4 minute read
Mercredi 13h, intervention du président
Sainte-Soline : des centaines de blessés, deux personnes dans le coma et des mensonges à ne plus que savoir en faire. Le ministre de l’Intérieur n’est-il donc comptable de rien ?
Sainte-Soline restera dans les mémoires, comme Sivens. Une boucherie, pour un lopin de terre. Ce samedi 25 mars 2023, Gérald Darmanin a envoyé l’artillerie lourde pour défendre un trou dans le sol : près de 4000 grenades ont été lancées en moins de deux heures – soit environ une toutes les deux secondes, précise Libération –, pour affronter… 6000 manifestants (selon la préfecture). Bilan de la journée : 200 personnes blessées, dont 40 grièvement, trois « urgences absolues » et deux qui sont encore dans le coma (pour l’une d’elles, le pronostic vital est engagé).
Advertisement
Devant assumer cette situation, le pouvoir tente une diversion en faisant fuiter dans la presse qu’un des jeunes hommes dans le coma serait « fiché S, membre de l’ultra-gauche, black bloc ». En d’autres termes, s’il meurt, il l’aura pas volé. Quelques vautours médiatiques s’en délecteront. Et Gérald Darmanin d’annoncer dans la fou- lée « la dissolution des Soulèvements de la terre », comme le lui permet la loi Séparatisme censée lutter contre le terrorisme. La criminalisation des militants de Sainte-Soline, transformés en « écoterroristes » par le ministre de l’Intérieur en novembre dernier, a participé au désastre de ce samedi. Parce que les terroristes, en France, on peut les tuer.
Aux Fronti Res Du R El
Le 27 mars, alors que la pression du week-end n’est pas retombée, Gérald Darmanin donne une conférence de presse, dans un style 100% trumpiste. On a appris plus tôt qu’un deuxième manifestant se trouvait dans le coma.
Le ministre de l’Intérieur va alors mentir à trois reprises :
« Aucune arme de guerre n’a été utilisée par les forces de l’ordre ». Or, ça a été documenté par les journalistes en détail : ont été utilisées des grenades modulaires 2 lacrymogène (GML2), grenades classées en catégorie A2, donc en armes de guerre. Gérald Darmanin ment, en retournant l’accusation de mensonge à l’endroit de la presse.
« Aucun gendarme n’a utilisé de LBD en quad ». Alors que dès samedi nous avions tous pu constater ce genre de scènes via les réseaux sociaux. Darmanin sait qu’on les a vu, que l’on peut les revoir en deux clics, mais il s’en contre-fiche. Il crée des faits alternatifs. Le tout alors que l’IGGN (Inspection Générale de la Gendarmerie Nationale) a été saisi pour enquêter… Quelques heures plus tard, sur France 5, Gérald Darmanin nuancera légèrement ses propos : « Il y a eu deux lanceurs, c’est totalement proscrit, ces gendarmes seront suspendus ».
« Le SAMU n’a pas été empêché d’intervenir ». Là encore, entre les témoignages relayés par la presse – Le Monde est formel lorsqu’il titre « l’enregistrement qui prouve que le SAMU n’a pas eu le droit d’intervenir » – et les alertes données par la Ligue des droits de l’homme, il n’y a que la parole ministérielle qui vient contredire les faits. Et là encore, ce sont les autorités, ici en l’occurrence la gendarmerie, qui dénonce des fake news…
Ce sont loin d’être les premiers mensonges du ministre Darmanin. Il y a quelques jours, il avançait sans que personne n’y trouve à redire qu’il était interdit de participer à une manifestation non déclarée, ce qui est totalement faux. Autre mensonge, celui sur les Brav-M de la 21e CI. Un enregistrement révélé par Loopsider et Le Monde montrait l’envers du décor : menaces, coups et racisme. Le préfet de police de Paris Laurent Nunez et Gérald Darmanin avaient assuré que cette section de la Brav-M ne serait plus sur le terrain. Mais ils sont bien présents lors de la manifestation du 28 mars. StreetPress les a repéré. Heureusement qu’en France, quand ils ne sont pas en garde à vue, il y a encore des journalistes pour mettre les politiques face à leurs responsabilités. En attendant – qui sait ? –, un jour une réaction judiciaire. Car il est un fait : dans d’autres démocraties, toute cette histoire, des actes aux mensonges, provoquerait un énorme scandale et des démissions à la pelle. Mais la France n’est pas une démocratie comme les autres. « Manifester, c’est risquer sa vie : voilà ce que l’on transmet aux jeunes géné- rations. Symptôme terrifiant de l’état d’urgence démocratique », tweetait Clémentine Autain.
La gestion de la crise sociale actuelle n’a rien à envier avec la gestion du risque terroriste : des moyens policiers similaires y sont employés et la rhétorique politique demeure la même. Avec le résultat que l’on connaît : criminalisation de la grogne sociale, répression sans aucune retenue, arrestations et détentions arbitraires, justice expéditive, non-respect des règles déontologiques ou de la loi de la part des forces de l’ordre, mensonges et contre-attaques politiques. Le tout sous le regard approbateur de l’extrême droite, qui regarde sa montre.
Ce sont loin d’être les premiers mensonges du ministre Darmanin. Il y a quelques jours, il avançait sans que personne n’y trouve à redire qu’il était interdit de participer à une manifestation non déclarée, ce qui est totalement faux. Autre mensonge, celui sur les Brav-M de la 21e CI. Un enregistrement révélé par Loopsider et Le Monde montrait l’envers du décor : menaces, coups et racisme. Le préfet de police de Paris Laurent Nunez et Gérald Darmanin avaient assuré que cette section de la Brav-M ne serait plus sur le terrain. Mais ils sont bien présents lors de la manifestation du 28 mars. StreetPress les a repéré. Heureusement qu’en France, quand ils ne sont pas en garde à vue, il y a encore des journalistes pour mettre les politiques face à leurs responsabilités. En attendant – qui sait ? –, un jour une réaction judiciaire. Car il est un fait : dans d’autres démocraties, toute cette histoire, des actes aux mensonges, provoquerait un énorme scandale et des démissions à la pelle. Mais la France n’est pas une démocratie comme les autres. « Manifester, c’est risquer sa vie : voilà ce que l’on transmet aux jeunes générations. Symptôme terrifiant de l’état d’urgence démocratique », tweetait Clémentine Autain.
La gestion de la crise sociale actuelle n’a rien à envier avec la gestion du risque terroriste : des moyens policiers similaires y sont employés et la rhétorique politique demeure la même. Avec le résultat que l’on connaît : criminalisation de la grogne sociale, répression sans aucune retenue, arrestations et détentions arbitraires, justice expéditive, non-respect des règles déontologiques ou de la loi de la part des forces de l’ordre, mensonges et contre-attaques politiques. Le tout sous le regard approbateur de l’extrême droite, qui regarde sa montre.
loïc le clerc