L'Humanité 25 juin 2014

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MERCREDI 25 JUIN 2014 | N° 21447 | 1,50 € humanite.fr

Encore un traité négocié en secret ! RÉVÉLATION

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BELGIQUE 1,60 € - LUXEMBOURG 1,60 € - ANTILLES-RÉUNION 2,10 € - ITALIE 2 € - ESPAGNE 2 € - GRÈCE 2 € - MAROC 15 DH

LA BOMBE QUI FAIT EXPLOSER LES SERVICES PUBLICS DANS LE MONDE Les dirigeants de 50 pays, dont les États-Unis et la France, se cachent dans un immeuble australien à Genève pour discuter dans l’opacité la plus totale.

Déclassifier le :

Cinq ans après l’entrée en vigueur du traité Tisa, ou si aucun traité n’entre en vigueur, cinq ans après la fin des négociations.

* Ce document doit être protégé contre toute divulgation non autorisée, mais peut être envoyé ou transmis par e-mail ou fax non classifié, discuté sur des lignes téléphoniques non sécurisées et conservé sur des ordinateurs non classifiés. Il doit être conservé dans un immeuble, une pièce ou un contenant fermé à clé ou sécurisé.

Le traité préparé pour s’appliquer en 2015 graverait dans le marbre la privatisation des biens communs : eau, énergie, transports, santé… Les services publics seraient dynamités par une dérégulation généralisée. Une clause de « statu quo » ôterait à tout gouvernement la possibilité de revenir sur les concessions faites au privé. Une majorité de parlementaires européens ont donné leur blancseing à cette forfaiture. Comme pour le traité transatlantique, le lobby des multinationales est à la manœuvre. Lire notre article page 4

Annonces légales et judiciaires en page 15.


l’Humanité Mercredi 25 juin 2014

« La résistance des égoïsmes, la routine des préjugés s’y opposent encore ; mais dès maintenant les groupements ouvriers, fédérés dans la nation, pourraient prendre en main la grande production. » Jean Jaurès, Justice!, mars 1906.

NOS POINTS CHAUDS POLITIQUE

CULTURE

DROITS DE L’HOMME

SCIENCES

Japon Le musée national des Sciences et de la Technologie de Tokyo a présenté, hier, « Kodomoroid », et « Otonaroid », deux androïdes, capables de lire des infos, maniant le sens de l’humour, ayant l’air d’avoir le trac… Ils vont « travailler » pour recueillir des informations sur les réactions humaines face à la machine.

Allemagne Le pasteur Gregor Hohberg, l’imam Kadir Sanci et le rabbin Tovia Ben-Chorin ont posé à Berlin les premières pierres de la Maison de l’Un, la première église-mosquéesynagogue. Il s’agira, disent-ils, du premier lieu réunissant les fidèles des trois religions monothéistes pour les amener à dialoguer.

GRANDE-BRETAGNE Le royaume en guerre contre le tabac Après les multiples taxations du prix du tabac (plus 200 % entre 1992 et 2011) et l’interdiction de fumer en voiture, votée en janvier, jusqu’où ira la lutte contre le tabagisme du Royaume-Uni ? Selon le Guardian, la British medical association (BMA) examine le voeu de médecins d’interdire la vente de cigarettes aux gens nés après 2000, ce qui reviendrait à créer une génération « 100% tobacco free ». Si elle valide la proposition, la BMA pressera le Parlement de l’appliquer.

MONDE

Daniel Garcia/AFP

Géographie de l’humanité

L’actualité sur humanite.fr

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Juana Pargament aura cent ans dans quelques jours. Vous ne la connaissez certainement pas. Juana est une des « mères de la place de Mai ». Ces femmes qui, au pire moment de la dictature militaire argentine, osaient défier les généraux assassins en défilant tous les jeudis à Buenos Aires, sur la place face à la présidence de la République. Par José Fort.

www.humanite.fr/node/545420

Tasmanie

Syrie L’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques a constaté la fin du processus de désarmement, lundi. Au total, le pays s’est débarrassé de 1 300 tonnes d’armes chimiques.

AFRIQUE DU SUD Les forçats du platine font plier le patronat

Un accord salarial de trois ans a été signé hier par les trois premiers producteurs de platine mondiaux (Anglo American Platinum, Impala Platinum, Lonmin) et le syndicat Amcu, mettant fin à la grève des mineurs sud-africains qui durait depuis cinq mois. L’accord prévoit une revalorisation durant trois années consécutives du salaire mensuel des mineurs les moins qualifiés (950 à 1 000 rands, soit environ 70 euros). Les autres toucheront une première hausse de 8 %, puis 7,5 % les deux années suivantes.

Le Comité du patrimoine mondial de l’Unesco a refusé de déclasser partiellement des forêts de Tasmanie comme le demandait l’Australie. Une décision de bon sens, selon les associations australiennes de protection de la nature.

BÉNIN Un modèle de ferme bio à exporter

Fruits et légumes, riz, élevage de poissons, porcs et volailles, la ferme Songhaï, à Porto-Novo, est un projet pilote de préservation de l’environnement. Fientes de poule transformées en biogaz alimentant les cuisines, pièces détachées réutilisées, eaux usées filtrées grâce à des jacinthes… Désigné « centre d’excellence pour l’agriculture » par les Nations unies, le projet, copié au Nigeria, au Liberia et en Sierra Leone, a pour but de s’implanter dans 16 pays d’Afrique de l’Ouest et centrale.

France-palestine.org@AFPSOfficiel Lettre de @MDemessine à @LaurentFabius : la France doit sortir de son silence sur les prisonniers #palestiniens

BONNE NOUVELLE MAUVAISE NOUVELLE EN IRLANDE, AU DANEMARK ET AUX PAYS-BAS, OÙ DES LOIS DEVRAIENT AUTORISER LE CHANGEMENT DE SEXE SUR LES PAPIERS D’IDENTITÉ, LES DROITS DES TRANSGENRES PROGRESSENT, SE FÉLICITE HUMAN RIGHTS WATCH.

LES ÉTATS-UNIS NE VEULENT TOUJOURS PAS SIGNER LA CONVENTION D’OTTAWA SUR L’INTERDICTION DES MINES ANTIPERSONNEL. DEPUIS SON ENTRÉE EN VIGUEUR EN 1999, LES 161 PAYS SIGNATAIRES ONT DÉTRUIT 70 TONNES DE MINES.

SOCIÉTÉ Plus de 160 associations locales et nationales demandent le retour de la carte de résident, valable dix ans et renouvelable de plein droit. Le manifeste « Rendez-nous la carte de résident ! » est signé notamment par la Cimade, la Ligue des droits de l’homme, Médecins du monde, Emmaüs et le Groupe d’information et de soutien des immigrés.

www.humanite.fr/node/545342

LE FIL ROUGE

filrouge@humanite.fr

Saint-Denis (93). L’association FranceCuba rend hommage à sa secrétaire générale, Dominique Leduc, décédée récemment, ce soir à 18 h 30, au complexe sportif Nelson-Mandela (6, rue François-de-Pressensé, La Plaine). Romorantin (41). Les rencontres du service public « pour un service public ferroviaire de qualité » auront lieu ce soir, à partir de 18 heures, au centre administratif (place de la Paix). À l’invitation de l’ancien conseiller régional (PCF) de la région Centre, Jean-Claude Delanoue. Avec Jean-Michel Bodin, vice-président du conseil régional, et Monique Raynaud, conseillère régionale, et des syndicalistes. Tarbes (65). Vendredi 27 juin à 20 h 30, à la Bourse du travail de Tarbes : débat sur « comment libérer l’information de la pensée unique ? » avec Bruno Vincens, journaliste à l’Humanité. Gragnague (31). Samedi 28 juin, à 10 heures, aura lieu une commémoration au bois de La Reulle, où quinze résistants, il y a soixante ans, ont été fusillés par les nazis. Parmi ces quinze résistants, trois n’ont pu être encore identifiés.


Mercredi 25 juin 2014 l’Humanité

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Temps forts

L

a lumière, au fond du long tunnel de l’affaire Amisol, est réapparue hier pour les anciennes ouvrières de la filature d’amiante de Clermont-Ferrand, le « bagne blanc » où a éclaté pour la première fois le scandale de l’amiante au milieu des années 1970. La Cour de cassation, sur pourvoi des victimes, a annulé le non-lieu prononcé en février 2013 par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, et renvoyé l’affaire devant la même chambre, autrement composée. La mise en examen du dernier PDG de la société Amisol, Claude Chopin, est donc confirmée, ce qui pourrait aboutir « assez rapidement » à son renvoi devant le tribunal correctionnel, selon l’avocat des victimes, François Lafforgue. Dix-sept ans après les premières plaintes d’ouvriers et ouvrières de la filature en 1997, la voie vers un procès Amisol est de nouveau ouverte.

ÉDITORIAL

Bruno Arbesu

La Suisse a l’art de protéger les fortunes douteuses et de cacher les affaires louches. Mais là, il s’agit d’un sujet majuscule, d’un véritable coup d’État à l’échelle mondiale contre la politique, négocié dans le secret le plus absolu. Cet accord sur le commerce des services (Tisa), caché dans le secret de coffres-forts numériques que seul WikiLeaks a pu percer, contourne les négociations de l’OMC dans l’impasse et réduit les pays en voie de développement au silence, pour atomiser les services publics sur toute la planète. Les dirigeants des principaux pays capitalistes tentent ainsi d’éviter toute mise en cause future des multinationales qui leur tiennent la main. Les gouvernants français cautionnent cette conspiration du silence, qui nie toute souveraineté populaire et détruit la possibilité de choix démocratiques. Ils doivent en répondre et s’expliquer, tout comme la ma-

Par Patrick Apel-Muller

La souveraineté étouffée jorité des députés européens – tous les socialistes, conservateurs et centristes – ont voté le lancement de ces négociations ; mais pas ceux du Front de gauche ni d’EELV. Le projet Tisa complète le sinistre traité transatlantique. Il instille la concurrence au cœur des biens communs de l’humanité, interdit la mise en cause de privatisations,

interdit les décisions qui font primer l’intérêt général sur la concurrence, verrouille l’avenir de la civilisation. L’eau, l’énergie, la santé, les transports… sont particulièrement convoités, traités comme de nouveaux eldorados pour les profits capitalistes. Le « sens de l’avoir » que dénonçait Marx conduit à l’aliénation de ce qui fait la liberté des hommes, à la paralysie de l’avenir, à hypothéquer notre sauvegarde livrée au court-termisme du profit. Dans la discrétion de l’ambassade australienne en Suisse, des hommes en gris dessinent en noir un futur tyrannique. Désormais, il ne s’agit plus seulement de lancer des alertes ; il est urgent de suivre l’invitation de Robespierre et de mettre à bas « les privilèges que se sont arrogés les mandataires du peuple de se jouer impunément des droits de ceux qu’ils ont caressés bassement pendant les élections ».

AMIANTE

Un rayon de justice éclaire Amisol

La Cour de cassation a annulé hier le non-lieu prononcé en février 2013 sur Amisol, le bagne blanc de l’amiante à Clermont-Ferrand.

C’est bel et bien une « victoire »

La satisfaction des anciennes d’Amisol, hier à Clermont-Ferrand, était à la mesure de l’immense colère provoquée par le non-lieu le 8 février 2013. « On ne peut pas dire “victoire ” quand il y a tellement de victimes, mais c’est un soulagement, a réagi Josette Roudaire, figure de la lutte des Amisol depuis quarante ans. On espérait cette décision parce que, moralement, on estime que ce patron ne peut pas être blanchi. La société, l’histoire l’ont condamné, comme elles ont condamné les autres patrons de l’amiante. Maintenant il faut que la justice se mette au niveau de la condamnation de l’opinion. On attend le procès, notre combativité est intacte. Quarante ans après, nous étions encore trente anciennes de l’usine réunies aujourd’hui, c’est magnifique. » Et de conclure que c’est bel et bien une « victoire ». Sur place également, la sociologue Annie Thébaud-Mony, engagée depuis le début aux côtés des victimes, s’est félicitée de cet arrêt de la Cour de cassation et souhaite maintenant que « la justice accélère le pas ». « Enfer blanc », « bagne blanc », « usine cercueil », les mots et qualificatifs manquent aux personnes et à l’opinion publique qui découvrent, au milieu des années 1970, les conditions dans lesquelles ont travaillé pendant des décennies les ouvrières de la filature d’amiante Amisol, fondée en 1909. Dans l’ignorance totale du danger que fait peser l’amiante sur leur santé, les salariées brassent et manipulent les fibres à mains nues, sans aucune protection individuelle ni collective, dans des locaux tellement empoussiérés qu’« on n’y voit pas à trois mètres », comme le racontera Josette Roudaire, à l’époque déléguée CGT. Au début des années 1970,

le cadre de l’instruction sur Amisol pour « empoisonnement, voies de faits ayant entraîné la mort, homicides involontaires et coups et blessures involontaires ». Après plusieurs tentatives, il demande en mars 2012 l’annulation de la procédure, au motif que le délai écoulé depuis les faits ne garantit plus un procès équitable, et qu’il n’est resté que cinq mois à la tête de l’entreprise, responsabilité que lui aurait imposée son père… La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, qui a déjà annulé les mises en examen dans les affaires d’amiante Eternit et Condé-surNoireau (arrêts cassés par la suite), lui donne raison, avec des arguments qui stupéfient les victimes. La chambre estime ainsi que « la mémoire des faits s’efface ». Que rien en permet d’affirmer que Claude Chopin était mieux informé que ses salariés sur le risque amiante. Que le maintien de l’activité pendant cinq mois n’est pas une faute caractérisée. Enfin, qu’au début des années 1970, avant le premier décret amiante de 1977, aucune obligation particulière de prudence ou de sécurité ne reposait sur le patron, permettant sa mise en cause pénale. C’est sur ce dernier point que la Cour de cassation a cassé l’arrêt, en estimant au contraire que la réglementation alors en vigueur sur l’empoussièrement des locaux de travail, découlant d’un décret de

« Ce PDG doit être poursuivi, car il aurait dû mettre un terme immédiatement à l’activité de l’entreprise. » FRANÇOIS LAFFORGUE AVOCAT DES VICTIMES

DANS L’IGNORANCE DU DANGER QUE FAIT PESER L’AMIANTE SUR LEUR SANTÉ, LES SALARIÉES MANIPULAIENT LES FIBRES À MAINS NUES, SANS PROTECTION. PHOTO G. BLONCOURT/RUE DES ARCHIVES

les conditions de travail provoquent de nombreux conflits, tandis que l’inspection du travail puis la caisse régionale d’assurance maladie somment Amisol de mettre en place un système d’aspiration des poussières et d’aération des locaux. Le patron fait faire des devis mais, devant le coût des travaux annoncés, il confie l’entreprise à son fils Claude Chopin en juin 1974, en vue d’une fermeture définitive. En décembre 1974, l’entreprise est placée en redressement judiciaire et ferme ses portes, jetant 270 familles sur le carreau. Les ouvrières entament

alors une occupation qui durera dix ans. Au départ elles se battent pour l’emploi et la réouverture du site, mais la rencontre avec le toxicologue de Jussieu Henri Pézerat en 1976 leur fait découvrir brutalement le caractère cancérogène des poussières avalées pendant des années. Leur combat change alors d’orientation. Il n’est plus question de rouvrir l’usine, mais d’obtenir la reconnaissance des maladies professionnelles et surtout la condamnation de leur employeur. Le père Chopin étant décédé, c’est Claude le fils qui, en 1999, est mis en examen dans

1913 et imposant la mise en place de systèmes de ventilation ou, à défaut, d’appareils de protection individuelle, caractérise une obligation particulière de sécurité, permettant les poursuites. « Cette décision nous paraît juste et très symbolique car c’est dans cette société et dans cette région qu’est apparu au grand jour le drame de l’amiante, commente François Lafforgue, avocat des victimes. Ce PDG doit être poursuivi, car il aurait dû mettre un terme immédiatement à l’activité de l’entreprise. Il est très important que les victimes d’Amisol puissent assister à une audience où le responsable sera présent pour s’expliquer sur ces années. La quasi-totalité des anciennes ouvrières sont aujourd’hui malades. » FANNY DOUMAYROU


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l’Humanité Mercredi 25 juin 2014 Une hégémonie mondiale

Les 49 États qui négocient l’ACS représentent 70 % des échanges de services dans le monde, indique une résolution du Parlement européen. Ils auront une force de frappe énorme pour imposer leurs règles au reste du monde.

L’événement

58 %

C’est la part des exportations de l’Union européenne qui relève du secteur des services.

Globalisation capitaliste

L’accord top secret qui doit dépecer les services publics

T

out devait rester entièrement secret. Rien ne devait filtrer des négociations sur l’accord sur le commerce des services (ACS) entamées depuis deux ans à l’ambassade d’Australie à Genève entre les États-Unis, l’Union européenne et une vingtaine de pays. Une vaste entreprise de libéralisation qui touche jusqu’aux services publics fondamentaux. Des mesures assurant une confidentialité totale des discussions ont été prises, dans un langage digne d’un scénario à la James Bond. Les textes établissant l’avancée des pourparlers ont été « classifiés », selon un jargon utilisé généralement pour les dossiers secret-défense. Ils doivent être « protégés de toute diffusion non autorisée » et stockés dans un système d’ordinateurs lui-même classifié et maintenu « dans un building ou un container clos » sous haute surveillance. L’objectif déclaré est que rien ne puisse transpirer du contenu de ces tractations « jusqu’à cinq ans après la conclusion d’un accord » ou la fin des négociations si celles-ci devaient finalement ne pas aboutir. C’était sans compter sur la dextérité des lanceurs d’alerte de WikiLeaks qui sont parvenus à récupérer une partie des textes surprotégés. Ils ont publié ainsi le 19 juin sur leur site l’annexe du traité en préparation consacré aux services financiers. Ces révélations soulignent, en fait, l’ampleur de l’offensive engagée par Washington, suivi par les États membres de l’Union européenne, pour permettre aux multinationales de truster, le moment venu, le commerce des produits financiers mais aussi celui de tous les services sur les grands marchés transatlantique et transpacifique, dont les négociations, on le sait, avancent au même moment, dans la plus grande discrétion.

Contourner les résistances populaires et réfractaires de l’OMC

Les pourparlers secrets pour parvenir à un accord sur le commerce des services (ACS) ont démarré en 2012 et leurs initiateurs entendent tout faire pour les conclure avant la fin 2015. Ils sont en fait destinés à contourner l’obstacle que constituaient les résistances de forces progressistes, de mouvements sociaux, de syndicats et de plusieurs pays en développement pour la conclusion d’un accord global sur le commerce des services (AGCS) au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Devant la paralysie du processus multilatéral lancé en 2001 dans le cadre du cycle dit de Doha de l’OMC, un groupe de pays a décidé, sous l’impulsion des États-Unis et des États membres de l’UE, d’entamer, il y a deux ans, une négociation parallèle. Autrement dit : désavoué démocratiquement et donc sorti par la porte, l’AGCS pouvait ainsi rentrer par la fenêtre sous l’impulsion d’une cinquantaine de gouvernements. Les négociateurs autoproclamés ont l’espoir de définir dans un cadre plurilatéral des normes pour qu’elles s’imposent, à terme, comme unique référence internationale. Ils misent d’évidence sur leur poids économique – ils représentent ensemble près de 70 % du commerce mondial – pour rallier en fin de compte les pays récalcitrants de l’OMC court-circuités. Le lieu géographique des tractations a simplement été transféré de quelques rues à Genève, passant du siège de l’OMC aux locaux de l’ambassade d’Australie, pays o p p o r t u n é m e n t to u t a c q u i s à l a libéralisation. Principale source d’inspiration du groupe : les « experts » de la « coalition globale des services » (GSC) au sein de laquelle on retrouve, côté états-unien, les géants du

Infographie/Idé

Les États-Unis, les pays de l’UE et une vingtaine d’autres États ont entamé à Genève des négociations sur le commerce des services. Signe particulier : ces tractations devaient restées secrètes pendant cinq ans. WikiLeaks a réussi à lever en partie le voile sur leur contenu.

secteur (banque, Internet, énergie) mais aussi, côté européen, le Medef ou le poids lourd français, Veolia (voir ci contre). Le document diffusé par WikiLeaks, qui correspond au relevé de la négociation au 14 avril dernier, révèle le forcing déployé pour banaliser le commerce des produits financiers, comme si rien n’avait été retenu des causes du krach ravageur qui s’est produit seulement sept ans en arrière.

Échanges financiers, le retour du délire

Les normes proposées dans l’annexe du texte secret consacré au commerce des produits financiers visent d’abord à restreindre la capacité d’intervention de la puissance publique et se fixent ouvertement comme objectif un modèle « autorégulateur » de la finance. Les États signataires du futur ACS ne seraient quasiment plus autorisés à légiférer pour limiter les transactions financières transfrontalières (article X 3.2.). Au nom de la libre concurrence les « monopoles d’État en matière de fonds de pension » – traduisez : les systèmes publics de Sécurité sociale – seraient, à terme, démantelés. Même « les assurances pour calamité naturelle » se devraient de ne plus fonctionner sous contrôle public. L’approbation de l’autorisation de produits financiers innovants est recherchée (article X 2.1.). On sait combien le laxisme organisé à cet égard a nourri la boursouflure financière qui a éclaté, il y a sept ans. « Les CDS (credit defaut swaps), qui furent considérés

comme des produits innovants, ont été au cœur de la crise », fait remarquer à juste titre Jane Kelsey, professeure à la faculté d’Auckland, en Nouvelle-Zélande, sur le site de WikiLeaks. Les firmes Internet états-uniennes font pression pour transmettre sans véritable garde-fou les données de leurs clients. En particulier celles qui sont présentes dans les systèmes dits « clouds » (nuages) qui permettent de stocker des documents hors du disque dur de l’ordinateur. Cette information-là suscite depuis le jour de sa divulgation par WikiLeaks, le 19 juin, une vive réaction dans la presse allemande où les révélations d’un autre lanceur d’alerte, Edward Snowden, sur l’espionnage de masse pratiqué par la NSA (National Security Agency), avec la complicité des géants états-uniens de l’Internet, avaient déjà suscité beaucoup d’inquiétudes dans l’opinion.

Privatisations interdites

Les orientations du texte secret stipulent que les sociétés étrangères ne sauraient être victimes d’un traitement dit « discriminatoire ». Autrement dit : elles doivent avoir accès au marché des pays signataires exactement dans les mêmes conditions que les prestataires locaux, qu’ils fournissent ou non un service public à la population. Un géant de la fourniture d’eau ou de gaz, comme les français Veolia ou GDF Suez, aurait ainsi non seulement le droit de s’installer sur un marché tiers. Mais il pourrait


Mercredi 25 juin 2014 l’Humanité Les syndicats remontés « Assurer la pérennité des privatisations, même manquées, illustre la folie pure vers laquelle tend l’idéologie de libre marché. » Rosa Pavanelli, secrétaire générale de l’Internationale des services publics.

L’événement julian assange que devient-il ?

aussi faire jouer une clause d’engagement au respect de la concurrence pour exiger de bénéficier de subventions d’un montant égal à celui versé par l’État en question au service public de l’eau ou de l’énergie. Par ailleurs le retour à une nationalisation d’un service public privatisé, fût-il partiel, serait strictement interdit aux États signataires au nom des garanties accordées aux investisseurs afin de favoriser, expliquet-on, la fluidité des échanges. Ainsi deviendrait impossible une remunicipalisation de l’eau décidée en maints endroits en France comme à Paris, après la gabegie et l’explosion des factures des particuliers provoquées par les requins de la Générale et de la Lyonnaise des eaux, qui se sont longtemps partagé le marché de la capitale française.

Éducation, santé, transports, rien n’échapperait à l’appétit du privé

L’ACS doit s’appliquer à tous les domaines capables de fournir un service à l’échelle internationale. Selon l’Internationale des services publics (PSI), qui regroupe quelque 669 syndicats dans le monde entier, il englobe ainsi un champ immense : la fourniture transfrontière (le mode 1 de l’ex-AGCS) – telle que la télé-médecine, la formation à distance ou les paris sur Internet –, le tourisme (mode 2 de l’ex-AGCS), l’investissement étranger direct avec les principes et les conséquences que l’on vient d’exposer (mode 3 de l’ex-AGCS) et le mouvement temporaire des personnes physiques (mode

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4 de l’ex-AGCS). L’objectif d’accords comme celui dont la négociation est secrètement engagée, dénonce Rosa Pavanelli, la secrétaire générale de la PSI, est « d’institutionnaliser les droits des investisseurs et d’interdire toute intervention des États dans un large éventail de secteurs ». Santé, éducation, transports, rien n’échapperait à cette logique qui accélérerait, dans des dimensions inédites, la libéralisation des services publics. Selon une logique d’écrémage par le capital privé en mal d’acquérir de nouvelles ressources dans la phase actuelle de la crise où les débouchés se rabougrissent. Il cherche à s’accaparer les secteurs financièrement les plus prometteurs. Les cheminots français en lutte ont ainsi parfaitement discerné la menace qui pourrait conduire à une polarisation des investissements privés sur les tronçons voyageurs les plus rentables quand des dizaines de voies dites secondaires et donc de gares seraient condamnées à disparaître. Le 4e paquet ferroviaire de la Commission européenne n’est certes pas dans le traité secret en cours de négociation. Il n’en épouse pas moins la ligne dévastatrice pour l’avenir des services publics et, au passage, pour… un certain mode de construction européenne. Comme on devrait le savoir au moins depuis l’élection du 25 mai l’acharnement libéral, prêt à nier la démocratie au point d’agir caché contre les intérêts des citoyens, met pourtant l’Europe en danger. Bruno Odent

Avec les révélations sur l’accord de commerce des services, le site WikiLeaks revient dans l’actualité. Fondé en 2006, WikiLeaks a pour but de faire « fuiter » des informations confidentielles afin de les mettre à la disposition des citoyens. Le site doit notamment sa notoriété aux révélations sur des pratiques et bavures militaires américaines en Irak et en Afghanistan, et à la publication de plusieurs centaines de milliers de documents confidentiels, en particulier américains. Ces révélations ont valu au créateur de WikiLeaks, Julian Assange, d’être considéré comme un « espion » par les ÉtatsUnis. En août 2010, juste après la publication de plus de 77 000 documents états-uniens classés secrets, Assange est accusé d’agression sexuelle par la justice suédoise, fait qu’il a toujours nié. En juin 2012, afin d’échapper à l’extradition vers la Suède, il effectue une demande d’asile à l’ambassade d’Équateur à Londres. Malgré les pressions, le gouvernement équatorien le lui accorde. Néanmoins, Julian Assange ne peut sortir de l’ambassade, sous peine d’être immédiatement arrêté par la police londonienne et extradé vers la Suède, puis, sûrement, vers les États-Unis qui le jugeraient alors pour ses activités avec WikiLeaks. Actuellement, Julian Assange est toujours cloîtré à l’ambassade, et n’a pu voir la lumière du jour que 20 minutes en deux ans.

retrouvez sur humanite.fr l’intégralité du document secret

Seuls les lobbies ont voix au chapitre négociations Derrière les tractations secrètes, des

organisations sont à l’origine de la création de l’accord sur le commerce des services (ACS). Parmi elles, le Medef, Veolia Environnement ou encore Orange.

L

’accord sur le commerce des services (ACS) (en anglais Tisa) serait né aux États-Unis. Plus précisément en 2011, dans les bureaux et la tête de Robert Vastine, président de la CSI (Coalition of Services Industries). Les échecs des discussions du second cycle de Doha, dans le cadre de l’OMC, avaient alors achoppé du fait des revendications des pays émergents concernant l’agriculture et le développement. Ce retard à l’allumage aurait poussé un petit club de pays industrialisés à créer cette nouvelle entité afin d’accélérer le processus. Ce qu’a ouvertement affirmé GSC (Global Services Coalition), un groupe de pression représentant les multinationales de services américaines pour qui ce nouvel accord a été créé « afin d’apaiser la frustration des entreprises en raison de l’impasse du cycle de Chez les Doha sur les services ». Parmi ces Français, multinationales, de gros groupes eurole PS, le centre péens réunis sous la et l’UMP ont bannière ESF (European Services Fovoté comme rum), rameau de la un seul homme. GSC, sont aux avantpostes. Y figurent des géants français comme Orange, Veolia Environnement, et pour chapeauter le tout, le Medef. Deutsche Telekom et Siemens représentent entre autres l’Allemagne, Vodafone, ThomsonReuters et TheCityUK, le Royaume-Uni. L’Union européenne (UE) n’a pas tardé à accompagner politiquement le désir de ces multinationales à faire main basse sur les services. Le 18 mars 2013, le Conseil de l’UE pourtant réuni en session « agriculture et pêche » a donné mandat à la Commission pour négocier un accord plurilatéral sur les commerces des services. Mais c’est le 4 juillet 2013 que le projet est officiellement avalisé par Bruxelles. Sur 765 eurodéputés, 111 votent contre, notamment les Verts et la Gauche unie européenne (GUE-NGL), parmi lesquels siègent les députés Front de gauche. 526 parlementaires ont voté pour. Chez les Français, le PS, le centre et l’UMP ont voté comme un seul homme. Parmi eux, les anciens ministres Brice Hortefeux (UMP), et Corine Lepage (Alde) et l’actuel secrétaire d’État aux Affaires européennes de Manuel Valls, Harlem Désir. Des hommes et des femmes qui ont consciemment voté pour un projet des plus dangereux pour la démocratie et les services publics français et européens. Un document officiel de la Commission européenne précise en effet que ces parties – sans même que les multinationales aient eu besoin de leur dire – se sont mises d’accord pour qu’une clause de « statu quo » soit intégrée à cet accord. Afin de verrouiller automatiquement toutes possibilités de retour en arrière sur les privatisations des services. Stéphane Aubouard


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l’Humanité Mercredi 25 juin 2014 Silence à l’UMP « Le triumvirat ?   ils ne se parlent pas entre eux, ni aux militants,   ni aux sympathisants, ni aux électeurs. » Rachida Dati (UMP)

Politique&Citoyenneté

Le Front de gauche prépare sa rentrée C’est le 6 septembre que se tiendra « une grande rencontre réunissant les membres du conseil national   du Front de gauche, des animateurs des fronts thématiques   et des militants », a annoncé le mouvement, qui souhaite se relancer.

assemblée nationale

Budget rectificatif : vers un débat gauche contre gauche Alors que de nombreux députés de tous les groupes de gauche critiquent et souhaitent amender le projet gouvernemental, de collectif budgétaire, le gouvernement et le groupe socialiste font monter la tension.

L

a bataille des amendements sur le projet de loi de finances rectificative est partie. Le texte lançant la mise en application du pacte de compétitivité de 50 milliards d’euros en faveur des entreprises est un test politique pour le premier ministre, Manuel Valls, dont la majorité parlementaire ne cache plus ses fissures. Un premier psychodrame, dès l’ouverture des débats lundi, pose l’ambiance. Un amendement plus symbolique que révolutionnaire, d’une députée socialiste pas connue – loin de là – pour être « frondeuse », Karine Berger, a été adopté contre l’avis du gouvernement. Cet amendement, en baissant la part de structurel dans le

déficit, rendait moins urgentes les mesures d’austérité prônées par le gouvernement. « Ça a foutu un bordel, rapporte un député. Ils ont fait revenir en urgence le ministre “des tensions avec le Parlement” (Jean-Marie Le Guen, ministre réputé virulent, des Relations avec le Parlement – NDLR). On sent bien que l’équilibre est très précaire. »

Les communistes défendront des « amendements de principe »

Autant dire que toute velléité d’amendement est très mal vue par le gouvernement, comme par le président du groupe socialiste, Bruno Le Roux, qui n’hésite pas à se faire de plus en plus menaçant vis-à-vis de ceux qu’il est désormais convenu d’appeler « les frondeurs », en insistant sur le rappel du

fait que « l’appartenance à une majorité est fondée sur le vote des lois de finances ». Dans son entourage, on s’inquiète : « Si on commence à leur permettre de s’asseoir sur des règles du groupe, ils s’assiéront sur la dernière : le vote du budget. » Côté écologistes, qui recevaient hier la visite de Manuel Valls, on s’inquiète aussi de la méthode : « On ne peut pas dire aujourd’hui qu’il nous a rassurés. Pour l’instant on a l’impression que dans ce PLFR il n’y aura pas vraiment d’espace pour le travail parlementaire », estime Eva Sas. Pourtant, des amendements, il y en aura bien. Et pas tant venant de la droite. À gauche, ils viennent de partout. De groupes constitués, pour ceux du groupe de la gauche démocratique et républicaine (GDR, com-

munistes) ou Europe Écologie-les Verts, ou de sensibilités au sein d’un groupe, comme ceux des « frondeurs » socialistes. Les communistes défendront d’abord des « amendements de principe », comprendre des amendements qui ont peu de chances d’être adoptés mais marquent le coup : pour renforcer la progressivité de l’impôt sur le revenu, pour un retour aux seuils de l’ISF d’avant 2010 ou encore pour la suppression du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (Cice), un cadeau fiscal sans contrepartie offert depuis 2013 aux entreprises. Mais ils ont des solutions de repli s’ils ne devaient logiquement pas être adoptés : d’autres amendements communistes, mais aussi des amendements venus d’autres groupes. « Un amendement des frondeurs sur le remboursement du Cice s’il n’a pas servi à ce pour quoi il est prévu (emploi, Menu dégustation investissement… – NDLR) ; un autre sur la modulation de l’impôt sur les sociétés en pour le patronat fonction de l’utilisation des bénéfices… » C’est un bel aveu lâché par cite en exemples le député communiste le secrétaire d’État au Budget Nicolas Sansu. Ces amendements devraient fédérer les et repéré par le député (PCF) votes communistes, écologistes et une Nicolas Sansu. À Valérie partie des votes socialistes. L’esquisse Pécresse qui souhaitait que d’une majorité alternative ? Ce serait aller le Cice soit remplacé par un abaissement des charges, vite en besogne. « Il y a bien eu des contacts entre le président du groupe et lesdits “fronChristian Eckert a répondu : deurs”, avec EELV aussi, relate Nicolas « Vous aurez à la fois le Sansu, mais ce n’est pas un travail très fromage et le dessert !   commun. » Le Cice sera conservé   Au sein du groupe Europe Écologie, tout et il y aura un allégement   le monde n’est pas sur la même longueur de charges d’environ d’onde. Si Eva Sas cherche à constituer 4,5 milliards pour les entreprises et de 2,5 milliards « un front de propositions », estimant qu’avec le Front de gauche ou les « fronpour les salariés. » deurs » « nous avons des convergences sur certains points : la conditionnalité des aides aux entreprises, sur les emplois d’avenir, sur les contrats d’apprentissage », François de Rugy, coprésident du groupe, tempère immédiatement en assurant qu’un « renversement d’alliance » n’est pas à l’ordre millions du jour. d’euros  Alors, certes, une majorité de gauche alc’est le montant de ternative n’est pas encore pour aujourd’hui. la baisse des crédits Les débats vont se poursuivre. Mais les de l’écologie dans votes communs d’amendements montrent le projet du gouvernement. les convergences qui pourraient bien l’annoncer plus tard.

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le premier ministre Manuel valls peine à convaincre... Dominique Faget/AFP

Adrien Rouchaleou


25 juin2000 2014 L’Humanité l’Humanité xxxxxxxxMercredi 00 xxxxxxxxx

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Politique&Citoyenneté Xxxxxx RÉforme ferroviaire

Le Parlement valide l’éclatement de la SNCF

Europe Marine Le Pen échoue à constituer un groupe

à Paris, un millier de cheminots se sont rassemblés hier. La quasi-totalité des assemblées générales de cheminots ont voté la reprise du travail, au terme de quatorze jours d’une grève reconductible de grande ampleur. « Nous reprenons le travail à contrecœur, mais pas résignés, nous nous battrons lors des négociations sur la convention collective et le décret socle », explique Nicolas Scherrer, agent d’équipement, drapeau CGT sur l’épaule. Mais pour Matthieu Bolle-Reddat, de la CGT cheminots de Versailles, c’est l’amertume qui prime. Car si « la bataille sur le cadre social n’est pas terminée, la plus symbolique, celle de la structure de notre entreprise historique, est perdue ».

La présidente du Front national aura du mal à « détruire (l’Europe) de l’intérieur », comme elle en avait pris l’engagement lors de la campagne électorale. Marine Le Pen n’est pas parvenue à constituer un groupe au Parlement européen. Elle a eu beau multiplier les rencontres ces dernières semaines, elle a échoué à réunir assez de parlementaires de nationalité différente (25 de sept pays). À l’instar de la polémique suscitée par la « fournée » de Le Pen père, début juin, c’est l’appréciation de ce qui est acceptable ou pas chez de potentiels partenaires par chacun des partis sollicités qui est en cause. Les uns et les autres étant en quête de respectabilité, d’une image plus lisse que celle qui transpire dans leurs prises de position. Si le Jobbik hongrois ou Aube dorée (Grèce) ont d’emblée été exclus du champ des alliances potentielles, les partis à qui Marine Le Pen a tendu la main, loin d’être recommandables, se renvoient la balle. Son principal allié, l’Autrichien Geert Wilders, connu pour ses positions antiislam, a ainsi déclaré qu’« un pont trop important » le séparait du Congrès de la nouvelle droite polonaise, homophobe entre autres tares.

Marion d’Allard

Julia Hamlaoui

Les députés ont adopté hier le projet de réforme ferroviaire sans le vote des parlementaires Front de gauche, qui se sont prononcés contre. Un millier de cheminots se sont rassemblés à Paris.

H

ier, les députés ont adopté le projet de loi de réforme ferroviaire par 355 voix pour, 168 contre et 27 abstentions. Les députés PS, UDI et Verts ont voté pour. Le Front de gauche s’est prononcé contre, la majorité des députés UMP aussi. Lors de l’examen du texte, les parlementaires ont adopté plusieurs amendements dont un du groupe Front de gauche visant à faire de la SNCF « l’employeur unique » dans le futur système qui, loin de réunifier la SNCF et RFF, crée trois établissements publics à caractère industriel et commercial (Epic). Les députés ont également adopté un amendement du groupe écologiste entérinant « le caractère indissociable et solidaire » des trois entités. Pour

autant, la question de la dette du système ferroviaire, qui pèse plus de 40 milliards d’euros, reste entière. Ni le projet initial ni le texte amendé n’évoquent le désendettement du rail, affichant tout juste la volonté de « stabiliser le montant de la dette ». « La question de la dette n’a pas été réglée », a réagi André Chassaigne, le chef de file des députés Front de gauche. « Les gains de production pour que la dette n’augmente pas auront des conséquences sur les salariés, les usagers et les investissements », a-t-il ajouté. En conséquence, son groupe a voté contre le texte qui poursuivra son parcours au Sénat pour une lecture unique les 9, 10 et 11 juillet prochains. À quelques pas de l’Assemblée nationale, sur l’esplanade des Invalides

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8

l’Humanité Mercredi 25 juin 2014 le travail au noir en Europe

Le Cese présentait hier un rapport sur le travail au noir en France. Le pourcentage de l’économie non déclarée dans le PIB est de 10,8 %. En Union européenne, l’économie souterraine représente 18,9 % de l’activité, soit 2 100 milliards d’euros.

Capital/travail

200 000

C’est, en euros, le montant de l’amende requise par la cour d’appel d’Aix-en-Provence contre Ryanair, poursuivie pour travail dissimulé.

Santé

Quand la Sécu finance les cliniques privées Les salariés des maisons de retraite et des cliniques privées se mobilisent, aujourd’hui, contre la casse de leurs acquis. Leur cible : les marchands de santé qui s’engraissent sur le dos de la Sécurité sociale.

D

es salaires en berne, des des employés de ces établissements », dénonce conditions de travail de la CGT. Une dérive dont avaient déjà bien plus en plus pénibles, un conscience les pouvoirs publics, en témoigne sous-effectif chronique… une note de la Fédération hospitalière de France Les salariés de la santé de 2008 : « Les pouvoirs publics devraient (…) privée (des cliniques et des veiller à ne pas constituer des rentes de situation maisons de retraite com- pour les investisseurs dans ce secteur, la situation merciales) sont à bout. Et le font savoir au- de la Sécurité sociale n’autorise pas de telles jourd’hui, la CGT appelant à une mobilisation générosités. » Sauf que, depuis, ces marchands sur tout le territoire alors que se déroulent de santé ont continué d’appliquer les règles des négociations entre les employeurs élémentaires pour retirer le maximum de – Fédération hospitalière du privé et Synerpa profits : centralisation des achats, mutualisation (1) – et les syndicats du secteur. « En dix ans, des investissements, optimisation des « coûts nous avons enregistré une chute de 15 % de de production » au niveau des actes, dotation notre pouvoir d’achat. Pour certains, leur grille en personnel calculée au plus juste… La Sécurité de salaires ne les rémunère même pas à la sociale finance donc toujours les cliniques hauteur du Smic. Et aujourd’hui, nos employeurs privées, mais celles-ci, plus pressurisées par veulent supprimer la convention collective et leurs actionnaires, ont entamé une vaste rela valeur du point, instaurer un salaire annuel composition et mettent aujourd’hui le cap à de référence, diminuer la prévoyance. Ce n’est l’international pour conquérir des parts de pas acceptable d’autant que l’envers du décor, marché en Europe et en Chine. Après le rapc’est la hausse des dividendes versés aux ac- prochement, fin avril, de Médipôle Sud Santé tionnaires », s’insurge Anne Taquet, secrétaire et Médi-Partenaires, qui a donné naissance générale de la CGT santé privée. au numéro deux de l’hospitalisation privée Si un quart des cliniques sont en déen France, le groupe australien Ramficit, la majorité des établissesay vient de mettre la main sur ments privés français de santé la Générale de santé, leader – qui appartiennent pour la des cliniques commerciales C’est le nombre plupart à des fonds de pendans l’Hexagone, devenant de personnels sions étrangers – affichent un poids lourd à l’échelle paramédicaux et une solide santé financière et européenne. administratifs dans un taux de rentabilité de 10 à Ces grandes manœuvres les cliniques et 15 %. Et alors que les hôpitaux touchent aussi les maisons maisons de retraite publics et la Sécurité sociale de retraite. Ainsi, en sepprivées. sont sommés de faire des miltembre, la fusion des français lions d’économies, leurs actionnaires Korian et Medica a permis au groupe réalisent de mirifiques profits payés par… de se hisser à la première place sur le l’argent public. marché européen de l’or gris, avec un objectif de 3 milliards de chiffre d’affaires en 2017. Une dérive dont avaient déjà bien Autre exemple, celui de DomusVi (troisième opérateur privé de maisons de retraite en conscience les pouvoirs publics Car, en France, le marché est solvabilisé par France) qui s’est associé au fonds d’invesl’assurance maladie, qui assure 90 % des re- tissement chinois Hanfor pour créer Duomei, cettes des établissements privés, les 10 % une société destinée à développer 100 mairestant étant assurés par les complémentaires sons de retraite en Chine. « Ce groupe français ou les patients. « Chaque dividende reversé va s’implanter en Chine grâce aux bénéfices aux actionnaires est financé par notre Sécurité réalisés en France, sur le dos des résidents sociale (12,5 milliards de déficit en 2013 – NDLR) qui paient en moyenne 2 200 euros par mois. et par la dégradation des conditions de travail C’est un scandale », tonne Christophe Prud-

220 000

LE PERSONNEL de la santé privée EST à BOUT : « En dix ans, nous avons enregistré une chute de 15 % de notre pouvoir d’achat. » AFP PHOTO PHILIPPE HUGUEN

homme, du collectif des médecins de la CGT, qui dénonce au passage les carences de ces établissements en matière de prise en charge : « On vient de dénoncer à l’agence régionale de santé (ARS), une maison de retraite Medica, où les résidents paient 3 000 euros par mois car, le week-end, il n’y a parfois pas de médecin qui assure les soins, c’est le Samu qui s’en charge. Donc la Sécu. Donc le public. » Comme le résume Anne Taquet : « Les patients et les salariés, le privé s’en moque. » Sentiment partagé par cette aide-soignante d’une maison de retraite : « J’arrête de chercher du sens à mon travail dès que je passe la porte, sinon je serais incapable de tenir la journée. » Alexandra Chaignon

(1) Syndicat national des établissements et résidences privées pour personnes âgées.

Korian-Medica numéro un des maisons de retraite privées en France Avec la fusion en mars dernier des sociétés Korian et Medica, le groupe est devenu le numéro un du « bien vieillir ». Comme s’en targue son directeur général, il dispose « désormais d’une base solide dans quatre marchés européens importants » (France, Allemagne, Belgique et Italie). La situation financière du groupe s’est encore renforcée en 2013, avec des résultats en forte hausse, qui dépassent les objectifs annoncés. Son chiffre d’affaires est en hausse de 23,7 % à 1,371 milliard d’euros. Un chiffre d’affaires de 3 milliards est prévu à l’horizon 2017.


Mercredi 25 juin 2014 l’HumanitÊ

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Capital/travail COMMERCE

ASSURANCES

 Laissez-nous notre dimanche ! 

PrĂŠcarisation des jeunes

Près de 600 salariĂŠs ont manifestĂŠ, hier, contre l’ouverture dominicale des grands magasins parisiens proposĂŠe par le ministre des Affaires ĂŠtrangères, Laurent Fabius.

A

près les cheminots et les intermittents, c’est au tour des salariĂŠs du commerce de tirer la sonnette d’alarme contre les projets du gouvernement. Près de 600 salariĂŠs ont rĂŠpondu Ă l’appel de l’intersyndicale du commerce parisien Clic-P (CGT, SUD, CFDT, CFE-CGC et Seci-Unsa) Ă manifester ce mardi contre les annonces du ministre des Affaires ĂŠtrangères, Laurent Fabius. En conclusion des assises du tourisme, celui-ci avait plaidĂŠ jeudi dernier pour l’extension des  zones touristiques d’affluence exceptionnelle  afin de permettre l’ouverture dominicale des grands magasins du boulevard Haussmann et des principales gares de France. MĂŞme si le travail du dimanche a progressĂŠ de 10 % chez les salariĂŠs en vingt ans, selon le ministère du Travail, ce n’est jamais assez pour Laurent Fabius, qui donne la prioritĂŠ aux touristes ĂŠtrangers : ÂŤÂ Le touriste qui trouve porte close le dimanche ou Ă 19 heures n’attend pas le jeudi suivant.  Du cĂ´tĂŠ des salariĂŠs, les rĂŠactions sont vives. ÂŤÂ Nous avons aussi le droit au repos dominical. On travaille dĂŠjĂ le samedi, on commence tĂ´t pour finir aux environs de 21 heures, sans compter le temps de trajet. Le dimanche est le seul jour oĂš nous pouvons profiter de nos familles , protestent, parmi les manifestants, deux salariĂŠs du Printemps. Quand le gouvernement met en avant les retombĂŠes ĂŠconomiques

HORS-SÉRIE JEAN JAURĂˆS

120 PHOTOGRAPHIES ET DOCUMENTS D’ÉPOQUE...

Jean Jaurès UNE VIE POUR

De quels emplois s’agirait-il ?

ÂŤÂ L’ouverture dominicale permettrait la crĂŠation d’emplois selon le gouvernement, cela reste Ă dĂŠmontrer, ajoute Laurent DegousĂŠe, secrĂŠtaire adjoint de SUD commerce ĂŽle-de-France. Et de quels emplois s’agirait-il ? De petits postes sans qualification proposĂŠs Ă de jeunes ĂŠtudiants manipulables.  D’autant que, selon lui, ÂŤÂ Ă cĂ´tĂŠ, les plus petits commerces vont couler puisqu’ils ne pourront pas verser les

compensations . Pour CĂŠline Carlen, secrĂŠtaire gĂŠnĂŠrale de la CGT Galeries Lafayette Haussmann, les propositions de Laurent Fabius sont dĂŠnuĂŠes d’intĂŠrĂŞt. ÂŤÂ Le seul sens que ça peut avoir, estime-t-elle, c’est celui d’un cadeau Ă la distribution qui veut absolument dĂŠmanteler certains aspects du droit du travail.  Au-delĂ , le dĂŠbat concerne, selon le syndicaliste de SUD, l’ensemble de la sociĂŠtĂŠ. ÂŤÂ Cette mesure a un coĂťt, affirme-t-il : les questions de sĂŠcuritĂŠ, de transports, de banques, de crèches devront ĂŞtre abordĂŠes.  Le Clic-P appelle d’ores et dĂŠjĂ les salariĂŠs Ă poursuivre leur action contre l’instauration du travail dominical dès la rentrĂŠe de septembre. Lola Ruscio

Kevin Boucaud

Jaurès Un hors-sÊrie de rÊfÊrence 1859 - 1914 Une plongÊe inÊdite dans le monde, la vie et les combats de Jaurès

CHANGER LE MONDE

A

lors que la direction d’Axa prĂŠsentait fièrement, hier en fin d’après-midi, au premier ministre Manuel Valls, son  programme d’accompagnement des jeunes vers l’emploi , le refrain ĂŠtait diffĂŠrent du cĂ´tĂŠ de la CGT du groupe. L’objet des revendications ĂŠtait simple :  On demande Ă notre PDG d’embaucher l’ensemble de nos jeunes collègues en CDD, en alternance, en apprentissage et en intĂŠrim , a exigĂŠ Nadine Garcia, dĂŠlĂŠguĂŠe nationale de la CGT Axa. En 2013, Axa France comptait 894 contrats prĂŠcaires, dont seulement 135 ont ĂŠtĂŠ transformĂŠs en CDI. Pour alerter, le syndicat a rĂŠdigĂŠ une pĂŠtition Ă ce sujet, qui a recueilli 2 488 signataires au sein du groupe. Certes, Axa s’est engagĂŠe Ă embaucher 20 000 jeunes europĂŠens au cours des quatre annĂŠes Ă avenir, soit 5 000 par an. Mais, comme le souligne Nadine Garcia,  seuls 10 000 d’entre eux seront en CDI . Et ce, alors que l’entreprise a touchĂŠ un crĂŠdit d’impĂ´t compĂŠtitivitĂŠ emploi (CICE) de 20 millions d’euros en 2013 et a vu son bĂŠnĂŠfice augmenter de 20 % la mĂŞme annĂŠe et son chiffre d’affaires progresser de 2 %. Ă€ cela s’ajoute une baisse drastique des effectifs : sur les 13 200 salariĂŠs en France que comptait le groupe fin 1998, il ne devrait plus en avoir qu’entre 6 881 et 7 628 en 2015.  Alors que nous avons un besoin ĂŠnorme en effectifs, la direction prĂŠfère former des jeunes et les laisser partir se faire exploiter par une autre entreprise, plutĂ´t que de les embaucher.  Et pour atteindre ses objectifs, Axa, explique Nadine Garcia,  met en place des outils et des organisations qui gĂŠnèrent pression, stress et dĂŠcouragement .

dĂŠfilĂŠ HIER AU PRINTEMPS pour LE droit au repos DOMINICAL. photo PIERRE PYTKOWICZ

de son projet, leurs collègues des Galeries Lafayette dĂŠnoncent un leurre : ÂŤÂ L’ouverture dominicale ne va pas gĂŠnĂŠrer du chiffre supplĂŠmentaire. Les touristes sont plutĂ´t des promeneurs que des acheteurs. 

En marge de la venue de Manuel Valls, la CGT Axa contestait hier la politique du groupe.

120 photographies et documents d’Êpoque

ď ą Je souhaite recevoir le hors-sĂŠrie Jaurès, une vie pour changer le monde, au prix de 9,50 â‚Ź + 2 â‚Ź de frais de port (valable uniquement pour la France mĂŠtropolitaine) par exemplaire, soit : 11,50 â‚Ź x ........... exemplaire(s) = ................ euros. Nom................................................................................... PrĂŠnom................................................................... Adresse.................................................................................................................................................................. Code postal....................................... Ville......................................................................................................... TĂŠlĂŠphone............................................................................................................................................................ Adresse e-mail...................................................................................................................................................

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08/04/2014 18:03:37


10 l’Humanité Mercredi 25 juin 2014

RENDEZ-VOUS NATIONAL DE LA VIGNETTE

Une Fête pour faire valser les lignes politiques

Pierre Laurent et Patrick Le Hyaric ont donné lundi soir le top départ de la diffusion de la vignette de la Fête, bon de soutien à l’Humanité. Devant la gravité de la situation politique, la vente militante doit être le moyen de se tourner tout l’été vers celles et ceux qui veulent une alternative.

A

cheter une place pour la Fête de l’Huma ? Oui ! Mais mieux vaut se procurer la vignette d’entrée à la Fête et le bon de soutien à l’Humanité ! Non content d’être plus accessible (21 euros au lieu des 30 demandés dans les points de vente commerciaux), ce précieux sésame vendu par les militants reflète bien mieux le véritable visage d’un rassemblement festif et éminemment politique. C’est dans cette optique que la bataille pour sa diffusion a été lancée lundi soir, au siège du PCF, place du ColonelFabien à Paris, en présence de Pierre Laurent et Patrick Le Hyaric. « La crise politique actuelle appelle à un véritable sursaut autour des valeurs républicaines et démocratiques. La Fête sera le tremplin des grandes manifestations que nous allons porter pour construire une alternative à gauche et changer le paysage politique en France », a démarré le secrétaire national du PCF. Une analyse partagée par le directeur de l’Humanité, qui, en ce 110e anniversaire de la création du journal – et centenaire de l’assassinat de son fondateur Jean Jaurès, le 31 juillet 1914, juste avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale –, s’est appuyé sur l’actualité la plus chaude.

Un défi considérable à relever

« Cette année plus que les autres, cette Fête est primordiale face aux résultats des élections municipales et européennes et

POUR PATRICK LE HYARIC, À DROITE, AUX CÔTÉS DE PIERRE LAURENT, LA FÊTE DE L’HUMANITÉ DOIT SERVIR À CONTRER LA DÉRIVE ACTUELLE. PHOTO JULIEN JAULIN

face à la déliquescence politique qui ne fait qu’augmenter », a insisté Patrick Le Hyaric. Le député européen a dénoncé les affaires qui gangrènent notre quotidien, de Bygmalion à Karachi, sans oublier un gouvernement qui « fait exactement le contraire de ce pour quoi il a été élu ». Devant la stigmatisation médiatique dont sont victimes les cheminots et les intermittents,

devant un exécutif qui planifie l’austérité au profit du grand patronat, devant un président qui décide sans concertation de la réforme territoriale, Patrick Le Hyaric a appelé à travailler et à expliquer sans relâche, en partant à la rencontre de tous les Français. « C’est l’enjeu de cette Fête. Il ne faudra pas seulement compter les vignettes vendues. Il faudra aller au-devant

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de celles et ceux qui veulent une alternative. De celles et ceux qui, comme les abstentionnistes, sont en osmose avec nous sur un certain nombre de sujets, mais qui par malheur ne le savent pas. » Le défi considérable à relever démarre dès à présent. Il se déclinera tout l’été, sur les marchés, les plages, lors des porte-àporte et des initiatives solidaires, grâce aux militants bénévoles, jusqu’au grand rassemblement unique en Europe des 12, 13 et 14 septembre prochains. « Nous invitons l’ensemble des forces de gauche. Que les militants PS et EELV viennent nombreux, a poursuivi le directeur de l’Humanité. Nous leur donnerons la parole. De tout ceci peut naître une modification de la situation politique. C’est une question fondamentale pour nous communistes : nous voulons que tous ceux qui le veulent puissent intervenir pour modifier le rapport de forces politique et pour construire un autre avenir. La rencontre est nécessaire maintenant pour ne pas laisser dériver davantage la situation. » Dernier point avant « la communion générale et intergénérationnelle » : « Certaines fédérations du PCF auront moins de moyens que d’autres depuis les municipales. Mais je souhaite que tous les stands qui ont pu venir l’an dernier puissent le faire cette année encore grâce à une démarche solidaire. » Le mot « commun » étant le plus beau du monde, en toutes circonstances, le lancement s’est terminé autour d’un pot fraternel. La distribution de la vignette peut maintenant commencer. À vos marques, prêts, partez ! AURÉLIEN SOUCHEYRE

DANS L’HUMANITÉ ET SUR HUMANITE.FR DEMANDEZ LE PROGRAMME Ils seront également de la 79e Fête de l’Humanité : Bernard Lavilliers, Scorpions, Massive Attack, les Ogres de Barback, Temples, Alpha Blondy, Ayo, Puggy, Divertimento, Francesco Bearzatti, Tinissima Quartet, Papanosh, Louis Winsberg Trio, Emmanuel Bex, Nico Morelli, Mike Ladd, Jean-Marie Ecay… et des dizaines d’autres concerts, débats, expositions : retrouvez, cet été, toute l’actualité de la Fête dans nos supports.


Mercredi 25 juin 2014 l’Humanité

FLORENT MARCHET

Olivier Metzger

Citizenside/Jean-François Gil

IAM

YVES JAMAIT

Parlophone

Stéphane Kerrad/KB Studios

FELOCHE

OUTERNATIONAL

Fly

NEVCHE

Olivier Metzger

11

OUTRE IAM QUI REJOINT LA GRANDE scène, l’affiche de la fête s’enrichit de la programmation de la scène zebrock.


12 l’Humanité Mercredi 25 juin 2014

Débats&Controverses

Progression des armées djihadistes

La balkanisation de l’Irak, apparue dès la fin 2003, peut-elle encore être évitée ? plement compromis dans l’immédiat du du pays, basé sur le commufait de l’ampleur des divisions qui rongent ce ne sera pas une campagne nautarisme et le confessionl’Irak et de l’ombre encore pesante du ré- de demi-mesures nalisme, par le soutien de gime baasiste, qui, sous couvert de natiol’Arabie saoudite, des pays du nalisme, a tyrannisé ses « fragments », « Nous arrivons en Irak remplis de Golfe et de la Turquie aux chiites et kurdes au premier plan. Le fédé- respect pour sa population, pour sa groupes djihadistes, et celui ralisme, inscrit dans la Constitution de grande civilisation et pour les religions de l’Iran au gouvernement d’Al 2005 et qui devait aider à la création d’une qu’elle pratique. Nous n’avons aucune Maliki. Cette stratégie améi certains paraissent s’émouvoir jeune démocratie irakienne reposant sur ambition en Irak, si ce n’est d’éliminer ricaine de favoriser l’émerdu démembrement de l’Irak, une répartition équitable du pouvoir, est une menace et de remettre ce pays entre g e n c e d e c e s y s t è m e auquel le monde assiste depuis devenu un motif de déchirements et d’éloi- les mains de son peuple. » politico-religieux a déjà été l’offensive lancée par les combattants gnement violent, plutôt qu’un quelconque Georges W. Bush, 19 mars 2003. expérimentée lors de la guerre de l’État islamique en Irak et au Le- mécanisme de paix sociale. De ce point de en Afghanistan contre les vant (EIIL ou Da‘ch en arabe) début vue, les hydrocarbures détenus par l’Irak, Soviétiques, par les talibans, juin, il ne faudrait pas perdre de vue parmi les plus abondants au monde, exadans les années 1980. que cette fragmentation qui se dé- cerbent les luttes sur le terrain, opposant tantôt Bagdad L’Irak est-il donc voué à l’éclatement, dans un partage roule sous nos yeux n’est pas nou- à Erbil, tantôt les Arabes aux Kurdes, tantôt les djihadistes des richesses pétrolières entre chiites, sunnites et Kurdes, Myriam velle. Le thème de la balkanisation entre eux. À cette impasse interne s’ajoutent des querelles avec un scénario sans fin de confrontations armées ? Benraad de l’Irak est ainsi apparu dès la fin régionales entre États se livrant une guerre par procuration Redessiner la carte du Moyen-Orient, œuvre des Français chercheuse 2003, ironiquement dans le débat dans tout le Moyen-Orient, l’Iran et l’Arabie saoudite et des Anglais à la chute de l’Empire ottoman, a toujours au Centre américain alors que Washington notamment, et s’accommodant finalement bien, pour été un projet d’une partie des dirigeants politiques des d’études et tentait désespérément de contenir l’heure, d’un Irak balkanisé et stratégiquement faible. États-Unis. Empêcher qu’émergent des puissances de recherches les effets inattendus et brutaux de régionales qui puissent les concurrencer dans la internationales son invasion. Dans une tribune pumaîtrise des énergies ou présenter un obstacle à la (Ceri bliée alors par le New York Times et politique colonialiste d’Israël. Sciences-Po) intitulée « La solution des trois Toutefois, ce n’est pas certain que les acteurs régioÉtats », l’éditorialiste et président naux voient d’un bon œil une disparition de l’Irak du Conseil des relations étrangères, comme État ; le besoin de stabilité régionale, déjà Leslie Gelb, avait suggéré l’idée d’une partition du terbouleversée par la guerre en Syrie, est peut-être plus ritoire irakien comme remède au bourbier. Quatre ans es graves événements que vit fort que les intérêts immédiats de tel ou tel courant plus tard, en septembre 2007, l’actuel vice-président des l’Irak aujourd’hui constituent politico-religieux. États-Unis, Joseph Biden, introduisait la notion d’une une phase nouvelle dans la Beaucoup va dépendre du gouvernement irakien qui partition douce de l’Irak selon trois enclaves – kurde, dégradation que traverse ce pays vient de passer victorieusement l’épreuve électorale, chiite et sunnite – dotées de prérogatives propres, avec depuis l’invasion américaine de 2003. dans sa capacité à créer un mouvement de rassemBagdad pour capitale. La montée voulue et organisée du blement national, associant sans exclusive toutes les confessionnalisme, qui débouche composantes politiques et sociales du peuple irakien, Rejetée à l’époque par de nombreux Irakiens comme le produit d’une division impérialiste de leur pays par les sur le djihadisme, pose à juste titre dans le respect des droits de chacun, dans le cadre Américains, cette partition a depuis pris le pas, consacrée la question de l’avenir de l’Irak d’un nouveau système politique débarrassé de tous par la poussée de réflexes tantôt autonomistes, tantôt Lydia comme État, dans son intégrité et critères confessionnels et communautaires. Les Kurdes sécessionnistes aux marges de l’Irak, dont le projet uni- Samarbakhsh unité territoriales. Qu’en sera-t-il constituent un point d’appui incontestable à la lutte latéral de grand califat sunnite arboré par l’EIIL procède. Responsable de l’Irak dans ces prochaines pé- anti-djihadistes. Les populations sunnites ne sont Ces dernières années, les Kurdes ont renforcé leur auto- des relations riodes ? Personne n’est capable de pas unanimes dans un soutien aux groupes armés. nomie au nord, au point de former un gouvernement internationales répondre à cette question avec cerLes frappes militaires envisagées par Obama ne régional indépendant, tandis que le grand Sud chiite, du PCF titude. Les jours qui arrivent seront feraient que radicaliser un peu plus chaque camp et historiquement marqué par un fort régionalisme, contemple donc décisifs tant au plan politique feraient de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) à son tour l’autodétermination face à la recentralisation que militaire pour stopper et vaincre le « héraut » de la lutte contre « l’Occident », et autoritaire de Bagdad. Quant aux sunnites, qui s’étaient l’avancée des groupes djihadistes. favoriseraient des affrontements entre communautés faits les défenseurs du nationalisme irakien et arabe face Dans ce pays ravagé par le terrorisme depuis 2003, à la au plan régional, ce qu’il faut empêcher à tout prix. Tout à cette balkanisation, ils se trouvent en marge du processus suite de l’intervention occidentale, ces groupes politico- faire pour éviter l’éclatement de l’Irak, « berceau de politique et des institutions depuis 2003 et évoquent religieux apparaissent pour une partie des populations l’humanité », c’est choisir, aujourd’hui, la voie politique aujourd’hui l’idée d’une séparation. Leur radicalisation sunnites comme des libérateurs. Marginalisés, discriminés au plan régional, tout en barrant la route aux groupes face à la politique pro-chiites et répressive de Nouri au plan politique, social et économique par le gouver- armés, ce qui est de la responsabilité des Irakiens euxAl-Maliki a facilité l’avancée éclair des djihadistes, nement Al-Maliki, ils veulent leur revanche. Ainsi, mêmes. Nouer le dialogue entre les alliés respectifs du dont la prétention est justement de leur offrir une fois de plus, le lit a été fait pour ces groupes gouvernement irakien et ceux qui le combattent. Cela une solution confessionnelle étendue de armés ultraradicaux, au projet religieux, concerne l’Iran, l’Arabie saoudite, la Turquie… Quant à conseillers l’Irak à la Syrie et au-delà. qui profitent de la détresse vécue par des l’ONU, qu’elle prenne l’initiative avant que la situation ne militaires Plutôt que de s’interroger sur l’évitement populations rejetées et combattues car as- devienne incontrôlable. américains de la balkanisation de l’Irak, à l’œuvre sociées à l’ancien régime de Saddam devraient être depuis la dernière guerre, la question serait Hussein. envoyés en irak, a promis donc : cette balkanisation est-elle encore Depuis des années, l’Irak est frappé de le président réversible et comment ? L’horizon d’une plein fouet à la fois par les suites de l’interpoursuivez le débat sur Barack Obama. réconciliation nationale, dont Al Maliki vention américaine, par un système politique humanite.fr avait fait son fer de lance en 2006, est ammis en place par Paul Bremer, « gouverneur »

L’horizon d’une réconciliation nationale est amplement compromis

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Tout faire pour éviter l’éclatement de l’Irak

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Mercredi 25 juin 2014 l’Humanité 13

Une logique favorable aux actionnaires et non aux salariés

Le mirage libéral des transports low cost Sébastien Elka Ingénieur, membre du comité de rédaction de Progressistes (*)

I

l y a beaucoup d’arg e n t à gagner sur le dos de ceux qui en manquent. C’est la logique des modèles d’entreprise qui parient sur le « bas de la pyramide » (en anglais, Bottom of the Pyramid) : vendre des produits peu chers pour le large marché des pauvres, faire relativement peu de marge sur chaque unité vendue mais compenser par les volumes. C’est le modèle du hard discount dans la grande distribution, du subprime dans le marché du crédit, du low cost dans les transports. Ce low cost, « bas coût », mérite bien son nom, puisque pour vendre des billets d’avion ou de train (entre autres) moins chers que les concurrents sans en rabattre sur le profit, il faut réduire les dépenses. Or le gros de ces dépenses ne présente que peu de marge de manœuvre pour que l’opérateur low cost se différencie de ses concurrents. Le coût du capital pour l’achat des véhqicules ou les couvertures financières est relativement homogène à l’intérieur d’un secteur. Et les frais liés à l’utilisation, la gestion et la sécurité des infrastructures répondent à des exigences réglementaires non négociables. Il ne reste donc aux entreprises prétendant au low cost qu’à réduire les coûts liés au service aux passagers et ceux liés au personnel. Pour les premiers, il s’agit de ne plus distribuer de repas dans les vols de courte durée, de

vendre des billets non échangeables ni remboursables, de faire payer des suppléments (bagages, paiement par carte bleue, embarquement prioritaire, boissons, journaux, etc.), de serrer les sièges pour charger le véhicule au maximum, etc. Pour les seconds, il s’agit d’optimiser les processus de travail et tendre les flux, au risque de transformer le moindre incident en retard irrattrapable, de faire du management lean (sans gras), d’utiliser au maximum les rames et appareils, de sous-traiter la restauration et l’entretien au moins cher, de « dématérialiser » les guichets et les remplacer par des automates et interfaces numériques. Ainsi, la facture du low cost est donc d’abord payée par les travailleurs du transport, tandis que le voyageur, lui, pourrait se dire que s’il perd en qualité de service, en ponctualité et en contact humain, il gagne en pouvoir d’achat. En période de salaires stagnants, se déplacer à petits prix n’est pas négligeable. Sauf qu’il y a là un calcul individuel à courte vue. D’abord, parce que le voyageur-consommateur est aussi travailleur-producteur. Certes, Internet lui donne accès à de puissants comparateurs de prix, mais en cherchant les prix bas, il encourage la mise sous pression des salaires, suivant un terrible cercle vicieux. Et au-delà, il faut comprendre que si le prix du ticket devient le déterminant quasi unique de la décision d’achat, au détriment du confort ou de la qualité du service notamment, moins tangibles, il n’y a plus de place sur le marché

pour une diversité d’offre et seul le moins cher survivra. À l’issue d’une phase de concurrence féroce, faillites et restructurations s’abattront sur la plupart des acteurs, et le marché retrouvera un équilibre avec un faible nombre d’acteurs, qui n’auront plus besoin de se différencier et pourront recommencer à augmenter les prix. Les coûts resteront bas mais les prix retrouveront un niveau plus élevé. Seuls les actionnaires auront finalement gagné à la déstabilisation de marché introduite pendant quelques années par le low cost. En plus de relever d’une logique de miroir aux alouettes, ces modèles low cost illustrent une contradiction de fond du capitalisme de notre temps. Pendant les Trente Glorieuses, le capitalisme occidental avait besoin pour faire tourner ses usines d’une consommation de masse portée par des salaires suffisants pour soutenir la demande, suivant la logique keynésienne globalement sociale-démocrate. Avec la révolution conservatrice néolibérale, il s’est agi, à partir des années 1970, de « contenir » les salaires sans cesser de soutenir l’indispensable consommation. Tout a été fait pour structurer l’économie autour de la seule bataille sur les prix, réservant la qualité et la diversité aux segments luxe de chaque marché. À travers le low cost, c’est donc le mirage de la classe moyenne qui s’évanouit. Là où le low cost nous conduit, il n’y a que deux classes sociales: la classe affaires et la classe éco. (*) La revue est téléchargeable sur pcf.fr.

Intermittents : lettre ouverte au président de la République

Ne signez pas l’agrément de l’« accord » ! Jacques Téphany Directeur délégué de l’association Jean Vilar.

J

e viens très respectueusem e n t e t modestement ajouter ma voix à celles qui vous appellent, de toute part, à ne pas signer un « accord » si peu respectueux, lui, des voix différentes et pourtant argumentées qui s’élèvent contre lui. Vous avez plusieurs fois rendu visite à la Maison Jean Vilar et j’ai eu chaque fois le plaisir de trouver en vous un responsable politique sensible et éclairé. En 2012, élu aux plus hautes fonctions de l’État, vous avez honoré la Maison Jean Vilar de votre première visite « culturelle », comme l’avait

fait dès le début de son mandat François Mitterrand en 1981.Quelle confiance vous accordaient alors les acteurs du spectacle français, aujourd’hui fragilisé par l’acceptation annoncée de nouvelles règles bureaucratiques et comptables ! Puisque, je le sais, la voix de Jean Vilar ne vous est pas indifférente, écoutez-le vous dire : « Je crois qu’en art, un et un ne font pas deux. Ils font forcément autre chose. » Cette « autre chose » a été magnifiquement évoquée, sinon définie, par Jack Lang voici peu sur les ondes de Radio France : l’ancien ministre de la Culture ajoutait l’émotion à la protestation partagée avec tous ceux qui se sentent abandonnés.Vilar était partisan de jouer quoi qu’il

arrive, mais jusqu’à la limite des forces du service public : « Lorsqu’il n’y a plus de pain, plus d’eau, plus de gaz ou d’électricité dans une cité, alors le théâtre doit s’arrêter. » C’est ce qui va arriver et qui peut être évité d’un seul mot prononcé par votre autorité.Au-delà de la tragédie sociale, si ce fatum administratif va à son terme, la défaite de la pensée sera considérable, ouvrant des avenues aux bonnes âmes qui n’attendent que cette occasion pour venir cracher sur nos tombes. Monsieur le Président, ne faites pas taire la voix du prince de Hombourg qui doit s’élever dans la nuit d’Avignon soixante-trois ans après celle de Gérard Philipe criant à sa fiancée : « Le cœur, Nathalie, le cœur ! »

LA CHRONIQUE ÉCONOMIQUE DE PIERREIVORRA

Socialisme de l’offre et offre socialiste

I

ndirectement, l’Insee vient à nouveau de mettre à mal ce que François Hollande a appelé le « socialisme de l’offre », expression qu’il a utilisée pour qualifier la politique gouvernementale et son florilège de cadeaux au patronat et de coupes budgétaires et sociales : le contrat d’impôt solidarité compétitivité et ses 20 milliards d’euros de remboursement de cotisations, la baisse de plus de 50 milliards d’euros des dépenses publiques… L’Institut persiste et signe en rappelant que l’investissement des entreprises, c’est-à-dire une part essentielle de ce que l’on appelle l’offre, « réagit généralement aux évolutions de l’activité ». L’offre est dépendante de la demande. En 2013, la stagnation de celle-ci, due à celle du pouvoir d’achat des ménages, au recul de l’emploi, au ralentissement marqué de la progression de la dépense publique, a contribué au tassement de l’investissement des entreprises, et donc de l’offre. En 2013, Il est cependant un autre facteur, souvent les dividendes ignoré, qui explique aussi l’ont emporté ce repli de l’investissement, ce sont les choix sur les de gestion des entreprises. Ces derniers, qui cotisations influencent à la fois l’offre et la demande au sociales. travers des achats de matière première, d’équipements, des salaires versés, sont sous influence. Les forts rendements obtenus par les investisseurs sur des marchés financiers mondialisés incitent les directions de sociétés à tout faire pour assurer à leurs actionnaires une rémunération aussi forte. Aussi, même en 2013, en dépit de la stagnation de l’activité, les revenus de la propriété versés par les entreprises, comprenant pour l’essentiel les dividendes et les intérêts payés, se sont élevés à 265 milliards d’euros, soit 25 milliards de plus que les investissements réalisés. Ils ont été supérieurs de 48 % aux cotisations sociales qu’elles acquittent. L’examen sur une longue période de l’évolution des profits des entreprises et de l’investissement montre qu’il n’y a pas de corrélation entre les deux éléments. Si, à partir du tournant de la rigueur engagé en 1983 par le gouvernement Fabius, les premiers ont fait un bond en avant, la part de l’investissement rapportée à la valeur ajoutée, à la richesse créée, a continué à régresser en tendance. Comme nous l’avons déjà relevé, la richesse créée est pour une part trop importante accaparée par la rémunération de la finance et de la spéculation. Tels sont les durs pépins de la réalité : le gonflement des profits espéré par François Hollande et son équipe grâce au CISE ne fera pas l’investissement de demain et les emplois d’après-demain. Le socialisme de l’offre n’a rien d’une offre socialiste.

Pierre Trovel

Débats&Controverses


14 l’Humanité Mercredi 25 juin 2014 Hamon pour une notation positive

Société&Solidarités

Le ministre de l’Éducation nationale, Benoît Hamon, a lancé hier une conférence nationale sur l’évaluation des élèves, afin de mettre sur pied une notation plus bienveillante. Les conclusions de ces travaux seront présentées début décembre.

+ 35 %

C’est l’augmentation en dix ans du nombre de prospectus publicitaires distribués dans les boîtes aux lettres, selon une étude de l’UFC-Que choisir.

1 500 euros

U

Entre 600 et 800 inspecteurs sur 1 260 ont prévu de débrayer aujourd’hui. photo jean-philippe ksiazek/afp

n véritable « coup de ­semonce » adressé au gouvernement. Aujourd’hui, plus de 4 000 examens du permis de conduire ne pourront pas se tenir. Entre 600 et 800 inspecteurs sur 1 260 ont prévu de faire grève ce mercredi pour dénoncer la réforme annoncée la semaine dernière par le ministre de l’Intérieur. Sous couvert de réduire les délais et de baisser les coûts, Bernard ­Cazeneuve souhaite externaliser les examens du code pour rendre les inspecteurs davantage disponibles pour les épreuves de conduite. L’ensemble de l’épreuve théorique générale (ETG), l’autre nom du code, sera donc confié à un prestataire privé à l’horizon 2015. En attendant, des retraités de la police et de la gendarmerie sont déjà mobilisés pour assurer l’intérim. Autre mesure annoncée : la réduction de 3 minutes de l’épreuve de conduite devrait permettre le passage de 12 à 13 candidats par jour. Enfin, les inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière seraient exemptés de l’épreuve du permis poids lourds, confié à l’avenir à des examinateurs issus du monde professionnel.

Pas un fonctionnaire de plus

Ces trois mesures devraient permettre de dégager 550 000 places supplémentaires pour l’examen pratique du permis B. « Le but, c’est des délais plus courts, pour un permis moins cher », a expliqué le ministre. Les 40 % de candidats qui échouent à la conduite dès leur première tentative pourront le repasser plus rapidement, et ainsi éviter des surcoûts liés aux leçons supplémentaires, oscillant « entre 200 et 600 euros ». Et tout cela, sans jamais embaucher un fonctionnaire supplémentaire, se réjouit l’ancien ministre du Budget. Mais cette belle démonstration chiffrée cache une série de non-dits. Transférer l’examen du

C’est le coût moyen du permis de conduire en France, selon l’Insee (chiffre 2011).

Permis de conduire

Bernard Cazeneuve roule pour la privatisation

Plus d’un inspecteur sur deux devrait répondre, aujourd’hui, à l’appel à la grève lancé par les principaux syndicats de la profession. En cause : la réforme annoncée début juin par le ministre de l’Intérieur qui souhaite transférer les examens du code à des « prestataires extérieurs ».

code à un prestataire extérieur, même « agréé par l’État », cela s’appelle purement et simplement une privatisation, rappelle Pascale Maset, secrétaire générale du SnicaFO. « Il est évident qu’une entreprise privée se doit d’intégrer un bénéfice dans la prestation, puisque c’est sa raison d’être, selon le premier syndicat de la profession. On veut faire croire que l’usager, en payant demain un examen qui est aujourd’hui gratuit, dépensera moins pour obtenir son permis ! » La manipulation de Bernard Cazeneuve est également contestée par Jean-Bernard Marcuzzi, secrétaire national du SNPTASCGT. Selon lui, l’augmentation du nombre de places n’entraîne pas de façon automatique une diminution de la file d’attente. « Plus le nombre de places à l’examen augmente, plus le taux de réussite diminue », soutient même le cégétiste. Il y a une inconnue dans l’équation du comptable

­ azeneuve, c’est l’attitude des auto-écoles C et le taux de réussite à l’examen. Ce que confirme Jean-Michel Gloriod, patron d’une auto-école à Dole (Jura) : « Le manque d’inspecteurs n’explique pas tout. Trop souvent les auto-écoles présentent à l’examen des élèves qui ne sont pas prêts. » Résultat, elles dépassent rarement les 60 % de réussite au premier passage. « Pour dix élèves présentés, quatre doivent donc se représenter. Cela augmente encore le délai d’attente, qui atteint huit mois dans certains endroits. Cela signifie aussi beaucoup d’heures supplémentaires facturées au candidat et l’encaissement, par l’auto-école, de nouveaux frais de présentation à l’examen. » Ceux-ci peuvent atteindre 200 euros pour une épreuve totalement gratuite… Une logique du tiroircaisse que refuse Jean-Michel Gloriod, qui affiche entre 90 et 95 % de réussite du premier coup. Quant aux places d’examen,

s’il en manque effectivement, la réalité est bien moins catastrophique que ne le laisse entendre le ministre. Il suffirait, selon JeanBernard Marcuzzi, de 100 000 à 120 000 places supplémentaires pour réduire la file d’attente. Pourquoi l’État veut-il en créer 500 000 ? En exagérant les dysfonctionnements, il justifie le transfert vers le privé de l’examen du code… Ce faisant, l’État, qui se refuse à combler le sous-effectif chez les inspecteurs, évalué de 40 à 50 équivalents temps plein, « veut, dans un deuxième temps, faire l’économie des 1 260 fonctionnaires qui travaillent pour assurer le service public du permis de construire ». Même analyse du Snica-FO. « Le prestataire qui gérerait demain le code gérera après-demain les catégories B et moto. C’est la programmation incontestable de la privatisation du système dans son intégralité ! » Pierre Duquesne


Mercredi 25 juin 2014 l’Humanité 15

Société&Solidarités Fin de vie

L’arrêt des soins confirmé pour Vincent Lambert la décision, la mère de Vincent Lambert, Viviane, éclatait en sanglots. Avant que l’un de ses avocats, Me Triomphe, proche de la Manif pour tous, fustige « une sombre barbarie en blouse blanche ». Et confirme le pourvoi de ses clients devant la Cour européenne des droits de l’homme. « Je peux comprendre la douleur d’une mère de voir partir son enfant avant elle, a réagi Me Munier-Apaire, conseil de François Lambert. Mais ce nouveau recours, déposé avant même que la ­décision du Conseil d’État ne soit connue, est la marque d’un certain acharnement. » Pour le médecin de Vincent Lambert, le Dr Éric Kaliger, si cette procédure avait un caractère suspensif, « ce serait vraiment le recours de trop, le délai de trop ».

« Monsieur Bonnemaison, vous n’êtes ni un assassin ni un empoisonneur. » Hier aprèsmidi, les réquisitions ont été mesurées à l’encontre de Nicolas Bonnemaison, jugé aux assises de Pau pour l’empoisonnement de sept patients en fin de vie. L’avocat général Marc Mariée a réclamé cinq ans de prison avec sursis, sans interdiction d’exercer. Dans un réquisitoire de près de deux heures, le représentant du ministère public a expliqué son « changement de regard » dans cette affaire. « Quand j’ai découvert le dossier, j’avais l’image d’un homme froid, déterminé, solitaire. Aujourd’hui, j’ai compris que vous avez agi avec sincérité et conviction. Votre sentiment n’était pas de faire mal mais d’abréger des souffrances. » Pourtant, a-t-il rappelé, « il est interdit de tuer, c’est le Code pénal ». Et le docteur Bonnemaison, en ne prévenant ni les patients ni la famille, était dans « l’opacité totale ». « Vous avez agi en médecin, mais en médecin qui s’est trompé », a poursuivi Marc Mariée. L’avocat général a conclu son réquisitoire par un appel au législateur : « J’espère que ces débats seront entendus par ceux qui ont le pouvoir de changer les choses. Il y a eu ici des cris de souffrance qui doivent être entendus. » Le verdict est attendu aujourd’hui.

Alexandre Fache

Marie Barbier

Le Conseil d’État a estimé, hier, que le maintien en vie de l’ancien infirmier, tétraplégique en état végétatif depuis six ans, relevait de « l’obstination déraisonnable ».

U

ne mort « légale ». Sans surprise hier, le Conseil d’État a confirmé la décision de l’équipe médicale du CHU de Reims, qui avait jugé, en janvier, que le maintien en vie de Vincent Lambert relevait de « l’obstination déraisonnable ». Cloué sur son lit d’hôpital depuis un accident de voiture en 2008, cet ancien infirmier fait l’objet depuis plusieurs mois d’une intense bataille familiale et judiciaire entre ceux qui, comme sa femme Rachel ou son neveu François, ont accepté le verdict des médecins, et ceux qui, comme ses parents, le refusent au nom du droit à la vie. Réunis dans la très solennelle « assemblée du contentieux », les 17 juges du Conseil d’État ont donc tranché en faveur des premiers. Vice-président

de l’institution, Jean-Marc Sauvé a expliqué en quoi l’arrêt des traitements imposés à Vincent Lambert était conforme à la loi Leonetti.

Le « souhait » du patient

« La procédure collégiale (…) a été régulière. Sur le plan médical, les conclusions claires et unanimes du collège d’experts montrent que le patient est atteint de lésions cérébrales très sévères et irréversibles. Il se trouve ­désormais dans un état végétatif avec un très mauvais pronostic clinique. » Le magistrat a aussi souligné que la décision prenait en compte le « souhait » du patient, « exprimé clairement et à plusieurs reprises, de ne pas être artificiellement maintenu en vie ». Quelques minutes après l’annonce de

Justice Réquisitoire mesuré au procès du Dr Bonnemaison

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Annonces légales PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS

ARRÊTÉ DÉCLARATIF D’UTILITÉ PUBLIQUE VALANT CESSIBILITÉ N° 2014-1275 DU 21 MAI 2014 MONTREUIL Réalisation d’un parvis et du prolongement de la rue des Jardins-Dufour, sis 55, rue Saint-Antoine à Montreuil, dans le cadre de la construction du futur collège intercommunal Le Préfet de la Seine-Saint-Denis, Chevalier de la Légion d’Honneur, Chevalier de l’Ordre National du Mérite, Vu le Code général des collectivités territoriales ; Vu le Code de l’urbanisme ; Vu le Code de l’expropriation ; Vu le décret n° 2010-146 du 16 février 2010, relatif aux pouvoirs des préfets, à l’organisation et à l’action des services de l’État dans les régions et les départements ; Vu la délibération du 29 mars 2012, par laquelle le Conseil municipal sollicite d’une part l’ouverture conjointe de l’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique et parcellaire pour la réalisation du parvis du futur collège intercommunal et le prolongement de la rue des JardinsDufour à Montreuil, et d’autre part la déclaration d’utilité publique et de cessibilité de la parcelle concernée ; Vu les dossiers d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique et parcellaire ; Vu la décision du 10 décembre 2013 n° E13000043/93 par laquelle le président du tribunal administratif de Montreuil a désigné Mme Micheline BELFORT en qualité de commissaire-enquêteur titulaire, et M. Guy-Michel CABRITA, commissaire-enquêteur suppléant ; Vu l’arrêté n°2013-3410 du 20 décembre 2013 prescrivant l’ouverture d’une enquête publique conjointe préalable à la déclaration d’utilité publique et parcellaire du lundi 13 janvier 2014 au vendredi 31 janvier 2014 inclus ; Vu les rapports et avis favorables émis le 26 février 2014 par le commissaireenquêteur ;

L’Humanité est officiellement habilité pour la publication des annonces judiciaires et légales dans les départements : 91 (arrêté 2013-PREF/DCSIPC/BAGP n° 137) 5,12 euros HT/ligne, 92 (arrêté CAB/SDCI n° 2013-589) 5,49 euros HT/ligne, 93 (arrêté n° 2013 - 3372) 5,49 euros HT/ligne, 94 (arrêté n° 2013/3819) 5,49 euros HT/ligne. Ministère de la culture et de la communication (arrêté du 21 décembre 2012, modifié par arrêté du 20 décembre 2013) relatif au tarif annuel et aux modalités de publication des annonces judiciaires et légales NOR : MCCE1240070A). La ligne se définit par 40 caractères, signes ou espaces de corps 6.

Vu la demande de la commune de Montreuil du 10 avril 2014 sollicitant la déclaration d’utilité publique et la cessibilité de la parcelle nécessaire à la réalisation de l’opération ; Vu l’état et le plan parcellaire ci-joints ; Considérant que ce projet s’inscrit dans la continuité des actions menées pour la revalorisation du quartier Saint-Antoine et de la protection de son patrimoine horticole et végétal ; Considérant qu’il créera de nouveaux accès, dans le cadre de la construction du futur collège intercommunal prévu à la rentrée 2014, avec la création d’un parvis servant d’articulation entre l’entrée du collège, l’avenue paysagère du tramway T1, l’espace agri-culturel du quartier du Mur-à-Pêches et de la rue Saint-Antoine ; Considérant que l’opération projetée présente un caractère d’utilité publique. Sur la proposition du secrétaire général de la préfecture de la Seine-Saint-Denis.

sous-préfète chargée de mission auprès du préfet, secrétaire générale adjointe chargée de l’arrondissement chef-lieu et le maire de Montreuil sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent arrêté qui sera publié au bulletin d’informations administratives des services de l’État et dont copie sera transmise : - à la directrice de l’unité territoriale de la direction régionale et interdépartementale de l’équipement et de l’aménagement ; - au commissaire-enquêteur ; - au juge de l’expropriation près le tribunal de grande instance de la Seine-SaintDenis. Fait à Bobigny, le 21 mai 2014. Le Préfet, Pour le préfet et par délégation, Le secrétaire général, M. Hugues BESANCENOT

ARRÊTÉ : Article premier : sont déclarés d’utilité publique au profit de la commune de Montreuil, les travaux nécessaires à la réalisation d’un parvis et du prolongement de la rue des Jardins-Dufourn, sis 55, rue Saint-Antoine à Montreuil, dans le cadre de la construction du futur collège intercommunal dont le plan du périmètre de DUP est annexé au présent arrêté. Article 2 : est déclarée immédiatement cessible la parcelle cadastrée section BZ n° 362 pour cause d’utilité publique, au profit de la commune de Montreuil, nécessaire à l’opération susvisée et décrite au plan et à l’état parcellaire joints en annexe. Article 3 : l’expropriation devra être accomplie dans un délai de cinq ans, à compter de la date de publication du présent arrêté. Article 4 : il sera en outre inséré dans deux journaux d’annonces judiciaires et légales du département par les soins et aux frais de l’autorité expropriante, affiché en mairie durant un mois, et notifié par le maître d’ouvrage, à chaque propriétaire figurant sur l’état parcellaire. Article 5 : le présent arrêté peut être déféré au tribunal administratif de Montreuil dans un délai de deux mois qui commence à courir le jour de sa publication ou de sa notification. Article 6 : le secrétaire général de la préfecture de la Seine-Saint-Denis, la

Par acte SSP du 23 mai 2014, il a été constitué la société :

BT SERVICE SARL

SARL au capital de 10 000 euros. Siège social : 278, rue de Rosny, 93100 Montreuil. Objet : la société à pour objet en France, et partout ailleurs : « activité de conditionnements, toutes activités et prestations de service liées à l’objet principal ». Durée : 99 ans. Gérant : M. KAYEMBE Serge, demeurant rue de Fréhel, log. C N 222, 22440 Ploufragan. Immatriculation au RCS de Bobigny. Avis est donné de la constitution de la société dénommée :

DMS

Forme : SASU. Capital : 1 000 euros. Siège social : 2, allée Peyronnet, 92320 Châtillon. Objet : produits d’alimentation. Durée : 99 ans. Président : M. BRAHMI Halim, demeurant 2, allée Peyronnet, 92320 Châtillon. Immatriculation au RCS de Nanterre. Par acte SSP du 17 juin 2014, il a été constitué la société dénommée :

MAYWAS DRIVER

Forme : SASU. Capital : 1 000 euros Siège social : 9, rue Guynemer, 93800 Épinay-sur-Seine. Objet : transport de voyageurs par voiture de tourisme, et transport de personnes. Durée : 99 ans. Cessions d’actions et agréments : la cession des actions de l’associé unique est libre, et notifiée par le président. Président : M. GAUCHET Jérôme, demeurant 9, rue Guynemer, 93800 Épinay-sur-Seine. Immatriculation au RCS de Bobigny. Avis est donné de la constitution de la société dénommée :

RAJ

Forme : SCI. Capital :1 000 euros. Siège social : 2, rue de la Gare, bât A2, esc. J, 93000 Bobigny. Objet : la propriété, la gestion, et la location d’immeubles. Durée : 99 ans. Gérant : M. RAJAKUMAR Shanmugam, demeurant 2, rue de la Gare, bât. A2, esc. J, 93000 Bobigny. Immatriculation au RCS de Bobigny.

CHIMERA-YAKAMOZ EURL au capital de 40 800 euros

Siège social : 105, rue Boucicaut 92260 Fontenay-aux-Roses RCS Nanterre 484 765 144 Suivant l’AGE du 2 juin 2014, il a été décidé de nommer un cogérant, M. DEMIRTAS Ilhami, demeurant au Gazi Bulvari n°112, Daire : 50 Cankaya konak-Izmir (Turquie) ; de transformer la forme en SARL, et de prendre comme sigle : « CY ». Mentions faites au RCS de Nanterre.

ECP SARL au capital de 8 000 euros

Siège social : 115, rue Anatole-France 93120 La Courneuve RCS Bobigny 524 142 742 Aux termes de l’AGE en date du 19 juin 2014, il a été décidé de nommer en qualité de gérant M. ROSHAN SINGH Michel, demeurant 113, boulevard

Maxime-Gorki, 93240 La Courneuve, en remplacement de M. SINGH Jit, démissionnaire. Mention faite au RCS de Bobigny.

SARL JP INDUSTRIE DÉCONSTRUCTION

SARL au capital de 10 000 euros Siège social : 195, avenue Gambetta 75020 Paris RCS Paris 801 564 667 Suivant la délibération de l’AGE en date du 26 mai 2014, il a été décidé d’étendre l’activité à : « dépollution de sites, transfert industriel national et international », et de changer la dénomination sociale qui sera :

JP INDUSTRIE DÉCONSTRUCTION

Et de transférer le siège au Rosny 2, 112, avenue du Général-de-Gaulle 93110 Rosny-sous-Bois. Le dépôt sera effectué au GTC de Bobigny.

L’AUTHENTIC

SARL au capital de 6 000 euros Siège social : 4, 6, boulevard de La République 93190 Livry-Gargan RCS Bobigny 750 905 614 L’AGE du 1er juin 2014 a nommé en qualité de gérant, à compter du 1er juin 2014, M. RAMDANI Khaled, demeurant au 82, avenue César-Collaveri, 93190 Livry-Gargan, en remplacement de M. CHALAL Hakim, gérant, démissionnaire. Mention faite au RCS de Bobigny.

LE GÉNIUS

SARL au capital de 3 000 euros Siège social : 28, boulevard Gutenberg 93190 Livry-Gargan RCS Bobigny 799 835 863 L’AGE du 1er juin 2014 a nommé en qualité de gérant, à compter du 1er juin 2014, M. CHALAL Hakim, demeurant 26, allée Bayard, 93190 Livry-Gargan, en remplacement de M. RAMDANI Khaled, gérant, démissionnaire. Mention faite au RCS de Bobigny.

LES TROIS FRÈRES

SASU au capital de 1 000 euros Siège social : 175, avenue d’Argenteuil 92600 Asnières-sur-Seine RCS Nanterre 530 798 677 Aux termes de l’AGE du 20 juin 2014, il a été décidé la dissolution anticipée de la société à compter du 30 juin 2014, est nommé liquidateur M. EL SHERBINI Mohamed Mahdy Khlil, demeurant 24, boulevard Marcel-Sembat, 93200 Saint-Denis, et de fixer le siège de liquidation au siège social. Aux termes de l’AGE du 20 juin 2014, il a été décidé d’approuver les comptes de liquidation, qui présente un mali, a donné quitus au liquidateur, l’a déchargé de son mandat, et prononcé la clôture des opérations de liquidation au 30 juin 2014. Le dépôt légal sera effectué au GTC de Nanterre.

PRO CONCEPT SÉCURITÉ

SARL au capital de 7 500 euros Siège social : 7, place du 11-Novembre-1918 93000 Bobigny RCS Bobigny 538 778 135 Aux termes de l’AGE du 13 mars 2014, il a été décidé de transférer le siège social au 20, rue des Champs, 77100 Meaux, à compter de ce jour. La société sera radiée du RCS de Bobigny, et sera désormais immatriculée au RCS de Meaux.

TOUS VOS SERVICES TVS

SARL au capital social de 3 000 euros Siège social : 157, rue de l’Abbé-Jean-Glatz 92270 Bois-Colombes RCS Nanterre 522 567 189 Aux termes du P.-V. de l’AGE en date du 19 mai 2014, il a été décidé de transférer le siège social à l’adresse du 40 boulevard Bessières, 75017 Paris. Mention faite au RCS de Nanterre.


16 l’Humanité Mercredi 25 juin 2014 Nouveau procès de masse au Caire 494 partisans du président destitué Mohamed Morsi s’apprêtent à être jugés dans un nouveau procès de masse le 16 juillet. La semaine dernière, 183 peines de mort ont été prononcées, dont celle de Mohammed Badie, le guide suprême des Frères musulmans.

Le monde en mouvement

1 000

C’est le nombre de personnes tuées entre le 5 et le 22 juin en Irak suite aux offensives djihadistes de l’État islamique en Irak et au Levant, selon l’ONU.

Développement

La France sabre son soutien aux pays pauvres Selon les informations de l’organisation humanitaire ONE, qui lance aujourd’hui une campagne, le gouvernement de Manuel Valls va réduire de 10 % son aide internationale pour la période 2015-2017.

L

’aide publique au développement (APD) de la France, c’est-à-dire son soutien financier aux pays pauvres et émergents, va une nouvelle fois être sacrifiée sur l’autel de la crise. Alors que les députés de l’Assemblée nationale débattent depuis lundi du projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour le budget 2014 qui devrait se solder par une baisse de 2,5 % de l’APD, les tractations dans les coulisses des ministères sur la répartition des 50 milliards d’euros d’économies à réaliser pour la période 2015-2017 devraient aboutir à une chute de 10 % du montant du soutien de la France au reste du monde. C’est ce qu’affirme la branche française de ONE, l’ONG cofondée par le chanteur Bono pour lutter contre la pauvreté en Afrique, qui lance aujourd’hui une campagne d’alerte sur les réseaux sociaux pour interpeller le président François Hollande. « ONE France a des informations qui indiquent que l’aide au développement sera

coupée de manière disproportionnée dans le futur budget triennal 2015-2017. Ces coupes pourraient aller jusqu’à 10 %, quand le budget global serait, lui, coupé de 4 % en moyenne », assure la directrice, Friederike Röder.

La contribution de la France baisse régulièrement depuis 2011

L’APD de la France représentait à l’année près de 8,5 milliards d’euros (essentiellement des prêts plutôt que des dons). Gérée par l’Agence française de développement (AFD), cette somme a permis de financer en 2013 diverses actions comme l’approvisionnement en eau potable de 1,5 million de personnes, la scolarisation dans le primaire de 450 000 enfants ou bien encore le soutien à près de 900 000 exploitations agricoles familiales. Les coupes à venir de la France, de l’ordre de 850 millions d’euros, auraient permis, selon ONE, d’acheter des vaccins vitaux pour 10 millions de bébés et des traitements

Pacifique Participation de la Chine aux exercices militaires dirigés par Washington

Pour la première fois, la Chine participera, aux côtés des États-Unis, du Japon et d’une vingtaines de pays, aux manœuvres militaires Rimpac (Rim of the Pacific), du 26 juin au 1er août, au large d’Hawaï. Cette annonce intervient dans un contexte de tensions croissantes dans le Pacifique et en mer de Chine au sujet de zones territoriales contestées. Washington, qui prévoit de redéployer 60 % de sa marine dans la région à l’horizon 2020, juge par la voix du commandant des forces américaines en AsiePacifique, l’amiral Locklear, que « la décision chinoise de s’engager représente un palier significatif. En particulier sous un commandement américain ». En décembre, un croiseur lance-missiles américain avait manqué d’entrer en collision avec un navire de la marine chinoise en mer de Chine méridionale. La participation de la Chine aux exercices militaires conjoints permettra-t-elle pour autant de désamorcer une éventuelle crise ?

5

C’est le rang occupé en 2013 par la France parmi les pays donateurs pour l’aide publique au développement, en recul d’une place.

en 2013, l’aide publique de la france a permis l’approvisionnement en eau potable de 1,5 million de personnes. photo unmis/j. hattingh/AFP

antirétroviraux pour 3 millions de malades. « La coupe est doublement disproportionnée quand on sait que l’aide publique au développement ne représente que 1 % du budget global. Une part infime qui ne permettra pas de sauver les finances publiques mais qui aura des conséquences désastreuses sur les pays en développement ! » s’insurge Friederike Röder. Une chute de 10 % de l’APD de la France sur les trois prochaines années ramènerait la part de cette aide, en 2017, à 0,35 % du revenu national brut. La contribution de la France baisse régulièrement depuis 2011. Elle est passée de 0,45 % à 0,41 % entre 2012 et 2013, soit une baisse là aussi de près de 10 %. Une situation intolérable pour Oxfam. « Ces coupes budgétaires interviennent dans un contexte où la solidarité internationale

Soudan La chrétienne condamnée à mort rattrapée à l’aéroport après sa libération

Meriam Yahia Ibrahim Ishag, cette chrétienne soudanaise condamnée à mort pour apostasie le 15 mai, et libérée lundi, a été arrêtée hier à l’aéroport de Khartoum alors qu’elle tentait de fuir le pays. Selon un proche de la famille, elle aurait été appréhendée par la sécurité nationale avec son mari, Daniel Wani, de nationalité américaine et originaire du Soudan du Sud à majorité chrétienne. Les époux auraient été emmenés dans des locaux du Service national de renseignement et de sécurité (Niss). L’incertitude demeure encore sur le sort des deux enfants, un nouveau-né dont elle a accouché en prison et un garçon de vingt mois. La jeune femme de vingt-sept ans, née d’un père musulman et d’une mère chrétienne, avait également été condamnée à cent coups de fouet pour « adultère » du fait de son mariage avec un non-musulman. Lundi, une cour d’appel avait annulé le jugement et ordonné sa remise en liberté.

n’est pas une priorité pour la France. En 2013, malgré les engagements présidentiels, l’APD française a subi pour la troisième année consécutive une baisse de près de 10 % alors que l’APD mondiale, elle, augmentait de plus de 6 % », s’inquiète l’ONG. À contre-courant de la tendance mondiale et de pays aujourd’hui cités en exemple comme le Royaume-Uni, la France s’éloigne de son objectif de consacrer 0,7 % de son revenu national brut au développement, conformément aux engagements internationaux pris lors de multiples sommets et aux promesses de campagne de François Hollande. « On sait que les promesses politiques ne sont pas toujours tenues, mais prévoir de ne pas les tenir, c’est sidérant », lâche Friederike Röder, qui accuse François Hollande d’être « le président du renoncement ». Damien Roustel

Nigeria Boko Haram continue de semer la terreur dans le nord du pays

La secte islamiste nigériane Boko Haram s’est de nouveau adonnée à une série d’attaques sur plusieurs jours faisant une trentaine de morts dans le nord-est du pays, en fin de semaine dernière. Après le rapt en mai de 220 lycéennes, les autorités de l’État de Borno ont confirmé hier l’enlèvement de 60 femmes. « Le chef du village de Kummabza nous a dit qu’il y a aussi des enfants âgés de 3 à 12 ans », a détaillé un responsable du district de Damboa avant d’ajouter que « les assaillants ont ensuite tenu tout le village en otage pendant trois jours ». En semant une nouvelle fois la terreur, les djihadistes d’Abubakar Shekau tentent de faire monter les enchères pour la libération de leurs propres militants. D’aucuns interrogent désormais la stratégie répressive de Goodluck Jonathan qui, malgré les victimes civiles, ne parvient pas à contenir l’influence islamiste. Lina Sankari


Mercredi 25 juin 2014 l’Humanité LE GRAËT LES TIENT À L’ŒIL « Le groupe restera très concerné jusqu’au bout, on n’a aucun risque de dérapage nulle part. » Noël Le Graët, président de la FFF, un poil anxieux.

12 juin - 13 juillet

Coupe du monde de football

17

Soyons sports

E

Ribeirao Preto (Brésil), envoyé spécial. n tête du groupe E après deux larges victoires (1), l’équipe de France s’apprête à disputer un match particulier ce soir dans le mythique Maracana de Rio face à l’Équateur (22 heures, TF1). Avec déjà un pied en huitièmes de finale, cette troisième et dernière rencontre de phase de poule ne présente à première vue pas un grand enjeu sportif pour les Bleus, qui lorgnent déjà le prochain tour. Et pourtant Didier Deschamps se trouve face à plusieurs choix entre la nécessité de faire tourner l’équipe tout en conservant la première place du groupe pour entretenir la dynamique et éviter probablement l’Argentine en huitièmes. Dans le pire des scenarii, les Bleus peuvent terminer le tournoi dès ce soir. Une défaite par au moins trois buts d’écart contre l’Équateur, qui reste en course pour la qualification (notre encadré), conjuguée à un carton de la Suisse face au Honduras, renverrait les Bleus à leurs études. Une issue très improbable mais que le sélectionneur a dû rappeler à ses troupes afin de ne pas tomber dans le travers de l’Euro 2012 SPECTATEURS où les Bleus de Laurent Blanc, AU MARACANA, LA quasi qualifiés, s’étaient laissés DERNIÈRE FOIS QUE LES BLEUS Y ONT JOUÉ. aller face à la Suède en s’incliC’ÉTAIT EN 1977 nant 2-0.

85 000

Un possible turnover

EN AMICAL FACE AU BRÉSIL POUR UN NUL (2-2).

Un nouveau succès permettrait en revanche d’entretenir le cercle vertueux (six victoires et un nul) depuis le barrage retour remporté 3-0 face à l’Ukraine, en novembre 2013. « On ne peut pas se contenter d’un match tranquille, souligne le défenseur central Raphaël Varane. Il faut garder une continuité, cette dynamique positive. C’est un match qui doit nous permettre de continuer à aller de l’avant. » Lorsqu’il était capitaine des Bleus à la Coupe du monde 1998 et l’Euro 2000, Deschamps avait fait l’expérience, après deux victoires, d’un turnover. Il pourrait être tenté de reproduire ce schéma pour reposer certains cadres et donner du temps de jeu aux remplaçants, qui ont pour l’instant seulement joué contre l’équipe de jeunes du Botafogo FC, le club local, battue deux fois 3-0. Une façon aussi de maintenir l’ensemble du groupe concerné alors que seulement quinze joueurs ont pour l’instant été utilisés. « Je ne vais pas galvauder le match, je ne vais pas mettre onze mecs qui n’ont jamais joué ensemble, précise le sélectionneur, qui aime brouiller les pistes. Il y en aura qui seront là pour le socle. Il y a aussi le souci des cartons jaunes qui va entrer dans la réflexion. » Pour Yohan Cabaye, c’est déjà réglé. Avec deux cartons en autant de matchs,

POURSUIVRE LA LECTURE SUR HUMANITE.FR FRANCE-ÉQUATEUR Dès la fin du match retrouvez le compte rendu de notre envoyé spécial.

LE 22 JUIN, LES BLEUS À L’ENTRAÎNEMENT AU SANTA CRUZ STADIUM PRÈS DE RIBEIRAO PRETO. PHOTO FRANCK FIFE/AFP

LES BLEUS

Ne pas tomber dans le piège de la facilité La tête déjà aux huitièmes de finale, l’équipe de France, leader du groupe E, dispute ce soir son dernier match de poule face à l’Équateur, au Maracana de Rio. Didier Deschamps pourrait faire tourner son effectif. le milieu sera remplacé par sa doublure Rio Mavuba (13 sélections). En ce qui concerne le latéral gauche Patrice Evra et l’autre milieu Paul Pogba, avertis une fois chacun, Deschamps pourrait aussi être tenté de ne pas prendre de risques et de les remplacer respectivement par le jeune Lucas Digne (vingt ans, 2 sélections) et Moussa Sissoko. Ce dernier a donné entièrement satisfaction face à la Suisse et inscrit son premier but. En outre, il permettrait d’économiser Pogba, qui a beaucoup joué cette saison avec la Juventus, en vue des huitièmes de finale. La charnière pourrait également être remaniée. Mamadou Sakho se remet lentement d’une élongation à la cuisse et pourrait céder sa place à Laurent Koscielny (18 sélections), qui est déjà entré en jeu en milieu de seconde période contre la Suisse. De son côté, Raphaël Varane sort fatigué d’une gastro-entérite qu’il a traînée ces

derniers jours et l’a obligé à se rendre à l’hôpital de Ribeirao Preto. Eliaquim Mangala (3 sélections) pourrait alors le suppléer. Mais cette charnière offre peu de garanties, car les deux défenseurs centraux n’ont joué que deux matchs ensemble, soit une défaite contre l’Uruguay (1-0) lors de la tournée en Amérique du Sud en juin 2013 et un nul face (1-1) au Paraguay en match de préparation au Mondial. Une chose est sûre au moins, tous les joueurs trépignent d’envie de jouer au Maracana. « C’est un stade mythique, s’exclame Mathieu Valbuena. De très grands joueurs ont foulé cette pelouse. Jouer un match de Coupe du monde à Rio, c’est fantastique. » NICOLAS GUILLERMIN

(1) Groupe E : 1. France 6 points (+ 6) ; 2. Équateur 3 points (0) ; 3. Suisse 3 points (– 2) ; 4. Honduras 0 point (– 4).

L’ÉQUATEUR DERRIÈRE SA LIGNE Bien organisé en un bloc très compact, l’Équateur pourrait poser des problèmes aux Bleus. Deuxième du groupe E devant la Suisse avec une meilleure différence de buts, l’Équateur (26e nation Fifa) a par exemple tenu en échec (1-1) les Pays-Bas le 17 mai dernier à Amsterdam grâce à une défense de fer. Battus de justesse par les Helvètes (2-1), les Équatoriens ont remporté leur deuxième match du Mondial 2-1 face au Honduras et jouent la qualification. « Nous allons essayer de faire en sorte que ce soit un match fermé, a annoncé le sélectionneur, Reinaldo Rueda. Ils ont des qualités que nous devrons contrôler. » Les Bleus sont prévenus.


18 l’Humanité Mercredi 25 juin 2014

Soyons sports CHEMIN DE TRAVERSE

Loin des clichés et des stéréotypes, en route pour la favela de Rocinha...

Le tiers de la population de Rio de Janeiro vit dans les favelas, auxquelles sont presque instinctivement accolées aux mots bidonvilles, pauvreté ou violence. Visite bien guidée, en mode « déconstruction », dans la plus grande d’entre elles.

C

Rio de Janeiro (Brésil), envoyé spécial. hrist Rédempteur du Corcovado, le stade Maracana, la montagne du pain de Sucre, la plage de Copacabana… À cette incontournable liste des « spots » touristiques vient, de plus en plus, s’ajouter une cinquième visite : celle des favelas. Depuis le début de la HECTARES Coupe du monde, l’intérêt C’EST LA SUPERFICIE des touristes se confirme TOTALE SUR LAQUELLE pour cette partie essentielle S’ÉTEND LA FAVELA DE de la vie « carioca » (de Rio ROCINHA, À RIO DE – NDLR) et brésilienne. Le JANEIRO, SELON UNE débat sur le côté « safari », ÉTUDE RÉALISÉE EN 2010. « voyeurisme », « exotisation » de la misère existe et se poursuit. Mais, de même que l’on peut rire de tout mais pas avec tout le monde (Desproges), on peut visiter une favela mais pas avec n’importe qui et pas n’importe comment. En l’occurrence, nous avons opté pour le « doyen », Marcelo Armstrong (Favela UNE PASSERELLE DE L’ARCHITECTE OSCAR NIEMEYER À ROCINHA. PHOTO SERGIO MORAES/REUTERS Tour), qui propose cette visite depuis 1992.

143,72

Le pays le plus inégalitaire au monde

Direction Rocinha, 70 000 habitants, la plus grande favela du pays après celle de Sol Nascente qui se trouve à Brasilia. En chemin, le guide rappelle que le Brésil est « l’un des douze pays les plus inégalitaires au monde », même « si depuis dix ans 40 millions de personnes sont sorties de la pauvreté ». L’occasion aussi

d’apprendre l’origine du nom : on avait promis aux soldats qui avaient maté la révolte des Canudos, à la fin du XIXe siècle, de leur céder un lopin de terre à leur retour à Rio. Installés sur une colline baptisée depuis du nom d’une plante qui y était florissante – favela –, ils déménagèrent sur la colline de la Providence et y bâtir la première favela.

Mondial 1 Le Brésil, la moustache de Fred et des huitièmes de finale presque au poil...

Il en frétille encore. À croire Fred, l’attaquant du Brésil, il lui aurait suffi de ne plus se raser sous les narines pour retrouver son nez et l’odeur du but lors de la victoire contre le Cameroun (4-1) qui a envoyé lundi le pays hôte en huitièmes de finale contre le Chili. « Sur l’action du but, David Luiz envoie un missile et je marque du visage. Moi, je dis que c’est un but de la moustache », rigole même l’ancien Lyonnais à propos de sa réalisation qui a porté le score à 3-1 (49e). Et comme sur le terrain, l’idole des Brésiliens, Neymar, auteur de deux buts face aux Camerounais, a aussi été décisif : « J’ai dit à Fred : “Ne te la rase pas et tu vas marquer avec la moustache.” » Un conseil au poil puisque Fred avait été un fantôme lors des matchs contre la Croatie (3-1) et le Mexique (0-0). Place donc au Chili, qu’il faudra maintenant tondre samedi prochain en huitièmes de finale. Un adversaire barbant, prévoit déjà Fredo les Bacchantes : « On les a déjà joués et on est passé par des moments difficiles. Mais on joue chez nous et on va tout faire pour être le plus agressif possible. » F. S.

Rio en compte aujourd’hui près d’un millier. Le tiers de la population « carioca » y vit. La Rocinha est coincée entre les quartiers chics de Gavéa et de Sao Conrado. Marcelo poursuit : « Si l’on prend les mesures de l’ONU, c’est comme si le Ghana vivait à côté de la Suisse ou de l’Allemagne. » Si les inégalités de revenus se réduisent, depuis une décennie, celles liées

Mondial 2 Argentine, Nigeria ou Iran, qui mettra le cap sur la France ?

L’Argentine, assurée de jouer les huitièmes du Mondial 2014, essaiera enfin de séduire aujourd’hui à Porto Alegre (18 heures) contre le Nigeria, qui vise également la première place du groupe F. Et l’ombre de la France, l’un des épouvantails du premier tour, planera sur ce duel : le perdant risque en effet de devoir affronter en huitièmes de finale les Bleus, probables vainqueurs du groupe E. Un match nul au stade Beira-Rio enverrait les deux équipes au second tour dans leur ordre actuel, l’Argentine à la première place et le Nigeria à la deuxième, c’est-à-dire face aux Français, ce qui donne une bonne raison aux champions d’Afrique 2013 de tenter de l’emporter mercredi. Mais la défaite est cependant interdite pour le Nigeria (4 points), qui reste sous la menace de l’Iran (1 pt), si ce dernier bat au même moment la Bosnie, déjà éliminée. Reste à savoir quelle Argentine ils trouveront en face d’eux. Ce que Maradona, l’idole sudaméricaine, résume ainsi : « J’ai vu une Argentine qui n’a pas encore trouvé le bon cap… » F. S.

au patrimoine restent intactes, voire se creusent encore. La Rocinha a poussé sur une colline qui surplombe l’océan. Vue époustouflante. Elle a fait partie des premières à expérimenter les UPP (unités de pacification de la police), censées chasser les narcotrafiquants. « Les favelas qui ont des UPP sont ceux de la zone sud et du Maracana, soit les endroits où se déroulent le Mondial et les JO », éclaire Marcelo. La Rocinha est une vraie ville, pas un bidonville, avec ses nombreux commerces, ses moyens de transport (moto-taxis), ses salariés (contrairement aux idées reçues, 98 % des habitants des favelas travaillent). En sinuant dans la favela, les signes de la politique engagée par le gouvernement Lula apparaissent vite : un nouvel hôpital public, des logements sociaux en dur dans le cadre du programme « Ma maison, ma famille. » « Beaucoup de monde ici profite des bourses familles », précise également Marcelo. Un peu plus loin, la visite se poursuit à Las Canoas, favela de 2 800 habitants. La favela a débuté avec l’installation des employés du parcours de golf voisin. Ils ont demandé une parcelle de terrain afin de pouvoir s’y installer et d’être ainsi plus proches de leur travail. La petite communauté a fait l’objet d’un programmepilote de réhabilitation avec l’installation de l’électricité et du tout-à-l’égout. En repartant vers le centre et en traversant les quartiers chics, l’impression d’un changement dans le paysage surgit : l’amenuisement du nombre de drapeaux brésiliens, omniprésents dans les favelas… CHRISTOPHE DEROUBAIX

COURSES HIPPIQUES AVEC P. ROSSO NOTRE CHOIX POUR LE QUINTÉ Mercredi Compiègne Plat R1 2e course à 13h50 16 partants Handicap 1.600 m. - Corde à gauche

Jeudi à Enghien Trot R1 3e course à 13h50 16 partants Autostart 2.150 m. - Corde à gauche

BASES

BASES

11. SAPHIRSIDE 2. LOUVAIN 5. KOURK 13. JACK SPARROW

8. TELLEMENT HAUFOR 2. TAKE 7. TONNERRE DU GERS 4. TZARINE FAC

CHANCES

CHANCES

12. QUART DE RHUM 6. KÖNIG BERNARD 4. ANAXIS 14. CUT INTO THE ROCK

6. TABBY POINT 12. GLOBAL MIDNIGHT 13. RYU JIEL 9. TEAM JOB

LE BON FAVORI : SAPHIRSIDE L’OUTSIDER REPÉRÉ : JACK SPARROW

LE BON FAVORI : TAKE L’OUTSIDER REPÉRÉ : TABBY POINT


Culture&Savoirs

Mercredi 25 juin 2014 l’Humanité 19

cinéma

Shlomi Elkabetz : « Une clé pour pénétrer la société israélienne »

Ils écrivent ensemble avec des phases de cohabitation, tournent presque sans parole par la complicité du regard : l’actrice et réalisatrice Ronit Elkabetz et son frère Shlomi signent le dernier volet de leur trilogie cinématographique. Une fraternité créatrice que nous décrypte ce dernier.

L DR

e film clôt une trilogie entamée avec Prendre femme, en 2004, suivi par les Sept Jours, en 2008. Le personnage de Viviane sert de fil conducteur, mais comment définiriez-vous l’essentiel de votre propos ? Shlomi Elkabetz Il a toujours été clair pour nous qu’il s’agissait de traiter de l’inégalité entre hommes et femmes au sein d’une société donnée. Dans ce dernier volet, nous ne parlons pas d’une femme, de « la » femme, des femmes… cela deviendrait un bien grand mot, de surcroît abusif. Ce n’est pas parce que l’on filme une femme durant deux heures que l’on ne parle que d’elle. La trilogie parShlomi court tout ce que cette Elkabetz femme doit traverser Réalisateur et accomplir pour israélien conquérir sa liberté. Nous avons essayé de porter un regard acéré en miroir de la société israélienne par le biais de cette question cruciale, celle de l’appropriation de l’autre. En Israël, dans le cadre du mariage régi par les règles religieuses, l’époux affirme « tu es à moi ». Il possède seul le pouvoir d’accorder le divorce. C’est le visage de la société que nous faisons entrer dans ce tribunal rabbinique qui prétend que chacun peut s’appuyer sur la Loi, alors qu’il n’en est rien. Israël se veut une démocratie mais les lois dessinent un pays. On n’est pas dans une démocratie uniquement par défaut en se comparant aux états environnants. Les paradoxes existent. On peut marcher dans les rues avec l’impression que l’on peut faire ce que l’on veut, éprouver un sentiment de modernité. Les femmes subissent cette loi hébraïque qui n’a pas été modifiée depuis au moins quatre cents ans. Nous disons aux spectateurs qu’ils vont rire, pleurer ou déplorer, mais surtout qu’il s’agit d’un film politique à propos de cette discrimination. En Israël, vous pouvez assister aux audiences du tribunal pénal où il arrive que soient jugés des crimes affreux, mais le tribunal rabbinique se tient à huis clos. Le film est une clé pour y pénétrer. Les forces que nous mettons en présence sont conte-

Viviane (Ronit Elkabetz) a demandé le divorce il y a trois ans. Mais Seul un tribunal rabbinique est habilité, après autorisation du mari, ici Elisha (Simon Abkarian), à lui délivrer le « Gett », document qui officialisera cette séparation. Photo Losange Films

nues dans une seule pièce, mais suggèrent l’immensité du concept de liberté.

Peu importe ce que les personnages éprouvent vraiment. Tout est affaire de subjectivité, garantie que nous ne portons pas de jugement Quelles ont été les lignes de réalisateurs. L’image sedirectrices de votre approche rait celle d’un match de ten« La trilogie cinématographique dans ce nis au cours duquel vous lieu cloisonné ? parcourt tout ce tournez la tête de part et Shlomi Elkabetz Nous avons d’autre. La caméra est toutourné quelque 97 heures de que cette femme jours positionnée du point film, ce qui est considérable. de vue d’un personnage qui doit traverser Les deux précédents n’en en regarde un autre, celui comptaient même pas 15. Là, et accomplir qui n’est pas regardé n’étant nous savions qu’il fallait obpas visible. Cette règle extenir le tracé, la silhouette en pour conquérir trême était un impératif afin quelque sorte, des émotions de nous assurer qu’il n’y aude chacun, de la manière sa liberté. » rait aucune manipulation des dont elles sont manifestées spectateurs. ou cachées. Concernant Viviane et son mari, ce qui se passe entre eux est presque entiè- Comment l’avez-vous mise en œuvre avec rement silencieux. Ils ne se parlent quasiment Jeanne Lapoirie, grand nom du métier de pas directement et c’est au public d’éprouver. chef-opérateur ?

Shlomi Elkabetz J’ai une grande confiance

en elle. Le film comporte beaucoup de moments de silence et de nombreux moments de dialogue. Jeanne a lu et relu le script mais ne comprenait pas les mots de ces dialogues. Pendant les répétitions, je lui ai d’abord demandé de bien observer et de me dire ce qu’elle ressentait malgré ces textes pour elle incompréhensibles. Ce qu’elle en traduisait visuellement la surprenait elle-même parfois. Elle a notamment su créer des tensions, voire des conflits à l’intérieur de l’image, des choses qui m’étaient impossibles, la verbalisation m’étant accessible. Elle a de toute façon un œil d’excellence concernant le cadre et la lumière, qui a fait l’objet d’un script spécifique. La lumière ne change dans le tribunal que depuis les fenêtres, éclairées d’un extérieur que l’on ne voit pas. Nous l’avons donc écrit très précisément. Il fait beau mais quel genre de beau temps ?


20 l’Humanité Mercredi 25 juin 2014

Culture&Savoirs mille. Le sort de Viviane est celui de milliers d’autres femmes et c’est parfois pire. Ronit et moi, nous nous sommes inspirés, entre autres, de notre propre famille. Notre grand-mère « régnait » sur dix enfants mais n’avait aucune liberté, n’avait droit à aucune éducation et, point selon nous Comment ce pouvoir exorbitant du droit crucial s’agissant d’autonomie, n’avait pas religieux peut-il perdurer droit à un compte en banque dans la société israélienne, « Notre grandpersonnel. La jeune génés’exerçant même sur les ration reproduit ces laïques ? schémas. mère “régnait” Shlomi Elkabetz Parce que dans un pays dans lequel la sur dix enfants Depuis son passage à religion est une nationalité, mais n’avait Cannes, le film reçoit un très reste à déterminer qui est bon accueil critique, enthoujuif. Il doit donc y avoir des aucune liberté siaste souvent. À quoi cela moyens de cerner cette détient-il de votre point de vue ? finition au plan émotionnel, (...) La jeune Shlomi Elkabetz Je crois que spirituel, de manière à ce les gens sont sensibles à une génération que l’État puisse la contrôsimplicité de l’image, de la ler. C’est inscrit dans les reproduit construction. Le film est fondements mêmes de la ancré dans la société israésociété et c’est l’une des ces schémas. » lienne avec sa complexité raisons qui rend le changeet d’autres plus universelles, ment très difficile. Selon ces lois archaïques, mais on attend tout au long une réponse l’homme détient un pouvoir considérable. binaire : Elisha va-t-il dire oui ou non ? Le divorce étant à sa seule discrétion, la Cela peut tenir en haleine en France comme vie conjugale consiste en une soumission au Zimbabwe. Nous sommes parvenus avec à toutes ses volontés. Même une femme ce dernier volet de la trilogie à l’aboutisqui vit séparément dans l’attente d’une sement de dix ans de travail. Faire un film officialisation ne peut avoir aucune vie représente de telles difficultés que l’on se sociale sans risquer de se voir accusée demande toujours comment se lancer dans d’avoir des relations avec d’autres hommes, le suivant. Ronit et moi, nous avons main obstacle supplémentaire si son époux ne dans la main accompli ce chemin. veut toujours pas la libérer. Elle ne peut Entretien réalisé par pas fonder un autre couple, une autre faDominique Widemann Shlomi Elkabetz : « Une clé pour pénétrer la société israélienne » Y a-t-il du vent ? S’il pleut, est-ce une pluie froide et dure, ou une averse tiède ? Il fallait cela pour contribuer à donner force et sens à ce qui était filmé.

Témoignages de la société des hommes Critique Viviane Amsalem ou une femme

qui se confronte au droit et à la Loi pour échapper aux prisons intimes, sociales et religieuses.

Gett. Le procès de Viviane Amsalem, de Ronit et Shlomi Elkabetz. Israël. 1 h 55.

L

orsque s’entame le récit du chemin ultime de Viviane (Ronit Elkabetz) vers une désaliénation jusqu’ici impossible, elle attend depuis trois ans la confirmation du divorce qu’elle a demandé. Elle ne peut obtenir le « Gett », document qui officialise la séparation, sans l’accord de son mari Elisha (Simon Abkarian). Le couple se présente donc devant un tribunal rabbinique, seul autorisé à faire agir la Loi selon les préceptes religieux. Les premiers plans reproduisent cette réalité de la salle du tribunal, des principaux protagonistes masculins, sans contrechamp sur Viviane dans un premier temps. L’affirmation cinématographique de l’inégalité de son statut oppose une contradiction visuelle aux propos tenus d’une justice équitable dans sa souveraineté. Viviane et Elisha ne vivent plus ensemble depuis longtemps mais elle ne peut en aucun cas disposer d’elle-même. Traits tirés, maintien excessif de la détermination, mise sombre et modeste comme il se doit, Viviane n’apparaîtra que lors d’une audience

plus tardive dans une tenue rouge inusitée, lâchant des mains cette chevelure dont le déploiement signe en religion l’obscénité. Car le temps est ici l’un des matériaux du film, travaillé des atermoiements et volte-face d’Elisha, des variations de lumière coulant des rares ouvertures au sein d’un huis clos maintenu en tension. Il arrive que des panneaux indiquent ce passage du temps, durées en mois ou semaines scandant tristesses et exaspérations, espérances déçues et renouvelées au sein d’une claustration oppressante qui impose d’imaginer un hors-champ.

L’excellence de tous les acteurs

L’obstination d’Elisha, l’inaltérable volonté de Viviane ramèneront par la force de l’expression aux fondamentaux culturels et émotionnels de chacun qui ne peuvent se lire de manière univoque. Le silence presque complet entre eux possède la puissance du cinéma muet quand toutes sortes de témoins apportent le verbe. L’hébreu, le français pour de rares échanges, l’arabe qui est la matrice langagière d’Elisha dont la famille a immigré du Maroc, superposent leurs niveaux et croisent les codes de représentation. On se désole, on rit parfois, cocasserie ou nervosité, on attend surtout, entièrement capté par les ressources du cinéma mises en œuvre, au rang desquelles l’excellence de tous les acteurs. On attend parce qu’il s’agit d’une question de vie ou… D. W. de non-vie.

Carole (Emmanuelle Devos) et Marithé (Karin Viard). photo Mars Distribution

Contre-emploi

Une histoire d’amitié à qui perd gagne

La réalisatrice Anne Le Ny signe là son quatrième opus et met en scène deux actrices sur fond de province. On a failli être amies, d’Anne Le Ny.

pris qui croyait prendre. Ce n’est donc pas un pur hasard si une des scènes France. 1 h 31. clés va correspondre à un accident de voiture avec inversion des conducn avait quitté Anne Le Ny sur trices entre celle qui tenait le volant le souvenir de Cornouaille, et celle qui affirmait l’avoir eu en film que nous avions adoré main. Parallèlement, on ne cache pas tant il nous avait paru être au point que l’on aurait volontiers vu Emmad’équilibre entre un lieu, la Bretagne nuelle Devos dans le rôle de Karin profonde du titre, et une intrigue, Viard et réciproquement au vu de le retour aux sources, aux leurs carrières spécifiques. origines, un héritage à Donc, le seul à sa place Anne faire justifiant une est Roschdy Zem, Le Ny plongée dans le sans pour autant a écrit passé. Rien d’aussi qu’on puisse le consiet réalisé directement séduidérer comme capable en 2007 sant ici, mais là, de jouer l’un de ces son premier Anne Le Ny, réaligrands chefs à toque long-métrage, satrice, ne saurait avec la crédibilité qui Ceux être confondue avec convient. Le reste qui restent. la comédienne que relève du contre-eml’on a pu apprécier en son ploi, au sens qui pourrait temps dans plusieurs dizaines être celui de Stéphane Audran et de films depuis les années 1990. de Marie Trintignant dans Betty, de Claude Chabrol.

O

Face-à-face symétrique

Ici, c’est dans le rapport au travail que les personnages s’expriment. Il y a là Carole (Emmanuelle Devos), que l’on peut considérer comme l’élément en perdition tant elle a toujours vécu dans l’ombre de son mari, mais ledit mari est un chef étoilé qui a connu le succès et dont les petits plats font saliver, donc elle est amenée à être un brillant numéro deux, ce qui ne saurait être confondu avec la place symbolique du numéro un. Face à elle et en symétrie, on peut citer Marithé (Karin Viard), qui travaille dans un centre de formation pour adultes, et incarne donc la position symbolique de l’ouverture au changement, mais ici les places peuvent facilement s’inverser. Tel est

Un sujet rare au cinéma

L’autre chose qui intéresse ici est l’observation minutieuse de la province. Elle oppose les deux femmes, celle qui relève de la bourgeoisie et celle qui n’en fait pas partie. Là encore, Claude Chabrol pointe le nez, mais sans son pesant d’ironie acerbe. Anne Le Ny a voulu essentiellement nous raconter une histoire entre femmes, sujet pas si couramment abordé par le cinéma français. Rien que pour cela, elle mérite de tenir sa place parmi nos réalisatrices. Et puis, quelqu’un capable de citer la Toile d’araignée, de Vincente Minnelli, ne saurait nous laisser indifférents. Jean Roy


Mercredi 25 juin 2014 l’Humanité 21

RÉTROSPECTIVE

Pippo Delbono arrache les masques Alors que Sangue sort aujourd’hui en salles, le metteur en scène et homme de théâtre italien verra son cinéma consacré du 27 juin au 6 juillet au Festival international du film de La Rochelle.

SANGUE, de Pippo Delbono.

en parler savamment parce qu’en Italie, nous avons touché le fond. Il est bon alors de se “trahir” soi-même. »

Italie, Suisse, 1 h 32.

D

Au plus près des corps et des visages

’origine ligure, Pippo Delbono débute tout petit Au cinéma comme au théâtre, Pippo Delbono est un artiste dans le théâtre amateur de son père. « Mon du corps, et la petite caméra, voire le téléphone portable (la oncle, qui était le maire du village et l’a été Paura, 2009), n’en est que le prolongement, qui lui permet toute sa vie, y montait des textes de d’être en mouvement, de danser. Dans la tradition Govi en dialecte génois. Mon orientale, en force et en légèreté. Dans Sangue, premier rôle au théâtre a été celui de l’enfant Pippo s’approche, à l’aide d’un filmage souple, PIPPO Jésus. Un jour où je m’étais brûlé le visage et au plus près des corps – celui de Margherita, DELBONO sa maman mourante –, des visages – celui de avais la tête gonflée d’un seul côté, ma mère REÇOIT LE PRIX voulait m’empêcher de jouer. Alors que pour Giovanni Senzani, ex-chef des Brigades rouges, EUROPÉEN moi, cela présageait la souffrance du Christ. qui vit la fin de vie d’Anna, sa femme, ne saDES NOUVELLES Ensuite, j’ai interprété toute la vie de Jésus. chant que faire de sa liberté après vingt ans de RÉALITÉS En amateur. Cette manière, de Govi, de prison. « La petite caméra m’aide à soutenir THÉÂTRALES. le regard de Giovanni avec qui j’ai une relation s’adresser aux spectateurs, distanciée, brechtienne, m’a influencé à jamais. » Le rituel de vraie parce que nous sommes tous deux dans un état la représentation théâtrale comme cinématographique de fragilité, en perte de défense. » Giovanni, qui a exécuté chez Pippo Delbono vient de là. « Je suis très content en 1981 Roberto Peci, frère du premier brigadiste qui a accepté lorsqu’aux représentations d’Orchidées (au Théâtre du de collaborer avec la police, ne s’est jamais repenti. Lorsqu’il Rond-Point à Paris en février dernier – NDLR), à Rome ou raconte la mise à mort, nous savons que sa vie en est marquée à Bucarest, je vois arriver dans la salle des Africains, des dans sa profonde intimité. Sangue est un rite laïque sur la mort Gitans. J’ai le sentiment de faire quelque chose qui a à voir écrit avec le sang de la vie, de la mère, de l’épouse, de ceux avec la réalité, dans lequel l’acteur est l’Autre, où le théâtre, pour qui elle s’est arrêtée à L’Aquila, « ville orpheline, comme moi », dont les ruines dues au mensonge politique poussent telle la musique, pénètre le public calmement. » Pour Pippo, le spectacle doit être texte mais aussi image, à réflexion. Ici encore, Pippo Delbono arrache les masques. musique, danse et vide. Soit le tout. Il doit se rénover pour MICHÈLE LEVIEUX ne pas mourir. « Je dois faire attention parce que je suis de gauche, mais le risque est de devenir de droite sans s’en « Rétrospective de films » de Pippo Delbono, Festival apercevoir. Il faut savoir adapter son point de vue, je peux international du film de La Rochelle, du 27 juin au 6 juillet.

2009

Par ici les sorties par Vincent Ostria UNDER THE SKIN, de Jonathan Glazer.

Royaume-Uni, 2013, 1 h 47.

Alien chic. Le plus remarquable à propos de ce film de science-fiction aussi hors norme que minimaliste, c’est qu’une actrice en vue comme Scarlett Johansson n’ait pas hésité à s’y risquer. Elle incarne un séduisant mixte de vampire et de succube extraterrestre sillonnant l’Écosse et la ville de Glasgow en quête de proies. Une œuvre à la fois abstraite (notamment la façon dont des hommes sont engloutis dans un espace noir symbolique) et réaliste (la partie documentaire avec des Écossais lambda), dont la froideur a pour corollaire une profonde mélancolie. Mortelle randonnée à travers les villes et les campagnes, le film exprime la nostalgie d’un au-delà insaisissable et offre un regard fascinant sur l’étran-

geté des êtres humains culminant avec deux scènes fabuleuses. L’une, sur un être disgracié rappelant Elephant Man ; l’autre, sur une plage où on voit une famille se noyer. Étrange et beau.

LE CONTE DE LA PRINCESSE KAGUYA, d’Isao Takahata. Japon, 2013, 2 h 17.

Princesse lunaire. Le retour d’Isao Takahata, principal associé de Miyazaki au sein du studio Ghibli et autre grand du dessin animé nippon, qui ne donnait plus de nouvelles depuis 1999 (Mes voisins les Yamada). Il revient avec ce qui sera probablement aussi son dernier film. Une splendide adaptation d’un conte du Moyen Âge sur une princesse tombée du ciel, et élevée par des paysans, qui rejette l’éducation sophistiquée à laquelle on veut la soumettre.

Une sorte de plaidoyer pour la camaraderie et la vie buissonnière, au détriment des codes rigides de la haute société urbaine. Le graphisme est au diapason de cet appel à la désobéissance : clair et détaillé comme dans les estampes, mais avec un trait irrégulier et élégamment esquissé.

ZERO THEOREM, de Terry Gilliam.

États-Unis, 2014, 1 h 39.

Toujours orwellien. L’ex-Monty Python, incurable fantaisiste baroque, ne sort guère de ses marottes comicoapocalyptiques. Ici, il invente un monde futuriste pas si éloigné de son propre Brazil, dans lequel un pauvre hère, esclave d’un ordinateur central, ferraille avec une jolie hétaïre. Décoratif, stylisé à mort, mais pas très consistant, ni pertinent.

LA CHRONIQUE CINÉMA D’ÉMILE BRETON

Francine Bajande

Culture&Savoirs

L’aventure, mais aussi… LORD JIM, de Richard Brooks.

DVD et Blu-ray, livre de Patrick Brion, sortie le 2 juillet.

L

ord Jim (1965), de Richard Brooks, sort en DVD. Il est temps de revoir ce film qui n’eut pas grand succès à sa sortie et reçut un médiocre accueil critique. La Columbia, qui le produisit, comptait renouveler, avec cette histoire d’un marin ambitieux et beau comme un ange, coupable d’une lâcheté au début de sa carrière et qui passe sa vie à tenter de se racheter, le triomphe de Lawrence d’Arabie (1962), de David Lean, qu’elle avait également produit. Aussi ses dirigeants pensèrent que nul n’était mieux placé que le héros du désert, Peter O’Toole, pour tenir le rôle principal. Erreur : Lawrence était le valeureux héros tout d’une pièce malgré ses apparentes contradictions, héros bien lisse en vérité ; lord Jim, un personnage « au cœur impénétrable, oublié, non pardonné, figure romanesque à l’extrême », dit Conrad à la fin de son roman. Et Richard Brooks « La réflexion aimait trop Conrad (il avait lu cinquante-deux sur le sens fois le roman, disait-il) pour ne pas lui être fidèle, de la vie malgré les exigences qu’on pouvait d’une compagnie qui, ayant payé très cher son attendre désir d’alimenter tous les écrans du monde, aurait d’un lecteur voulu de l’aventure. De de Conrad. » l’aventure, encore de l’aventure. Rien d’autre. Or, s’il y en a dans le film – tempêtes en mer, batailles dans la jungle, bons et méchants, amour et serments sous les palétuviers –, ce dernier est bien plus que cela : la réflexion sur le sens de la vie qu’on pouvait attendre d’un lecteur de Conrad : « Où est la vérité ? J’ai été soi-disant lâche, soidisant héros, qui suis-je ? » dit, au moment de prendre la seule décision qui lui rendra l’estime de soi, Jim au vieux négociant Stein, qui l’a aidé à reprendre pied. Et pour cette seule séquence, d’amour filial pourrait-on dire, entre le vieux marchand et le jeune aventurier que la quête d’un père a peut-être conduit à être ce qu’il est, homme en recherche de sa vérité, on ne peut qu’aimer ce film. Poignante tendresse. Ayant dit, Jim pose la tête sur l’épaule du vieil homme. Mais il n’y a bien sûr pas que cela, et que l’aventure (car, oui, elle y est aussi). Ce serait compter sans la rencontre, dans la nuit d’un fleuve d’Asie, entre Jim et son double noir, paria comme lui mais voué au mal, Gentleman Brown, bandit voué au lucre, et ce qu’ils se disent, ces deux-là, sur l’âme humaine. Et même O’Toole, imposé par la production et qui détesta le film, est parfait dans le rôle : pour sa vacuité même de beau gosse. Le film fait plus de deux heures et c’est une jubilation que complète le livre de Patrick Brion. Les précisions apportées ici doivent tout à cet amoureux du cinéma américain, et tous ceux qui suivirent le Cinéma de minuit à la télévision connaissent sa méticuleuse érudition.


22 l’Humanité Mercredi 25 juin 2014

Culture&Savoirs intermittents

notre choix télé

Montpellier, un festival à pas comptés

carmen aux Arènes de vérone Arte, 20 h 50.

Opéra enregistré en juin 2014. Avec Ekaterina Semenchuk, Irina Lungu et Carlo Ventre.

L’opéra de Bizet, le plus joué au monde, est mis ici en scène par le réalisateur Franco Zeffirelli.

La mobilisation du Printemps des comédiens persiste. Le gouvernement s’obstine à signer l’agrément mais ouvre des voies de discussion.

Des racines et des ailes France 3, 20 h 45.

H

Montpellier, envoyé spécial. ier, François Hollande s’exprimait sur France Info à propos du mouvement contre les accords du 22 mars. À Montpellier, pour les grévistes du Printemps des comédiens (PDC) et le Mouvement unitaire en Languedoc-Roussillon (Mu-lr), c’est un signe. L’exécutif perd pied dans sa course contre la montre pour sauver les festivals, tout en persistant à vouloir ratifier l’accord Unedic. Le Mu-lr rassemble depuis quatre mois le Synavi, le SMA, la fédération des arts de la rue, la CIP-Lr, SUD culture et la CGT spectacle. Depuis le début de la grève au PDC, le mouvement se réunit quotidiennement dans le parc départemental où devait se dérouler le festival. Lundi soir, à Montpellier Danse, Angelin Preljocaj est programmé. Vers 20 heures, cent cinquante personnes du Mu-lr se retrouvent non loin du lieu de la représentation. Commence peu après une déambulation discrète mais pressée dans les ruelles de la vieille ville. Avant l’entrée du public, elles rejoignent l’arrière du théâtre et s’introduisent sur scène, empêchant, comme la veille, le lever de rideau. Tout le monde reste calme mais l’émotion est intense. « Je respecte votre lutte, pas vos moyens d’action », déclare le chorégraphe présent sur le plateau à leur arrivée. « Le but, c’est que cet accord tombe, indique pour sa part un des techniciens du festival, en grève depuis deux jours. Ce soir nous sommes quatre grévistes, mais sans cette intervention le spectacle aurait été joué. Je suis

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L’heure est aux monteen-l’air ! C’est en montgolfière que s’ouvre cette émission aux couleurs du Périgord, avec ses châteaux Beynac, Castelnaud, La Roque Gageac ou Bridoire. Ce dernier est en cours de restauration. Un petit détour par la réplique de la grotte de Lascaux, un autre au bord de la Vézère pour découvrir des champs de safran… Pas mal la soirée.

Les intermittents ne baissent pas les bras. photo n. gaillard/apercu/Sipa

solidaire. » Devant les grilles du théâtre, les esprits s’échauffent mais une grande partie du public applaudit en soutien. Une dame s’adresse à Michel Miaille, président du festival. Elle demande pourquoi un cordon de police ne lui permet pas d’accéder au théâtre. « Jamais je ne ferai intervenir les forces de l’ordre à Montpellier Danse, répond l’intéressé. C’est un lieu où la communication entre tous doit rester possible. » Hier, à 18 heures, l’équipe de Montpellier Danse votait majoritairement la grève. La représentation ne devait pas avoir lieu.

Mots croisés HORIZONTALEMENT 1. Il a sa place dans l’armoire à pharmacie. 2. Maladie infectieuse de la peau. 3. À partir d'un moment donné. Garnissons d'explosifs. 4. Sortie de secours. Le plus âgé des enfants. 5. Bien charpentés. Symbole chimique d'un métal blanc très dur. 6. Montée des eaux. 7. Ennuyer par des propos oiseux. Enjeu. 8. Pronom personnel. Lit suspendu. 9. Pot de terre. Avion militaire. 10. Sur un diplôme. Apsaras.

PIF

The constant gardener France 4, 20 h 45.

Film de Fernando Meirelles, avec Ralph Fiennes, Rachel Weisz.

Adaptation du best-seller de John Le Carré (la Constance du jardinier).

Émilien Urbach

I

N° 21 447 par Martial Dubois

II

III

IV

V

VI VII VIII IX

X

1

VERTICALEMENT I. Insuffisance de valeur. II. Périodes historiques. Respirations bruyantes de certains moribonds. III. Lingeries féminines. IV. Ville bourguignonne bien connue des cruciverbistes. Au bout du rouleau. V. Sommets. Pronom. VI. Une bonne pomme. Clé des chants. Demoiselle. VII. Eus un avantage à la marque. Gagnes le large. VIII. Saint évêque de Noyon. Entassement d'objets sans valeur. IX. Non. Fureur. X. Faveurs.

SOLUTION : HORIZONTALEMENT. 1. Médicament. 2. Érésipèle. 3. Dès. Minons. 4. Issue. Aîné. 5. Ossus. Ir. 6. Crue. 7. Raser. Pari. 8. Il. Hamac. 9. Têt. Mirage. 10. Es. Déesses. VERTICALEMENT. I. Médiocrité. II. Ères. Râles. III. Dessous. IV. Is. Usées. V. Cimes. Me. VI. Api. Ut. Hie. VII. Menas. Pars. VIII. Éloi. Ramas. IX. Nenni. Rage. X. Services.

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Magazine présenté par Louis Laforge.

Humanité N° 21447

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D’après C. ARNAL


Mercredi 25 juin 2014 l’Humanité 23 écrivains et étudiants

Arno Bertina, Marie Didier, Roger Grenier, Maylis de Kerangal, Laure Limongi, Vincent Message, Wajdi Mouawad, Olivia Rosenthal ont participé à l’encadrement, depuis la rencontre à l’atelier jusqu’à l’enseignement théorique ou pratique.

80

C’est le nombre d’étudiants suivant actuellement l’un des trois masters de création littéraire en France.

Enquête

L

a création littéraire ? Mais ça ne s’apprend pas ! Voilà ce qu’on entend, invariablement, quand on évoque l’enseignement de ce qu’en France on ne considère pas comme une discipline universitaire. La littérature, comme l’Esprit de la Bible, souffle où elle veut. Et si ce regard était en train de changer ? Depuis longtemps, des ateliers d’écriture existent dans les universités. La présence des écrivains y est une réalité ­quotidienne, en particulier grâce au programme « Le temps des écrivains à l’université », de la Maison des écrivains et de la littérature. Et les lecteurs français, grands amateurs de littérature américaine, commencent à savoir que la plupart des auteurs qu’ils admirent ont suivi un cursus de « creative writing ». On ne s’étonnera pas si l’annonce de masters de « création littéraire », à Toulouse, au Havre et à Paris Saint-Denis, a suscité des réactions, de l’enthousiasme au scepticisme. Que peut-on faire d’un « diplôme d’écrivain » alors que les éditeurs croulent sous les manuscrits ? Ne va-t-on pas aboutir à un formatage alors que la littérature est avant tout singularité ? Comment évaluer un « bon » étudiant ? Ces questions, nous les avons posées à des responsables des trois masters qui existent en France, ceux de Toulouse, du Havre et de Paris-VIII Saint-Denis. Mathilde Bonazzi enseigne la stylistique à l’université JeanJaurès de Toulouse et fait partie de ceux qui ont créé le premier master du genre, intitulé « métiers de l’écriture », dirigé par Sylvie Vignes et Christine Rodriguez. « La pratique de la création littéraire, du roman au scénario et au théâtre, permet, dit-elle, d’acquérir des compétences dans d’autres secteurs, de l’écrivain public à l’animateur d’atelier d’écriture ou au correcteur. »

« Sculpter une phrase demande autant de technique que dessiner un corps »

« L’écriture, ça peut s’enseigner, poursuit Mathilde ­Bonazzi. La théorie de la création “inspirée” ne résiste pas aux faits, et les premiers mots des écrivains invités insistent sur l’importance du travail, du temps exclusivement consacré à l’écriture. » Thierry Heynen dirige l’École supérieure d’art et de design Le Havre Rouen, qui travaille en association avec l’université de Normandie. « Ceux qui veulent devenir peintres, sculpteurs, compositeurs savent à quelle porte frapper. Pas ceux qui se destinent à la littérature. On pourrait penser que c’est justifié pour des raisons de technique. Or tout le monde en est conscient, sculpter une phrase demande autant de technique que dessiner un corps. » Olivia ­Rosenthal enseigne à Paris-VIII Saint-Denis. À cette question, elle répond que « la littérature est un art comme les autres. On vit encore sur l’idée romantique du talent inné. Moi-même, je n’ai pas appris dans une université, j’ai travaillé seule, en perdant beaucoup de temps ». Alors, comment apprend-on à écrire ? « Apprendre la création littéraire, c’est pratiquer, réfléchir à sa pratique, découvrir et s’enrichir de la pratique des autres, poursuit Olivia Rosenthal Nous proposons de donner du temps à des étudiants pour cela. Tous n’en ont pas besoin. Mais certains pensent que dans le collectif ils peuvent réinventer quelque chose de leur écriture. » Mathilde Bonazzi insiste : « Son principal intérêt est de faire gagner du temps à ceux qui veulent écrire. Le plein-temps et les rapports au sein d’un groupe sont des moteurs. Le programme “Le temps des écrivains à l’université”, de la Maison des écrivains, a été essentiel par les contacts qu’il permet à nos étudiants. Nous apportons aussi une connaissance de la langue qui leur permet de comprendre et de maîtriser leur propre pratique. » Thierry Heynen précise qu’au Havre « l’université apporte son savoir théorique et critique, et l’École d’art son expérience des ateliers animés par des artistes, ou ici, des écrivains. Il existait, avant même la création du master, un atelier d’écriture, Erasinulo, animé par Élise Parré, maintenant responsable du master, et Maxence Alcade. C’est devenu le noyau de l’enseignement d’aujourd’hui ». Laure Limongi,

les apprentis écrivains semblent échapper à L’angoisse de la page blanche. photo plainpicture/amanaimages

université

La création littéraire ? Oui, ça s’apprend À Toulouse, au Havre, à Saint-Denis, les premiers étudiants des masters de cette discipline obtiennent leur diplôme. Accueillie avec scepticisme, cette formation est des plus recherchées.

écrivaine et éditrice, qui enseigne au Havre, revient sur la question de l’originalité et de la créativité. « Tous les étudiants ont été sélectionnés parce qu’ils montraient une réelle passion pour l’écriture et une forte personnalité. Je ne les vois pas se laisser formater. Je m’attache à la fois à les pousser à formuler des propositions singulières, à écarter ce qui est imitation, conformisme. J’essaie de leur éviter ces pièges que sont le repli sur leurs propres intuitions, le nombrilisme. Le travail collectif et la variété des exercices demandés visent à acquérir une certaine distance par rapport à leur texte tout en maintenant leur capacité à s’investir. » « Ce sont de petites promotions, ajoute Mathilde Bonazzi, et nous partons de ce qu’ils apportent. D’autre part, ils n’ont pas affaire à un seul enseignant. Le risque d’influence est faible. » « Au bout de deux ans, il doit y avoir un travail de création achevé, nous dit Olivia Rosenthal. On évalue la capacité à aller au bout du travail, à tenir compte des critiques, et la qualité du résultat. En étant conscients de la part de subjectivité que cela suppose. C’est pourquoi cette phase est collective. » En ce moment même, une première promotion est en train d’obtenir son diplôme. La littérature française vat-elle en être transformée ? Le changement n’est sans doute pas pour maintenant, mais demain, qui sait ? Alain Nicolas

Pour en savoir plus Au moment même où se terminent les sélections pour les masters de création littéraire, la première promotion de l’université de Paris-VIII Saint-Denis - Vincennes organisait, lundi, une performance collective et littéraire, témoignant de la qualité des travaux réalisés, de la créativité des étudiants et de leur engagement dans l’écriture. Une « performance » salubre, qui augure bien de l’avenir de la littérature. Avec les responsables du master : Lionel Ruffel et Olivia Rosenthal, écrivains et responsables de l’enseignement. Infos www.univ-paris8.fr/Master-Creation-litteraire Voir aussi: École supérieure d’art et de design Le Havre-Rouen : www.esadhar.fr Université de Toulouse Jean-Jaurès : www.univ-tlse2.fr


24 l’Humanité Mercredi 25 juin 2014

Cactus

« Je pensais à des tas de trucs On envoie des keums sur la lune Et moi je n’ai droit qu’à un tuc Pour espérer avoir d’la thune. » Les Rats, Je m’emmerde

PinocChio « Je l’ai combattu   pendant des années (…)   et j’ai décidé de faire   avancer mon projet. »

Bling-bling

Au One 57, immeuble de très haut standing du cœur de New York, l’étage coûte 50 millions de dollars. En doublant la mise, seul le premier ministre du Qatar a pu se payer le plus cher duplex de la ville.

Les puissants ne pourront pas s’asseoir dessus

Le billet de Maurice Ulrich

Ça pique ! par Babouse

À genoux

Josiane Fischer, administratrice

Bruno Arbesu

d’Anticor, est adjointe au maire UMP d’Asnières, réélu en mars dernier, Manuel Aeschlimann, condamné pour favoritisme et sur lequel l’association anticorruption gardait un œil. Et on s’étonne que la structure, qui a destitué son président, soit en crise.

CACtus 40 le bas de laine de la BNP La BNP va donc devoir payer une amende de 6,6 milliards d’euros à la justice américaine pour avoir contourné l’embargo sur l’Iran, Cuba et le Soudan. Qu’on se rassure, la banque a de quoi voir venir, selon le directeur général de la société de Bourse Montségur Finance. « C’est une magnifique machine à gagner de l’argent (…) cette amende ne la mettra pas à plat », explique-t-il au Parisien. Tout juste risque-t-elle « de ne pas distribuer de dividendes à ses actionnaires ». Pour cette année…

MediaTOC la grâce médiatique Depuis quelques jours, Ingrid Betancourt est partout, du journal de France 3 à Libération, en passant par France Inter ou le Figaro, on ne parle plus que d’elle. C’est qu’elle a écrit un roman, la Ligne bleue. Mais les confrères lui parlent moins de son contenu – la dictature argentine des années 1970 – que de sa crise mystique. Ne seraient-ce pas eux qui en faisant de l’ex-otage des Farc une figure christique ont cru voir la Vierge ?

zéro pointé en correction Dans le Parisien d’hier, consacré à l’abandon de la « note sanction », un comparatif entre deux dictées illustrant la nouvelle méthode de correction. Problème : celle du haut non seulement massacre l’orthographe et la grammaire (comme celle du bas), mais aussi le texte d’Annie Ernaux, la Place, sucrant au passage plusieurs mots de la version originale. Erreurs non comptabilisées par un « correcteur » distrait… même si le système de notation change, pour le respect de l’œuvre, c’est zéro !

Ils n’ont pas honte ! TTIP : Oncle Sam veut se payer l’opinion

A

près le bulldozer en 2005, le char tion donc que le débat soit « positif ». Il d’assaut en 2014 ? Lors du débat sur suffit de remplir un formulaire en ligne et le traité constitutionnel européen, de le retourner à l’ambassade berlinoise qui charriait déjà sa dose de libéralisme, par courriel ou voie postale pour qu’Oncle les pressions étaient très fortes pour orienter Sam ouvre le porte-monnaie. Une dél’opinion en faveur du oui. Les médias marche, note la Tribune, assimilable à « une notamment, dont on nous dit aucertaine forme de propagande ». Sans jourd’hui qu’ils étaient « tous pour blague… L’ambassade américaine le oui » (nos lecteurs appréa bien tenté d’expliquer qu’il Les États-Unis cieront), se battaient pour s’agissait juste de « relever ouvrent leur porteoccuper la niche. le niveau ». C’est vrai, quoi ! monnaie pour Aujourd’hui, les tenants Marre des discussions sur orienter le débat du traité transatlantique les normes alimentaires ou sur le Traité pour le commerce et l’inle recul du droit social. « No transatlantique vestissement (TTIP), aussi fun », comme ils disent… de manière « positive »... appelé grand marché tranCité par le site d’actualités pour qui ? satlantique, accélèrent le et de débats en ligne Euracmouvement idéologique. Mais tiv, le diplomate américain Peter médias et politiques ne sont plus Claussen cherche à rassurer. L’initiaseuls à se mouiller. La Tribune.fr a retrouvé tive n’est rien d’autre qu’un encouragement trace d’un tweet de l’ambassade des États- à « confronter différents points de vue. (…) Unis à Berlin, daté du 17 juin, qui en atteste : Nous voulions ouvrir le dialogue, ce qui est « Vous souhaitez organiser un débat concret la raison d’être des médias ». Il ne reste plus sur le TTIP ? Nous aussi ! Nous soutenons aux pauvres petits Européens qu’à dire merci vos projets jusqu’à 20 000 dollars. » Un pour cette leçon de démocratie qui laisse petit coup de pouce de la tête de pont des dans la gorge des opposants au GMT comme intérêts américains en Europe aux tenants un arrière-goût de poulet au chlore… d’un partenariat transatlantique… à condiGrégory Marin

« Mettez-vous à genoux, remuez les lèvres et vous croirez », écrivait Pascal (Blaise). C’est avec cette foi nouvelle en Manuel Valls et François Hollande, « Un binôme à l’épreuve du feu », que Libération croit pouvoir affirmer sur cinq pages que « le changement c’est peut-être maintenant ». Ainsi, lit-on dans l’éditorial, « la gestion des conflits avec les cheminots et les intermittents atteste également d’une méthode, entre fermeté et dialogue, susceptible de donner des résultats ». Avec les cheminots « l’incendie est circonscrit » et, si rien n’est réglé avec les intermittents, c’est que ces derniers « soufflent sur les braises », on se demande pourquoi. On sent à la lecture de Libération cette sorte de soulagement que stigmatisait Rimbaud après la Commune : « Société, tout est rétabli » (ou va l’être, nom de dieu !). Ce pourquoi d’ailleurs le Figaro, parce qu’il se trouve encore à gauche « des nostalgiques de ces politiques qui ont mis la France à genoux, d’inguérissables promoteurs   de la lutte des classes », invite Manuel Valls à ne faire « aucun compromis ». Il est des encouragements qui rabaissent qui les reçoit.

L’Humanité Fondateur : Jean Jaurès. Directeur : Patrick Le Hyaric. Société anonyme à directoire et conseil de surveillance. Société nouvelle du journal l’Humanité (SA 99 ans à compter du 1er janvier 1957). Capital social : 2 500 000 euros. Siège social : 5, rue Pleyel, immeuble Calliope, 93528 Saint-Denis CEDEX. Téléphone : 01 49 22 72 72. Service diffusion (fax) : 01 49 22 73 37. Service aux abonnés : 01 55 84 40 30 relationlecteur@humanite.fr. Vente commerciale : 01 49 22 73 31. Vente militante : 01 49 22 73 47. Publicité : Comédiance. Téléphone : 01 49 22 74 43 (commerciale) 01 49 22 74 53 (annonces classées) 01 49 22 74 89 (annonces légales). Directoire : Patrick Le Hyaric, président du directoire et directeur de la publication ; Patrick Apel-Muller, directeur de la rédaction ; Silvère Magnon, secrétaire général et co-directeur de la publication ; André Ciccodicola, directeur de la rédaction pôle magazine. Conseil de surveillance : Jean-Louis Frostin, président. Impression : POP (La Courneuve), Mop (Vitrolles), Nancy-Print, CILA (Nantes). Numéro ISSN : 0242-6870. Dépôt légal : date de parution. Commission paritaire : 0418 C 79615. Tirage du lundi 23 juin 2014 : 54885 exemplaires.


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