Parapolis - Mémoire Diplôme

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PA RA P OL I S Une nouvelle membrane urbaine



PA RA P OL I S Corentin Chapelle, Thomas Dauphant et Robin Thomas sous la direction de Lionel Lemire


Imagine China - Shengsan Island


REMERCIEMENTS

Un an après, l’exploration touche à sa fin. Nous nous sommes lancés dans cette aventure à trois, par amitié, curiosité et défi ; oscillant entre harmonie et divergence, toujours dans le but de dépasser nos personnalités qui nous sont propres. La route fut longue et sinueuse, mais sans cesse ponctuée de découvertes et de rencontres qui nous ont fait avancer dans la bonne direction. Pour cela, nous tenons à remercier tous ceux qui de près ou de loin ont participé à notre progression. Tout particulièrement Lionel Lemire, notre directeur de diplôme, qui nous aura accompagné depuis le début dans cette recherche, apportant avec lui son expertise et sa sensibilité incomparables. Sans oublier son humour - on aura quand même bien ri ! Un grand merci à Jacques Sautereau qui nous a fait profiter de sa science et de sa gentillesse durant cette année. Merci également à Carl Fredrik Svenstedt qui au fil du temps continue de croire en nous et qui nous a apporté ses critiques toujours avisées. Nous remercions aussi Pierre Mansat pour nous avoir accordé du temps et son expertise sur le sujet. Et bien entendu Arnaud Gillet pour son amitié et ses conseils avisés quant à l’exercice du diplôme. Enfin, à tous ceux qui nous ont aidé tout au long de l’aventure, nous permettant d’aller toujours plus loin dans notre démarche, un grand MERCI !



Périphéries, François Lacour



INTRODUCTION / PRÉFACE

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GRAND PARIS / MÉTROPOLE

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RADIOCONCENTRISME / PÉRIPH

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EXPLORATION URBAINE

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MEMBRANE / DENSIFICATION

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GÉOMÉTRIES / ANNEAU

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LOGEMENT / TYPOLOGIES

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DÉSIR / SYMBIOSE

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BIBLIOGRAPHIE

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Typologie du bĂŠton, Ludovic Maillard


S’attaquer au symbole de la ville de Paris n’est jamais chose facile, tant l’image mentale qu’elle dégage d’elle-même a fini par nous imprégner, qu’on le veuille ou non. Quiconque a déjà arpenté ses rues, scruté son plan de métro, visité ses monuments, a en tête une collection d’images qui façonnent l’identité de Paris. Haussmann a bel et bien réussi au XIXe siècle le pari de rendre visible et palpable le pouvoir qui y régnait - et y règne toujours actuellement. S’attaquer à Paris c’est finalement remettre en cause. Car la ville lumière comme on la surnomme, qui s’évertue à faire briller de mille feux ses atours n’en reste pas moins une entité urbaine reposant sur une construction séculaire, et peinant aujourd’hui à trouver ses marques dans un monde en perpétuelle évolution. Paris inspire et attire, mais reste ancrée dans un paradoxe où innovation et immobilisme jouent sur le même terrain, retranchée derrière son “intramuros“ et rêvant de repousser ses frontières jusqu’au Havre. Paris intramuros justement, appellation d’origine protégée dirait-on avec cynisme et pourtant, nulle n’est moins méritée et ardemment défendue que celle-ci. Paris et ses parisiens chaque jour se retranchent derrière ce “mur“ fictif et bien réel à la fois, la peur de l’inconnu les empêchant sans doute d’explorer l’au-delà, ou serait-ce cet infâme RER qu’on ne saurait emprunter, symbole d’une banlieue qui pénètre la capitale par l’en-dessous. Hier enceintes et murailles protégeaient Paris de l’envahisseur, aujourd’hui, le “Périf“, véritable ceinture autoroutière, joue le rôle de dernière frontière séparant Paris du reste du monde, et à plus petite échelle de sa banlieue. Les clichés ont la vie dure, et ce lien à sens unique entre Paris et ses communes limitrophes n’a jamais été aussi vivace, à une époque où les lignes bougent et les frontières tendent à disparaitre. A l’ère du Grand Paris et du cyberespace, Paris ne peut plus rester enfermée dans ses murs, surtout lorsque tant d’identités multiples se pressent à sa porte, apportant une offre riche sur un plateau, qu’il lui faut maintenant saisir.

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Une certaine idée du Grand Paris a émergé en 2008 lorsqu’un certain Nicolas S. émis le souhait de transformer l’agglomération parisienne en une “grande métropole mondiale et européenne du XXIe siècle, afin d’améliorer le cadre de vie des habitants“. 8 ans plus tard, et après bien des concertations menées tant sur le territoire que via des concours internationaux, la Métropole du Grand Paris a vu le jour le 1er janvier 2016, dans un flou total. Seul le nom, Grand Paris, semble retenir l’attention des habitants, tant sa construction, ses objectifs et ses moyens relèvent d’un mille feuilles impossible à percevoir - et comprendre - dans son intégralité. Hormis sur la question du Grand Paris Express, agrandissement du réseau de transport en commun francilien, le projet n’a donc pas réussi à attirer à lui les feux des projecteurs, faute à un cafouillage dans sa construction, et son empilement administratif qui se rajoute finalement à celui existant… Au coeur de ce contexte hautement symbolique du Grand Paris, où expansionnisme et enfermement tentent de cohabiter dans une évolution complexe du territoire, nous nous lançons les yeux et les oreilles grands ouverts dans cette exploration. Traitant question après question, sans chercher la réponse ultime mais plutôt le chemin le plus riche possible, chaque réponse soulevant de nouvelles questions et nous emmenant toujours plus loin, vers Parapolis.

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1 GRAND PARIS / MÉTROPOLE

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GRAND PARIS / MÉTROPOLE

Le territoire du Grand Paris s’offre désormais à nous, tant sur le plan géographique, qu’économique ou politique. C’est un terrain de jeu vaste, et complexe qui nous tend la main. Faisant miroiter des enjeux mirobolants depuis sa mise en marche, le projet avait de quoi susciter l’engouement, et ce non pas seulement sur le territoire français, mais sur le plan international. C’est bien entendu exactement ce qui se passa, sous la houlette de l’Atelier International du Grand Paris (AIGP), organisme censé superviser et orienter la réflexion autour de ce qui se devait d’être un des projets urbains majeurs de cette décennie. Nombre d’architectes, urbanistes, et autres penseurs répondirent à l’appel de la ville de Paris, tentant, à tour de rôle de définir la voie à suivre dans la construction future de cette grande métropole. D’une densification massive de Paris, à un étalement jusqu’au Havre, les propositions présentées par les équipes vont du tout au tout, essayant chacune de percer le mystère de la métropole, et de sa construction idéale. Mais qu’est-ce vraiment qu’une métropole ? Quel espace occupe-t-elle ? Est-ce une appellation géographique ou administrative ? Comment alors l’appréhender ? Nous continuons donc notre exploration, à une échelle bien plus vaste et abstraite que celle à laquelle nous nous attendions.

Le cyberespace métropolitain 14


La ville dense

La ville étalée

La ville cyber connectée

La métropole est un territoire complexe, affranchi de la distance car conçu sur un paradigme urbain nouveau, celui du cyberespace. Ce dernier, bouleversant les codes de nos sociétés et inversant les rôles nomades / sédentaires a accentué l’immatérialité du territoire, englobant sous une identité factice des pôles spatialement dissociés les uns des autres. Si la voiture a amorcé un virage dont on peine encore à sortir aujourd’hui, allongeant les trajets possibles et ayant pour cause directe l’étalement de nos villes, le cyberespace apporte quant à lui un niveau supplémentaire, une multitude de calques se superposant les uns aux autres, à des échelles que l’urbain ne peut ressentir. 15


La métropole est par essence hyper connectée, entre ses différents territoires d’une part, reliant les pôles aéroportuaires aux centres historiques par exemple, et entre ses voisines - concurrentes - d’autre part. Londres, Francfort, Tokyo, New York… toutes ses villes font partie d’un seul et même réseau, connecté, mais immatériel. Vouée à proposer à ses habitants une infinité de lieux, la métropole n’en est plus à même d’offrir une image mentale d’elle-même. Avec la perte de repères, c’est l’exclusion qui s’amorce, et l’identité qui s’envole. Une identité qui pour toute métropole semble se reposer quasi entièrement sur sa ville-centre, ne faisant que l’enrober d’un pourtour de services, de pôles tous plus attrayants les uns que les autres, dans une lutte sans merci avec ses paires, afin de réussir à peser sur la scène économique internationale. Pourtant, le territoire du Grand Paris est riche, offrant une multitude d’identités spécifiques qu’il s’agit de révéler, de mettre en exergue. C’est cette voie que nous choisissons de suivre, afin d’appréhender au mieux cette métropole.

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Hub Roissy-CDG

Le Bourget La Plaine St Denis

La Défense

Pantin Clichy RER B

Decartes-Noisy

RER A CHATÊLET LES HALLES

Billancourt

MEDIA

RER C

Issy les Moullinaux Ivry-Berges sur Seine

Versailles-Villacoublay LEGENDE RER/ grand axe transport en commun

Hub Olry-Rungis

Échangeur/ grand axe autoroutier

Grand bassin d’emploi

Plateau de Saclay Nouveau bassin d’emploi

Spécification économique

Économie du Grand Paris 17


LEGENDEDensitĂŠ du Grand Paris



INTÉGRATION D’UNE PROMENADE URBAINE ET NOTION DE PAYSAGE

La promenade urbaine fait appel aux acteurs de terrain, aux personnes en charge de l’action politique qu’elle engage et pour finir au regard des habitants, sur cet outil de réappropriation du territoire de la ville. Le rapport à l’espace urbain est d’abord un rapport sensible et subjectif du quotidien. C’est en jouant sur ces scènes de vie, que l’on peut engager une nouvelle dimension urbaine, une dimension plus sensible. L’espace public, lieu de vie et d’émotion, lieu de prédilection de la promenade déambulatoire, à la découverte de son territoire, représente un espace nécessaire à la parole partagée, aux rassemblements et au bon fonctionnement de la communauté. La promenade permet de comprendre dans la traversée de son territoire proche, la question de paysage. Découvrir différents territoires, échelles, parcours, qualités spatiales, renforce l’aspect purement déambulatoire mais aussi attise la curiosité de découverte et non plus seulement de simple passage. Un lieu se découvre principalement par ce qu’il provoque, questionne, fait ressentir… La question de la ville vécue et non subie, témoigne du besoin prenant de réappropriation du territoire par ses habitants. La notion de paysage suppose aussi un regard souvent idéal, bucolique voir nostalgique d’une image de la nature sauvage et non domestiquée, opposée à la métropole bruyante et frénétique. La jouissance de cette utopie se réalise lors de temps de loisirs par opposition à la vie de tous les jours. Un quotidien répétitif privé de paysage, dans un univers de bâti, froid, hostile, parfois impropre ou inhospitalier, banal et saturé. La promenade, espace déambulatoire est un moyen de s’échapper de ce cauchemar trop cartésien et d’arpenter un territoire de nature où perspectives, reliefs, et compostions végétales créent un espace pictural où l’homme s’oublie et s’évade de son quotidien. Se retrouver à dériver dans une foret épaisse où seuls les bruits des animaux percent le silence, provoque un sentiment de bien être qui n’est plus accessible en ville car, la nature aux vertus apaisante et revitalisante se retrouve “parquée“, emmurée et rétrogradée à une fonction purement esthétique, d’ornementation aux faux airs de parc urbain. La ville étouffée par le bâti ne parvient plus à restituer un sentiment de nature cannibalisée par tout un tas de nuisances (sonore, lumineuse, polluante…). 20


Au fond même en allant dans la forêt de Fontainebleau, nous ne quittons jamais la ville, nous empruntons les fameux réseaux interurbains, nous ne parcourons plus la campagne mais un espace sauvagement canalisé, traversant à bonne distance, quasi virtuellement le paysage rural sans moyen de l’approcher. On reste dans un espace clos de toute interaction extérieure, car le réseau n’a qu’un seul but celui de vous amener d’un point A à un point B sans intermédiaire. C’est une suppression pure et simple de l’incidence de parcours, de l’aléatoire, de la surprise et du hasard au profit du totalitarisme urbanistique organisé, et auto régulé, bref du paysage monotone et standardisé.

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LA MORT DE L’ESPACE PUBLIC ?

Benjamin Barder, philosophe français a écrit : « les individus n’aspirent pas a rester seul, mais ont besoin d’être ensemble, d’interagir, d’échanger, et de collaborer pour faire avancer la société ». C’est à partir du moment où l’homme se regroupe en tribu, que la civilisation a surgi. Puis est venu le troc, moyen de connecter les tribus, lointaines. A partir du moment où l’être humain est devenu civilisé celui-ci a abandonné sa position de solitaire et a commencé à participer à un effort de groupe pour en bénéficier et faire bénéficier les autres. La civilisation a bien sur bien évolué depuis, les besoins avec, mais celui d’être ensemble pour prospérer est rester le même. Sommes nous en train de transformer nos villes en territoires lisses, où les interactions deviennent minimales voir inexistantes ? Même si nous possédons toujours notre liberté de mouvement, l’espace dans lequel nous nous déplaçons devient de plus en plus fermé. Vivons nous dans un monde illusoire où les idéalistes n’existe plus, où les antagonistes se cachent, dans cette nouvelle réalité superficielle et moralisatrice. Des choses comme la création, la diversité, l’ouverture et la communauté, représentent un espoir d’avenir et d’avancée pour la société, mais aussi une menace pour la ville globale qu’elle ne tolère pas. Notre perception de la ville aujourd’hui pourrait se résumer à un territoire que l’on ne comprend pas vraiment, que l’on ne fait qu’emprunter, comme un obscur décor passif, où rien n’arrive par hasard, où rien n’arrive en réalité. Si nous avons perdu ces qualités spatiales, c’est aussi que l’art et la culture, qui représentaient le ciment et l’instigateur de vie dans le domaine public ont disparu. La performance comme élément d’attraction et scène à ciel ouvert de la vitalité de la ville. Mais aujourd’hui l’art de rue comme on l’appelle est devenu illégal, illicite comme un objet dégradant et immoral. L’art prend alors une place d’instigateur de chaos, voix de la masse et provocateur de dérèglements structurels que la ville ne veut et ne peut gérer. L’art se voit alors placé dans un musée derrière des vitres blindées où il ne pourra nuire à l’intégrité de la société. L’art devient un divertissement pour les élites et une possibilité de contestation en moins pour la masse. 22


L’espace public, ce médium libre et gratuit qui disparaît au profil des « fun palaces » que sont les Mall, temples de consommation impersonnels et sans identités, créant une génération d’inconnus que la société pousse à redevenir solitaires. Reconquérir l’espace public devient alors crucial dans l’optique de réintroduire et de réinstaurer l’aspect participatif dont la communauté à besoin pour survivre. Réintroduire l’art et la culture à la place qu’ils ont toujours eu. Revitaliser l’espace public rendu moribond par la ville, et redéfinir une échelle humaine et humaniste. Faire voler en éclat l’espace institutionnalisé à outrance, les musées et autres centres commerciaux et shopping Mall géants, hors du temps, hors de notre temporalité. Ce sont des caricatures de monumentalité du « nonsense » sans lien ni identité.

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UN PAYSAGE URBAIN HÉTÉROCLITE À L’OPPOSÉ DU TOUT HAUSSMANN

La notion de village caractérise les enjeux locaux et politiques qui sont propres au quartier et dans son intérêt. Un paradigme profondément territorial imprégné des aspects humains fondateurs du quartier, qui refuse le modèle urbain régulé, dépourvu d’histoires, de mémoires et impersonnel. L’intérêt n’est pas tant de créer une communauté puisque celle-ci se crée généralement d’elle-même, ou d’une résultante extérieure (quartiers voisins plus cher, politique avantageuse…), mais plutôt de se concentrer sur la mixité. Favoriser la mixité des usages et des activités. A l’échelle du bâti par exemple en définissant des activités commerciales au niveau de la rue. L’impact devient alors presque immédiat, le trottoir s’anime, devient plus passant. Définir une véritable vie de quartier par l’aménagement des qualités qu’offre l’espace urbain, dans l’intérêt de la population. La notion de village prend alors tout son sens car dans un quartier où de multiples activités, commerces, équipements s’insèrent dans le paysage le quartier devient vivant. La rue favorise les croisements au hasard grâce à sa géométrie, et les espaces libres qu’offre la rue comme lieu de passage, crée finalement un environnement mieux adapté à la socialisation. Mettre l’accent sur la convivialité et le mélange social des quartiers populaires, le retour à la rue permettant avant tout de mettre en exergue un paysage à taille humaine. Les habitants peuvent alors interagir à plus petite échelle, celle du micro quartier ouvert à tous. Il est intéressant de remarquer que ces quartiers sont le plus souvent repoussés loin du centre et de ses folies foncières. Un centre urbain où les petits commerces ne peuvent s’implanter faute de foncier abordable, le quartier s’embourgeoise alors, se résidentialise, les rues se vident d’activités devenues trop onéreuses pour survivre, bref la vie de quartier meurt petit à petit.

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Les quartiers en périphérie constituent alors un espace privilégié, abritant ces nouvelles couches sociales. Pour une part croissante des classes moyennes, la localisation en périphérie est apparue comme le choix le plus vraisemblable. Ces couches sociales à la recherche d’une localisation centrale qui se heurtent à l’obstacle financier s’orientent finalement vers les quartiers populaires en périphérie jusque là rejetés et stigmatisés a tort, participant de fait à instaurer une mixité tant sur le niveau social, qu’économique ou politique, rendant ainsi le quartier nouvellement investi encore plus riche.

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INTÉGRER LA NATURE POUR LA SUBLIMER

La reconquête de l’espace urbain implique de questionner les demandes sociales de nature et avec elle les usages souhaités (jardiner, pique-niquer, se balader, etc.) Cette récupération de l’espace par la nature se doit aussi d’être à l’initiative des habitants car, ce sont eux qui occuperont l’espace. C’est ce pacte désir / nature qui devient la clé de voute de toute intervention future, car il n’est plus question d’embellir ou d’assainir la ville comme ce fut le cas au XIXe siècle par les hygiénistes, mais plutôt de démultiplier les insertions végétales, parcs, jardins pour que l’ont puisse ensuite penser la ville comme un milieu où le vivant retrouve sa place. L’accessibilité à la nature, sa proximité et l’importance de sa présence sont des caractéristiques paysagères privilégiées par la majorité des citadins. Mais concevoir des espaces verts en zone urbaine, c’est aussi inclure une composante culturelle, qui repose sur des normes sociales influencées par ses habitants, pratiquées dans les quartiers, éléments atypiques et autres interventions permettant de renforcer l’identité locale et le rapprochement social. En créant une interface ville / nature, le contact avec la nature se fait selon des épaisseurs variables, en révélant et sublimant les caractéristiques du site qu’elles soient géographiques, topographiques… nous créons un paysage. Cette interface est essentielle dans le tissage d’un espace qui vient s’imbriquer avec la “géographie humaine“, formes urbaines, équipements, voiries…que représente la ville. Le boulevard périphérique devient un arc à la prolifération de la nature en ville, un bassin de vie qui ensuite tel un parasite, se propagerait et disperserait la pensée de la ville végétalisée. Ce n’est pas seulement en plantant des arbres le long des avenues que l’ont peut recréer efficacement un espace de nature intra-urbaine. La nature comme ornementation n’a qu’une valeur subjective et visuelle, un parc lui avec toute sa biodiversité et sa complexité, crée un catalyseur d’enchantement pour quiconque voudrait s’évader de l’oppression du quotidien généré par la ville.

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Cette conception isole le vivant de l’espace figé de la ville ne considérant plus qu’ils font partie du même environnement, on distingue alors une fracture de plus en plus brutale entre ceux-ci. La nature au service du citoyen ou nature socialisée qui participe à la vie en ville et résulte d’une interaction avec la ville, doit être distinguée de la nature désirée et produite (parcs, pots de fleurs sur les balcons...). La ville a toujours voulu canaliser la nature, l’ordonner et la discipliner en la ‘’dénaturant’’, instaurant ainsi encore plus fortement le paradigme de l’Homme dominant la Nature. Nous sommes confrontés aujourd’hui à une triple question sociale, urbaine et communicationnelle qui provoque le divorce du temps et de l’espace. Comment rendre plus habitable notre territoire. Une nouvelle vision de la cité jardin pour élaborer et réaliser enfin une combinaison inédite entre urbain et nature. Les morceaux de nature dans les villes induisent une certaine urbanisation autour de ces espaces qui peuvent donc devenir des ‘‘vides structurants’’. Dans ce rapport entre nature et vide, les espaces verts ne sont plus une variable d’ajustements et les vides sont sources de composition urbaine. La nature est perçue comme nouvelle centralité, créant une multitude de repères dans la ville.

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DES ENCEINTES DE LA VILLE AUX LIMITES DANS LA VILLE

Les villes s’étalent, s’explosent et se fragmentent, l’espace réel devient de plus en plus atone, la ville fragmente le territoire et avec elle ses infrastructures éclatent, et ségréguent l’espace temps, creusant les fractures sociaux, socio spatiales, et inégalités de territoires. La fragmentation territoriale découle d’une sédimentation fonctionnelle le plus souvent créée par ses réseaux tissant un jeu de nouveaux paysages complexes, délimitant et moralisateurs. Un paysage dompté par les transports et non plus par l’homme. Venir restituer une pratique populaire assimilée à la valeur d’un sentiment de démocratie locale au sein de la ville. Les besoins sociaux des usagers de la ville nécessitent la création d’espaces publics, lieux de débat et de confrontation, véritable dispositif ouvert à la culture populaire le tout dans un espace naturellement opposé à la ville mécanique et mercantile. Pendant des siècles, l’identité des milieux urbains a été confinée à l’implantation de limites comme murailles de protection. Mais la ville aujourd’hui libérée de ces murs n’a cependant pas totalement aboli cette démarcation entre ce qui est aujourd’hui le centre et la périphérie. Alors que la ville tend à un urbanisme proliférant au delà de ses « frontières historiques », elle fait non moins face à de nouvelles frontières en son cœur, celle de la ségrégation spatiale et sociale liée à son infrastructure. Le zoning des années 60 fait place à une nouvelle mobilité qui tend à abolir ses « frontières » mais créait un conflit d’enjeux, une crise identitaire liée à un contexte métropolitain entre nouvelle dérive et force en place tentant de sauvegarder un semblant de territoire. Le boulevard périphérique de Paris se présente à l’intérieur du débat sur l’espace limitant et limité comme lieu représentant une valeur physique et politique. Si ce réseau avait pour but de connecter l’espace lointain il a aussi créé un phénomène d’enclave urbaine de la proche banlieue.

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Cette infrastructure lourde de sens, traverse une multiplicité de situations urbaines de façon très différentes. Une production architecturale héritée d’un autre temps, celui des années de la démesure des programmes en réseaux et de l’étalement pavillonnaire. Réhabiliter voir ré habiter ce territoire proche est aujourd’hui essentiel pour Paris qui aspire à son rêve de grande métropole monde. Le boulevard est un espace épais parfois opaque, parfois dégagé, ou encore parfois incertain mais dans notre imaginaire il reste une limite forte, trop forte, qui le place comme espace d’exception et c’est peut être là qu’il faut en jouer. Un espace unique, qui peut être catalyseur à l’enchantement du quartier comme un parasite pour celui–ci. Ne restant plus que trouver les bonnes solutions pour ne pas créer un monstre. Un espace d’échanges se basant sur un système d’exclusion des piétons au profil de la voiture peut à présent permuter en promenade urbaine.

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2 RADIOCONCENTRISME / PÉRIPH

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RADIOCONCENTRISME / PÉRIPH

Depuis l’époque Gallo-romaine, la ville de Paris s’est toujours développée dans un radioconcentrisme expansif, menant à sa forme actuelle que tout un chacun saurait identifier entre mille. De l’enceinte gallo-romaine au IVe siècle, jusqu’à l’enceinte de Thiers au XIXe siècle, celles-ci ont défini les frontières de la ville, qui s’inscrivent à la fois dans une logique de limitation, mais également d’objectif à atteindre, car ces murs sont déjà un pas en avant dans la volonté d’agrandissement de Paris. Au XIXe siècle, lorsqu’Adolphe Thiers entreprend l’édification d’une nouvelle enceinte, cinquante ans après celle des Fermiers Généraux, Paris entend se doter d’une nouvelle défense contre la menace prussienne grandissante. L’enceinte de Thiers scellera définitivement le sort des murailles parisiennes, et permettra l’agrandissement de la ville de Paris, englobant les communes jusque-là limitrophes. Belleville, Montmartre, La Villette ou encore Passy, en intégrant ces villages dans ses frontières, Paris passe directement de douze à vingt arrondissements, sans réellement demander l’avis de ses nouveaux habitants… Considérées à juste titre comme de véritables frontières, les enceintes successives ont comme but premier la défense de la ville certes, mais également la concentration des pouvoirs. Car si Paris reste encore aujourd’hui le pôle français majeur à tous points de vue, c’est bel et bien car elle a réussi à conserver ses frontières intactes, gardant précieusement ses atouts à l’intérieur de ses murs. 32

Plan de Paris fortifié


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EVOLUTION DES ENCEINTES DE PARIS

1840

1845 Murailles Construction des enceintes de Thiers

1920 Zone tampon Destruction des enceintes de Thiers

1935 Ceinture de bâtiment Construction de la ceinture d’ HBM

1945 Zone tampon

1955 Grands équipements Construction de grands ensembles

1970 Ceinture autoroutière Construction du boulevard périphérique

1990 Bâtiments antibruit Construction de bâtiments écran

Évolution des enceintes de Paris / source TVK

Réquisition de la zone

34 Source TVK


Aujourd’hui, la donne a un peu changé. Paris, cerclée par sa dernière frontière : le boulevard Périphérique, aimerait pousser les murs, mais son attraction a eu un effet tel que les communes voisines ont petit à petit grignoté de leur territoire jusqu’à venir mourir sur cette dernière enceinte. Paris est encerclée. Cette ceinture autoroutière construite dans la deuxième moitié du XXe siècle, en lieu et place de la Zone, et une fois la dernière enceinte démolie, n’est ni plus ni moins que la dernière muraille “protégeant“ Paris du reste du monde.

La capitale a donc décidé au fur et à mesure d’exporter ses pôles à l’extérieur de ses limites : la Défense, Roissy, Orly, Saclay…faisant de ces villes de banlieues des satellites servant l’intérêt de la ville centre. Alors que les concertations pour la mise en oeuvre du Grand Paris sont en action, il apparait clairement que la question de la frontière dans ce territoire doit être posée comme l’enjeu principal. Si la ville de Paris doit se définir par rapport à son centre mais également par rapport à sa périphérie, il va de soi que le “Périf“ doit devenir un lieu de convergence, et non plus un territoire de glissement et de distribution, dirigée pour un seul utilisateur : l’automobiliste. Car à l’heure où l’écologie nous somme de réinventer nos villes, quelle est la place de la voiture ? Les capitales autour du globe se parent de plus en plus contre l’utilisation excessive de la voiture, instaurant des péages urbains, développant les réseaux de transports… Dans ce contexte là, le boulevard Périphérique est voué à disparaitre, redirigeant ses utilisateurs vers l’A86 et les transports en communs, dont l’offre va être largement agrandie avec l’arrivée du Grand Paris Express, réseau dense reliant les départements de la Petite Couronne entre eux et abolissant les trajets banlieue-paris-banlieue. La métropole ne sera jamais viable si elle ne consiste qu’à agrandir l’administration d’une ville-centre, pour la transformer en aire urbaine que personne ne maitrise. Mieux vivre l’espace métropolitain consiste en premier lieu à optimiser ses fonctions nodales, dans le cas présent le noeud si intense géographiquement et si délaissé spatialement : le boulevard périphérique. Il s’agit alors ici de revitaliser un territoire aujourd’hui délaissé par la ville, où le piéton, le terrien n’a plus sa place. Le “Périf“, territoire des possibles ? C’est du moins la réponse que nous souhaitons apporter, tentant de réactiver ce territoire qui n’a cessé de faire office de fracture et qui a fini par chasser le piéton, l’urbain hors de ses terres.

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LE PERIPHERIQUE EN DONNÉES LE PÉRIPH EN DONNÉES

PORTE DE CLIGNANCOURT PORTE DE CHAMPERRET

PORTE ST OUEN

PORTE DAUPHINE

PORTE D’AUBERVIL

PORTE DE CLICHY

PORTE DE PASSY PORTE D’AUTEUIL

PORTE MAILLOT

PORTE DE ST CLOUD

PORTE DE LA CHAPEL

COUPE DU BOULEVARD PERIPHERIQUE POINT DE VUE

PERIPHERIQUE

1KM

INFRASTRUCUTRE

VIADUC

EN TRANCHÉE

A NIVEAU

EN REMBLAI

FONCIER

POLITIQUE DROITE

GAUCHE

COMMUNISTE

150 000v/j 64ug/m3 115db

100 000v/j 59ug/m3 90db

10 000v/j 50ug/m3 45db

CIRCULATION ET NUISSANCES vehicules/jour

TRAFFIC VEHICULES JOURNALIERS

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ug/m3

POLLUTION

decibel

NUISSANCES SONORES

COUVERT


PORTE DE MÉNILMONTANT PORTE DES LILAS

LLIER

PORTE DE PANTIN PORTE DE MONTREUIL

PORTE DE LA VILETTE

LLE

PORTE DE VINCENNES

PORTE DE BAGNOLET

PORTE DE GENTILLY

PORTE DE CHARENTON

PORTE D’ITALIE

PORTE DE VITRY PORTE DE BERCY

SEINE VOIX FERROVIAIRE

PORTE DE VANVES

PORTE D’ORLEANS

PORTE DE VERSAILLES PORTE DE BAS MEUDON

SEINE

SEINE/CANAUX

Source APUR


UNE ZONE ATTRACTIVE

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UN BASSIN D’EMPLOIS

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LEGENDE Grands pôles tertiaires Industries/entrepots Nouvelles operations immobilières Emprises férroviaires Echangeurs Reseau autoroutier Grands axes


DES TYPOLOGIES VARIÉES

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LEGENDE Grand echangeur Grande porte/grand axe Batiment écran Residentiel HBM Residentiel années 60 Residentiel neuf Cimetière Emprise ferrovaire Grand equipement Equipement sportif/public Espace vert/parc


UN PASSAGE DISCONTINU

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Voie interrompue par le peripherique Données Apur

Voie traversant le peripherique Données Apur


UN PARIS SANS LIMITES

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3 EXPLORATION URBAINE

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EXPLORATION URBAINE

L’exploration urbaine comme principe formateur, la marche comme outil d’analyse, tels sont les ingrédients clés de la balade urbaine, analyse sensible de nos villes à même d’offrir des situations de vie qui se répètent pour certaines, deviennent emblématiques pour d’autres, créant un paysage unique propre au territoire arpenté. Si le principe de vivre la ville par la marche a connu une grande renommée dans la deuxième moitié du XXème siècle, sous la houlette du mouvement Situationniste, emmené par Guy Debord, c’est car elle permet de faire un parallèle entre deux échelles : l’urbain, et le terrien. L’infiniment grand, se retrouve ici étudié à la loupe : l’infiniment petit. Essayer de percevoir le plus infime des rouages, pour saisir le fonctionnement du mécanisme dans sa globalité.

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PORTE DE BAGNOLET, LA NOUVELLE FRONTIÈRE Du proche au lointain, et la notion d’hyper building

La porte de Bagnolet et son échangeur monstre, connectant le réseau parisien au grand lointain. Un territoire marqué par cet immense connecteur, inter-échangeur autoroutier reliant le périphérique et l’autoroute A3. Inséré en son centre, un grand Mall. Autour, de grands ensembles mono-fonctionnels. Tours de bureaux, logements sociaux, stades et autres équipements forment un espace comme un micro hub de business et d’activités aux portes de Paris. Mais derrière ce corridor, un autre paysage se dessine, plus résidentiel et hétérogène. Un tissu bien moins dense et divers, une confrontation entre de l’habitat individuel, de l’activité artisanale, des garages, ferraillages, brocantes, friches délaissées… le tout encadré par de grands ensembles construits pendant les années 60. Une vie urbaine très disparate mais faible, un manque de commerces de rues, qui se retrouvent centralisés autour des grandes infrastructures de la porte avec son centre commercial, et quelques places ici et là, où seul un ou deux magasins insufflent un peu d’énergie dans un quartier sans vie. Un centre commercial qui semble être le seul théâtre de vie dans le quartier où sont concentrées toutes les activités, ne parvient toutefois pas à créer une véritable identité. De plus, de part son enclavement et son fonctionnement en presque totale autarcie, il devient un espace singulier et introverti. Un monument de démesure dans un tissu modeste qui se demande bien comment s’en rapprocher. Mais le mastodonte fonctionne comme un ilot solitaire, un iceberg dans un océan qui lui est inconnu. Un hyper centre, vampirisant toutes sources d’activités, comme un hyper building. Le centre commercial et ses annexes créent une emprise si forte qu’il semble parvenir à effacer tout ce qui se passe autour. Comme si tous les regards étaient tournés vers lui, catalyseur d’envie, de passion et de désir délaissant un territoire alentour vidé de tout sens et de vie.

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De plus, le réseau dans lequel il parvient à s’entrelacer devient élément perturbateur, espace de franchissement compliqué pour la proximité et élément de simple passage pour le lointain. Car très peu de passages existent entre les deux rives du périphérique, même si les connexions existent, elles ne restent pas faciles à emprunter. De facto chaque rive s’isole l’une de l’autre, à ceux-ci près que le côté Paris est connecté à tout le centre, alors que côté Bagnolet, c’est un peu le grand Far East. Les gens venant de loin, ne s’arrête pas, et pourquoi faire ? Malgré le centre commercial et ses bureaux, le quartier dans son ensemble leur est inconnu. Un espace congestionné et dense qui se justifie par une action mécanique de contamination de son espace. L’hyper building se nourrit de tout ce qui l’entoure. Sa puissance et son rayonnement sont tel qu’ils attirent comme un aimant, personnes, biens et activités. Un espace mécanique qui consume et consomme son environnement. Un territoire confronté à sa propre démesure qui oublie son lien qui l’unit à son territoire. Une puissance telle qu’il se détache de son environnement pour créer son propre espace temps, comme un vaisseau spatial posé là qui devient le nouveau totem, lieu de culte, temple de plaisir, cathédrale moderne de commerce, nouvelle agora de grande consommation. L’hyper building n’est pas juste envers ses voisins, son territoire sauvagement assimilé pour ses besoins, sa population vassalisée pour son plaisir, et pourquoi devrait-il se justifier ? Ici il a tout pouvoir, celui qui concentre, consomme, consume et redistribue devient le nouveau roi du royaume.

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AUBERVILLIERS, LA BANLIEUE POPULAIRE ÉPARGNÉE Un microcosme aux portes de Paris

Aubervilliers est une cité multipolaire à part entière, autonome dans son art de vivre, aux nombreuses facettes et visages. Ici, les minorités cohabitent et créent une fusion de cultures qui côtoient la rue, les bazars et autres animations de rue. Il n’est pas rare ici de voir les enfants jouer au ballon dans la rue, sous l’œil attentif du grand frère, qui avec sa bande se voit déjà comme le nouveau caïd de la rue. Les plus âgés ont eux déjà assimilés les codes du quartier, ils se retrouvent au PMU du coin pendant que les femmes font leurs courses et papotent au bazar de la rue adjacente. Tout le monde se connaît, la communauté est si forte qu’une personne étrangère au quartier sera immédiatement reconnue. Ici la ville n’a pas encore contaminé ce territoire laissé vierge de toute emprise capitaliste. Le quartier jugé sensible, n’a que très peu de reconnaissance de ses voisins du sud, car la capitale dans son ensemble évolue par elle-même. Les subventions n’arrivent pas, la ville préfère construire ailleurs. Il n’est pas rare de trouver ici et là des bâtiments totalement délabrés, abandonnés, brulés qui n’ont pas trouvé preneur. Ils font partie du paysage, presque monuments singuliers d’un environnement en état de survie permanent. Pourtant l’activité est intense, les habitants arpentent la rue, l’investisse, les magasins, s’ils existent ne sont que l’extension de son échoppe de rue. Les grandes rues et les grands axes sont de grands bazars à ciel ouvert, où chacun trouve son bonheur. Ça hurle, crie, papote dans un perpétuel brouhaha. Ici on troque, négocie, fait du commerce à la sauvette et rien n’est introuvable. Un territoire utilisé de façon si intense, aux richesses innombrables et exotiques, qu’elles nous font presque oublier que nous sommes à Paris. Enfin un sentiment d’appartenir à une ville cosmopolite, aux multiplicités. Un patchwork, véritable melting-pot de cultures différentes.

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Mais toute cette énergie implique aussi de la discorde, les populations restant pour la plupart des exclus de la société parisienne, les tensions sont fortes, dans les mœurs comme dans la rue. Une insécurité permanente règne par ces mêmes caïds de rue qui se livrent à une bataille sans merci pour le contrôle des rues. Les très jeunes suivent ce dessein presque imposé par leur ainés et il est souvent risqué de s’aventurer la nuit dans ses rues. Tout n’est pas noir pour autant, car la communauté n’a pas attendu les beaux discours de la capitale pour prendre conscience de ce problème. Cette même communauté joue sur cette force de cohésion pour empêcher les tempéraments trop débordants. Les pères, mères, grands-pères sont là tels des vigilantis. Les grands-pères, figures sages aux yeux des plus jeunes s’installent sur les bancs et montent la garde, ne tolérant aucun écart. Ainsi la communauté réussit où la ville échoue, celle de sécuriser la rue. Le diagnostic est simple, la ségrégation spatiale formée par le périphérique est un facteur délimitant dans l’optique de réconcilier un jour la ville et sa banlieue. Les discriminations elles persistent, l’exclusion est plus forte qu’auparavant mais peu importe, car si Paris semble leur tourner le dos, les habitants se plaisent à penser qu’ils sont un des dernier bastions à ne pas être tombé sous le poids de l’ogre parisien. Aubervilliers reste un bouillon de culture, faisant les gros titres des journaux pour ses travers mais dans les yeux des habitants, les difficultés persistent, et sans l’aide du grand voisin, le quartier restera un théâtre d’expérimentation à ciel ouvert, délaissé de toute intrusion de la capitale préservant ses richesses socio-culturelles et non matérielles.

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MASSÉNA, UN NOUVEL ELDORADO URBAIN ? Réinventer l’îlot moderne avec toutes ses déconvenues

Le tout jeune quartier Masséna se cherche encore, mais déjà il inspire, comme il dégoute. Un projet qui dès le début s’était attribué les gros titres, on en attendait beaucoup, grand sauveur pour les uns, échec avant l’heure pour les autres. Un parc central qui doit pouvoir capter toute la vie des ilots dans un espace public comme on aime les appeler, sorte de friche végétale où les gens sont libres de s’installer sur l’herbe, où les divers espaces intégrés à une nature qui semble sauvage mais disposée de façon si précise que l’illusion tombe à plat. Un parc se voit enfermé entre les bâtiments, formant des remparts à la lumière, plongeant le parc dès 16h dans une ombre permanente. La proximité des ilots rend l’espace presque étouffant, là où l’on aurait aimé voir des points de vue plus intéressants, voir un percement vers la Seine. Même si le tout jeune complexe de Val de Seine, crée ce prolongement en permettant cette connexion, celle-ci est noyée dans un décor ou les bâtiments et les arbres obstruent toute vision claire et lointaine. Un micro quartier où chaque ilot est laissé libre à l’imagination des architectes. Parfois il y a du bon, parfois du très mauvais. Une diversité architecturale de mauvais goût, un environnement saturé d’éléments d’ornementations, formes, et autres outils d’architecture moderne représentée ici dans si peu d’espace que le décor tourne vite à l’overdose. Des bâtiments pluriels qui ne dialoguent pas entre eux, se rejettent même parfois dans l’idée, bref, rien n’est sans conséquence et ici la discontinuité est poussée à l’extrême, l’observateur est perdu, frustré, ne comprend pas l’environnement qu’il arpente. Un peu de cohésion n’aurait pas empêché l’esprit créatif des architectes de s’exprimer mais du moins aurait participé à créer une meilleure harmonie. Revenons à l’essence du quartier, malgré les déconvenues architecturales, la valorisation apportée par le campus de front de Seine est pour le moins bénéfique. Un campus qui offre des locaux d’une grande qualité, permet d’apporter une vie continue dans la quartier, les étudiants, investissent le territoire, les jardins, les commerces et ainsi permet de créer un catalyseur fort dans l’installation de nouveaux commerces. Mais la grande question sera de comprendre comment les habitants et les étudiants vont pouvoir cohabiter ensemble. 58


Les étudiants présents en nombre auraient tendance à investir massivement les espaces publics ne laissant aux habitants qu’un sentiment d’impuissance que de voir cet envahisseur prendre possession de leur quartier. Les familles ou les couples cherchant la tranquillité et le calme vont indubitablement se trouver en position de faiblesse, car qui dit étudiant, dit remue-ménage. Une possible collision est à prévoir entre les deux mondes, mais si celle-ci n’arrive pas alors peut-être serons-nous en présence d’un exemple réussi de mixité potentiellement reproductible dans d’autres quartiers. Masséna est pour le moment un jeune quartier et il est difficile de dresser un portrait exhaustif. Mais il est clair que celui-ci est déjà mis à rude épreuve, si les opérations architecturales sont plutôt à mettre dans la case de la médiocrité qu’aucun quartier moderne n’est encore parvenu à surmonter, il sera un autre enjeu bien plus important de voir si le projet tient la route et est capable d’insuffler une dynamique sociale forte, et surtout pérenne.

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BERCY, L’ÉCHANGEUR MONSTRE Les méandres infernaux d’un territoire abandonné à la voiture

Une brume épaisse, suffocante, grasse au goût de pétrole, un bruit sourd vrombissant, une architecture grise et austère. L’architecture du réseau, celui de la voiture, espace totalement dénué de vie. L’homme est remplacé par la machine, dans un cadre autoritaire et froid, un entremêlement de voies, toutes menant vers l’inconnu. Dénaturé de vie, cannibalisé par le bitume, implacablement roi de ce nouveau paysage magnétique, monument de vitesse, créant sa propre temporalité. L’échangeur monstre produit une nouvelle urbanité, un paysage de friches s’installant autour de celui-ci, espace intermédiaire où rien ne se passe. L’échangeur est une pieuvre, dont les tentacules partant dans tous les sens se posent en éléments perturbateurs de la tranquillité et la continuité urbaine. Il est le rejeton mal aimé de cette ville qui ne saurait le voir et pourtant vital à sa survie. Une artère irriguant le corps de la ville, si essentiel que sa disparition entrainerait la mort de son hôte. Une résultante perverse qui contribue à créer des territoires de non-lieux, carrefours des mondes, ne faisant que découper le flux massif et unique en une multitude de flux plus petits aux directions différentes. Et l’enjeu est tel, que les tensions sur le réseau poussent chaque jour tout le système vers son point de rupture. Un trafic presque ininterrompu, surchargé, un trafic ne faisant que grossir, alors que l’objet lui-même vieillissant n’a pas la possibilité de s’étendre, figé dans sa rigidité, voyant sa mort se rapprocher. Un espace ou le piéton est désorienté, tant qu’il n’arrive pas à trouver une brèche dans le système. Passer d’une rive à l’autre est un jeu presque impossible, des espaces résiduels sans apparentes continuités, des ilots au milieu des voies, peuplés par quelques arbres décoratifs mais sans réel attribut. Un passage de temps à autre n’aboutit que vers un autre no man’s land, territoire en dégénérescence, où la ville semble pourtant à portée de vue mais n’a pas osé coloniser cet espace.

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Et pourtant dans un apparent chaos, aux voies et bretelles partant dans tout les sens, dans un son perpétuel de klaxons, une lecture pragmatique est belle et bien à l’œuvre. Un paysage sauvagement conquit par l’automobile certes, mais optimisé jusque que dans son épaisseur. Une morphologie élaborée dans son détail, échafaudée par des esprits cherchant la perfection, la fluidité salvatrice mais qui n’est pas à toute épreuve. On ne peut cependant dénigrer cette intelligence de forme, presque hypnotique, un jeu harmonieux de courbes, de niveaux qui crée une image forte et puissante, cultivant un certain imaginaire. Un espace complexe évoluant en trois dimensions, décuplant ainsi les fantasmes et les possibilités, ainsi décuplées et amplifiées. Un espace au langage unique mais multi facettes, selon la perception de l’individu, à la fois effrayant et énigmatique. Véritable ouvrage d’art, l’échangeur peut être perçu comme un monument de vitesse, grand connecteur du lointain dans un souci d’irriguer la ville pour qu’elle ne manque jamais de rien, ses bienfaits se transcrivant bien au-delà de ses frontières. Mais ses alentours n’ont que faire de ce mastodonte qui leur a été imposé. Une cicatrice béante pourrissant son territoire, n’attirant que le néant et le dégoût. Un territoire stigmatisé par l’infrastructure, comme des terres salies, personne ne voulant s’installer en lisière de ce désastre de quartier.

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MALAKOFF ET MONTROUGE, UN TERRITOIRE APAISÉ Les territoires pavillonnaires du Sud

Quand on se promène dans le sud de Paris et plus particulièrement dans des banlieues telles que Montrouge ou Malakoff, il est facile de remarquer que le paysage se transforme pour adopter une taille plus modeste, la ville moyenne aux portes de Paris. Passés les grands axes et ses grands bâtiments Haussmanniens ou plus modernes, nous découvrons un décor de petites allées pavées, fleuries ou se côtoient petites maisons et leurs jardins personnels. Un tissu entre ilots en barres plutôt bien entretenues et petites maisons sur cour ou jardin qui nous font oublier que nous sommes à Paris. Des quartiers résidentiels pour catégories aisées aux portes de la ville. Un silence presque permanent règne, loin du tumulte de la grande ville. Les quelques places rencontrées sont des lieux de détente pour les plus âgés qui s’assoient volontiers et regardent passer les plus jeunes. Les jeunes eux investissent les rues, jouent, crient, une contre-allée devient le temps d’une après-midi un terrain de foot où se dispute le titre de meilleure équipe du quartier. Un mélange de vie de famille et de vie tout court dans une atmosphère de profonde sérénité. Ici les générations cohabitent de façon très simple sans collisions, les jeunes reconnaissent les vertus de leur banlieue même si le soir c’est l’éternelle question posée aux parents de savoir si ‘ils auront le sésame, les clés de la voiture familiale pour aller faire la fête dans le centre. Le centre attire par la multitude d’activités mais le plaisir de rester dans la banlieue paisible et tranquille est un luxe que même les jeunes comprennent, car trouver un territoire avec cette qualité de vie aux portes de la ville est pour le moins dure voire impossible à trouver dans la ville moderne. Bien sûr des qualités pareilles aussi proches sont des facteurs qui attirent les plus aisés, recherchant cette même qualité de vie, et si le quartier semble être tiré par le haut, on ne peut le cataloguer comme quartier bourgeois. Car les gens sont là depuis plusieurs générations et créent de facto un contre-pouvoir très fort à la gentrification tous azimuts. Si certains ilots s’embourgeoisent, la communauté déjà en place n’est pas prête à laisser les clés du château sans un dernier combat. La communauté se rassemble, prenant un malin plaisir à faire capoter les projets de constructions pour nouveaux riches. Un immeuble de grand standing, mais pourquoi faire ? Il nous boucherait la vue sur le parc, et qu’est ce que cela apporterait au quartier à part faire augmenter les prix tout autour. 64


Des petites commerces ici et là permettent aux résidents de se procurer le nécessaire mais pas plus, ici on ne cherche pas le dernier Apple store mais la simplicité. Un petit bistro, une épicerie, une boulangerie, une charcuterie et un salon de coiffure feront l’affaire. En soit, la ville se régit comme un petit village tranquille. Il est même très facile de se balader, de passages en petits chemins sans croiser personne, chose qui dans Paris est impossible à moins qu’il soit 4h du matin. Ce sentiment de tranquillité est pour le moins reposant, on parvient même à entendre les oiseaux chanter, chose pour le moins étrange pour un citadin plutôt habitué à entendre les sirènes et autres klaxons beaucoup trop intrusifs. Les banlieues sud semblent se détacher de Paris et non l’inverse, phénomène intriguant car bien au contraire les banlieues tentent de se rapprocher de la ville. Mais en cela beaucoup de citoyens du centre cherchant autre chose que la ville dense et omniprésente et oppressante, tentent de s’évader tout en voulant rester près de leur ville chérie. Alors la banlieue sud c’est l’alternative de la ville diluée, aérée, et tranquille, tout ce que Paris n’est pas et ne pourra jamais être.

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CLICHY ET SAINT OUEN, UN VILLAGE EN VILLE Un besoin de communauté dans une ville étendue

Nous nous rapprochons du périphérique, et là le constat est prenant. A cet endroit ce dernier est surélevé. La longueur de la portion à traverser jumelée avec l’apparente pesanteur liée à la faible hauteur du passage nous donne une sensation de lourdeur telle que cela rend le passage d’une dizaine de secondes extrêmement oppressant. L’espace devient une véritable zone tampon, comme un sas entre les deux mondes. Passage qui ne peut pas se vivre comme une transition douce mais bel et bien comme un sentiment de rupture. D’un coté la frénésie des Batignolles (quoique arrêtée le temps du weekend), des constructions et de l’urbanisme tous azimuts, de l’autre un autre espace temps, celui de la sensation d’être dans une autre ville, plus petite, plus tranquille, une petite ville de taille moyenne où il fait bon vivre, loin de la grande ville bruyante et oppressante. Un constat assez fort, passé le périphérique, le bruit de la ville s’arrête, les oiseaux chantent, les gens sourient. Une architecture qui devient plus diverse. Le Haussmann n’est plus omniprésent mais plutôt acteur parmi tant d’autres. Un autre constat encore plus fort est celui de la densité, les bâtiments sont moins hauts, la variété de formes et même hauteurs rompt avec l’homogénéité que Paris veut soumette à son urbanisme et en cela l’atmosphère se détend, le paysage urbain s’aère le rendant plus sympathique. Une vie qui semble différente de celle du centre, alors que nous en sommes tout proche. C’est comme si la frénésie de Paris s’était arrêtée au périphérique, devenant alors une barrière protégeant ce “village de plénitude“ du grand voisin malveillant. Un quartier qui se revendique, presque autonome dans son art de vivre, comme l’irréductible village Gaulois dans une Gaule conquise. Un quartier populaire qui se veut rester populaire. Face à la gentrification du tout Paris, sa communauté entend résister et garder un environnement proche de ce que l’on pourrait trouver dans une ville moyenne de campagne. Une ville où tout le monde semble se connaître, où la vie de quartier devient le moteur principal de celle-ci. Une chose qui n’est plus envisageable dans le centre ou les flux sont tellement divers et diffus que l’individu semble se perdre dans un océan d’inconnu. La notion de voisinage semble être préservée ici, et la communauté n’en est que renforcée. 68


Ces micros quartiers au sens de l’agglomération dans son ensemble semblent garder une identité forte, que l’homogénéisation de Paris et sa grande métropole tente de détruire. La ville de Paris n’est ainsi pas monochrome comme on pourrait le penser, mais plutôt un grand réservoir de multiples incidences et communautés qui se sont regroupées, formées, installées pour diverses contraintes, qu’elles soient foncières, historiques ou politiques. Ces îles forment un archipel de territoires à appréhender, de façon à créer une image de Paris non pas à une mais à plusieurs facettes. En cela toute la diversité que peut offrir la ville se retrouve dans ces microcosmes, qui deviennent de véritables bouillons de culture et d’échange. Une ville aujourd’hui ne peut être vue ou représentée comme un objet unique ou l’individu se confronte à sa loi, mais plutôt comme un patchwork à l’intérieur duquel se passent de multiples interactions, et représentations de la diversité que chaque groupe apporte. Paris veut se bâtir comme ville monde, mais qu’est-ce que la ville monde si ce n’est sa capacité à absorber et retranscrire ses diversités pour en faire sa force.

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PORTE MAILLOT, L’ESPACE PUBLIC SERAIT-IL MORT ? Un territoire déshumanisé et hostile

Un territoire pour le moins particulier. Espace gigantesque qui ne peut être apprivoisé. Un espace où le domaine public est mort, sans vie, impropre à toute trace ou forme d’humanité. En son centre régit comme un temple, un artéfact, nouveau monument de commerce et de consommation faisant sa loi. Un sentiment d’impuissance dans cet espace si vaste qui n’est pas conçu a taille humaine. La Porte Maillot n’est que la résultante de la machine de Paris. Où la voiture impose par sa circulation un code urbain sans foi ni loi. En son centre tel un phare dans un océan de voitures, le centre commercial, Palais des congrès est accueilli comme le grand libérateur, concentrant loisirs, commerces, bureaux, hôtel, discothèque comme un gigantesque parc d’attraction pour adultes. Emmuré derrière de gigantesques façades brutalistes, il est pour le moins difficile de trouver une entrée. Une architecture fonctionnelle et fonctionnaliste bien loin d’une architecture subtile ou sensible. Le centre commercial/palais des congrès dans son approche fonctionnelle enlève le sens des réalités, en imposant aux individus le besoin de s’adapter à ce modèle d’urbanisme au service d’enjeux économiques et globaux. Le bâtiment répond à toute une panoplie de besoins techniques et enjeux mais en oublie son but. L’individu n’a plus une place prépondérante mais subit la volonté spatiale de l’architecture fonctionnelle. Il ne peut plus s’approprier l’espace de façon spontanée mais devient acteur passif à une architecture lui dictant ses droits. L’architecture devient alors un outil ou un artefact de représentation, un symbole de pouvoir sur la masse, optimisé et politisé par les têtes pensantes. Une icône urbaine de subversion où le droit des individus est rendu inopérant. Une dystopie déconnectée de toute sensibilité citoyenne. Une allure de bunker moderne qui n’est pas la résultante d’un besoin évident mais plutôt un postulat de la ville dans son ensemble de positionner un méga Mall à sa périphérie sans se soucier des besoins inhérents des localités proches. Dans cette immense intersection autoroutière difficile et inhospitalière pour le piéton, le Mall est une solution de facilité dans la création d’un équipement qui puisse se soustraire à son environnement pas vraiment glamour pour la ville et ses citoyens. 70


Le centre commercial se pose comme nouvel espace public, où l’argent est roi, où les citoyens n’ont pas d’autres choix que de consommer le divertissement. Il y a déjà 20ans, Mike Davis et Micheal Sorkin avait déjà prédit la fin de l’espace public. A cette époque déjà de l’autre côté de l’Atlantique, nous voyions les effets dévastateurs de la transformation d’un espace public ouvert vers un espace de consommation fermé. Ces espaces monumentaux comme la Porte Maillot ne fait que renforcer cette position d’île isolée au sein de son territoire. Une fracture immense tant elle est brutale entre les deux côtés du périphérique. C’est une nouvelle architecture, où l’idée d’urbanisme en décalage avec son territoire. Une architecture négative qui déteint sur la communauté alentours, manipulant ses habitants. Un paysage hostile, de béton brut, gris, froid et monotone. Le Méga Mall , une enclave au sein même de la ville. Un territoire où l’espace public jadis plein de vie et d’interaction inopinées devient privatisé et institutionnalisé comme un faux décor de plaisir superficiel et artificiel le tout dans un espace policé et régulé.

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PARC DE LA VILLETTE , LA GRILLE À LA CONQUÊTE DU TERRITOIRE Réussite locale, et rêve d’expansion inachevée

En libérant l’espace public, la nature et la culture cohabitent dans un plan libre, laissant libre cours à la réorganisation de l’espace, l’espace optimal, optimisable et permutable, offrant une flexibilité maximum pour s’adapter aux changements et aux différents besoins des multiples activités. Potentiel illimité de la grille qui de par sa simplicité de mise en œuvre, offre la possibilité de proliférer en dehors de ses limites. Le parc de la Villette imaginé par Bernard Tschumi se voulait n’être qu’une première étape, comme expérience visant a être étendue, dépassant les bordure du parc, proliférant dans Paris, comme nouvel urbanisme extensible peu contraignant mais qui resta un rêve ne dépassant pas les frontières du parc. Néanmoins les qualités du parc sont immenses, très fréquenté, il réussit là où la démarche la plus traditionnelle a échoué. Rendre l’espace public riche par le minimum d’aménagement. Le parc s’agence et se modifie au fur et à mesure des événements venant altérer son espace. Si la structure du parc, son infrastructure primaire ne change pas, la disposition des “folies“ sur cette grilles ont la possibilité d’accueillir des activités diverses et leur emprise minimale ne nuit pas l’occupation du parc. Un caractère singulier qui fait aujourd’hui du parc de la Villette un exemple d’aménagement public qui parvient a mêler nature et hasards. Cependant, si le parc s’ouvre harmonieusement sur le Paris intra muros (bordure Sud et Ouest du parc), le Nord et l’Est bordent le boulevard périphérique qui crée une frontière presque infranchissable. Le passage rendu difficile, parfois dangereux, contribue a exercer un sentiment de rejet, presque intentionnel. Les quartiers en dehors sont ainsi exclus, le parc leur étant fermé. Il existe cependant une ouverture vers le nord permise par la cité des sciences. L’autoroute se surélève et le passage est rendu possible, toutefois celui-ci est long et pour le moins délimitant. Traverser cet espace revient à passer de trottoirs en trottoirs, coupant des artères très fréquentées, pas de passages piétons ni même de feux rendent le parcours du piéton compliqué et complexe. Une fois ce territoire traversé, on arrive en embuscade, se dressant devant nous un véritable mur, bâtiment en longueur qui nous coupe la route, Il faut alors traverser la cité des science pour parvenir enfin a entrer dans le parc.

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Le parc s’intègre parfaitement avec ses voisins de l’intérieur, mais tente de se prémunir derrière cette grande enceinte qu’est le périphérique, des incursions du nord. Les quartiers au nord de la Villette comme Aubervilliers, très populaires, sont délibérément exclus même si existent ces fameuses grandes portes, faut-il encore les trouver en premier lieu. Le parc de la Villette, et ses promesses d’espace libéré, aux frontières diluées, est pourtant confronté a une réalité brutale, celle d’un espace au final piégé par son environnement. La frontière physique du boulevard périphérique qui met entre parenthèse les espoirs d’une explosion de la bordure, ou l’expansion de la grille, plan libérateur d’un nouvel urbanisme désinhibé profite a l’ouverture totale de l’espace public voulue par les planificateurs. Au final le parc profite principalement au quartier du 19ème qui par la même occasion voit son pouvoir attractif augmenter. Débordant sur la proche bordure de Pantin bénéficiant d’un passage facile, ils forment ensemble un nouveau point d‘expansion des classes plus aisées au nord. Les derniers bastions plus modestes du Nord, grâce principalement à l’attrait du parc sont tout simplement en train de disparaître.

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PARC DES EXPOSITIONS, ZONE GRISE Un sanctuaire de suppression spatiale

Territoire fermé, rompant toute liaison entre le 14ème et Malakoff. Un espace inconnu peuplé de machines, d’entrepôts, un parc des expos que l’on n’appréhende que de l’intérieur. Comme si le monde extérieur n’existait plus, supprimé au profit d’un espace totalement hermétique et climatisé. Ses contours bien définis, l’angularité de son architecture comme monument étendu, que l’on ne peut appréhender d’un simple coup d’œil, qui nous dépasse et n’est certainement pas conçu à taille humaine. Un bloc entier pouvant contenir une petite ville est purement réapproprié, une brèche béante dans le tissu qu’il faut contourner sans vraiment savoir ce qu’il se cache derrière. Un espace si vaste et pourtant emplit d’un vide profond où sa propre existence en devient surprenante. Un espace qui vit de façon discontinue dans une temporalité limitée. Le reste du temps le silence est roi, un territoire figé dans l’attente perpétuelle du prochain grand rassemblement. Une architecture sans architectes, celle de la fonction, du programme unique et totalement autonome, peuplée de parkings, enseignes publicitaires et bâtiments uniformes dont un simple nom de code permet de le différencier de son voisin, parfaite réplique dans une grande matrice homogène. Un urbanisme commercial qui célèbre la ville organisationnelle et autogérée. Une sorte de new Babylone où le concept d’un vaste espace de service en intérieur par une concentration massive dans ce centre gigantesque, situé à l’extérieur de l’espace de la vie quotidienne. Un espace tout simplement exproprié de son territoire de naissance, complétant un enjeu de sectorisation, un grand équipement profitant à la ville plus large mais pas à sa proximité, ne faisant que fragmenter le territoire proche.

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Un sanctuaire qui n’est pas la création du peuple, mais l’œuvre des politiques d’aménagement de l’encombrement. Un espace trop vaste et étendu pour se trouver dans le centre, mais pas assez autonome pour se trouver trop loin. Un vaste projet qui par son emprise est de facto avaleur de territoire, dérangeant pour les habitants qui y voient plus de contraintes que de bénéfices. L’implantation autoritaire de ce territoire sortant de l’ordinaire du quotidien, contraint à une cohabitation forcée. D’un côté un quartier voulant accueillir un équipement des plus hermétique contribuant à déconnecter le quartier à la ville centre. De l’autre, une géographie de dissociation et de rupture qui contribue à fataliser la ville dans sa forme la plus brutale. Espace tampon, comme une fortification empêchant l’envahisseur de rentrer dans la ville citadelle, production d’un urbanisme moderne de découpage de territoire et devient un parasite du bien être local.

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VINCENNES, LE VILLAGE BOURGEOIS Un eldorado pour élites

Le quartier de Vincennes c’est avant tout une vie tournée autour de son parc. Le grand parc de Vincennes est un exemple d’expression végétale au cœur de l’urbain. Un temple de la biodiversité, ici la nature est vierge presque sauvage, un parti-pris de laisser la nature faire. Aucune règle, l’homme laisse libre cours et le parc devient une véritable forêt comme on pourrait facilement en trouver loin de la ville dans la campagne profonde où l’homme et sa ville sont loin très loin. Un paysage naturel, territoire non artificiel, le parc est une véritable bouffée d’oxygène et d’évasion pour quiconque le temps d’un après-midi voudrait s’échapper de la ville tumultueuse. Les territoires en périphérie bénéficient ainsi d’un poumon vert presque inespéré, mais dans un monde où le capital est roi, être proche de la nature à un prix. Un privilège, presque un droit à la nature si l’on peut dire car dans la ville de plus en plus dense et étendue, la nature devient une denrée rare presque inestimable aux yeux de ses habitants. Ainsi Vincennes ne déroge pas à la règle, quartiers des plus aisés, il n’est pas rare de voir en se promenant un dimanche, les grosses berlines de sortie, les maisons de maitres et autres hôtels particuliers accueillant le brunch dominicale de la famille, les enfants racontant leurs derniers voyages en terres lointaines, les parents comparant leurs exploits professionnels. Une opulence certes, mais ne tombant pas dans les excès. Car même si la réussite s’affiche sur le fronton des grandes bâtisses aux façades fraîchement rajeunies, le silence est d’or. Riche mais discret et ne pas attirer trop l’attention, cela pourrait être la devise du quartier. Mais phénomène rare, les personnalités se dévoilent, les habitudes du jogging dans le parc le week-end et autres interactions avec le parc tout proche font sortir de l’ombre cette catégorie de gens qui dans Paris seraient enfermés dans leur bulle. Peut-être que ce rattachement à la terre grâce au parc fait que les gens sortent volontiers et se rencontrent.

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C’est pourquoi il est important de voir Vincennes non pas comme un quartier mais comme un village bourgeois ; un village car une communauté s’est formée aux abords de ce parc, une communauté qui n’est pas aussi vivante que leurs sœurs populaires du nord mais qui a le mérite d’être là. Le sentiment de se sentir de Vincennes et non de Paris, crée une identité, celle de cette petite enclave aisée entre le parc d’un côté et la voie ferrée de l’autre. Un territoire aux frontières clairement délimitées qui ne pose pas de problème aux habitants qui se voient presque protégés, à l’abri derrière ces frontières modernes. En définitive Paris intra-muros n’a qu’une frontière très étroite avec Vincennes qui s’étire sur une bande le long du parc de même nom, et profite d’un isolement même si il reste toujours relatif, mais assez important pour permettre la création d’un petit eldorado, pour une population bourgeoise qui ne recherche pas la reconnaissance mais la tranquillité à l’abri des regards indiscrets. Le village bourgeois vit en presque autonomie, ne rejetant pas la ville toute proche mais ne semblant pas non plus l’accueillir à bras ouvert. Une situation de statu quo, où chacun s’observe de loin dans une relation amicale se gardant bien de franchir la ligne.

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4 MEMBRANE / DENSIFICATION

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MEMBRANE / DENSIFICATION

De tout temps, Paris a cherché à s’accroitre, englobant les territoires limitrophes pour les placer sous sa juridiction, au détriment des identités déjà en place. Le Grand Paris s’inscrirait-il dans cette volonté ? L’étalement urbain n’est selon nous pas viable pour ce cas précis, il est donc temps de cesser de développer Paris avec une vision passéiste de l’urbanisation, basée sur l’utilisation de la voiture. Renzo Piano le soulignait dans son ouvrage La Désobéissance de l’Architecte : “l’explosion des centres a montré ses limites, il est temps d’imploser nos villes“.

La ville traditionnelle

L’explosion des centres

Implosion des villes

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Étapes 0 : deux milieux séparés

Étapes 1 : tentative de lien

Étapes 2 : membrane forte

Étapes 3 : homéostasie 87


Idéalement, l’objectif du Grand Paris serait de réconcilier Paris et sa périphérie. Pour cela, il faut tout d’abord réussir à penser la ville autrement, tenter de reconquérir l’entre-deux. La réactivation du territoire suppose d’abandonner l’espace de séparation, et de renforcer le caractère du lieu. Le “Périph“ comme territoire des possibles, offrant la page blanche nécessaire afin de proposer une nouvelle vision de la Métropole, une vision novatrice de la ville. En faisant le pari d’une zone attractive et de transition, le Grand Paris se retrouve unifié dans le jeu de la densification. Cette union ne sera possible que si l’on réussit à observer le “Périph“ dans une vision holistique, en tant qu’objet unique, afin de l’appréhender dans sa totalité et d’en comprendre les multiples aspects qui le caractérisent. Ainsi, il faudra se confronter à l’abandon de l’outil de planification urbaine par les autorités, car les métropoles ont au fil du temps laissé libre cours au marché privé, perdant de vue l’intérêt commun, et accentuant ainsi de fait la perte d’identité de nos villes. Par le biais de la densification, nous venons insérer une membrane dans ce vide urbain, une nouvelle interface entre Paris et ses communes limitrophes.

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État cellulaire faible

Communication intercellulaire

Homeostasie générale

Si l’on considère Paris et les villes alentours comme des cellules distinctes, perdues au sein de l’espace cellulaire, ici la Métropole, la membrane est alors nécessaire au bon fonctionnement de l’homéostasie, phénomène permettant de conserver l’équilibre au sein d’un système, et ce, en assurant la translation entre les deux milieux qui la jouxtent. C’est cette régulation, ce lien entre les deux territoires qui est essentiel au bon développement de l’ensemble. Si la membrane peut paraitre limitante au premier abord, elle est en réalité une barrière indispensable pour le bien être des deux milieux qu’elle sépare, puisqu’elle sert à la communication intracellulaire, et à l’adhérence des cellules entre elles et dans le milieu extracellulaire. La fluidité membranaire ainsi mise en place, la relation directe entre Paris et sa banlieue ne s’en trouve plus coupée par un vide, au contraire, cet entre-deux offre un visage de plus, enrichissant l’identité multiple de la métropole. Notre proposition se nomme Parapolis, provenant du grec para, à côté de, et polis, cité. Parapolis se pose en marge de la ville, et entend la réinventer. 89


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5 GÉOMÉTRIES / ANNEAU

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GÉOMÉTRIES / ANNEAU

Investir les 35 kilomètres qui constituent le boulevard Périphérique nécessite obligatoirement d’établir des principes formels, induisant de fait une manière de coloniser cet espace. La densification par la construction d’une membrane ne peut être envisageable que si nous percevons cet espace dans sa totalité, instaurant ainsi un système de valeur qui s’appliquerait à l’ensemble, et non plus à des parcelles isolées. Il nous faut abandonner ce principe qui consiste à répondre à une problématique donnée par une réponse ultra localisée. Le périphérique se révèle certes sous des aspects multiples, mais pose dans l’ensemble une même question, celle de la limite, de la frontière. C’est cet aspect que nous choisissons d’adresser, représentant pour nous l’enjeu majeur d’une création viable d’un Grand Paris uni. Mais alors comment, sous quelle forme densifier le “Périf“ ? Le projet s’inscrit dans un champ lexical naturel, abordant ainsi le thème de la membrane et de l’homéostasie pour qualifier les réponses envisagées. C’est dans cette direction que nous choisissons de poursuivre la recherche, prenant comme inspiration les phénomènes naturels, de l’infiniment petit à l’infiniment grand. Par le biais de la morphogénèse, nous venons proposer différentes manières de coloniser l’espace urbain que constitue le boulevard Périphérique. Nous choisissons de développer cinq thématiques d’expérimentation : la cellule, l’enveloppe, le végétal, le stellaire et le mécanique. Chacune développant son propre langage. Nous nous sommes ensuite attelés à les retranscrire formellement, les transposant tous à notre contexte de la membrane circulaire autour de Paris. En résultent vingt illustrations de ce concept, non ordonnées dans leur répartition, mais développant chacune des caractéristiques spécifiques d’occupation spatiale. L’objectif de cette étape du processus est de comprendre et d’appréhender le potentiel géométrique de la membrane, de cette implantation circulaire entre Paris et sa banlieue. En quoi souligner le tracé du boulevard Périphérique peut amener à créer du lien entre les deux parties qu’il sépare ? Car c’est bel et bien de cet enjeu que nous parlons : créer du lien. Il ne s’agit pas ici de faire disparaitre une frontière, mais au contraire de revendiquer cette limite comme bénéfique et créatrice de liaisons. 92


Ces illustrations finissent par former, au travers des cinq thématiques, deux catégories spatiales majeures. La famille des linéaires d’un côté, appuyant intensément la ligne du “Périf“ dans une continuité importante. De l’autre la famille des polaires, se perméabilisant pour venir créer des points d’intensité censés supporter le poids du lien. Au total, vingt “géométries“, vingt tentatives de coloniser cet espace de transition, chacune apportant une solution différente. La membrane pour coloniser le boulevard périphérique, et transformer cet espace de transition en véritable coeur de la métropole du Grand Paris.

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NODALE

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COLLIER

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NEURONALE

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POLYCENTRIQUE HIÉRARCHISÉ

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POLYCENTRIQUE DILUÉE

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PARASITAIRE

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ENVELOPPANT

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CELLULAIRE

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ALVÉOLAIRE

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AGGLOMÉRÉE

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CONTINUE

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DISCONTINUE

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SEQUENTIELLE

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STRATIFIÉE

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EXPANSIVE

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INTERFACE

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ÉPI

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RAMIFIÉE

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FRACTALE

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TRAME

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6 LOGEMENT / TYPOLOGIES

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LOGEMENTS / TYPOLOGIES

A partir de ces vingt illustrations d’une possible colonisation de l’espace du “Périf“, la question de la forme de la membrane est posée. De la plus diffuse à la plus précise, chacune s’évertue à répondre aux enjeux que posent la problématique de l’homéostasie. Si l’enjeu principal de ce territoire, comme il est admis précédemment, est la densification de l’entre-deux, il va de soi que la réponse la plus séductrice est celle de l’anneau continu, de par son potentiel formel et spatial. Cependant, afin de ne pas recréer stricto sensu une frontière, il nous faudra redéfinir la portée du cercle. Sa ligne directrice se doit de prendre forme, et de devenir un véritable champ de résistance, coincé entre deux tissus distincts. Mais alors pour quel usage ? Quel fonction pourrait abriter cet anneau ? Dans un contexte de métropole où la course à l’offre la plus riche et la plus variée possible est constante, construisant ici et là de nouveaux pôles culturels, académiques ou économiques, il reste un domaine malgré tout en retrait. Le logement. Pourtant, le manque de logement n’est pas pour ainsi dire un problème récent. L’habitat social est présent en France depuis plus de 70 ans, et l’Etat semble mener une politique forte à ce sujet depuis quelques années. Preuve en est l’objectif fixé par le Grand Paris de créer pas moins de 70 000 nouveaux logements par an - et ce sur 25 ans. Tout semble rose, donc. Mais à y regarder de plus près, on s’aperçoit qu’il n’en est rien. La demande est telle que ce nombre n’est déjà pas suffisant pour réussir à rattraper le retard accumulé tout au long de ces années de disette. A cela s’ajoutent un nombre incalculables de réglementations et autres normes qui viennent tuer dans l’oeuf toute portée créatrice des architectes. Sous couvert de développement durable, l’Etat court-circuite sa propre bonne volonté. Et poursuit sur sa lancée de gentrifier Paris intramuros. Car il est un phénomène social qu’on ne peut écarter lorsqu’on commence à questionner le Grand Paris, l’exil des pauvres. Entamé sous les travaux d’Haussmann, cet embourgeoisement de la ville centre continue son avancée, grignotant petit à petit les territoires populaires de la capitale, les transformant tout d’abord en enclaves, avant de les avaler entièrement et de les digérer en dehors de son “mur“.

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C’est cette gentrification contemporaine qui soulève des questions, de communauté, de socialité, et d’un paradigme urbain basé sur le vivre ensemble. Mais quel ensemble ? S’agit-il de religions, d’opinions politiques, de revenus, d’origines ? Si on prône la gentrification comme instigateur de mixité en milieu urbain, il apparait qu’elle n’agit que dans un sens, apportant son lot de classes moyennes dans les quartiers populaires, afin de les “revitaliser“. Si une gentrification passive, apportée principalement par les flux d’étudiants cherchant à se loger à bas prix dans les quartiers populaires, apporte réellement une plus-value de mixité, il va de soi qu’une gentrification forcée ne peut être bénéfique. Mais désirons-nous réellement cette mixité ? D’un côté les quartiers bourgeois, enclave urbaine par excellence, prouvent le contraire depuis des siècles. De l’autre, les quartiers populaires, qui s’ils ne se regroupent pas par choix, finissent par former une communauté soudée, et un contre pouvoir puissant. Faut-il pour autant créer des ghettos ? L’anneau de logement n’a de sens que s’il est posé comme un objet politique, revendicateur d’une attitude forte, en dehors des pensées actuelles. Il se pose donc comme un projet critique. Critique d’une société à la dérive. Il nous faut pour cela nous détacher de cet anneau, et de la fascination que l’objet peut revendiquer par sa force, sa pureté. Pour le remettre en question, nous choisissons d’aller dans sa direction radicalement, jusqu’à l’épuisement. Consommer l’anneau pour en tirer les conséquences, mais également ses conditions. Nous tentons alors d’esquisser cinq typologies de grand ensemble, cinq interprétations de la “barre“ de logements, chacune façonnée par une catégorie sociale définie qui viendrait l’habiter.

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RÉFUGIÉS


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PAUVRES


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ÉTUDIANTS


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BOBOS


AU BON PAIN

COIFFEUR

café LE BLOCK 21

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RICHES


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C’est en observant ces cinq typologies qu’on prend réellement conscience de ce qui est en train de se passer. Le politique a réussi à infiltrer la géométrie. Apparaissent alors les clichés contre lesquels il nous faut désormais lutter, ils doivent exploser, violemment. Ces cinq typologies reflètent le conditionnement de pensée dans lequel nous nous trouvons, malgré nous. La société a fini par imprégner nos modes de création et y retranscrire des images effrayantes. Il nous faut inventer une nouvelle méthode pour penser le logement, et ainsi mettre fin à cette catégorisation sociale, productrice de différenciation et de relégation. Il nous faut poser la question du commun.

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7 DÉSIR / SYMBIOSE

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DÉSIR / SYMBIOSE

S’intéresser au commun dans le processus de création de l’habitat nécessite de critiquer notre mode de pensée. Au fil du temps, ce dernier s’est vu infiltré par le symbole politique qu’est la catégorisation sociale, mettant ainsi la différenciation des gens au coeur du dessin. Impactant de fait la géométrie du projet. Et si nous bouleversions tout ça ? Et si les critères d’obtention d’un logement n’étaient plus en terme de revenus, mais en terme de ce que l’on pourrait apporter à l’ensemble ? Et si un couple d’amoureux rendaient la vie de l’immeuble plus belle ? Dans nos précédentes expérimentations, la typologie des étudiants évolue dans ce sens, ne posant plus la question du revenu, mais d’un certain lien entre les habitants, ici un “statut“ social. C’est dans cette direction que nous choisissons de poursuivre notre voie. D’autres architectes se sont déjà posés la question, tentant de faire évoluer les mentalités. Jean Renaudie avec ses étoiles à Ivry interroge le désir des futurs habitants. Et dans l’idéal des années 70, la maison pavillonnaire attirait encore l’attention. Soit, l’architecte décida de repenser l’immeuble dense en incorporant ce désir. Il en résultera des appartements dotés chacun d’une terrasse végétalisée, réussissant de surcroit à mettre à distance les unités les unes des autres. Un désir que BIG actualise 30 ans plus tard avec sa “montagne“ illustrant parfaitement la maison Marie Claire faisant rêver les jeunes familles contemporaines. Quel est alors ce désir aujourd’hui ? Si le pavillon de banlieue ne trouve guère plus grâce aux yeux des parisiens, ne voulant pas s’éloigner de l’hypercentre, la nature reste au coeur des attentes. Sous une forme différente cependant : le désir d’écologie. Si l’on observe de plus près les usages actuels, les comportements au sein des logements, ou même les réponses aux concours d’architecture, on aperçoit clairement une volonté, celle de renouer un lien fort avec la nature. Manger ses propres fruits crée de l’émotion, au même titre qu’un arbuste contribue à purifier l’air que nous respirons. Il faut cependant faire attention à ne pas tomber dans le piège de l’écologie moralisatrice low tech qui sévit actuellement.

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L’écologie, oikos - habitat et logos - science, n’est finalement autre que la science de l’environnement. Il nous faut nous reconnecter à la nature, et pour cela définir un nouveau champ d’expérimentations. Actuellement, le rapport que nous entretenons à la nature est de l’ordre du dominant. Le paradigme de l’Homme qui domine la Nature n’est plus envisageable, si nous voulons éviter de continuer à aller dans le mur. Nous avons besoin de changer de paradigme, afin de faire évoluer les mentalités. Si nous étudions le rapport “naturel“ qu’entretient la nature avec l’architecture, nous nous rendons vite compte que la première finit inexorablement par manger la deuxième. La nature littéralement mange l’architecture. Le paradigme inverse n’est donc pas non plus souhaitable dans son extrême application. Comment la laisser faire alors ? Il faut réussir à créer une relation du type mutualiste, donnant-donnant. Comment l’architecture, en laissant des espaces libres pour que la nature s’y développe, peut gagner de cet échange ? Si l’architecture et la nature venaient à se nourrir l’une de l’autre, aurions-nous atteint l’homéostasie dont nous parlons depuis le début ? Pourrions-nous alors parler de symbiose ? Le boulevard Périphérique, territoire des possibles, instaurant un nouveau paradigme urbain, afin de faire lien.

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Imagine China - Shengsan Island


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Gunkanjima - Yves Marchand


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Porte de Bagnolet


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Avril 2016 École Spéciale d’Architecture Corentin Chapelle, Thomas Dauphant et Robin Thomas


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