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LES TRENTE GLORIEUSES À L’ÉPREUVE DE LA VILLE

Saint-Pavin-des-Champs.

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale et jusqu’en 1975, la population mancelle connaît, en raison de l’exode rural et du baby-boom, un nouvel épisode d’augmentation démographique d’ampleur. La période appelée « les Trente Glorieuses » se caractérise donc, comme à l’échelle nationale, par un dynamisme démographique qui s’accompagne de grands travaux. Dans l’immédiat après-guerre, la municipalité du Mans souhaite dessiner une ville nouvelle et moderne. De grands aménagements sont alors envisagés, la progression du tissu urbain est d’une ampleur sans précédent. L’importance industrielle du Mans poursuit son développement, avec l’affirmation d’usines comptant un nombre important d’ouvriers et d’employés (Renault, SNCF, Carel et Fouché…). La création de nombreux quartiers dits ouvriers et des infrastructures caractérise à nouveau l’évolution des faubourgs manceaux dans cette seconde moitié du xxe siècle.

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Reconstruire Et Basculer Dans La Modernit

À la libération du Mans, le 8 août 1944, 16 % du bâti de la ville sont détruits. La municipalité, épaulée par l’État, entame une période de reconstruction. De l’organisation urbaine du Mans découle une polarisation de l’industrie au sud, particulièrement visée par les bombardements de mars 1943 puis de mars et avril 1944. Bien que ciblant les sites de production, les bombardements ont aussi causé des dégâts dans les cités ouvrières implantées à proximité. Contrairement à celles de la plupart des villes sinistrées, les destructions au Mans sont disparates. Deux îlots seulement sont entièrement détruits. Les édiles, qui sont aussi pour certains des industriels, s’attachent dans un premier temps à engager la reconstruction des usines et des ouvrages d’art. Les plans d’aménagement et de reconstruction de la ville dessinés par

Pierre Vago, nommé architecte en chef de la reconstruction du Mans par l’État le 14 novembre 1945, s’adaptent donc à ces destructions diffuses et aux attentes des élus.

Sur ces plans de programmation, qui permettent de penser le développement de la ville sur plusieurs décennies, Pierre Vago procède selon trois échelles. L’architecte s’attache àla modernisation du territoire communal et propose principalement l’aménagement d’un boulevard annulaire, ou rocade, destiné à fluidifier le trafic dans la ville en détournant les véhicules en transit. Les travaux de la rocade ne débutent qu’en 1973 et la dernière portion est réalisée en 2016.

Pierre Vago apporte des préconisations pour plusieurs quartiers à réaménager, dont celui du Maroc, qui se voit doté d’une nouvelle chapelle paroissiale et d’un terrain de sport, tandis que la partie nord de la cité-jardin est reconstruite. Enfin, un regard attentif est porté sur plusieurs îlots dits « îlots prioritaires », dont celui qui est appelé « viaducnord », situé au nord des voies ferrées, à l’ouest de la ville, et dont les maisons sont entièrement détruites. Aprèsqu’il a été envisagé de conserver cet espace pour y aménager un parc destiné aux enfants du quartier, en mal d’espaces verts, la décision d’une reconstruction globale de l’ îlot est privilégiée : les échanges avec la municipalité évoquent la difficulté de consacrer une vaste parcelle à un espace vert dans un contexte extrêmement tendu lié à la pénurie de logements. Ce croisement est certainement, avec la partie nord de la cité-jardin du Maroc, l’ensemble programmé le plus vaste et le mieux conservé de la reconstruction de la ville. La déclaration de sinistre est réalisée en 1944 par l’architecte manceau Pierre Goussin, agréé architecte de la reconstruction du Mans par le ministère. Les propriétaires procèdent au montage d’une association (Association de reconstruction du Mans) pour faire établir les plans du lotissement par les architectes agréés Pierre Goussin et Maurice Levasseur. La livraison des bâtiments en béton, avec un parement en briques qui détonne dans le quartier, a lieu en 1949.

Parallèlement au plan d’aménagement, des déblaiements encadrés par la municipalité débutent dès août 1945 dans les quartiers sinistrés, et les premières conventions passées avec le MRU (ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme) datent de 1946. Les subventions accordées pour la reconstruction des maisons et immeubles isolés, touchés par les bombardements, sont versées après dépôtde dossiers pour obtenir l’arrêté accordant le certificat de conformité pour bâtiment sinistré ; 158 maisons et 24 immeubles, entièrement ou partiellement détruits, ont fait l’objet d’une demande de subvention. Lefaible nombre d’immeubles correspond à la typologie du bâti manceau, majoritairement constitué de maisons individuelles. Ce principe s’inverse après la Seconde Guerre mondiale pour répondre à l’urgence de la création de logements. Une nouvelle génération d’une quinzaine d’architectes agréés émerge alors et s’impose sur la scène mancelle.

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