dacodac
Cécile Chartre
De la même autrice au Rouergue Petit meurtre et menthe à l’eau – 2011, roman dacodac. Poil au nez – 2012, roman doado. Ça déménage – 2012, roman Zig Zag (ill. Charlotte des Ligneris). Joyeux ornithorynque ! (nouvelle édition) – 2017, roman dacodac. Brouzouf tour – 2018, roman doado. Elliot, super-héros (nouvelle édition) – 2019, roman dacodac. Elliot vient de Mars – 2019, roman dacodac.
Illustration de couverture : Juliette Barbanègre Graphisme de couverture : Olivier Douzou © Éditions du Rouergue, 2021 www.lerouergue.com
Cécile Chartre
c’est où qu’on va ? Illustrations de Juliette Barbanègre
chapitre 1
Il se passe quelque chose de bizarre depuis ce matin. Quelque chose qui ne ressemble pas aux autres matins. Je ne sais pas encore ce que c’est. Je ne sais pas si je vais aimer. Pour le moment, pas trop. Ce qui est certain, c’est que je n’ai pas peur. Je n’ai peur de rien d’abord. Je m’appelle Manuel, j’ai neuf ans presque dix mais je suis super costaud pour mon âge. Et plus tard, je serai le plus grand footballeur du monde. 7
Bon d’accord, j’ai aussi un doudou qui est là pour me rassurer, en cas de besoin. Un petit lapin rose en tissu pas très joli, avec les oreilles toutes mâchouillées. Mâchouillées par moi, évidemment. Je le trimballe partout, bien planqué sous mon t-shirt, coincé dans la ceinture de mon pantalon. Personne ne doit savoir qu’il est là. Personne sauf moi. De temps en temps, je le serre un petit peu. C’est pas grand-chose, trois fois rien. Mais ça me fait du bien.
C’est avec lui qu’ils m’ont trouvé, devant la porte de l’orphelinat. Au début, ils ont cru que j’étais une fille à cause de sa couleur. Mais après, ils ont bien regardé ma tête et le reste et ils ont compris. N’importe quoi, les petits lapins roses, c’est aussi pour les garçons. Et les doudous, c’est aussi pour les grands costauds. Surtout pour ceux qui ont besoin d’explications. Et ce matin justement, j’aurais bien aimé qu’ils m’expliquent. Et qu’ils me disent pourquoi ils m’ont réveillé en cachette avant tous les autres, pour m’emmener je ne sais pas où. Je me doutais qu’ils mijotaient quelque chose. Hier soir, ils n’étaient pas comme d’habitude avec moi. Même Diego, mon surveillant préféré, était bizarre. Lui, il m’a à la bonne depuis que je suis arrivé ici. Et en me parlant hier, il se grattait l’œil comme s’il avait de la poussière dedans. Le style de poussière qui fait pleurer, un petit peu. 9