Memoire de diplôme ROXANE VAN GINNEKEN

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Un paysage en pause à reconquérir

L’école nationale supérieure de la nature et du paysage promotion 2014

les GRANDS MOULINS DE PARIS à marquette-lez-lille(59)

Directrice de mémoire : Catherine Farelle ENCADRANT : christophe letoquin

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Année universitaire 2013/2014 TRAVAIL DE FIN D’étude : École nationale supérieure de la nature et du paysage, blois

Président du jury

Marc Claramunt, paysagiste, enseignant à l’ENSNP

Directrice de mémoire

Catherine Farelle, paysagiste, enseignant à l’ENSp

PROFESSEUR Associé CHRISTOPHE LE TOQUIN, photographe, enseignant à l’ENSNP

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sommaire préambule

I. à la découverte d’un paysage en ruine 1. Un site entre ruine et friche industrielle 1.1. La mélancolie des ruines: entre réalité et imaginaire 1.2. Regards sur la friche industrielle 1.3. Promenade à Marquette-Lez-Lille : une rencontre mémorable 2. PERCEPTIONS SENSIBLES DU SITE 2.1. Triptyque 2.2 Un paysage qui attise nos sens 3. LE PAYSAGE DE LA Mémoire 3.1. La mémoire m’est venue des autres 3.2. Mémoire et paysage amnésique 3.3. La mémoire du site 4

II. LA DEÛLE, colonne vertébrale 1. IL était une fois la Deûle 1.1. La vallée de la Deûle 1.2. Les dynamiques de la Deûle 2. Les aménagements de la Deûle 2.1. La maîtrise de la rivière 2.2. Les moulins et les abbayes 2.3. Les canaux de Lille 3. La deûle, berceau de l’industrie 3.1. L’arrivée de l’industrie 3.2. La Deûle, un lieu de développement 3.3. Aujourd’hui la Deûle...un espace délaissé à Marquette-Lez-Lille 4. ENTRE REJET ET RETOUR DE L’eau 4.1. Le retour de la Deûle 4.2. Les parcs de la Deûle


III. à la découverte d’un territoire d’histoire(s) De l’abbaye Jeanne de Flandre au quartier industriel

1. XIIIe siècle : Le Moyen-âge 1.1. l’abbaye cistercienne Jeanne de Flandre 2. Xive -XVIIe siècles : UN Monastère CLASSIQUE 3. XVIIIe siècle : un parc au tracé classique 3.1. Des jardins et des potagers 3.2. Fin XVIIIe : une vie calme au château 3.3. Évolution de la porte de l’abbaye

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4. XIXe siècle : installation progressive de l’industrie 4.1. La vallée de la chimie 4.2. Une plateforme de l’industrie agroalimentaire sur laquelle s’installera la meunerie Lilloise 4.3. L’arrivée de l’industrie entre Saint-André, La Madeleine et Marquette-lez-Lille 4.4. Les jardins des quartiers environnants

IV. DE L’euro-métropole à la métropole lilloise 1. L’échelle transfrontalière 1.1. l’ Euro-métropole : un territoire Franco-Belge 2. L’échelle de la métropole lilloise 2.1. Évolution de l’urbanisation 2.2. Les projets actuels de la Métropole 2.3. le projet Rhodia élargi 2.4. Les trois points forts de la Métropole


V. LE PAYSAGE CONTEMPORAIN DES GRANDS MOULINS DE PARIS 1. LE SITE DANS SON TERRITOIRE 1.1. Un site stratégique de la métropole : Un réseau d’infrastructures riches 2. PORTRAIT ACTUEL DU SITE 2.1. Observation des Grands Moulins de Paris 2.2. Un site clos, propice à l’imaginaire 2.3. La Deûle dans le site 3. PROMENADE DANS LE SITE 3.1. Description du site 3.2. Le paysage des Grands Moulins de Paris 1. La friche des Grands Moulins de Paris 2. Le site des fouilles archéologiques 3. La cimenterie 4. Le site Rhodia 6

4. LA PLACE DE LA Mémoire 4.1. La mémoire humaine 4.2. La mémoire du site 4.3. La pollution : empreinte de l’industrie

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vi. QUELLE MÉMOIRE POUR DEMAIN? 1. enjeux à l’échelle de la métropole lilloise 1.1. Retrouver une proximité avec la Deûle 1.2. Connecter des espaces de végétation en ville 1.3. Mettre en scène le patrimoine industriel 1.4. Assurer l’accessibilité 2. à l’échelle du site 2.1. Divergence avec le projet de la ZAC Jeanne de Flandre 2.2. étude du plan local d’urbanisme sur les trois communes de la Deûle 2.3. Le foncier sur le site

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3. Vers le projet 3.1. Radiographie du site 3.2. Synthèse des enjeux à l’échelle du site 1.Créer un parc en liaison avec la Deûle 2.Mettre en valeur le patrimoine médiéval et industriel 3.Se rapprocher de la Deûle 4.Rouvrir le site et favoriser son accessibilité Phasage Références CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE remerciements


Préambule Partons au Nord de Lille, découvrir

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des paysages délaissés et abandonnés par les industries. Aux portes de la Madeleine et de Saint-André, la ville de Marquette-lez-Lille s’est implantée à la confluence du canal de Roubaix et de la Deûle. La rive gauche de Marquette-lez-Lille a vu s’installer une plate-forme d’industries. Sur une parcelle de 3 ha se trouvent les Grands Moulins de Paris, haut symbole de l’industrie meunière qui fabriquait et stockait la farine et a cessé son activité en 1989. À une centaine de mètres sur la parcelle voisine se trouvait auparavant l’usine chimique Rhodia-Khulmann. Démantelée en 2004, son sol a livré un trésor archéologique : les traces de l’abbaye cistercienne de la comtesse Jeanne de Flandres... Érigée en 1228, cette abbaye abritait la plus grande communauté de femmes en Europe. En 2005, l’abbatiale et le chœur, le transept, la nef et l’aile des moniales ont été mis au jour par les archéologues. Un monument industriel et une des plus puissantes abbayes cisterciennes se sont installés proches l’un de l’autre. L’une sous-terre, l’autre hors de terre : façade de la ville aérienne et souterraine. Cela dévoile un espace de 23 ha : le paysage des grands Moulins de Paris.

La Deûle, colonne vertébrale de ce territoire a été le facteur de leurs implantations. En analysant strate par strate, tel un mille feuilles, on comprendra les raisons de ce territoire depuis plus de huit siècles. Ces deux sites sont des éléments forts du patrimoine religieux et industriel. Les Grands Moulins de Paris ont d’ailleurs été ajoutés en 2001 à l’inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques, qui va me permettre de réfléchir à la question du patrimoine dans un site en pleine mutation urbaine. Le site archéologique et les bâtiments des Grands Moulins sont protégés et peuvent devenir un espace privilégié pour la culture et l’économie du territoire. Tout le territoire de Lille-Sud est en réflexion urbaine à travers des quartiers d’habitations tels que Bois Blancs, quartier Moulin et Fives. Les décideurs politiques se tournent vers Lille-Nord et l’agrandissement de la métropole va bientôt accueillir cette emprise dans une Zone d’Aménagement Concertée de 60 ha. En développant de l’économie, des logements, et des loisirs, le site Rhodia et les Grands Moulins de Paris s’inscriront au sein de ses nouvelles limites.

Sachant que ce projet sera en réflexion territoriale par la communauté urbaine de Lille Métropole, il me semble essentiel de l’inscrire dans la planification urbaine à l’échelle de la ville et de ses enjeux géographiques et politiques. Je devrai me questionner sur la place de ce site dans le territoire qui a besoin d’un nouveau dynamisme post-industriel. Comment les Grands Moulins de Paris peuvent-ils impulser la ville de Marquette-Lez-Lille et de Lille ? Pour ne pas être démantelés comme les usines voisines, comment la minoterie ainsi que le site de l’abbaye peuvent-ils acquérir une nouvelle image? Dans quelles perspectives dois-je me situer pour repenser leurs nouvelles limites? Comment pourrais-je raccrocher ce territoire à son territoire? Ainsi je m’interroge sur mon rôle à jouer et sur le regard à apporter en tant que future paysagiste.

page suivante : Les Grands Moulins de Paris et la Deûle


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I.à LA Découverte d’un paysagE EN RUINE

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1.UN SITE ENTRE RUINE ET FRICHE 2.PERCEPTIONS SENSIBLES DU SITE 3.LE PAYSAGE DE LA Mémoire

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Carte sensible du Paysage des Grands Moulins de Paris à Marquette-Lez-Lille Septembre 2013


1. UN SITE ENTRE RUINE ET FRICHE INDUSTRIELLE 1.1. la mélancolie des ruines : entre réalité et imaginaire. « on a l’impression qu’il a cent ans ce jardin tant de feuilles mortes.» Haiku. Bashô 1644–1694

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Se perdre dans les ruines, se retrouver dans des lieux à l’arrêt, déambuler entre les vielles pierres qui se fondent dans une végétation, retrouver des traces, des morceaux d’histoire, des papiers, des poignées, des cheminées brisées...découvrir des endroits par surprise, pousser la porte d’une usine, entrer... Je voulais écrire sur un paysage abîmé et usé par le temps dans lequel s’inscrirait une architecture en ruine. J’ai toujours été passionnée par les sites archéologiques. La place des vestiges noyés dans la végétation qui a repris le dessus me rappelle le site d’Angkor Wat au Cambodge. La végétation qui ravage et absorbe l’architecture : les pierres, disparaissant dans les racines, le temps efface les traces d’une histoire. Un temple devient une jungle, un monde perdu où le rêve est possible dans un espace décalé. On retrouve cette atmosphère dans les tableaux de Hubert Robert qui peint les ruines et les lieux délaissés qui redeviennent alors de sublimes espaces de contemplation et de déambulation. On se trouve de plus en plus confrontés à des espaces ayant été construits à la révolution industrielle, dont les bâtiments dominaient le territoire et qui sont aujourd’hui tombés dans l’oubli. Leurs silhouettes ne s’effacent pas et restent ancrées dans le paysage comme des amers . Ils voient passer le temps et les saisons, les incendies et les tempêtes. Ils se transforment en nichoirs pour oiseaux, en maisons hantées, en lieux de liberté «deviennent naturellement le refuge d’un certain imaginaire» comme le dit Georges Descombes, paysagiste. Situés la plupart du temps en plein cœur de centres anciens, ces lieux fantomatiques sont pétris d’histoire, de saveurs, de goûts du passé dont on peut encore retrouver des bribes de souvenirs. Lieux interdits, fermés, ils stimulent mon imaginaire et me font rêver. Des formes étranges, des machines oubliées, des ombres dansantes nous dévoilent un monde vivant derrière les murs de ces lieux interdits.


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Hubert Robert-Architectural Landscape with a Canal. Oil on canvas, 129x182.5 cm. http://www.arthermitage.org


1.2. REGARDS SUR la friche industrielle

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LES RAISONS

LA FRICHE INDUSTRIELLE

Dans le Nord de la France, au XIXe siècle, l’expansion industrielle permet aux riches industriels de se développer à travers des cités, des jardins, des structures, des infrastructures( train, routes). à Marquette-lez-Lille, au Nord de Lille, le monde des industries se dessine comme une grande fourmilière mêlant la pétrochimie à l’agroalimentaire, les briqueteries, les malteries, les maïserie, les minoterie.. Révolution en plein essor qui permet à la ville de se développer et à la Deûle de devenir un axe fluvial essentiel de la Hollande à la France en passant par la Belgique. Puis à la fin du XXe siècle, une nouvelle stratégie du capitalisme abandonne ces activités pour d’autres lieux, d’autres économies plus rentables et plus modernes. La société des Grands Moulins de Paris ferme, les ouvriers de Rhodia sont licenciés ou déplacés à Grenoble...les ouvriers de Marquette-lez-Lille n’ont plus de travail et la ville s’endort.

friche : * un terrain agricole non cultivé * un emplacement où se tiennent les foires, où se font les fêtes des saints patrons d’une localité friche industrielle, ville en friche, société en friche, délaissé, espace en pause, morceau de paysage disloqué, friche urbaine, site fantôme, terrains vagues, zones, squat, lieux d’abandons, terrain vague, terre d’errance, lieu de déambulation, de rêverie, de ruines... Ces lieux abandonnés sont le miroir du déclin industriel et le portrait de nombreux sites dont l’activité fut trop vite arrêtée. On se retrouve face à des palais et des châteaux industriels où la végétation a repris ses droits et a développé des jardins-jungle .


une terre d’aventure

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Voir ces lieux comme des opportunités de liberté, des espaces d’expérimentations entre le sauvage et le régulier. Se retrouver dans un bois qui s’est développé spontanément et longer une allée de cyprès plantée à l’époque industrielle. S’asseoir à côté d’un bassin d’incendie et traverser une zone humide qui revient à la surface. Ne plus voir le tronc d’arbre qui est plongé dans une ronceraie gigantesque, se faire un chemin sur les rails d’une voie ferrée sans distinguer le quai, indissociable des hautes herbes... Un mille-feuilles d’émotions qui permet de dépasser les limites de l’interdit, du raisonnable et du «bien planté». Du géométrique et du plan orthonormé. Se sentir dans un coin de nature où la végétation règne.

Oser rentrer dans ces univers, tel un explorateur. Pénétrer dans ces jardins qui semblent sortir des Contes des mille et une nuit . Appelant aux descriptions de jardins magiques ... Vivre le site comme expérience physique du corps et de la mémoire. Se retrouver face à des vestiges, à des monstres industriels, à des usines fantômes peuplées elles-même de traces de la vie ouvrière. Une partie de la ville se meurt et se décompose lentement. Des traces rouillées, brisées restent...des poignées de portes, des feuilles, des cheminées, des grues, mais surtout des souvenirs planent au dessus des sites : c’est la mémoire des lieux.

« Un jardin des plus agréables du monde. Ses allées étaient de petits cailloux de différentes couleurs(...)La vue était terminée à l’entour, le long des allées , par deux canaux d’eau claire comme de l’eau de roche. (...) ces allées faisaient une séparation entre de grands espaces plantés d’arbres droits touffus, où mille oiseaux formaient un concert mélodieux, et divertissaient la vue par leurs vols divers, et par les combats tantôt innocents et tantôt sanglants qu’ils se livraient dans l’air.» Les mille et une nuit Nuit CLXXXVI. Histoire d’Aboulhassan et de Schemselnihar p.76 Tome 2. Garnier Flammarion


1.3. PROMENADE à MARQUETTE-lEZ-LILLE : une rencontre mémorable La découverte du site En plein mois de juillet 2012, sous un soleil tapant d’après-midi. Un ciel de tableaux italiens, un cadre parfait. Je me suis promenée sur les bords de la Deûle et suis arrivée à Marquette-Lez-Lille. Un monde d’usines m’est alors apparu. Je me suis retrouvée face à des machines arrêtées, des façades gothiques, des sons métalliques et une odeur de viennoiseries. Lors de cette promenade, j’ai croisé quelques personnes, des marcheurs, aux cyclistes, des promeneurs intrigués comme moi par les bâtiments surprenants. Assise, j’ai observé les péniches passer et je me suis sentie funambule dans ce site inconnu. Comme à la recherche d’un signe, j’ai longé les murs, traversé des rues, aperçu des maisons colorées, des corons...sans ouvriers. J’ai osé pénétrer dans le site, derrière ces murs qui m’intriguaient et j’ai franchi les limites. Je me suis aventurée sur la parcelle des Grands Moulins de Paris...

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Avenue Decauville dessin 18/10/2013


présentation La friche des Grands Moulins de Paris et du site Rhodia à Marquettelez-Lille ont à elles deux une superficie de 23ha. Située à 10 minutes de la citadelle de Lille, au bord de la Deûle, ce site est encerclé de réseaux ferroviaires et fluviaux. Cet espace insulaire est fermé et appartient à une époque révolue. Ce site pourrait être un lieu de vie, malgré le fait que ce soit un espace privé.

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Je l’imagine comme une frange urbaine mise de côté. Un lieu abandonné, en décalage avec ce qui l’entoure, une parenthèse urbaine : une île imaginaire dans la ville...et pourquoi pas, une utopie. Un terrain d’aventure, comme le dit Alberti. Comment ce «terrain d’aventure interdite» pourrait devenir un jardin de liberté ?

La métropole lilloise est en pleine réflexion sur le devenir des friches industrielles et le site des Grands Moulins de Paris est au cœur des futures réhabilitations de la Communauté urbaine de Lille Métropole (LMCU). Au bord de la Marque, à la confluence de la Deûle dessin du 18/10/2013

« Un sentiment d’irréalité baigne la visite de ce territoire dont tous les éléments semblent s’enchaîner comme les images d’un rêve ou d’un film » A Tour to the Monuments of Passaic, New Jersey. Robert Smithson 1967


UN QUARTIER INDUSTRIEL AU BORD DE LA DEÛLE

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« Le ciel avait le gris indéfinissable des papiers journaux et les nuages, qui ressemblaient à de délicates tâches de sueur, faisaient penser aux aquarelles d’un célèbre peintre yougoslave dont j’ai oublié le nom » A Tour to the Monuments of Passaic, New Jersey. Robert Smithson 1967

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Je suis arrivée à Marquette-lez-Lille, petite ville de corons où la brique rouge est l’élément emblématique. La plupart des maisons sont faites du même matériau, mais elle ont la particularité d’être chacune d’un style différent. C’est cette diversité des styles qui forme leur unité, et qui me plaît dans ce paysage urbain du Nord. Après avoir traversé la ville, j’arrive dans une ruelle de maisons blanches identiques. Depuis ce lieu, j’ entend des bruits stridents d’usines en écho. Des sons saccadés et agressifs remplissent le silence. Je me dirige vers le canal de la Deûle qui se trouve au bout de la rue et découvre un balcon en béton au bord de l’eau. Un panneau déchiré et griffonné présente le paysage industriel des différentes usines,Rhodia-Kuhlmann, les Grands Moulins de Paris, les Grandes Malteries,la papeterie Sonoco, Massey-Fergusson... Ces noms ne me parlent pas mais attisent ma curiosité.

Vue sur la Deûle vers le Sud Photographie argentique Juin 2013


AMBIANCE DE PORT créée par les GRANDS moulins DE PARIS

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Je lève alors la tête, un grand bâtiment surgit de son socle : les Grands Moulins de Paris ! Un vrai choc, une surprise qui me fige sur place. Je ne m’attendais pas à cela.

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Je découvre un panorama incroyable : un bâtiment saisissant de briques rouge orangé donnent le ton de ce tableau. Une très grande façade rythmée par des centaines de fenêtres, une grue en ruine, des volets qui claquent, des toitures brûlées, un bâtiment usé. Des corbeaux survolent la tour de cette usine et créent une atmosphère inquiétante. Je me souviens avoir comparé cette usine à un château anglais, un navire échoué dans un port. Des cris de mouettes, des claquement de vagues, un bruit métallique : celui de l’usine qui nous fait face. Une ambiance de port se fabrique dans mon imaginaire.

Le paysage est vivant, dynamique et bruyant. Il y a du vent ce jour là et il fait particulièrement chaud. Une usine, des arbres, des quais, des monstres de machineries et ce vide. Le bâtiment semble avoir des murs brisés, avoir été abîmé. Comment se fait-il qu’un espace aussi majestueux soit abandonné en pleine ville? En entrant dans la friche, la première sensation que j’ai est l’odeur de la farine qui me prend au corps. L’odeur des lieux comme si les Grands Moulins de Paris étaient encore en activité. Les Grands Moulins de Paris ne seraient pas morts !

Des blocs d’aluminium sont posés les uns sur les autres et forment un paysage argenté. Très lumineux, ils brillent et scintillent comme des miroirs face au soleil. A gauche de cette usine, des quais abandonnés sont toujours présents, ils semblent rouillés et être les témoins d’une activité industrielle en liaison directe avec l’eau. Je les entends grincer au loin.

Vue les Grands Moulins Photographie argentique Juin 2013


UN JARDIN SAUVAGE

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Au sol, des rails entourés de mousses et d’herbes m’invitent à m’immiscer dans le site, je les suis dans les branches, les ronces et les racines au sol.Une végétation foisonnante me plonge dans un jardin luxuriant. J’ai la sensation d’avoir pénétré dans un monde interdit, un hortus conclusus. Les arbres grimpent et s’accrochent aux façades. La vue est coupée par le feuillage et la masse boisée qui s’est formée. Les Grands Moulins sont pris aux pièges par les plantes. Herbes, buissons, ronces, arbres, tout le site est dans les houppiers. Ce lieu m’apparaît comme une île d’arbres qui voyage sur la rivière : un jardin flottant des paysages mystérieux et surprenants des rives de la Deûle. 23

île Végétale

« Mer située dans l’Océan Atlantique où sur près de quatrevingts kilomètres poussent, sans racines, des pins et des cyprès flottants. Les troncs sont si serrés qu’il est possible, quand les vents soufflent fort, de naviguer dessus, à condition d’être capable de hisser son navire à la cime des arbres.» Lucien de Samosate. Histoire véritable. IIe siècle apr. J-C Dictionnaire des lieux imaginaires. Alberto Manguel

Le jardin sauvage Photographie argentique Juin 2013


2. Perceptions sensibles du site

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2.1. TRIPTYQUE

la mémoire du fou.

Ce travail est le fruit d’une réflexion personnelle sur le thème de la mémoire. Qu’est-ce que mon souvenir m’apporte et comment peut-il nourrir ma réflexion? Qu’est ce que je retiens du site? En posant les détails tels que je les voyais sur le site, cela me permettrait d’avoir un regard critique dans le choix des éléments sélectionnés, qui sont ancrés dans les images que j’ai de ce lieu. L’idée était de pousser le souvenir à ses limites et de savoir précisément jusqu’où je serais capable de me remémorer le site. Cette démarche me permettrait de révéler les détails que j’aurais pu oublier, ou mettre de côté et qui peuvent être essentiels dans le futur projet. Les règles étant de s’appuyer sur ma seule mémoire.

Deux possibilités se sont posées en poussant le travail de la mémoire à ses limites : faire ce travail comme si le site allait disparaître, ou bien comme si ma mémoire allait s’effacer. Par le dessin, j’ai pu spatialiser les éléments tels que je les voyais dans mes souvenirs. Ce jeu sur la mémoire me permet de pousser à ses limites mes souvenirs et dégage trois conclusions nettes sur le regard que j’ai. Je choisis de décrire ce site comme un triptyque : Une île imaginaire, un jardin sauvage et un monde industriel. L’île imaginaire, enclos coupé du tissu urbain, est séparée par la voie ferrée qui est comme un ruisseau, un flux. La Deûle, à la fois liaison et frontière, borde le site et accentue cette notion d’insularité. Cette friche qui évoque chez les habitants un endroit inaccessible, un lieu inatteignable et interdit fait appel à l’imaginaire. Souvenir pour nombres de personnes, ce site qui leur a appartenu et qui aujourd’hui leur est fermé est une incompréhension. Le connaissant par cœur, ils l’imaginent avec leurs mots, leurs souvenirs. Les Grands Moulins sont encerclés par des boisements : la végétation a poussé, une forêt s’y est installée, des herbes hautes et une végétation spontanée s’est développée avec le temps, la pollution, l’histoire. Le terrain vague de l’errance a alors été envahi par la végétation et est devenu un grand jardin-jungle devenu après le départ des usines. Le site est parsemé de matériaux de l’époque industrielle. Percevoir ces ombres de l’industrie qui donnent le ton à ce paysage, à cet ancien quartier agroalimentaire qui perdure, à quelques marionnettes qui sont encore en mouvement, c’est voir que ce quartier est encore vivant par ses industries et pas seulement par la Deûle. Ce lieu n’est pas mort, vivent les Grands Moulins de Paris !


un terrain perçu comme un paysage insulaire

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Photographie aĂŠrienne www.ign.fr

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une île imaginaire En quittant Lille vers le Nord, la Deûle nous amène en suivant ses berges à découvrir la ville de Marquette-lez-Lille. En arrivant sur les quais, on se retrouve face à un lieu étrange : la Deûle se dilate devant ces bâtiments, l’eau y est très agitée comme si l’usine était encore en pleine activité. Les vagues et le mouvement qui se dessine évoquent la proximité des ports de la mer du Nord et le voyage des péniches au fil de l’eau. Au premier plan, le balcon sur la Deûle théâtralise le paysage. On est face à une scène où les acteurs seraient les bâtiments de l’usine abandonnée qui étaient auparavant les Grands Moulins de Paris. 26

Marquette-Lez-Lille tourne le dos à son canal ainsi qu’à la berge qui lui fait face. La ville se coupe de son paysage industriel et de son cours d’eau. Le seul lien qui perdure : une odeur de croissants au beurre du dimanche matin. Celle-ci émane de l’usine, embaume le site et traverse le pont. Usine à l’image d’un encensoir urbain quand le vent souffle. L’odeur n’a pas quitté ce paysage dans la «ville de la farine», l’âme des Grands Moulins de Paris perdure. Des péniches passent comme des automates et ne s’arrêtent pas.

décryptage du dessin

Le regard s’accroche sur les bâtiments de brique rouge vif qui étonnent les passants : ce site est une surprise! Silhouette majestueuse et imposante, ils sont comme un appel et se tiennent immobiles comme des perchoirs à oiseaux. A proximité un jardin sauvage longe les quais, un parc abandonné où la végétation domine. Le vide et le plein fabriquent ce jardin. Il est entouré d’habitations colorées, situées dans la «rue des maisons joyeuses». Orientées vers des jardins, ces maisons tournent le dos à la friche pour ne pas la regarder, pour l’éviter. Des jardins ouvriers bordent le site et sont séparés d’une voie ferrée qui coupe le territoire en deux. Limite, frontière, flux, courbes, barrière, mur, ces rails coupent physiquement le site des Grands Moulins de son tissu urbain et l’isolent. Trois «mondes» se créent : celui des maisons ouvrières, celui du site des Grands Moulins et celui de la ville de Marquette-lez-Lille. Au centre, une île-jardin se dessine, l’île imaginaire des Grands Moulins de Paris.

Vue imaginée depuis le balcon des Grands Moulins de Paris Septembre 2013


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UN JARDIN SAUVAGE La rive droite de Marquette-lez-Lille est floutée et endormie. Il s’y passe peu de choses et seule une rue de jardins privatifs donnant sur la rivière de la Marque est dessinée. Le site semble calme. Les berges sont vides, une pelouse remplit l’espace de la malterie démantelée qui semble être en mouvement. La végétation a pris le dessus des bâtiments, les murs s’effacent et sont remplacés par la texture des arbres. Les rives des Grands Moulins de Paris, en contraste semblent vivantes et rythmées.

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Un mur sépare le site des grands Moulins du site de l’abbaye. Un passage est marqué pour relier les deux par une ouverture dans le mur. Le site de l’abbaye est représenté par sa végétation et sa topographie. Les buttes dessinées correspondent aux monticules des déblais et remblais et forment un paysage de dunes. L’abbatiale devient l’espace central du site : forêt, prairies, pelouses, friche, arbres isolés, buissons, haies fabriquent la palette végétale du site archéologique. La végétation est le fil conducteur de cette promenade et donne de la matière au site, à cette friche terrain d’aventures.

Souvenir des lieux par la végétation Plan masse de mémoire Septembre 2013


un MONDE INDUSTRIEL Le balcon, baignoire de théâtre sur la scène des Grands Moulins de Paris est un point d’observation. Grues, aluminium, objets métalliques, poteaux, lignes à haute tension, câbles, quais, barbelés, murets, emprises, entreprises, usines, camions, transport, mouettes...un vocabulaire industriel se distingue dans ce paysage. Cette île industrielle se dessine par des machines en activités ou à l’arrêt.

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Telle une chorégraphie, une danse avec des gestes répétitifs d’automates, les marionnettes s’activent. Les grues, les pelleteuses, font des gestes répétitifs : les matériaux s’accumulent formant des tas argentés, les grues avancent comme des somnambules. Quand à elles, les machines des Grands Moulins ont été mises en pause. Ces instruments sont restés, gelés par le temps. Face à ces vestiges du passé, le site est vivant et bruyant.

Vue imaginée du haut de la tour des Grands Moulins Septembre 2013


2.2 UN PAYSAGE qui attise nos sens « Il faut sans doute un peu plus d’imagination pour se représenter un appartement dont la partition serait fondée sur des fonctions sensorielles : on conçoit assez bien ce que pouvait être un gustatorium ou un auditoir, mais on peut se demander à quoi ressemblerait un visoir, un humoir, ou un palpoir .» Espèce d’espace. Georges Perec

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«le GUSTATORIUM » Les Grands Moulins de Paris et ses viennoiseries, testeurs, goûteurs de boulangeries, anciens laboratoires, moulins et fournils d’essais, magasins à farines, silos «préparation mouture », semoulières, magasins, test de la farine, test de la pâte,test des goûts ...le «gustatorium» : un palais de la Deûle. Mais c’était aussi la brasserie de l’abbaye, activité économique des sœurs cisterciennes où les religieuses développaient et travaillaient leurs papilles. : économie de la région qui était le lieu de la bière de Marquette. Plus tard, une malterie va s’installer sur la rive opposée...continuité de l’histoire. La maïserie a été démantelée mais il reste l’empreinte du maïs.

Représentation sensible du gustatorium

L’histoire de ce site se développe à travers les différents goûts. Marqué par la présence des moulins, ce lieu développe le paysage du goût et des papilles gustatives. Du XII e siècle à aujourd’hui, ce petit morceau de territoire a vu s’installer différents types de goûteurs, de testeurs au sein de ce quartier de l’industrie agroalimentaire. Aujourd’hui Délifrance, usine de viennoiseries surgelée en activité est la dernière entreprise à être restée, un témoin de ce passé gustatif. Ici on goûtait, on goûte, peut-être goûtera t’ on encore demain? Comment le site pourra t’ il à l’avenir conserver cette activité du goût, ce sens qui doit perdurer dans ce paysage sensoriel?


«L’HUMOIR » Une odeur embaume les quais de la ville. C’est celle de la farine, franche, agréable, analogue à celle de la noisette. Elle est légère et douce mais très présente.

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Par vents forts le site a cette odeur et la «pollution olfactive», selon certains, flotte au dessus de la métropole Lilloise et se faufile dans les rues de Lille. En fermant les yeux, je pourrai me souvenir de cette sensation, de ce paysage olfactif qui fabrique ce lieu. Cette mémoire me rappellera ce paysage, cette « ville de la farine ». La place que l’odeur de la farine occupe dans le paysage des Grands Moulins de Paris est inoubliable. Elle est toujours présente, les Grands Moulins de Paris ne sont pas morts, ils renaissent par le nez!

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GRANDS MOULINS DE PARIS

«J’aime ma ville, je ne saurais dire exactement ce que j’y aime. Je ne pense pas que ce soit l’odeur. » Espèce d’espace. Georges Perec

Carte olfactive sensible de la métropole

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«le palpoir » LA Matière Pignons à redents, lucarnes, beffrois...symboles de l’architecture néo-flamande. Promenade dans les bâtiments, à travers les murs éventrés, les passages éboulés, le rouge domine. La brique, rappelant les couleurs du sol argileux, les murets du site archéologique. La matière comme mémoire du site, la brique comme fil rouge de l’histoire.

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Photographie des murs en brique du site de fouilles Octobre 2013


la végétation Des ruines apparaissent, cachées derrière des ronces. Un magnifique balcon en pierre de taille, dont les gardes corps moulés ont été cassés me fait imaginer une possible entrée principale menant au bureau du directeur. La végétation a pris le dessus des briques, des murs, de la matière. Elle caresse la façade et grimpe, comme un nouveau mur végétal des Grands Moulins de Paris.

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Dessin du balcon du directeur noyé dans la végétation Octobre 2013


«les visoirs »

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Les visoirs du paysage Carte des postes d’observation des Grands Moulins de Paris

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«l’ auditoir » Sur le site la vie des machines est encore en activité, et les concerts industriels résonnent. Des sons fantômes, fabriqués par les bras des machines qui dansent avec le vent nous plongent dans une atmosphère inquiétante. Tel un orchestre vivant, le site n’est jamais silencieux. D’autres machines, quand à elles toujours en activité, comme la cimenterie et les grues frappent des sons cinglants et percutants. La mémoire du site rejaillit et redonne vie au site dont les machines rouillées continuent d’opérer.

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brutal (compression de voitures)

Aigu (machines farine)

métallique

(compression de ferailles)

grinçant (silos de ciment)

grave (démantèlement d’usine)

carte sonore sur le site


3. LE PAYSAGE DE LA Mémoire 3.1. LA Mémoire m’est venue des autres Celle des ouvriers et travailleurs que j’ai rencontré, qui m’ont parlé de l’histoire des lieux comme on conte une histoire à un enfant. J’ai compris que ce site était un morceau de leur vie, de leur passé et en continuité avec le paysage qui les entourent. Un espace-temps qu’on s’approprie... Aujourd’hui en pause, cet « endroit», «cette zone», ce «monde», cette «friche», cette «île» n’a pas perdu ses récits, elle est simplement silencieuse. Comme des tiroirs de notre mémoire que l’on n’ouvre plus, mais que l’on possède encore. Ceux qui lui parlent, ceux qui la connaissent dans ses plus fins recoins sont les témoins de cette mémoire qui l’a fait vivre. Choisir de parler de la mémoire d’un site, se retourner sur ce qui s’y est passé est une façon, non pas de lui rendre hommage, mais de la fêter et de la célébrer. Toutes les strates de ce mille-feuilles que racontent le site quand on tend l’oreille sont une possible renaissance pour les habitants, la ville, la Métropole...

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Ecrire et mettre en scène cette mémoire qui se délaisse et s’oublie permettrait d’offrir au paysage l’opportunité de se développer. Ce travail sur la mémoire de ces lieux doit se faire. Ensuite, libre aux futures générations de la prendre en compte. Par le paysage, je souhaite révéler, signaler les strates et les rendre cette mémoire lisible, ensuite, dans le temps, de nouvelles strates viendront s’accumuler. Réfléchir à la mémoire d’hier, d’aujourd’hui et de demain est une manière de réfléchir au présent continu de ce site.

« La ville ne dit pas son passé, elle le possède pareil aux lignes d’une main, inscrit au coin des rues, dans les grilles des fenêtres, sur les rampes des escaliers, les paratonnerres, les hampes des drapeaux, sur tout segment marqué à son tour de griffes, dentelures, entailles, virgules. » Zaire- les villes et la mémoire 3 Les villes invisibles Italo Calvino


la Problématique : comment par le biais de la mémoire passer d’un paysage patrimonial délaissé à un espace «culturel» accessible ?

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3.2. Mémoire ET paysage amnésique l’histoire de la mémoire

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«Pour former une série de lieux dans la mémoire, il faut, ditil, se rappeler un bâtiment, aussi spacieux et varié que possible, avec l’atrium, la salle de séjour, les chambres à coucher, les salons, sans omettre les statues et les autres ornements qui décorent les pièces. Les images qui doivent rappeler le discours (...)sont alors placées en imagination dans les lieux qui ont été mémorisé dans le bâtiment. Cela fait, dès qu’il s’agit de raviver la mémoire des faits, on parcourt tous ces lieux tour à tour et on demande à leur gardien ce qu’on y a déposé. » Frances Yates. L’art de la mémoire Gallimard 1975

On constate ainsi à quel point l’édifice de la culture classique devient source de repère et outils de souvenirs. Utilisée principalement par certains avocats, à l’époque qui doivent connaître et se remémorer, sans les écrire, les affaires de leurs clients à défendre, ils ont besoin de se souvenir, besoin de retenir... Cet extrait de Quintilien explique clairement la méthode pour se souvenir.

Palais de la mémoire extrait du livre l’art de la mémoire, le territoire et l’architecture Sébastien Marot

l’ architecte & la mémoire Cette manière de se souvenir permet de comprendre qu’elle était structurée et ordonnée comme les salles d’une usine, lieux mnémoniques d’un fonctionnement logique. Chaque pièce y a son détail, son activité. Ce moyen mnémotechnique, je l’ai retrouvé chez les anciens ouvriers qui ont effectué ce même travail. En effet, me parler des Grands Moulins de Paris était pour eux un retour sur le passé. Ils ont pu me décrire différentes salles et ce qu’elles représentaient pour eux en passant pièces par pièces et en m’y décrivant leurs activités : magasin, laboratoires, boulangerie, silos, triage de blé... Ainsi à la manière des grecs, les ouvriers construisaient devant mes yeux une charpente mnémotechnique fondée sur une vision spatiale et historique de leurs bâtiments.


le paysagiste de la mémoire

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Ces endroits ne se résument pas seulement aux immeubles. On peut dire ainsi, qu’ils se fabriquent un parcours dans leurs souvenirs. Ces espaces font de ces orateurs des promeneurs. Utiliser l’espace comme outil de mémorisation permet de penser à ces espaces que l’on connaît, que l’on croit se rappeler et que l’on imagine. Cours, rues, chemins, ville, campagne, champs, bois... le paysage est un outil spatial sur lequel on appuie les souvenirs de notre mémoire. Celui qui se souvient devient promeneur à la fois dans sa mémoire mais aussi dans le paysage qu’il fabrique. Il construit un paysage de la mémoire qui lui est propre. Il l’ imagine à son idée et s’en fait le décor théâtral de son discours. Il devient alors un paysagiste, à travers sa façon d’utiliser ses paysages pour faire appel à ses souvenirs, à ses sens. En s’appuyant sur l’espace, il crée comme un peintre paysagiste, sa façon de raconter les lieux.

La ville & LA Mémoire Chaque recoin de cette ville devient un tiroir de notre mémoire, une poésie que l’on apprend par cœur et que l’on se récite. Ainsi, le flâneur urbain se promène à travers la ville dans sa propre mémoire qu’il nourrit à chaque déambulation. A sa façon il construit sa ville de souvenirs. « Les villes sont un ensemble de beaucoup de choses : de mémoire, de désirs, de signes d’un langage; les villes sont des lieux d’échange; les villes, comme l’expliquent tous les livres d’histoire économique, mais ce ne sont pas seulement des échanges de marchandises, ce sont des échanges de mots, de désirs, de souvenirs» Italo Calvino Les villes invisibles


3.3. LA mémoire du site

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l’imaginaire

SVP : se souvenir

L’accès est interdit, on imagine ce qui s’y passe, les ambiances, le monde de la friche, le jour et la nuit... Lors de ma rencontre avec ce site, je m’étais autorisée à y aller, en tant que défricheuse. je l’avais observé les yeux grands ouverts mais maintenant que je suis à l’extérieur de ses remparts, de ses murs, mes images se mélangent et mon imaginaire prend le poids sur une réalité. Ma mémoire est nourrie par les images que je me suis appropriées. L’imagination nourrit la mémoire et le souvenir. Les frontières entre la mémoire et l’imagination sont particulièrement poreuses. La mémoire devient imaginative Pour certains habitants un cerf et une biche habitent dans le jardin sauvage : ces détails sont les ingrédients même de la construction d’un monde imaginaire. L’image des animaux sauvages dans une friche urbaine est bien le résultat d’un rêve, d’une imagination de la nature dans la ville. Le site, comparé à un jardin sauvage, une forêt, un lieu interdit fait rêver et imaginer un monde. La forêt, lieu des dangers a toujours fait peur et dans lescroyances abrite des animaux dangereux. Cette idée d’un monde sauvage dans une friche urbaine exprime la pensée contemporaine de la place de la nature en ville et de ce besoin de renouer avec elle.

Se souvenir, garder des traces pour ne pas perdre les bribes d’une histoire, d’un vécu. La mémoire, matière du passé, souvenir du « présent continu » comme le dit Georges Descombes sur le parc du Lancy en Suisse, outil du futur permet d’avancer dans les constructions des villes et des paysages. Ne pas faire tabula rasa, faire un écho à l’histoire sans la muséifier et la cristalliser, mais permettre à des lieux de ne pas oublier, de ne pas s’oublier. Garder en tête le souvenir d’une population, d’un monde qui s’est fabriqué, d’un lieu qui a développé son territoire avec ses activités. Car le passé ne dresse pas seulement une image de l’histoire mais un vrai savoir faire culturel et technique. Le mettre de côté, c’est perdre un élément de notre développement, ne pas prendre en compte des méthodes et des occupations qui peuvent être d’actualité.


L’histoire du site

L’«IMPULSION Géographique»

Trop souvent des projets se construisent et se développent sur une histoire faussement muette du passé. Parfois, ces nouvelles épaisseurs se rajoutent sans écouter le site lui-même, sans lui prêter attention. Il s’agit d’une nouvelle strate, continuité de l’histoire qui s’installe. Cependant, à mon sens elle ne prend pas forcément en compte ce que le site veut lui conter. Intervenir sur un lieu, y installer des usages, le réhabiliter fait appel à la mémoire. On ne peut développer son programme sans être dans un premier temps spectateur et auditeur du récit.

En arrivant sur un espace délaissé et tout particulièrement une friche industrielle, on ouvre un livre d’histoire. L ’histoire de la révolution industrielle, sociale, liée à une entrepris. C’est le récit d’un d’un territoire. En ouvrant le livre de Marquette-lez-Lille, je n’aurais pas imaginé découvrir des strates archéologiques d’une abbaye cistercienne... Tout site a son histoire, son passé antérieur, son propre vécu. Il est composé de son assiette qui le différencie de toute autres couches successives. Chaque morceau de paysage est unique par son paysage et son histoire. à l’image d’un vieillard, chaque morceau de terre a son passé rempli d’ anecdotes et de traumatismes à raconter. On les retrouve sur le site, par des récits, des cartes, des livres...Nous avons à faire à la mémoire humaine et la mémoire du site. Comment révéler et retrouver les traces d’un passé oublié ? Le site des Grands Moulins de Paris est un mille-feuilles d’histoire(s), très fines qui se superposent et au final racontent un palimpseste. Celle d’un présent continu qui a commencé au XIIe siècle qui continue aujourd’hui et se poursuivra demain.

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II. à LA Découverte de la deûle

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1. 2. 3. 4.

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il était une fois la deûle les aménagements de la deûle berceau de l’industrie entre rejet et retour de l’eau


1. il était une fois la Deûle 1.1. La vallée de la deûle

BELGIQUE

DEûLEMONT BAS SE D EÛL

BELGIQUE

NE

DEÛ

LE

E

MO YEN

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Ancienne rivière venue de l’Artois crayeux, la Deûle était connue jusqu’au Moyen-âge pour son caractère capricieux et son parcours sinueux. Prenant sa source dans les collines de l’Artois à 100m. d’altitude, son tracé dessine un axe Sud-Nord de 63 km, et elle coule du Sud au Nord. Toute d’abord, bordée par les marécages, la Deûle a été l’artère des implantations religieuses et urbaines, l’axe d’installation des commerces et des artisanats pour devenir par la suite l’artère de l’industrie. Sous la pression urbaine et industrielle, son tracé a été modifié et son gabarit élargit pour le passage des péniches. Déviée et rectifiée, elle a subi de nombreuses transformations La Deûle forme avec son prolongement par la Lys, la plus importante connexion du réseau des Voies Navigables de France avec les Flandres Belges.

H HA AUTE UT E D DEÛLE EûL E DOUAI

LA «NOIRAUDE» Le nom de la rivière est mentionné sous la forme Dupla en 1276, évolution phonétique d’un probable *Dubulā, basé sur le celtique (gaulois) dubu-, noir (cf. breton du, noir, irlandais dub, noir), c’est-à-dire : « la noiraude »

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carte de la vallée de la Deûle De Douai à Deûlemont

LILLE


1.2. les dynamiques de la deûle le commerce alimentaire

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L’artisanat a forgé l’économie de la Deûle. En effet, liaison entre la mer et Lille, elle est un vrai axe d’échange pour les marchands et les artisans au fil des siècles. Cité marchande depuis ses origines, manufacturière depuis le xvie siècle, la révolution industrielle en fait une grande capitale industrielle, principalement autour des industries textiles et mécaniques De nombreuses activités se sont développées avant l’arrivée de l’industrie sur la Deûle. Il s’agit principalement du commerce alimentaire. Venus de la côte, via la Lys, le sel est acheminé par des embarcations remontant la basse Deûle jusqu’à’ à Lille. Le travail des marchands et transporteurs de sel génère le développement de deux activités : celle des propriétaires et celle des colporteurs qui transportent le sel depuis Lille. De nombreux métiers se développent au bord de la Deûle et en font une dynamique commerciale importante. Les charretiers et broutteurs sont chargés de transporter les marchandises entre les deux rivages de Lille, soit par charrette, soit par brouette. Les bateliers organisent deux corporations, celle de la haute Deûle, et celle de la basse Deûle. Des privilèges sont accordés aux corps de navigation des bateliers et des péages. Pour rythmer la vie des travailleurs, des commerces s’installent le long des quais. De nombreux cafés, épiceries, merceries, boutiques vont devenir des lieux d’arrêt pour les bateliers, et donc des espaces dynamiques pour la ville. D’autres types de commerces profitent de cette rivière. Des vignerons et des marchands de vin vont utiliser la Deûle comme axe de transport. En effet, au Nord de Lille, un cépage est commercialisé dès le XIIe siècle. Au XIIe siècle, une communauté cistercienne de femmes va s’installer au bord de la Deûle pour les mêmes raisons. Il s’agit des sœurs de l’abbaye de Jeanne de Flandre installée en 1226 qui aura un impact important sur le territoire des Flandres. Ce sera une des plus grandes abbayes cisterciennes féminines. La Brasserie des sœurs avec la bière de marquette, les productions des terres agricoles et les réserves alimentaires seront ainsi transportées par la rivière comme premier axe de vente. Ce commerce a perduré jusqu’au XVIIIe siècle par des manutentionnaires qui débarquaient le vin par tonneaux à Lille, ainsi que de l’huile et du vinaigre.

Ainsi, on peut conclure que la Deûle est avant tout commerciale, et permet de transporter facilement les marchandises. On comprend donc la morphologie urbaine développée sur les bords de la Deûle. Les industries et les commerces s’y sont implantés pour être au plus proche de cet axe fluvial. Aujourd’hui, la Deûle est un axe fluvial important. Des centaines de péniches passent par Lille pour rejoindre la mer. Ce commerce fluvial ne s’est jamais arrêté et le développement des industries a suivit celui des activités artisanales en se développant sur les bords du canal pour faire de la Deûle un axe majeur . Il faudra ainsi penser à l’avenir ce site comme un lieu de passage des péniches, de bateaux de plaisanciers et de touristes et prendre en compte dans le projet cette « autoroute vers la mer et vers Paris».


2. Les aménagements de la deûle

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2.1. la maitrise de la rivière

LES RAISONS DES IMPLANTATIONS RELIGIEUSES

Deux grandes étapes marquent l’aménagement de la Deûle au XIIIe et au XVIIe siècle. Toutes deux visent à conforter le pouvoir économique, politique et militaire de Lille qui permettent de comprendre les stratégies territoriales de l’époque, ainsi que les éléments déclencheurs de l’installation de l’abbaye à Marquette. Dès le XIIIe siècle, pour des raisons commerciales, afin de faciliter le transport de marchandises vers Lille et pour des raisons stratégiques afin de se protéger des invasions, les comtes de Flandre cherchent à maîtriser la rivière dans sa globalité. En 1226, l’abbaye cistercienne Jeanne de Flandres s’installe à la confluence de la Marque et de la Deûle et gère le territoire avec des terres agricoles. Entourée par la nature, l’abbaye est aussi à la tête d’une importante exploitation agricole. Des aménagements sont réalisés à Marquette et à Wambrechies pour réguler le cours d’eau et faciliter la navigation vers la Lys et les grandes cités marchandes de Gand et d’Ypres. Cela explique les stratégies territoriales de la Deûle, dès le Moyen-âge. Aménagée à la fin du XIIIe siècle, la Deûle se déploie sur 13 mètres entre deux chemins de halage.

L’installation des abbayes et monastères dans la vallée de la Deûle est expliquée à l’époque de la christianisation au IVe siècle. En effet, les Églises, les collégiales, les abbayes se multiplient dans la vallée de la Scarpe, de l’Escaut et de la Deûle. Les moines, les bénédictins, vont mettre en œuvre des travaux importants de défrichage, assèchement des marais et exploitation des tourbières. Ce qui explique le chapelet des différentes abbayes le long de la Deûle. Si l’ancien site des Grands Moulins de Paris étaient un site où l’abbaye Jeanne de Flandre s’est installée, c’est donc pour cette raison. L’ordre cistercien de Citeaux fut fondé en 1098 et s’appuie sur trois règles : isolement, pauvreté et travail manuel. C’est l’explication du choix de la rivière : les cisterciens s’installent en dans endroits reculés, mais bénéficiant de fortes capacités d’irrigation, qu’ils mettent en valeur. Le choix du site cistercien a souvent répondu à cet idée, sans se trouver trop loin des axes de circulation. Comme par exemple, la Deûle ou bien la route des Flandres. Le site doit permettre l’isolement conforme à la vie hors du monde de plus, les éventuels rapports avec les seigneurs locaux doivent être pris en compte, comme par exemple avec les comtes de Flandres.

Vue de la rivière de Marquette au XVIIIe siècle Collection Musée Hospice Comtesse.


abbaye Jeanne

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Plan de Lille 1708-Monsieur Br端chman Plan de la ville de Lille investie par les Haut-Allies sous le commandement de S.A. le Prince Eugene de Savoye le 13 aout et prise le 8 octobre 1708

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2.2. LES MOULINS ET LES ABBAYES

LES MOULINS Les meuniers sont depuis le moyenâge très nombreux tout le long de la Deûle et dans Lille. On peut d’ailleurs voir sur la réinterprétation de la carte de Cassini, de 1740 que les moulins sont très présents au Nord de Lille entre Wambrechies et Marquette. Cette implantation historique des moulins à Marquette s’est développée au fil du temps et a évolué. Il y a toujours eu des moulins dans ce secteur, grâce à trois facteurs : le transport fluvial de la Deûle vers la mer et la Belgique, la proximité géographique à Lille cité commerciale et l’importance des fermes et des champs de blé dans les environs. De plus, la communauté cistercienne avait ses propres moulins pour se nourrir et pour nourrir. Ces trois raisons expliqueront plus tard au XX e siècle, l’implantation de la grande Meunerie Lilloise qui deviendra en 1921, l’établissement des Grands Moulins de Paris. L’enjeu sera de ne pas oublier les raisons de l’implantation des Grands Moulins de Paris en réfléchissant à la mémoire des moulins.

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LES MOULINS moulin à vent moulin à eau moulin LES églises paroisse abbaye de femmes Carte de Cassini réinterprétée 1740

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LES LIEUX RELIGIEUX En 1866, date de la carte d’État Major, les abbayes ont donné aux lieux leurs noms. On constate qu’à la confluence de la Marque et de la Deûle, on se trouve dans un nœud de lieux saints. St Venant, St Roch, St Bavent, L’abbaye, le calvaire. Toutes ces appellations ont marqué le territoire et ont installé l’abbaye Jeanne de Flandre au cœur des décisions politiques religieuses de Lille. On peut voir que le village de Marquette s’est installé sur les bords de la Deûle, en face de St Venant. A l’époque il est encore très réduit, mais va se développer avec les industriels. On observe déjà sur la carte des briqueteries, des fabriques et des ateliers.

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L’enjeu serait de ne pas oublier ces lieux religieux à l’avenir et de mettre en avant la mémoire de l’abbaye Jeanne de Flandre, au cœur du site des Grands Moulins de Paris. les lieux lieux religieux lieux de fermes lieux de l’industrie ville secondaires la Deûle villes principales Carte d’Etat majors réinterprétée 1866

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LES MILIEUX au Xiie Les milieux de l’époque étaient composés de marécages, de champs et de prés. La comtesse Jeanne de Constantinople avait ses terres en Flandres. Elle avait une terre, appartenant aux comtes de Flandres, de 20 hectares, situés au bord de la Deûle, reliée par l’eau à l’hospice comtesse fondé en1236 pour les pauvres et les malades. Elle décida d’y installer un grand monastère de sœurs cisterciennes l’abbaye cistercienne Jeanne de Flandres. A l’époque de son établissement, au XIIIe, le site du monastère avait une superficie de 17 ha et la ville de Lille, de 34 ha. On comprend bien l’importance de la taille de cette abbaye aux yeux de la communauté cistercienne.

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les milieux jardins et parcs parcs à bestiaux

villes principales ville secondaires la Deûle 2000

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2.3. Les canaux de lille

lille :

Implantée sur un marécage, Lille, Insula, Isola : «île» a toujours eu un lien avec l’eau dans sa forme urbaine. Cet élément est un facteur économique pour la ville de Lille. Au XVIIe siècle, la conquête de la Flandre par Louis XIV, engage le deuxième acte de l’aménagement de la Deûle. Deux chantiers sont ouverts : la construction de la citadelle et la canalisation de la Deûle jusqu’à Douai. La ville de Lille qui organise les travaux en les finançant perçoit ainsi les droits du péage. Marquette-lez-Lille était un octroi de la ville de Lille, une porte fluviale à écluses avant de rentrer dans Lille.

Lille est depuis le Moyen-Age une cité artisanale. Les artisans du textile blanchissent, lavent et rincent laines et draps dans les eaux de la ville. La pollution olfactive des 22 tanneries envahit la ville de Lille. D’autres corps de métiers utilisent les canaux : les poissonniers, les tripiers et surtout les bouchers. En effet, les abattoirs ne sont crées qu’en 1825. Dès le XVIe et XVIIe siècle des lois interdisent les nouvelles tanneries, brasseries, boucheries s’installent au bord des canaux. Les tanneurs et les teinturiers sont taxés.

UNE Cité artisanale

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Les douves et les remparts pour la défense, les canaux pour le transport fluvial, les lieux de travaux pour la tannerie et l’artisanat. A l’époque de Vauban, l’ensemble est intégré aux fortifications de la ville et la Deûle rentre dans Lille.

« L’eau des tanneries emporte du sang coagulé, des graisses, des peaux écorchées, des chairs putréfiées, des poils, des acides et de la chaux...» Carole Boussemart historienne de Lille

Lille au début du XVIIe siècle Vue depuis le village de Wazemmes Archives Hospice Comtesse. Lille


3. La Deûle, berceau de l’industrie 3.1. l’arrivée de l’industrie

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Le XIXe voit la libéralisation du trafic fluvial : les privilèges accordés aux corps de navigation des bateliers et les péages dus jusqu’alors à la ville de Lille sont supprimés. L’état est désormais propriétaire du réseau, et devient en 1802 le percepteur exclusif du droit de navigation. Depuis le XIIIe siècle elle est aux prises de l’envasement récurrent du cours d’eau qui, dans certaines sections, atteint à peine 1,20 m. de tirant d’eau. L’écluse de Pont-à-Vendin est supprimée et on remplace les barrages à sas par des barrages simples , on relancer des travaux de dragage. Il faut agir rapidement pour répondre aux besoins de l’industrie implantée le long de la Deûle.

« le paysage du fleuve, déjà passablement pollué et défiguré par l’industrie, servait de théâtre à l’évocation d’une population d’ ouvriers et de chômeurs de toutes origines fédérés par la rivière » Life along the River Passaic. 1940 William Carlos William

une rivière très polluée... C’est toute la Deûle qui est préoccupante. L’accumulation massive quotidienne générée par une quinzaine de types d’industries toutes situées en bordure de rivière. La pollution de la Deûle constatée par les membres du conseil général du Nord en 1880 ne concerne que la partie aval de la rivière canalisée. L’amont l’est tout autant, mais par d’autres types d’industries. Les activités minières, carbo chimiques et métallurgiques se sont concentrées le long du canal de Lens à la Scarpe-Deûle, sans ménager l’eau. Les usines de production de plomb et de zinc déversent durant prés d’un siècle leurs rejets chargés de plomb, de cadmium et d’autres métaux lourds.

canal de la basse Deûle. 1907 Collection Hospice Comtesse


EXPLICATION DU GABARIT de la deûle

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A l’origine, la Deûle seule était canalisée au moyen de pertuis ou même de bassins à portes marinières. Depuis le XIIIe siècle, elle est aux prises de l’envasement récurrent du cours d’eau qui, dans certaines sections, atteint à peine 1,20 m. de tirant d’eau. Puis, vers 1822, ceux-ci furent transformés en 7 écluses au gabarit «Becquey», soit 30,40 m sur 5,20 m, mouillage 1,60 m, hauteur libre 3 m, avant d’être, en 1880, mises au gabarit «Freycinet», soit 39 m sur 5,20 m, mouillage 2 m, hauteur libre 3,70 m. Au xixe siècle, pour améliorer l’approvisionnement en charbon de la ville de Lille depuis le bassin de l’Escaut, un groupe d’investisseurs obtient l’adjudication du canal de Roubaix entre l’Escaut et la Marque, affluent de la Deûle dont le confluent est à Marquette-lez-Lille. En 1880, le gouvernement décide d’homogénéiser les caractéristiques du réseau français au gabarit Freycinet, correspondant au transit des spits flamands, circulant déjà sur les canaux du Nord de la France. Ce qui explique l’élargissement du canal de la Deûle à Marquette-lez-Lille devant les Grands Moulins de Paris et le site Rhodia. En effet, à ce niveau là, la Deûle s’ouvre en port des Grands Moulins de Paris, accueillait une dizaine de péniches par jours. Les grains de Blé arrivaient par bateaux, et la farine repartait. Les péniches pouvaient ainsi se retourner, en remontant par le Nord, sans obligatoirement passer par Lille. Par suite des deux guerres mondiales, des dommages consécutifs et des moyens consacrés à la reconstruction, la situation du gabarit n’évolue plus sur la Deûle jusqu’en 1954 : cette année-là, la Conférence Européenne de Paris envisage de promouvoir les voies navigables de l’Escaut, la Deûle et la Lys en vue de la navigation des chalands de plus de 1 000 tonnes. Sur la Deûle, après la reconstruction de l’écluse à grand gabarit de Don (1959), la mise à grand gabarit (3 000 t) de la section Bauvin- Marquette est déclarée d’utilité publique. Les travaux commencent en 1968 par la section les Ansereuilles-Haubourdin, et se terminent avec la construction de la nouvelle écluse du Grand Carré à Lille (1974-1977).

Par suite de restrictions budgétaires, les travaux ne se poursuivent de Lille jusqu’à Marquette qu’avec un gabarit réduit de 1 350 t, et ce n’est que par un programme de financement régional (1978-1982) que le gabarit est porté de 350 t à 800 t entre Marquette et Deûlémont. Les travaux d’élargissement ne reprennent qu’en 1993 avec la démolition de l’écluse de Deûlémont qui entraîne un abaissement de 1,83 m du plan d’eau à l’amont de la confluence avec la Lys. Après une décennie de travaux, la Deûle a été ouverte au gabarit de 1 350 t à l’aval de Lille en juin 2004.


3.2. La De没le, un lieu de d茅veloppement IMPLANTATIONS RELIGIEUSES

ARTISANAT et commerce

Abbaye de Marquette-Albums de Cro每 -1600 Archives de Lille

chemin de halage : Traction m茅canique depuis la berge sur les voies navigables Collection Guillaume. Kiffer 1905

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ESPACES PUBLICS

plaisirs de la deûle

Jeux de joute-dauphin-1729http://virnot-de-lamissart.com

Film La vie est un long fleuve tranquille. etienne Chatilliez « et si on allait se baigner dans le Deûle ? »

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La Deûle est utilisée comme une plateforme commerciale d’échanges, un lieu implantation des abbayes et des villes avant le Moyen-Age. Les espaces publics se dessinent autour de la Deûle et deviennent un lieu de plaisirs, de jeux et de fêtes. Au XIX e siècle, Les industries s’installent sur les bords de la Deûle dans la continuité des activités antérieures. On peut dire que c’est le commerce qui a été le levier de déclenchement de l’utilisation de la Deûle et qu’il perdure encore aujourd’hui. L’histoire du transport fluvial est essentielle pour comprendre le développement territorial de la vallée, ainsi que l’implantation du site de l’abbaye et des Grands Moulins aujourd’hui. L’enjeu serait de retrouver à l’avenir cette relation à la Deûle qui aujourd’hui ne se lit plus sur les berges.


3.3. AUJOURD’HUI : LA DEÛLE... UN ESPACE Délaissé à marquette-lez-lille Depuis la Deûle

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Depuis le sol

Depuis un point haut

1.Devant le parc de Wambrechies

5.Dans le parc de Wambrechies

9.De haut sur les silos Holcim

2.En arrivant au port de Wambrechies

6. Devant l’usine Cibié à Marquette

10.Au 4e étage des Grands Moulins de Paris

3.Sur la Deûleà Wambrechies

7. à Saint-Hélène en regardant la Deûle

11.Sur le pont de l’abbaye vers Rhodia

4.Sur la Deûle, devant les Grandes Malteries

8.Vers le nouveau quartier Saint-Hélène

12.Sur pont de l’abbaye vers Spie Batignolles


VOIR LA DEÛLE 3 5

2 1

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La Deûle est considérée comme la colonne vertébrale de ce territoire. Rivière qui était le facteur des implantations du commerce, des abbayes, des villes, des usines, elle est considérée comme l’élément clef de ce paysage. Pourtant, elle est trop souvent cachée : maisons, usines, végétation, murs sont les obstacles qui ferment la deûle au regard. Une promenade en trois temps, sur l’eau, au niveau du sol et depuis un point haut, nous fait découvrir la Deûle. Pour s’en approcher, il faut prendre de la hauteur et rentrer dans des parcelles privées. Les industries ont toujours privatisé les berges. La rive droite est grâce à un corridor vert relié à Lille accessible en vélo et à pied, contrairement à la rive gauche est inaccessible au public. Rouvrir les berges et en faire des espaces publics permettrait de retrouver la relation qui s’était établie avant l’arrivée des industries entre le territoire et sa rivière.

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ANGLE D’OBSERVATION DEPUIS LA DEÛLE ANGLE D’OBSERVATION DEPUIS LE SOL ANGLE D’OBSERVATION DEPUIS UN POINT HAUT LES GRANDS MOULINS DE PARIS MON POSITIONNEMENT D’OBSERVATION

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4.entre rejet et retour de l’eau 4.1. LE RETOUR DE LA DEÛLE Assèchement de lille à la révolution industrielle, l’eau n’est plus acceptée dans la ville et n’est plus un élément clef, fondateur du tissu urbain. On la rejette, on remblaie les canaux, on assèche la ville. Le premier port du bras de la basse Deûle date du Moyen-âge et est aujourd’hui détruit. Le quai de Wault qui recevait les embarcations de l’Artois, sera remblayé. Le port disparaît. En 1966, la destruction du pont du goulet, reliant la Deûle au quai de Wault marque l’arrêt définitif de toute activité dans ce bassin. L’avenue du Peuple Belge est bétonné et est en 1893 transformé en grand boulevard urbain automobile. Cette ville d’eau « s’assèche » et rejette l’eau vers ses périphéries pour des questions sanitaires, hygiénistes comme on a pu le voir avec la pollution des eaux par les industriels. Inadaptés aux besoins sans cesse croissants de l’industrie et du commerce, les ports disparaissent. Au XIXe siècle, un nouveau site portuaire est crée au niveau de la citadelle Vauban. 58

retour de l’eau dans Lille

Dans un futur projet de développement de la friche des Grands Moulins de Paris et du site de l’abbaye Jeanne de Flandres, l’enjeu serait de retrouver la liaison qu’il existait depuis le Moyen-âge entre l’abbaye de Marquette et l’hospice comtesse. En ouvrant le bras de la Deûle, et en développant un transport de batobus, la stratégie de développement entre Marquette et Lille pourrait être retrouvée en s’inscrivant dans les projets de Lille métropole.

confluence avec la Deûle

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Ces dernières années, la Deûle a été acceptée et repensée dans le tissu urbain lillois. Réhabilitée, aménagée et protégée, elle affirme son retour. Reconnue comme liaison essentielle au sein de la métropole Lilloise, ce retournement entraîne le retour d’un paysage disparu dans les rues de Lille, celui des canaux : la place de l’eau dans la ville. En 1994, l’aménagement du quai de Wault marque le retour de l’eau dans Lille. Plus tard, le canal des Jésuites, est plus facilement retrouvé car il avait été recouvert sans être comblé en 1713. Une nouvelle étape, celle du Plan BLeu, ou projet des quais de la basse Deûle : la remise en eaux des anciens canaux du Vieux-Lille pour rouvrir l’avenue du Peuple Belge comblé entre 1930 et 1935 qui mène à l’hospice comtesse. Il s’agit de recreuser un véritable canal sur 350 m pour remettre le bras de la Basse-Deûle en navigation, et réaménager tous les espaces publics qui le bordent sur 700 m. Le bras de la Deûle dans Lille s’arrêtait devant l’hospice comtesse de Jeanne de Flandres. Portés par cette dynamique, d’autres projets sont apparus comme celui de la création d’une navette sur la Deûle reliant le quai de Wault au quartier des Bois Blancs et au site Euratechnologies, la reconstruction du pont Napoléon sur le canal de l’Esplanade, ou la remise en eau de certains fossés entourant la citadelle plan de Lille.

Futurs Quais Hospice Comtesse

du projet de plan Bleu lille prévision 2030-LMCU www.lillemetropole.fr


4.2. LEs PARCs DE LA DEÛLE Aujourd’hui : la deûle un lieu clef pour les futurs projets de paysage et

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d’architecture et d’urbanisme. Le parc de la Deûle crée par Jacques Simon, Jean-Noêl Capart et Yves Hubert est un espace naturel le long de la Deûle au Sud de Lille. Il protège les zones de captage de l’eau potable et augmente les superficies de zones naturelles. Ce grand parc de 350 ha est constitué d’espaces naturels tels que mares, marais, prairies...Il relie la Deûle avec ses paysages et permets aux promeneurs de s’en rapprocher. Un «corridor écologique» vert et bleu d’une trentaines de kilomètres se construit le long de la Deûle, reliant le sud de Lille au bassin minier au Sud de Lille. La communauté de Lille a l’ambition de réhabiliter les friches industrielles pour donner une cohérence aux berges et aux bords de Deûle. Depuis, le long de la Haute Deûle, de nombreux espaces naturels ont été réhabilités : la Louvière à Don, les Ansereuilles à Wavrin, les marais d’Haubourdin, le canal de Seclin, la Gîte à Santes. Le site des Grands Moulins de Paris fait l’objet d’un projet de ZAC actuellement en concertation à la Métropole. Il est donc nécessaire d’approfondir la stratégie d’aménagement actuelle. Euratechnologie- Bruel et Delmar 2009-Bois Blancs-Lille www.landezine.com


IIi. à LA Découverte d’un territoire d’histoire(s)

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1. 2. 3. 4.

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le moyen-âge XIVe siècle : un monastère classique XVIIIe siècle :UN PARC VERSAILLAIS XIXe siècle : installation de l’industrie


de l’abbaye jeanne de flandre

ABBAYE

CHÂTEAU

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XIIe siècle

MONDE CISTERCIEN frise historique de l’histoire du site aquarelle

XVIIIe siècle

MONDE CLASSIQUE

u


au quartier industriel

usines

friches

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XIXe siècle

MONDE INDUSTRIEL

XXIe siècle

MONDE CONTEMPORAIN


1.LE MOYEN-âge 1.1. xiiiE.l’abbaye cistercienne Jeanne de Flandre L’histoire de marquette

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La rivière de la Marque est à l’origine du nom Marquette. Les archives donnent différentes orthographes : Marchete, Markette, Marquetta, surnommée « la ville des trois ponts » Cette ville est remplit d’histoire. En 1226, la comtesse Jeanne de Flandre, fille du comte de Baudoin, empereur de Constantinople, épouse de Ferrand du Portugal, fonde une abbaye à Marquette. Le village s’épanouit. Elle est seule, son époux est emprisonné suite à une défaite contre Philippe Auguste à Bouvines en 1214. A cette époque, la Flandre est une région très convoitée. La ville connaît de nombreux incendies, des famines et des épidémies. A chaque fois, les maisons et l’abbaye sont reconstruites. Philippe le Bel en 1297 attaque Lille et la région est dévastée. En 1556, une partie de l’abbaye est détruite. Louis XIV installe son campement à Marquette en 1667, avant de prendre Lille. La guerre de succession d’Espagne amène les Marquettois à être les témoins de combats sur leur propre territoire lors du siège de Lille en 1708. C’est l’abbaye qui en fera les frais : elle sera détruite et désertée, et ne sera plus reconstruite.

L’Abbaye de Marquette, vu par le peintre des albums de Croÿ XVI http://asso.nordnet.fr

ème


2. XiVE. UN Monastère classique jusqu’à fin xviie-xviiie)

En 1228, Jeanne de Flandres installe une communauté de cisterciennes sur le site de Marquette en donnant de grands biens fonciers du comté de Flandre et en finançant la construction d’un grand monastère. En installant l’abbaye à la confluence de la Deûle et de la Marque , à l’entrée de la ville de Lille elle fut l’un des plus prestigieux monastères féminins européens de l’ordre de Cîteaux, en place jusqu’à la Révolution. 65

Grâce à de récentes fouilles, les archéologues ont retrouvé les vestiges de l’abbaye et ont permis de situer les emplacements des bâtiments. Les lieux réguliers s’inscrivaient dans un périmètre de 120 x 150 mètres . Leur plan était conforme à celui des grandes abbayes cisterciennes féminines de l’époque.

Enclos abbatial, plan 1686 source illustrée Marquette-lez-Lille à la redécouverte de l’abbaye de la comtesse Jeanne. Benoit Chauvin 2002. Ville de Marquette-lezLille


3. XVIIIe. UN parc au tracé classique Entrepris à partir de 1730 et inachevés à la Révolution Française, des travaux d’envergure vont créer un ensemble paysager et architectural à la Française, entièrement disparu. Imaginons une promenade dans ce parc...une fois ce monument franchi, le promeneur parcourait une allée de 180 mètres bordée de tilleuls et arrivait sur une vaste esplanade (120 x 80m.) avec deux kiosques prolongés de grilles ornementales, des pavillons et des orangeries, des serres chaudes, et des pièces de jets d’eau. à Marquette un véritable petit Versaillais se développait. Retrouver le vocabulaire de ce parc versaillais disparu à travers le réseau d’eau et la végétation pourrait être des idées de projet pour le futur du site des Grands Moulins de Paris.

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L’inventaire des meubles énumère : «la chambre du grainetier, le jardin potager de Mme l’abbesse très bien décoré en arbres, fleurs et fontaines avec un bâtiment pour le jardinier avec une très belle serre...40 orangers...un beau cabinet dans le jardin de ladite dame pavé de marbre...1790»


3.1. DES JARDINS ET DES POTAGERS

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Des vergers et des potagers étaient situés sur les points hauts du site, loin des marécages en zones sèches, comme on peut le voir sur la carte. On retrouve aujourd’hui des traces de vergers dans les bois de Rhodia. De plus, il a été affirmé que les vestiges archéologiques ont été sauvegardés par l’implantation des jardins ouvriers installés pour conserver les fondations de l’abbaye. Depuis le Moyen-Age, les vergers et les potagers sont présents et ont toujours servi les communautés. La communauté des cisterciennes en avait l’usage, les châtelains s’en servaient, l’époque industrielle a développé sur le site des jardins ouvriers pour nourrir et occuper les travailleurs. L’intention serait de repenser la place des jardins potagers et des vergers pour le futur site des Grands Moulins de Paris.

Enclos abbatial, plan 1751 source illustrée Marquette-lez-Lille à la redécouverte de l’abbaye de la comtesse Jeanne. Benoit Chauvin 2002. Ville de Marquette-lezLille

verger

potager «grand jardin»

beau jardin

potager

carte de 1751, localisation des jardins Enclos abbatial, plan 1686 source illustrée Marquette-lez-Lille à la redécouverte de l’abbaye de la comtesse Jeanne. Benoit Chauvin 2002. Ville de Marquette-lezLille

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« Au sud-ouest du carré monastique, s’étendent deux grands jardins, les huit planches de celui du nord et leurs pousses alignées semblent indiquer un potager; le tracé beaucoup plus recherché, mêlant quadrilatères, losange, rond-point et les festons des parterres de celui du sud suggèrent un espace d’agrément. Au sudouest de la cour occidentale, un autre jardin presque carré à dessin central montre quatre planches avec motif festonnés intérieurs. Tout le reste de l’enclos est en verger ou, le long de la Deûle, en taillis forestiers. 1686»


3.2. FIN XVIIIe siècle : UNe vie calme Au château

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Environ 150 personnes de rangs sociaux contrastés vivent à l’abbaye. Des malades et indigents, domestiques, pensionnaires, 30 converses, 40 moniales, plusieurs chapelains, un intendant et sa famille, une abbesse. Chacun de ces groupes dispose d’un quartier propre : infirmerie, internat, vacherie, lieux réguliers et ailes spéciales pour les anciennes, appartement pour les prêtres et l’intendant, palais abbatial avec une chapelle pour la plupart. Il n’y a plus de dortoirs, les religieuses vivent en chambres. Le château abbatial est riche : parquets et boiseries, cheminées de marbres et poêle de faïence, glaces et gypseries habillent les appartements richement meublés, reliés entre eux par de grands escaliers et de vastes couloirs. Des revenus annuels de 50000 livres font de Marquette une abbaye riche. Ils proviennent de baux lucratifs de 14 fermes, 6 moulins, de dizaines d’hectares de terres et de prés, des fondations, des pensions et l’ « eau de Marquette » qui est sacrée et qui fait venir les visiteurs. Les constructions dévorent le budget, au point qu’il faut emprunter ou solliciter des subventions. C’est en 1791-92, que les sœurs vont être privées de toutes ressources, et la communauté va devoir vivre sur les produits de la vacherie et de l’enclos est transformé en potager.

Le château de l’abbaye de Marquette. XVIIIe siècle Collection : Nicolas Dessault Archéologue du Service Régional de l’archéologie de Lille

EAU DE MARQUETTE «Cette eau, dont l’Abbaye possède seule le secret depuis des siècles, est bonne contre... les apoplexies et épilepsies, deux cuillerées. Pour la paralysie, la mêler avec de l’eau tiède, en frotter et envelopper les membre affectés. Pour les vomissements, oppressions de poitrine, éblouissements, vertiges, une cuillerée deux heures avant de manger, et autant le soir après le repas (pendant) deux jours. Dans les éblouissements, étourdissements et soulèvements du cœur, maux d’estomac, coliques et indigestions, une cuillerée dans un verre d’eau. Contre les maux de tête, en se la frottant sur les tempes. Contre la migraine, quelques gouttes par la narine du côté du mal. Contre les contusions, les piqûres de guêpes et moucherons, une compresse...L’odeur écarte les insectes.» Eau de Marquette réclame (v. 1775-1780)


3.3. ÉVOLUTION DE LA PORTE de L’abbaye Au XVIIIe siècle une grande porte est construite sur l’ancienne porte de l’abbaye sous l’abbesse Angélique de Rohan. Une porte monumentale servait d’entrée à un immense parc boisé et aménagé de splendides jardins. La porte se trouvait dans l’axe sur une perspective arborée Orientée est-ouest sur 170m, sa façade à double étage se composait de deux pavillons servant de porterie et de local à archives encadrant un grand bâtiment central où résidait l’abbesse. 69

Porte de l’abbaye XVIIIe siècle Collection Hospice Comtesse

Au XIX e siècle, elle est utilisée comme entrée principale de l’usine Khulmann et un café s’y installe. Au XXe, elle a été détruite pendant la guerre et ressemble à une ruine. Son délabrement dangereux obligea la société Kuhlmann à la démolir en 1942. Elle est détruite et remplacée par une porte contemporaine pour le stade de football Rhodia. Aujourd’hui elle est délabrée et laissé à l’abandon. Elle donne sur le stade de football en friche et pollué.

Porte du stade Donat- Agache en 2013 Rue Sadi Carnot


4. LE XIXe : siècle INSTALLATION PROGRESSIVE DE L’INDUSTRIE

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4.1. La vallée de la Chimie Le charbon alimente l’industrie textile et chimique en plein essor dans la métropole Lilloise. L’un des plus importants clients des compagnies minières est Frédéric Kuhlmann, installé à Lille pour créer un enseignement de la chimie. Peu à peu, Kuhlmann, soutenu financièrement par le patronat local, ouvre d’autres établissements à Marquette, Saint-André et à la Madeleine, où il rachète l’usine d’un concurrent, Claes, en 1847. Occupant une trentaine d’hectares en bordure de la Deûle, elle devient la principale unité de production, avec un quai s’étirant sur 800 mètres et un accès au réseau ferré développé spécialement pour l’entreprise. Un port Rhodia pour l’import export des produits se développe et ce lieu devient une halte fluviale pour les péniches. Devenue la manufacture des produits chimiques du Nord, elle poursuivra son activité à la suite de ventes et de restructurations, sous le nom de Rhodia. Le site où se développent les établissements Kuhlmann s’étend sur 40 hectares et se trouve dans le quartier de l’abbaye, à la jonction de trois villes : Marquette, La Madeleine et Saint-André. Elle est jusqu’à la fin de son activité une des industries qui emploie le plus d’ouvriers dans la région, facteur d’économie et de développement local. Cette usine a beaucoup marqué les mentalités et les souvenirs de cette époque industrielle. Démantelée depuis 2003, l’usine a disparu et laisse place à un site pollué en friche. L’objectif est de trouver par de nouveaux usages du site des activités qui offrirait aux habitants une économie et une nouvelle manière de découvrir le site et de repenser cette halte fluviale. Le site Rhodia Khulmann en 1925 Fond Pasquero. Hospice Comtesse Collection Catherine Nmili


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4.2. UNE PLATE-FORME de l’industrie agroalimentaire sur Laquelle s’installera la meunerie lilloise En 1920, la minoterie de la Meunerie Lilloise s’installe sur la rive gauche, mitoyenne à l’usine Khulmann. Bâtiment racheté par de la filière des Grands Moulins de Paris, elle est l’établissement qui s’impose dans le Nord de la France. Le commerce entre Paris et Lille sera relié par les péniches. Château industriel de la Deûle, le bâtiment est aux portes de Lille et devient le symbole de la farine de Nord. Avant l’arrivée de la Meunerie Lilloise en 1920 sur les berges de Marquette, de nombreuses industriels de l’agro-alimentaire se sont établies. Au cours de la première moitié du XIXe siècle, l’industrie des céréales s’est développée avec des moulins, des maïseries des malteries associées aux brasseries, des distilleries et des amidonneries. Après avoir crée en 1853 une distillerie d’alcool de grains à Marquette-lez-Lille, les familles Lesaffre et Bonduelle s’installent dans le moulin de Marcq-en-Baroeul, pour fabriquer de la levure fraîche depuis les moûts de fermentation de céréales en 1873. Les Grands Moulins de Paris se sont implantés au sein d’un quartier déjà industriel et a su se construire dans cette dynamique économique. L’objectif est de ne pas oublier ce patrimoine en retrouvant à l’avenir une richesse économique liée à ce lieu, à la Deûle et à la ville. le site des grands moulins de paris en 1930 Fond Pasquero. Hospice Comtesse Collection Catherine Nmili


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La De没le industrialis茅e en 1954


4.3. L’arrivée de l’industrie entre saint-andré la madeleine et marquette-lez-lille

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A partir de 1900, ces trois communes deviennent un quartier industriel dynamique. Les bords de la Deûle sont exploités pour le transport fluvial, les rives sont privatisées et les usines se multiplie. La villes se densifient, la population augmente et s’industrialise. L’implantation des usines modifie le territoire et les infrastructures. La ligne de chemin de fer est rapidement installée et ouvre des portes aux transport ferroviaire : la gare de la Madeleine et celle de Saint-André sont implantées pour l’usine Rhodia Khulmann, un port pour Rhodia et un pour les Grands Moulins sont construits. Le calibrage et l’élargissement de la Deûle vont permettre aux usines de se développer. La Deûle devient une bande industrielle au Nord et au Sud de Lille.


LA MEUNERIE LILLOISE La guerre 14-18 modifie le territoire qui change et se développe par les chemins de fer. La reprise économique et la desserte des lieux par voies ferrées aboutissent à une occupation par des usines autour et sur les bords de l’enclos abbatial. Un concours de plusieurs meuniers sinistrés est lancé dans le but de reconstituer en une seule unité plusieurs moulins qui avaient été détruits pendant l’occupation allemande. Il s’agissait des Moulins Reuflet à Quesnoy-sur-Deûle, Deligne Frères à Lens, Naveau et Maure à Beuvry-les-Orchies, Coupey à Annoeulin, Meunerie coopérative roubaisienne à Roubaix. 74

La Meunerie Lilloise sera rachetée par les Grands Moulins de Paris en 1928 qui emploieront un maximum de 366 ouvriers. Les Grands Moulins de Paris travaillent pour l’exportation : l’ Egypte, le Sri Lanka, le Maroc, les Antilles, la Palestine. Le reste de la production est utilisée pour la boulangerie artisanale régionale.

On comprend donc que l’installation de cette minoterie au Nord de Lille va avoir un impact favorable sur le territoire et sur les populations. En effet, symbole de modernité, cette industrie de la farine va permettre à la région d’exporter à l’étranger, de continuer à développer un commerce fluvial important vers la mer. Cette implantation à la limite des plaines agricoles de Lille va favoriser un échange entre les fermiers locaux et les moulins qui viendront vendre leurs blés aux Grands Moulins de Paris et de faire venir de la main d’œuvre des pays étranger et local. Le commerce par la voie ferrée va être doublement mis en avant et l’usine construira des voies au sein de son site Cette usine va être un élément favorisant l’économie, la richesse et le sous-développement de la ville de la région.

publicité pour la meunerie lilloise 1930 Fond Pasquero. Hospice Comtesse Collection Catherine Nmili


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LA MINOTERIE DANS LE TERRITOIRE

UN paysage industriel

La minoterie en règle générale, s’installe entre les infrastructures et crée des espaces publics. On constate qu’elle anticipe cette prise en charge du territoire en se logeant entre voie d’eau et voie ferrée. Le fil directeur de cette architecture est le régionalisme néo-flamand. L’établissement de l’industrie et son départ forgent le paysage social et le devenir des territoire du Nord de la France. Les Grands Moulins de Paris à Pantin s’établissent en 1880, ceux de Marquette-lez-Lille, attendront 1920. La branche d’activité des Grands Moulins de Paris connaît, au lendemain de la Guerre, une nouvelle phase de concentration. Il faut attendre 1925, 1929 et 1932 pour que les récoltes de blé rejoignent et dépassent leur niveau de 1913, grâce au recul des jachères, à la poursuite de la mécanisation et à l’utilisation progressive de fertilisants chimiques. Les conséquences pour la meunerie sont de deux types : la poursuite des importations de céréales, en très forte augmentation durant la guerre : le froment des pays neufs (Etats-Unis, Australie, Argentine, Canada doit compenser l’insuffisance des récoltes. Puis la réduction des moulins, avec l’accroissement des capacités de production et de stockage, rendu possible par l’emploi du béton armé. Les minoteries rescapées se modernisent, se densifient et le nom des Grands Moulins de Paris s’installent en force. Un chapelet de minoteries se développe. Paris, Pantin, Strasbourg, Worms (Allemagne), Dijon, Toulouse, Lyon, Bordeaux, Lille, Valenciennes...Le groupe possède enfin dès 1928, des participations en Belgique et en Allemagne dans de nombreuses sociétés minotières. L’usine Rhodia et les Grands Moulins de Paris s’installent au bord de l’eau, réseau de transport fluvial international pour des questions de développement économique et d’exportation par péniches. Les fermes des alentours venaient vendre leur blé aux grands Moulins de Paris

L’usine des Grands Moulins de Paris a transformé de 1920 à 1989, les blés de France en farine. Un tel développement économique induit une évolution radicale pour un bourg rural. Quartiers, jardins ouvriers, transports, écoles, lieux de vie, stade de foot... Il y a des conceptions paternalistes qui se développent, des logements ouvriers, aux cadres, une association sportive, une coopérative, un cinéma. Tout est pris en charge par les usines : tout est pensé dans son ensemble et cela produit un paysage du monde industriel. L’architecte Vuagnaux est à l’origine de ces bâtiments de style néo-flamand extrêmement modernes pour l’époque. Architecte parisien spécialisé dans les minoteries.

aux PORTES DE LILLE

Une usine-symbole, image de la ville de Marquette-lez-Lille.

Minoterie : minoterie, nom féminin Sens Etablissement où l’on transforme les grains en farine destiné au commerce extérieur.

le site des grands moulins de paris en 1930 Fond Pasquero. Hospice Comtesse Collection Catherine Nmili


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LE SITE EN 1989

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Photographie de 1989 Photo prise du ciel par les archĂŠologues collection : Nicolas Dessault


SITUATION DU SITE DANS SON TISSU URBAIN

WAMBRECHIES

MARQUETTE_LEZ_LILLE

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SAINT-andré

Localisation du site entre La Madeleine, Saint-André et Wambrechies Photographie aérienne www.ign.fr

la madeleine

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4.4. LES JARDINS DES QUARTIERS ENVIRONNANTS

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La ville est rythmée par ses jardins. Sur la rive droite, le tissu urbain s’est densifié et est composé d’habitats ouvrier s’est installé, alors que la rive gauche et les berges de la Deûle ont laissé de façon plus marquante une place à l’industrie. L’ancien site de l’abbaye dévasté est devenu un terrain vague, et de lourdes industries de s’y sont installées. Ce phénomène se lit à travers les jardins de la ville. On différencie l’espace en friche des petits jardins ouvriers en arrête sur la rive droite qui correspondent à l’installation des quartiers ouvriers. Ces jardins, un souvenir de ce passé rythmé par le paternalisme et l’industrie.

Carte des jardins de Marquette et de Saint-André


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Jardin d’un ancien ouvrier des grands moulins de paris. 21 octobre 2013


Iv. de l’eurométropole à la métropole

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Rocade Nord ouest qui passe sur la Deûle à Marquette-lez-Lille Vers les frontières Novembre 2013


1. L’échelle transfrontalière 2. L’échelle de la métropole lilloise

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1. l’échelle transfrontalière 1.1. Un site au cœur de la métropole Le site se trouve dans une imbrication d’échelles au sein de l’Eurométropole transfrontalière, dans l’Eurorégion, au cœur de la métropole Lilloise. Le futur projet ne sera pas réfléchi seulement à l’échelle des trois communes : la Madeleine, Saint-André et Marquette-lez-lille, mais à l’échelle de la Métropole et de l’Eurorégion. Il pourrait devenir un lieu clef pour des problématiques de tous ces territoires comme le développement, des dynamiques et des réflexions actuelles. 84

La ville de Marquette-lez-Lille se trouve à 90 km de la mer, on peut imaginer la poésie et la sensation qu’ont les péniches ont en venant de Dunkerque et en passant dans les paysages de la vallée de la Deûle.

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carte inspirée de l’Eurométropole-Lmcu Vivre ensemble notre Eurométropole www.lillemetropole.fr

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1.1. L’eurométropole : UN territoire franco-belge

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Schéma des acteurs


2. l’échelle de LA métropole lilloise 2.1. évolution de l’urbanisation de la métropole lilloise

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L’explosion

Après la guerre

La population de Marquette-lez-Lille se développe avec l’industriel Rhodia qui s’implante sur le territoire. La Deûle s’industrialise, et devient un lieu de commerce et de développement d’industriels. Les rives sont privatisées. Dans les années 1840, l’explosion démographique et industrielle a eu lieu. La démographie de Roubaix et Tourcoing, ville voisine de Marquettelez-Lille font figure d’exemple dans le sens où aucune autre villes françaises ne croit de cette manière, sur une période si courte grâce au commerce de la laine.

La métropole se développe par ses industries qui dominent le territoire.

À l’avenir, il pourrait d’ailleurs être pertinent de faire passer la route de l’industrie (des enjeux à l’échelle de la métropole) par ces industries de la laine.

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On constate que le nord de la Métropole, et plus particulièrement à la confluence de la Deûle et de la Marque, est très urbanisé. Les villes de Saint-André, la Madeleine et Marquette-lez-Lille sont devenues un quartier industriel spécialisé dans la pétrochimie et l’agroalimentaire, ce sont des villes d’ouvriers qui se développent. à l’est, les villes de Roubaix et Tourcoing décuplent et la métropole croît.


87 1990

2014

LE POST-INDUSTRIEL

LES RECONVERSIONS DES friches industrielle

La période de la crise industrielle s’installe. L’industrie est victime des délocalisations de la production. L’influence de la grande distribution favorise les produits étrangers. Des industries ferment, de grandes marquent sont rachetées. L’activité des Grands Moulins de Paris s’arrête en 1989, celle de Rhodia en 2003. La démographie continue à croître, mais on passe à l’époque postindustriel.

Grâce à de nouvelles politiques des zones ZPPAUP (Zone de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager) sont mises en place. La métropole se rend alors compte des opportunités qu’offrent les friches de la ville et la nécessité de les reconvertir apparaît comme un des enjeux primordiaux. La métropole, qui compte le plus grand nombre de friches en France, doit faire face à la dépollution et aux techniques scientifiques. La plupart des sites sont extrêmement pollués. La ville de Roubaix sera le ville exemple pour la réhabilitation des friches. Référence pour les projets en architecture, l’usine Roussel est réhabilitée en école de danse, l’usine Motte-Boussut, en Centre de archives du Monde du Travail, la Condition Publique, en Fabrique Culturelle, la piscine municipale en musée. Le site de l’Union est la référence pour les projets de dépollution et de paysage dessiné par l’agence Reichen & Robert et l’association des Saprophytes.


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RHO DIA


2.2. LES PROJETS actuels DE LA Métropole

En 2014, on voit que la métropole Lilloise continue à situer ses projets sur la ceinture de Lille.

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PÔLE EURA : un lieu qui participe à la redynamisation économique de la métropole lilloise et qui s’organise autour d’une filière d’excellence.

Comme un collier de projet, Lille est en pleine réflexion sur des futurs parcs, en relation avec la Deûle : la citadelle d’ici 2020, Le bois Blancs, le parc de la Haute Deûle, le site Rhodia d’ici 2030, le plan bleu pour 2020, le port de Lille. On redonne à la Deûle une place dans l’espace public et dans les aménagements urbains. Les projets tentent un retour historique entre l’eau et l’histoire, en reliant les sites à la Deûle. «Imaginer et bâtir ensemble un nouvel art de ville pour un nouvel art de vivre ensemble. C’est l’ambition collective du projet urbain Lillois.» Martine Aubry Séminaire ««ville 3000. Imaginer de nouveaux quartiers à vivre à Lille» 11 juin 2009

Carte des projets actuels de la Métropole Lilloise en 2014

SITE DE PROJET GRANDS MOULINS DE PARIS projet en réflexion projet en cours

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imaginer de nouveaux quartiers à vivre à Lille

*LE PROJET RHODIA ÉLARGI Situé sur un ancien quartier industriel au bord de la Deûle à Marquette-lez-Lille au Nord de Lille. Le projet de 55 ha vise à développer une ZAC, Zone d’activité Concertée de la ville de Lille comprenant de l’habitat, de l’économie et des activités de loisir en rapport avec le site archéologique de l’abbaye Jeanne de Flandres datant du XIIe siècle. Il s’agit du site des Grands Moulins de Paris de travail de fin d’études.

le PLAN BLEU, fil conducteur de la deûle.

Le plan bleu vise à remettre en valeur l’histoire fluviale de la ville. Depuis l’installation de fontaines publiques jusqu’à la remise en eau de l’avenue du Peuple Belge, la présence de l’eau sera matérialisée dans le cœur de la ville, pour rappeler les canaux de l’histoire et la place que l’eau occupait dans le passé. La Deûle peut ainsi redevenir un axe structurant et servir de support à de futurs projets d’aménagement.

le PORT DE LILLE 90

Une première séquence du port fluvial de Lille, entre la citadelle et le pont de Dunkerque, a vocation à réintégré dans le tissu urbain reliant Vauban au projet des rives de la Haute Deûle. L’ensemble sera structuré par un réseau d’espaces publics et de promenades en bord de canal. Il doit jouer un rôle d’interface entre les quartiers des bois-Blancs et de Vauban-Esquermes, actuellement séparés par les infrastructures du port

la CITADELLE

Sur 100 hectares, le parc de la citadelle est un véritable poumon vert dans un milieu au plein cœur du tissu urbain. Il est l’un des espaces de la métropole les plus fréquenté pour les activités qu’il offre : sport, nature, détente, histoire, zoo, relation à la Deûle...Il fait l’objet d’une requalification qui mettra en valeur son patrimoine écologique et historique.

RIVES DE LA HAUTE-DEÛLE

C’est un projet débuté en 1999, sur un espace regroupant les communes de Lille et de Lomme. Cette opération de renouvellement urbain s’appuie sur un pôle d’excellence économique métropolitain : EURAtechnologie. L’emblème de ce projet est la réhabilitation de l’usine le Blanc-Lafont qui illustre la réutilisation du patrimoine industriel.


GARE SAINT SAUVEUR

C’est un vaste territoire de 21 ha bordé à l’est par des franges qui connaissent d’importantes mutations. Les premières orientations d’aménagement de ce secteur prévoient la réalisation d’un quartier mixte ponctué par des parcs et des jardins. Ce quartier sera constitué de bureaux, de services et de logements.

FIVES-cail-Babcock

Dans le quartier de Fives, la friche industrielle Fives-Cail-Babcock constitue un potentiel de 17ha. Un programme de requalification prévoit un parc urbain de 5 ha, la construction de 800 logements, l’implantation d’un lycée européen de l’hôtellerie et la bourse du travail. Ce futur écoquartier privilégiera les déplacements doux, les économies d’énergies et une gestion innovante de l’eau et des modes de vie durables.

PORTE DE VALENCIENNES 91

Site stratégique à la jonction de plusieurs quartier (17ha- Moulins, Fives, Euralille 2), c’est une porte d’entrée dans la ville. L’enjeu majeur de cette restructuration urbaine est de relier le nouveau quartier du «bois-habité» aux grands ensembles de Belfort par un boulevard urbain apaisé.

LE RENOUVELLEMENT URBAIN DE LILLE-SUD

Cette stratégie urbaine est composée de quatre étapes : la halle de glisse, le faubourg des modes, le faubourg Arras-Europe et le secteur Cannes-Arbrisseau. Le projet consiste à insérer des fonctions urbaines d’envergure dans le domaine du sport, des équipements, du commerce et du développement économique. Il est couplé à un projet ambitieux de diversification de l’habitat et du cadre de vie.

LE SECTEUR DES DEUX-PORTES

Avec l’acquisition en décembre 2006 de 9 ha auprès du Réseau Ferré de France, l’aménagement de ce secteur situé de part et d’autre du périphérique entre la porte des postes et la porte d’Arras est désormais possible. Aux côtés d’opérations déjà acquises, d’autres projets seront soumis à discussions : installation d’activités économiques,; construction d’un parking relais en silo; implantation d’une troisième gare lilloise; couverture partielle du périphérique...

Extrait du livre CARRE D. Ville 3000 Imaginer de nouveaux quartiers à Lille ed. Carré 2010


2.3. le projet Rhodia élargi DES OBJECTIFS FORTS POUR LE SITE

92

Présentation DE LA ZAC JEANNE DE FLANDRE PROJET DE LA LMCU Il s’agit d’un des grands projets actuels de requalification de friches industrielles de la métropole Lilloise. Il est dirigé par la communauté urbaine de Lille et décidé par le secteur du développement urbain et des espaces naturels. Ce site de 60 ha présente une opportunité foncière qui permet l’économie sur les terres agricoles. Il fait partie du programme «1000 hectares économiques» et sera le prototype des parcs d’activité du XXIe siècle. Les objectifs de ce parc d’activités sont de reconvertir un site industriel en intégrant les activités existantes, de créer de l’activité économique et développer de l’emploi. Répondre aux besoins de logement en villes à Marquette-lez-Lille et à Saint-André ainsi qu’au sein de la métropole dans le cadre du programme local de l’habitat. Ce parc devra aussi se développer autour de la trame verte et bleue en rendant possible les promenades piétonnes le long des deux berges, tout en favorisant l’intermodalité du site en développant des transports en commun.

HABITER TRAVAILLER SE DIVERTIR 4 objectifs

SE DÉPLACER


HABITER SE dĂŠplacer travailler se divertir

93

60 ha SAINT-ANDRĂŠ-lez-lille

la madeleine

PROGRAMME DE LA ZAC carte des trois communes qui prennent en compte le site des grands Moulins de Paris

la gare de la madeleine


2.4 LES TROIS POINTS FORTS DE LA MéTROPOLE 1.LES PARCS DE LA Métropole

2. LES eura pôles DE LA Métropole

La métropole lilloise est composée de 4 parcs principaux, la citadelle de Lille au cœur du parc Vauban, le parc du Hem, le parc de la Deûle et le parc du Héron qui comprend le nouveau musée d’art contemporain. Ces parcs se trouvent en dehors de Lille et il y a un vrai besoin de nature à ville. Les réhabilitations des friches industrielles au bord de la Deûle pourraient prendre en compte le besoin de parcs. La friche des Grands Moulins de Paris peut devenir un futur parc à l’avenir autant culturel que patrimonial.

De nombreux pôles à filières d’excellences se spécialisent dans les secteurs de la santé, la technologie, les transports, la mode...Ces pôles sont des facteurs d’économie et de développement à l’échelle de la métropole Ce dynamisme permet à des secteurs de s’enrichir. L’enjeu serait de créer sur le site des Grands Moulins de Paris, un pôle d’excellence dédié à l’archéologie et au patrimoine à la fois économique et culturel.

EURAUNION

94

PARC DU HEM

PARC DE LA CITADELLE

EURATECHNOLOGIE

PARC DU HERON EURALILLE

EURASANTé

PARC DE LA HAUTE DEÜLE N Carte des parcs de la métropole

N Carte des pôles Eura de la métropole


3. LES PORTS DE LA Métropole Aujourd’hui on compte 2 ports importants dans la métropole Lilloise : le port de Wambrechies au nord qui possède 38 anneaux et le port industriel de Lille qui est en pleine réhabilitation. Il est donc difficile de faire une halte en bateau et la demande est de plus en plus croissante. Il faut attendre 3 ans pour obtenir un anneau à Wambrechies. L’enjeu serait de développer le déplacement fluvial et les haltes aux portes de Lille. L’objectif est de redynamiser la place de la Deûle, pourquoi ne pas tendre vers un transport local par bateau et vers un nouveau tourisme Lillois en créant de nouveaux ports?

95 PORT DE WAMBRECHIES

PORT DES BOIS BLANC PORT FLUVIAL DE LILLE page suivante : Dessin des Grands Moulins de Paris Depuis le pont de la Marque Octobre 2013

N Carte des ports de la métropole

2000

4000

Le site des Grands Moulins de Paris


v.Ă LA DĂŠcouverte du paysage contemporain des grands moulins de paris

96


1. 2. 3. 4.

97

LE SITE DANS SON TERRITOIRE PORTRAIT ACTUEL DU SITE Promenade DANS LE site LA PLACE DE LA mémoire


1. LE SITE DANS SON TERRITOIRE 1.1. UN SITE Stratégique de la métropole : UN réseau d’infrastructures richeS

98

Carte des infrastrutures à l’échelle de la métropole D’après les données SIG QGIS www.ign.fr page suivante : carte de la Métropole et de la commune de Marquette-lez-Lille D’après des données de la Dreal Atlas des paysage du Nord http://www.nord-pas-de-calais. developpement-durable.gouv.fr


vers UNE HALTE AUX PORTES DE LILLE? La situation géographique du site des Grands Moulins de Paris à proximité de Lille de la gare de la Madeleine et des dessertes fluviales a permis un développement économique rapide au début du XXe siècle. Les entreprises et les réseaux se sont concentrées le long des berges de la Deûle et de la Marque. La ville de Marquette est au cœur des infrastructures métropolitaines. A quelques minutes de l’aérodrome de Marcq-en-Barœul proche de la rocade du Nord, la Deûle et la confluence avec la marque et donc le canal de Roubaix.

99

Le site a une position stratégique, au sein d’un réseau d’infrastructures riches. Ce site pourrait donc être une vraie halte aux portes de Lille. Le lino et un tram-tram doivent prochainement être prolongés jusqu’à Marquette, ce qui placerait la ville à 10 mn de la gare de Lille Flandre


2. PORTRAIT ACTUEL DU SITE 2.1. Observations des grands moulins de Paris à LA RECHERCHE DES GRANDS MOULINS DE PARIS Depuis la Deûle

Depuis le sol

Depuis un point haut

1.Sur la deûle avant la rocade

5.Avenue de l’industrie, longeant le mur

9.Sur le pont de l’abbaye, vers le nord

2.Sous le pont de marquette

6.Avenue de l’industrie, devant une haie de rhodia

10.Depuis le 4e étage des bâtiments Spie Batignolles

3.Devant l’entreprise Boone aluminium dur la deûle

7.Rue Sadi Carnot, proche de la porte de l’abbaye

11.Sur le pont Pasteur devant l’usine d’aluminium.

4.Devant le mail de la rue de l’industrie

8.Rue de la deûle, devant le mail, rive opposée face aux Grands Moulins de Paris

12. Depuis le pont de la Madeleine, sur la Deûle

100


On m’avait présenté les Grands Moulins de Paris, comme un repère de l’entrée Nord la métropole, et pourtant je les ai cherchés...à partir de trois niveaux d’observation, l’objectif était de décrypter la place des bâtiments dans le paysage et de comprendre leur impact visuel. Essayer de les voir, tenter de les apercevoir, observer un partie : silo, tour, toit... Les Grands Moulins de Paris se dressent majestueusement au bord de la Deûle mais ne sont finalement perceptibles que depuis certains points clefs. Dans une ascension sur trois niveaux, l’eau, le sol, les points haut, l’observation du bâtiment des Grands Moulins de Paris est difficile car les obstacles visuels sont nombreux. C’est pourtant depuis le sol qu’ils sont les plus visibles. Il est possible de les approcher de plus près, même si le promeneur est gêné par la végétation qui forme un mur, un rideau obstruant les bâtiments.

1 2

11

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20 K

40 k

Carte à la recherche des grands moulins de paris

1000

1000


LA SILHOUETTE DES GRANDS MOULINS DE PARIS Depuis la Deûle

102

Depuis le sol

Depuis un point haut

1.Sur les berges, face aux Grands Moulins de Paris

5.Depuis l’usine PUM plastique

9.Sur les silos Holcim à 30 m de hauteur

2.Sous le pont de la rocade

6.Depuis le site archéologique de l’abbaye

9.Depuis une butte, en face des GMP

3.Devant les grandes malteries vers les silos

7.Rue Sadi Carnot

10.Depuis la rocade nordouest , en voiture

4.Devant l’usine Holcim

8.Depuis le site Rhodia

11.Depuis la rocade nordouest , en voiture


11 2

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Amers : n.m. Marques apparentes sur les côtes, telles que les cloches, tours, rochers, propres à guider les navigateurs qui sont en vue de terre. Dictionnaire des mots rares et précieux

8

5 7

Carte la silhouette des grands moulins de paris

1000

En me rapprochant un peu plus, en déterminant certains points d’observation, en dégageant la vue sur les Grands Moulins de Paris, en traçant des lignes droites avec le regard, en me rapprochant et en essayant d’éviter végétation et murs, la silhouette des Grands Moulins est lisible dans sa globalité. On peut la regarder depuis les silos, retrouver même de loin sa silhouette son profil identifiable entre tous les bâtiments. Ce travail sur les trois niveaux, eau, sol, points hauts permet de dépasser les obstacles et de se positionner en pied de façade, de comprendre l’impact des bâtiments des Grands Moulins de Paris sur le paysage, comme une grande cathédrale industrielle au bord de l’eau, un amer.

1000


2.2. UN SITE clos, PROPICE a l’imaginaire

104

le mur

L’imaginaire

Tourner autour, faire le tour, contourner, arpenter longer, butter, parcourir.. On observe, on cherche des trous de serrures, des «portes», des vides par lesquels on pourrait apercevoir un détail ou un élément, entrevoir ce qui s’y passe. Cela nous renvoie à des images qui nous rappellent des lieux-souvenirs, lieux de l’imaginaire. Le lieux et l’imaginaire se rencontrent pour ne former plus qu’un. Un mélange entre l’histoire des Grands Moulins, le passé de l’abbaye, les souvenirs de livres sur les usines, des promenades dans les jardins des monastères, les photos de lieux abandonnés. Un sentiment de peur et d’excitation s’esquissent au-delà du mur.... J’ai toujours été passionnée et intriguée par les murs qui séparent. Dans le paysage urbain, le mur séquence les espaces, les inscrit dans des parcelles, des formes. Les monastères, les prisons, les jardins, les propriétés, les hôpitaux, les écoles, les musées, les frontières La clôture des cimetières symbolise la frontière existant entre le sacré et le profane et sépare le monde des vivants du monde des morts... tous ces espaces possèdent leurs murs, leurs gardiens. Les murs forment une peau, une épaisseur qui clos le site. Les murs apparaissent comme une ligne, un rythme dans ce paysage, une continuité.

Le terrain des Grands Moulins de Paris appelle à l’imaginaire et fait rêver. Des personnes interrogées y imaginent des cerfs, des animaux sauvages y habitant, un hibou nichant dans la tour. Des mythes s’y développent, des meurtres s’y racontent, des accidents s’y passent.. Ce site devient une île imaginaire, un lieu extraordinaire, un rêve.

L ’intention serait d’ouvrir ce site au public, aux usagers : de le faire dialoguer avec la ville et le paysage alentour. Observer le site depuis l’extérieur est une façon de se l’approprier et de le comprendre. Découvrir le plein par le vide, c’est définir les limites du site, en faire le tour. L’enclos de l’abbaye est encore lisible et «arpentable». En redéfinissant les limites de l’ancien enclos, on peut grâce au mur, mettre en scène la mémoire du site fermé, de cette ancienne communauté cistercienne. Par un travail sur le thème des entrées, des murs, et des limites, on peut s’appuyer sur l’histoire pour réfléchir au futur. Le projet cherchera à penser aux ouvertures, à la place du mur dans ce site fermé.

Mur du site de la rue de l’industrie


PLAN DES DIFFÉRENTES murs de l’histoire

105

ancien enclos de l’abbaye murs actuels anciennes limites Rhodia entrées des défricheurs dans le site

Carte des sondages de l’abbaye Source : Laurent Gubellini Société ARCHEOPOLE cartographie des murs et des clôtures du site

100

200


Ouvrir le site casser l’enclos Présentant de nombreux dangers, le site est fermé au public. à l’image d’un gruyère, une multitude de puits sont cachés dans la végétation. Ouverts et remplis d’eau par les nappes phréatiques polluées, ils sont disséminés comme des pièges. Des résidus rouillés de la minoterie sont parsemés comme des indices. En se rendant sur le site on comprend qu’il soit fermé. Un arrêté de péril qui a été établi est affiché sur les murs extérieurs.

« Essayer de classer les gens : ceux qui sont du quartier et ceux qui ne sont pas du quartier. Il ne semble pas y avoir de touristes. L’ époque ne s’y prête pas d’ailleurs. Le quartier n’est pas spécialement touristique. Quelles sont les curiosités du quartier ? » Espèce d’espace Georges Perec

Ces lieux, une fois sécurisés pourraient être ouverts au public, afin de (re)devenir des lieux de vie accessibles à tous en ouvrant certaines parties des murs.

106


« Lorsque rien n’arrête notre regard, notre regard porte très loin. Mais s’il ne rencontre rien, il ne voit rien ; il ne voir que ce qu’il rencontre : l’espace, c’est ce qui arrête le regard, ce sur quoi la vue butte : l’obstacle : des briques, un angle, un point de fuite : l’espace, c’est quand ça fait un angle, quand ça s’arrête, quand il faut tourner pour que ça parte ; ça a des bords, ça ne part pas dans tous les sens, ça fait tout ce qu’il faut faire pour que les rails de chemin de fer se rencontrent bien avant l’infini. » Espèce d’espace. Georges Perec 107 MURMURE DE MURS Collage des murs qui ferment le site Septembre 2013


LES NOUVEAUX USAGES DE CE SITE Malgré le fait que le site soit fermé, il est tout de même visité, utilisé et devient le terrain de jeux des citadins, leur espace sauvage de la ville. Des gens du voyage viennent s’y installer, des personnes s’y promènent et rentrent dans ces murs comme un endroit qu’on visite, un jardin interdit... Ce «monde» est surtout représenté par différents types de photographies prises sur le terrain. Photographies d’architectes, de défricheurs amoureux des bâtiments en ruine. Haut lieu de photo de charme, de photos expérimentales, on trouve de nombreux utilisateurs qui y passent pour la beauté des lieux. Tagueurs de friches, squatteurs, curieux, sons et lumières... ce lieu développe un imaginaire et fait rêver. à Lille, tout le monde connaît les Grands Moulins pour y être allé au moins une fois en visite. La ville de Marquette-lez-lille est aujourd’hui connue pour sa friche.

« Si la banlieue est l’endroit où le futur s’est perdu, alors c’est en effet dans ces «terrains de jeux» que l’art doit peut-être aller chercher le sien, et une possible renaissance. » « A Tour to the Monuments of Passaic, New Jersey» Robert Smithson 1967

Ces activités pourraient s’y développer en l’ouvrant et en le sécurisant puis en y développant ces expressions artistiques.

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«L’enquête devra aussi déterminer dans cette affaire la part de responsabilité du propriétaire, qui a racheté le bâtiment il y a plusieurs années. Un propriétaire nommément mis en cause par le maire de Marquette, qui déplore que le bâtiment soit laissé à l’abandon et devienne la proie des vandales et des squatteurs. «Nous avons fait installer des grilles et grillages autour de l’usine pour éviter ce genre de problème. La police municipale y passe tous les jours, bien que les terrains ne nous appartiennent pas. Si responsabilité il doit y avoir, c’est celle du propriètaire.» Alexis Degroote Aticle la voix du Nord 29 juin 2002

Avenue des Grands Moulins de Paris Entrée fermée en septembre 2013


«cet endroit où l’on est incomparablement plus libre qu’à la ville» et où l’on peut « ouvrir sa porte sans être tiré à quatre épingles...» Alberti (le suburbia classique )

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photographie. «promeneur» dans les grands moulins de paris. http://farm6.staticflickr.com


2.3. la Deûle dans le site les lumières de la deûle Rythmée par le passage des péniches, des joggeurs et des cygnes, la Deûle s’ouvre devant les Grands Moulins de Paris. Lumineuse, claire, jaune, grise, noire, bleu nuit, la rivière canalisée nous montre différents visages à travers ses lumières du Nord en écho aux palettes de Turner peignant la Tamise. Comme on s’approche d’un point de vue pour regarder, il faudrait amener les usagers à observer ce tableau de la Deûle, et les tourner vers la force que dégage ces vestiges du patrimoine industriel, le potentiel qu’ils ont sous les yeux. Valoriser les berges de la Deûle pour en faire un lieu d’arrêt, un espace de redécouverte des plaisirs de l’eau. Un site non plus de passage, mais un lieu de vie. Mêler à la fois les usages du passé avec le paysage industriel actuel.

110

lumières du 21 juin 2013 17h00. Marquette-lez-lille


LA PLACE DE LA DEÛLE La Deûle est la colonne vertébrale du site des Grands Moulins de Paris. Rive droite, la ville de Marquettelez-Lille, rive gauche, les industries chimiques et alimentaires. Le site entretient des liens étroits avec la rivière. Malgré cela, la Deûle n’est pas accessible et visible en tous points. Rive Gauche, l’ancien chemin de halage a été totalement privatisé par les industriels. Les rives sont bouchées par la végétations et inaccessibles. La rive Droite quand à elle est inscrite sur une voie verte cyclable depuis Lille et est piétonne. On observe l’utilisation de la Deûle par les marcheurs, les joggeurs et les cyclistes. 111

lumières du 21 novembre 2013 17h00. Marquette-lez-lille


rive gauche : LE RAPPORT AUX BERGES depuis la deûle 4 séquences de la Deûle

l’usine d’aluminium

112 les Grands Moulins de Paris

la cimenterie Holcim

Carte des 4 séquences de la rive gauche

les quais de la maïserie


rive droite : LE RAPPORT AUX BERGES depuis la de没le 4 s茅quences de la De没le

le pont de la Marque

113 les berges et les marcheurs

les berges

Carte des 4 s茅quences de la rive droite

les Grandes Malteries


3. promenade DANS LE site

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LE SITE ARCHéologique cimenterie

114

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le site rhodia

carte de présentation des 4 sites

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3.1 DESCRIPTION DU site

115

D’une superficie de 23 ha, le site est compris entre la voie de chemin de fer à l’ouest, où deux trains circulent par jour et la Deûle. La Deûle se trouve à l’est, le long des berges. Au nord, le pont Pasteur de Marquette-lez-Lille et au Sud le pont de l’abbaye. Le site est donc entouré et délimité par des infrastructures aux quatre points cardinaux. Il s’étend de Sud au Nord sur 698 mètres, de la porte de l’abbaye, à la rue de l’industrie, parallèle au Bâtiment de la minoterie. Et 535 mètres, de la petite gare à la cimenterie. Le point le plus haut est de 20m. d’altitude, et le plus bas, au niveau de la Deûle, de 18 mètres. Découvrir le site, c’est arpenter ses distances, ses pleins et ses vides, sa végétation. Rapprochons nous du site, entrons dans son enclos.

2345. 1 345. 12 45. 123 5.

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4 lieux pour 1 site

Découvrir un site au ralenti, c’est s’y arrêter, prendre le temps de le comprendre et de le contempler. Faire des pauses, le dessiner, faire attention, être sur ses gardes. Une rencontre avec ce site en deux temps. Sur ce site en friche, deux démarches de découverte, l’attention et la curiosité. Comme un animal sauvage, apeuré mais curieux, on rentre dans ce site avec deux comportements, ce qui apporte au promeneur un double regard. Dans cette déambulation, le regard du curieux sera celui qui sera développé. Une danse en 4 temps pour découvrir pas à pas le site, l’appréhender. À travers un cheminement au rythme du piéton, entre les herbes hautes, les feuillages, les ronces, les murs, les pièges, les vestiges métalliques, les tas... le fil rouge de la promenade va se développer en partant de la friche des Grands Moulins de Paris, vers le site archéologique, vers la cimenterie, le site Rhodia en terminant par l’entrée au Sud de la porte de l’abbaye. Partir du Nord, vers le Sud, aller chercher chaque «morceaux de paysage» comme des salles, des chambres. Cette déambulation spatiale est aussi une errance à travers la mémoire, l’histoire des lieux. Imaginer le passé, contempler le présent, rêver le futur est en tant que paysagiste, une manière de parler d’un regard sur le site. Partons ensemble observer le site actuel, à la découverte des lieux à la manière des archéologues.

FRICHE DES Grands Moulins de Paris site archéologique cimenterie site Rhodia


A. l’esplanade des grands moulins la grue du Quai la maison de l’ancien pont de la rue du bas de l’enfer

A B. le jardin sauvage

le bois arrière des grands Moulins de Paris

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B’

c. la cimenterie et le site archéologique Les buttes du site archéologique

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les silos

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la maison de l’ancien pont de la rue du bas de l’enfer

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imenterie

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3.2. le site du paysage des grands moulins de paris

LES GRANDS MOULINS DE PARIS

delifrance USINE DE VIENNOISERIES

bOONE ALUMINIUM LA CIMENTERIE

le bois Rhodia LE SITE ARCHĂŠologique

118

la France vue du ciel.Les Grands Moulins de Paris photographe Antoine Alacusos www.lafrancevueduciel.fr


Représentation du paysage dans l’enclos des Grands Moulins de Paris et son rapport à la Deûle

GRANDS DES PARIS DE TERRAIN LINS U MO cime

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SITE éo ARCH

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3 ha 1. la friche des grands moulins de paris

la friche des Grands Moulins de Paris s’étend sur 4.5 ha et mesure 295 m sur 97 m . Elle est composée principalement d’une façade néo-flamande qui mesure 140 m de long sur 40 m de haut. La parcelle commence après l’usine Délifrance, usine productrice de viennoiserie industrielle et s’arrête au niveau de la Deûle avec les anciens quais de commerce de la farine.

120

Inscrits sur la liste supplémentaire des monuments historique en 2005, les bâtiments sont en train de tomber en ruine. Le site est interdit au public et ses nappes phréatiques sont polluées au PCB (polychlorobiphényles) qui viennent des transformateurs de l’usines pillés. Rythmée par une végétation dense et luxuriante, les dépendances des Grands Moulins, laboratoires, cantine, maison du gardien ressemblent à des folies architecturales et un ancien canal industriel longe la façade. Tous ces détails sont cachées par les masses boisées.

2.les quais des grands moulins

1.la friche des grands moulins

le clocher des Grands Moulins de Paris

la friche des Grands Moulins

le laboratoire

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LA TOUR ET LES cantines

la cantine des ouvriers

L’enjeu serait de réhabiliter ce site en reliant l’ensemble des Grands Moulins de Paris à la Deûle.

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le clocher des Grands Moulins de Paris la friche des Grands Moulins

le canal

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LA MINOTERIE ET LE CANAL

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Localisation de la parcelle des grands moulins de paris

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5.5 ha 2.le site des fouilles archéologiques

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Le site de fouilles archéologique occupe une surface de 3 ha et est en secteur sauvegardé dans le plan local d’urbanisme. Il faut bien différencier le site de fouilles et le site archéologique. L’abbaye s’étendait quasiment sur tout le site, donc le site archéologique comprend la quasi totalité du site Rhodia, alors que le site de fouilles de 2003 ne correspond qu’à la partie non polluée fouillée. Il comprend dans ses couches du sol des vestiges architecturaux de l’abbatiale, des granges et des cuisines. Les fouilles ont débuté en 2003, et ont permis de mettre à jour les vestiges archéologiques. Le site est le cœur des parties religieuses avec le carré régulier, et les lieux sacrés. Aujourd’hui, recouverts par 1 m de terre, ces traces, murs, colonnes, cheminées, canaux sont protégés. On imagine le mille feuilles des constructions endormies de l’abbaye. L’enjeu serait de valoriser les vestiges archéologiques, mémoire du site pour les inscrire dans le présent.

Le site de fouilles se trouve sur une zone à caractère humide. On observe en effet une végétation spontanée indicatrice de milieux humides. Phragmites, roseaux, des poches d’eau lors de pluies et un sol humide. L’enjeu étant d’évoquer les canaux de l’époque, on pourrait s’appuyer sur cette zone humide pour dépolluer les sols en déblayant la terre triée par les archéologues, et en mettant en scène cette zone humide à travers un parc archéologique qui retrouverait ses strates.

Photo du 5 septembre 2006 Collection Nicolas Dessault

LE SITE DE FOUILLES 2006

1. les vestiges archéologiques

2. le site remblayé

la cimenterie

les anciens vergers de l’abbaye

les vestiges des granges

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coupe ouest-est des buttes aux silos

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localisation de la parcelle du site archéologique Jeanne de Flandre Plan de la parcelle des grands moulins de paris

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les Grands Moulins de Paris

la butte du site de fouilles

les anciens bâtiments des archéologues le site de fouilles

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coupe nord-sud des grands moulins aux bâtiments des archéologues

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LE CHANTIER ARCHÉOLOGIQUE

Juin 2013 Laissé en place tel quel avec des bâches depuis 2005, les vestiges étaient exposés au vent, au gel et aux vols après les programmes de fouilles de 2003-2005. Les murs étaient perceptibles, et le site n’a pas été sécurisé. Octobre 2013 Les archéologues ont effectué un état des lieux en analysant l’état les vestiges de l’abbaye, des granges, et des cuisines. A travers un travail de photographies et d’observation, le site a été mis à jour et étudié.

124

Novembre 2013 Une fibre géotextile, le «bidime» a été installée sur les vestiges archéologiques. C’est un anti-contaminant, qui permet d’isoler les vestiges de la terre. Elle permet de conserver et de sécuriser les murs, les pierres. Le manteau de terre isole du gel pendant plusieurs dizaines d’années. Le déblais des tas entourant l’abbaye dans lesquels se trouvent des débris ont permis de remblayer et d’enterrer le site archéologique. Décembre 2013 Le site a été aplanit, les murs ont été ensevelis, les vestiges ont disparu sous un sarcophage de terre, en attendant d’être dévoilé de nouveau...La ville de Marquette-lez-Lille rêve d’un r jardin archéologique Jeanne de Flandres.


révéler en cachant Le voile cache les traces. La mise sous cloche des vestiges permet aux débris archéologiques d’être conservés du froid et mis en sécurité. Cette étape, technique et poétique rappelle le travail de Land Art des artistes Christo et Jeanne-Claude, qui emballent le paysage et ses géographies. à l’image d’une strate supplémentaire qui évoque sans dévoiler, ce textile affirme la topographie, les courbes, les hauteurs des niveaux et devient une maquette à l’échelle 1.

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Comme une fine couche de neige qui se serait déposée, ce manteau blanc assoit le site archéologique dans son socle. On ne le perçoit plus, on devine ses courbes, ses formes, ses angles comme un corps vêtu d’un drap. Ce voile évoque et développe l’imaginaire, parle de l’histoire de l’abbaye de façon contemporaine en suivant les formes des cuisines, des granges sans les muséifier.

le site archéologique sous le voile textile le 18/10/2013

L’intention est de garder l’idée de ce voile qui fait le lien entre le passé et le présent et devient révélateur de la mémoire du site.

http://www.syti.net/LandArt.html Emballage d’une côte en Australie. Christo


2.5 ha 3. la cimenterie

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La cimenterie Holcim a une superficie de 2,5 ha. Elle fabrique du ciment mortier. Construite au dessus de l’ancienne infirmerie cistercienne, elle s’est installée au bord de la Deûle pour profiter des quais et développer son commerce fluvial. Sa localisation privilégiée n’est plus aujourd’hui justifiée, car son économie ne se fait plus que par le transport routier. En effet, une centaine de camions sortent de l’usine par jour, ce qui fait de la rue de la Fontaine, une «autoroute du ciment» en continu. Dans les projets d’aménagements, la cimenterie doit quitter la parcelle pour laisser place à la future Zone d’aménagement concertée. Elle va implantée sur le berges de Valencienne. Il faudra penser aux vestiges que cette industrie laissera, tels que les bâtiments et les silos blancs qui, ressemblant à des fusées, sont de belles traces de l’industrie. Accessibles, à 30 m. de hauteur, ils offrent un panorama dégagé sur tout le site. Leurs futures réhabilitation permettront de les mettre en valeur. L’enjeu serait d’utiliser les vestiges de cette industrie partie pour les futures activités et de profiter de ce point d’observation du territoire.

L’intention de réutiliser les vestiges de cette cimenterie est une façon de s’inscrire dans la démarche du projet à travers l’histoire. A l’époque médiévale, une infirmerie se trouvait à cet emplacement, au XXe siècle, l’usine Holcim s’est installée. Aujourd’hui on se retrouve face à la volonté de la ville de mettre en avant le site médiéval. Hors, la cimenterie va bientôt être laissé, et il me semble que d’utiliser à la fois les vestiges industriels et médiévaux pourrait être une opportunité pour parler des différentes strates de l’histoire. Il est vrai que dans la région on se retrouve très souvent face à ce type de structures industrielles : des silos, des bâtiments en brique... Mais ce vocabulaire est un vestige de l’industrie et donc une mémoire du site. Sans effacer les traces de la cimenterie, l’idée serait de valoriser à la fois les silos Holcim qui pourraient servir d’observatoires et d’utiliser les hangars de cette usine dans un projet de développement durable de réhabilitation du site

A lA cimenterie et la deûle

photographie des silos usine Holcim Novembre 2013

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localisation de la parcelle de la cimenterie Holcim

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b lA cimenterie et la friche

80

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12 ha 4. le site rhodia

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L’usine Rhodia Khulmann s’est installée au début 1900 sur la parcelle de l’ancien enclos de l’abbaye Jeanne de Flandres. Le site fouillé de l’abbatiale, des granges et des cuisines se trouvaient sous les jardins partagés des ouvriers. Pour cette étude nous allons redéfinir le périmètre du site Rhodia.Le site de fouilles archéologiques, se limite aux fouilles de l’abbatiale et le site Rhodia, commence avant l’abbatiale. Dans ce travail d’études, le site Rhodia sera délimité à l’Ouest par l’avenue industrielle, à l’Est, par la Deûle, au Nord, par l’actuelle clôture du site archéologique et au Sud, par la porte, elle a une superficie de 12 ha. Extrêmement polluée par les restes des produits fabriqués tels que le chlore, le mercure, le cuivre, le plomb...le site est interdit, et la végétation s’est développée avec cette pollution. On pourrait ainsi déblayer la terre polluée afin de rendre ce site vivable. L’enjeu serait de retrouver la mémoire industrielle de ce site et de l’ouvrir en le reliant au site archéologique.

le site Rhodia

1. LES STRATES Végétales

coupe sensible de terrain

2. LE bois


1

2

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Plan de la parcelle du site Rhodia- Khulmnann

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4. LA PLACE DE LA mémoire Comme on a pu le voir à travers l’étude de l’histoire du site, la mémoire tient une place essentielle. Elle est à la fois vécue et inscrite : mémoire humaine et mémoire du site. Se souvenir du passé des lieux est une façon de ne pas les oublier, et surtout de ne pas mettre de côté ceux et celles qui l’ont construite. Les couches du site s’épaississent, s’alourdissent et gomment parfois les strates inférieures.

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Face à un site marqué par le passé, il me semble que la mémoire du site peut être racontée par les personnes qui l’ont vécu et les traces que l’on a aujourd’hui comme des murs, des bribes de machines et toute l’archéologie à la fois industrielle et médiévale. Mais autour, existent encore quelques témoins de l’histoire, des gardiens du passé qui sont les auteurs de cette mémoire, qui l’ont fondée et fabriquée. Aujourd’hui il est encore possible de valoriser cette mémoire qui peut être levier de projet pour la future réhabilitation du site.

aquarelle de la voie de chemin de fer des Grands Moulins de Paris Collection : archive de Mr Deprick


4.1. LA Mémoire humaine

« Avant de connaître les pentes et les plateaux, la yeuseraie, les éboulis, les pessières, les landes et les châtaigneraies, les points de vue, les ponts, les roches taillées par l’eau dans les fonds de vallée, les sangliers ; avant de me rendre en tout ces lieux, vérifier l’érosion, la couverture des arbres, la rareté de l’eau, l’importance réduite des exploitations dans l’immensité de la forêt, j’en avais une idée. Une idée forgée par le vécu des autres.» Gilles clément Le belvédère des lichens

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avis de recherche personnel du 13/10/2013

Photo des farineurs des Grands Moulins de Marquette. Source : Collection de photos de Mr Roger Chochois

Pour découvrir l’histoire de ce site, l’objectif premier était de rencontrer ceux qui ont travaillé dans les Grands Moulins de Paris, afin qu’ils racontent leurs histoires et leurs mémoires de ce monde. J’ai ainsi, lors de ma deuxième visite sur le site, affiché des avis de recherche dans des cafés, sur des cabines téléphoniques, des panneaux...afin de pouvoir me mettre en contact avec les anciens. Rencontres émouvantes, surprenantes, parfois tristes et perturbantes, ces interviews ont ranimé les souvenirs des travailleurs, de ceux qui ont vu «le Moulin» disparaître, de ceux qui y ont travaillé. Entre excitation et mélancolie, ces histoires des Grands Moulins ont permis de réveiller une mémoire vive.


Souvenir du fils du chef du personnel Entretien avec Mr Jean-Marie Deprick 85 ans, retraité. Habitant à Marquette-lez-Lille Statut:

Marquette-lez-lille:

Son père était chef du personnel des Grands Moulins de Paris à Marquette-lezLille. Il a habité de 1927 à 1949 dans les appartements situés en face du bâtiment, au niveau de la passerelle. Le logement donné sur le stade de foot. Sa famille possédait un jardin potager. Il n’est jamais retourné sur les lieux des Grands Moulins de Paris.

Il n’y a plus de commerces, avant il y en avait entre 15 et 20 rue de Lille.

Organisation des Grands Moulins de Paris :

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Le blé venait par les péniches de la Deûle, les cultivateurs de la région, et par le train situé à l’arrière du bâtiment. Les magasins servaient d’entrepôt pour la farine en sac. Dans les ateliers mécaniques, les ingénieurs testaient la farine. Les Grands Moulins de Paris faisaient en supplément de la farine et des produits alimentaires pour les vaches et les porcs. Il y avait une grande passerelle sur tapis roulant qui amenait les livraisons du quai de chargement au bâtiment. Les ouvriers mangeaient dans une cantine située un des petits bâtiments en face de la minoterie. L’usine fonctionnait à l’électricité et les ouvriers travaillaient aussi de nuit. L’entrée principale se situait avenue des Grands Moulins de Paris, un chemin longeait le pont mobile, qui arrivait sur la rue de l’enfer. Les quais:

L’esplanade était un quais de déchargement des camions. La grande grue servait à soutirer le blé des bateaux vers le tapis roulant. Le parvis des grands Moulins:

Le jardin était impeccable, très ouvert et était composé principalement d’une grands pelouse. Il y avait un poulailler pas très loin du canal, un bassin incendie, et un autre petit bassin derrière les laboratoires.

Usines à Marquette :

Il y avait 20 usines à Marquette : la papeterie Sonoco, l’usine Grondelle de cimenterie, l’usine de pétrochimie Rhodia kuhlmann, l’usineDecauville de wagons et voies ferrées, l’entreprise Massey-Fergusson de tracteurs, la Minoterie des Grands Moulins de Paris, l’usine Magenta de Champagne. Les marquettois étaient divisés principalement sur 3 sites clefs : 300 ouvriers aux Grands Moulins de Paris, 2000 chez Massey et Fergusson et 1000 chez Rhodia. Pollution :

L’usine GMP est polluée par le Pyralen, et le site est saccagé. L’air était pollué, quand il allait jouer au foot le dimanche sa peau piquait. Site archéologique:

La découverte de l’abbaye a été une grande surprise et a suscité beaucoup d’émotions.

Souvenirs:

La «gloire de son père» était de faire visiter les Grands Moulins de Paris. Il se e souvient que l’usine a fait faillite en 1989 pendant la période de la chute de l’industrie. Il a des images anciennes du «Moulin» dans la tête.

Les fermes :

Il y avait 4 à 5 fermes à Marquettelez-Lille.


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Entretien avec Mr DEPRICK Fils du chef du personnel Interview du 17 octobre 2013


UNE CARTE DES SOUVENIRS « Marquette, la ville aux trois ponts» était-elle appelée comme cela pour ce troisième pont ? Sur le rythme de la récitation haletante, le livre Je me souviens de Perec pourrait faire écho à la description de ces lieux.

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Bassin incendie pelouse taillée chemin de fer jardin des ouvriers pont des ouvriers laboratoires les péniches la Deûle Les bateliers le clos de l’abbaye l’usine la maison des ouvriers le stade de foot Tony Agache le mail la porte de l’abbaye les cafés la zone TDI RHODIA le pont blanc

RHODIA

la carte mentale des souvenirs. Janvier 2014


DES Détails retrouvés PAR LES SOUVENIRS le tapis roulant le pont le bassin

la cantine

la maison du gardien

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Photo du Fond Pasquero. Collection Hospice comtesse Vue axonométrique année 1930

Retrouver des signes, des empreintes par ceux qui les ont vécus, est beaucoup plus poignant et émouvant que de l’apprendre dans les archives. Les personnes sont ces farineurs, ces boulangers, ces ouvriers, ces livreurs, ces fils d’ouvriers qui m’ont livré leurs histoires, leurs mémoires.

Ces rencontres ont permis d’établir une carte mentale. Il a ainsi été possible de retrouver des détails disparus en comparant les récits des ouvriers aux photographies aériennes. Par exemple, le pont qui se trouvait en face des Grands Moulins de Paris a été localisé sur une photographie de 1930.

« Le temps qui passe, dépose des résidus qui s’empilent : des photos, des dessins, des chemises, des boîtes, des gommes, des cartes postales, des livres, de la poussière et des bibelot : c’est ce que j’appelle ma fortune. » Espèce d’espace. Georges Perec


4.2. LA mémoire du site le chosier médiéval

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Comme toutes les antiquités d’un grenier, qui sont un amas de souvenirs, d’objets, de moments, de pierres du passé, le site archéologique constitue à lui seul un chosier médiéval, une strate du XII e mélangée à d’autres et à des superpositions de couches. Lors des fouilles, objets, bijoux, vaisselles, murs, fondations, canaux, cheminées, nécropole, citernes,pavés, tombe et ossements ont été retrouvés. Ces précieux morceaux de l’histoire sont les vestiges d’une époque, celle de la plus grande abbaye cistercienne de femmes fondée par Jeanne de Flandre. On ne peut oublier, cette histoire qui doit être remise à jour et dévoilée. Cette découverte est un trésor pour la mémoire du site, une pierre précieuse avant l’époque industrielle. Aujourd’hui, le site est composé de vestiges qui nous permettent de lire les anciens plans de 1800, et qui évoquent des éléments architecturaux et paysagers. Des canaux nous donnent la possibilité de retrouver le passage de l’eau, la cheminée presque intacte montre l’emplacement des cuisines, les granges spatialisent les box des animaux dans les parties dites économiques, le tombeau de Jeanne de Flandres permet de lire le centre de l’abbatiale, le carré régulier décrit les lieux... toutes ces traces sont comme les reliques d’une époque révolue. Mais cette époque n’est pas achevée car elle s’est inscrite dans la mémoire du site, la mémoire des lieux. Elle est encore présente et fabrique autour d’elle de nombreuses réflexions pour le futur de ce site en jardin archéologique projeté par la communauté urbaine de Lille, LMCU. Ce chosier de l’ abbaye appartient à l’ensemble des différentes strates pédologiques qui fabriquent aujourd’hui, en 2014 le paysage et l’histoire du site des Grands Moulins de Paris. L’enjeu est d’inscrire le site archéologique dans le futur de ce site, et de valoriser ses vestiges du XIIe siècle en évoquant sa mémoire et ses récits .

la grue des Grands Moulins de Paris extrait du chosier industriel Novembre 2013

« que reste-t-il de ce royal établissement? Deux pavillons d’un style assez semblable à celui du portique se découvrent encore dans le vaste et beau jardin où fut jadis le monastère.1841» Extrait des textes de l’époque du livre de Benoit Chauvin


le chosier industriel « Des engins de chantier que ce soleil de jour chômé fait ressembler à des créatures préhistoriques piégées dans la boue ou, mieux, à des machines d’espèces éteintes, des écorchés de dinosaures mécaniques» A Tour to the Monuments of Passaic, New Jersey Robert Smithson 1967

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En arpentant le site, on croise différentes machines, des morceaux de ferrailles, des objets qui semblent être rongés par la végétation qui rappellent les robots dans le Château dans le ciel. Laputa de Hayao Miyazaki en 1986. A l’image de ces robots en ruine, les machines qui errent sur le site sont comme des fantômes du passé, acteurs de la vie des Grands Moulins de Paris. Il reste des outils, des masses, mais tout se dégrade, grince et s’agitent avec le vent... A l’intérieur des bâtiments, l’ascenseur rouillé est tombé du dernier étage, des machines se cassent, des structures chutent. Il ne reste plus que des architectures, tels que les silos, les murs et les structures des planchers. Dans la friche des grands moulins, les quais flottent et s’agitent avec les vagues des péniches, la grue domine la Deûle tel le gardien des Grands Moulins. Ces vestiges sont la mémoire du site, et restent comme des traces, des sculptures gelées par le temps, souvenir de la minoterie. Les traces qui sont encore figées dans le site Rhodia sont les quais, les rails de chemin de fer, des barres et plus principalement les axes clefs de l’usine, marqués par la végétation. Des grandes allées de graminées dessinent les anciens chemins principaux qu’empruntaient ouvriers, camions et voitures pour accéder aux différentes parties de l’usine. Tous ces tuyaux de Rhodia sont partis et ont laissé place à un grand vide. Les vestiges qui restent sont les matériaux des centres de fabrication pétrochimique. Sols souples bleus, rouge, rose ressemblant étrangement aux sols des jeux d’enfants dans les projets de projets actuels...ils définissent l’emplacement des anciennes zones de fabrication de la soude et évitaient que les produits chimiques ne pénètrent dans le sol. Les produits chimiques ont pénétré, les revêtements sont restés. à l’image d’un immeuble que l’on détruit, certains repères se figent comme une tapisserie, un carreau, ici ce sont les sols, les rails, les tuyaux. Ce sont les empreintes du sol, comme une nouvelle couche de l’histoire, celle de l’archéologie industrielle. L’enjeu serait d’utiliser ce chosier industriel pour valoriser le patrimoine.


LES LOGIQUES D’UNE INSTALLATION

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Quand l’usine Kuhlmann s’est installée, les industriels connaissaient le plan de l’abbaye, et c’est la raison pour laquelle au niveau de l’abbaye cistercienne, des granges et des cuisines, ils n’ont pas installé d’équipement, mais des jardins ouvriers. Le site archéologique n’est pas pollué car il a été sauvegardé, grâce à cette logique d’installation. Les jardins ouvriers ont été les gardiens de ces vestiges. Ce qui n’a pas été le cas pour l’infirmerie des sœurs, sur laquelle s’est implantée la cimenterie. La pollution et les fondations des silos ont du probablement abîmer les vestiges cisterciens de l’infirmerie. L’objectif est de poursuivre cette volonté de conservation. L’enjeu est maintenant de conserver ce site cistercien par l’évocation, de le faire découvrir aux futurs usagers, et de le rendre lisible dans le paysage contemporain.

Photographie des vestiges de l’abbaye sur le site


LE PATRIMOINE INDUSTRIEL Le site est parsemé de ruines, de débris oubliés, de références au passé industriel. Ces indices qui racontent une histoire sont les mémoires du site. Le patrimoine industriel, est aujourd’hui de plus en plus présent dans les questions de paysage et de société. Ce chosier est une richesse car il parle en même temps du site, et de ceux qui y ont travaillé.

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Parler du site par son archéologie des machines, des savoir-faire pourrait être la façon de réfléchir et de mettre en valeur la mémoire du site. Les souvenirs de ces outils, de ces machines qui racontent des techniques, des mises en oeuvre et le travail. On pourrait se demander en venant dans ces site, comment une minoterie fonctionnait, quels étaient les ouvrages de fabrication de la farine. A quoi ressemblait une usine de pétro chimie? Le paysage peut être un signe du patrimoine industriel. L’enjeu est de reconnaître ce patrimoine industriel au sein du paysage des Grands Moulins de Paris.

Photographie des vestiges de l’industrie sur le site


ÉVOLUTION DU Tracé de la Deûle

1686

1751

1795

Le tracé de la Deûle est dessiné par des marécages et des îles. La Deûle rentrait dans le site et créait des axes importants. Le château de Jeanne de Flandres est encadré par l’eau, des bâtiments longent la rivière. L’eau arrive jusqu’à l’entrée de l’abbaye.

Le château Renaissance s’est installé contre l’ancienne abbaye. Le cours d’eau a changé son dessin. On retrouve les axes principaux bordés par des canaux comme à l’entrée de la porte de l’abbaye. Un petit lac de pêche est crée et un bras supplémentaire de la Deûle a été dessiné.

Le lac a disparu, il n’y a plus que deux bras de Deûle. La brasserie a disparu et on conserve les axes principaux au niveau de la porte de l’abbaye. Un bassin à l’ouest dans l’enclos sert de lieu de promenade dans les potagers.

CARTE 1686 l’abbaye Jeanne de Flandre et le réseau hydraulique

CARTE 1751 l’abbaye Jeanne de Flandre et le château dans le réseau hydraulique

CARTE 1795 le chateau versaillais ET LES R2SEAUX

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200

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1830

1905

1980

Les bras de la Deûle sont encore présents, mais on sent que les vestiges de l’abbaye sont en train de disparaitre. Le deuxième axe de la Deûle est encore présent.

Les industriels ont asséchés les canaux de la Deûle qui est devenue une rivière linéaire, sans bras. Les industries se sont installées sur l’emplacement des anciens bâtiments, vers le château. Les axes sont conservés et une route de la fontaine a été construite pour faciliter le passage des camions.

Les industriels Rhodia -Khulmann ont investi tout le site de l’ancienne abbaye. L’enclos a disparu. La Deûle s’est élargie et des quais pour le commerce fluvial ont été construits. Le stade de football s’est installé sur l’emprise de l’entrée de l’abbaye. Certains axes ont été conservés, et on arrive à lire des cheminements datant du moyen-âge.

CARTE 1830 Les restes de l’époque classique

CARTE 1905 implantation de l’industrie et assèchement des marais

CARTE 1980 L’industrie dominant le site et élargissement du gabarit de la Deûle

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LES TRACES ACTUELLES PLAN DES TRACES DE L’ABBAYE et de l’enclos de l’abbatiale

PLAN DES TRACES DE L’ABBAYE et du château

Ce plan, en jaune montre l’emplacement de l’enclos abbatial qui a aujourd’hui quasiment disparu, il ne reste plus que la partie de la porte de l’abbaye et l’emplacement du mur séparant l’abbaye des grands moulins de paris. L’axe qui part de cette porte dessine une grande perspective et divise le site en deux parties. à gauche, les fermes, et à droite, le château de Jeanne de Flandres. On retrouve les anciens canaux perpendiculaires à cet axe. Le site fouillé de l’abbaye est la partie au Sud comprenant l’abbatiale, les granges et le cuisines. L’enjeu serait de retrouver ces tracés essentiels au dessin du plan de l’abbaye.

Le château de la Renaissance, en orange s’est installé au niveau de l’extrémité de l’axe de la porte de l’abbaye. et est mitoyen à l’abbatiale. Aujourd’hui cette partie n’a pas été fouillée par les archéologues, car elle a été jugée comme trop polluée par des essences. Il serait intéressant de reprendre le dessin du château, de donner de l’importance à son emplacement et de l’inscrire dans le futur dessin du parc . Le château doit faire partie du futur projet de développement de l’archéologie. Il pourrait dans un premier temps être évoqué dans un dessin de parc, et à l’avenir fouillé.

Les traces médiévales

Les traces médiévales et classiques

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PLAN DES TRACES DE L’ABBAYE, du château et de l’industrie

PlanS du substrat paysager

Sur les traces de l’abbaye et du château, les industries se sont installées en suivant les axes principaux des époques précédentes. Les espaces ont été parfois gommés, et le mur de l’abbatial a quasiment disparu. Les architectures ont été remplacés et les bâtiments abbatiaux ont été réutilisés, détruits ou enterrés. Cette superposition de la strate industrielle a accentué des axes, en a crée. La rue de la fontaine a été construite en parallèle à l’ancien bras de la Deûle. L’objectif serait de prendre en compte cette strate industrielle à travers les vestiges.

Ces plans montrent les traces qui restent et qui ont dessiné les espaces. Le site est aujourd’hui la synthèse de trois époques : l’époque médiévale, l’époque Renaissance et l’époque industrielle. L’imbrication de ces trois grands moments a ancré le site dans ses strates. On observe que ce sont surtout les allées qui sont restées aujourd’hui les plus fortes traces. Il n’y a pas tant la dominance d’une couche historique sur une autre mais ce sont les trois couches qui dominent. On retrouve des logiques dans les axes et dans les entrées et les murs.

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Légendes strates industrielles strates médiévales strates Renaissance bâtiments en ruine limites du site

Les traces médiévales et classiques et industrielle

Cette succession archéologique rend logique les implantations sur le site. On arrive à voir que c’est la place de la fontaine et son axe qui part au sud qui sont aujourd’hui les plus fortes de traces de l’époque médiévale. L’enjeu serait d’accentuer cet axe à l’avenir par un travail sur l’évocation des traces encore visible pour parler de l’histoire du site. Il me semble que le site ne peut être développé sur un seul moment choisi de l’histoire. à travers un futur projet de paysage, l’enjeu sera de faire dialoguer ces couches de ce mille feuilles de l’histoire les unes avec les autres. C’est la pluralité des époques qui fait la richesse de ce site.


4.3. la pollution : empreinte de l’industrie Les industriels de Rhodia sont partis en 2003 en démantelant le site, sans respecter la règle de la dépollution. Ils ont laissé les lieux avec les terres et les nappes polluées. Cette pollution est restée sur le site après le départ de l’usine Rhodia, qui n’a pas dépollué ses sols, ses nappes phréatiques noyées de tous ces polluants, ces terres pétro-chimiques spongieuses de produits mortels. Depuis le départ de Rhodia, le site secteur Seveso 2 était classé jusqu’en 2003. Aujourd’hui le site n’est plus secteur Seveso 2, mais pourtant la pollution n’est pas résorbée. Pollution de la parcelle des Grands Moulins de Paris: 144

POLLUTION DES SOLS : Les sols (environ 1 800 m3) sont pollués par des PCB (déversements à la suite d’un acte de vandalisme en 1993 : la quantité épandue dans les caves a été estimée à 7 300 kg de PCB. 850 kg de PCB seraient présents au droit du bâtiment silo à farine). Teneurs significatives en PCB mesurées dans les eaux de la nappe superficielle LES NAPPES : Au droit du site, présence de deux aquifères captifs (la nappe de la craie à plus de 40m de profondeur et la nappe des calcaires du carbonifère) et d’une nappe superficielle (nappe des alluvions de la Deûle) ENVIRONNEMENT : Environnement peu vulnérable compte tenu de la captivité des aquifères au droit du site. http://basol.developpement-durable.gouv.fr/fiche 59.0007

Sites en friche Site en activité

plan des implantations des industries


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Mercure Hg Hydrocarbures cuivre Cu plomb Pb arsenic As cadmium Cd chrome Cr zinc Zn nickel Ni baryum Ba cuivre Cu pcb La pollution s’est installée dans un temps postérieur à 1989. La pollution est le stigmate de ce paysage. Mémoire indésirable de ce lieu, ces traces doivent disparaître. L’objectif va être en premier lieu de dépolluer et de permettre à de futurs usagers de venir. Dépolluer ces sols est la première action à opérer avant tout projet et les raisons de l’avenir de ce site. L’enjeu est de dépolluer le site, pour le rendre accessible au public. L’objectif du projet sera de considérer les différents moyens de dépollution et les solutions qui seraient envisageables pour ce site à travers un phasage. Synthèse des zones de pollution observées sur le site Document LMCU 2014

200

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LA POLLUTION

La phytoremédiation

La pollution est un enjeu majeur et urgent à gérer. Lors des premières réflexions sur le site, la dépollution aurait pu être envisagée et commencée. Il est vrai que des études Basol ont été faites pour dresser un état des lieux, mais des actions n’ont pas été mises en place. C’est un processus qui se déroule dans le temps, dans un phasage à développer en fonction de la technique utilisée.La LMCU a dressé des études d’impact en Septembre 2013 pour établir un tableau des pollutions actuelles, mais les données confidentielles ne sont pas encore livrées.

En ce qui concerne les traitements in-situ, à préférer car limitant les déplacements, les techniques de phytoremédiation sont favorisées lorsque le degré de pollution et la durée du traitement le permettent. Par exemple, si le projet inscrit dans son développement la dépollution comme un élément faisant partie du projet et non mis à part, alors cela peut être fait. Un phasage permettant la mise en place progressive du parc des Grands Moulins de Paris pourrait être traité de cette manière.

Une zone humide polluée Les hydrocarbures sont les polluants les plus difficiles à éliminer car ils contaminent le sol et les eaux des nappes phréatiques. L’eau ne doit pas pénétrer dans les sols et c’est pourtant ce qui se passe aujourd’hui. Etant donné que l’on se situe sur une zone (cf. site de fouilles archéologiques chap.3.2) à caractère humide avec la présence de plantes indicatrices, et de milieux gorgés d’eau. De plus, de nombreux piézomètres « ouverts » sont dispersés sur le site Rhodia. Ce sont des tubes, qui depuis la surface accèdent à l’eau d’une nappe phréatique. Ils permettent d’en relever le niveau piézométrique à l’aide d’une sonde poids. En effet, ayant été historiquement asséché et rendu viable, les marécages se trouvaient auparavant à cet emplacement, comme on peut le constater avec la frise d’évolution du réseau hydraulique. Ainsi on se trouve sur une zone humide polluée. Les sources de pollution ne sont pas répartis uniformément sur le site, ce qui implique que le type de traitement devra dépendre des zones à décontaminer en fonction des sols et des zones géographiques, le degré de pollution et les polluants présents.

reference / Une parcelle en devenir sur un ancien site industriel qui prend la forme inattendue d’un jardin expérimental, collectif et participatif.

Printemps 2013 Jardin C - La Fabrique http://www.mire-exp.org

Phytostabilisation: phase 1 Dans un premier temps afin de limiter la mobilité des polluants volatiles, en attendant la mise en place d’une action de dépollution. Phytoextraction : phase 2 Il s’agit d’utiliser des plantes qui absorbent et qui concentrent les polluants dans les feuilles et les tiges, qui sont récoltées et incinérées : les cendres seront valorisés pour récupérer les métaux lourds accumulés. Dans le cadre de la revalorisation du site en parc et en espace public, les feuilles ne doivent pas être ingérées ni touchées. Il est possible de réfléchir à une pédagogie de la pollution expliquée au public. En effet, dans certains jardins botaniques, des arbres toxiques comme le sumac Toxicodendron sont présents et inaccessibles, mais un travail de pédagogie est fait pour que l’arbre ne soit pas touché. On pourra dépolluer en créant le parc, pour faire comprendre au public ce processus.


Phytodégradation : Cette technique permet de transformer les contaminants en substances moins toxiques grâce aux enzymes produits par certaines plantes. Phytorestauration Processus permettant de revenir à des conditions proches de celle antérieures à la contamination en utilisant des plantes indigènes à la région.

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On pourrait par exemple utiliser la palette végétale du site car celle-ci a su se développer, s’installer pour formuler la végétation spontanée actuelle. Ces plantes supportent la pollution et s’y sont adaptées. Ainsi, on pourrait les utiliser pour dépolluer les sols. On a un exemple actuel avec une friche industrielle en projet à Tours : le Point Haut, sur lequel travaille Patrick Bouchain. La technique de la phytoextraction est mise en œuvre dans le temps. Après avoir récupérer chacune des plantes présentes sur le site, ils en ont fait des boutures. Ainsi, les futures plantes viennent du site et sont adaptées aux pollutions présentes. Ils ont choisi la palette végétale de l’état existant. « La phytoremédiation, ou traitement localisé de la pollution par les plantes. » Les paysagistes vont planter des espèces métallicoles, qui ont des tolérances très élevées, comme l’Armeria maritima « Tout se fera sur le long terme, ce ne sera pas visible ». C’est un travail pédagogique sur la dépollution des sols.

Traitement biologique:

QUELS CHOIX?

la biodégradation : Cette méthode pour les hydrocarbures consiste à stimuler in situ des polluants dans les sols, en fournissant à la microflore en place l’oxygène nécessaire au métabolisme bactérien. L’oxygène qui est en aérobiose, est fourni par l’injection d’air dans la zone contaminé. Traitement est aussi possible pour les hydrocarburesaprès excavation, cela permet d’extraire et de traiter les terres à dépolluer, par lavage et de les laisser sur le site.

Ces différentes techniques permettent de comprendre les processus de dépollution des sols de friches industrielles. Il ne faut pas oublier que le paysage des Grands Moulins de Paris de 23 ha est un mille feuille de l’histoire et a accumulé les strates du passé. Le site de fouilles archéologiques n’est pas pollué, mais le site archéologique dans son ensemble (qui comprend quasiment tout le site a des parcelles non fouillées) et très polluées. Par exemple, l’ancien emplacement du château de Jeanne de Flandres, a le projet d’être fouillé. Mais cette zone est trop dangereuse car polluée aux hydrocarbones. Le choix de la technique de dépollution devra être décidée en prenant en compte les strates et les vestiges médiévaux sous terre, les vestiges classiques, et les vestiges industriels à sauver. La pollution et les vestiges doivent être pensé ensemble, afin de déterminer des zones de dépollution.

Stripping C’est la technique de mise en phase vapeur des polluants dissous pour les solvants chlorés. Lessivage C’est la mobilisation des polluants à l’eau et la récupération par pompage pour les métaux lourds, processus qui n’entre pas dans les techniques de développement durable. L’évacuation L’évacuation des terres polluées, après excavation, vers un centre de traitement ou de stockage adapté. Confinement : Technique permettant de laisser les terres à dépolluer sur le site en empêchant la propagation des polluants grâce à une barrière étanche : géomembrane, couverture imperméable, paroi moulée...Processus envisageable sur les espaces dédiés à la voirie à condition de rajouter au minimum 40 cm de terre au dessus. Grâce à ce procédé, on évite l’érosion des sols, la percolation de l’eau vers les nappes et les ruissellement des terres polluées.

Pour l’instant, étant donné les vestiges archéologique, la phytoextraction ainsi que la phytorestauration sur un long terme seraient, me semble t’ il les techniques les plus appropriées pour respecter la mémoire du site. On pourrait à la fois, à travers des essences végétales contribuer à dépolluer les sols, évoquer les vestiges et rendre des espaces accessibles phases par phases, zones par zones.


vi. QUELLE Mémoire pour demain...? VERS LE PROJET

148

carte des idées de projet sur le site Décembre 2013


1. la 2. 3.

Synthèse des enjeux à l’échelle de métropole à l’échelle du site VERS LE PROJET

149

250

500


1. ENJEUX à l’échelle de la metropole lilloise

1.1.RETROUVER UNE Proximité AVEC LA DEÛLE

ENJEUX DE LA Deûle TRANSPORT FLUVIAL Ports actuels de la métropole Désengorger les ports de Lille en créant des haltes de plaisance Navettes fluviales existantes Développer le tourisme sur la Deûle en renforcant développant les navettes fluviales CENTRALITé du canal Espaces de la Deûle mis en valeur 150

Mettre en valeur l’épaisseur de la Deûle en lui redonnant sa centralité. ouverture sur la Deûle Zones de confluence de la Deûle déjà mis en valeur Valoriser les zones de confluence en y développant des activités de loisirs pour retrouver les plaisirs de la Deûle. S’inscrire dans le Plan Bleu de Lille et rouvrir le bras de la Deûle, ancienne connexion historique avec l’hospice Comtesse. Localisation du site existant projet

1000

2000


1.2. Connecter les espaces de végétation en ville ENJEUX DE LA végétation les berges Créer une continuité sur les berges en ouvrant les quais privatisés des industries en friche au public en créant des lieux de promenades sur le long de la Deûle. CHAPELET de parcs Parcs de la Deûle existants Utiliser les délaissés urbains comme de nouveaux terrains de découverte et les inscrire dans le maillage des parcs de la Deûle. 151

Relier ces nouveaux parcs à la végétation déjà présente dans la métropole Lilloise liaison à la deûle

Connexions existantes entre les rives Relier les parcs, les jardins, les squares, les friches à la Deûle Localisation du site

existant projet

1000

2000


1.3. mettre en scène le patrimoine industriel ENJEUX Du patrimoine VALORISER LE PATRIMOINE industries réhabilitées Reconvertir les bâtiments en friche en les mettant en scène dans des projets de paysage. Développer la culture Rendre attractif les musées du patrimoine de Métropole en les reliant entre eux. Ouvrir de nouveaux musées

Les maisons Folies de Lille Créer de nouvelles maisons de folie dans la métropole

152

DYNAMISER LES SITES INDUSTRiels S’approprier les espaces en réhabilitation pour en faire de vie, d’économie et de culture. S’inscrire dans le développement des pôle d’excellence. Développer de nouveaux pôles Eura dédiés à la culture RELIER LES SITES Réhabilitées Connecter ces lieux de la mémoire du patrimoine en dessinant une «Route de l’industrie «de la Deûle en mettant en scène les friches. existant projet

1000

2000

Localisation du site


1.4. assurer l’accessibilité ENJEUX DE L’accessibilité relier les villes Connecter les centres villes entre eux en consolidant les chemins de fer Gares existantes Développer des haltes ferroviaires pour amener aux friches réhabilitées Développer les transports S’inscrire dans les projets de LINO et de Tram-Train pour relier le Nord de la Métropole au reste du territoire

153

lier les quartiers à la Deûle Connexions existants entre les deux rives Tourner la ville vers sa rivière en retrouvant les espaces publics autour de la Deûle Localisation du site

existant projet

1000

2000


2. à l’échelle du site

154

2.1. divergences avec le projet de la ZAC JEANNE DE FLANDRE

Cette ZAC , dont les travaux doivent commencer en 2016 va permettre à la métropole au Nord et à la ville de Marquette-lez-Lille de se développer. Des logements aux entreprises, jusqu’aux commerces, le site Rhodia est voué donc un nouvel espace d’économie, d’habitat et de culture. De plus les berges rendues accessibles permettront de retrouver la proximité avec la Deûle autant pour les entreprises que pour les loisirs. Tous ces facteurs sont réunis pour faire du site Rhodia, un grand parc du XXIe siècle. Au-delà d’une ambition quantitative, Lille Métropole a engagé une grande réflexion afin que les nouveaux parcs ne soient plus les héritiers du siècle passé, mais au contraire la vitrine de l’aménagement économique durable du 21ème siècle qui prend la forme d’une charte, fondée sur 6 valeurs fortes pour un aménagement économique attractif, durable et innovant de la métropole : la densité, la mixité, la mobilité, la performance écologique, l’efficience énergétique, la gouvernance. Certains points sont discutables cependant. L’ existant n’est pratiquement pas pris en compte, si ce n’est la création d’un jardin archéologique. Toutefois, il me semble que, même si l’archéologie médiévale est mise en valeur, certains arbres plantés au niveau des vestiges du site de fouilles risquent de détruire le patrimoine cistercien. Il ne faut pas oublier le passé industriel du site. Sur la vue de l’agence Babylone Paysage, la cimenterie a totalement disparu et la morphologie des quais a été gommée. Il est prévu que les Grands Moulins de Paris soient réhabilités en lofts et en commerces. Il faudra penser à la mémoire des bâtiments PROGRAMMATION et du site pour ne pas mettre de coté l’histoire de la minoterie : les 250 500 couches de l’histoire ont fabriqué ce paysage et ce mille feuille ne doit LINO pas être mis sous terre par le nouveau parc du XXIe siècle. Train Dominante économie/ PME/ARTISANAT Le contexte social de Marquette -lez-Lille, n’est pas suffisamment pris Dominante ÉCONOMIE Service/ Transport en compte. En effet, ce renouvellement urbain attirera une population Dominante ÉCONOMIE Activité fluviale aisée dans des lofts, des appartements, une population d’ingénieurs et Dominante HABITAT Dominante Loisirs/Espaces ouverts de cadres alors que ce lieu pourrait un parc public pour tous. Les activités sont sectorisées : habitat, parc, économie. Il pourrait être pertinent Centralité de superposer toutes ces activités pour fabriquer un quartier et un lieu dynamique pour la ville et de retrouver les traces du site à travers de nouvelles activités. La place du paysage se restreint à 7 sur 60 ha. Par rapport au paysage développé depuis l’abbaye médiévale la réponse Dossier de présentation publique Marquette-lez-Lille pourrait être nourrie des canaux, des marécages, des magnifiques jarProjet de requalification du dins, des vergers des sœurs et des ouvriers, des allées de 180m de long, Grand Rhodia des bassins, des serres d’orangers, du petit Versailles, du bois de Jeanne, Septembre 2012 du stade de Football de l’usine,et des boisements de Rhodia. La friche des Grands Moulins et ses folies n’ont ils pas eux aussi une place dans la mémoire du site?


REGARDS objectifs sur le projet de la zac par rapport a mes intentions

155

L’HABITAT

ACTIVITés

LOISIRS

L’objectif de cette ZAC, comme on a pu le voir est de créer un prototype de parc du XXIe siècle. L’enjeu sur l’habitat est très fort. En effet, construire1600 logements permettra de rendre foncièrement économique ces terrains, mais aussi de créer de l’attractivité et de la rentabilité. Je suis entièrement consciente de ce besoin qu’a la métropole de développer de nouveaux quartiers. Mais, il se trouve que sur la rive opposée, une réserve foncière potentielle est présente. Le site de la papeterie a une superficie de 2.5 ha et celui des Grandes Malteries Lesaffre qui est en train d’être démantelée de 3.5 ha. De plus la parcelle Rhodia au bord des quais qui mesure 10 ha, peut comme le souhaite la ZAC accueillir des logements. Dans un périmètre de 500 m, des réserves foncières potentielles de 16 ha justifient le fait de ne pas construire autant de logement que ceux proposés par la LMCU sur le site des Grands Moulins de Paris. Cela n’empêche pas l’idée de construire des habitations au sein du futur parc des Grands Moulins de Paris en dessinant un quartier, qui apporterait une vie et un dynamisme à ce site, mais avec parcimonie.

Dans le programme de la ZAC, une partie dédiée à l’économie de l’activité fluviale sera développée. Cela permettra à des entreprises de s’installer au bord de la Deûle et de profiter de leur implantation pour favoriser le commerce fluvial. à travers la réflexion menée dans l’étude de ce site dans ce mémoire, un objectif a été développé : celui de retrouver la proximité à la Deûle et les activités liées à l’eau. Celles-ci ont été gommé par la privatisation des berges et la dominance des industries sur la Deûle depuis le XIXe siècle. Le site des Grands Moulins de Paris est une opportunité pour retrouver ce dialogue entre l’eau et le site. Il est vrai que le facteur économique est important pour rendre viable ce quartier. Mais ne serait-il pas possible de trouver un équilibre entre les deux objectifs en développant une économie fluviale qui aurait un impact direct sur la relation des usagers avec le canal? En créant par exemple un port, cela déclencherait une économie et en parallèle pourrait permettre de retrouver le lien à la Deûle. On pourrait en effet réfléchir à de nouvelles manières d’habiter sur l’eau en créant à la fois un village fluvial. On pourrait concevoir un port de péniches «rentable» habité à l’année comme le quais de Seine à Paris. Ainsi, ce serait une manière de loger en relation directe avec la Deûle tout en répondant aux demandes de la ville. Une activité se ferait donc avec le public et non plus seulement avec des industriels privés.

Le programme du parc archéologique est une volonté de longue date de la par de la ville de Marquette-lezLille. Ils souhaitent mettre en valeur le site de fouille de l’abbaye Jeanne de Flandre. Cet objectif a été inscrit dans les enjeux de la ZAC et s’étend sur un parc urbain. La liaison avec l’histoire et la mémoire va pouvoir se développer dans cette partie. Il faudra aussi réfléchir aux autres strates de l’histoire. Le projet du jardin archéologique doit être relié avec les futurs programmes des PME, entreprises, logements. Cela signifie donc que le site archéologique se localisera au cœur de bureaux, de commerces et de logements. Il faudra donc réfléchir au paysage et aux constructions fabricant le futur jardin de l’abbaye, aux usagers, aux visiteurs, sans que celui-ci ne devienne un jardin étouffé par son environnement. Il me semble essentiel d’inscrire à part entière le projet du jardin archéologique dans son paysage et de relier les différentes activités qui l’entoureront. On pourrait imaginer des centres d’interprétation, des cheminements par évocation décrivant l’histoire du site. De plus, un mélange entre les vestiges industriels et ceux du moyen-âge permettraient de faire comprendre aux promeneur l’évolution du site. Il faudrait donc que le programme dépende de ce site archéologique et non le contraire.


2.2. étude du plan local d’urbanisme des 3 communes sur la deûle L’étude de ces objectifs donne des axes qui pourront rentrer dans les intentions du projet. Par exemple les berges et le parc, l’utilisation de la rive droite pour construire de l’habitat comme je le propose ci-dessus.

aménagement des berges de la Deûle et parc

aménagement des berges de la Deûle et parc

aménagement des berges de la Deûle et parc

zone d’activité à vocation industrielle et artisanale zone d’activité à vocation industrielle et artisanale zone urbaine mixte à densité élevée dominante habitat liaison intercommunale Nord-Ouest Site archéologique de 156 l’abbaye concept d’un jardin écologique liaison fluviale et élargissement du canal de la Deûle zone d’activité à vocation industrielle et artisanale

élargissement de la rue Pasteur zone urbaine mixte à densité élevée dominante habitat zone d’activité à vocation industrielle et artisanale

secteur EBC repris en secteur de parc zone urbaine mixte à densité élevée dominante habitat zone d’activité à vocation industrielle et artisanale

aménagement des berges de la Deûle secteur EBC repris en secteur de parc

aménagement des berges de la Deûle et parc zone d’activité diversifiées : bureaux commerces-services

zone d’activité diversifiées : bureaux commerces-services

aménagement des berges de la Deûle et parc

liaison intercommunale Nord-Ouest liaison tram-train site Rhodia limite communale limites du site d’étude (personnel )

N

200

400

zone d’activité diversifiées : bureaux commerces-services création de la voie du LINO et pont zone d’activité à vocation industrielle et artisanale


2.3. LE FONCIER SUR LE SITE

157

Cette carte foncière montre les différentes propriétés du site. Il est intéressant de voir que la parcelle du site de fouilles archéologique appartient à la ville de Marquettelez-Lille. De plus, la ville a récupéré les berges devant la cimenterie Holcim. Dans un futur projet de parc archéologique, comme le souhaite le plan local d’urbanisme (cf. page suivante) il pourrait être pertinent de relier les berges au site de fouilles archéologique. De plus, étant donné que la cimenterie doit quitter le site, cet espace pourrait être récupéré par la métropole. L’ancienne bande de chemin de fer qui est aujourd’hui un écrin végétal contre les Grands Moulins appartient à la LMCU. Il peut donc être utilisé dans la liaison de la parcelle des Grands Moulins de Paris au site Rhodia. Le site Rhodia doit être racheté par la LMCU dans un projet de ZAC, ainsi tout le site d’étude peut être utilisé dans le futur projet, il sera donc aisé de l’utiliser et de réfléchir à l’ensemble du site. Les berges appartiennent à L’État, et au Ministère des transports et de l’équipement du tourisme et de la Mer, ce qui signifie que les quais pourront être utilisés à usages public comme par exemple pour le transport fluvial et la réhabilitation du chemin de halage dans l’objectif de relier le site à la Deûle.

BOONE ALU

RANDS LES G IS R DE PA

NS

MOULI

SI holcim TE AR ciment CH DE éo F logiOUI LLE e s

site rhodia

Sociétés d’entreprises LMCU Ville de Marquette-lez-Lille Etat Ministère des transports et de l’équipement du tourisme et de la mer Voies Navigables de France

200

plan foncier du site des Grands Moulins de Paris. d’après le site du foncier LMCU. 2013

400


3. VERS LE PROJET

158

+

=

+


3.1 Radiographie du site

159

Cette synthèse à l’image d’une radiographie permet de faire un point sur les différentes strates du site depuis le Moyen-âge. Ce travail vise à établir une carte levier des mémoires des lieux. Ces traces visibles et invisibles seront la trame du futur dessin du site : un plan d’appui qui va permettre de préparer le dessin des futurs espaces du paysage des Grands Moulins de Paris. L’état des lieux du substrat paysager nous montre par couches les histoires et le patrimoine qui est encore présent. L’enjeu du projet sera de se servir de cette base archéologique pour développer le site de demain. Un présent continu, qui perdure s’enrichit et se nourrit du passé pour fabriquer l’avenir. Entre passé médiéval et passé industriel, l’objectif est de dessiner dans la continuité en ayant compris et étudié les calques de l’histoire dans la temporalité.

1. radio des strates médiévales 2. radio des strates médiévales et classiques 3.radio des strates médiévales, classique,industrielle 100 m

200m


3.1.un site et 4 OBJECTIFS LA NATURE COMMENT CE SITE PEUT-IL REDEVENIR UN LIEU D’USAGES POUR LES HABITANTS? LA Mémoire COMMENT PAR UN TRAVAIL SUR LA Mémoire peuton sauver ce site des ruines? LA DEÛLE COMMENT CE SITE PEUT DEVENIR UNE HALTE AUX PORTES DE LA Métropole Lilloise? 160

la halte COMMENT FAIRE DEVENIR CE SITE UN LIEU D’ARRÊT ET DE VIE?


la nature RENDRE LE SITE ACCESSIBLE AU PUBLIC un parc public ouvert sur la deûle la mémoire DÉVELOPPER LA PLACE DU PATRIMOINE un pôle CULTUREL dédié à l’archéologie industrielle la deûle RELIER LE SITE à la métropole lilloise par la deûle un port de plaisance proche du centre de lille 161

la halte Créer des accès depuis la métropole une gare des grands moulins de paris


3.2. Synthèse des enjeux à l’échelle du site se rapprocher de la deûle dans le site ENJEUX de la Deûle ouvrir la deûle Faire rentrer la Deûle dans le site Retrouver par évocation les anciens canaux de l’abbaye et de l’industrie Transport fluvial Créer un port de plaisance Développer les haltes de navettes fluviales

162

Dessiner un parcours fluvial pour les navettes Ouverture sur la deûle

Tourner le site vers son canal Valoriser des points de vue Aménager des espaces de détente retrouver les plaisirs de la Deûle

100

200


créer un parc en liaison avec la deûle ENJEUX NATURE LES BERGES Rendre accessible les berges de la Deûle et y développer de nouvelles activités : retrouver la proximité à l’eau

Faire dialoguer la Deûle avec le site par les berges valoriser l’existant 163

végétation existante sur la rive droite

Utiliser la végétation existante pour dessiner le futur parc Relier les îlots de végétation au futur parc affirmer des axes Accentuer des axes sur le site par la végétation

100

200


METTRE EN Scène le patrimoine médiéval et industriel ENJEUX patrimoine

VALORISER LES VESTIGES Bâtiments en ruine à reconvertir en valorisant le style architectural Bâtiments à réhabiliter pour de nouveaux usages affirmer les strates de l’histoire Strates à évoquer dans le futur plan du site Strates médiévale

164

Strates Renaissance Strates industrielles Développer la place de la culture Créer un pôle Eura dédié à la culture et à l’archéologie Développer des centre culturels Maisons folie, Centres d’interprétation Valoriser les points de vue sur le patrimoine 100

200


Rouvrir ce site et favoriser son accessibilité ENJEUX d’ouverture OUVRIR LE SITE VERS L’extérieur Retrouver des accès principaux Rouvrir des accès secondaires Ouverture sur la Deûle entrées dans le site

165

relier le site aux autres villes Renforcer la fréquence du train future ligne LINO et tram-train Liaisons Intercommunales Nord Ouest en construction Développer l’accessibilité Créer une gare des Grands Moulins de Paris Ponctuer la ligne du Lino et du tram-train par des arrêts Créer des parking Réhabiliter et retrouver des ponts disparus

100

200


phasage UN PARC DE la mémoire

UN PÔLE CULTUREL

UN PARC SUR LE PAYSAGE DE LA MÉMOIRE

VIABILISATION ECONOMIQUE ET CULTURELLE DU SITE

un JARDIN DES VESTIGES et des strates UN PARC URBAIN QUI DIALOGUE AVEC LA DEÛLE ET La métropole

166

Temps 0 préparation à la dépollution Étude historique pour s’informer de l’état des sols Campagne de sondages pour connaître avec certitude la qualité des sols et des eaux souterraines Évaluation quantitative des risques sanitaires pour établir les scénarios de référence Plan de gestion des sols pour déterminer les mesures à prendre Actualisation de l’évaluation et du plan de gestion

UN CENTRE D’ARCHÉOLOGIE UN LIEU DE MANIFESTATIONS CULTURELLES

temps

1

1er étape de dépollution fouilles préventives développement de la végétation mise en place du projet de parc ouverture du parc


UN PORT FLUVIAL DE PLAISANCE ÉVOCATION DE LA PLACE DE L’EAU UNE HALTE FLUVIALE POUR LES PÉNICHES RETROUVER LES PLAISIR DE LA DEÛLE

167

temps

2

2 eme étape de dépollution et réhabilitation des bâtiments choix et vestiges des bâtiments à garder mise en valeur des vestiges réflexion avec les habitants sur la mémoire du site

temps

3

3 eme étape Dé pollution en continu Fouilles archéologiques de la cimenterie creusement du bassin et des canaux utilisation de la terre déblayée sur le site ouverture du port création du quartier urbain dans le parc


références JARDIN Archéologique

JARDIN industriel

JARDIN d’enfants

évocation par la lumière

évocation par la matière

évocation végétale

1.Agence Base. Parc de l’abbaye de Valasse. 2. Yann Kersalé. le sillon dans le miroir

1.Latz& Partner. Emscher parc Duisburg-1990 2. Richard Serra. Courbe dans un champs

1.Jacqueline Osty. Caserne de Boone. Grenoble 2. Agence Base. Parc de l’abbaye de Valasse

168


réhabilitation de friche

réhabilitation d’usine

réhabilitation de vestiges

port de plaisance

piscine sur le fleuve

Quai de péniches

1.Zaigas Gailas Birojs. ancienne usine de poisson. Lettonie 2. Starseite. port. Helsinki

1. Riciotti. Les Grands Moulins de Paris en université. 2006 2. Bedeshiff. Spree. Berlin

1.Patrick Bouchain. Friche de Belle de mai. Marseille. 2004 2. Quai de l’arsenal. Paris. 4e arr.

169


CONCLUSION ET OUVERTURE Ce travail de recherche m’a permis de comprendre l’épaisseur de ce site. Je me suis immiscée avec les outils de paysagiste dans la peau d’un archéologue : j’ai fouillé, enquêté, décrypté, annoté, examiné, relié et délié le langage de ce site. J’ai défini des éléments d’hydrologie, de paysage, d’histoire, de géographie... qui constituent le socle de ce paysage. Cette analyse m’a fait découvrir les principales strates de ce territoire, qui vont me permettre de développer le projet. Aujourd’hui, je me rend compte à quel point le paysage des Grands Moulins de Paris est riche et offre une opportunité pour le développement de la ville de demain. La Deûle va aiguiller toutes les réflexions et donnera une dynamique à cet espace, l’ambition étant de retrouver les plaisirs de la Deûle par les futurs usages.

170

Je vais maintenant réfléchir à l’avenir du paysage des Grands Moulins de Paris, esquisser et dessiner le projet de demain. Je vais prendre en compte les besoins à la fois de la métropole, de la ville de Marquette-lez-Lille, Saint-André et la Madeleine mais aussi de tous les acteurs que j’ai pu rencontrer. Les volontés de la Communauté Urbaine doivent être un écho aux désirs des habitants : futurs usagers de ce site. Le site devra être réfléchi dans le temps. La dimension de la temporalité est essentielle et ne peut être défini dans un espace-temps réduit. Ces ruines réhabilitées doivent s’inscrire dans le processus du présent continu. L’enjeu serait à travers le futur projet de retrouver cette atmosphère d’île imaginaire qu’il y a aujourd’hui sur le site. Cette perception d’insularité pourrait être un élément fort dans les pistes à envisager. De plus ce projet ne peut être dynamique sans vie de quartier. Un quartier doit être développé avec des activités tels que des commerces, des cinémas, des lieux de détente, une bibliothèque, des lieux d’enseignement, des cafés, un village sur l’eau, un port avec son phare, des espaces pour les plaisanciers, des salles de spectacles, une vie de quartier s’inscrira donc dans le futur parc des Grands Moulins de Paris !

http://www.panoramio.com Enfants se baignant dans le canal d’Euratechnologie 2013


171

« ET SI ON ALLAIT SE BAIGNER DANS LA DEÛLE ?»


BIBLIOGRAPHIE

172

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PLAN et documents LMCU. Bâtir un éco-quartier sur un ancien site industriel. n°4 Les livrets de L’Union. éd. L’Union Métropole. 2012 LMCU.Stephenson, la renaissance inattendue d’un quartier ancien. n°2. Les livrets de l’Union. L’Union Métropole. 2012 LMCU. Friches industrielles et pollutions historiques-Rapport de la mission d’information et d’évaluation. éd. LMCU.2010 LMCU. Guide des friches industrielles. Gestion et régénération. éd. LMCU. 2011 VERQUERRE S. Marquette-lez-Lille (59520) Vers la requalification du centre-ville. Mémoire d’étude. 2011 LMCU. Dossier de présentation Marquette-lez-lille, Saint-André-Lez-Lille; Projet de requalification du Grand Rhodia

173

Schéma directeur de développement et d’urbanisme de Lille Métropole approuvé le 6 décembre. Ville de Lille, Grand Projet citadelle présentation du schéma directeur de la citadelle 2009-2020 Lille métropole, Plan local d’urbanisme de la ville de Lille adopté le 8 octobre 2004, modifié par délibération février 2012. Syndicat mixte du SCOT Lille métropole et le débat du comité syndicat du 22 octobre 2010 Lille métropole, Programme local de l’habitat adopté en 2005 par le conseil de communauté Plan Bleu métropolitain Lille, La madeleine, St André, étude faune flore habitat et dossier d’enquêtes publiques, Lille métropole Communauté Urbaine Dossier de présentation Marquette-lez-Lille Marquett-lez-Lille Projet de requalification du grand Rhodia Plan de ville -Lille agglomération. échelle1/15000. éd. Blay Folder Carte Ign 1/25000e Lille n°2504 Fonds de coupe de Wonks Architecture. Lille TRAVAUX D’ARTISTES http://www.christojeanneclaude.net MATHIEU G. et STOFLETH B. Observatoire photographique du paysage depuis le GR2013. éd. Wild project Richard Serra http://www.moma.org/collection/artist.php?artist_id=5349 ÉMISSION RADIOPHONIQUES et conférence Conférence Sébastien Marot Conférence Collectif Dérive Décembre 2013 Conférence Collectif ETC ensnp Blois Décembre 2013 Le paysage est-il un lieu de mémoire ? France Inter. La croix. 17/10/2012 PHOTOgraphie Fond Pasquero. Hospice Comtesse. www.laterrevueduciel.fr

SITOGRAPHIE www.marquettelezlille.fr www.lmcu.fr www.landezine.com http://lavoixdunord.fr www.universalis.fr http://www.vnf.fr http://geoportail.fr http://www.marquette-en-flandre.net http://www.pointhaut-lechantier.com


remerciements Je tiens à remercier mes professeurs Catherine Farelle et Christophe LeToquin pour le regard, la critique et leurs conseils avisés. Merci à Adrien Jacques, gardien des Grands Moulins de Paris qui a su me faire découvrir la friche avec ses yeux d’urbaniste. Merci à Violaine Mussault pour son engagement et sa motivation. Merci à tous les ouvriers des Grands Moulins de Paris pour leurs mémoire, leurs souvenirs et leurs anecdotes. Merci aux archéologues, Laurent Gubellini, Nicolas Dessault pour les rendez-vous sous la pluie à me conter l’histoire. Merci à Nicolas van Poucke, pour sa connaissance du terrain. Merci à toutes les personnes de la LMCU, qui m’ont accueilli les bras ouverts. Merci à tous les copains pour les moments de bonheur pendant ces 5 années, ces charrettes inoubliables et ces heures à l’atelier, cette famille, cette vie blaisoise. Merci les collocs pour vos sourires et vos confitures. Un grand merci à toute ma famille, Marie-Pierre, Jean-Luc, Virgile pour son écoute, Iona, Pierrette pour les couleurs, à Rommen sans qui... Et enfin, je tiens particulièrement à remercier Antonin pour ses délicats conseils et son regard pertinent. Merci, Merci, Merci !!! 174


« Vous qui construisez des jardins, ne faites pas des parcs, des espaces verts; faites des marges. Ne faites pas des terrains de loisirs et de jeux, faites des lieux de jouissance, faites des clôtures qui soient des commencements. Ne faites pas des objets imaginaires, faites des fictions. Ne faites pas des représentations, faites des vides, des écarts, faites du neutre...» Louis Marin La Montagne. Les cahiers de l’école du paysage

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Un paysage en pause à reconquérir les GRANDS MOULINS DE PARIS à marquette-lez-lille(59) Au Nord de Lille, le long de la Deûle, à quelques minutes à pied de la citadelle de Vauban et de la frontière Belge se trouve un ancien quartier industriel. Une grande friche domine les berges de la Deûle, celle des Grands Moulins de Paris et de la friche Rhodia. Cette espace est un mille feuilles de l’histoire sur lequel s’est développé au XIIe siècle, une des plus grandes abbayes cisterciennes de femmes, un site pétrochimique et la minoterie des Grands Moulins de Paris. Les décideurs politiques se tournent vers Lille-Nord et l’agrandissement de la métropole va bientôt accueillir cette emprise de 60 ha au sein de ses nouvelles limites dans le projet d’une Zone d’Aménagement Concerté. Sachant que ce projet sera en réflexion territoriale par la LMCU (Lille Métropole Communauté Urbaine) il me semble essentiel de l’inscrire dans la planification urbaine à l’échelle de la ville et de ses enjeux géographiques et politiques.

Je devrai m’interroger sur la place de ce site dans le territoire qui a besoin d’un nouveau dynamisme postindustriel. Comment les Grands Moulins de Paris peuvent-ils impulser la ville de la métropole ? Pour ne pas être démantelées comme les usines voisines, comment la minoterie ainsi que le site de l’abbaye peuvent-ils acquérir une nouvelle image ? Dans quelles perspectives dois-je me situer pour repenser leurs nouvelles limites? Ainsi je m’interroge sur mon rôle à jouer et sur le regard à apporter en tant que future paysagiste. Comment dois-je prendre en main un site marqué par l’histoire qui se retrouve aujourd’hui pollué et oublié ? En dirigeant mon étude sur le site de l’abbaye Jeanne de Flandres et les Grands Moulins de Paris, mon travail consistera à révéler les vestiges archéologiques et l’histoire meunière de ces lieux.

Sujet de Juillet 2013 Roxane Van Ginneken L’école nationale supérieure de la nature et du paysage 9, rue de la Chocolaterie-41000 Blois tel : +33(02)54783700 fax : +33(02)54784070 www.ensnp.fr

Comment faire dialoguer ces sites et les lier afin de trouver un fil conducteur qui assure la continuité du paysage? La valorisation du patrimoine historique est un sujet clef qui pourra me faire réfléchir à l’avenir de ces lieux et les connexions qu’ils peuvent avoir. Quels usages donner à ce site ? En saisissant l’opportunité de ce «paysage en pause», je pourrai ainsi établir un programme entre l’abbaye, la minoterie et Lille Métropole. La problématique consiste à passer, par le biais de la mémoire, d’un site patrimonial oublié à un espace culturel accessible au public. Vers un projet de paysage, l’idée d’un parc des Grands Moulins de Paris et un dessein de jardin archéologique sont les premières intuitions qui me viennent à l’esprit... Des amers aux portes de Lille sont en train de mourir. J’aimerais contribuer à leur redonner vie !


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