"Orphée dans la cité/Icare sur les toits" de Benjamin Desmares -Extrait

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: 978 2 8126 2130 7 XI-20

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Icare sur les toits

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Icare sur les toits benjamin desmares

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benjamin desmares

Orphée dans la cité

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Orphée dans la cité

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Orphée dans la cité



Icare sur les toits Il n’aime pas sa cité, Icare. Il ferait tout pour quitter L’Olympe. Alors il passe son temps seul sur le toit de son immeuble, à faire voler des avions et rêver de s’échapper vers les nuages…

boomerang, une collection de courts romans recto verso. Pile ou face ? Commencez par l’un ou par l’autre et laissez-vous surprendre…


© Éditions du Rouergue, 2020 www.lerouergue.com Illustration de couverture : Marta Orzel Graphisme de couverture : Olivier Douzou Ouvrage réalisé par Cédric Cailhol Infographiste. Reproduit et achevé d’imprimer en octobre 2020 par Corlet imprimeur (Condé-sur-Noireau). Dépôt légal : novembre 2020 N° d’impression : ISBN : 978-2-8126-2130-7 « loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse »


boomerang

Benjamin Desmares

Icare sur les toits illustrations Marta Orzel



Je n’aime pas cet endroit. Ici, tout est gris et moche. Je déteste. La cité Olympe, un jour, j’en partirai sans me retourner et je n’y remettrai plus jamais les pieds. L’endroit le moins nul de la cité, c’est le toit de mon immeuble, Le Parthénon. Au moins, ici, je suis seul. Mon regard s’envole jusqu’aux arbres mauves, juste avant l’horizon. Les seuls arbres de la cité Olympe sont des bouleaux rabougris et malades. On dirait de pauvres

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gens, serrés les uns contre les autres pour se réchauffer. Ils sont un peu comme moi : perdus, pas à leur place. Ici, ils gâchent leur vie. Quand je me déplace dans la cité, je regarde mes pieds. Rien que mes pieds. Les gens qui me croisent pensent peut-être que je suis amoureux de mes baskets. Je m’en fiche. J’avance en regardant mes pieds et en faisant la tête. Comme ça, personne ne me parle, personne ne m’embête. Ici, de toute façon, c’est nul. Ce n’est pas chez moi. Je n’ai rien à faire dans la cité Olympe. Et je n’ai rien à faire non plus dans ce pays qui n’est pas le mien. Mon pays, j’ai dû le quitter avec mes parents quand j’avais cinq ans. On ne

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pouvait plus rester. C’était devenu trop dangereux. Je n’en ai gardé que peu de souvenirs. Je revois ma chambre, le beau tissu vert et orange accroché sur le mur, face à mon petit lit. Les franges tressées de fils d’or qui se mettaient à danser quand l’air chaud rentrait par la fenêtre. Parfois, quand je rentre dans la cuisine, il m’arrive de me retrouver paralysé par une odeur qui s’échappe des casseroles. C’est comme si, pendant un instant, j’étais retourné là-bas. À la maison. Et je demande à mes parents : – C’est quoi ce parfum ? Je me souviens !

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Ma mère ou mon père m’explique alors qu’il s’agit de telle ou telle épice, ou bien de fleur de rose ou d’oranger. Je monte sur le toit de l’immeuble tous les samedis matin. La veille, je prépare mes avions en papier. Il y en a des longs et fuselés, qui fendent l’air avec leur nez pointu, et d’autres, avec de grandes ailes qui les font planer tels des aigles. Mes avions, j’écris mon prénom sur chacun d’eux. « Icare ». Avec un feutre bleu. C’est un peu comme si je m’envolais avec eux. À force d’en fabriquer, j’ai amélioré ma technique. Désormais, je les recouvre de cire de bougie fondue. Ainsi, ils deviennent imperméables à l’eau et je peux les lancer même

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lorsqu’il pleut ! Parce que, dans ce pays, il pleut presque un jour sur deux. Le problème, quand je me rends sur le toit de l’immeuble, c’est le concierge, monsieur Sisyphe. Rien à faire, je le croise à chaque fois ! À croire qu’il vit dans les escaliers, avec son énorme caisse à outils qu’il traîne toujours avec lui en soufflant. Je me souviens encore de notre première rencontre. On venait d’emménager dans l’immeuble et je ne parlais pas un seul mot de français. Monsieur Sisyphe, le concierge, il m’a dit « Bonjour » et puis il a commencé à me raconter je ne sais quoi. Je suis resté là à l’écouter. Aujourd’hui, je parle français comme

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