du consulting (Monsieur Alioune NDIAYE, Expert-Comptable Associé du Cabinet Mazars et Madame Ndeye Maguette DIOUF, Expert-Comptable Associé de Deloitte Sénégal), et par un juriste membre de la Commission nationale de l’OHADA, Monsieur Mountaga Diouf, l’atelier sur « le rôle de l’Expert-Comptable dans la prévention des conflits et la sauvegarde des entreprises » a été sans aucun doute
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la grande attraction des travaux scientifiques du 2ème Congrès Régional des Experts-Comptables. Ledit atelier a été modéré par le président d’honneur de l’ONECCA, Monsieur Abdoulaye Dramé. Il a permis aux participants de cerner les causes de difficulté des entreprises ainsi que les signes précurseurs de ces difficultés. L’atelier a aussi permis d’analyser en profondeur la complexité de la mission de prévention et de sauvegarde de l’ExpertComptable dans une entreprise en situation de crise, de dégager des pistes de solutions et enfin de s’accorder sur les facteurs clé de réussite de l’intervention de l’ExpertComptable. un thème à enjeux multiples Il faut dire que ce thème qui se situe aux confluents des actes uniformes de l’OHADA - notamment dans ses volets règlement préventif et liquidation qui sont encadrés par des textes juridiques communautaires - revêt également des enjeux à la fois économiques, financiers et sociaux considérables (atteinte d’objectifs macroéconomiques pour l’Etat, perte de profit pour l’entreprise, pertes d’emplois pour les travailleurs de l’entreprise etc). Nonobstant l’existence d’un nombre important d’entreprises mort-nées à la création, le fort taux de mortalité peut s’expliquer par le fait que nous sommes dans une situation de changement du cycle de vie de w w w. o n e c c a . o r g
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l’entreprise, explique un des panelistes. Avant, le cycle de croissance de l’entreprise était plus long. Maintenant, le cycle de croissance est devenu court. Ce qui suggère un besoin constant d’innover vite dans un temps réduit ou de disparaitre, analyse Mme Ndeye Maguette DIOUF de Deloitte. Dans ces conditions, la contagion de valeur prônée par la profession comptable réside dans l’inversion de la situation, autrement dit, faire de sorte que les 10% d’entreprises qui font vivre les recettes fiscales et les Cabinets, qui créent de la richesse et de l’emploi, deviennent 20%, 30% etc. Une gageur, quand on sait que les risques opérationnels sont souvent méconnus des chefs d’entreprises tout comme les méthodes d’anticipation, de détection et de prévention de crise, en l’absence d’un système de contrôle interne (miss management) et du fait de l’entêtement des chefs d’entreprise à vouloir nier la réalité (refus de reconnaitre la crise). Cette négation de la crise explique le recours tardif aux services de l’Expert-Comptable et la réduction des chances de succès de sa mission.
Quelles sont les sources de difficultés des entreprises ? Les causes de difficultés de nos entreprises dans notre environnement sont nombreuses. Elles ont été bien identifiées par Monsieur Alioune NDIAYE du Cabinet Mazars. Selon Monsieur NDIAYE, les causes de difficultés peuvent être externes, c’est-à-dire, liées au contexte économique (arrivée d’un concurrent, hausse du prix des intrants et matières premières utilisés, une évolution technique ou technologique dans le secteur d’activité de l’entreprise, une nouvelle réglementation etc,). Elles peuvent aussi être d’origine interne, liées cette fois-ci à des facteurs endogènes (la stratégie opérationnelle de l’entreprise ou l’absence de stratégie, les mauvais choix d’investissement, un endettement excessif, des abus de biens sociaux, une faible rentabilité, une mauvaise structure de charges, une mauvaise organisation commerciale etc). Quels sont les signes avant-coureurs d’une entreprise en difficulté ? Les manifestations peuvent être perceptibles à travers des problèmes de trésorerie. Parmi les signes précurseurs de difficultés, Monsieur Alioune NDIAYE du Cabinet Mazars a pointé : le non respect des engagements vis-à-vis des tiers, la non atteinte des objectifs de création de richesse. D’autres signes sont à chercher dans le comportement des dirigeants notamment les mesures prises par les dirigeants : les leviers opposés aux difficultés, le recours à une assistance externe. Il existe à coté, des facteurs aggravants ; des facteurs qui masquent les difficultés comme par exemple une information trompeuse pour éviter d’attirer l’attention. Le soutien abusif des bailleurs peut aussi être un facteur aggravant parce qu’il permet juste un traitement symptomatique et non un traitement de la racine du mal. L’intervention souvent tardive de l’Expert- Comptable n’est pas pour arranger les choses.
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Madame Ndeye Maguette DIOUF de Deloitte a pour sa part relevé dans son intervention d’autres symptômes d’une entreprise en difficulté qui ne trompent pas. Il s’agit entre autres de la tension de trésorerie, de la baisse de la qualité des prestations, des outils de productions obsolètes, un problème de marketing, un climat social tendu, un moral du personnel très bas, un problème de management (lorsque le leadership personnel du manager est contesté) etc. La plus grosse erreur pour Madame DIOUF, c’est d’ignorer la crise ou le déni de la crise. Il est souvent difficile pour le chef d’entreprise de tout remettre en cause. Le dirigeant d’une entreprise en difficulté a tendance à bien cacher son jeu. Toutefois, il est souvent trahi par un ensemble de signaux qui ne trompent pas : la récurrence d’incidents de paiement et l’accumulation de prêts bancaires (la hausse des découverts et des endettements à court terme), la baisse des indicateurs de vente, le déséquilibre du bas de bilan. La tendance des dirigeants d’une entreprise en difficulté à nier la crise les conduit souvent à prévoir des provisions insuffisantes, sans évaluation des actifs (stocks), à s’endetter pour régler d’anciennes dettes et même à faire de la création monétaire illégale (émissions de traites non adossées à une provision). Autant de signaux qui montrent clairement que l’entreprise est entrain de rentrer dans les ténèbres. Les « mesurettes » prises à la va-vite pour sauver les apparences ne feront que remuer le couteau dans la plaie, et aggraver les difficultés avec comme conséquence ; le discrédit avec les partenaires, et le déclenchement contre elle de mesures de recouvrement des créances renchérit Monsieur Alioune Ndiaye de Mazars. Le recours à l’Expert-Comptable se faisant souvent tardivement, l’entreprise dans cette situation s’enlise dans un cercle vicieux infernal où elle a du mal à sortir. Seule une intervention de l’Expert-Comptable permet de sauver ce qui peut l’être et d’éviter d’arriver à une procédure de règlement préventif ou tout bonnement à sa liquidation.
Que peut faire l’Expert-Comptable? La prévention et la sauvegarde comportent des aspects financiers et économiques. La prévention consiste à préserver l’exploitation de l’entreprise et à respecter ses encagements vis-à-vis des tiers. Les mesures de prévention des difficultés consistent à prévoir, anticiper, détecter le plus en amont possible les situations de crise. Le premier travail de l’Expert-Comptable consiste à aider les dirigeants à dédramatiser la situation et à faire rétablir une information financière fiable. L’ExpertComptable doit rétablir la vérité des chiffres avant toute chose. En effet, son intervention doit permettre la mise en conformité réglementaire de l’entreprise et la restauration de la confiance entre l’entreprise et ses partenaires avec un business modèle remis à plat à court terme. Le second travail consiste à faire une revue critique du business plan de l’entreprise en analysant les 05 • Avril-Mai-Juin 2019
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performances antérieures de l’entreprise ainsi que la viabilité de l’affaire pour pouvoir préconiser des mesures à même d’assurer la continuité de l’exploitation. Une fois que cette étape est franchie, l’Expert-Comptable a, à sa disposition, plusieurs leviers pour agir : la mise en place d’un plan de restructuration assorti d’un plan de financement de l’exploitation voir de soutien de la restructuration des dettes de l’entreprise et son rééchelonnement. Les mesures de prévention et de sauvegarde peuvent inclure la recherche de repreneurs pour l’entreprise et même la cession de biens pour réduire ses dettes, et la dation pour aller à des durées de remboursement plus longues, et le cas échéant, le règlement à l’amiable via des procédures d’apurement du passif de l’OHADA. En définitive, l’alternative consiste à proposer un plan de restructuration ou le cas échéant, de dissolution de l’entreprise. Dans le cas d’un plan de restructuration, il appartient à l’Expert-Comptable de proposer un plan de financement de l’exploitation pour soutenir la restructuration de la dette et le rééchelonnement dans les limites fixées à trois ans dans les procédures de recouvrement OHADA mais qui est dans la réalité, un délai plus que problématique.
Discussions et Conclusions Il est souvent reproché à l’auditeur de trop se focaliser sur les informations financières et non sur la structuration de l’entreprise et de ses relations avec ses partenaires et son environnement. Les échanges pendant l’atelier ont montré que ces reproches sont fondés dans la mesure où la restauration de la confiance nécessite un business model remis à plat à court terme. Par ailleurs, la mise en œuvre de moyens de restructuration crédibles et de repositionnement de l’entreprise ou d’un plan de liquidation, suppose un diagnostic stratégique économique et financier clair tel un médecin devant un patient. Un autre sujet de préoccupation, c’est la faiblesse des dispositifs publics de soutien aux entreprises en difficulté et en particulier, la disproportionnalité des ressources allouées par l’Etat à ces dispositifs comparées aux besoins énormes de prise en charge des nombreuses entreprises en difficulté. La question du financement de l’entreprise en difficulté reste entière. Les banques mettaient 38 mois pour récupérer 14 % de leur créance (Rapport Doing Business 2014) ce qui ne les incite guère à soutenir le financement d’un plan de restructuration d’une entreprise en difficulté renseigne Monsieur Mountaga Diouf. D’autres questions tout aussi importantes ont été soulevées par les participants. Comment faire pour que la prévention soit liée aux missions de l’ExpertComptable et au principe de continuité de l’exploitation ? Selon Monsieur Mountaga Diouf, l’acte uniforme de l’OHADA donne aux commissaires aux comptes un droit de délation d’une situation de crise mais qui dans la pratique, n’est pas exercé par ces derniers. De même, l’existence de clauses anti dissolution pour les sociétés à participation égalitaire rend quasi impossible leur liquidation et partant le recouvrement des créances recouvrables. Une situation qui mérite d’être révisée.
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Une autre question soulevée est de savoir comment assurer un minimum d’assistance comptable aux entreprises pour leur éviter des situations de crise? Quid du sort des entreprises qui entrent en règlement préventif après avoir épuisé le Concordat ? Y a-t-il une possibilité pour les Experts-Comptables de réaliser un Benchemarketing sectoriel des entreprises en difficulté en exploitant des bases de données auxquelles ils ont accès ? Si d’autres rencontres sont nécessaires pour élucider toutes ces questions, l’atelier a néanmoins permis d’établir un certain nombre d’évidences tirées des leçons apprises de la pratique de prévention de crise et de sauvetage des entreprises, de dégager quelques pistes de solutions et de formuler quelques recommandations a l’endroit des parties prenantes. Premièrement, l’ExpertComptable doit innover dans l’approche et mieux comprendre les besoins du client pour pouvoir l’aider à anticiper les crises. Il y a nécessité de changer d’approche en matière de prévention en développant une culture de l’économie préventive qui met en avant la réactivité, l’anticipation, le diagnostic réaliste, la formation des Experts-Comptables aux outils d’alerte précoce. En somme, il s’agit de promouvoir une approche préventive et non curative ; ne pas attendre que l’entreprise soit dans une situation de non retour ; en détectant le plus en amont possible les difficultés. Les entreprises sauvées sont celles pour lesquelles l’intervention a été précoce. Deuxièmement, il faut arriver à associer l’appareillage juridique à des dispositifs économiques ; en s’inspirant par exemple de l’expérience du Benin qui a mis en place un fonds pour soutenir les entreprises en difficultés. Troisièmement, devant le refus des banques à financer la continuité de l’exploitation quand leurs clients sont en difficulté, il faut de plus en plus envisager le recours aux fonds d’investissements ou de capital risque plus attachées au potentiel intrinsèque de l’entreprise et plus aptes et mieux outillés que les banques à s’immiscer dans la gestion de l’entreprise.
Enfin, Il existe toute une chaine de responsabilité collective dans la prévention des conflits et le sauvetage des entreprises en difficulté : les dirigeants de l’entreprise, ses partenaires techniques, financiers, et commerciaux, les Experts-Comptables, les Etats, le régulateur. L’Etat a mis en place tout un dispositif d’aide et de soutien aux entreprises afin d’augmenter leur productivité et de réduire leur vulnérabilité. Cependant, les moyens des dispositifs de soutien aux entreprises en difficultés gagneraient à être revus à la hausse. Sa responsabilité est manifeste dans la mise en place de mesures juridiques, fiscales, économiques de soutien aux entreprises en difficulté. Certaines mesures fiscales et sociales contenues dans l’Acte uniforme de l’OHADA sont en déphasage avec la réalité des entreprises en difficulté. Elles doivent donc être révisées sans délai pour se hisser à la hauteur des enjeux de l’heure.
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ZOOM sur le Statut de l’entreprenant dans l’environnement juridique officiel. Des chefs de micros, petites entreprises sont également freinés par une crainte d’exercer dans un cadre formel à travers lequel, ils ne perçoivent les obligations qu’en termes de contraintes et non d’opportunités. Ainsi, ils se confinent dans l’informel avec des possibilités limitées de développer leurs activités. Enjeux de la formalisation des entreprises du secteur informel
Le secteur informel pris dans sa globalité occupe une place importante dans le Plan Sénégal Emergent (PSE 2015-2035) où il est considéré comme un moteur important de diversification des sources de la croissance et d’inclusion sociale qui doit permettre d’atteindre les objectifs de transformation structurelle de l’économie visés par l’axe un ( 1) de ce Plan. Le secteur informel ou l’économie informelle apparait dans ce nouveau référentiel de développement économique et social comme un moyen pour l’État de réaliser une croissance inclusive à large base sociale dont les Micros, petites, et moyennes entreprises seront les principaux artisans. Cette importance accordée au secteur informel lui a valu d’être intégré dans le Département ministériel en charge des PME qui est devenu depuis lors, le Ministère du commerce, du secteur informel, de la consommation, de la promotion des produits locaux, et des PME.
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ntroduction
Au Sénégal, les chefs de micros, petites entreprises sont freinés dans leur élan par une méconnaissance des règles administratives et des obligations légales. Selon l’Enquête Nationale sur le Secteur Informel au Sénégal (ANSD 2010) : 8,8% des Unités de Production Informelles (UPI) seulement sont enregistrés au NINEA, 30% ont le Registre de Commerce, 2,2% sont immatriculées à l’IPRES / CSS, 1/3 de ces UPI ignorent qu’elles doivent s’inscrire dans les fichiers administratifs, 41,5% pensent que la tenue d’une comptabilité n’est pas nécessaire. Cette méconnaissance des règles administratives constitue souvent un handicap pour leur insertion
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Cet ancrage institutionnel du secteur informel à ce département ministériel se justifie par le fait qu’au Sénégal, les micros, très petites, petites et moyennes entreprises sont majoritairement des entreprises du secteur informel (97% du tissu des pme sénégalaises sont dans l’informel). (ANSD, Recensement Général des Entreprises, 2016). Il traduit enfin la volonté de l’Etat de faire migrer ces entreprises dans le secteur formel et de réaliser ainsi une modernisation graduelle de l’économie sociale. Il est attendu de ce basculement vers le secteur formel, la structuration de nouveaux corps de métiers ou le renforcement de ceux existants ; l’accès du secteur informel à la protection sociale ; l’organisation des filières clées de l’artisanat de production ; l’implantation d’incubateurs et de zones d’artisanat dédiées ; la formalisation du commerce intérieur (création de marchés de gros pour les céréales et les fruits et légumes) et du transport etc. Echec des politiques publiques de formalisation du secteur informel
Au plan législatif et réglementaire, différentes politiques en direction des entreprises du secteur informel ont cherché à formaliser un secteur qui a toujours résisté à toute réglementation. Ce processus qui a été conduit par la Direction des PME (DPME), a démarré au Sénégal par la mise en place progressive w w w. o n e c c a . o r g
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d’un cadre juridique et réglementaire de 2004 à 2008. L’option prise par l’Etat pour formaliser les entreprises du secteur informel consistait à mettre en place un ensemble de mesures de soutien et d’accompagnement pour les entreprises qui acceptaient de se formaliser, à travers leur adhésion à la charte des PME (2003) devenue à partir de 2008 la Loi d’orientation et de développement des PME (Loi 2008 -29 du 28 juillet 2008, www.gouv. sn).
La Loi d’orientation prévoyait un certain nombre de facilités (régularisation fiscale, accès prioritaire aux financements publics, à des sites aménagés, aux marchés publics etc) aux entreprises qui décidaient volontairement d’acquérir la « qualité de PME ». En contrepartie, ces entreprises s’engageaient au respect d’un certain nombre de règles et principes consensuels (disposer d’un Registre de commerce, d’un Numéro d’Identification des Entreprises et Associations (NINEA), tenir une comptabilité allégée (système minimal de trésorerie) reconnue par les Centres de Gestion Agréés etc. (Loi d’orientation 2008). « La qualité de PME » se perd à tout moment par la constatation du non respect des engagements souscrits ou en cas de fraude avérée par le Comité de suivi placé sous la supervision de la Direction des PME (DPME). Pour faciliter la régularisation fiscale volontaire des entreprises du secteur informel et les amener à acquérir la « Qualité de PME », le code général des Impôts adopté en 2013 a institué la Contribution Globale Unique (CGU) (Code général des impôts 2013) ; un impôt synthétique qui offre l’avantage d’être payé une seule fois l’an et est calculé sur la base du Chiffre d’affaires réalisé par l’entreprise. Cette imposition unique évitait la paperasserie et les tracasseries administratives inutiles qui décourageaient plus d’une entreprise à se formaliser. Par ailleurs, l’adhésion était volontaire (régime de déclaration volontaire) en vertu du civisme fiscal. Enfin, pour tenir compte de la spécificité des femmes et libérer le potentiel de l’entreprenariat féminin, la Loi d’orientation relative à la promotion et au développement des PME, s’appuyant sur le code des marchés publics, rappelle en son article 33 que : « 15% des parts de marchés publics réservés aux PME reconnues comme telles sont accordées aux entreprises appartenant aux femmes ». (DPME, Document de Lettre de Politique Sectorielle des PME, LPSE PME, page 21).
A l’heure du bilan, les résultats de ces initiatives publiques de faire migrer les entreprises vers le secteur formel sont plutôt décevants. Le secteur informel a pris plus de poids ce qui nuit à la compétitivité du tissu économique et remet en cause l’atteinte des objectifs de transformation structurelle de l’économie sénégalaise. La Loi d’orientation n’a pas suscité des adhésions massives comme souhaité pour plusieurs raisons : (i) Portage politique et institutionnel défaillant (non signature des décrets d’application, changements fréquents à la tête du Département ministériel en charge du secteur des PME) ; (ii) manque d’appropriation de la Loi par les opérateurs économiques du secteur
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informel). Beaucoup d’entreprises qui avaient adhéré à la Contribution globale unique (CGU) ont fait défection au bout d’un à deux années d’exercice et sont retournées dans l’informel
Le statut de l’entreprenant, une solution alternative ? En matière de reconnaissance juridique des entreprises de l’économie informelle, l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), dont fait partie le Sénégal et 15 autres pays africains, propose un statut juridique qui pourrait être un modèle taillé sur mesure pour les entreprises du secteur informel. En effet, dans le cadre de la révision de l’Acte uniforme sur le droit commercial général, adoptée le 15 décembre 2010 à Lomé au Togo (cf. Journal Officiel de l’OHADA N°23 du 15 février 2011), l’OHADA a innové en consacrant un statut juridique particulier aux entreprises du secteur informel dénommé : Statut de « l’entreprenant » soumis à un régime juridique, comptable et fiscal allégé. Ce nouveau statut tend à favoriser le passage de l’économie informelle vers l’économie formelle et faciliter l’accès des petits entrepreneurs aux financements. Qu’est-ce que l’entreprenant? L’entreprenant est un entrepreneur individuel, une personne physique qui, sur simple déclaration faite au greffe du tribunal, exerce une activité professionnelle civile, commerciale, artisanale ou agricole. L’entreprenant doit avoir la majorité et ne pas être frappé par une incapacité ou d’une interdiction générale, définitive, temporaire directe ou indirecte.
Activités de l’entreprenant et plafonds de chiffre d’affaires Les secteurs d’activités qui peuvent être investis par l’entreprenant sont le commerce, l’artisanat, les services, l’agriculture. Le plafond de chiffre d’affaires pour avoir la qualité d’entreprenant est ainsi fixé : 10.000.000 FCFA pour les activités de services, 20.000.000 FCFA pour les activités artisanales et assimilées, 30.000.000 FCFA pour les activités de commerce. Le chiffre d’affaires annuel généré par l’activité de l’entreprenant ne doit pas dépasser ces seuils. Lorsque, durant deux années consécutives, le chiffre d’affaires de l’entreprenant excède les limites fixées pour ses activités, il est tenu, dès le premier jour de l’année suivante de respecter toutes les charges et obligations applicables à l’entrepreneur individuel. Il perd dés lors sa qualité d’entreprenant et ne bénéficie plus de la législation spéciale applicable à l’entreprenant et doit en conséquence se conformer à la réglementation applicable à ses activités. Obligations juridiques et comptables de l’entreprenant Au plan juridique, l’entreprenant est dispensé d’immatriculation au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier. Il doit simplement déclarer son activité, sans frais, au greffe du tribunal, chargé du Registre du Commerce et du Crédit Mobilier. Il complète un formulaire, renseigne sur l’identité de l’entreprenant et son activité. Le greffe du tribunal
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compétent délivre un numéro de déclaration. Ce numéro, accompagné de la mention « Entreprenant dispensé d’immatriculation », doit figurer sur les factures, bons de commande et autres correspondances professionnelles. Au plan comptable, l’entreprenant est tenu d’établir, dans le cadre de son activité, un livre mentionnant chronologiquement l’origine et le montant de ses ressources et la destination et le montant de ses emplois. Ledit livre doit être conservé pendant cinq ans au moins. L’entreprenant qui vend des objets, des denrées ou des fournitures, doit tenir un registre annuel qui détaille les achats et leur mode de règlement.
Quels sont les avantages liés au statut de l’entreprenant? Le législateur de l’OHADA a laissé à chaque État la liberté de fixer les mesures incitatives pour l’activité de l’entreprenant notamment en matière d’imposition fiscale et d’assujettissement aux charges sociales. Plusieurs textes existent mais sont encore à l’état de projet : - L’avant-projet de loi portant sur le statut fiscal de l’entreprenant : qui fait bénéficier à l’entreprenant, un abattement de 30% du montant de la CGU ; - L’avant-projet de loi fixant le statut social de l’entreprenant : L’entreprenant peut s’affilier soit à une institution de prévoyance maladie, soit à une mutuelle de santé ou à tout autre système d’assurance complémentaire. Au titre de ses cotisations sociales, l’entreprenant affilié verse un montant selon un taux forfaitaire équivalant à 1% de son chiffre d’affaires pour sa propre couverture sociale. - Du Régime Social Simplifié pour les Petits Contribuables (RSPC) au Sénégal, - Du Projet de loi relatif au développement des
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La revue de l’expert-comptable
05 • Avril-Mai-Juin 2019
PME et la modernisation de l’économie qui a prévu des mesures d’assistance technique : soutien à l’alphabétisation fonctionnelle, à la formation et à l’innovation ; appui/conseil ; Mise en réseau ; assistance à la mutualisation de services marchands ; facilitation des relations avec les services techniques déconcentrés, assistance juridique et judiciaire. Conclusion : Que faut-il faire maintenant pour que le secteur informel sénégalais puisse bénéficier de ce statut? AGIR ! Agir pour rendre plus attractif ce statut parce que les seuls avantages fiscaux et sociaux ne suffisent pas, il faut aller au-delà. Ensuite unifier tous les projets de textes et initiatives concernant l’entreprenant et les avantages à leurs octroyer, notamment dans le projet de loi relatif au développement des PME et la modernisation de l’économie. Voter sans plus tarder ce fameux projet de loi qui dort encore dans les tiroirs du gouvernement alors que sa validation technique et politique nationale a eu lieu depuis le 14 octobre 2014 ! Enfin, initier une phase pilote, pour ensuite corriger éventuellement après évaluation en s’inspirant de l’expérience béninoise, la seule qui a été initiée dans l’espace UEMOA et OHADA réunis, celle du Maroc qui marche pour le moment ; et celui de la France qui a été la source d’inspiration du Statut de l’entreprenant promu par l’OHADA.
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