ACTUALITÉ PROFESSIONNELLE EXERCICE
Les remplaçants sont des médecins comme les autres Pour la première fois une étude dresse le bilan d’une année de l’activité de 265 praticiens. Extrapolés à l’ensemble des quelque 10 000 généralistes remplaçants de l’Hexagone, ces résultats prouvent leur place croissante dans le système de santé et insistent sur le boulot qu’ils abattent : en moyenne 81 %de l’activité d’un praticien installé. Cette enquête montre aussi que la plupart d’entre eux seraient prêts à travailler davantage.
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ge moyen : 31,5 ans. Sexe : majoritairement féminin (56 %). Mode d’exercice : libéral exclusif (64 %) ou activité mixte (36 %). Durée de la pratique du remplacement : deux ans et demi en moyenne. Lieu d’exercice : zone semirurale (40 %), zone rurale (30 %), ville (30 %). Tel est le profil type dressé à partir des réponses données au cours de l’année 2008, des 265 médecins remplaçants qui ont participé à l’enquête du Regroupement Autonome des Généralistes Jeunes installés et Remplaçants de France (ReAJIR), cette structure créée il y a deux ans et qui compte aujourd’hui des antennes dans quatorze régions de France. Mais cette étude, inédite, ne fait pas que dessiner le portrait-robot de ces praticiens qui ne s’installent pas, elle bat surtout en brèche bon nombre d’idées reçues sur ce contingent de quelque 10 000 pratiquants de la médecine générale. Au premier rang desquelles l’image de dilettantisme qui continue à coller à la peau de ce corps de généralistes particuliers.
BURGER/PHANIE
165,5 jours d’exercice par an
Ainsi, selon les données de l’enquête, baptisée « Remplact », les remplaçants ont, en 2008, assuré la continuité des soins de 6,8 médecins en moyenne. Dans le même temps, ils ont exercé 165,5 jours et ont bénéficié d’une rétrocession d’honoraires moyens de 73 %. Enfin, quatre médecins généralistes remplaçants sur dix ont effectué des remplacements un ou plusieurs
jours fixes de la semaine. À l’arrivée, « le remplaçant fournit une activité équivalente à 81 % de celle d’un médecin installé », analyse le Dr Catherine Laporte, porte-parole de ReAGJIR, qui précise : « Nous avons pris pour référence une étude de l’Irdes qui évalue la moyenne du temps de travail d’un généraliste installé à 54,6 heures hebdomadaire, dont 14,5 heures sont consacrées à la gestion administrative du cabinet et qui travaille en moyenne 46 semaines par an ». Côté permanence des soins, les remplaçants ne chôment pas non plus. En effet, en 2008, près de deux remplaçants sur trois (65 %) ont assuré au moins une garde de semaine et au moins une garde de week-end. « Cela signifie, poursuit le Dr Laporte, qu’en moyenne, un remplaçant a effectué 7,2 gardes de semaine et 4,3 gardes de week-end ». Au total, les médecins remplaçants auraient donc assuré 13,9 % des gardes de week-end et 93,5 % des gardes de semaine ». Pas mal pour un corps de métier qui représente 7,2 % des médecins généralistes en exercice. « Ces résultats tendent aussi à prouver que les remplaçants sont au moins aussi investis dans la PDS que la moyenne des généralistes installés », souligne le président de ReAGJIR, le Dr Alain Charissou. Un argument de poids à l’heure où les pouvoirs publics, sur fond de pénurie médicale annoncée, ne verraient pas forcément d’un mauvais œil l’installation en zones déficitaires d’une partie de ce réservoir de quelque 10 000 mé-
decins généralistes ? « Ce serait en tout cas une grosse erreur de raisonner de cette manière. Les remplaçants aujourd’hui pratiquent réellement la médecine générale libérale. Vouloir les contraindre à s’installer serait contreproductif et rien ne dit que, dans ce cas, ils continueraient à exercer », rétorquent à l’unisson les Drs Laporte et Charissou.
Paradoxes
Cette analyse, ils l’ont développé dans un premier temps devant la commission Legmann sur la refondation de la médecine libérale. Et espèrent bien se faire aussi entendre prochainement par Élisabeth Hubert. « Car nous sommes face à un paradoxe », expliquent-ils. « Notre enquête a montré que 25,1 % des remplaçants auraient souhaité effectuer plus de journées de remplacements dans l’année, et 65 % auraient accepté de travailler davantage s’ils avaient été sollicités. Si l’on rapproche ces chiffres au nombre de généralistes qui peinent à se faire remplacer, cela prouve bien que le premier des volets sur lesquels il faut agir, c’est bien celui de la mise en relation des remplaçants et des remplacés ». Quant à la question d’une évolution du statut même des médecins remplaçants, les structures régionales de ReAGJIR souhaitent d’abord recueillir le sentiment des premiers intéressés… Une fois le programme rédigé, l’association pourra alors se prononcer vers la fin de l’année. Et, pourquoi pas, à l’occasion de son tout premier congrès. ! François Petty
Vendredi 21 mai 2010 | numéro 2527
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