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Bien manger au pays de la pura vida
Par Roderick Eime
La toute petite république du Costa Rica, en Amérique centrale, est un chef de file mondial en tourisme durable.
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Johnny Rodríguez sourit à pleines dents en soulevant l’énorme levier qui sert à écraser une pile de cannes à sucre dans sa presse rudimentaire. Le jus savoureux s’écoule alors dans un sceau et la purée de canne est mise de côté pour être compostée et nourrir les animaux.
C’est ici, à Playa Blanca, sur la péninsule éloignée d’Osa, que la famille Quiroz-Rodríguez cultive ce produit sucré aux allures de bambou depuis 50 ans, au sein de l’entreprise familiale Trapiche Don Carmen. Carmen, le beau-père très alerte de Johnny, donne encore un coup de main devant les yeux impatients des enfants qui espèrent patiemment goûter aux friandises sucrées. Johnny est fier comme un paon de sa trapiche centenaire – le moulin en bois avec lequel il écrase les longues tiges juteuses pendant que son cheval, Ricki, tire la lourde poutre attachée au vieux moulin.
Au creux de cette forêt dense, le produit entièrement biologique est bouilli et purifié pour être transformé en blocs de mélasse appelés tapa de dulce. Ces derniers sont cuits dans le four à bois à l’aide de moules en acajou, fabriqués à la main. Tout le processus se déroule dans la cour de la petite maison en briques familiale pendant que sa femme, Noemí Quiroz, mélange une préparation sucrée à base de mélasse, de noix, de noix de coco et de lait en poudre, qu’elle sert ensuite joyeusement à notre groupe.
Dans les dernières années, le Costa Rica est devenu la tête d’affiche de l’écotourisme. Lorsque les gens parlent de voyage écologique et durable, ils se tournent souvent vers cet exemple réconfortant qui est passé d’un environnement fragilisé à une nation, sans doute, parmi les plus heureuses au monde.
Le Costa Rica a démantelé son armée en 1948 et redirigé les fonds qui lui étaient alloués vers des programmes sociaux et environnementaux. Avec son slogan accrocheur, la pura vida (la vie simple), le pays de près de cinq millions d’habitants (surnommés localement les «Ticos») joue maintenant dans la cour des grands sur le plan des indices socio-économiques, comme le bonheur, l’empreinte carbone et les libertés civiles.
Plus tard durant la journée, nous avons eu la chance d’assister à un spectacle donné par des élèves qui chantaient et dansaient en costumes traditionnels, observés par un trio espiègle d’aras sauvages, perchés au sommet d’un immense figuier. Une fois notre pique-nique terminé, nous nous sommes rendus à la plantation de cacaoyers, Finca Köbö, où nous avons découvert bien plus que du cacao.
Notre guide, Juan-Luis, nous a fait visiter une petite partie de la ferme où l’on retrouve 85 variétés différentes de fruits, d’épices, d’herbes et de légumes qui poussent à merveille dans ce sol fertile. La ferme entièrement biologique produit des cultures exotiques, comme l’anone cœur de bœuf, le nono, la cannelle, le curcuma, le jaquier, le caïnitier, ainsi que plusieurs variétés d’agrumes et de goyaves. « Le nono est riche en antioxydants et en vitamine C », précise-t-il en tranchant le fruit piquant avec son couteau de poche. « Le goût n’est pas aussi mauvais que l’odeur qu’il dégage. »
Après tout, les fameux bienfaits sur la santé de ce fruit piquant sont peut-être un signe de ce que nous devrions endurer pour sauver notre planète malade: un petit inconfort et de la persévérance pour assurer une vie meilleure pour tous. La pura vida, quoi!