Mise au point No. 04/2012

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MiseauPoint Politique de la santé

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Médicaments : 410 millions de marge en plus Christian Affolter, Docteur en pharmacie, resp. Bases fondamentales, santésuisse

Les marges sur les médicaments sont nettement plus élevées en Suisse. Il faut justifier économiquement cet écart dans chaque canal de distribution en démontrant les avantages apportés aux assurés. Les médecins doivent être correctement rémunérés pour leurs prestations médicales, sans qu’ils aient besoin de gagner sur la délivrance de médicaments. Les pharmaciens pourraient se voir attribuer de nouvelles prestations dans le cadre de l’assurance de base, comme le suivi des malades chroniques, pour compenser la baisse des marges. santésuisse invite les responsables politiques à prendre des mesures pour soulager les payeurs de primes.

Il faut réduire les marges sur les médicaments ! Une étude récente de santésuisse montre que les marges en Suisse sont plus élevées de 410 millions de francs que dans les pays européens de comparaison. Cette somme correspond à 2,1 % de primes. santésuisse demande des mesures pour soulager les assurés.

Pour la deuxième année consécutive, santésuisse a présenté fin octobre sa comparaison des marges de distribution des médicaments. L’analyse montre que les marges en Suisse sont supérieures de 410 millions de francs à la moyenne des pays européens de comparaison. Résultats de l’étude

CONTENU Editorial Pilule amère : les marges plus élevées en Suisse

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sondage santé : le libre choix plébiscité par les assurés

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Remboursement des primes : une mesure inique

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En bref

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En 2011, les médicaments soumis à ordonnance ont représenté 87 % des dépenses de médicaments dans l’assurance obligatoire des soins, soit 4,7 milliards de francs à la charge des assurés. La somme versée aux distributeurs (grossistes, pharmaciens, médecins propharmaciens et hôpitaux) se monte à 1,2 milliard, les fabricants ont touché 3,4 milliards et 110 millions sont allés à la Confédération sous forme de TVA. L’étude, réalisée avec les pays de référence de l’Office fédéral de la santé publique (l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark, la France, la Grande-Bretagne et la Hollande), se concentre sur la marge de distribution. Pour tous ces pays, la marge calculée correspond à la différence entre le prix de fabrique et le prix public sans TVA, avec un facteur

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de correction tenant compte du niveau des salaires, loyers, et taux d’intérêt. Différencier les canaux

La comparaison révèle que la Suisse applique les marges de distribution sur les médicaments les plus élevées, celles des autres pays sont nettement plus basses. santésuisse demande, pour chaque canal, une justification économique reflétant les coûts des prestations fournies. C’est actuellement difficile, car le système des marges est identique pour tous et s’additionne même à d’autres systèmes de rémunération. santésuisse propose de modifier l’ordonnance existante afin de garantir que les marges dans les différents canaux de distribution (médecins, pharmaciens et hôpitaux) soient économiques et représentent une réelle plusvalue pour les assurés, par exemple en les négociant comme le demande la motion Meier-Schatz. Mais dans ce cas, la marge des grossistes devrait également être négociée. Cette proposition va dans le même sens que celle du Surveillant des prix. (GPA)


LES A SSU RÉS AT TACHÉS AU L I BRE CHO I X Cet été, santésuisse a réalisé pour la dixième fois consécutive depuis 2003 le « sondage santé », une enquête représentative auprès de la population. Dans l’ensemble, les Suissesses et les Suisses sont satisfaits du système actuel. Ils sont un tiers à refuser l’idée d’une séparation de l’assurance de base et de l’assurance complémentaire, peu y sont favorables. Les opinions concernant la caisse unique ne sont pas encore faites, mais la liberté de choix est préférée à une médecine étatique. Enfin, le niveau de connaissances de la population sur le système de santé peut être grandement amélioré.

Comme chaque année, 1200 personnes ont été interrogées par téléphone sur le système de santé et l’assurance-maladie. Plus de 60 % des sondés continuent de juger les assureurs-maladie crédibles, sympathiques et au service des clients. La satisfaction envers « son » assureur demeure élevée, raison principalement évoquée par les nombreux assurés restés fidèles en 2011 (84 %).

quième de l’échantillon s’approche du chiffre réel de 5,4 %. L’idée, resurgie récemment, d’interdire aux assureurs de proposer simultanément assurance de base obligatoire et assurance complémentaire ne suscite pas l’enthousiasme des sondés : seuls 13 % y sont favorables, un tiers privilégie clairement le statu quo et la moitié n’a pas encore d’opinion définitive. La combinaison évite des doublons administratifs et permet de judicieuses synergies.

LAMal, la grande inconnue

Seule la moitié de la population sait que les assureurs n’ont pas le droit de faire de bénéfice dans l’assurance de base et qu’ils doivent conclure des conventions avec tous les médecins (obligation de contracter). L’estimation des frais administratifs est particulièrement surprenante : en moyenne, les personnes interrogées évaluent à plus de 30 % les dépenses consacrées par les assureurs à l’administration et à la publicité. Quatre cinquième des sondés surestiment ainsi massivement les frais administratifs. Seul un cin-

Liberté de choix contre caisse unique

Les opinions concernant la caisse unique ne sont pas encore arrêtées, ce qui n’est guère étonnant aussi longtemps avant la votation : 30 % sont opposés au principe d’une caisse étatique, un peu moins (27 %) sont clairement pour, 43 % n’ont pas encore arrêté leur opinion. Les partisans d’une telle caisse espèrent une diminution des coûts et la fin de la sélection des risques. Ils plaident pour une prime unique

FRAIS ADMINISTRATIFS DE 2003 À 2010/2012: RÉALITÉ ET FICTION

SOURCES: SONDAGE SANTÉ ET OFSP (FRAIS ADMINISTRATIFS ET AMORTISSEMENTS)

30,0% 25,0% 20,0% 15,0% 10,0% 5,0% 0,0%

2003

2004

2005

FRAIS RÉELS SELON L'OFSP

2006

2007

2008

2009

2010

2011

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ESTIMATION PAR LA POPULATION SELON LE SONDAGE SANTÉ

Connaissances lacunaires : depuis toujours, la population surestime la part des frais administratifs des assureurs-maladie.

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Résultats clés du sondage santé : • Les Suisses privilégient le libre choix • Ils surestiment largement les frais administratifs • Ils ont des connaissances très lacunaires de l’assurance de base • Ils plébiscitent clairement le système actuel des primes par tête • Ils refusent la séparation de l’assurance de base et complémentaire

et une simplification du système de l’assurance-maladie. Les adversaires du projet refusent d’abandonner le libre choix parmi les assureursmaladie. Ils veulent pouvoir changer de caisse s’ils sont mécontents et craignent par ailleurs l’absence d’incitation à baisser les coûts et à offrir un service de qualité. La prime par tête recueille la majorité des suffrages

Parmi les systèmes de financement possibles, le système actuel des primes par tête obtient la plus forte approbation (39 %). Le principe d’une prime en fonction du revenu et de la fortune est nettement moins bien accueilli (23 %). Et dès que les conséquences d’un tel financement sont évoquées concrètement, le scepticisme reprend le dessus. La retenue sur le salaire ou un financement par le biais de l’impôt sur la fortune sont clairement rejetés (respectivement 18 % et 4 %). L’abolition de l’assurance de base n’est pas envisageable, seuls 4 % des sondés y étant favorables. Si l’on veut consolider le système actuel, globalement plutôt performant, l’essentiel est de fournir un service de qualité aux assurés et de les informer régulièrement sur le financement mixte selon la LAMal. (GPA)


Photo : Keystone

Une mesure inique et absurde : toute idée de remboursement rétroactif des primes génère de nouvelles inégalités.

PRI M ES REFLÉ TA N T LES COÛ TS CA N TO N AUX Une correction rétroactive des primes légales approuvées depuis 1996 serait une mesure arbitraire et injuste dans 7 cas sur 10. santésuisse rejette donc le projet 12.026 et fait une proposition pour garantir à l’avenir des primes conformes aux coûts dans chaque canton.

L’approbation des primes doit davantage tenir compte des coûts effectifs et être complétée d’un mécanisme de compensation, estime santésuisse. Cela éviterait une déstabilisation du processus complexe de calcul et d’approbation des primes ainsi que la correction rétroactive de primes approuvées. Au lieu de cela, la solution proposée par la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS), à savoir la correction rétroactive des primes payées depuis 1996, génère de nombreuses inégalités de traitement entre les assurés.

canton B aux primes trop élevées bénéficieraient d’un remboursement bien que leurs primes n’aient pas couvert les coûts dans le canton A. Enfin, les assurés ayant reçu des subsides ainsi que les mauvais payeurs seraient également remboursés, aux dépens de l’ensemble des assurés des caisses concernées. Des évaluations statistiques appliquées à la proposition de la CDS révèlent qu’elle serait inéquitable dans 7 cas sur 10. Pour toutes ces raisons, santésuisse a décidé de rejeter ce projet. Mieux gérer au lieu de corriger

Injuste pour les payeurs de primes

En effet, les personnes assurées depuis trois ans auprès d’un assureur ayant des réserves suffisantes bénéficieraient d’un remboursement si elles sont domiciliées dans un canton où les primes étaient au total trop élevées. En revanche, les personnes du même canton assurées auprès d’assureurs sans réserves «excédentaires» – et ils sont sans doute nombreux – n’en profiteraient pas. En outre, les assurés ayant déménagé d’un canton A aux primes au total trop basses dans un

Contrairement à la législation actuelle, la loi sur la surveillance de l’assurance-maladie (LSAMal) entend garantir à l’avenir des primes correspondant aux coûts effectifs des cantons. Or le mécanisme proposé ne permet pas d’atteindre cet objectif. Vouloir corriger le système plutôt que de le gérer plus efficacement serait une erreur. Une modification rétroactive des primes est contestable dans un État de droit et déstabilisante pour l’ensemble du système. De plus, elle accroît les sources potentielles de conflit entre

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Les corrections rétroactives • … sont contraires au principe de la concurrence, coûteuses sur le plan administratif et contestables dans un État de droit • ... sont une erreur du point de vue actuariel • ... menacent la stabilité du système de santé

l’autorité de surveillance et les assureurs-maladie. Proposition de santésuisse

santésuisse a mis au point une proposition constructive tenant compte des exigences politiques, notamment des cantons, sans créer de frictions et de conflits inutiles, et sans porter atteinte à la crédibilité du système. La compensation des recettes de primes trop élevées des années précédentes doit idéalement être intégrée dans le processus de calcul et d’approbation des primes. Cette proposition a l’avantage de garantir la sécurité juridique tout en respectant le principe selon lequel les primes doivent être conformes aux coûts constatés dans les cantons. (DHB)


EN BREF santésuisse favorable à la médecine de famille Lors de la session d’automne, le Conseil des Etats a adopté à l’unanimité la motion de sa Commission de la santé publique visant à renforcer la médecine de famille. Cette motion fixe les principes du projet censé inciter les auteurs de l’initiative « Oui à la médecine de famille » à la retirer. Les mesures proposées concernent la formation, l’enseignement et la recherche, des nouveaux modèles de services d’urgence et surtout la rémunération des prestations. santésuisse est consciente du rôle indispensable des médecins de famille en tant que premier recours et maillon central de la chaîne thérapeutique. Elle estime praticable la voie du contre-projet indirect. Une révision du TARMED n’est toutefois envisageable que dans le respect de la neutralité des coûts.

Pourquoi faut-il plusieurs régions de primes ? Le découpage des régions de primes est de nouveau discuté au Parlement. La motion 12.3941 de Kathy Riklin (PDC) demande l’inscription dans la LAMal des bases légales nécessaires pour que les cantons puissent délimiter eux-mêmes uniformément les régions déterminantes pour les primes. Chaque assureur-maladie devrait ainsi fixer des primes identiques pour tous les assurés d’un canton. Cela briserait l’équilibre fragile entre les exigences actuarielles et celles de politique sociale. Les régions de primes à l’intérieur des grands cantons ne sont en outre qu’un élément d’un système d’assurance complexe. Les supprimer soulagerait les assurés des régions urbaines, plus chères, sans réduire en contrepartie leur consommation de prestations médicales, supérieure à la moyenne. De nombreux assurés des régions rurales, pourtant plus économes dans l’assurance de base, seraient pénalisés par des hausses de primes considérables. Les disparités de coûts par région sont une réa-

lité et un échelonnement mesuré des primes correspond au principe de causalité. santésuisse recommande donc le rejet de la motion.

Une muselière pour les assureurs-maladie ? Lors de la session d’automne, à l’heure des questions, la conseillère nationale socialiste Valérie Piller Carrard a fait un procès d’intention aux assureurs-maladie : ils publieraient dans leurs magazines d’information leur opinion sur la caisse-maladie publique sans respecter les principes d’objectivité, de transparence et de proportionnalité. Le Conseil fédéral devrait donc faire cesser cette « propagande politique ». santésuisse rappelle que les assureurs ont, de par la loi, un devoir d’information vis-à-vis de leurs assurés et qu’il ne faut pas confondre la rectification de fausses informations avec de la propagande. Le comité d’initiative de la caisse publique informe-t-il les citoyens de manière objective et transparente ? Et le concept de la caisse unique respecte-t-il le principe de proportionnalité ? En voici quelques exemples concrets : l’information du comité sur les économies potentielles n’est objectivement pas correcte, car environ 95 % des coûts concernent les prestations médicales, seulement 5,4 % les frais administratifs. Elle n’est pas transparente non plus, la comparaison avec la Suva ne précisant pas que les frais administratifs par tête de cette dernière sont plus élevés que ceux des assureurs-maladie. Enfin, elle ne respecte pas le principe de proportionnalité : la transformation du système actuel, qui fonctionne bien, engloutirait plusieurs milliards de francs et risquerait de conduire à un rationnement des soins. (GPA)

Extrait du blog de Monsieur Santé Contre-projet à la caisse unique : pas de réduction des coûts Dans son contre-projet à l’initiative pour une caisse-maladie publique, le ministre de la santé Alain Berset propose des mesures qui compliquent encore le système de santé et accentuent sa cherté au lieu de l’améliorer. Même la presse a qualifié le contreprojet du conseiller fédéral de placébo. L’avantage d’un tel remède, c’est son innocuité. Or deux des trois propositions sont délétères pour le système de santé. Loin de le parfaire, elles renforceraient sa complexité et son coût. Il est dès lors légitime de se demander si des tactiques de parti ont joué ici un rôle déterminant. Reste que tous les assurés devront payer l’addition. La compensation des risques affinée, quant à elle, est une proposition de bon aloi… Lire la suite sous santesu.is/semjk Dr Christoph Q. Meier, directeur de santésuisse

IMPRESSUM ÉDITION santésuisse – Les assureurs-maladie suisses, Römerstrasse 20, case postale, 4502 Soleure RÉDACTION Gregor Patorski, Daniel Habegger, Frédérique Scherrer, Département Politique et Communication, case postale, 4502 Soleure, Tél. 032 625 41 54, Fax. 032 625 41 51, courriel : redaction@santesuisse.ch, page d’accueil : www.santesuisse.ch, blog: www.monsieur-sante.ch PRODUCTION City-Offset, 2540 Granges PAGE DE COUVERTURE Keystone

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