ROSEMONDE
CLIENT: Musée de la civilisation L'univers de création de Réjean Ducharme 20 septembre 2019
Édition du 13 septembre 2019 - Section ARTS ET ÊTRE - Écrans 1 et 8
L’univers de Ducharme au musée
Photo: Monique Bertrand L’atelier de Réjean Ducharme tel qu’il était au jour de son décès.
Caroline Montpetit 13 septembre 2019 Lire
Dans sa maison de la rue Quesnel, au bureau du deuxième étage, Réjean Ducharme vivait entouré de livres et de dictionnaires ; des dictionnaires français, anglais, allemands, latins, grecs. « Il y avait des dictionnaires partout dans la maison », disait jeudi Monique Jean, exécutrice littéraire de Réjean Ducharme, qui vient de léguer au Musée de la civilisation de Québec la totalité du contenu du bureau de Réjean Ducharme et de son atelier adjacent. Pas étonnant que sous ses doigts, les mots voguent libres, d’un sens à l’autre, d’une langue à l’autre. « J’en ai assez du mot suicide et de ses dérivés, écrivait Ducharme dans Le Nez qui voque. Désormais, j’emploierai un autre mot. Je donne le dictionnaire à Chateaugué. Je lui dis d’ouvrir le dictionnaire au hasard, de me lire le premier mot sur la colonne de gauche de la page de gauche. […] Branle-bas. Donc, nous ne nous suiciderons pas, nous nous branlebasserons ». D’ailleurs, dans son premier roman publié, L’Avalée des avalés, la narratrice invente une langue, le bérénicien. Fort de ce legs, le Musée de la civilisation du Québec prépare une exposition en l’honneur de Ducharme pour 2022. Le grand public pourra donc finalement approcher l’écrivain au plus près, après avoir accepté durant des décennies son très grand besoin d’ombre. Ces deux pièces, c’est l’artiste, et non l’homme dans sa vie intime, qu’elles représentent, dit Yves Bergeron, muséologue et membre du groupe des Amitiés ducharmiennes, fondé à la mort de l’écrivain, et qui a participé au processus. C’est Monique Jean qui a approché le Musée de la civilisation pour qu’il mette en valeur ce legs. Par son oeuvre, Réjean Ducharme restait en relation avec un public qu’il ne pouvait fréquenter autrement, dit Mme Jean. C’est pourquoi elle ne pense pas trahir sa mémoire en permettant au public de s’approcher de son processus de création. Cette exposition sera « un signe de la main » de Réjean Ducharme, qui s’inscrira dans la durée. Des livres annotés Dans la maison de la rue Quesnel, tout était resté en l’état, comme si Ducharme, disparu en août 2017, n’était sorti que pour quelques minutes. Une panoplie de casquettes constitue le costume qui lui permettait de circuler librement en ville dans l’anonymat, lui qui adorait marcher dehors. Dans la pièce adjacente au bureau, Réjean Ducharme devenait Roch Plante, le pseudonyme dont il signait ses Trophoux, ses sculptures et toiles bricolées à même des objets trouvés dans la rue. Quatre Trophoux inachevés feront partie de l’exposition, légués au Musée par Charles Forget et Stefan Georgesco. Sur un mur de l’atelier, en plein centre, une rare photo de Nelligan âgé. Un peu partout, des cadrans et des horloges, dont la vue renvoie au titre glaçant de l’une des pièces de l’écrivain : À quelle heure on meurt ? Éparses, des photos de Virgina Woolf, de Tolstoï, de Céline, de Marguerite Duras, de Gabrielle Roy, de Marilyn Monroe, de la comédienne Luce Guilbault, de Gérald Godin, et même de sainte Thérèse de Lisieux. Plus de mille livres reposaient toujours dans sa bibliothèque à son décès. Ce sont des livres qui lui étaient précieux, et qu’il a abondamment annotés et conservés, raconte M. Bergeron. Une mine d’or pour les chercheurs. « Ses livres de Shakespeare étaient très annotés », raconte Monique Bertrand, amie et photographe des lieux habités par l’écrivain. Ils y côtoyaient des oeuvres de Virginia Woolf, de Nelligan ou de Rimbaud, beaucoup de classiques français et européens, des livres traitant de la
culture asiatique. L’équipe du Musée de la civilisation a eu quatre jours tout au plus pour vider les lieux avant que la maison ne soit vendue. « C’était une maison sur deux étages, raconte Mme Jean. Le rez-dechaussée était l’espace commun. Le haut était l’étage de Réjean ». Le couple que Réjean Ducharme formait avec Claire Richard avait pu acheter cette maison lorsque Ducharme a gagné le prix Gilles-Corbeil dans les années 1990, explique-t-elle. C’est là qu’il a écrit ses dernières oeuvres, les romans Va savoir et Gros mots. « Ils ont vécu là jusqu’à la fin de leur vie », dit Mme Jean. Pour Mme Jean, Gros mots était le testament littéraire de Réjean Ducharme. Il n’a plus publié par la suite. Jeudi, au Théâtre du Nouveau Monde, qui est l’héritier des droits de ses oeuvres publiées, et où l’annonce du legs a été faite, on avait rassemblé pour l’occasion quelques objets de l’écrivain, dont la laisse et le collier de son chien Blaze, mort dans les années 1980. L’une des très rares photos de Réjean Ducharme le montre d’ailleurs promenant Blaze dans la neige. Ducharme n’a jamais eu d’autre chien, raconte Monique Bertrand. On voyait aussi un coffre d’outils avec lesquels il fabriquait ses Trophoux, quelques dictionnaires et quelques disques. Le directeur du Musée de la civilisation de Québec, Stéphan Laroche, a dit vouloir que cette exposition accueille à la fois des chercheurs et le grand public. Elle sera accompagnée de toute une programmation dédiée à Réjean Ducharme. Malheureusement, le musée ne pourra pas l’accueillir de façon permanente faute d’espace. « Je caresse l’idée que cette exposition aille à Paris, dit-il. C’est une exposition qui pourrait se retrouver à la Bibliothèque nationale de France (BNF) ».
RDI matin - 13 septembre 2019
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Réjean Ducharme fait son entrée au Musée de la civilisation
PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE
Tout le contenu du bureau et de l’atelier de l’écrivain de l’ombre, Réjean Ducharme, décédé il y a deux ans, a été légué au Musée de la civilisation de Québec par sa Succession. C’est l’exécutrice littéraire et testamentaire Monique Jean qui en a fait l’annonce ce matin au TNM.
Tout le contenu du bureau et de l’atelier de l’écrivain de l’ombre, Réjean Ducharme, décédé il y a deux ans, a été légué au Musée de la civilisation de Québec par sa Succession. C’est l’exécutrice littéraire et testamentaire Monique Jean qui en a fait l’annonce ce matin au TNM, en présence du directeur général du Musée, Stéphan La Roche et de la directrice générale et artistique du théâtre Lorraine Pintal. Publié le 12 septembre 2019 à 13h34
JEAN SIAG LA PRESSE
Le don inclut la bibliothèque personnelle de Réjean Ducharme, ainsi que tous ses livres, son
bureau, des cadres, des photos et une multitude de petits objets. Quant à l’atelier, il comprend bien sûr tous ses outils, mais surtout quatre de ses Trophoux, ces sculptures/collages faits de débris que Ducharme signait de son pseudonyme Roch Plante. « Cette donation est faite en reconnaissance de la dette de Ducharme envers tous ceux et celles qui ont accepté tout simplement, d’un accord tacite, sa discrétion, a affirmé Monique Jean. Pour les remercier d’avoir accepté les conditions qui lui étaient nécessaires pour écrire et accéder à la liberté qu’il recherchait. » Le choix du TNM n’était pas innocent, Réjean Ducharme ayant légué au théâtre ses droits d’auteur et de parolier sur toutes ses œuvres publiées, jouées ou enregistrées. Romans, pièces de théâtre, scénarios de films et paroles de chansons appartiennent désormais à « sa maison de théâtre », qui a notamment monté ses pièces HA ha ! et L’hiver de force.
PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE
Lorraine Pintal, directrice générale et artistique du TNM, était présente pour l'annonce du legs du contenu du bureau et de l'atelier de Réjean Ducharme au Musée de la civilisation de Québec.
En juin prochain, le TNM présentera d’ailleurs L’avalée des avalés, que Mme Pintal mettra en scène. La nouvelle salle de répétition du TNM, qui sera prête en 2022, sera également baptisée la salle Réjean-Ducharme. Des photos du bureau et de l’atelier de Ducharme témoignent de la richesse du contenu (épars) qui s’y trouve. On a pu voir entre autres une table de chevet dans l’état où elle a été trouvée après sa mort, en 2017, avec au moins deux dictionnaires ouverts dessus. Une boite à outils, ainsi que le collier de son chien Blaize, font également partie de la collection. Le Musée de la civilisation s’est félicité d’enrichir le patrimoine culturel des arts vivants, le legs de Ducharme s’ajoutant entre autres au piano de Claude Léveillée, à l’ensemble du décor, costumes et accessoires de la pièce Broue (qui fera l’objet d’une expo le 29 octobre), ou encore de la collection des costumes conçus par le regretté François Barbeau.
PHOTO MONIQUE BERTRAND, FOURNIE PAR LA SUCCESSION RÉJEAN DUCHARME
Le bureau de Réjean Ducharme
Stéphane La Roche s’est d’ailleurs engagé à présenter, d’ici 2022, une exposition où seront reconstitués à l’identique le bureau et l’atelier de l’écrivain. « Ce don permettra aux gens d’entrer dans l’intimité de l’artiste », a précisé Mme Jean, qui a fondé l’OBNL Les Amitiés ducharmiennes.
Règlement à l’amiable Cette annonce met également fin au litige concernant les sept Trophoux de Ducharme. Dans son testament, l’énigmatique écrivain avait indiqué qu’il léguait ses Trophoux signés Roch Plante à ses amis collectionneurs Charles Forget et Stefan Georgesco, qui possèdent déjà une soixantaine de ces œuvres. Or, seuls trois Trophoux étaient signés « RPlante ». Monique Jean, une amie de longue date de Ducharme et de sa compagne Claire Richard (décédée un an avant lui), qui est l’exécutrice testamentaire, avait décidé d’appliquer à la lettre le testament de l’écrivain. Les deux hommes avaient répliqué en déposant une poursuite civile le 28 mars dernier pour récupérer les quatre autres Trophoux.
PHOTO MONIQUE BERTRAND, FOURNIE PAR LA SUCCESSION RÉJEAN DUCHARME
L'atelier de Réjean Ducharme
Mme Jean a confirmé à La Presse qu’elle avait signé une entente à l’amiable avec MM. Forget et Georgesco, il y a une semaine, pour que ces quatre Trophoux fassent partie du don offert au Musée de la civilisation. « Ça a toujours été mon intention d’inclure les Trophoux qui étaient dans l’atelier de Réjean Ducharme, comme c’était mon objectif de ne pas dissocier la bibliothèque des livres », a-t-elle simplement indiqué. Les journaux, calepins et manuscrits de l’écrivain avaient quant à eux été légués aux Archives nationales du Canada à la suite de son décès. © La Presse (2018) Inc. Tous droits réservés.
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COMMUNIQUÉ
Pour diffusion immédiate
L’UNIVERS DE CRÉATION DE RÉJEAN DUCHARME ENTRE DANS LES COLLECTIONS DU MUSÉE DE LA CIVILISATION Québec, le 12 septembre 2019 – Pour perpétuer la mémoire de l’écrivain Réjean Ducharme et préserver son processus de création, sa Succession offre en donation au Musée de la civilisation l’intégralité du contenu de son bureau et de son atelier. Cette donation inclut, entre autres, la bibliothèque personnelle de Réjean Ducharme ainsi que quatre Trophoux inachevés, offerts au Musée par Charles Forget et Stefan Georgesco. En recevant ce corpus exceptionnel qui témoigne du processus créatif de Ducharme, le Musée de la civilisation s’engage à présenter, d’ici 2022, une exposition où seront reconstitués à l’identique ces lieux où travaillait l’écrivain. C’est ce qu’ont annoncé ce matin, au Théâtre du Nouveau Monde à Montréal, madame Monique Jean, exécutrice littéraire et liquidatrice de ladite succession et le directeur général de l’institution muséale nationale, monsieur Stéphan La Roche. Porteurs de son identité, de son imaginaire et de sa création, nul doute que ces deux espaces ont été extrêmement importants dans la vie de Réjean Ducharme. Impressionnants, curieux et touchants dans l’éclectisme des références culturelles qu’ils contiennent et leur organisation matérielle, ces lieux ouvrent une fenêtre sur la pensée de Ducharme et permettent de saisir avec plus de justesse les influences, les modèles, les sources d’inspiration, les références ainsi que la complexité des œuvres de ce géant de la culture du Québec. Citations : « Par cette donation, Ducharme nous fait à nouveau signe de la main, et ce signe s’inscrit désormais dans la durée. Cette donation est faite en reconnaissance de la dette de Ducharme envers tous ceux et celles qui ont accepté, tout simplement, d’un accord tacite, sa discrétion, pour remercier chacun et chacune d’avoir accepté les conditions qui lui étaient nécessaires pour écrire et accéder à la liberté qu’il recherchait. » -Monique Jean, exécutrice littéraire et liquidatrice de la succession de Réjean Ducharme
« Comme musée de société, c’est un immense privilège d’accueillir au sein de nos collections la donation d’éléments aussi emblématiques du personnage mythique qu’est Réjean Ducharme. Son œuvre littéraire et son œuvre plastique sont indissociables. La première se démarque par une esthétique ancrée dans son rapport intime à la langue qu’il manie et réinvente avec une virtuosité magistrale, tout comme il donne une seconde vie, un nouveau sens aux matières recyclées avec lesquelles il conçoit ses Trophoux. Le Musée de la civilisation s’intéresse vivement à la démarche des créateurs québécois dont le regard critique alimente la compréhension de la société. Cette remarquable donation entre donc dans nos collections avec tous les égards nécessaires à la symbolique qu’elle représente. » -Stéphan La Roche, directeur général du Musée de la civilisation
Faits saillants : •
Le bureau et la bibliothèque de chevet contiennent plus d’un millier d’ouvrages, dont un grand nombre comporte des annotations. Cela entraînera chercheurs et spécialistes vers de nouvelles pistes de recherches et d’interprétations de l’œuvre de Ducharme;
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À l’intérieur de l’atelier, en plus des divers outils de travail et des nombreux objets récupérés dans la rue en vue d’être intégrés à ses œuvres d’art, on retrouve plusieurs références littéraires et artistiques, dont il aimait s’entourer. L’artiste y avait accroché, selon un ordre systématique et symbolique, des images de personnages historiques ou religieux, d’artistes et d’écrivains importants pour lui, notamment Louis-Ferdinand Céline, Jean-Paul Riopelle, Virginia Woolf, Léon Tolstoï, Émile Nelligan, Gérald Godin, Gabrielle Roy et Sainte Thérèse de Lisieux. Il s’agit d’un ensemble qui mérite d’être étudié rigoureusement en rapport avec la production littéraire et artistique de Ducharme;
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Le Musée de la civilisation présentera d’ici 2022 une exposition où seront reconstitués, à l’identique, le bureau et l’atelier de Réjean Ducharme;
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Le Théâtre du Nouveau Monde présentera, du 2 au 16 juin 2020, une adaptation du roman phare de Réjean Ducharme L’Avalée des avalés.
Liens connexes : Musée de la civilisation : www.mcq.org Théâtre du Nouveau Monde : tnm.qc.ca – 30 – Relations de presse : Québec : Agnès Dufour, 418 643-2158, poste 433; courriel : agnes.dufour@mcq.org Montréal : Rosemonde Gingras, 514 458-8355; courriel : rosemonde@rosemondecommunications.com