M MERCURIALE DU GOUVERNEUR DE LA PROVINCE DE NAMUR Protéger, conserver, réhabiliter, valoriser, comprendre, expliquer et transmettre notre patrimoine : un devoir d’ici et d’aujourd’hui en forme de résistance à tous les obscurantismes et à l’oubli ... de là-bas ou de demain
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CONSEIL PROVINCIAL DE NAMUR SÉANCE DU 23 OCTOBRE 2015
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M Sommaire
Introduction
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La notion de patrimoine
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Faut-il tout conserver ?
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Patrimoine et attractivité touristique
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La réutilisation du patrimoine monumental protégé est-elle possible et souhaitable ? Quelles sont les implications du concept de «responsabilité partagée» ?
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La protection du patrimoine en période de troubles : conflits armés, catastrophes naturelles, accidents industriels
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Le Palais provincial
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Conclusion
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Annexes
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MERCURIALE DU GOUVERNEUR DE LA PROVINCE DE NAMUR
Protéger, conserver, réhabiliter, valoriser, comprendre, expliquer et transmettre notre patrimoine : un devoir d’ici et d’aujourd’hui en forme de résistance à tous les obscurantismes et à l’oubli ... de là-bas ou de demain
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CONSEIL PROVINCIAL DE NAMUR SÉANCE DU 23 OCTOBRE 2015
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M 1. INTRODUCTION
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M Monsieur Le Président, Mesdames et Messieurs les Députés provinciaux, Mesdames et Messieurs les Conseillers provinciaux, Monsieur le Directeur général, Monsieur le Secrétaire perpétuel, Madame la Commissaire d’arrondissement, Monsieur le Directeur des archives de l’Etat, Mesdames et Messieurs,
Introduction
Choisir le sujet de l’exercice particulier que constitue la rédaction puis le prononcé d’une mercuriale est, toute proportion gardée, pareil à un dilemme de Corneille auquel Sisyphe se trouverait confronté. La thématique retenue sera jugée par d’aucuns secondaire, accessoire, voire anecdotique face aux priorités et aux réalités de l’heure, confrontée aux urgences économiques et sociales, replacée dans le contexte de l’actualité, où violence, précarité, drames humains retiennent toutes les attentions, au travers notamment du tout-puissant prisme médiatique. De l’autre côté, choisir de commenter un fait de société pourra tout aussi bien être jugé présomptueux, déconnecté d’autres réalités, celles qui peuvent être appréhendées à notre niveau provincial et donc beaucoup trop éloigné des préoccupations des citoyens, comme du champ d’action traditionnel et du travail quotidien d’une institution intermédiaire telle que la Province.
Et là où Corneille rencontre Homère et Camus, c’est quand on s’interroge finalement sur l’utilité même de l’exercice, quel que soit d’ailleurs le sujet choisi ; quand on se demande quelle est la finalité et la valeur ajoutée de tout cela et que tous les «à quoi bon ?» désabusés mêlent leurs ailes tournoyantes à celles des «de toute façon» déshérités, dans le ciel nuageux de l’indifférence, des découragements et des résignations. Le sujet dont j’ai choisi de vous entretenir aujourd’hui, à savoir celui du patrimoine, m’apparaît pourtant tout à la fois exemplatif de ce dilemme et en capacité de le résoudre, si nous y prêtons quelque attention ; tout à la fois suffisamment interconnecté avec l’action provinciale, avec son environnement institutionnel immédiat et avec ses compétences, tout en s’inscrivant dans une actualité internationale suffisamment grave pour commander aux consciences de rester en état de veille et, quand il le faut, aux vigilances de se transformer en résistances.
De manière certes très partielle, et ce au travers de mes interrogations, doutes, ambitions, rêves ou responsabilités quant au Palais provincial, j’ai déjà évoqué la question du patrimoine, dans ma mercuriale de 2012. Et je ne cache pas bien entendu, que le devenir de ce Palais provincial et sa mise en valeur, notamment au lendemain de son transfert de l’inventaire de la Régie fédérale des bâtiments de l’État vers celui de la Wallonie, est une des raisons parmi d’autres qui m’ont inspiré le choix de la thématique de ce jour. Mais ce n’est pas là la seule.
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M Des questions très actuelles du moment, telle que celle de la lutte contre le radicalisme chez nous, tel que le défi que représente l’accueil des migrants et des réfugiés dans nos états occidentaux ou encore les débats qui ont entouré l’éventuelle intervention de notre armée au sein du conflit syrien, charrient derrière elles des images d’une autre nature mais qui y sont indissociablement liées. Ces images sont celles de sculptures millénaires fracassées à coups de masses ; de sites archéologiques dévastés par des fanatiques aveuglés, signes et serviteurs de la résurgence d’un obscurantisme qu’on croyait d’un autre temps ; de temples extraordinaires, aux noms qui semblent sortis des Contes des mille et une nuits, pilonnés sans relâche à coups de canons.
Parler devant vous maintenant de la question du patrimoine et de sa protection, même si notre domaine de compétences et notre aire géographique d’intervention potentielle ne s’étendent bien sûr pas aux rives de l’Euphrate, du Tigre ou du Niger, c’est verser des larmes de tristesse, de colère et de rage pour maintenir ensemble la garde contre le mépris de l’art, des savoirs, contre le rejet du beau, des racines, les nôtres comme celles de l’Humanité toute entière ; contre le dénigrement de la culture, de la poésie, de la liberté de penser et de s’exprimer ; contre le misérabilisme utilitariste, cette nouvelle forme d’ignorantisme qui, malheureusement et perfidement, fait chez nous aussi de nouveaux adeptes.
La réflexion sur la place du patrimoine au sein de nos sociétés et sur l’espace qu’il peut ou doit occuper au cœur des politiques des collectivités territoriales, intermédiaires notamment, croise bien évidemment également, et à de multiples endroits, les soucis de développement et de prospérité économiques ; elle croise les dimensions d’attractivité touristique, le positionnement quant à l’image qu’on veut renvoyer de l’institution, le questionnement sur la manière de préserver la mémoire et de la transmettre ; elle croise les mutations de nos processus pédagogiques et d’enseignement et enfin, last but not least, il existe un lien étroit entre la notion de patrimoine et le concept de développement durable qui se retrouvent l’un et l’autre au travers de principes tels que « le principe de solidarité entre générations, le principe de précaution, celui d’intégration ainsi que la conciliation de ces trois dimensions et le principe de participation ».1 Ainsi, comme le proclame Michel QUINTIN dans l’introduction de son ouvrage juridique La protection du patrimoine culturel : « la conservation du patrimoine est une des composantes à part entière du développement durable ». Nous sommes donc bien là je pense et sans contestation possible, au beau milieu de nombre de compétences provinciales.
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Je vous le disais, les piliers de la terre et ceux des civilisations peuvent fraterniser sans encombre avec les feuillets et les pages du Contrat d’avenir provincial, et même s’en renforcer et s’en nourrir. Corneille, quant à lui, peut remiser ses alternatives aux relents schizophréniques.
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1
C. H. BORN, Le développement durable : un «objectif de politique générale» à valeur constitutionnelle, Revue de droit constitutionnel, 2007, pages 211 et 212 cité par Michel QUINTIN in La protection du patrimoine culturel, collection de Droit public, éditions Vanden Broele, Bruges, 2009, page 4
M Mesdames et Messieurs,
Vous l’aurez sans doute déjà compris, il y a en filigrane de cette introduction à ma mercuriale l’annonce, en forme d’aveu, totalement assumé, que celle-ci ne se veut absolument pas une monographie presque exhaustive sur la thématique. Cela n’aurait d’ailleurs dans ce contexte que très peu d’intérêt. Ce qui est intéressant, par contre, c’est de tenter de synthétiser quelques réflexions déjà existantes et souvent même très construites (notamment au sein des services provinciaux), mais encore parfois par trop dispersées ou cloisonnées ; de rappeler quelques outils, méconnus du grand public ; de mettre en questionnement la manière dont la Province, en tant qu’institution, en parallèle ou en partenariat avec d’autres acteurs de son territoire et avec lesquels elle travaille déjà, peut au quotidien, s’impliquer dans la protection du patrimoine, dans sa valorisation et son utilisation à bon escient, dans une démarche alliant crédibilité et souci de notoriété. Ce qui est intéressant, c’est de s’attarder enfin sur un dossier spécifique qui devrait nous concerner tous et qui mérite à ce titre un petit développement et deux ou trois commentaires, à savoir, je l’ai déjà dit, le Palais provincial. Si j’ai choisi de vous réserver cet effort de réflexion, c’est que je suis personnellement convaincu que votre assemblée est, et cela encore plus depuis qu’elle s’est engagée résolument dans les partenariats avec les communes et les démarches de supracommunalité le lieu où des lignes de force pour l’avenir sur cette thématique peuvent être tracées, au-delà des préoccupations certes nécessaires mais reconnaissons-le, un rien triviales, de l’ici, du maintenant et du combien ?. Je souhaiterais pour commencer cet exercice, essayer de définir certains concepts et certaines notions qui permettront dans le même temps de circonscrire davantage le contour de mon exposé, en disant aussi ce qu’il ne pourra pas, ou pas beaucoup, aborder. En effet, la notion de patrimoine est elle-même, ainsi qu’il convient pour un mot de cette occurrence, polysémique mais également évolutive, et ce tant dans le langage courant que dans les textes juridiques et administratifs qui en traitent.
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M 2. LA NOTION DE PATRIMOINE
M La notion de patrimoine
La notion de «patrimoine» telle que je l’aborde dans la présente mercuriale ne correspond indubitablement pas à cette notion de droit privé, bien connue des juristes car étudiée avec moult détails dès les premières heures du cours de droit romain et qui désigne l’universalité des biens, des droits et des obligations d’une personne, physique ou morale, se situant en principe « dans le commerce « et constituant aussi bien la totalité de ses avoirs que la mesure de son crédit.
Le patrimoine dont il est question ici est une notion d’une autre nature. Elle est en lien avec la collectivité, son passé, son histoire, sa mémoire, sa culture ou son identité. Ceci ne signifie pas cependant que la dimension économique du patrimoine, envisagé sous cet angle, est totalement absente. Un bien dit «patrimonial», dans cette acception du terme, peut sûrement avoir eu, ou avoir toujours, une valeur marchande voire commerciale (ne fût-ce que pour, le cas échéant, permettre la détermination du coût des assurances qui le couvrent) mais ce qui prime essentiellement maintenant, c’est la relation que ce bien «patrimonial» entretient avec la collectivité.
Le concept de «conservation» prend dès lors le pas sur celui d’ «aliénation» et si l’idée de «mobilité des biens» reste présente, elle s’entend désormais dans le sens de «transmission» aux générations futures et non plus de valorisation pécuniaire dans le cadre d’une cession. Remarquons aussi que les qualificatifs de «culturel» ou de «mémoriel» sont également régulièrement accolés au mot patrimoine, ce qui fait dire au professeur François RIGAUD dans son ouvrage Le patrimoine culturel : répartition des compétences et conflits de lois que « le substantif a ici un sens métaphorique».2
En outre, étant donné que tout ne peut trouver sa place dans cette notion de patrimoine entendue de la sorte, un choix devra être effectué entre ces biens, ces objets, ces ressources, de toute nature, afin d’identifier ceux et celles qui sont porteurs de suffisamment de symboles, de témoignages et de significations et qui méritent dès lors d’être préservés en vue de les léguer aux générations futures mais également d’être conservés, restaurés ou rénovés et valorisés.
Apparaissent ainsi ici la notion de sens (dans sa double acception : orientation - signification) et, dans sa foulée, les controverses et polémiques qui peuvent surgir à propos de la conservation ou non de tels ou tels éléments qui font sens pour les uns, moins pour les autres, pas du tout pour les troisièmes. Je reviendrai quelque peu ultérieurement sur ce point.
Parfois le mot «patrimoine» est également utilisé de manière restrictive pour désigner le concept de «monuments et sites», ce qui est particulièrement le cas chez nous, notamment au travers de l’énoncé des compétences de certains ministères ou de l’appellation de certaines institutions, ainsi par exemple l’Institut du patrimoine wallon qui a pour vocation unique de s’intéresser au patrimoine immobilier de Wallonie. L’une des implications de cette limitation d’ordre sémiotique (en est-elle l’origine ou la conséquence ?), fait que le patrimoine immobilier est de compétence régionale alors que le patrimoine mobilier est, quant à lui, abordé sous l’angle des arts et de la culture, compétences de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
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RIGAUD, François, Le patrimoine culturel : répartition des compétences et conflits de lois, revue belge de droit constitutionnel, 1994, page 52.
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M A l’inverse, le Code français du patrimoine, dans sa version consolidée du 11 juillet 2015, est beaucoup plus englobant en son article L1 qui dispose que « Le patrimoine s’entend, (...) de l’ensemble des biens, immobiliers ou mobiliers, relevant de la propriété publique ou privée, qui présentent un intérêt historique, artistique, archéologique, esthétique, scientifique ou technique ». Enfin, au-delà de cette dichotomie traditionnelle entre patrimoine culturel matériel, immobilier d’une part et mobilier d’autre part, de nouvelles notions sont apparues au fil des temps ou des prises de conscience ; d’autres encore se sont interpénétrées ou entrecroisées.
Ont ainsi fait leur apparition les notions de «patrimoine culturel subaquatique» (les épaves englouties ou les cités enfouies), de «patrimoine culturel immatériel» (je reviendrai plus longuement sur ce sujet dans quelques instants), de «patrimoine culturel naturel» (autrement dit des sites naturels ayant des aspects culturels, tels des paysages ou des formations biologiques ou géologiques) et enfin de «patrimoine culturel en situation de conflit armé», notion plus étonnante car elle définit le patrimoine visé non par son essence mais par son contexte, et qui pourtant révèle de nos jours, peut-être plus que jamais, toute sa pertinence. Je l’aborderai également en l’incluant dans ma réflexion lorsque je vous parlerai des notions de patrimoine en péril et de «bouclier bleu», en équilibrant mon propos entre les circonstances de catastrophes et celles des conflits armés.
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Mesdames et Messieurs,
Je l’ai dit, la notion de patrimoine est fortement ancrée dans la collectivité et donc dans l’histoire de celle-ci. Malgré tout, ce patrimoine et plus facilement encore le patrimoine mobilier (quoique) peut ne pas être lié strictement aux traditions ou aux productions, que celles-ci soient architecturales, artisanales ou artistiques, de ladite communauté, mais provenir de l’extérieur sans perdre pour cela sa qualification de bien à valeur patrimoniale ni la légitimité de sa reconnaissance par la population et de sa protection par l’ordre juridique dans lequel il se trouve.
Des acquisitions antérieures ou des cadeaux, dans le meilleur des cas ; des rapines organisées (qui étaient monnaie courante à l’occasion de certaines campagnes militaires ou coloniales), du côté plus obscur de la force, ont fait voyager au cours des siècles d’innombrables biens mobiliers à grande valeur patrimoniale chez eux (dans tous les sens du terme) qui se sont parfois fondus et intégrés dans le patrimoine indigène et autochtone des sociétés qui les ont accueillis, en en devenant ainsi partie intégrante ou peu s’en faut. La Statue de la Liberté, œuvre d’un français, BARTHOLDI, et offerte par la France à l’occasion du centième anniversaire de la déclaration d’indépendance des États-Unis est devenue sans conteste un patrimoine américain, symbole qui plus est emblématique de la Ville de New York.
Pareillement, mais témoin de ce patrimoine exogène dont les origines sont plus sujettes à polémiques (sur lesquelles je ne me prononcerai pas) : les frises du Parthénon. Emportées en 1803 par le diplomate britannique Lord ELGIN, exposées à Londres, comme tout le monde le sait, et auxquelles le British Museum tient comme à la prunelle de ses yeux, preuve, quoiqu’il en soit, d’une certaine appropriation par au moins une partie de l’opinion publique d’Albion et d’une vraie connivence entre les antiques bas-reliefs grecs du plus célèbre des monuments de l’Acropole et l’histoire collective passée de la société anglaise de notre 21ème siècle.
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M Namur peut actuellement éprouver cet aspect des choses au travers du débat passionné qui anime les esprits, bien au-delà d’un microcosme d’initiés, à propos de l’éventuelle conservation chez nous de l’œuvre d’un certain sculpteur anversois. Un sculpteur qui s’est peut-être dit un jour que la lenteur proverbiale des Namurois ne pourrait faire que bon accueil à tous les représentants du règne animal dont l’indolence et la lenteur sont elles aussi proverbiales, sans que les caracoles ne puissent se prévaloir d’une quelconque exclusivité.
L’avenir nous dira ce qu’il en est exactement et si l’engouement important mais temporaire d’une exposition tout aussi temporaire est en mesure de créer durablement ici les conditions d’une appropriation de nature patrimoniale qui confèrerait à l’œuvre ellemême un véritable droit de cité sur le long terme dans notre capitale wallonne. Par contre, on pourrait aisément présumer que cette relative indifférence quant à l’origine réelle, essentiellement géographique, du bien patrimonial, pour lui conférer dans l’opinion publique une éventuelle dimension affective, apte à favoriser son acculturation dans un environnement d’accueil, ne trouve que très peu d’échos lorsqu’on en vient à considérer le concept de «patrimoine culturel immatériel». C’est en partie vrai mais ceci doit aussi être légèrement relativisé.
Ainsi que le souligne à juste titre l’UNESCO au travers de ses publications traditionnelles ou web, « le patrimoine culturel ne s’arrête pas aux monuments et aux collections d’objets. Il comprend également les traditions ou les expressions vivantes héritées de nos ancêtres et transmises à nos descendants, comme les traditions orales, les arts du spectacle, les pratiques sociales, rituels et événements festifs, les connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers ou les connaissances et le savoir-faire nécessaires à l’artisanat traditionnel ».
Au début 2001, une rencontre internationale d’experts organisée à Turin a tenté d’élaborer une définition dite «opérationnelle» de l’expression « patrimoine culturel immatériel ». Les travaux de cette table ronde de l’UNESCO se sont basés sur des enquêtes menées auprès des commissions nationales des Etats membres ainsi que d’organisations internationales, gouvernementales et non gouvernementales, à propos des différentes terminologies en usage et des législations nationales existantes dans le domaine. Ce travail a permis de proposer une nouvelle définition du patrimoine culturel immatériel (aussi dénommé «patrimoine culturel vivant»), défini comme « Les processus acquis par les peuples ainsi que les savoirs, les compétences et la créativité dont ils sont les héritiers et qu’ils développent, les produits qu’ils créent et les ressources, espaces et autres dimensions du cadre social et naturel nécessaires à leur durabilité ; ces processus inspirent aux communautés vivantes un sentiment de continuité par rapport aux générations qui les ont précédées et revêtent une importance cruciale pour l’identité culturelle ainsi que la sauvegarde de la diversité culturelle et de la créativité de l’humanité ».
L’article 2 de la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel du 17 octobre 2003 adoptée à Paris par l’Assemblée générale de l’UNESCO lors de sa 32ème session définit quant à elle le patrimoine culturel immatériel comme étant « les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire - ainsi que les instruments, objets, artefacts et espaces culturels qui leur sont associés - que les communautés, les groupes et, le cas échéant, les individus reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. Ce patrimoine culturel immatériel, transmis de génération en génération, est recréé en permanence par les communautés et groupes en fonction de leur milieu, de leur interaction avec la nature et de leur histoire, et leur procure un sentiment d’identité et de continuité, contribuant ainsi à promouvoir le respect de la diversité culturelle et la créativité humaine ».
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M Et la convention ajoute « seul sera pris en considération le patrimoine culturel immatériel conforme aux instruments internationaux existants relatifs aux droits de l’homme, ainsi qu’à l’exigence du respect mutuel entre communautés, groupes et individus, et d’un développement durable ».
La mise en parallèle de ces deux définitions, émanant pourtant de la même autorité, l’UNESCO, nous montre, malgré des constantes sémantiques (transmission, durabilité, identité, continuité, «évolutivité» ) combien cette notion de «patrimoine culturel immatériel» est sujette à débats, modifications, précisions, voire controverses et polémiques, au gré des propositions de reconnaissances et de leur confrontation aux diversités des réalités économiques, sociales et politiques comme aux principes moraux, convictionnels ou philosophiques. Malgré tout, il est intéressant de remarquer que selon l’UNESCO elle-même, le patrimoine culturel immatériel contiendrait une dimension supplémentaire très peu, voire pas du tout, présente dans la définition du patrimoine considéré sous le seul angle de sa matérialité et dont je viens de parler. Il s’agirait à nouveau de l’importance de la transmission (ce qui n’est pas étonnant) mais ici de la transmission de techniques et de savoirs envisagés dans leurs rapports à « leur valeur sociale et économique pertinente pour les groupes minoritaires comme pour les groupes sociaux majoritaires à l’intérieur d’un État (qui) est tout aussi importante pour les pays en développement que pour les pays développés ».
L’utilité sociale et économique des éléments reconnus «patrimoine immatériel» comme leurs rôles de véritables acteurs dans les processus de production et de création des écosystèmes qui les ont développés apparaissent donc comme deux des composantes intrinsèques de la notion. Je reviendrai en partie sur cette question lorsque j’aborderai les liens entre patrimoine (dans ses multiples acceptions) et industrie touristique.
Enfin, et je terminerai par là en ce qui concerne mes considérations générales sur la notion de patrimoine culturel immatériel, plusieurs notions ou qualificatifs y sont accolés dans un essai, par l’UNESCO encore, de précision mais surtout de ce que j’appellerai «d’humanisation» du concept.
Ainsi, le patrimoine culturel immatériel est non seulement traditionnel (référence au passé) mais il englobe également les pratiques contemporaines et toujours vivaces (référence au présent et surtout au futur). Il est aussi dit «représentatif», ce qui signifie que le patrimoine culturel vaut bien en tant que bien culturel, par comparaison, pour son exclusivité, son originalité ou sa valeur exceptionnelle mais qu’en outre il se nourrit et se développe à partir de son enracinement dans une communauté et «dépend de ceux dont la connaissance des traditions, des savoir-faire et des coutumes est transmise au reste de la communauté, de génération en génération, ou à d’autres communautés». Corollaire de ce second principe, le patrimoine culturel immatériel « ne peut être patrimoine que lorsqu’il est reconnu comme tel par les communautés, groupes et individus qui le créent, l’entretiennent et le transmettent ». La reconnaissance par ces communautés où il se vit et leur adhésion sont des préalables incontournables. Une autorité, aussi prestigieuse soit-elle comme l’UNESCO, ne peut dès lors décider seule que nous sommes en présence d’un patrimoine culturel immatériel. On peut donc en inférer, par exemple, que si les marches de l’Entre-Sambre-et-Meuse ont été reconnues, c’est non seulement parce qu’elles sont certes des événements à l’originalité et à l’ampleur remarquables, mais c’est aussi parce que les autorités publiques, telles que la Province, et la population
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M elle-même, les accompagnent, les soutiennent et proclament leur fierté à leur endroit. Ainsi, elles reflètent une certaine prise de conscience de soi-même par le groupe ou la communauté. Et enfin, les formes que prend ce patrimoine immatériel peuvent avoir des similitudes ou des parentés avec celles d’autres réalités existant ailleurs. « Qu’elles viennent du village voisin, d’une ville à l’autre bout du monde ou qu’elles aient été adaptées par des peuples qui ont émigré et se sont installés dans une autre région, elles font toutes partie du patrimoine culturel immatériel en ce sens qu’elles ont été transmises de génération en génération, qu’elles ont évolué en réaction à leur environnement et qu’elles contribuent à nous procurer un sentiment d’identité et de continuité, établissant un lien entre notre passé et, à travers le présent, notre futur ».3
Et c’est ici qu’apparaît la relativisation de l’apparent non-sens que serait la notion «d’acculturation» en matière de patrimoine immatériel. La preuve en est par un simple exemple, proche de nous et non exempt de polémiques : l’origine espagnole de la corrida n’a pas empêché qu’elle soit inscrite en 2011, certes sous les protestations et les cris d’indignation, au patrimoine immatériel de la France, (apparemment quasiment à l’insu du Ministre de la culture de l’époque), avant d’en être radiée, quatre ans plus tard, mais cela en raison de son caractère cruel à l’encontre des animaux et de son inadéquation aux principes moraux en cours de nos jours, et non de son origine extérieure, même si certaines diatribes ont parfois utilisé ce second argument pour renforcer leur portée. Ce qu’on nomme communément «patrimoine immatériel» est donc, au sein de chaque société, et ce contrairement à ce qu’on pourrait penser, une notion en constante construction, dans une conception presque darwinienne.
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Matérialité et immatérialité, immobilité (ou immobilisation) et mobilité (ou « mobiliarité » ainsi qu’on le trouve parfois au XVIIIème siècle4), endogénéité et exogénéité, j’ai voulu dans cette première partie poser le cadre, définir quelques notions, commenter les classifications qu’on retrouve régulièrement dans le discours classique sur ce thème, dégager quelques principes et poser l’une ou l’autre question, en les rattachant, quand cela était possible, à des exemples de chez nous pour mieux mesurer que les interrogations qui sont les nôtres dans ce domaine s’imbriquent et s’interconnectent avec l’abondante littérature, administrative ou scientifique, sur le sujet dans laquelle elles peuvent d’ailleurs peut-être puiser çà et là des réponses ou des ébauches d’explications.
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Mesdames et Messieurs,
Je voudrais à présent aborder quatre points distincts dont, pour ce qui me concerne du moins, je trouve l’analyse tout à fait exemplative des questionnements, des limites ou des controverses qui ne manquent pas de surgir au sein de l’abondante littérature qui existe et se multiplie tous les jours autour de «la question patrimoniale», celle-ci envisagée globalement.
Faut-il tout conserver ? Patrimoine et attractivité touristique. La réutilisation du patrimoine monumental protégé est-elle possible et souhaitable ? Et enfin, quelles sont les implications du concept de «responsabilité partagée» ? 3
Cfr site de l’UNESCO, Qu’est-ce que le patrimoine immatériel, http://www.unesco.org/culture/ich/index.php?lg=fr&pg=00002 Voy. Du gouvernement national, Sain de Manévieux, Chapitre XXVIII, page 40, Neufchâtel, 1789
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3. FAUT-IL TOUT CONSERVER ?
Orchimont - Vue aérienne des séchoirs à tabac - © Aerialmedia
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M Faut-il tout conserver ?
La question sonne a priori, aux oreilles de toute personne ayant un tant soit peu de jugeote, comme un repoussoir de La Palisse à sa réponse qui ne peut être que négative. On ne conserve évidemment que ce qui a une valeur, un sens, une signification, de nature mémorielle, dans les champs de l’économie, des arts, des techniques, des combats sociaux, des faits et des courants historiques indéniables et qui ont en outre influencé la société ; ou encore, que ce qui se rapporte aux hommes et aux femmes qui ont contribué à son progrès, à sa construction ou qui sont reliés avec celles et ceux qui ont marqué la marche de ses avatars successifs. Mais ce faisant, on comprend aussi qu’on trace immédiatement les limites intrinsèques du raisonnement qui peut devenir pour certains, tout sauf une évidence. Philosophes, anthropologues ou sociologues entrent à présent dans la danse et consacrent sans attendre l’art contemporain en l’élevant concomitamment à la dignité patrimoniale du temps actuel.
La sociologue de l’art Nathalie HEINICH précise que « la notion de patrimoine évolue depuis une quarantaine d’années. Hier, pour le grand public, ce qui était patrimonial devait être nécessairement beau et ancien. Progressivement les critères de beauté comme d’ancienneté ont été bannis du discours des experts. Mieux, le lavoir de village ou le four à pain ont été élevés au rang d’éléments à protéger5 » et j’ajouterais, ceci indépendamment d’une reconnaissance de la cuisson du pain ou de la lessive à la main en tant que patrimoine immatériel.
Plus de place donc uniquement pour le beau et l’ancien. Le laid (ou plus exactement le «sujet aux questionnements de l’esthétisme ») et le nouveau (et pourquoi pas l’évanescent ?) sont déclarés «patrimonialisables». Mais qu’en est-il dès lors du méchant et du mal ? Quelle place laisser en effet aux stigmates monumentaux des régimes totalitaires, aux témoignages visibles et aux sanctuaires maudits des idéologies les plus barbares ?
Les camps de concentration et les autres lieux de détention, de privation et de confiscation de la liberté et de la dignité ont-ils une place dans la grande famille du patrimoine, en tant que traces, malheureusement presque indélébiles, de la cruauté des hommes ? Cela fait bien longtemps qu’on visite Alésia, Waterloo, Omaha Beach ou Dien Bien Phu.
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La préoccupation pédagogique de la transmission, doublée de la volonté de pouvoir se fonder sur des «objectivités» prouvées par les faits et les pierres, nous conduisent évidemment vers une réponse qui ne peut être que positive. Les dates anniversaires que nous vivons ou venons de vivre permettent de plus à ces logiques de jouer de manière exponentielle. Pourtant, d’autres interrogations continuent de planer ...
Peut-on préserver la maison du dictateur ou la résidence à l’architecture démente et au luxe outrageant de l’affameur d’un peuple pour la seule raison que son occupant a marqué l’histoire, d’abord, voire uniquement, par son nom d’infamie ?
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Voir l’article de Philippe TRETIACK, Le patrimoine a de l’avenir in Le Cahier du Monde, n°21982 du 19 septembre 2015 et l’ouvrage de Nathalie HEINICH, La fabrique du patrimoine. De la cathédrale à la petite cuillère, Editions de la Maison des Sciences de l’Homme, coll. «Ethnologie de France», 2009, 286 p.
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M Nous conservons et valorisons en tant que lieu pédagogique et de mémoire le bunker d’Hitler à Brûly-de-Pesche. En avril dernier, la RTBF en soulignait d’ailleurs le tout nouvel attrait ... touristique6 qu’il avait à présent suite aux nouveaux aménagements et à sa nouvelle scénographie épurée, financés par la Province, dans le cadre des partenariats, à concurrence de plus de 130.000 euros. Et si nous pouvons en l’occurrence certes considérer que les aspects «hommage aux victimes» et «interprétation de notre sombre passé» prennent le pas sur une exploitation touristique qu’on pourrait juger malsaine, il n’en va pas toujours de la sorte dans des circonstances comparables. Et que penser des «touristes» d’un autre genre, nostalgiques d’un certain ordre nouveau qui peuvent y trouver des buts de pèlerinages aux accents nazillons ?
Dans le même ordre d’idée, pourquoi empruntons-nous sans trop d’états d’âme les nouvelles voies soyeuses du tourisme chic qui nous conduisent vers les vestiges (encore souillés du sang de leurs esclaves bâtisseurs) des temples d’un Tamerlan dont je n’ai, malgré l’éloignement du temps, aucune raison de sous-estimer l’autocratie alors que nous ne souffrons pas le moindre regret de ne pouvoir visiter un jour les résidences de Mouammar KHADAFI, dont l’une n’est plus qu’un terrain vague jonché d’immondices et l’autre un marché aux animaux ? Pourrait-on alors, si on suit la même logique mais en sens inverse, oser songer de temps à autre à «patrimonialiser» également les causes et les effets d’une guerre qui a fait rage ces dernières années ou qui gronde actuellement ?
Le pont de Mostar en Bosnie devait-il être reconstruit pour treize millions d’euros ou n’avait-il pas, une fois détruit, également une certaine valeur patrimoniale, alors en forme d’exemple du non-sens ? Et pourquoi est-ce que je trouve normal et même nécessaire qu’il en soit allé ainsi alors que je ne me suis jamais demandé pourquoi on n’avait pas tenté de rebâtir une xième fois le Pont d’Avignon après la dernière inondation qui en emporta les arches ou que j’ai toujours considéré que ne pas réédifier les tours jumelles du World Trade Center de New York et préférer y marquer le ground zero coulaient finalement de source ?
A propos des ponts, disons qu’on peut considérer que le critère de l’utilité pour la traversée de la rivière qu’il enjambe parvint à amplifier l’intérêt patrimonial de celui de Mostar pour en commander la reconstruction et que le critère de l’intérêt patrimonial de celui d’Avignon compensa sa nouvelle inutilité pour en empêcher la destruction.
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Quant au WTC, il suffit d’accepter l’idée que la consécration de nouveaux sanctuaires a besoin qu’on puisse renoncer à la réédification de temples maudits.
Pour clore ce chapitre, je ne peux m’empêcher de mentionner deux choses encore qui prouvent à loisir le champ immense de réflexions, de débats et de perspectives qu’ouvre cette question toute simple du «faut-il tout conserver ?» (question que j’aurais d’ailleurs pu prolonger dès le début par quelques autres telles que «faut-il tout protéger ?» ou «faut-il tout valoriser»). La première de ces deux choses est le débat émergent, depuis quelques années déjà, de la conservation, et si oui de l’utilisation et de la valorisation, par exemple à des visées touristiques ainsi que je vais en parler, du patrimoine industriel. La seconde est le cas spécifique des archives.
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Site de la RTBF, le 24 avril 2015 : Le bunker d’Hitler à Brûly-de-Pesche: le lieu de mémoire se renouvelle.
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M La préservation, l’entretien et l’organisation de visites aux Valenbruken de la région d’Uppsala en Suède, vestiges des origines wallonnes de l’industrie sidérurgique suédoise, magnifient notre histoire autant qu’ils flattent notre ego et leur évidence n’appelle aujourd’hui plus guère de commentaires. Il en va tout autrement de l’ancien site Renault de Boulogne Billancourt dont la réaffectation et le réaménagement appellent toujours autant de critiques qu’ils ne suscitent de regrets. Quelques éléments ont néanmoins été conservés car, comme le dit un commentateur : « Tout raser de Renault n’était pas possible pour des raisons sociales, c’est ici, au sein des usines Renault, que les mouvements sociaux ont été les plus marqués, c’est ici, grâce au combat d’ouvriers, que des acquis sociaux ont été gagnés pour des générations de salariés (...), c’est au sein des usines Renault que l’effort de guerre de 14-18 a été l’un des plus forts, c’est ici que sont nés le tank moderne (FT17), ou encore la voiture populaire avec la 4CV.7 » Les sorts contrastés réservés à d’anciens sites industriels qui ont, chacun à leur manière, marqué l’histoire, que celle-ci soit nationale, régionale ou locale tels que le site du Bois du Cazier (dont la tragédie de 1956 est une donnée particulière), de Renault - Boulogne Billancourt, de Val Jalbert (dans le Saguenay québécois), de la Saline royale d’Arc-et-Senans, en France, du Grand Hornu ou plus près de nous, les séchoirs à tabac de la Semois, les abattoirs de Bomel, les Moulins de Beez ou les papeteries saint-servaitoises, illustrent les enjeux et aspects contradictoires du devenir des anciens sites industriels, techniques et de production, envisagés dans leur dimension patrimoniale. Ainsi, les télescopages d’intérêts opposés (parfois radicalement) guidés par des ambitions ou visées locales incompatibles avec les intentions de classement ou de préservation ; les conflits des mémoires et des références ; les arrière-pensées, ambiguïtés ou instrumentalisations, des prétentions mémorielles notamment8 ; les enjeux politiques sont des réalités qu’on peut draper d’un regret naïf mais avec lesquelles il faut cependant compter.
En ce qui concerne les archives, la situation est à la fois identique et aux antipodes et cette thématique mériterait à elle seule un développement spécifique que je me suis pris, en rédigeant celui-ci, à placer au rang de mes projets d’avenir. Je me bornerai donc à trois courtes considérations personnelles qui n’engagent que moi : en matière d’archives, le spectateur d’hier devient de plus en plus le producteur et le créateur d’aujourd’hui et surtout de demain ; les nouvelles technologies de numérisation et de virtualisation nous donnent l’illusion que tout est d’ores et déjà possible en ce domaine et, ce faisant, accroissent nos capacités et notre appétit de conservation ; tenant compte de ces réalités, il faut se préserver aujourd’hui du syndrome du «tout est intéressant» en se disant de toute façon qu’il faudra faire confiance au temps qui passe et à son regard rétrospectif critique sur les mirages archivistiques de l’immédiat. Le risque de ces évolutions et de ces travers, si nous n’y prenons pas garde, étant que l’archive quitte lentement la sphère du patrimoine pour entrer de plain-pied dans celle de l’anecdote.
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Que reste-t-il de Renault à Boulogne Billancourt, 7 mars 2015, alexrenault, http://lautomobileancienne.com/que-reste-t-il-de-renault-a-boulogne-billancourt/ PALMER, Robert, Préface à l’ouvrage collectif Le patrimoine et au-delà, Editions du Conseil de l’Europe, Paris, 2009, 235 pages : «De nombreux exemples montrent qu’aujourd’hui comme hier, le patrimoine peut devenir un facteur de division si des groupes l’instrumentalisent pour opposer une résistance ou exprimer des différences ». 8
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4. PATRIMOINE ET ATTRACTIVITÉ TOURISTIQUE
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M Patrimoine et attractivité touristique Mesdames et Messieurs,
Au-delà des expériences vécues lors de nos villégiatures estivales ou des approches intuitives que nous pouvons en avoir, penchonsnous sur les liens entre gestion du patrimoine et attractivité touristique. Ces deux préoccupations sont-elles vraiment conciliables ou mieux, complémentaires, et n’y a-t-il pas néanmoins entre les deux l’un ou l’autre point d’ombre ou de tiraillement ? « Des Bouddhas de Bamiyang ou ce qu’il en reste, aux remparts du Vieux-Québec qui n’ont jamais réellement servi en tant que tels mais qui semblent aujourd’hui plus que jamais authentiques ; des gorilles camerounais du Dja mais aussi de ses pygmées, à ces hôtels particuliers du Marais à Paris ; de La Fayette, dernier retranchement de la Francophonie aux Etats-Unis à Hanoï où celle-ci semble accompagner l’ouverture et la prospérité nouvelles du Vietnam jusqu’à Francières où le regard hésite encore à transfigurer les ruines de bétons et de rouille d’une sucrerie picarde en témoignage d’une époque mémorable, à aucun moment peut-être le monde n’a semblé vibrer, tantôt en harmonie, tantôt en opposition mais toujours avec autant de constance, des bruits du tourisme et du patrimoine »9 , c’est en ces mots que le géographe français du tourisme et professeur d’université Olivier LAZZAROTTI posait le débat, il y a une dizaine d’années, en introduction d’un article interpellant intitulé, «Tourisme et patrimoine, ad augusta per angusta» (traduction littérale : «tourisme et patrimoine, vers la gloire mais par des voies étroites », en d’autres mots, les grandes choses ne se font pas sans mal).
Tantôt en opposition, tantôt en harmonie, les dynamiques touristiques et patrimoniales semblent en effet a priori faire corps, sinon dans la réalité des principes de gestion de l’une comme de l’autre, à tout le moins dans la réflexion conceptuelle. Les éléments d’architecture, les œuvres d’art, les rites, les fêtes et le folklore sont indéniablement des éléments de curiosité ou d’attrait qui retiennent l’attention du public amateur de découvertes, d’exotisme culturel, d’événements traditionnels. Et d’ailleurs, les statistiques de fréquentation des musées, des expositions temporaires, des monuments, des sites naturels, des grands rassemblements populaires à dimension culturelle mettent la plupart du temps, et à juste titre, un point d’honneur à souligner la participation de visiteurs ou de spectateurs extérieurs et la contribution de ceux-ci au bilan positif de l’initiative. Tout récemment encore, les journées du patrimoine auxquelles la province a largement contribué, notamment par l’ouverture de ce Palais provincial et les animations qui s’y sont déroulées, ont connu un vif succès. Dans son bilan intermédiaire, le service provincial du patrimoine se félicitait que près de huit cents personnes, adultes, jeunes et enfants confondus, aient visité le Palais tout en ajoutant dans la foulée que « des statistiques et une ... cartographie seront réalisées dès que possible ». Cet exemple tiré de nos activités provinciales quotidiennes (et j’aurais bien évidemment pu prendre d’autres exemples) témoigne de la préoccupation constante de connaître l’origine des visiteurs (c’est le cas ici dans un programme de mise en évidence de notre patrimoine monumental local, adhérant à une initiative régionale globale), et donc son potentiel d’attractivité sur le plan touristique. Mais revenons sur ces liens (que je qualifierais d’amour – haine) entre le patrimoine et l’activité touristique. Car la mise en tourisme du patrimoine ne va pas sans poser de questions voire même sans susciter de sérieuses remises en cause ces derniers temps.
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LAZZAROTTI, Olivier, Tourisme et patrimoine, ad augusta per angust(i)a, Université de Picardie EA MIT Université, Paris.
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M Ainsi que certains auteurs le constatent, on peut considérer que la première reconnaissance en tant que patrimoine est le fait de touristes eux-mêmes. Avant même de donner tous pouvoirs en la matière aux technocrates de l’ethnographie, de la sociologie comparée, de l’archéologie ou de l’architecture, la reconnaissance patrimoniale fut indéniablement d’abord le fait de ... touristes10 . Prosper Mérimée, référence majeure en France et dans nos régions, en matière de protection du patrimoine, ne déclara-t-il pas luimême lorsqu’il devint Inspecteur général des monuments historiques de France en 1834 que cette fonction « convient fort à mes goûts, à ma paresse et à mes idées de voyage » et qu’il se réjouit de pouvoir découvrir et parcourir une France » plus inconnue que la Grèce ou l’Egypte ».11 De même, c’est en voyageur émerveillé et curieux que Stendhal parcourt l’Italie et succombe aux beautés de son patrimoine artistique pour nous confier qu’il en était «... arrivé à ce point d’émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les Beaux-Arts et les sentiments passionnés. En sortant de Santa Croce, j’avais un battement de cœur, [...] la vie était épuisée chez moi, je marchais avec la crainte de tomber » 12. Le fameux syndrome de Stendhal était né et avec lui, la contemplation du patrimoine faisait son entrée à la Faculté.
C’est dans un second temps que d’autres démarches, issues quant à elles de disciplines scientifiques, puis de courants philosophiques ou de combats politiques et idéologiques (en ce compris les combats pour la reconnaissance identitaire des peuples, des états ou des nations), prirent la main en matière de reconnaissance patrimoniale pour l’établissement des listes de protection des biens les plus divers dont il faut bien avouer que cette mise en valeur, sous le couvert d’une noble cause de sauvegarde, servait aussi parfois des visées d’un autre ordre. On en est venu ainsi progressivement, au-delà de ce que j’appellerais «des biens de la première vague», à reconnaître et à protéger, d’une part un patrimoine apte à conforter les identités et les fiertés nationales, quitte à ce que celui-ci perde de sa pertinence au cours du temps et, d’autre part, un patrimoine plus confidentiel, difficile à interpréter ou à comprendre pour le touriste lambda, parfois abscons ou accessible aux seuls initiés et experts, largement dénué d’intérêt touristique. Il est piquant de constater à cet égard qu’un grand nombre de biens, essentiellement mobiliers, figurant sur l’imposante liste du patrimoine protégé du Québec voient leur localisation tenue secrète et classée confidentielle, ce qui est en somme parfaitement compréhensible pour leur sécurité et leur protection mais parfaitement à l’antithèse d’une démarche contribuant à l’attractivité touristique.
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De plus, et malgré la Charte du tourisme durable signée à Lanzarote en avril 1995, les contours qu’on voudrait magiques du triangle patrimoine-durabilité-tourisme deviennent plus flous et même se lézardent.
Afin de se préserver, les grottes de Lascaux doivent se cloner et fermer l’original pour ouvrir grandes et sans complexe les portes de leur copie et à propos du site emblématique Incas du Pérou, le Machu Picchu, le journal Le Monde titrait il y a quelques années : « Machu Picchu : un patrimoine menacé par le tourisme13» . 10
Voy. à ce sujet NOPPEN, Luc et MORISSET, Lucie K., « Le patrimoine est-il soluble dans le tourisme ? », Teoros, Revue de recherche en tourisme, p. 57-59, http:// teoros.revues.org/1722#bodyftn4/ 11 MERIMEE, Prosper, lettre à son ami Sutton Sharpe, du 12 mai 1834 12 STENDHAL, Rome, Naples et Florence en 1854, p. 207 13 Le Monde, le 1er juillet 2011, par Chrystelle BARBIER sur http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2011 /07/01/machu-picchu-un-patrimoine-menace-parle-tourisme_1543457_3222.html#ojqbqK0f2jPEKTYv.99
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M La revue universitaire québécoise consacrée au tourisme, Teoros, posait déjà la question en 2003 «le patrimoine est-il soluble dans le tourisme» pour arriver au terme d’un article savant et d’une analyse très philosophique à une conclusion négative ce qui est, toujours selon la revue, certainement un bien mais était-ce «réellement un gain ?»14
Le tourisme en effet, outre qu’il ait permis la première vague de reconnaissances patrimoniales (j’en ai donné deux exemples) ou qu’il ait permis à tout le moins d’éveiller les intérêts, est aujourd’hui également considéré comme l’un des seuls modèles qui permette d’assurer le développement de la ressource patrimoniale ou culturelle envisagée pour elle-même ; les théoriciens du tourisme le proclament, il soutient l’épanouissement du patrimoine. Dès lors, le plus inquiétant aux yeux des observateurs avertis étant à présent l’émergence et la «starification» de la notion de «patrimoine immatériel» dont j’ai déjà abondamment parlé qui serait une arme «à tranchants multiples» et qui, en dépit des prétentions de l’UNESCO15 selon qui ... (il) ... serait « garant du développement durable » , serait en fait « … tout le contraire (...) parce que, même en prenant appui sur le prétexte de la diversification de l’offre touristique pour s’épanouir, le patrimoine immatériel draine l’énergie que l’on consacrerait autrement, justement, à la ressource véritable : le patrimoine matériel » . Et les auteurs de poursuivre au sein de la même revue Teoros déjà citée : « Le patrimoine immatériel n’est, lui, qu’un oxymoron, au mieux une confusion, entre un objet… et son interprétation »17.
Certainement qu’il est plus agréable et plus authentique que ce soit une béguine18 plutôt qu’un guide, aussi compétent soit-il ou soit-elle, qui nous fasse découvrir son béguinage ; plus «couleur locale» que ce soit un tisserand qui nous montre comment manier le métier à tisser ou un forgeron qui nous ouvre tout grand le portail de sa forge mais, sans forge, sans métier à tisser, sans béguinage, ce qu’on appelle les «trésors vivants «, à savoir les congrégations religieuses, les artisans et autres professions ancestrales ne sont que peu de choses.
Si on n’y prend pas garde, l’attention croissante portée au patrimoine immatériel (qui est presque à chaque fois totalement délocalisable19) au détriment du patrimoine matériel, encore plus du patrimoine matériel immobilier, risque de supprimer l’envie de mobilité du touriste, soit parce que le dépaysement proposé par le rite, la tradition, la technique ou la croyance reconnue dans cadre, même vécue dans son environnement d’origine, n’arrivera jamais à la hauteur de celui que procure le patrimoine monumental ou naturel ; soit que ce patrimoine immatériel pourra tout aussi bien se découvrir à deux pas de chez soi.
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Après tout, la vraie gastronomie française se déguste avec autant de plaisir dans le restaurant français de la rue d’à côté que sur les berges de la Seine à Paris ou de la Gironde à Bordeaux et quel intérêt auront encore les Chinois de venir visiter Walcourt ou Namur
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14
NOPPEN, Luc et MORISSET, Lucie K, Le patrimoine est-il soluble dans le tourisme ? Teoros, p. 57 - 59, consultable sur http://teoros.revues.org/1722#ftn3 Voy. UNESCO 2003:1 16 NOPPEN, Luc et MORISSET, Lucie K, Le patrimoine immatériel : une arme à tranchants multiples, Teoros, p. 75 -76 consultable sur http://teoros.revues.org/1500 17 Idem 18 En 2006, lors d’un colloque organisé par Mission patrimoine religieux qui s’est tenu au Québec, au Cap-de-la-Madeleine, 30 congrégations religieuses avaient manifesté leur intérêt pour participer à l’établissement d’un inventaire du patrimoine religieux … immatériel 19 Cfr. le développement supra. 15
M puisque notre patrimoine culturel immatériel, déjà reconnu ou qui aimerait un jour l’être, les marcheurs de l’Entre Sambre et Meuse et les Echasseurs, viennent à eux presque chaque année ? Mais d’autres diront qu’il n’y a dans tout cela que de noires prédictions d’une bien triste Cassandre et que le patrimoine culturel immatériel est une source encore insuffisamment inexplorée de potentialités touristiques, spécialement pour des contrées telles que nos provinces wallonnes.
A quelques coudées de la fin chez nous de la semaine des langues endogènes et dialectales de Wallonie, la question de la reconnaissance de celles-ci au titre de patrimoine culturel immatériel mériterait un développement bien plus long que la seule mention que j’en fais en conclusion de ce chapitre. Mais à titre de contrepied aux Cassandre dont je viens de me faire le portevoix, je terminerai cette partie en soulignant que l’apport d’une telle reconnaissance à l’industrie du tourisme fait également dès à présent l’objet d’études et d’analyses, tel ce mémoire universitaire récent à l’université de Toulouse sur le thème «La valorisation touristique du patrimoine culturel immatériel occitan» et dont la première partie est encore plus explicite, puisqu’elle s’intitule »langues régionales et attractivité touristique (...)»20. Quant à moi, je clôturerai cette partie par une interrogation en forme de provocation : son approche patrimoniale et ses nouvelles tendances donneraient-elle tout compte fait raison à l’Académicien français Jean MISTLER quand il déclarait que « Le tourisme est l’industrie qui consiste à transporter des gens qui seraient mieux chez eux, dans des endroits qui seraient mieux sans eux» »21 ? Je vous laisse maintenant le soin de répondre à cette question.
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BORDENAVE, Marine, Mémoire de 2ème année, Université de Toulouse, Institut supérieur du tourisme, de l’hôtellerie et de l’alimentation, Master en tourisme et hôtellerie, «La valorisation touristique du patrimoine culturel immatériel occitan. Le cas de la Région Midi-Pyrénées», année universitaire 2013 – 2014, sous la direction de S. Rayssac. 21 MISTLER, Jean, Faubourg Antoine, Éditions Grasset et Fasquelle, 1982
M 5. LA RÉUTILISATION DU PATRIMOINE MONUMENTAL PROTÉGÉ EST-ELLE POSSIBLE ET SOUHAITABLE ?
M La réutilisation du patrimoine monumental protégé est-elle possible et souhaitable ?
«Il ne saurait être question en plein XXe siècle de faire du moindre édifice ancien un musée figé dans l’expression du passé ; c’est vers le principe d’une réutilisation conforme à l’intérêt même des bâtiments qu’il faudrait tendre aujourd’hui »22 . L’occupation et l’utilisation à d’autres fins que celles pour lesquelles il était à l’origine voué du patrimoine architectural monumental est un débat qui ne manque pas, depuis déjà quelques dizaines d’années, de faire couler beaucoup d’encre ... aux teintes les plus variées. Comme à chaque fois qu’on emprunte le chemin de la nouveauté et de la créativité ainsi que les sentiers de traverse lorsque ceux-ci sont bordés d’habitudes, d’attachements sentimentaux ou idéologiques et de symboles, les bornes qui rythment la progression ont pour noms «controverses» et «polémiques».
En 1979, un rapport français sur l’utilisation des monuments historiques23 pointait quelques causes à la base d’un phénomène qu’il convenait de prendre en considération avec le plus grand sérieux ; elles étaient essentiellement au nombre de trois : baisse de la pratique religieuse ; mutations et transformation des équipements publics ; érosion des fortunes privées.
Les pistes d’utilisations et de réaffectations envisagées étaient quant à elles de divers ordres ; citons les musées (forme la plus traditionnelle de l’utilisation du patrimoine monumental), l’utilisation par des services publics et des administrations (mais les tendances à la modernisation et les nouvelles techniques de management du service public concouraient déjà à limiter les perspectives en ce domaine, la solution éventuelle pouvant recouper dès lors l’origine du problème), l’hôtellerie et enfin, d’autres utilisations de nature culturelle. Nous remarquerons ainsi qu’hormis le domaine particulier de l’hôtellerie, l’accueil d’activités de nature commerciale était à première vue très limité ou même passé sous silence.
Peintre, essayiste mais surtout ancien Commissaire des monuments historiques de France, Philippe LEVANTAL déclarait déjà en 1969 que « pour un monument, la pire des affectations est préférable à l’abandon ou à l’effacement ». Cette déclaration concédons-le, un peu à l’emporte-pièce, ne lui fit pas que des amis, notamment dans la toujours délicate «disputation» autour de la réaffectation du patrimoine religieux, et en particulier des églises, sujet de frictions particulièrement sensible et toujours très actuel (prenonsen pour seul exemple l’installation récente, ici à Namur, d’un magasin de vêtements au sein de l’église Saint-Jacques, à propos de laquelle la RTBF titrait en avril dernier que « les marchands du temple étaient entrés dans l’église»). Dans le même ordre d’idées, c’est un véritable tollé, accompagné d’un appel au boycott, qu’a soulevé l’installation d’un fast food à l’intérieur de l’église Saint-François-d’Assise de Vandoeuvres, près de Nancy.
22
LEVANTAL, Philippe, L’intégration économique et sociale des édifices anciens, Paris, La documentation française, 1969, 53 pages ; voir aussi à ce propos LAURENT, Xavier, Grandeur et misère du patrimoine, d’André Malraux à Jacques Duhamel ; 1959 - 1973, Librairie Drooz, Paris, 2003, p. 283. 23 L’Utilisation des monuments historiques, rapport remis à M. le Ministre de la culture et de la communication par la commission présidée par Dieudonné MANDELKEM, Paris, Caisse nationale des monuments historiques et des sites, 19792
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M À Milan par contre, les choses semblent avoir été moins problématiques au sujet de l’installation d’une boîte de nuit, homonyme du roman de di Lampedusa. Quelques jours avant la fin de l’Expo universelle milanaise, je ne résiste pas à l’envie de vous lire la notice d’un guide plein de malice et de ruse : « Cadre impressionnant pour ce disco-bar aménagé dans une église déconsacrée. L’autel de marbre a été transformé en comptoir et un étincelant lustre en cristal brille dans la nef. En fin de semaine, on commence par l’apéro et on termine sur la piste de danse. Très glamour ! ». Mais ces doutes et ces controverses ne se limitent pas à la réaffectation du patrimoine religieux, loin s’en faut.
L’Hôtel de la Marine à Paris est au centre, actuellement, et ce depuis déjà quelques années, de toutes les attentions et de toutes les convoitises. Il y a six mois, un article du Monde intitulé L’hôtel de la Marine aiguise les appétits refaisait l’historique et l’état du dossier. Dernière évolution en date, un mois auparavant, un communiqué de la Présidence de la République française annonçant que » le rez-de-chaussée du bâtiment (4 000 mètres carrés) sera conçu pour faire découvrir aux touristes étrangers et aux compatriotes la gastronomie française, classée au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Unesco »24 . L’ancien Président de la République, Valéry GISCARD d’ESTAING, qui avait été chargé début 2011, par le Président d’alors d’animer une commission destinée à « rendre un avis aux pouvoirs publics sur l’avenir de l’hôtel de la Marine, et sur la meilleure utilisation possible de ce bâtiment qui appartient au patrimoine national » rentra alors dans une colère de n’avoir pas été mis au courant ; dans une entrevue au journal Le Point du 25 mars, il déclara : « C’est une offense à la dignité de la France. Ce serait manifester de manière spectaculaire sa décadence. Imaginer dans ce bâtiment chargé d’Histoire un présentoir des produits agroalimentaires régionaux, c’est atterrant ! Les gens ne viennent tout de même pas à Paris, dans ce lieu, pour manger des saucisses ! ». Comme quoi, quand il s’agit de réaffectation, la rencontre d’un patrimoine national matériel immobilier avec un patrimoine immatériel reconnu par l’UNESCO peut parfois aussi faire de sacrées étincelles.
Deux cas par contre, parmi beaucoup d’autres bien sûr, semblent recueillir une très large adhésion. La chartreuse du Val de Bénédiction à Villeneuve-lès-Avignon ou, après une politique de rachat à environ trois cents propriétaires privés, l’Etat français entama la restauration (toujours en cours) et dès 1973 lui redonna une âme avec la création du CIRCA (son gestionnaire ensemblier) et y installa le Centre National des Ecritures du Spectacle. Un projet culturel ambitieux était né dont la vocation proclamée était de faire de ce lieu une Villa Médicis à la française.
C’est dans cette optique et grâce à la convention signée en 1999 avec le Gouvernement de la Communauté française, le Ministère de la Communauté française, Wallonie-Bruxelles International et Wallonie Bruxelles Théâtre / Danse, que la chartreuse des portes d’Avignon peut accueillir chaque année une dizaine d’auteurs, dramaturges et traducteurs belges francophones gratifiés d’une bourse. On le sait trop peu chez nous. Mais connait-on finalement dans le même registre les potentialités similaires, quoique plus modes et moins ensoleillées, du Château de Thozée à Mettet ? Second exemple, d’une autre nature celui-là puisqu’il s’agit du domaine de l’hôtellerie, l’InterContinental Berchtesgaden Resort construit non loin du site qui abritait le Berghof, résidence secondaire d’Adolf Hitler, ainsi que celles de hauts responsables nazis tel que Goering. 24
L’hôtel de la Marine aiguise les appétits, Le Monde, 23 avril 2015 par JP. GENE ; pour en savoir plus, aller sur http://www.lemonde.fr/m-gastronomie/ article/2015/04/23/l-hotel-de-la-marine-aiguise-lesappetits_4621069_4497540.html#iUo1BGoubkmKASI1.99
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M Ces traces de la honte ont disparu. Des bombardements américains, suivis ultérieurement du dynamitage par l’Allemagne, ayant détruit l’ensemble au lendemain et dans les années qui suivirent la guerre. A leur place, un nouvel «havre de paix». Ici, la reconversion n’a pas été synonyme de sauvegarde mais tout au contraire d’effacement. On pourrait même considérer qu’en matière de reconversion, c’est un paysage qui l’a été et non un édifice, introduisant dès lors une nouvelle dimension dans la réflexion, celleci renvoyant en partie à mes développements antérieurs, «faut-il tout conserver ?» et «patrimoine et tourisme».
Et si l’aspect mémoire y subsiste au travers d’un centre de documentation, d’aucuns voient ici la mise en défaut de l’affirmation de Philippe LEVANTAL, pour qui, je le rappelle, « Pour un monument, la pire des affectations est préférable à l’abandon ». En ce qui concerne le Berghof, le site a été volontairement abandonné (et le bâtiment réduit en poussières). De temps à autre, l’opinion publique préfère tenter d’oublier, essayer d’effacer les blessures et les douleurs et retrouver un peu de sérénité. Les gestionnaires du patrimoine doivent tenir compte aussi de ces aspirations compréhensibles.
Respect de l’architecture, respect de l’esprit des lieux, respect de l’intérêt général mais également respect des sensibilités et des émotions des communautés dans lesquelles le patrimoine en question est immergé (même si beaucoup de celles-ci s’expriment prioritairement de manière réactive et épidermique et ne sont malheureusement pas non plus préservées des manipulations et des utilisations au profit de desseins cachés ou de calculs moins nobles) tous ces principes, tous ces éléments devront de toute façon, à un moment ou un autre, être pris en compte et mis dans la balance quand le débat de la réaffectation est posé25. Le risque de seulement donner l’impression d’une posture inverse, comme on a pu le voir récemment dans l’un ou l’autre débat local enflammé, certes d’une autre nature, étant d’immoler définitivement le projet en cause sur l’autel des passions au lieu de l’examiner sur l’établi de la raison.
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Cfr sur ces points et à propos précisément de « l’Hôtel de la Marine », le mémoire présenté par Alix PANTZ pour l’obtention du diplôme de Master professionnel, section tourisme (2ème année), spécialité «Gestion des sites du patrimoine culturel et naturel et valorisation du patrimoine touristique», intitulé La réutilisation du patrimoine monumental protégé : la braderie des monuments historiques ?, sous la direction de Madame Gravari - Barbas, juin 2012, Université Paris 1, Panthéon Sorbonne.
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6. QUELLES SONT LES IMPLICATIONS DU CONCEPT DE «RESPONSABILITÉ PARTAGÉE » ?
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M Quelles sont les implications du concept de « responsabilité partagée » ?
J’ai déjà fait mention plus haut de plusieurs conventions internationales, adoptées dans le cadre de l’UNESCO notamment, à propos de la notion de «patrimoine» et de sa protection. Néanmoins, il est apparu rapidement que beaucoup de ces textes ne traduisaient pas suffisamment encore l’importance de la notion de patrimoine culturel et ce compte tenu du contexte de mondialisation et des impératifs toujours croissants des enjeux et des prises de conscience du développement durable que j’ai déjà également mentionnés.
La Convention-cadre du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour la société, signée à Faro au Portugal, dont nous fêterons les dix ans dans quatre jours et qui est entrée en vigueur le 1er juin 2011 après que dix états membres l’aient ratifiée avait pour but de combler ces lacunes. Suite au double décret d’assentiment du Parlement de Wallonie du 2 juillet dernier, tous deux parus au Moniteur belge le 14 juillet, cette convention est enfin entrée en vigueur chez nous depuis le 24 juillet.
Pour résumer, on peut dire que le principe fondateur de cette convention est que chaque personne dispose d’un droit personnel au patrimoine culturel et que ce droit est intimement lié à celui de participer à la vie culturelle. Elle développe ainsi la notion de «patrimoine commun de l’Europe» qui implique dans sa foulée une véritable responsabilité commune envers ce patrimoine. Les notions «d’engagement démocratique en faveur du respect de la diversité culturelle» (en ce compris le respect des interprétations différentes ou même contradictoires qui peuvent être données par des communautés différentes d’un même patrimoine), celle de «l’exercice des libertés individuelles» ou encore de «respect des droits de l’Homme» en sont les lignes de force. Le patrimoine est en outre considéré comme une ressource et un outil de dialogue. Lors d’une communication faite à Venise en mars 2013, Daniel THEROND, Secrétaire du Comité de rédaction de la Convention de Faro et ancien Chef du service de la culture, du patrimoine et de la diversité au Conseil de l’Europe dit ceci à propos de cette convention : « Offrant une vision actualisée du patrimoine la Convention (...) complète les grands textes antérieurs du Conseil de l’Europe et de l’UNESCO sur les biens culturels. Ce texte resitue le patrimoine comme une réponse aux attentes et aux besoins de bien-être du citoyen dans des démocraties avancées. Il met en évidence le parti que l’on peut tirer du patrimoine pour améliorer la qualité du milieu de vie des habitants tout en favorisant un renforcement du lien social ».
Dans la foulée, la Convention de Faro dépasse les cloisonnements traditionnels du matériel et de l’immatériel, des immeubles et des objets. Elle articule plutôt son propos sur des «valeurs, croyances, savoirs et traditions en continuelle évolution». Elle abandonne la terminologie de «patrimoine immatériel» et, insiste à nouveau Daniel THERON, elle « englobe aussi dans le patrimoine commun de l’Europe les idéaux, principes et valeurs ayant débouché sur les droits de l’Homme, la démocratie et l’état de droit » et bien que « cette référence politique inédite », ajoute-t-il, « par rapport à la définition traditionnelle des biens culturels (ait) fait l’objet de controverses lors de l’élaboration du texte ... (sa) ... pertinence (...) se comprend cependant mieux quand on pense à une actualité mondiale comportant de la violence et des résurgences d’obscurantisme ». C’est dans ce contexte qu’apparait comme une évidence d’abord puis comme une nécessité et maintenant comme une obligation, la notion de «responsabilité partagée», et ce pour tous les échelons et tous les niveaux institutionnels et politiques de la gestion du
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M patrimoine. Cette nouvelle voie de la «responsabilité partagée» implique quant à elle à son tour une approche intégrée, des cadres juridiques et financiers redéfinis, des pratiques innovantes et créatives,... Elle doit aussi permettre, à chaque fois que c’est possible, d’estomper les limites qui brident encore trop souvent et traditionnellement la prise de conscience de l’intervention qui peut être la nôtre vis-à-vis d’un élément de nature patrimoniale, à savoir l’existence ou non d’un lien juridique (droit réel ou de nature contractuelle). Les valeurs et principes de la Convention de Faro, en intégrant le patrimoine dans la communauté, en lui reconnaissant des vertus démocratiques, un rôle économique, des influences bénéfiques sur la cohésion sociale de cette communauté obligent, en particulier les pouvoirs publics, à transcender les concepts de droit de propriété et d’utilitarisme direct. Ce n’est pas parce qu’on n’est pas maître ou propriétaire d’un patrimoine (et ceci est encore plus tangible pour le patrimoine immobilier) qu’on n’a pas d’obligation et de responsabilité à son égard. Et si ceci est vrai pour un patrimoine «tiers», cela l’est d’autant plus pour un patrimoine qu’on fréquente, qu’on occupe, qu’on utilise. C’est dans ce nouveau contexte que la Province doit à présent, elle aussi, envisager avec des partenaires (au rang desquels on peut ranger la Société archéologique, la Fondation Roi Baudouin, le Collège Belgique et l’Académie royale, les Universités, les sociétés savantes, les cercles locaux d’histoire, la Commission des monuments et sites, l’Institut du Patrimoine wallon, l’administration régionale, les communes, etc ... ) avec des partenaires donc et dans la mesure de ses moyens et de ses ressources, une implication croissante dans le monde du patrimoine. Les nouvelles approches «bottom up» et l’émergence du concept de «communauté patrimoniale» encore une fois, lui en donnent à mon sens l’occasion si elle le souhaite vraiment, en accord bien évidemment avec les autorités de la Wallonie.
Certains textes la lui donnaient déjà cette occasion, au travers de l’intervention de minimum 1 % dans les travaux aux bâtiments classés publics ou privés. On sait que j’ai regretté à l’époque (en matérialisant ce regret par un recours, non abouti, auprès du Gouvernement wallon), que j’ai regretté les tiédeurs et tergiversations provinciales pour la mise en œuvre de cette obligation, dont la lettre permettait à mon sens une implication volontariste et responsable dans un domaine qui aurait donné, qui plus est, à l’institution provinciale une véritable hauteur en l’inscrivant dans la marche inexorable du progrès de l’ordre juridique international en la matière.
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Les choses sont à présent rentrées dans l’ordre. Les mesures de mise en œuvre ont été prises. La contribution provinciale a été fixée à 4% pour l’avenir et un accord a été engrangé pour régler le sort de tous les dossiers mis entre parenthèses durant ce qu’on a baptisé le «moratoire».
Est-ce à dire que la province de Namur peut se reposer dorénavant sur les lauriers de la nouvelle virginité retrouvée dans ce dossier pour éluder ses autres responsabilités et obligations, tant juridiques que morales ou simplement citoyennes, en matière de patrimoine ? Car si les chantiers (au sens imagé, quoique) qui s’ouvrent les uns après les autres semblent appeler une réponse négative, l’amplitude de l’ouverture de ces fenêtres d’opportunité demeure variable. Les enthousiasmes se cumulent à propos du projet Trema et ils ont pu s’exprimer une fois encore récemment, parfois en sens divers, lors d’un colloque de haute tenue que j’ai eu le grand honneur de conclure. J’espère que le feu du début restera actif, que l’histoire ne repassera pas les plats des circonspections qui ont entouré l’accueil du Trésor Hugo d’Oignies et que les avatars administratifs et
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M relationnels n’enverront ici aucune onde durablement négative. Les quelques rencontres de travail du début, que j’avais initiées ou auxquelles j’avais été associé, étaient dopées de perspectives encourageantes ; près de deux ans plus tard, je suis toujours disposé, si vous le souhaitez, à continuer à accompagner activement l’évolution de ce projet.
Rénovation de la Maison de la culture, écrin de nouvelles ambitions ; restauration de la Cathédrale Saint-Aubain, dans une perspective intégrée à l’ensemble de la place ; valorisation, avec le commandement militaire de la province, du patrimoine mémoriel de la Grande guerre, dans un souci pédagogique, notamment vers les plus jeunes ; inscription et investissement de la province et de ses outils dans les réseaux internationaux à vocation ou à connotation patrimoniales (tels que les Chemins de Saint-Jacques, les Plus beaux villages de Wallonie ... et d’ailleurs, ou Eccofort, le Centre de coopération européenne du patrimoine fortifié); la confiance dans le crowdfunding pour aider à garder ici un nouvel ambassadeur étincelant de l’ordre des chéloniens, voici quelques autres exemples de ces chantiers que je disais nombreux qui prouvent le rôle de la province dans l’arène bouillonnante des gladiateurs du patrimoine26 .
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Autre chantier, abouti celui-là et à ma plus grande satisfaction, la préservation du Fonds d’archives Thomas Owen sur lequel j’avais attiré l’attention lors de mon discours au personnel en janvier 2011 et qui est venu récemment enrichir les collections des Archives et musée de la littérature
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7. LA PROTECTION DU PATRIMOINE EN PÉRIODE DE TROUBLES : CONFLITS ARMÉS, CATASTROPHES NATURELLES, ACCIDENTS INDUSTRIELS
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M La protection du patrimoine en période de troubles : conflits armés, catastrophes naturelles, accidents industriels
À l’instar de la protection des vies humaines et de celle des biens de production, la protection du patrimoine en période de troubles, qu’il s’agisse de conflits armés mais également de catastrophes naturelles ou d’accidents industriels, a rapidement retenu l’attention. En effet, en cas de guerre d’abord, le patrimoine est tout particulièrement exposé aux menaces et exactions qui sont inhérentes à tout type de conflits, les conflits internationaux ou les guerres civiles.
On peut ainsi distinguer trois catégories de menaces : les atteintes et déprédations involontaires, que l’on qualifie aussi de «collatérales» (par exemple les dégâts causés par des bombardements en périphérie de la cible) ; le pillage que facilitent le chaos et la désorganisation propres à presque tous les conflits armés ; et last but not least malheureusement, et au cœur actuellement de l’actualité, la destruction volontaire et programmée du patrimoine monumental ou artistique dans un but politique, d’intimidation, d’épuration culturelle ou religieuse ou encore d’effet médiatique27. Ainsi l’article 27 de la Convention de La Haye de 1907 réglant les lois et coutumes de la guerre sur terre dispose que : « Dans les sièges et bombardements, toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour épargner, autant que possible, les édifices consacrés aux cultes, aux arts, aux sciences et à la bienfaisance, les monuments historiques, les hôpitaux et les lieux de rassemblement de malades et de blessés, à condition qu’ils ne soient pas employés en même temps à un but militaire. Le devoir des assiégés est de désigner ces édifices ou lieux de rassemblement par des signes visibles spéciaux qui seront notifiés d’avance à l’assiégeant. »28 Cette Convention est la première à faire mention de cette préoccupation de protection du patrimoine en période de conflits armés. Même si sa mise en application s’avéra délicate, voire même limitée, cette convention de La Haye 1907 servit néanmoins de base à la condamnation par le tribunal de Nuremberg des spoliations de biens qui se sont déroulées durant la seconde guerre mondiale.
Ultérieurement, ce furent précisément les nombreuses destructions massives de villes et de monuments durant la deuxième guerre mondiale qui firent que, sous l’impulsion de l’UNESCO, une fois encore, on mit en chantier une série de réflexions et de travaux qui aboutirent au terme d’une conférence intergouvernementale en 1954, à La Haye à nouveau, à l’adoption de la Convention internationale sur les biens culturels en cas de conflit armé. Celle-ci sera le premier texte international à vocation universelle sur cette préoccupation. Un protocole additionnel fut également adopté relatif au vol et à la spoliation de biens culturels en période de guerre. Ultérieurement d’autres textes et protocoles furent également adoptés, notamment pour mettre sur pied le Comité pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé ainsi que la gestion d’un système de protection renforcée qui accroît les mesures légales prises par un pays pour protéger un site. Procédant a priori d’une raison sociale non directement tournée ou, plus exactement, non uniquement tournée, vers la protection du patrimoine en période de guerre, ICOMOS, le Conseil international des monuments et des sites (International Council on conservation et la restauration des monuments et des sites. 27
Voy notamment à ce sujet le site Orgueil et patrimoine, de Joëlle DEPAGNE, http://www.orgueilet patrimoine.fr/lumiere-sur-la-protection-du-patrimoineen-cas-de-conflit-armé 28 Convention (IV) concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre et son Annexe: Règlement concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre, La Haye, 18 octobre 1907, Section II.- Des hostilités. - Chapitre I.- Des moyens de nuire à l’ennemi, des sièges et des bombardements. - Règlement : Art. 27.
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M Monuments and Sites) fut créé en Pologne en 1964 dans la foulée de l’adoption de la Charte internationale de Venise sur la
Cependant, en mettant à profit son caractère généraliste, ICOMOS n’a pas manqué d’intervenir à de multiples reprises ces dernières années pour dénoncer la destruction intentionnelle ou collatérale du patrimoine culturel : les sanctuaires soufis en Tunisie, des bibliothèques et des sanctuaires soufis en Libye, les mausolées de Tombouctou au Mali, l’antique site de Hatra en Iraq ou le krak des chevaliers en Syrie, pour ne citer que ces quelques tristes exemples. Fin 2014, rien qu’en Syrie, il y avait plus de 300 sites historiques qui avaient été partiellement ou totalement détruits. Et on sait que ce mouvement inexorable de l’anéantissement programmé du patrimoine n’a fait que s’amplifier depuis le début de cette année 2015 avec les destructions d’Alep ou de Palmyre, notamment.
« On efface de notre mémoire collective des pans entiers de notre histoire » déclare un expert de l’ONU sur un ton grave et d’autres voix continuent de se lever, ici comme aux quatre coins du monde, telle la Directrice générale de l’UNESCO, Irina BUKOVA, qui lance des appels remplis de désespoir et d’indignation.
Les destructions volontaires et programmées d’un patrimoine inestimable qui se déroulent à quelques encablures seulement, au Moyen-Orient, sont donc à elles seules les preuves irréfutables de son importance pour l’âme des peuples qui les abritent et dont les ancêtres en sont les artisans puisque les plus inhumains des combattants ont bien compris qu’en le détruisant, c’est le moi intime de leurs adversaires qu’ils sont en capacité d’annihiler. Le 30 avril dernier, le Parlement européen adoptait quant à lui une résolution sur la destruction de sites culturels par le groupe État islamique29 qui « condamne sévèrement les destructions de sites culturels, archéologiques et religieux en Syrie et en Iraq auxquelles se livrent les parties au conflit, en particulier le groupe qui se fait appeler «État islamique» et les forces gouvernementales » mais également qui « dénonce la destruction du patrimoine culturel dont sont responsables le régime de Bachar el-Assad, dans le cadre de ses actes de guerre, et, dans une moindre mesure, les autres parties au conflit ». Le Parlement européen en outre « réaffirme la responsabilité du régime de Bachar el-Assad dans cette destruction et souligne que cette dernière fera partie des accusations dont il devra répondre un jour devant un tribunal international ; il met également en exergue les destructions perpétrées en Iraq par des groupes autres que l’EI, notamment les milices chiites et les forces iraquiennes dans le cadre de la lutte contre l’EI ». Le Parlement européen suggère de plus d’ajouter la destruction volontaire ou à grande échelle d’éléments du patrimoine culturel de l’humanité sur la liste des crimes contre l’humanité.
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Force est malheureusement de constater que toutes ces suppliques et tous ces appels résonnent un peu jusqu’à présent dans le désert, celui-là même vers lequel ils sont tournés, d’aucuns en venant en outre à se demander s’ils n’apportent pas finalement de l’eau au moulin médiatique des obscurantistes et des intolérants.
Pour ma part, je demeure convaincu qu’on finit par douter de l’existence des choses que l’on tait. Et qu’ici, maintenant, et à notre niveau, la dénonciation indignée fait partie d’une résistance morale et d’une prise de conscience, celle de ce qu’en matière de patrimoine, et sur le très long terme, une somme de petits désintérêts et d’omissions coupables peut saper tout autant que des tirs d’artillerie. Ce qui est vrai en temps de guerre ne l’est-il pas aussi en temps de paix, et de manière plus inacceptable encore ?
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Résolution du 30 avril 2015 sur La destruction de sites culturels par le groupe État islamique, procédure 2015/2649 (RSP)
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M Mesdames et Messieurs,
L’actualité brûlante, comme la nécessité de justifier le titre de cette mercuriale, expliquent ce long développement autour de la protection du patrimoine en cas de guerres et de conflits armés.
Il ne faudrait pas néanmoins que cette question occulte un aspect plus immédiat et plus actuel, qui lui nous concerne au quotidien dans nos contrées pacifiées, à savoir celui de la protection du patrimoine en cas de crise ou de catastrophe.
Car au-delà des conflits, c’est sur cette matière aussi que le Comité international du Bouclier bleu (sorte de pendant de La CroixRouge mais pour venir au secours des monuments, des sites, des œuvres d’arts, des livres ou des archives) fondé en 1996 par quatre institutions non-gouvernementales internationales, dont ICOMOS que je viens de mentionner, travaille au quotidien afin de stimuler la réflexion et l’action. Il y a tout juste cinq ans, jour pour jour à 24 heures près, je prenais la parole ici à Namur à l’occasion d’un colloque intitulé «gestion des risques et patrimoine» pour tenter de mettre cette question en perspective avec les prérogatives d’un gouverneur de province en matière de management des situations d’urgence. Je ne pouvais alors qu’avouer que la préoccupation de la sauvegarde du patrimoine dans de telles circonstances n’était que fort peu présente dans l’élaboration des plans d’urgence et d’intervention, à quel que niveau que ce soit ... Oh... pas faute d’intérêt mais plutôt par manque de temps, de moyens ou d’expériences. Cinq ans plus tard et malgré quelques idées ou suggestions lancées dans la foulée de ce colloque, nous ne sommes, je dois bien le dire, pas beaucoup plus avancés.
Sans aucun doute, le présent exercice me donne-t-il une opportunité de replacer ce point un peu plus proche du centre des dispositifs et procédures que je mets en place ou que j’approuve dans ce cadre. Je ne manquerai pas de reprendre d’autres initiatives dans les mois qui viennent. Je suggérerai en outre, lors de la prochaine Conférence des gouverneurs de notre pays, d’approcher le Comité belge du bouclier bleu afin que soit étudiée la possibilité pour un représentant des gouverneurs d’être présent à l’avenir au sein de ses organes.
C’est sur l’annonce de cette démarche proactive que je refermerai cet avant- dernier point de mon exposé, à savoir celui de la protection du patrimoine en cas de situations troubles ou inhabituelles que sont les crises de toutes natures ainsi que les dégradations volontaires, non sans regretter de ne pouvoir, faute de temps mais aussi de vraies pertinences pour notre province, consacrer ne fût-ce que quelques lignes, à la protection du patrimoine subaquatique30, elle aussi véritable défi de l’heure si on en croit les spécialistes. Je me bornerai donc à la mentionner pour mémoire.
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Voy. sur cette question le site de l’UNESCO, à l’adresse suivante:http://www.unesco.org/new/fr/culture/themes/underwater-cultural-heritage/world-war-i/aheritage-under-threat/
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8. LE PALAIS PROVINCIAL
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M Le Palais provincial
Mesdames et Messieurs,
L’entonnoir des considérations successives que je viens d’émettre m’amène tout naturellement vers le dernier point de ma mercuriale, avant la conclusion : ce Palais provincial qui nous accueille et qui abrite, sauf quand il se sent patraque, vos travaux depuis que la Province existe. Et ceux qui diront que le détour fut long alors qu’on entrevoyait tous le but de la balade dès les premiers pas n’auront pas tout à fait tort. Vous connaissez en effet mon attachement à ce bâtiment, à son passé, à son présent mais surtout à son avenir. Mon collègue Michel FORET, Gouverneur honoraire de la Province de Liège, proclamait d’ailleurs le sien à l’égard du Palais des Princes Evêques, en des mots semblables aux miens, lors de son allocution de départ il y a trois semaines31 . En ce qui me concerne, les Vœux aux forces vives, la remise des trophées des Namurois de l’année, la rentrée du Collège Belgique ou les Fêtes de Wallonie sont autant de moments de parole que j’ai souvent mis à profit pour communiquer ma fierté d’en être, en quelque sorte, le concierge en chef mais aussi pour dire mes préoccupations quant à son état et quant à son devenir.
Parfois aussi, il faut bien l’avouer, ce furent des occasions de faire part de mon incompréhension (qui flirte alors toujours avec un petit agacement) du désintérêt dont il a trop souvent fait l’objet chez certains de ceux qui en ont eu la propriété, la responsabilité politique ou qui prenaient plaisir tout simplement à le fréquenter sans se dire que ce simple fait pouvait peut-être justifier dans leur chef de se préoccuper un minimum activement de sa préservation.
Entre les nombreux appétits qu’il a pu aiguiser et les jalousies qu’il suscite encore ; entre les poutres qui s’effondrent, la veille d’une réception, et les étançons qui ont accueilli les ambassadeurs dans les salons durant plus de deux ans ; entre un garde-corps qui menace de tomber par morceaux sur le trottoir et les états d’âme de la Commission des monuments et sites à propos de sa couleur exacte en 1733 ; entre sa façade décrépie, qui entraîne les quolibets des touristes et des passants les samedis de marché, et ses nouvelles vocations cinématographiques qui le livrent parfois à de drôles de personnages ; entre ses voisins immédiats (sur lesquels il comptait un peu pour conserver la sérénité due à son rang et à son passé et que tout le monde a laissé filer aux mains de promoteurs moins sensibles à ses charmes) et les intrusions répétées qui le blessent et le déstabilisent ; entre enfin ceux qui poussaient à l’abandonner à son sort, (ce qui revenait à dire, à votre serviteur) et ceux qui ne parvenaient pas à s’y résigner, conscients de la force de son symbole, nous avons dû, mes prédécesseurs et moi, jouer «serré». Le temps est venu maintenant, de ne pas oublier ces vicissitudes mais avant tout de regarder vers l’avenir. Le transfert de sa propriété au 1er janvier de cette année, de la Régie fédérale des bâtiments de l’Etat vers la Région, est une opportunité à saisir.
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FORET, Michel, Allocution de départ à l’occasion de l’installation du nouveau Gouverneur de la Province de Liège, Palais des Princes Evêques, le 30 septembre 2015, pt. 3, page 5.
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M J’espère quant à moi que cette nouvelle situation ne va pas remettre en cause, pour de simples raisons d’habitudes sclérosantes et de pratiques administratives, parfois lourdes, ce qui a bien fonctionné pour sa gestion quotidienne jusqu’ici et notamment ce que j’appellerai «une réelle autonomie de gestion encadrée». Car ce dont ce bâtiment a maintenant besoin, ce sont avant tout des perspectives à longue échéance, une vraie reconnaissance de sa valeur patrimoniale (il ne figure pas sur la liste du patrimoine remarquable de Wallonie) et une programmation pluriannuelle tenant compte de sa fonction administrative, de son rôle de lieu d’expression de la démocratie, de sa qualité de véritable outil de travail au service de l’image de la province et de ses dynamismes mais aussi, ici au cœur de la capitale wallonne, de l’image de la Wallonie et enfin, tenant compte de son potentiel en matière d’attractivité touristique (et donc éventuellement économique) comme en fait de trait d’union entre le passé, le présent et le futur pour la collectivité.
C’est en tirant les premiers enseignements de ces expériences que j’ai pris langue récemment avec l’Administrateur général de l’Institut du patrimoine wallon et ce, en accord avec le ministre wallon du patrimoine et celui de la gestion immobilière (les enjeux étant croisés entre ces deux compétences), pour obtenir l’appui de l’Institut et envisager avec lui les initiatives qui pourraient être prises et les interventions qui devraient être envisagées, dès que le Palais provincial sera considéré comme patrimoine à valoriser. Il devra rester un lieu ouvert, ancré dans la société et sa vie associative, culturelle et sociale, ce qu’il est déjà (j’en veux pour preuve son ouverture lors des Fêtes de Wallonie, lors des Journées du patrimoine, lors de nombreuses visites de groupes, pour le Collège Belgique, pour des expositions -ainsi dans le cadre du Festival Nature-Namur -, pour l’Urban trail, ....) même si je sais que d’aucuns voudraient légitimement qu’il soit encore plus ouvert … ce à quoi je ne suis pas opposé, si du moins on tient compte de deux éléments : 1. Nous ne nous trouvons ni dans un musée, ni dans un lieu de séminaires mais dans un endroit de travail avec des contingences en matière de sécurité d’accès, de disponibilités des salles de réunions et d’infrastructures de gestion de crise ; 2. Augmenter les capacités et les fréquences d’accès des visiteurs et aux activités d’origine extérieure nécessitera, si on veut le faire au bénéfice de ses occupants comme du grand public, une gestion dynamique du bâtiment ainsi que du personnel en nombre suffisant, dédicacé à ces tâches pour assurer la qualité de l’accueil. J’étudie également la possibilité et la valeur ajoutée que pourrait représenter l’inscription sur la liste du patrimoine majeur de Wallonie, de tout ou partie de cet édifice.
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Enfin, la création d’un comité stratégique d’accompagnement, Les amis du Palais provincial de Namur, que j’ai déjà plusieurs fois appelée de mes vœux, se met sereinement et résolument en place.
Ce comité devrait, dans les mois qui viennent, rassembler, a priori sans autre raison d’être que celle de la passion et de la tendresse pour un endroit d’exception dont l’histoire est intrinsèquement mêlée à l’histoire individuelle de milliers de Namurois et sans aucune autre lettre de mission que celle de le faire savoir et de le communiquer, des personnes ressources des milieux des arts, des lettres, académiques, de l’administration, de l’entreprise, de la magistrature et du secteur associatif qui seraient disposées à m’appuyer de leurs conseils et de leurs avis, à faire un bout de chemin avec nous, et de temps à autre, si nécessaire, à remonter le moral de l’intendant inquiet que je suis.
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9. CONCLUSION
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M Conclusion
Mesdames et Messieurs,
Nous arrivons à destination de cette double promenade.
La mienne tout d’abord, au beau milieu des centaines de pages de la documentation touffue et abondante que j’ai pu consulter ; des mémoires universitaires et études savantes qui fleurissent sur les campus du monde entier de manière régulière sur ce sujet ; au beau milieu des nombreux articles que les presses nationale et étrangère y consacrent tous les jours ; des textes de l’ordre juridique interne et ceux des multiples conventions internationales dont la mise bout à bout des noms des villes, lieux de leur signature, sonne comme les étapes d’un fabuleux tour du monde. Ce qui est sans doute plus remarquable encore dans ma balade, c’est qu’au détour de chaque chemin, j’y ai croisé paradoxes et ambivalences, contradictions et hésitations, revirements de pensée, prises incessantes de contrepieds au sein de la communauté scientifique, théories nouvelles, nouveaux champs d’investigation, nouveaux développements juridiques, concepts plus originaux que ceux connus la veille, exemples et contre-exemples d’une même affirmation, d’une même assertion.
C’est vrai que j’exagère peut-être un tantinet. Mais derrière mon exaltation romantique se cachent les réalités du formidable foisonnement de la réflexion actuelle à propos du patrimoine, de l’essence de la notion, de son contenu, de son rôle, de sa représentation, de ses potentialités et de ses interactions avec l’économie, le tourisme (nous l’avons vu), la sociologie, la philosophie mais également l’ethnographie, la recherche identitaire, l’émancipation des peuples, les droits fondamentaux de l’homme, la liberté de s’exprimer, de s’indigner et celle de s’extasier. Nul étonnement dès lors qu’une notion aussi complexe soit aussi l’objet de controverses, la proie d’intérêts divergents, un instrument aux mains des desseins ou des ambitions des lobbys commerciaux, des peuples, des collectivités territoriales, des états. Heureusement, c’est ici qu’intervient la deuxième promenade, la vôtre, ou plus exactement celle dans laquelle je vous ai emmenés. Celle aux quatre coins de la planète, vers les peintures rupestres et les temples soufis, vers les mosaïques de Samarkand et les paysages des Alpes autrichiennes, vers la saveur de la tarte tatin et d’infortunés taureaux immolés sur le sable, vers les rituels sacrés de l’Acropole et les rizières aux environs d’Hanoi, vers des hommes qui collent des élytres de scarabées et des femmes qui tissent leur désespoir sur les bords du Golfe persique. Le patrimoine dans ses multiples acceptions, grâce à ces voyages qu’il permet, dans le temps et dans l’espace, par l’entremise des multiples questions qu’il pose, c’est aussi et avant toute chose, des manières de s’interroger sur notre monde et son histoire, des leçons à interpréter, des réponses à approcher pour savoir qui nous sommes, d’où nous venons, ce que nous faisons ici et, peut-être, pourquoi nos prédécesseurs ont fait ce qu’ils ont fait.
Mesdames et Messieurs,
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En cette année où nous avons accueilli la Conférence du Conseil de l’Europe des Ministres en charge du patrimoine qui a donné lieu, en avril dernier, à la « Déclaration de Namur - l’Appel de Namur/the Namur call » (texte qui a inscrit aujourd’hui Namur dans
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M la longue liste des villes étapes de l’odyssée patrimoniale autour de la Terre), le choix du sujet recelait plus de pertinence encore.
Protéger, conserver, réhabiliter, valoriser, comprendre, expliquer et transmettre, tous ces verbes (et nous pourrions en ajouter d’autres, tels rénover, restaurer, interpréter, traduire, …) n’ont rien de synonymes ; et s’ils désignent des préoccupations indiscutablement complémentaires, ils sont tout autant, plus souvent qu’à leur tour, et ce de façon circonstancielle, exclusifs l’un de l’autre. Malgré cela, ils sont selon moi l’expression d’un seul et même devoir, d’un seul et même élan de résistance à une époque où on tente de nous prouver, à quelques milliers de kilomètres de chez nous, que la dignité et la mémoire des peuples pourraient s’évanouir et disparaître quand on détruit les pierres et qu’on fait taire les chants. C’est l’une des raisons supplémentaires pour lesquelles j’ai d’ores et déjà suggéré que le sujet du patrimoine puisse être inscrit à l’agenda des travaux futurs de l’Association européenne des représentants territoriaux d’Etat (l’AERTE, association regroupant notamment des préfets français, italiens, suisses ou roumains, des gouverneurs suédois, hongrois, norvégiens, turcs ou belges, des commissaires du Roi néerlandais, des walis marocains, des regierungspräsidenten allemands, etc …) dont le comité d’orientation se réunira la semaine prochaine, à Montreux.
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Mesdames et Messieurs,
Dans son conte philosophique et allégorique, « Le monde comme il va », Voltaire nous raconte que le puissant génie de la HauteAsie, l’ange Ituriel, a confié au Scythe Babouc la mission de lui confirmer que la ville de Persépolis méritait pour ses turpitudes le châtiment de la destruction. Pour s’acquitter de sa mission, Babouc se promène dans les rues de la ville en vue de peaufiner son rapport.
« ...(...)... le soleil approchait du haut de sa carrière. Babouc devait aller dîner à l’autre bout de la ville, (...). Il fit d’abord plusieurs tours dans Persépolis ; il vit d’autres temples mieux bâtis et mieux ornés, remplis d’un peuple poli, et retentissant d’une musique harmonieuse ; il remarqua des fontaines publiques, lesquelles, quoique mal placées, frappaient les yeux par leur beauté ; des places où semblaient respirer en bronze les meilleurs rois qui avaient gouverné la Perse ; (...) Il admira les ponts magnifiques élevés sur le fleuve, les quais superbes et commodes, les palais bâtis à droite et à gauche, une maison immense où des milliers de vieux soldats blessés et vainqueurs rendaient chaque jour grâces au Dieu des armées. Il entra enfin chez la dame, qui l’attendait à dîner avec une compagnie d’honnêtes gens. La maison était propre et ornée, le repas délicieux, la dame jeune, belle, spirituelle, engageante, la compagnie digne d’elle ; et Babouc disait en lui-même à tout moment : l’ange Ituriel se moque du monde de vouloir détruire une ville si charmante » .32 L’exercice auquel je viens de me livrer a, je le conçois, quelque chose de convenu et je concède que sa longueur pouvait inquiéter autant qu’elle est parvenue parfois, du moins je le suppose, à indisposer.
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VOLTAIRE, Romans et contes, Le monde comme il va ou Le monde comme il va, vision de Babouc écrite par lui-même, Édition de Frédéric Deloffre avec la collaboration de Jacqueline Hellegouarc’h et Jacques Van den Heuvel, Gallimard, Bibliothèque de La Pléiade, n° 3, 1979, 1392 pages
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M Toutefois, si au sujet des choses qui nous entourent, matérielles ou non, il nous a aidés, ne serait-ce qu’à la marge, à préférer le regard bienveillant et sans a priori d’un Babouc esthète et curieux de tout aux sombres et obscurs projets de l’ange Ituriel qui sommeille en chacun de nous, je me dis décidément qu’il ne pouvait nous faire à tous, cet exercice, que le plus grand bien.
Et puisque ce matin le paradoxal tutoyait chaque paragraphe, que le triomphe de l’intelligence du jugement de Babouc sur l’aveuglement du fanatisme ne nous empêche pas néanmoins de cultiver la prudence et de nous rappeler que trop d’engouement pour un trésor patrimonial peut également le détruire aussi sûrement que quelques tirs de mortier. Je vous remercie pour votre attention.
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10. ANNEXES
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M Annexes
Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, avec Règlement d’exécution 1954 La Haye, le 14 mai 1954 - Protocole, La Haye, le 14 mai 1954 - Deuxième Protocole, La Haye, le 26 mars 1999
Dépositaire - Ouverture à la signature - Entrée en vigueur - Textes faisant foi - Enregistrement auprès de l’ONU - Etats parties Déclarations et réserves - Application territoriale -
UNESDOC - Anglais - Français - Espagnol - Russe Les Hautes Parties contractantes,
Constatant que les biens culturels ont subi de graves dommages au cours des derniers conflits et qu’ils sont, par suite du développement de la technique de la guerre, de plus en plus menacés de destruction; Convaincues que les atteintes portées aux biens culturels, à quelque peuple qu’ils appartiennent, constituent des atteintes au patrimoine culturel de l’humanité entière, étant donné que chaque peuple apporte sa contribution à la culture mondiale;
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Considérant que la conservation du patrimoine culturel présente une grande importance pour tous les peuples du monde et qu’il importe d’assurer à ce patrimoine une protection internationale;
Guidées par les principes concernant la protection des biens culturels en cas de conflit armé établis dans les Conventions de La Haye de 1899 et de 1907 et dans le Pacte de Washington du 15 avril 1935; Considérant que, pour être efficace, la protection de ces biens doit être organisée dès le temps de paix par des mesures tant nationales qu’internationales; Résolues à prendre toutes les dispositions possibles pour protéger les biens culturels; Sont convenues des dispositions qui suivent:
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M Chapitre premier. Dispositions générales concernant la protection
Article premier. Définition des biens culturels
Aux fins de la présente Convention, sont considérés comme biens culturels, quels que soient leur origine ou leur propriétaire:
a. Les biens, meubles ou immeubles, qui présentent une grande importance pour le patrimoine culturel des peuples, tels que les monuments d’architecture, d’art ou d’histoire, religieux ou laïques, les sites archéologiques, les ensembles de constructions qui, en tant que tels, présentent un intérêt historique ou artistique, les œuvres d’art, les manuscrits, livres et autres objets d’intérêt artistique, historique ou archéologique, ainsi que les collections scientifiques et les collections importantes de livres, d’archives ou de reproductions des biens définis ci-dessus;
b. Les édifices dont la destination principale et effective est de conserver ou d’exposer les biens culturels meubles définis à l’alinéa a, tels que les musées, les grandes bibliothèques, les dépôts d’archives, ainsi que les refuges destinés à abriter, en cas de conflit armé, les biens culturels meubles définis à l’alinéa a.; c. Les centres comprenant un nombre considérable de biens culturels qui sont définis aux alinéas a. et b., dits « centres monumentaux ».
Article 2. Protection des biens culturels
Aux fins de la présente Convention, la protection des biens culturels comporte la sauvegarde et le respect de ces biens.
Article 3. Sauvegarde des biens culturels
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Les Hautes Parties contractantes s’engagent à préparer, dès le temps de paix, la sauvegarde des biens culturels situés sur leur propre territoire contre les effets prévisibles d’un conflit armé, en prenant les mesures qu’elles estiment appropriées.
Article 4. Respect des biens culturels
1. Les Hautes Parties contractantes s’engagent à respecter les biens culturels situés tant sur leur propre territoire que sur celui des autres Hautes Parties contractantes en s’interdisant l’utilisation de ces biens, celle de leurs dispositifs de protection et celle de leurs abords immédiats à des fins qui pourraient exposer ces biens à une destruction ou à une détérioration en cas de conflit armé, et en s’abstenant de tout acte d’hostilité à leur égard. 2. Il ne peut être dérogé aux obligations définies au paragraphe premier du présent article que dans les cas où une nécessité militaire exige, d’une manière impérative, une telle dérogation.
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M 3. Les Hautes Parties contractantes s’engagent en outre à interdire, à prévenir et, au besoin, à faire cesser tout acte de vol, de pillage ou de détournement de biens culturels, pratiqué sous quelque forme que ce soit, ainsi que tout acte de vandalisme à l’égard desdits biens. Elles s’interdisent de réquisitionner les biens culturels meubles situés sur le territoire d’une autre Haute Partie contractante. 4. Elles s’interdisent toute mesure de représailles à l’encontre des biens culturels.
5. Une Haute Partie contractante ne peut se dégager des obligations stipulées au présent article, à l’égard d’une autre Haute Partie contractante, en se fondant sur le motif que cette dernière n’a pas appliqué les mesures de sauvegarde prescrites à l’article 3.
Article 5. Occupation
1. Les Hautes Parties contractantes occupant totalement ou partiellement le territoire d’une autre Haute Partie contractante doivent, dans la mesure du possible, soutenir les efforts des autorités nationales compétentes du territoire occupé à l’effet d’assurer la sauvegarde et la conservation de ses biens culturels.
2. Si une intervention urgente est nécessaire pour la conservation des biens culturels situés en territoire occupé et endommagés par des opérations militaires, et si les autorités nationales compétentes ne peuvent pas s’en charger, la Puissance occupante prend, autant que possible, les mesures conservatoires les plus nécessaires en étroite collaboration avec ces autorités. 3. Toute Haute Partie contractante dont le gouvernement est considéré par les membres d’un mouvement de résistance comme leur gouvernement légitime, attirera si possible l’attention de ces membres sur l’obligation d’observer celles des dispositions de la Convention qui ont trait au respect des biens culturels.
Article 6. Signalisation des biens culturels
M
Conformément aux dispositions de l’article 16, les biens culturels peuvent être munis d’un signe distinctif de nature à faciliter leur identification.
Article 7. Mesures d’ordre militaire
1. Les Hautes Parties contractantes s’engagent à introduire dès le temps de paix dans les règlements ou instructions à l’usage de leurs troupes des dispositions propres à assurer l’observation de la présente Convention, et à inculquer dès le temps de paix au personnel de leurs forces armées un esprit de respect à l’égard des cultures et des biens culturels de tous les peuples. 2. Elles s’engagent à préparer ou à établir, dès le temps de paix, au sein de leurs forces armées, des services ou un personnel spécialisé dont la mission sera de veiller au respect des biens culturels et de collaborer avec les autorités civiles chargées de la sauvegarde de ces biens.
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M Chapitre II. De la protection spéciale
Article 8. Octroi de la protection spéciale
1. Peuvent être placés sous protection spéciale un nombre restreint de refuges destinés à abriter des biens culturels meubles en cas de conflit armé, de centres monumentaux et d’autres biens culturels immeubles de très haute importance, à condition:
a. qu’ils se trouvent à une distance suffisante d’un grand centre industriel ou de tout objectif militaire important constituant un point sensible, tel par exemple qu’un aérodrome, une station de radiodiffusion, un établissement travaillant pour la défense nationale, un port ou une gare de chemin de fer d’une certaine importance ou une grande voie de communication; b. qu’ils ne soient pas utilisés à des fins militaires.
2. Un refuge pour biens culturels meubles peut également être placé sous protection spéciale, quel que soit son emplacement, s’il est construit de telle façon que, selon toute probabilité, les bombardements ne pourront pas lui porter atteinte. 3. Un centre monumental est considéré comme utilisé à des fins militaires lorsqu’il est employé pour des déplacements de personnel ou de matériel militaire, même en transit. Il en est de même lorsque s’y déroulent des activités ayant un rapport direct avec les opérations militaires, le cantonnement du personnel militaire ou la production de matériel de guerre. 4. N’est pas considérée comme utilisation à des fins militaires la surveillance d’un des biens culturels énumérés au paragraphe premier, par des gardiens armés spécialement habilités à cet effet, ou la présence auprès de ce bien culturel de forces de police normalement chargées d’assurer l’ordre public.
M
5. Si l’un des biens culturels énumérés au premier paragraphe du présent article est situé près d’un objectif militaire important au sens de ce paragraphe, il peut néanmoins être mis sous protection spéciale si la Haute Partie contractante qui en présente la demande s’engage à ne faire, en cas de conflit armé, aucun usage de l’objectif en cause, et notamment, s’il s’agit d’un port, d’une gare ou d’un aérodrome, à en détourner tout trafic. Dans ce cas, le détournement doit être organisé dès le temps de paix.
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6. La protection spéciale est accordée aux biens culturels parleur inscription au « Registre international des biens culturels sous protection spéciale ». Cette inscription ne peut être effectuée que conformément aux dispositions de la présente Convention et dans les conditions prévues au Règlement d’exécution. Article 9. Immunité des biens culturels sous protection spéciale
Les Hautes Parties contractantes s’engagent à assurer l’immunité des biens culturels sous protection spéciale en s’interdisant, dès l’inscription au Registre international, tout acte d’hostilité à leur égard et, sauf dans les cas prévus au paragraphe 5 de l’article 8,
M toute utilisation de ces biens ou de leurs abords à des fins militaires.
Article 10. Signalisation et contrôle
Au cours d’un conflit armé, les biens culturels sous protection spéciale doivent être munis du signe distinctif défini à l’article 16 et être ouverts à un contrôle de caractère international, ainsi qu’il est prévu au Règlement d’exécution.
Article 11. Levée de l’immunité
1. Si l’une des Hautes Parties contractantes commet, relativement à un bien culturel sous protection spéciale, une violation des engagements pris en vertu de l’article 9, la Partie adverse est, aussi longtemps que cette violation subsiste, dégagée de son obligation d’assurer l’immunité du bien considéré. Cependant, chaque fois qu’Elle le peut, Elle fait préalablement la sommation de mettre fin à cette violation dans un délai raisonnable.
2. En dehors du cas prévu au premier paragraphe du présent article, l’immunité d’un bien culturel sous protection spéciale ne peut être levée qu’en des cas exceptionnels de nécessité militaire inéluctable, et seulement aussi longtemps que cette nécessité subsiste. Celle-ci ne peut être constatée que par le chef d’une formation égale ou supérieure en importance à une division. Dans tous les cas où les circonstances le permettent, la décision de lever l’immunité est notifiée suffisamment à l’avance à la Partie adverse. 3. La Partie qui lève l’immunité doit en informer dans le plus bref délai possible, par écrit et avec indication de ses motifs, le Commissaire général aux biens culturels prévu au Règlement d’exécution. Chapitre III. Des transports de biens culturels
Article 12. Transport sous protection spéciale
1. Un transport exclusivement affecté au transfert de biens culturels, soit à l’intérieur d’un territoire soit à destination d’un autre territoire, peut, à la demande de la Haute Partie contractante intéressée, se faire sous protection spéciale, dans les conditions prévues au Règlement d’exécution. 2. Le transport sous protection spéciale est réalisé sous la surveillance de caractère international prévue au Règlement d’exécution et muni du signe distinctif défini à l’article 16. 3. Les Hautes Parties contractantes s’interdisent tout acte d’hostilité à l’égard d’un transport sous protection spéciale.
Article 13. Transport en cas d’urgence
1. Si une Haute Partie contractante estime que la sécurité de certains biens culturels exige leur transfert et qu’il y a une urgence telle
M
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M que la procédure prévue à l’article 12 ne peut pas être suivie, notamment au début d’un conflit armé, le transport peut être muni du signe distinctif défini à l’article 16, à moins qu’il n’ait fait l’objet d’une demande d’immunité au sens de l’article 12 et que ladite demande n’ait été refusée. Autant que possible, notification du transport doit être faite aux Parties adverses. Un transport vers le territoire d’un autre pays ne peut en aucun cas être muni du signe distinctif si l’immunité ne lui a pas été accordée expressément. 2. Les Hautes Parties contractantes prendront, dans la mesure du possible, les précautions nécessaires pour que les transports prévus au premier paragraphe du présent article et munis du signe distinctif soient protégés contre des actes d’hostilité dirigés contre eux.
Article 14. Immunité de saisie, de capture et de prise
1. Jouissent de l’immunité de saisie, de capture et de prise: a. les biens culturels bénéficiant de la protection prévue à l’article 12 ou de celle prévue à l’article 13; b. les moyens de transport exclusivement affectés au transfert de ces biens 2. Rien dans le présent article ne limite le droit de visite et de contrôle. Chapitre IV. Du personnel
Article 15. Personnel
Le personnel affecté à la protection des biens culturels doit, dans la mesure compatible avec les exigences de la sécurité, être respecté dans l’intérêt de ces biens et, s’il tombe aux mains de la partie adverse, pouvoir continuer à exercer ses fonctions lorsque les biens culturels dont il a la charge tombent également entre les mains de la partie adverse.
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Chapitre V. Du signe distinctif
Article 16. Signe de la Convention
1. Le signe distinctif de la Convention consiste en un écu, pointu en bas, écartelé en sautoir de bleu-roi et de blanc (un écusson formé d’un carré bleu-roi dont un des angles s’inscrit dans la pointe de l’écusson, et d’un triangle bleu-roi au-dessus du carré, les deux délimitant un triangle blanc de chaque côté). 2. Le signe est employé isolé ou répété trois fois en formation triangulaire (un signe en bas), dans les conditions prévues à l’article 17.
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M
Article 17. Usage du signe
1. Le signe distinctif répété trois fois ne peut être employé que pour: a. les biens culturels immeubles sous protection spéciale;
b. les transports de biens culturels, dans les conditions prévues aux articles 12 et 13; c. les refuges improvisés, dans les conditions prévues au Règlement d’exécution. 2. Le signe distinctif ne peut être employé isolé que pour:
a. des biens culturels qui ne sont pas sous protection spéciale;
b. les personnes chargées de fonctions de contrôle conformément au Règlement d’exécution; c. le personnel affecté à la protection des biens culturels;
d. les cartes d’identité prévues au Règlement d’exécution.
3. Lors d’un conflit armé, il est interdit d’employer le signe distinctif dans des cas autres que ceux mentionnés aux paragraphes précédents du présent article ou d’employer à un usage quelconque un signe ressemblant au signe distinctif.
4. Le signe distinctif ne peut être placé sur un bien culturel immeuble sans que soit apposée en même temps une autorisation dûment datée et signée par l’autorité compétente de la Haute Partie contractante.
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Chapitre VI. Du champ d’application de la Convention
Article 18. Application de la Convention
1. En dehors des dispositions qui doivent entrer en vigueur dès le temps de paix, la présente Convention s’appliquera en cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit armé surgissant entre deux ou plusieurs des Hautes Parties contractantes, même si l’état de guerre n’est pas reconnu par une ou plusieurs d’entre elles. 2. La Convention s’appliquera également dans tous les cas d’occupation de tout ou partie du territoire d’une Haute Partie contractante, même si cette occupation ne rencontre aucune résistance militaire.
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M 3. Si l’une des Puissances en conflit n’est pas partie à la présente Convention, les Puissances parties à celle-ci resteront néanmoins liées par elle dans leurs rapports réciproques. Elles seront liées en outre par la Convention envers ladite Puissance, si celle-ci a déclaré en accepter les dispositions et tant qu’elle les applique.
Article 19. Conflits de caractère non international
1. En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international et surgissant sur le territoire de l’une des Hautes Parties contractantes, chacune des parties au conflit sera tenue d’appliquer au moins les dispositions de la présente Convention qui ont trait au respect des biens culturels. 2. Les parties au conflit s’efforceront de mettre en vigueur par voie d’accords spéciaux tout ou partie des autres dispositions de la présente Convention. 3. L’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture peut offrir ses services aux parties au conflit. 4. L’application des dispositions qui précèdent n’aura pas d’effet sur le statut juridique des parties au conflit. Chapitre VII. De l’exécution de la Convention
Article 20. Règlement d’exécution
Les modalités d’application de la présente Convention sont déterminées dans le Règlement d’exécution qui en est partie intégrante.
Article 21. Puissances protectrices
M
La présente Convention et son Règlement d’exécution sont appliqués avec le concours des Puissances protectrices chargées de sauvegarder les intérêts des Parties au conflit.
Article 22. Procédure de conciliation
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1. Les Puissances protectrices prêtent leurs bons offices dans tous les cas où elles le jugent utile dans l’intérêt des biens culturels, notamment s’il y a désaccord entre les Parties au conflit sur l’application ou l’interprétation des dispositions de la présente Convention ou de son Règlement d’exécution.
2. A cet effet, chacune des Puissances protectrices peut, sur l’invitation d’une Partie, du Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, ou spontanément, proposer aux Parties au conflit une réunion de leurs représentants et, en particulier, des autorités chargées de la protection des biens culturels, éventuellement sur un territoire neutre
M convenablement choisi. Les Parties au conflit sont tenues de donner suite aux propositions de réunion qui leur sont faites. Les Puissances protectrices proposent à l’agrément des Parties au conflit une personnalité appartenant à une Puissance neutre, ou présentée par le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, qui est appelée à participer à cette réunion en qualité de président.
Article 23. Concours de l’Unesco
1. Les Hautes Parties contractantes peuvent faire appel au concours technique de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture en vue de l’organisation de la protection de leurs biens culturels, ou à propos de tout autre problème dérivant de l’application de la présente Convention et de son Règlement d’exécution. L’Organisation accorde ce concours dans les limites de son programme et de ses possibilités. 2. L’Organisation est habilitée à faire de sa propre initiative des propositions à ce sujet aux Hautes Parties contractantes.
Article 24. Accords spéciaux
1. Les Hautes Parties contractantes peuvent conclure des accords spéciaux sur toute question qu’il leur paraît opportun de régler séparément.
2. Il ne peut être conclu aucun accord spécial diminuant la protection assurée par la présente Convention aux biens culturels et au personnel qui leur est affecté.
Article 25. Diffusion de la Convention
Les Hautes Parties contractantes s’engagent à diffuser le plus largement possible, en temps de paix et en temps de conflit armé, le texte de la présente Convention et de son Règlement d’exécution dans leurs pays respectifs. Elles s’engagent notamment à en incorporer l’étude dans les programmes d’instruction militaire et, si possible, civile, de telle manière que les principes en puissent être connus de l’ensemble de la population, en particulier des forces armées et du personnel affecté à la protection des biens culturels. Article 26. Traductions et rapports 1. Les Hautes Parties contractantes se communiquent par l’intermédiaire du Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, les traductions officielles de la présente Convention et de son Règlement d’exécution. 2. En outre, au moins une fois tous les quatre ans, Elles adressent au Directeur général un rapport donnant les renseignements
M
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M qu’elles jugent opportuns sur les mesures prises, préparées ou envisagées par leurs administrations respectives en application de la présente Convention et de son Règlement d’exécution.
Article 27. Réunions
1. Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture peut, avec l’approbation du Conseil exécutif, convoquer des réunions de représentants des Hautes Parties contractantes. Il est tenu de le faire si un cinquième au moins des Hautes Parties contractantes le demandent. 2. Sans préjudice de toutes autres fonctions qui lui sont conférées par la présente Convention ou son Règlement d’exécution, la réunion a pour attributions d’étudier les problèmes relatifs à l’application de la Convention et de son Règlement d’exécution, et de formuler des recommandations à ce propos. 3. La réunion peut en outre procéder à la révision de la Convention ou de son Règlement d’exécution si la majorité des Hautes Parties contractantes se trouve représentée, et conformément aux dispositions de l’article 39.
Article 28. Sanctions
Les Hautes Parties contractantes s’engagent à prendre, dans le cadre de leur système de droit pénal, toutes mesures nécessaires pour que soient recherchées et frappées de sanctions pénales ou disciplinaires les personnes, quelle que soit leur nationalité, qui ont commis ou donné l’ordre de commettre une infraction à la présente Convention.
Dispositions finales
M
Article 29. Langues
1. La présente Convention est établie en anglais, en espagnol, en français et en russe, les quatre textes faisant également foi.
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2. L’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture fera établir des traductions dans les autres langues officielles de sa Conférence générale. Article 30. Signature La présente Convention portera la date du 14 mai 1954 et restera ouverte jusqu’à la date du 31 décembre 1954 à la signature de tous les États invités à la Conférence qui s’est réunie à La Haye du 21 avril 1954 au 14 mai 1954.
M
Article 31. Ratification
1. La présente Convention sera soumise à la ratification des Etats signataires conformément à leurs procédures constitutionnelles respectives.
2. Les instruments de ratification seront déposés auprès du Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture.
Article 32. Adhésion
A dater du jour de son entrée en vigueur, la présente Convention sera ouverte à l’adhésion de tous les États visés à l’article 30, non signataires, de même qu’à celle de tout autre État invité à y adhérer par le Conseil exécutif de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture. L’adhésion se fera par le dépôt d’un instrument d’adhésion auprès du Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture.
Article 33. Entrée en vigueur
1. La présente Convention entrera en vigueur trois mois après que cinq instruments de ratification auront été déposés.
2. Ultérieurement, elle entrera en vigueur, pour chaque Haute Partie contractante, trois mois après le dépôt de son instrument de ratification ou d’adhésion.
3. Les situations prévues aux articles 18 et 19 donneront effet immédiat aux ratifications et aux adhésions déposées par les Parties au conflit avant ou après le début des hostilités ou de l’occupation. Dans ces cas le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture fera, par la voie la plus rapide, les communications prévues à l’article 38.
Article 34. Mise en application effective
1. Les États parties à la Convention à la date de son entrée en vigueur prendront, chacun en ce qui le concerne, toutes les mesures requises pour sa mise en application effective dans un délai de six mois. 2. Ce délai sera de six mois à compter du dépôt de l’instrument de ratification ou d’adhésion, pour tous les États qui déposeraient leur instrument de ratification ou d’adhésion après la date d’entrée en vigueur de la Convention.
M
Article 35. Extension territoriale de la Convention
Toute Haute Partie contractante pourra, au moment de la ratification ou de l’adhésion, ou à tout moment ultérieur, déclarer par
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M une notification adressée au Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, que la présente Convention s’étendra à l’ensemble ou à l’un quelconque des territoires dont elle assure les relations internationales. Ladite notification prendra effet trois mois après la date de sa réception.
Article 36. Relation avec les conventions antérieures
1. Dans les rapports entre Puissances qui sont liées par les Conventions de La Haye concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre (IV) et concernant le bombardement par des forces navales en temps de guerre (IX), qu’il s’agisse de celles du 29 juillet 1899 ou de celles du 18 octobre 1907, et qui sont Parties à la présente Convention, cette dernière complétera la susdite Convention (IX) et le Règlement annexé à la susdite Convention (IV) et remplacera le signe défini à l’article 5 de la susdite Convention (IX) par le signe défini à l’article 16 de la présente Convention pour les cas dans lesquels celle-ci et son Règlement d’exécution prévoient l’emploi de ce signe distinctif.
2. Dans les rapports entre Puissances liées par le Pacte de Washington du 15 avril 1935 pour la protection d’institutions artistiques et scientifiques et de monuments historiques (Pacte Roerich) et qui sont Parties à la présente Convention, cette dernière complétera le Pacte Roerich et remplacera le drapeau distinctif défini à l’Article III du Pacte par le signe défini à l’article 16 de la présente Convention, pour les cas dans lesquels celle-ci et son Règlement d’exécution prévoient l’emploi de ce signe distinctif.
Article 37. Dénonciation
1. Chacune des Hautes Parties contractantes aura la faculté de dénoncer la présente Convention en son nom propre ou au nom de tout territoire dont elle assure les relations internationales.
2. La dénonciation sera notifiée par un instrument écrit déposé auprès du Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture.
3. La dénonciation prendra effet une année après réception de l’instrument de dénonciation. Si toutefois, au moment de l’expiration de cette année, la Partie dénonçante se trouve impliquée dans un conflit armé, l’effet de la dénonciation demeurera suspendu jusqu’à la fin des hostilités et en tout cas aussi longtemps que les opérations de rapatriement des biens culturels ne seront pas terminées.
Article 38. Notifications
Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture informera les États visés aux articles 30 et 32, ainsi que l’Organisation des Nations Unies, du dépôt de tous les instruments de ratification, d’adhésion ou d’acceptation mentionnés aux articles 31, 32 et 39, de même que des notifications et dénonciations respectivement prévues aux articles 35, 37 et 39.
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Article 39. Révision de la Convention et de son Règlement d’exécution
1. Chacune des Hautes Parties contractantes peut proposer des amendements à la présente Convention et à son Règlement d’exécution. Tout amendement ainsi proposé sera communiqué au Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, qui en transmettra le texte à toutes les Hautes Parties contractantes auxquelles il demandera en même temps de faire connaître dans les quatre mois: a. si elles désirent qu’une conférence soit convoquée pour étudier l’amendement proposé;
b. ou si elles sont d’avis d’accepter l’amendement proposé sans qu’une conférence se réunisse;
c. ou si elles sont d’avis de rejeter l’amendement proposé sans la convocation d’une conférence.
2. Le Directeur général transmettra les réponses reçues en application du premier paragraphe du présent article à toutes les Hautes Parties contractantes.
3. Si toutes les Hautes Parties contractantes qui ont, dans le délai prévu, fait connaître leurs vues au Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture conformément à l’alinéa b du paragraphe premier du présent article, informent le Directeur général qu’Elles sont d’avis d’adopter l’amendement sans qu’une conférence se réunisse, notification de leur décision sera faite par le Directeur général conformément à l’article 38. L’amendement prendra effet, à l’égard de toutes les Hautes Parties contractantes, dans un délai de 90 jours à dater de cette notification. 4. Le Directeur général convoquera une conférence des Hautes Parties contractantes en vue d’étudier l’amendement proposé, si la demande lui en est faite par plus d’un tiers des Hautes Parties contractantes.
5. Les amendements à la Convention ou à son Règlement d’exécution soumis à la procédure prévue au paragraphe précédent n’entreront en vigueur qu’après avoir été adoptés à l’unanimité par les Hautes Parties contractantes représentées à la conférence et avoir été acceptés par chacune des Hautes Parties contractantes. 6. L’acceptation par les Hautes Parties contractantes des amendements à la Convention ou à son Règlement d’exécution qui auront été adoptés par la conférence visée aux paragraphes 4 et 5, s’effectuera par le dépôt d’un instrument formel auprès du Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture.
7. Après l’entrée en vigueur d’amendements à la présente Convention ou à son Règlement d’exécution, seul le texte ainsi modifié de ladite Convention ou de son Règlement d’exécution restera ouvert à la ratification ou à l’adhésion.
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Article 40. Enregistrement
Conformément à l’article 102 de la Charte des Nations Unies, la présente Convention sera enregistrée au Secrétariat des Nations Unies à la requête du Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture.
EN FOI DE QUOI les soussignés dûment autorisés ont signé la présente Convention.
Fait à La Haye, le 14 mai 1954, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, et dont les copies certifiées conformes seront remises à tous les États visés aux articles 30 et 32, ainsi qu’à l’Organisation des Nations Unies.
Règlement d’exécution de la Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé Chapitre premier. Du contrôle
Article premier. Liste internationale de personnalités
Dès l’entrée en vigueur de la Convention, le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture établit une liste internationale composée de toutes les personnalités désignées par les Hautes Parties contractantes comme étant aptes à remplir les fonctions de Commissaire général aux biens culturels. Cette liste fera l’objet de révisions périodiques, sur l’initiative du Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, d’après les demandes formulées par les Hautes Parties contractantes.
Article 2. Organisation du contrôle
Dès qu’une Haute Partie contractante est engagée dans un conflit armé auquel s’applique l’article 18 de la Convention:
a. elle nomme un représentant pour les biens culturels situés sur son territoire; si elle occupe un autre territoire, elle est tenue de nommer un représentant spécial pour les biens culturels qui s’y trouvent;
M
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M b. la Puissance protectrice de chaque Partie adversaire de cette Haute Partie contractante nomme des délégués auprès de cette dernière, conformément à l’article 3 ci-après; c. il est nommé, auprès de cette Haute Partie contractante, un Commissaire général aux biens culturels, conformément à l’article 4 ci-après.
Article 3. Désignation des délégués des puissances protectrices
La Puissance protectrice désigne ses délégués parmi les membres de son personnel diplomatique ou consulaire ou, avec l’agrément de la Partie auprès de laquelle s’exercera leur mission, parmi d’autres personnes.
Article 4. Désignation du Commissaire général
1. Le Commissaire général aux biens culturels est choisi d’un commun accord, sur la liste internationale de personnalités, par la Partie auprès de laquelle s’exercera sa mission et par les Puissances protectrices des Parties adverses.
2. Si les Parties ne se mettent pas d’accord dans les trois semaines qui suivent l’ouverture de leurs pourparlers sur ce point, Elles demandent au Président de la Cour internationale de Justice de désigner le Commissaire général, qui n’entrera en fonctions qu’après avoir obtenu l’agrément de la Partie auprès de laquelle il devra exercer sa mission.
Article 5. Attributions des délégués
Les délégués des Puissances protectrices constatent les violations de la Convention, font enquête, avec le consentement de la Partie auprès de laquelle ils exercent leur mission, sur les circonstances dans lesquelles elles se sont produites, effectuent des démarches sur place afin de les faire cesser et, en cas de besoin, en saisissent le Commissaire général. Ils le tiennent au courant de leur activité.
Article 6. Attributions du Commissaire général
1. Le Commissaire général aux biens culturels traite, avec le représentant de la Partie auprès de laquelle il exerce sa mission et avec les délégués intéressés, les questions dont il est saisi au sujet de l’application de la Convention. 2. Il a pouvoir de décision et de nomination dans les cas prévus au présent Règlement.
3. Avec l’agrément de la Partie auprès de laquelle il exerce sa mission, il a le droit d’ordonner une enquête ou de la diriger lui-même.
M
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M 4. Il fait, auprès des Parties au conflit ou de leurs Puissances protectrices, toutes démarches qu’il juge utiles pour l’application de la Convention.
5. Il établit les rapports nécessaires sur l’application de la Convention et les communique aux Parties intéressées ainsi qu’à leurs Puissances protectrices. Il en remet des copies au Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, qui ne pourra faire usage que de leurs données techniques. 6. Lorsqu’il n’existe pas de Puissance protectrice, le Commissaire général exerce les fonctions attribuées à la Puissance protectrice par les articles 21 et22 de la Convention.
Article 7. Inspecteurs et experts
1. Chaque fois que le Commissaire général aux biens culturels, sur demande ou après consultation des délégués intéressés, le juge nécessaire, il propose à l’agrément de la Partie auprès de laquelle il exerce sa mission une personne en qualité d’inspecteur aux biens culturels chargé d’une mission déterminée. Un inspecteur n’est responsable qu’envers le Commissaire général. 2. Le Commissaire général, les délégués et les inspecteurs peuvent recourir aux services d’experts, qui seront également proposés à l’agrément de la Partie mentionnée au paragraphe précédent.
Article 8. Exercice de la mission de contrôle
Les Commissaires généraux aux biens culturels, les délégués des Puissances protectrices, les inspecteurs et les experts ne doivent en aucun cas sortir des limites de leur mission. Ils doivent notamment tenir compte des nécessités de sécurité de la Haute Partie Contractante auprès de laquelle ils exercent leur mission, et avoir égard en toutes circonstances aux exigences de la situation militaire telles que les leur fera connaître ladite Haute Partie Contractante.
Article 9. Substitut des puissances protectrices
Si une Partie au conflit ne bénéficie pas, ou ne bénéficie plus, de l’activité d’une Puissance protectrice, un État neutre peut être sollicité d’assumer les fonctions de Puissance protectrice en vue de la désignation d’un Commissaire général aux biens culturels selon la procédure prévue à l’article 4 ci-dessus. Le Commissaire général ainsi désigné confie éventuellement à des inspecteurs les fonctions de délégués des Puissances protectrices déterminées par le présent Règlement.
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Article 10. Frais
La rémunération et les frais du Commissaire général aux biens culturels, des inspecteurs et des experts, sont à la charge de la Partie auprès de laquelle s’exerce leur mission; ceux des délégués des Puissances protectrices font l’objet d’une entente entre Celles-ci et
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M les États dont elles sauvegardent les intérêts. Chapitre II. De la protection spéciale
Article 11. Refuges improvisés
l. Si une Haute Partie contractante, au cours d’un conflit armé, est amenée par des circonstances imprévues à aménager un refuge improvisé et si elle désire qu’il soit placé sous protection spéciale, elle en fait immédiatement communication au Commissaire général qui exerce sa mission auprès d’Elle. 2. Si le Commissaire général est d’avis que les circonstances et l’importance des biens culturels abrités dans ce refuge improvisé justifient une telle mesure, il peut autoriser la Haute Partie contractante à y apposer le signe distinctif défini à l’article 16 de la Convention. Il communique sa décision sans délai aux délégués intéressés des Puissances protectrices, dont chacun peut, dans un délai de 30 jours, ordonner le retrait immédiat du signe.
3. Dès que ces délégués ont signifié leur accord ou si le délai de 30 jours s’écoule sans qu’il y ait opposition de l’un quelconque des délégués intéressés et si le refuge improvisé remplit, selon l’avis du Commissaire général, les conditions prévues à l’article 8 de la Convention, le Commissaire général demande au Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture l’inscription du refuge au Registre des biens culturels sous protection spéciale.
Article 12. Registre international des biens culturels sous protection spéciale
1. Il est établi un « Registre international des biens culturels sous protection spéciale ».
M
2. Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture tient ce registre. Il en remet des doubles au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies ainsi qu’aux Hautes Parties contractantes.
3. Le registre est divisé en chapitres, chacun d’eux au nom d’une Haute Partie contractante. Chaque chapitre est divisé en trois paragraphes intitulés respectivement : refuges, centres monumentaux, autres biens culturels immeubles. Le Directeur général arrête les mentions contenues dans chaque chapitre.
Article 13. Demandes d’inscription
1. Chacune des Hautes Parties contractantes peut faire au Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, des demandes d’inscription au registre de certains refuges, centres monumentaux ou autres biens culturels
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M immeubles, situés sur son territoire. Elle donne dans ces demandes des indications quant à l’emplacement de ces biens, et certifie que ces derniers remplissent les conditions prévues à l’article 8 de la Convention. 2. En cas d’occupation, la Puissance occupante a la faculté de faire des demandes d’inscription.
3. Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture envoie sans délai une copie des demandes d’inscription à chacune des Hautes Parties contractantes. Article 14. Opposition
1. Chacune des Hautes Parties contractantes peut faire opposition à l’inscription d’un bien culturel par lettre adressée au Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture. Cette lettre doit être reçue par lui dans un délai de quatre mois à dater du jour où il a expédié copie de la demande d’inscription. 2. Une telle opposition doit être motivée. Les seuls motifs en peuvent être: a. que le bien n’est pas un bien culturel;
b. que les conditions mentionnées à l’article 8 de la Convention ne sont pas remplies.
3. Le Directeur général envoie sans délai une copie de la lettre d’opposition aux Hautes Parties contractantes. Il prend, le cas échéant, l’avis du Comité international pour les monuments, les sites d’art et d’histoire et les sites de fouilles archéologiques et, en outre, s’il le juge utile, de tout autre organisme ou personnalité qualifiés. 4. Le Directeur général, ou la Haute Partie contractante qui a demandé l’inscription, peut faire toutes démarches opportunes auprès des Hautes Parties contractantes qui ont formé l’opposition, afin que celle-ci soit rapportée.
5. Si une Haute Partie contractante, après avoir demandé en temps de paix l’inscription d’un bien culturel au registre, se trouve engagée dans un conflit armé avant que l’inscription ait été effectuée, le bien culturel dont il s’agit sera immédiatement inscrit au registre par le Directeur général, à titre provisoire, en attendant que soit confirmée, rapportée ou annulée toute opposition qui pourra, ou aura pu, être formée. 6. Si, dans un délai de six mois à dater du jour où il a reçu la lettre d’opposition, le Directeur général ne reçoit pas de la Haute Partie contractante qui a formé l’opposition une communication notifiant que celle-ci est rapportée, la Haute Partie contractante qui a fait la demande d’inscription peut recourir à la procédure d’arbitrage prévue au paragraphe suivant. 7. La demande d’arbitrage doit être formulée au plus tard une année après la date à laquelle le Directeur général a reçu la lettre
M
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M d’opposition. Chacune des Parties au différend désigne un arbitre. Dans le cas où une demande d’inscription a fait l’objet de plus d’une opposition, les Hautes Parties contractantes qui ont formé l’opposition désignent ensemble un arbitre. Les deux arbitres choisissent un surarbitre sur la liste internationale prévue à l’article premier du présent Règlement; s’ils ne peuvent pas s’entendre pour effectuer ce choix, ils demandent au Président de la Cour internationale de Justice de nommer un surarbitre, qui ne doit pas nécessairement être choisi sur la liste internationale. Le tribunal arbitral ainsi formé détermine sa propre procédure; ses décisions sont sans appel.
8. Chacune des Hautes Parties contractantes peut déclarer, au moment où surgit une contestation dans laquelle Elle est partie, qu’Elle ne désire pas appliquer la procédure arbitrale prévue au paragraphe précédent. Dans ce cas, l’opposition à une demande d’inscription est soumise par le Directeur général aux Hautes Parties contractantes. L’opposition n’est confirmée que si les Hautes Parties contractantes en décident ainsi à la majorité des deux tiers des votants. Le vote se fera par correspondance, à moins que le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, jugeant indispensable de convoquer une réunion en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 27 de la Convention, ne procède à cette convocation. Si le Directeur général décide de faire procéder au vote par correspondance, il invitera les Hautes Parties contractantes à lui faire parvenir leur vote sous pli scellé dans un délai de six mois à courir du jour où l’invitation à cet effet leur aura été adressée.
Article 15. Inscription
1. Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture fait inscrire au registre, sous un numéro d’ordre, tout bien culturel pour lequel une demande d’inscription a été faite lorsque cette demande n’a pas, dans le délai prévu au premier paragraphe de l’article 14, fait l’objet d’une opposition.
2. Dans le cas où une opposition a été formée, et sauf ce que est dit au paragraphe 5 de l’article 14, le Directeur général ne procédera à l’inscription du bien au registre que si l’opposition a été rapportée ou si elle n’a pas été confirmée à la suite de la procédure visée au paragraphe 7 de l’article 14 ou de celle visée au paragraphe 8 du même article.
M
3. Dans le cas visé au paragraphe 3 de l’article 11, le Directeur général procède à l’inscription sur requête du Commissaire général aux biens culturels. 4. Le Directeur général envoie sans délai au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, aux Hautes Parties contractantes et, sur requête de la Partie ayant fait la demande d’inscription, à tous les autres États visés aux articles 30 et 32 de la Convention, une copie certifiée de toute inscription au registre. L’inscription prend effet trente jours après cet envoi.
Article 16. Radiation
1. Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture fait radier l’inscription d’un bien culturel au registre:
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M a. à la requête de la Haute Partie contractante sur le territoire de laquelle le bien se trouve;
b. si la Haute Partie contractante qui avait demandé l’inscription a dénoncé la Convention et lorsque cette dénonciation est entrée en vigueur; c. dans le cas prévu au paragraphe 5 de l’article 14, lorsqu’une opposition a été confirmée à la suite de la procédure visée au paragraphe 7 de l’article 14 ou de celle prévue au paragraphe 8 du même article.
2. Le Directeur général envoie sans délai au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies et à tous les États qui ont reçu copie de l’inscription une copie certifiée de toute radiation au registre. La radiation prend effet trente jours après cet envoi. Chapitre III. Des transports de biens culturels
Article 17. Procédure pour obtenir l’immunité
1. La demande visée au paragraphe premier de l’article 12 de la Convention est adressée au Commissaire général aux biens culturels. Elle doit mentionner les raisons qui l’ont suscitée et spécifier le nombre approximatif et l’importance des biens culturels à transférer, l’emplacement actuel de ces biens, leur nouvel emplacement prévu, les moyens de transport, le trajet à suivre, la date envisagée pour le transport et toute autre information utile. 2. Si le Commissaire général, après avoir pris les avis qu’il juge opportuns, estime que ce transfert est justifié, il consulte les délégués intéressés des Puissances protectrices sur les modalités d’exécution envisagées. A la suite de cette consultation, il informe du transport les Parties au conflit intéressées et joint à cette notification toutes informations utiles.
M
3. Le Commissaire général désigne un ou plusieurs inspecteurs qui s’assurent que le transport contient seulement les biens indiqués dans la demande, qu’il s’effectue selon les modalités approuvées et qu’il est muni du signe distinctif; ce ou ces inspecteurs accompagnent le transport jusqu’au lieu de destination.
Article 18. Transport à l’étranger
Si le transfert sous protection spéciale se fait vers le territoire d’un autre pays, il est régi non seulement par l’article 12 de la Convention et par l’article 17 du présent Règlement, mais encore par les dispositions suivantes:
a. pendant le séjour des biens culturels sur le territoire d’un autre État, celui-ci en sera le dépositaire. Il assurera à ces biens des soins au moins égaux à ceux qu’il donne à ses propres biens culturels d’importance comparable.
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M b. L’État dépositaire ne rendra ces biens qu’après cessation du conflit; ce retour aura lieu dans un délai de six mois après que la demande en aura été faite. c. Pendant les transports successifs et pendant le séjour sur le territoire d’un autre État, les biens culturels seront à l’abri de toute mesure de saisie et frappés d’indisponibilité à l’égard du déposant aussi bien que du dépositaire. Toutefois, lorsque la sauvegarde des biens l’exigera, le dépositaire pourra, avec l’assentiment du déposant, faire transporter les biens dans le territoire d’un pays tiers, sous les conditions prévues au présent article. d. La demande de mise sous protection spéciale doit mentionner que l’État vers le territoire duquel le transport s’effectuera accepte les dispositions du présent article.
Article 19. Territoire occupé
Lorsqu’une Haute Partie contractante occupant le territoire d’une autre Haute Partie contractante transporte des biens culturels dans un refuge situé en un autre point de ce territoire, sans pouvoir suivre la procédure prévue à l’article 17 du Règlement, ledit transport n’est pas considéré comme un détournement au sens de l’article 4 de la Convention, si le Commissaire général aux biens culturels certifie par écrit, après avoir consulté le personnel normal de protection, que les circonstances ont rendu ce transport nécessaire. Chapitre IV. Du signe distinctif
Article 20. Apposition du signe
1. L’emplacement du signe distinctif et son degré de visibilité sont laissés à l’appréciation des autorités compétentes de chaque Haute Partie contractante. Le signe peut notamment figurer sur des drapeaux ou des brassards. Il peut être peint sur un objet ou y figurer de toute autre manière utile.
2. Toutefois, en cas de conflit armé, le signe doit, sans préjudice d’une signalisation éventuellement plus complète, être apposé, d’une façon bien visible le jour, de l’air comme de terre, sur les transports dans les cas prévus aux articles 12 et 13 de la Convention, et d’une façon bien visible de terre: a. à des distances régulières suffisantes pour marquer nettement le périmètre d’un centre monumental sous protection spéciale; b. à l’entrée des autres biens culturels immeubles sous protection spéciale.
Article 21. Identification de personnes
1. Les personnes visées à l’article 17 de la Convention, paragraphe 2, alinéas b et c, peuvent porter un brassard muni du signe
M
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M distinctif, délivré et timbré par les autorités compétentes.
2. Elles portent une carte d’identité spéciale munie du signe distinctif. Cette carte mentionne au moins les nom et prénoms, la date de naissance, le titre ou grade et la qualité de l’intéressé. La carte est munie de la photographie du titulaire et, en outre, soit de sa signature, soit de ses empreintes digitales, soit des deux à la fois. Elle porte le timbre sec des autorités compétentes. 3. Chaque Haute Partie contractante établit son modèle de carte d’identité en s’inspirant du modèle figurant à titre d’exemple en annexe au présent Règlement. Les Hautes Parties contractantes se communiquent le modèle adopté. Chaque carte d’identité est établie, si possible, en deux exemplaires au moins, dont l’un est conservé par la Puissance qui l’a délivrée. 4. Les personnes mentionnées ci-dessus ne peuvent être privées, sauf raison légitime, ni de leur carte d’identité, ni du droit de porter leur brassard. Dépositaire : UNESCO
Ouverture à la signature :
Du 14 mai au 31 décembre 1954.
La Convention a été signée par les Etats suivants : Allemagne (République fédérale d’) Andorre (voir note 1) Australie Autriche Belgique Birmanie Brésil (Chine) (voir note 2) Cuba Danemark Egypte
14 mai 1954
M
14 mai 1954 14 mai 1954
31 décembre 1954 14 mai 1954
31 décembre 1954 31 décembre 1954 14 mai 1954 14 mai 1954
18 octobre 1954
30 décembre 1954
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M El Salvador 14 mai 1954 Equateur 14 mai 1954 Espagne 14 mai 1954 Etats-Unis d’Amérique 14 mai 1954 France 14 mai 1954 Grèce 14 mai 1954 Hongrie 14 mai 1954 Inde 14 mai 1954 Indonésie 24 décembre 1954 Iraq 14 mai 1954 Iran 14 mai 1954 Irlande 14 mai 1954 Israël 14 mai 1954 Italie 14 mai 1954 Jamahiriya arabe libyenne 14 mai 1954 Japon 6 septembre 1954 Jordanie 22 décembre 1954 Kampuchéa démocratique 17 décembre 1954 Liban 25 mai 1954 Luxembourg 14 mai 1954 Mexique 29 décembre 1954 Monaco 14 mai 1954 Nicaragua 14 mai 1954 Norvège 14 mai 1954 Nouvelle-Zélande 20 décembre 1954 Pays-Bas 14 mai 1954 Philippines 14 mai 1954 Pologne 14 mai 1954 Portugal
14 mai 1954
M
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M République arabe syrienne
14 mai 1954
République socialiste soviétique de Biélorussie République socialiste soviétique d’Ukraine Roumanie Royaume-Uni Saint-Marin Tchécoslovaquie Union des Républiques socialistes soviétiques Uruguay Yougoslavie
14 mai 1954 14 mai 1954 14 mai 1954
30 décembre 1954 14 mai 1954 14 mai 1954 14 mai 1954 14 mai 1954 14 mai 1954
Entrée en vigueur :
Le 7 août 1956, conformément à l’article 33 Textes faisant foi :
anglais, espagnol, français et russe Enregistrement auprès de l’ONU : Le 4 septembre 1956, n° 3511 Etats parties
M
Liste par ordre alphabétique Liste par ordre chronologique Déclarations et réserves : Etats-Unis d’Amérique
L’instrument de ratification contenait les déclarations suivantes:
“(1) Les Etats-Unis d’Amérique considèrent que la « protection spéciale », telle que définie au chapitre II de la Convention, codifie le droit international coutumier en ce que, premièrement, elle interdit l’utilisation d’un bien culturel aux fins de protéger d’une attaque toute cible militaire légitime et que, deuxièmement, elle permet qu’un bien soit attaqué par tout moyen licite et proportionné en cas
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M de nécessité militaire et nonobstant d’éventuels dommages collatéraux causés au bien concerné.
(2) Les Etats-Unis d’Amérique considèrent que toute décision émanant d’un commandant, de personnel militaire ou de toute autre personne chargée de planifier, autoriser ou mener une opération militaire ou d’autres activités visées par la Convention, ne doit être jugée que par rapport à l’appréciation, par cette personne, des informations dont elle pouvait raisonnablement disposer au moment où elle a planifié, autorisé ou mené l’opération en question et non par rapport à des informations apparues postérieurement à ladite opération. (3) Les Etats-Unis d’Amérique considèrent que les règles établies par la Convention s’appliquent uniquement aux armes conventionnelles et ne préjugent en rien des règles du droit international régissant d’autres types d’armements, y compris l’armement nucléaire.
(4) Les Etats-Unis d’Amérique considèrent que, comme pour tous les objets civils, la responsabilité première de la protection des objets culturels incombe à la Partie qui en détient le contrôle afin d’assurer qu’ils sont dûment identifiés et qu’ils ne sont pas utilisés à des fins illicites.” [original anglais] La lettre de transmission de cet instrument contenait la demande suivante:
«Les Etats-Unis d’Amérique demandent qu’il soit donné immédiatement effet au présent instrument de ratification, conformément aux dispositions pertinentes de l’article 33 (3) de la Convention. » [original : anglais] Norvège (voir note 3)
« …la restitution des biens culturels, conformément aux dispositions des Partie I et II du Protocole ne pourra être exigée après l’expiration d’un délai de vingt ans à compter de la date à laquelle le bien en question est parvenu en la possession d’un détenteur de bonne foi » (voir lettre CL/1522 du 30 octobre 1961).
M
Nouvelle-Zélande
« ET DÉCLARE que, conformément au statut constitutionnel des Tokélaou et compte tenu de l’engagement pris par le gouvernement de la Nouvelle-Zélande en faveur du développement de l’autonomie de ce territoire par un acte d’autodétermination en vertu de la Charte des Nations Unies, cette ratification ne concernera pas les Tokélaou tant qu’une déclaration en ce sens n’aura pas été déposée par le Gouvernement de la Nouvelle-Zélande auprès du Dépositaire à la suite de consultations appropriées avec ce territoire ; » [original anglais] Pays-Bas
“À compter du 10 octobre 2010, les Antilles néerlandaises cessent d’exister en tant que pays du Royaume des Pays-Bas. À partir de
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M cette date, le Royaume se compose de quatre territoires : les Pays-Bas, Aruba, Curaçao et Saint-Martin (partie néerlandaise). Curaçao et Saint-Martin jouissent de l’autonomie au sein du Royaume, comme Aruba et, jusqu’au 10 octobre 2010, les Antilles néerlandaises. Ces changements modifient les relations constitutionnelles internes du Royaume des Pays-Bas. Ainsi, le Royaume demeure le sujet de droit international avec lequel les accords sont conclus. En conséquence, l’évolution de la structure du Royaume n’affecte pas la validité des accords internationaux ratifiés par le Royaume pour les Antilles néerlandaises : ces accords, y compris les réserves éventuellement formulées, continuent de s’appliquer à Curaçao et Saint-Martin. Les autres îles qui faisaient jusqu’alors partie des Antilles néerlandaises – Bonaire, Saint-Eustache et Saba – font désormais partie des Pays-Bas, constituant la « partie caraïbe des Pays-Bas ». Les accords actuellement en vigueur aux Antilles néerlandaises continuent également de s’appliquer à ces îles ; toutefois, il incombe désormais au Gouvernement des Pays-Bas de les mettre en œuvre. En outre, un certain nombre d’accords actuellement en vigueur aux PaysBas sont, par les présentes, déclarés applicables, à compter du 10 octobre 2010, à ladite partie caraïbe des Pays-Bas. Les accords concernés sont énumérés en annexe. Un rapport faisant état des accords applicables à Curaçao, Saint-Martin et/ou la partie caraïbe des Pays-Bas, y compris les réserves et déclarations éventuelles, sera livré prochainement. La délégation permanente prie respectueusement la Directrice générale, en sa qualité de dépositaire, d’informer les États parties de la modification susmentionnée et de ses prolongements, énumérés en annexe. ” [original : anglais] République fédérale d’Allemagne
(Traduction) : « Etant donné […] que la procédure de ratification exigera beaucoup de temps, en raison du caractère fédéral de la République fédérale d’Allemagne, […] conformément à l’article 18(3) de la Convention, […] la République fédérale d’Allemagne accepte dès maintenant les dispositions de la Convention et les applique pour sa part […] de ce fait, toutes les parties à la Convention, conformément à l’article 18(3), sont également liées par la Convention envers la République fédérale d’Allemagne. » (voir lettre ODG/SJ/2/467 du 2 mars 1962).
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République socialiste soviétique de Biélorussie (lors de la signature)
(Traduction) : « En signant la Convention et le Règlement, le représentant de la République socialiste soviétique de Biélorussie déclare que différentes dispositions incluses dans la Convention et le Règlement diminuent le rôle de ces accords en ce qui concerne la préservation et la défense des biens culturels en cas de conflit armé et qu’il ne peut, pour cette raison, s’en déclarer satisfait » (voir Actes de la Conférence de La Haye, procès-verbal, paragraphe 2215). Des déclarations semblables ont été faites au même moment par la RSS d’Ukraine et l’Union des républiques socialistes soviétiques (id., paragraphes 2216 et 2217).» Soudan
« Du fait qu’il considère que le gouvernement royal de l’Union nationale du Cambodge de Samdeck Norodom Sihanouk est le seul
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M gouvernement habilité à représenter le Royaume du Cambodge, le gouvernement de la République démocratique du Soudan ne reconnaît pas au régime de Phnom Penh le droit de contracter des obligations internationales au nom du Royaume du Cambodge » (voir lettre CL/2236 du 18 octobre 1972). Application territoriale : Notification Date de réception de la notification Maurice 22 septembre 2006 Pays-Bas 10 octobre 2006 Pays-Bas 11 mai 2011 en date du
Extension à
îles Maurice, Rodrigues, Agalega, Tromelin, Cardagos Carajos et à l’archipel des Chagos, y compris Diego Garcia, ainsi qu’à toute autre île comprise dans l’État de Maurice. Territories of Bonaire, Sint Eustatius and Saba Conformément aux termes de la notification 8 octobre 2010, ci-après le rapport faisant état des accords internationaux applicables à Curaçao, Sint Maarten et/ou la partie caraïbe des Pays-Bas suite à la modification des relations constitutionnelles internes du Royaume des Pays-Bas : Pays-Bas (partie européenne) - application : oui ; entrée en vigueur : 14 janvier 1959 / Partie caraïbe des Pays-Bas (îles de Bonaire, Saint-Eustache et Saba) - application : oui ; entrée en vigueur : 10 janvier 2011 (voir note du 8 octobre 2010) / Aruba - application : non ; entrée en vigueur : non / Curaçao - application : non ; entrée en vigueur : non / Sint Maarten - application : non ; entrée en vigueur : non
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Notes :
(1) Signature au nom de l’évêque d’Urgel, coprince d’Andorre. Le Ministère français des affaires étrangères, dans une communication en date du 5 août 1954, a fait savoir que le président de la République française, coprince d’Andorre, considère cette signature comme nulle et non avenue, l’Etat français étant seul en mesure d’assurer la représentation des intérêts andorrans sur le plan international (voir lettre CL/996 du 22 octobre 1954). L’évêque d’Urgel a, dans une lettre du 6 décembre 1954, répondu à cette communication en faisant valoir sa qualité de coprince souverain (voir lettre CL/1026 du 22 février 1955).
(2) Signature apposée par les autorités qui représentaient la Chine aux Nations Unies et à l’ UNESCO au moment de la signature. La Chine est membre originaire des Nations Unies, la Charte ayant été signée et ratifiée en son nom, les 26 juin et 28 septembre
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M 1945 respectivement, par le gouvernement de la République de Chine, qui a continûment représenté la Chine aux Nations Unies jusqu’au 25 octobre 1971. La Chine est également membre originaire de l’UNESCO, l’Acte constitutif ayant été signé et accepté en son nom par le gouvernement de la République de Chine qui a continûment représenté la Chine à l’UNESCO jusqu’au 29 octobre 1971. Le 25 octobre 1971, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté la résolution 2758 (XXVI), ainsi conçue: « L’Assemblée générale, » Rappelant les principes de la Charte des Nations Unies, » Considérant que le rétablissement des droits légitimes de la République ( populaire de Chine est indispensable à la sauvegarde de la Charte des Nations Unies et à la cause que l’Organisation doit servir conformément à la Charte, » Reconnaissant que les représentants du gouvernement de la République populaire de Chine sont les seuls représentants légitimes de la Chine à l’Organisation des Nations Unies et que la République populaire de Chine est un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, » Décide le rétablissement de la République populaire de Chine dans tous ses droits et la reconnaissance des représentants de son gouvernement comme les seuls représentants légitimes de la Chine à l’Organisation des Nations Unies, ainsi que l’expulsion immédiate des représentants de Tchang Kaï-chek du siège qu’ils occupent illégalement à l’Organisation des Nations Unies et dans tous les organismes qui s’y rattachent. » La constitution du gouvernement populaire central de la République populaire de Chine, intervenue le 1»’ octobre 1949, a été notifiée aux Nations Unies le 18 novembre 1949. Diverses propositions ont été formulées entre cette date et celle de l’adoption de la résolution précitée en vue de modifier la représentation de la Chine aux Nations Unies, mais ces propositions n’avaient pas été approuvées. Le 29 octobre 1971, le Conseil exécutif de l’UNESCO, lors de sa 88» session, a adopté la décision suivante: Le Conseil exécutif, 1. Tenant compte de la résolution adoptée par l’Assemblée générale le 25 octobre 1971, par laquelle les représentants du gouvernement de la République populaire de Chine ont été reconnus comme les seuls représentants de la Chine à l’Organisation des Nations Unies, 2. Rappelant la résolution 396 (V) adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies, à sa cinquième session ordinaire, le 14 décembre 1950 qui recommandait que « l’attitude qu’aura adoptée l’Assemblée générale » sur la question de la représentation d’un État membre « soit prise en considération par les autres organes des Nations Unies et par les institutions spécialisées », 3. Décide que, à partir de ce jour, le gouvernement de la République populaire de Chine est l’unique représentant légitime de la Chine à l’UNESCO, et invite le Directeur général à agir en conséquence (88 EX/Décisions, 9). En date du 29 septembre 1972, le Secrétaire général des Nations Unies a reçu la communication suivante du ministre des affaires étrangères de la République populaire de Chine: 1. En ce qui concerne les traités multilatéraux que le défunt gouvernement chinois a signés ou ratifiés ou auxquels il a adhéré avant l’établissement du gouvernement de la République populaire de Chine, mon gouvernement en examinera la teneur avant de décider, à la lumière des circonstances, s’ils devraient ou non être reconnus.
M
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M 2. A compter du 1er octobre 1949, jour de la fondation de la République populaire de Chine, la clique de Tchang Kaï-chek n’a aucun droit de représenter la Chine. Ses signature et ratification de tout traité multilatéral, ou son adhésion à tout traité multilatéral, en usurpant le nom de la « Chine », sont toutes illégales et dénuées de tout effet. Mon gouvernement étudiera ces traités multilatéraux avant de décider, à la lumière des circonstances, s’il conviendrait ou non d’y adhérer. En déposant son instrument d’adhésion à l’Accord, le gouvernement roumain a déclaré qu’il considérait la signature en question comme nulle et non avenue, le seul gouvernement en droit d’assumer des obligations au nom de la Chine et de la représenter sur le plan international étant le gouvernement de la République populaire de Chine. Dans une lettre adressée au Secrétaire général en référence à cette déclaration, le représentant permanent de la République de Chine auprès de l’Organisation des Nations Unies a déclaré ce qui suit: « La République de Chine, État souverain et membre de l’Organisation des Nations Unies, a participé à la cinquième session de la Conférence générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, a contribué à l’élaboration de l’Accord pour l’importation d’objets de caractère éducatif, scientifique ou culturel et a dûment signé ledit Accord le 22 novembre 1950 au siège temporaire de l’Organisation des Nations Unies à Lake Success. Toute déclaration relative audit Accord qui est incompatible avec la position légitime du gouvernement de la République de Chine ou qui lui porte atteinte n’affectera en rien les droits et obligations de la République de Chine comme signataire dudit Accord. » (3) La Bulgarie, l’Espagne, l’Inde, l’Italie, Madagascar, le Mexique, les Pays-Bas, la Pologne, la République arabe unie, la République socialiste soviétique de Biélorussie, la Roumanie, Saint-marin, le Tchad, la Tchécoslovaquie et l’Union des Républiques socialistes soviétiques ont émis des observations à l’égard de cette réserve (voir lettres CL/1606 du 27 novembre 1962 et CL/2351 Add. du 14 août 1974). Par note verbale du 3 octobre 1973, la Norvège a fait part de sa décision, prise le 24 août 1979, de lever cette réserve (voir lettre LA/depositary/1979/23 du 6 décembre 1979).
aliste soviétique de Biélorussie, la Roumanie, Saint-marin, le Tchad, la Tchécoslovaquie et l’Union des Républiques socialistes soviétiques ont émis des observations à l’égard de cette réserve (voir lettres CL/1606 du 27 novembre 1962 et CL/2351 Add. du 14 août 1974). Par note verbale du 3 octobre 1973, la Norvège a fait part de sa décision, prise le 24 août 1979, de lever cette réserve (voir lettre LA/depositary/1979/
M
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M U
LA R U PO
N O I T N MM I E V L E N UR CO T L U EC N I O RIM T A P U D E D R A G E SAUV
M 3
M Convention pour la sauvegarde du Patrimoine culturel immatériel Paris, le 17 octobre 2003
MISC/2003/CLT/CH/14 Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel
La Conférence générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture ci-après dénommée «l’UNESCO», réunie à Paris du vingt-neuf septembre au dix- sept octobre 2003 en sa 32e session, Se référant aux instruments internationaux existants relatifs aux droits de l’homme, en particulier à la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966,
Considérant l’importance du patrimoine culturel immatériel, creuset de la diversité culturelle et garant du développement durable, telle que soulignée par la Recommandation de l’UNESCO sur la sauvegarde de la culture traditionnelle et populaire de 1989, par la Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle de 2001 et par la Déclaration d’Istanbul de 2002 adoptée par la troisième Table ronde des ministres de la culture, Considérant la profonde interdépendance entre le patrimoine culturel immatériel et le patrimoine matériel culturel et naturel,
Reconnaissant que les processus de mondialisation et de transformation sociale, à côté des conditions qu’ils créent pour un dialogue renouvelé entre les communautés, font, tout comme les phénomènes d’intolérance, également peser de graves menaces de dégradation, de disparition et de destruction sur le patrimoine culturel immatériel, en particulier du fait du manque de moyens de sauvegarde de celui-ci, Consciente de la volonté universelle et de la préoccupation partagée de sauvegarder le patrimoine culturel immatériel de l’humanité,
Reconnaissant que les communautés, en particulier les communautés autochtones, les groupes et, le cas échéant, les individus, jouent un rôle important dans la production, la sauvegarde, l’entretien et la recréation du patrimoine culturel immatériel, contribuant ainsi à l’enrichissement de la diversité culturelle et de la créativité humaine, Notant la grande portée de l’activité menée par l’UNESCO afin d’établir des instruments normatifs pour la protection du patrimoine culturel, en particulier la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel de 1972,
M
73
M Notant en outre qu’il n’existe à ce jour aucun instrument multilatéral à caractère contraignant visant à la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel,
Considérant que les accords, recommandations et résolutions internationaux existants concernant le patrimoine culturel et naturel devraient être enrichis et complétés efficacement au moyen de nouvelles dispositions relatives au patrimoine culturel immatériel, Considérant la nécessité de faire davantage prendre conscience, en particulier parmi les jeunes générations, de l’importance du patrimoine culturel immatériel et de sa sauvegarde,
Considérant que la communauté internationale devrait contribuer avec les Etats parties à la présente Convention à la sauvegarde de ce patrimoine dans un esprit de coopération et d’entraide, Rappelant les programmes de l’UNESCO relatifs au patrimoine culturel immatériel, notamment la Proclamation des chefsd’oeuvre du patrimoine oral et immatériel de l’humanité,
Considérant le rôle inestimable du patrimoine culturel immatériel comme facteur de rapprochement, d’échange et de compréhension entre les êtres humains, Adopte, le dix-sept octobre 2003, la présente Convention.
I.
Dispositions générales
M
Article premier : Buts de la Convention
Les buts de la présente Convention sont :
(a) la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel ;
(b) le respect du patrimoine culturel immatériel des communautés, des groupes et des individus concernés ;
(c) la sensibilisation aux niveaux local, national et international à l’importance du patrimoine culturel immatériel et de son appréciation mutuelle ; (d) la coopération et l’assistance internationales.
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M
Article 2 : Définitions
Aux fins de la présente Convention,
1. On entend par «patrimoine culturel immatériel» les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire - ainsi que les instruments, objets, artefacts et espaces culturels qui leur sont associés - que les communautés, les groupes et, le cas échéant, les individus reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. Ce patrimoine culturel immatériel, transmis de génération en génération, est recréé en permanence par les communautés et groupes en fonction de leur milieu, de leur interaction avec la nature et de leur histoire, et leur procure un sentiment d’identité et de continuité, contribuant ainsi à promouvoir le respect de la diversité culturelle et la créativité humaine. Aux fins de la présente Convention, seul sera pris en considération le patrimoine culturel immatériel conforme aux instruments internationaux existants relatifs aux droits de l’homme, ainsi qu’à l’exigence du respect mutuel entre communautés, groupes et individus, et d’un développement durable. 2. Le «patrimoine culturel immatériel», tel qu’il est défini au paragraphe 1 ci-dessus, se manifeste notamment dans les domaines suivants : (a) les traditions et expressions orales, y compris la langue comme vecteur du patrimoine culturel immatériel ; (b) les arts du spectacle ;
(c) les pratiques sociales, rituels et événements festifs ;
(d) les connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers ; (e) les savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel.
M
3. O n entend par «sauvegarde» les mesures visant à assurer la viabilité du patrimoine culturel immatériel, y compris l’identification, la documentation, la recherche, la préservation, la protection, la promotion, la mise en valeur, la transmission, essentiellement par l’éducation formelle et non formelle, ainsi que la revitalisation des différents aspects de ce patrimoine. 4. On entend par «Etats parties» les Etats qui sont liés par la présente Convention et entre lesquels celle-ci est en vigueur.
5. L a présente Convention s’applique mutatis mutandis aux territoires visés à l’article 33 qui en deviennent parties, conformément aux conditions précisées dans cet article. Dans cette mesure, l’expression «Etats parties» s’entend également de ces territoires.
Article 3 : Relation avec d’autres instruments internationaux
Rien dans la présente Convention ne peut être interprété comme :
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M (a) altérant le statut ou diminuant le niveau de protection des biens déclarés du patrimoine mondial dans le cadre de la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel de 1972, auxquels un élément du patrimoine culturel immatériel est directement associé ; ou (b) a ffectant les droits et obligations des Etats parties découlant de tout instrument international relatif aux droits de la propriété intellectuelle ou à l’usage des ressources biologiques et écologiques auquel ils sont parties. II.
Organes de la Convention
Article 4 : Assemblée générale des Etats parties
1. I l est établi une Assemblée générale des Etats parties, ci-après dénommée «l’Assemblée générale». L’Assemblée générale est l’organe souverain de la présente Convention.
2. L’Assemblée générale se réunit en session ordinaire tous les deux ans. Elle peut se réunir en session extraordinaire si elle en décide ainsi ou si demande lui en est adressée par le Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel ou par au moins un tiers des Etats parties. 3. L’Assemblée générale adopte son règlement intérieur.
Article 5 : Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel
M
1. Il est institué auprès de l’UNESCO un Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, ci-après dénommé «le Comité». Il est composé de représentants de 18 Etats parties, élus par les Etats parties réunis en Assemblée générale dès que la présente Convention entrera en vigueur conformément à l’article 34. 2. Le nombre des Etats membres du Comité sera porté à 24 dès lors que le nombre d’Etats parties à la Convention atteindra 50.
Article 6 : Election et mandat des Etats membres du Comité
1. L’élection des Etats membres du Comité doit répondre aux principes de répartition géographique et de rotation équitables.
2. Les Etats membres du Comité sont élus pour un mandat de quatre ans par les Etats parties à la Convention réunis en Assemblée générale.
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M 3. T outefois, le mandat de la moitié des Etats membres du Comité élus lors de la première élection est limité à deux ans. Ces Etats sont désignés par un tirage au sort lors de cette première élection. 4. Tous les deux ans, l’Assemblée générale procède au renouvellement de la moitié des Etats membres du Comité. 5. Elle élit également autant d’Etats membres du Comité que nécessaire pour pourvoir les postes vacants. 6. Un Etat membre du Comité ne peut être élu pour deux mandats consécutifs.
7. L es Etats membres du Comité choisissent pour les représenter des personnes qualifiées dans les divers domaines du patrimoine culturel immatériel.
Article 7 : Fonctions du Comité
Sans préjudice des autres attributions qui lui sont conférées par la présente Convention, les fonctions du Comité sont les suivantes : (a) promouvoir les objectifs de la Convention, encourager et assurer le suivi de sa mise en oeuvre ;
(b) d onner des conseils sur les meilleures pratiques et formuler des recommandations sur les mesures en faveur de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel ;
(c) préparer et soumettre à l’approbation de l’Assemblée générale un projet d’utilisation des ressources du Fonds, conformément à l’article 25 ;
M
(d) s’efforcer de trouver les moyens d’augmenter ses ressources et prendre les mesures requises à cette fin, conformément à l’article 25 ;
(e) p réparer et soumettre à l’approbation de l’Assemblée générale des directives opérationnelles pour la mise en oeuvre de la Convention ; (f) examiner, conformément à l’article 29, les rapports des Etats parties, et en faire un résumé à l’intention de l’Assemblée générale ; (g) e xaminer les demandes présentées par les Etats parties et décider, en conformité avec les critères objectifs de sélection établis par lui et approuvés par l’Assemblée générale :
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M (i) des inscriptions sur les listes et des propositions mentionnées aux articles 16, 17 et 18 ; (ii) de l’octroi de l’assistance internationale conformément à l’article 22.
Article 8 : Méthodes de travail du Comité
1. Le Comité est responsable devant l’Assemblée générale. Il lui rend compte de toutes ses activités et décisions. 2. Le Comité adopte son règlement intérieur à la majorité des deux tiers de ses membres.
3. Le Comité peut créer temporairement les organes consultatifs ad hoc qu’il estime nécessaires à l’exécution de sa tâche.
4. Le Comité peut inviter à ses réunions tout organisme public ou privé, ainsi que toute personne physique, possédant des compétences avérées dans les différents domaines du patrimoine culturel immatériel, pour les consulter sur toute question particulière.
Article 9 : Accréditation des organisations consultatives
1. L e Comité propose à l’Assemblée générale l’accréditation d’organisations non gouvernementales possédant des compétences avérées dans le domaine du patrimoine culturel immatériel. Ces organisations auront des fonctions consultatives auprès du Comité. 2. Le Comité propose également à l’Assemblée générale les critères et modalités de cette accréditation.
M
Article 10 : Le Secrétariat
1. Le Comité est assisté par le Secrétariat de l’UNESCO.
2. Le Secrétariat prépare la documentation de l’Assemblée générale et du Comité, ainsi que le projet d’ordre du jour de leurs réunions et assure l’exécution de leurs décisions. III. Sauvegarde du patrimoine culturel immatériel à l’échelle nationale
Article 11 : Rôle des Etats parties
Il appartient à chaque Etat partie :
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M (a) de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel présent sur son territoire ;
(b) p armi les mesures de sauvegarde visées à l’article 2, paragraphe 3, d’identifier et de définir les différents éléments du patrimoine culturel immatériel présents sur son territoire, avec la participation des communautés, des groupes et des organisations non gouvernementales pertinentes.
Article 12 : Inventaires
1. P our assurer l’identification en vue de la sauvegarde, chaque Etat partie dresse, de façon adaptée à sa situation, un ou plusieurs inventaires du patrimoine culturel immatériel présent sur son territoire. Ces inventaires font l’objet d’une mise à jour régulière.
2. Chaque Etat partie, lorsqu’il présente périodiquement son rapport au Comité, conformément à l’article 29, fournit des informations pertinentes concernant ces inventaires.
Article 13 : Autres mesures de sauvegarde
En vue d’assurer la sauvegarde, le développement et la mise en valeur du patrimoine culturel immatériel présent sur son territoire, chaque Etat partie s’efforce :
(a) d’adopter une politique générale visant à mettre en valeur la fonction du patrimoine culturel immatériel dans la société et à intégrer la sauvegarde de ce patrimoine dans des programmes de planification ; (b) d e désigner ou d’établir un ou plusieurs organismes compétents pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel présent sur son territoire ;
M
(c) d’encourager des études scientifiques, techniques et artistiques ainsi que des méthodologies de recherche pour une sauvegarde efficace du patrimoine culturel immatériel, en particulier du patrimoine culturel immatériel en danger ; (d) d’adopter les mesures juridiques, techniques, administratives et financières appropriées visant à :
(i) f avoriser la création ou le renforcement d’institutions de formation à la gestion du patrimoine culturel immatériel ainsi que la transmission de ce patrimoine à travers les forums et espaces destinés à sa représentation et à son expression ; (ii) g arantir l’accès au patrimoine culturel immatériel tout en respectant les pratiques coutumières qui régissent l’accès à des aspects spécifiques de ce patrimoine ; (iii) établir des institutions de documentation sur le patrimoine culturel immatériel et à en faciliter l’accès.
79
M
Article 14 : Education, sensibilisation et renforcement des capacités
Chaque Etat partie s’efforce, par tous moyens appropriés :
(a) d’assurer la reconnaissance, le respect et la mise en valeur du patrimoine culturel immatériel dans la société, en particulier grâce à : (i) des programmes éducatifs, de sensibilisation et de diffusion d’informations à l’intention du public, notamment des jeunes ; (ii) des programmes éducatifs et de formation spécifiques au sein des communautés et des groupes concernés ;
(iii) des activités de renforcement des capacités en matière de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel et en particulier de gestion et de recherche scientifique ; et (iv) des moyens non formels de transmission des savoirs ;
(b) d e maintenir le public informé des menaces qui pèsent sur ce patrimoine ainsi que des activités menées en application de la présente Convention ; (c) de promouvoir l’éducation à la protection des espaces naturels et des lieux de mémoire dont l’existence est nécessaire à l’expression du patrimoine culturel immatériel.
Article 15 : Participation des communautés, groupes et individus
M
Dans le cadre de ses activités de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, chaque Etat partie s’efforce d’assurer la plus large participation possible des communautés, des groupes et, le cas échéant, des individus qui créent, entretiennent et transmettent ce patrimoine, et de les impliquer activement dans sa gestion.
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IV. Sauvegarde du patrimoine culturel immatériel à l’échelle internationale
Article 16 : Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité
1. P our assurer une meilleure visibilité du patrimoine culturel immatériel, faire prendre davantage conscience de son importance et favoriser le dialogue dans le respect de la diversité culturelle, le Comité, sur proposition des Etats parties concernés, établit, tient à jour et publie une liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
M 2. Le Comité élabore et soumet à l’approbation de l’Assemblée générale les critères présidant à l’établissement, à la mise à jour et à la publication de cette liste représentative.
Article 17 : Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente
1. E n vue de prendre les mesures de sauvegarde appropriées, le Comité établit, tient à jour et publie une liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente, et inscrit ce patrimoine sur la Liste à la demande de l’Etat partie concerné. 2. Le Comité élabore et soumet à l’approbation de l’Assemblée générale les critères présidant à l’établissement, à la mise à jour et à la publication de cette liste.
3. D ans des cas d’extrême urgence - dont les critères objectifs sont approuvés par l’Assemblée générale sur proposition du Comité - celui-ci peut inscrire un élément du patrimoine concerné sur la Liste mentionnée au paragraphe 1 en consultation avec l’Etat partie concerné.
Article 18 : Programmes, projets et activités de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel
1. S ur la base des propositions présentées par les Etats parties, et conformément aux critères qu’il définit et qui sont approuvés par l’Assemblée générale, le Comité sélectionne périodiquement et fait la promotion des programmes, projets et activités de caractère national, sous-régional ou régional de sauvegarde du patrimoine qu’il estime refléter le mieux les principes et objectifs de la présente Convention, en tenant compte des besoins particuliers des pays en développement. 2. A cette fin, il reçoit, examine et approuve les demandes d’assistance internationale formulées par les Etats parties pour l’élaboration de ces propositions.
M
3. L e Comité accompagne la mise en oeuvre desdits programmes, projets et activités par la diffusion des meilleures pratiques selon les modalités qu’il aura déterminées.
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V. Coopération et assistance internationales
Article 19 : Coopération
1. A ux fins de la présente Convention, la coopération internationale comprend en particulier l’échange d’informations et d’expériences, des initiatives communes ainsi que la mise en place d’un mécanisme d’assistance aux Etats parties dans leurs efforts pour sauvegarder le patrimoine culturel immatériel.
M 2. Sans préjudice des dispositions de leur législation nationale et de leurs droit et pratiques coutumiers, les Etats parties reconnaissent que la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel est dans l’intérêt général de l’humanité et s’engagent, à cette fin, à coopérer aux niveaux bilatéral, sous-régional, régional et international.
Article 20 : Objectifs de l’assistance internationale
L’assistance internationale peut être accordée pour les objectifs suivants :
(a) la sauvegarde du patrimoine inscrit sur la Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente ; (b) la préparation d’inventaires au sens des articles 11 et 12 ;
(c) l’appui à des programmes, projets et activités conduits aux niveaux national, sous- régional et régional, visant à la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel ; (d) tout autre objectif que le Comité jugerait nécessaire.
Article 21 : Formes de l’assistance internationale
L’assistance accordée par le Comité à un Etat partie est réglementée par les directives opérationnelles prévues à l’article 7 et par l’accord visé à l’article 24, et peut prendre les formes suivantes : (a) des études concernant les différents aspects de la sauvegarde ;
M
(b) la mise à disposition d’experts et de praticiens ; (c) la formation de tous personnels nécessaires ;
(d) l’élaboration de mesures normatives ou autres ; (e) la création et l’exploitation d’infrastructures ;
(f) la fourniture d’équipement et de savoir-faire ; (g) d’autres formes d’assistance financière et technique y compris, le cas échéant, l’octroi de prêts à faible intérêt et de dons.
82
M
Article 22 : Conditions de l’assistance internationale
1. L e Comité établit la procédure d’examen des demandes d’assistance internationale et précise les éléments de la demande tels que les mesures envisagées, les interventions nécessaires et l’évaluation de leur coût. 2. En cas d’urgence, la demande d’assistance doit être examinée en priorité par le Comité.
3. Afin de prendre une décision, le Comité procède aux études et consultations qu’il juge nécessaires.
Article 23 : Demandes d’assistance internationale
1. C haque Etat partie peut présenter au Comité une demande d’assistance internationale pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel présent sur son territoire. 2. Une telle demande peut aussi être présentée conjointement par deux ou plusieurs Etats parties.
3. La demande doit comporter les éléments d’information prévus à l’article 22, paragraphe 1, et les documents nécessaires.
Article 24 : Rôle des Etats parties bénéficiaires
1. E n conformité avec les dispositions de la présente Convention, l’assistance internationale attribuée est régie par un accord entre l’Etat partie bénéficiaire et le Comité. 2. En règle générale, l’Etat partie bénéficiaire doit participer, dans la mesure de ses moyens, au coût des mesures de sauvegarde pour lesquelles une assistance internationale est fournie.
M
3. L ’Etat partie bénéficiaire remet au Comité un rapport sur l’utilisation de l’assistance accordée en faveur de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel.
83
VI. Fonds du patrimoine culturel immatériel
Article 25 : Nature et ressources du Fonds
1. Il est créé un «Fonds pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel», ci-après dénommé «le Fonds». 2. Le Fonds est constitué en fonds-en-dépôt conformément aux dispositions du Règlement financier de l’UNESCO.
M 3. Les ressources du Fonds sont constituées par : (a) les contributions des Etats parties ;
(b) les fonds alloués à cette fin par la Conférence générale de l’UNESCO ; (c) les versements, dons ou legs que pourront faire : (i) d’autres Etats ;
(ii) les organisations et programmes du système des Nations Unies, notamment le Programme des Nations Unies pour le développement, ainsi que d’autres organisations internationales ; (iii) des organismes publics ou privés ou des personnes privées ;
(d) tout intérêt dû sur les ressources du Fonds ;
(e) le produit des collectes et les recettes des manifestations organisées au profit du Fonds ;
(f) toutes autres ressources autorisées par le règlement du Fonds que le Comité élabore.
4. L’utilisation des ressources par le Comité est décidée sur la base des orientations de l’Assemblée générale.
M
5. L e Comité peut accepter des contributions et autres formes d’assistance fournies à des fins générales ou spécifiques se rapportant à des projets déterminés, pourvu que ces projets soient approuvés par le Comité. 6. L es contributions au Fonds ne peuvent être assorties d’aucune condition politique, économique ou autre qui soit incompatible avec les objectifs recherchés par la présente Convention.
Article 26 : Contributions des Etats parties au Fonds
1. S ans préjudice de toute contribution volontaire supplémentaire, les Etats parties à la présente Convention s’engagent à verser au Fonds, au moins tous les deux ans, une contribution dont le montant, calculé selon un pourcentage uniforme applicable à tous les Etats, sera décidé par l’Assemblée générale. Cette décision de l’Assemblée générale sera prise à la majorité des Etats parties
84
M présents et votants qui n’ont pas fait la déclaration visée au paragraphe 2 du présent article. En aucun cas, cette contribution ne pourra dépasser 1 % de la contribution de l’Etat partie au budget ordinaire de l’UNESCO.
2. Toutefois, tout Etat visé à l’article 32 ou à l’article 33 de la présente Convention peut, au moment du dépôt de ses instruments de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion, déclarer qu’il ne sera pas lié par les dispositions du paragraphe 1 du présent article. 3. U n Etat partie à la présente Convention ayant fait la déclaration visée au paragraphe 2 du présent article s’efforcera de retirer ladite déclaration moyennant notification au Directeur général de l’UNESCO. Toutefois, le retrait de la déclaration n’aura d’effet sur la contribution due par cet Etat qu’à partir de la date d’ouverture de la session suivante de l’Assemblée générale.
4. Afin que le Comité soit en mesure de prévoir ses opérations d’une manière efficace, les contributions des Etats parties à la présente Convention qui ont fait la déclaration visée au paragraphe 2 du présent article, doivent être versées sur une base régulière, au moins tous les deux ans, et devraient se rapprocher le plus possible des contributions qu’ils auraient dû verser s’ils avaient été liés par les dispositions du paragraphe 1 du présent article. 5. T out Etat partie à la présente Convention, en retard dans le paiement de sa contribution obligatoire ou volontaire au titre de l’année en cours et de l’année civile qui l’a immédiatement précédée, n’est pas éligible au Comité, cette disposition ne s’appliquant pas lors de la première élection. Le mandat d’un tel Etat qui est déjà membre du Comité prendra fin au moment de toute élection prévue à l’article 6 de la présente Convention.
Article 27 : Contributions volontaires supplémentaires au Fonds
Les Etats parties désireux de verser des contributions volontaires en sus de celles prévues à l’article 26 en informent le Comité aussitôt que possible afin de lui permettre de planifier ses activités en conséquence.
Article 28 : Campagnes internationales de collecte de fonds
Les Etats parties prêtent, dans la mesure du possible, leur concours aux campagnes internationales de collecte organisées au profit du Fonds sous les auspices de l’UNESCO.
VII. Rapports
M
Article 29 : Rapports des Etats parties
Les Etats parties présentent au Comité, dans les formes et selon la périodicité prescrites par ce dernier, des rapports sur les
85
M dispositions législatives, réglementaires ou autres prises pour la mise en œuvre de la présente Convention. Article 30 : Rapports du Comité
1. S ur la base de ses activités et des rapports des Etats parties mentionnés à l’article 29, le Comité soumet un rapport à chaque session de l’Assemblée générale. 2. Ce rapport est porté à la connaissance de la Conférence générale de l’UNESCO. VIII. Clause transitoire
Article 31 : Relation avec la Proclamation des chefs-d’oeuvre du patrimoine oral et immatériel de l’humanité
1. L e Comité intègre dans la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité les éléments proclamés «Chefsd’oeuvre du patrimoine oral et immatériel de l’humanité» avant l’entrée en vigueur de la présente Convention.
2. L’intégration de ces éléments dans la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité ne préjuge en rien des critères arrêtés conformément à l’article 16, paragraphe 2, pour les inscriptions à venir. 3. Aucune autre Proclamation ne sera faite après l’entrée en vigueur de la présente Convention. IX. Dispositions finales
Article 32 : Ratification, acceptation ou approbation
M
1. L a présente Convention est soumise à la ratification, l’acceptation ou l’approbation des Etats membres de l’UNESCO, conformément à leurs procédures constitutionnelles respectives. 2. Les instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation sont déposés auprès du Directeur général de l’UNESCO.
Article 33 : Adhésion
1. L a présente Convention est ouverte à l’adhésion de tout Etat non membre de l’UNESCO invité à y adhérer par la Conférence générale de l’Organisation. 2. La présente Convention est également ouverte à l’adhésion des territoires qui jouissent d’une complète autonomie interne,
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M reconnue comme telle par l’Organisation des Nations Unies, mais qui n’ont pas accédé à la pleine indépendance conformément à la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale et qui ont compétence pour les matières dont traite la présente Convention, y compris la compétence reconnue pour conclure des traités sur ces matières.
3. L’instrument d’adhésion sera déposé auprès du Directeur général de l’UNESCO.
Article 34 : Entrée en vigueur
La présente Convention entrera en vigueur trois mois après la date du dépôt du trentième instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion, mais uniquement à l’égard des Etats qui auront déposé leurs instruments respectifs de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion à cette date ou antérieurement. Elle entrera en vigueur pour tout autre Etat partie trois mois après le dépôt de son instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion.
Article 35 : Régimes constitutionnels fédératifs ou non unitaires
Les dispositions ci-après s’appliquent aux Etats parties ayant un régime constitutionnel fédératif ou non unitaire :
(a) en ce qui concerne les dispositions de la présente Convention dont l’application relève de la compétence du pouvoir législatif fédéral ou central, les obligations du gouvernement fédéral ou central seront les mêmes que celles des Etats parties qui ne sont pas des Etats fédératifs ; (b) e n ce qui concerne les dispositions de la présente Convention dont l’application relève de la compétence de chacun des Etats, pays, provinces ou cantons constituants, qui ne sont pas en vertu du régime constitutionnel de la fédération tenus de prendre des mesures législatives, le gouvernement fédéral portera, avec son avis favorable, lesdites dispositions à la connaissance des autorités compétentes des Etats, pays, provinces ou cantons pour adoption.
Article 36 : Dénonciation
1. Chacun des Etats parties a la faculté de dénoncer la présente Convention.
2. La dénonciation est notifiée par un instrument écrit déposé auprès du Directeur général de l’UNESCO.
3. La dénonciation prend effet douze mois après réception de l’instrument de dénonciation. Elle ne modifie en rien les obligations financières dont l’Etat partie dénonciateur est tenu de s’acquitter jusqu’à la date à laquelle le retrait prend effet.
M
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M
Article 37 : Fonctions du dépositaire
Le Directeur général de l’UNESCO, en sa qualité de dépositaire de la présente Convention, informe les Etats membres de l’Organisation, les Etats non membres visés à l’article 33, ainsi que l’Organisation des Nations Unies, du dépôt de tous les instruments de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion mentionnés aux articles 32 et 33, de même que des dénonciations prévues à l’article 36.
Article 38 : Amendements
1. T out Etat partie peut, par voie de communication écrite adressée au Directeur général, proposer des amendements à la présente Convention. Le Directeur général transmet cette communication à tous les Etats parties. Si, dans les six mois qui suivent la date de transmission de la communication, la moitié au moins des Etat parties donne une réponse favorable à cette demande, le Directeur général présente cette proposition à la prochaine session de l’Assemblée générale pour discussion et éventuelle adoption. 2. Les amendements sont adoptés à la majorité des deux tiers des Etats parties présents et votants.
3. L es amendements à la présente Convention, une fois adoptés, sont soumis aux Etats parties pour ratification, acceptation, approbation ou adhésion.
4. Pour les Etats parties qui les ont ratifiés, acceptés, approuvés ou y ont adhéré, les amendements à la présente Convention entrent en vigueur trois mois après le dépôt des instruments visés au paragraphe 3 du présent article par les deux tiers des Etat parties. Par la suite, pour chaque Etat partie qui ratifie, accepte, approuve un amendement ou y adhère, cet amendement entre en vigueur trois mois après la date de dépôt par l’Etat partie de son instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion.
5. L a procédure établie aux paragraphes 3 et 4 ne s’applique pas aux amendements apportés à l’article 5 relatif au nombre des Etats membres du Comité. Ces amendements entrent en vigueur au moment de leur adoption.
M
6. U n Etat qui devient partie à la présente Convention après l’entrée en vigueur d’amendements conformément au paragraphe 4 du présent article est, faute d’avoir exprimé une intention différente, considéré comme étant : (a) partie à la présente Convention ainsi amendée ; et
(b) partie à la présente Convention non amendée à l’égard de tout Etat partie qui n’est pas lié par ces amendements.
Article 39 : Textes faisant foi
La présente Convention est établie en anglais, en arabe, en chinois, en espagnol, en français et en russe, les six textes faisant également foi.
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M Article 40 : Enregistrement Conformément à l’article 102 de la Charte des Nations Unies, la présente Convention sera enregistrée au Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies à la requête du Directeur général de l’UNESCO. Convention-cadre du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour la société
M
89
M u d e r d a c n o i t n e v e n p o o r C u E ' l e e n i d o l i m e i r s t n a o p C u d r u e l a ĂŠ v t ĂŠ a i l c o s sur a l r u o p l e r u t cul
M 3
5 0 0 2 . X . 7 2 , ro
M Convention-cadre du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour la société Faro, 27.X.2005 Préambule
Les Etats membres du Conseil de l’Europe, signataires de la présente Convention,
Considérant que l’un des buts du Conseil de l’Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses membres, afin de sauvegarder et de promouvoir les idéaux et les principes fondés sur le respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit, qui sont leur patrimoine commun ; Reconnaissant la nécessité de placer la personne et les valeurs humaines au centre d’un concept élargi et transversal du patrimoine culturel ; Mettant en exergue la valeur et le potentiel du patrimoine culturel bien géré en tant que ressource de développement durable et de qualité de la vie dans une société en constante évolution ;
Reconnaissant que toute personne a le droit, tout en respectant les droits et libertés d’autrui, de s’impliquer dans le patrimoine culturel de son choix comme un aspect du droit de prendre librement part à la vie culturelle consacré par la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies (1948) et garanti par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966) ; Convaincus du besoin d’impliquer chacun dans le processus continu de définition et de gestion du patrimoine culturel ;
M
Convaincus du bien-fondé des politiques du patrimoine et des initiatives pédagogiques qui traitent équitablement tous les patrimoines culturels et promeuvent ainsi le dialogue entre les cultures et entre les religions ; Se référant aux divers instruments du Conseil de l’Europe, en particulier la Convention culturelle européenne (1954), la Convention pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l’Europe (1985), la Convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique (1992, révisée) et la Convention européenne du paysage (2000) ;
Certains de l’intérêt existant à créer un cadre paneuropéen de coopération qui vienne favoriser le processus dynamique de mise en application effective de ces principes ; Sont convenus de ce qui suit :
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M Titre I – Objectifs, définitions et principes
Article 1 – Objectifs de la Convention
Les Parties à la présente Convention conviennent :
a d e reconnaître que le droit au patrimoine culturel est inhérent au droit de participer à la vie culturelle, tel que défini dans la Déclaration universelle des droits de l’homme; b de reconnaître une responsabilité individuelle et collective envers ce patrimoine culturel;
c d e faire ressortir que la conservation du patrimoine culturel et son utilisation durable ont comme but le développement humain et la qualité de la vie; d de prendre les mesures nécessaires pour l’application des dispositions de la présente Convention en ce qui concerne :
– l ’apport du patrimoine culturel dans l’édification d’une société pacifique et démocratique ainsi que dans le processus de développement durable et de promotion de la diversité culturelle;
Aux fins de la présente Convention,
M
a l e patrimoine culturel constitue un ensemble de ressources héritées du passé que des personnes considèrent, par-delà le régime de propriété des biens, comme un reflet et une expression de leurs valeurs, croyances, savoirs et traditions en continuelle évolution. Cela inclut tous les aspects de l’environnement résultant de l’interaction dans le temps entre les personnes et les lieux ;
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– la meilleure synergie des compétences entre tous les acteurs publics, institutionnels et privés concernés.
Article 2 – Définitions
b u ne communauté patrimoniale se compose de personnes qui attachent de la valeur à des aspects spécifiques du patrimoine culturel qu’elles souhaitent, dans le cadre de l’action publique, maintenir et transmettre aux générations futures.
Article 3 – Patrimoine commun de l’Europe
Les Parties conviennent de promouvoir une reconnaissance du patrimoine commun de l’Europe qui recouvre :
M a t ous les patrimoines culturels en Europe constituant dans leur ensemble une source partagée de mémoire, de compréhension, d’identité, de cohésion et de créativité; et, b l es idéaux, les principes et les valeurs, issus de l’expérience des progrès et des conflits passés, qui favorisent le développement d’une société de paix et de stabilité fondée sur le respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit.
Article 4 – Droits et responsabilités concernant le patrimoine culturel
Les Parties reconnaissent :
a q ue toute personne, seule ou en commun, a enrichissement ;
le
droit de
bénéficier du patrimoine culturel et de contribuer à son
b q u’il est de la responsabilité de toute personne, seule ou en commun, de respecter aussi bien le patrimoine culturel des autres que son propre patrimoine et en conséquence le patrimoine commun de l’Europe;
c q ue l’exercice du droit au patrimoine culturel ne peut faire l’objet que des seules restrictions qui sont nécessaires dans une société démocratique à la protection de l’intérêt public, des droits et des libertés d’autrui.
Article 5 – Droit et politiques du patrimoine culturel
Les Parties s’engagent :
a à reconnaître l’intérêt public qui s’attache aux éléments du patrimoine culturel en fonction de leur importance pour la société;
M
b à valoriser le patrimoine culturel à travers son identification, son étude, son interprétation, sa protection, sa conservation et sa présentation;
93
c à assurer, dans le contexte particulier de chaque Partie, l’existence de mesures législatives relatives aux modalités d’exercice du droit au patrimoine culturel défini à l’article 4; d à favoriser un environnement économique et social propice à la participation aux activités relatives au patrimoine culturel ;
e à promouvoir la protection du patrimoine culturel comme un élément majeur des objectifs conjugués du développement durable, de la diversité culturelle et de la création contemporaine;
M f à reconnaître la valeur du patrimoine culturel situé sur les territoires relevant de leur juridiction, quelle que soit son origine; g à élaborer des stratégies intégrées pour faciliter la réalisation des dispositions de la présente Convention.
Article 6 – Effets de la Convention
Aucune des dispositions de la présente Convention ne sera interprétée :
a c omme limitant ou portant atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales qui pourraient être sauvegardés par des instruments internationaux, notamment par la Déclaration universelle des droits de l’homme et par la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales ; b c omme affectant les dispositions plus favorables concernant le patrimoine culturel et l’environnement qui figurent dans d’autres instruments juridiques nationaux ou internationaux ; c comme créant des droits exécutoires.
Titre II – Apport du patrimoine culturel à la société et au développement humain
Article 7 – Patrimoine culturel et dialogue
M
Les Parties s’engagent, à travers l’action des pouvoirs publics et des autres organes compétents :
a à encourager la réflexion sur l’éthique et sur les méthodes de présentation du patrimoine culturel ainsi que le respect de la diversité des interprétations;
b à établir des processus de conciliation pour gérer de façon équitable les situations où des valeurs contradictoires sont attribuées au même patrimoine par diverses communautés;
c à accroître la connaissance du patrimoine culturel comme une ressource facilitant la coexistence pacifique en promouvant la confiance et la compréhension mutuelle dans une perspective de résolution et de prévention des conflits; d à intégrer ces démarches dans tous les aspects de l’éducation et de la formation tout au long de la vie.
94
M
Article 8 – Environnement, patrimoine et qualité de la vie
Les Parties s’engagent à utiliser tous les aspects patrimoniaux de l’environnement culturel :
a p our enrichir les processus du développement économique, politique, social et culturel, et l’aménagement du territoire, en recourant, si nécessaire, à des études d’impact culturel et à des stratégies de réduction des dommages;
b p our promouvoir une approche intégrée des politiques relatives à la diversité culturelle, biologique, géologique et paysagère visant un équilibre entre ces composantes; c pour renforcer la cohésion sociale en favorisant le sentiment de responsabilité partagée envers l’espace de vie commun;
d p our promouvoir un objectif de qualité pour les créations contemporaines s’insérant dans l’environnement sans mettre en péril ses valeurs culturelles.
Article 9 – Usage durable du patrimoine culturel
Pour faire perdurer le patrimoine culturel, les Parties s’engagent :
a à promouvoir le respect de l’intégrité du patrimoine culturel en s’assurant que les décisions d’adaptation incluent une compréhension des valeurs culturelles qui lui sont inhérentes; b à définir et à promouvoir des principes de gestion durable, et à encourager l’entretien;
c à s’assurer que les besoins spécifiques de la conservation du patrimoine culturel sont pris en compte dans toutes les réglementations techniques générales;
M
d à promouvoir l’utilisation des matériaux, des techniques et du savoir-faire issus de la tradition, et à explorer leur potentiel dans la production contemporaine;
95
e à promouvoir la haute qualité des interventions à travers des systèmes de qualification et d’accréditation professionnelles des personnes, des entreprises et des institutions.
Article 10 – Patrimoine culturel et activité économique
En vue de valoriser le potentiel du patrimoine culturel en tant que facteur de développement économique durable, les Parties s’engagent :
M a à accroître l’information sur le potentiel économique du patrimoine culturel et à l’utiliser ;
b à prendre en compte le caractère spécifique et les intérêts du patrimoine culturel dans l’élaboration des politiques économiques ; et c à veiller à ce que ces politiques respectent l’intégrité du patrimoine culturel sans compromettre ses valeurs intrinsèques. Titre III – Responsabilité partagée envers le patrimoine culturel et participation du public
Article 11 – Organisation des responsabilités publiques en matière de patrimoine culturel
Dans la gestion du patrimoine culturel, les Parties s’engagent :
a à promouvoir une approche intégrée et bien informée de l’action des pouvoirs publics dans tous les secteurs et à tous les niveaux; b à développer les cadres juridiques, financiers et professionnels qui permettent une action combinée de la part des autorités publiques, des experts, des propriétaires, des investisseurs, des entreprises, des organisations non gouvernementales et de la société civile; c à développer des pratiques innovantes de coopération des autorités publiques avec d’autres intervenants;
d à respecter et à encourager des initiatives bénévoles complémentaires à la mission des pouvoirs publics;
M
e à encourager les organisations non gouvernementales concernées par la conservation du patrimoine d’intervenir dans l’intérêt public.
Article 12 – Accès au patrimoine culturel et participation démocratique
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Les Parties s’engagent :
a à encourager chacun à participer :
– au processus d’identification, d’étude, d’interprétation, de protection, de conservation et de présentation du patrimoine culturel ; – à la réflexion et au débat publics sur les chances et les enjeux que le patrimoine culturel représente ;
M b à prendre en considération la valeur attachée au patrimoine culturel auquel s’identifient les diverses communautés patrimoniales ; c à reconnaître le rôle des organisations bénévoles à la fois comme partenaire d’intervention et comme facteurs de critique constructive des politiques du patrimoine culturel ;
d à prendre des mesures pour améliorer l’accès au patrimoine, en particulier auprès des jeunes et des personnes défavorisées, en vue de la sensibilisation à sa valeur, à la nécessité de l’entretenir et de le préserver, et aux bénéfices que l’on peut en tirer.
Article 13 – Patrimoine culturel et savoir
Les Parties s’engagent :
a à faciliter l’insertion de la dimension patrimoniale culturelle à tous les niveaux de l’enseignement, pas nécessairement en tant qu’objet d’étude spécifique, mais comme un moyen propice d’accès à d’autres domaines de connaissance; b à renforcer le lien entre l’enseignement dans le domaine du patrimoine culturel et la formation continue;
c à encourager la recherche interdisciplinaire sur le patrimoine culturel, les communautés patrimoniales, l’environnement et leurs relations; d à encourager la formation professionnelle continue et l’échange des connaissances et de savoir-faire à l’intérieur et à l’extérieur du système d’enseignement.
Article 14 – Patrimoine culturel et société de l’information
M
Les Parties s’engagent à développer l’utilisation des techniques numériques pour améliorer l’accès au patrimoine culturel et aux bénéfices qui en découlent :
a e n encourageant les initiatives qui favorisent la qualité des contenus et tendent à garantir la diversité des langues et des cultures dans la société de l’information; b e n favorisant des normes compatibles à l’échelon international relatives à l’étude, à la conservation, à la mise en valeur et à la sécurité du patrimoine culturel, tout en luttant contre le trafic illicite en matière de biens culturels;
c en visant à lever les obstacles en matière d’accès à l’information relative au patrimoine culturel, en particulier à des fins pédagogiques, tout en protégeant les droits de propriété intellectuelle;
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M d e n ayant conscience que la création de contenus numériques relatifs au patrimoine ne devrait pas nuire à la conservation du patrimoine existant. Titre IV – Suivi et coopération
Article 15 – Engagement des Parties
Les Parties s’engagent : a à développer, à travers le Conseil de l’Europe, une fonction de suivi portant sur les législations, les politiques et les pratiques en matière de patrimoine culturel, conformément aux principes énoncés par la présente Convention; b à maintenir, à développer et à alimenter en données un système partagé d’information, accessible au public, qui facilite l’évaluation de la mise en œuvre par chaque Partie des engagements résultant de la présente Convention.
Article 16 – Mécanisme de suivi
a L e Comité des Ministres, conformément à l’article 17 du Statut du Conseil de l’Europe, instituera un comité approprié ou désignera un comité déjà existant chargé du suivi de l’application de la Convention et habilité à définir les modalités d’exercice de sa mission; b Le comité ainsi désigné :
– établit des règles de procédure en tant que de besoin;
M
– s upervise le système partagé d’information visé à l’article 15 en établissant un rapport d’ensemble sur la mise en œuvre des engagements liés à la Convention;
– f ormule un avis consultatif sur toute question d’une ou de plusieurs Parties relative à l’interprétation de la Convention, en prenant en considération tous les instruments juridiques du Conseil de l’Europe; – à l’initiative d’une ou de plusieurs Parties, entreprend une évaluation de l’un ou l’autre aspect de leur application de la Convention;
– e ncourage la mise en œuvre transsectorielle de la présente Convention en collaborant avec d’autres comités et en participant à d’autres initiatives du Conseil de l’Europe; – fait rapport au Comité des Ministres sur ses activités.
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M Le comité peut associer à ses travaux des experts et des observateurs.
Article 17 – Coopération à travers les activités de suivi
Les Parties s’engagent à coopérer entre elles et à travers le Conseil de l’Europe dans la poursuite des objectifs et des principes de cette Convention, particulièrement dans la promotion de la reconnaissance du patrimoine commun de l’Europe : a en mettant en place des stratégies de collaboration répondant aux priorités retenues dans le processus de suivi;
b e n promouvant les activités multilatérales et transfrontalières, et en développant des réseaux de coopération régionale afin de mettre en œuvre ces stratégies; c en échangeant, en développant, en codifiant et en assurant la diffusion de bonnes pratiques;
d en informant le public sur les objectifs et la mise en œuvre de la Convention. Des Parties peuvent, par accord mutuel, établir des arrangements financiers facilitant la coopération internationale. Titre V – Clauses finales
Article 18 – Signature et entrée en vigueur
a La présente Convention est ouverte à la signature des Etats membres du Conseil de l’Europe.
b E lle sera soumise à ratification, acceptation ou approbation. Les instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe.
M
c L a présente Convention entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de trois mois après la date à laquelle dix Etats membres du Conseil de l’Europe auront exprimé leur consentement à être liés par la Convention conformément aux dispositions du paragraphe précédent.
99
d E lle entrera en vigueur à l’égard de tout Etat signataire qui exprimerait ultérieurement son consentement à être lié par elle le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de trois mois après la date du dépôt de l’instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation.
Article 19 – Adhésion
a Après l’entrée en vigueur de la présente Convention, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe pourra inviter tout Etat
M non membre du Conseil de l’Europe, ainsi que la Communauté européenne, à adhérer à la présente Convention par une décision prise à la majorité prévue à l’article 20.d du Statut du Conseil de l’Europe, et à l’unanimité des représentants des Etats contractants ayant le droit de siéger au Comité des Ministres.
b P our tout Etat adhérent, ou pour la Communauté européenne en cas d’adhésion, la Convention entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de trois mois après la date de dépôt de l’instrument d’adhésion près le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe.
Article 20 – Application territoriale
a T out Etat peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion, désigner le ou les territoires auxquels s’appliquera la présente Convention.
b T out Etat peut, à tout autre moment par la suite, par une déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, étendre l’application de la présente Convention à tout autre territoire désigné dans la déclaration. La Convention entrera en vigueur à l’égard de ce territoire le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de trois mois après la date de réception de la déclaration par le Secrétaire Général. c T oute déclaration faite en vertu des deux paragraphes précédents pourra être retirée, en ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, par notification adressée au Secrétaire Général. Le retrait prendra effet le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de six mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire Général.
Article 21 – Dénonciation
M
a T oute Partie peut, à tout moment, dénoncer la présente Convention en adressant une notification au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe.
b L a dénonciation prendra effet le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de six mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire Général.
Article 22 – Amendements
a Toute Partie et le comité cité à l’article 16 peuvent présenter des amendements à la présente Convention.
b T oute proposition d’amendement est notifiée au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe qui la communique aux Etats
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M membres du Conseil de l’Europe, aux autres Parties et à chaque Etat non membre et la Communauté européenne invités à adhérer à la présente Convention conformément aux dispositions de l’article 19.
c L e comité examine tout amendement présenté et soumet au Comité des Ministres, pour adoption, le texte retenu par une majorité fixée aux trois quarts des représentants des Parties. Après son adoption par le Comité des Ministres à la majorité prévue à l’article 20.d du Statut du Conseil de l’Europe, et à l’unanimité par les Etats Parties ayant le droit de siéger au Comité des Ministres, le texte sera envoyé aux Parties pour acceptation.
d T out amendement entrera en vigueur, pour les Parties qui l’acceptent, le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de trois mois après la date à laquelle dix Etats membres du Conseil de l’Europe auront notifié au Secrétaire Général leur acceptation. L’amendement entrera en vigueur, pour toute Partie qui exprimerait ultérieurement son acceptation, le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de trois mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire Général de l’acceptation.
Article 23 – Notifications
Le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe notifiera aux Etats membres du Conseil de l’Europe, à tout Etat ayant adhéré ou ayant été invité à adhérer à la présente Convention, et à la Communauté européenne ayant adhéré ou été invitée à adhérer : a toute signature;
b le dépôt de tout instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion ;
c toute date d’entrée en vigueur de la présente Convention conformément à ses articles 18, 19 et 20 ;
M
d t out amendement proposé à la présente Convention conformément à son article 22 ainsi que la date d’entrée en vigueur dudit amendement ; e tout autre acte, déclaration, notification ou communication ayant trait à la présente Convention. En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente Convention.
Fait à Faro, le 27 octobre 2005, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l’Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats membres du Conseil de l’Europe et à tout Etat ou la Communauté européenne invité à adhérer à celle-ci.
101
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IMOIN R T A UP
M
M 6ÈME CONFÉRENCE DES MINISTRES DU PATRIMOINE CULTUREL (23-24 AVRIL 2015) « Le patrimoine culturel au 21e s. pour mieux vivre ensemble. Vers une stratégie commune pour l’Europe » DECLARATION DE NAMUR
LES MINISTRES DES ETATS PARTIES CONTRACTANTES À LA CONVENTION CULTURELLE EUROPEENNE REUNIS A NAMUR les 23 et 24 avril 2015,
i. Saluant l’initiative du Gouvernement belge de les réunir quatorze a ns après la conférence de Portoroz (Slovénie) en 2001 ; ii Reconnaissant la contribution décisive du Conseil de l’Europe, nota mment par le biais de ses conventions pour la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine élaborées depuis plus de 40 ans et qui témoignent de la sorte d’un domaine d’excellence spécifiquement européen ; iii. Saluant les efforts déployés par l’Union européenne pour une mei lleure prise en compte du patrimoine culturel dans ses domaines de compétences, telle qu’ell e résulte notamment de la Communication de la Commission européenne du 22 juillet 2014 « Ver s une approche intégrée du patrimoine culturel européen » et des conclusions sur la gouvernanc e participative du patrimoine culturel adoptées le 25 novembre 2014 par le Conseil des Ministres d e l’Union Européenne, et la convergence de ces efforts avec les travaux du Conseil de l’Europe ; iv. Voulant ainsi marquer les 40 ans de la Charte européenne du patrimoi ne architectural adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe le 26 septembre 1975, les 30 ans de la Convention pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l’Europe, les 15 ans de la Convention européenne du paysage et les 10 ans de la Convention-cadre sur la valeur du patrimoine culturel pour la société ; v. Conscients que le patrimoine culturel est un ensemble de ressources héritées du passé que des personnes considèrent, par-delà le régime de propriété des biens, comme un reflet et une expression de leurs valeurs, croyances, savoirs et traditions en continuelle évolution et ceci incluant tous les aspects de l’environnement résultant de l’interaction dans le temps entre les hommes et les lieux ; vi. Constatant avec satisfaction le soutien à la présente démarche des associés aux travaux préparatoires ; acteurs de la société civile vii. Rappelant la contribution de la culture et du patrimoine culturel au développement durable dont ils constituent le « quatrième pilier » ; viii. Résolus à poursuivre et approfondir leur coopération afin d apporter des réponses à la hauteur des défis auxquels la conservation, la mise en valeur et l’usage du pa trimoine en tant que droit fondamental sont confrontés à l’orée du 21e siècle ;
M
103
M I.
ADOPTENT LA DECLARATION SUIVANTE :
1. Les changements climatiques, les changements démographiques, les mouvements migratoires, les crises politiques, économiques, financières et sociales ont des impacts forts sur nos sociétés et sur le patrimoine. Nous devons être conscients de ces défis, et travailler ensemble pour empêcher un développement dans le cadre duquel nos sociétés sont fragilisées, manque nt de repères, subissent une tentation de repli identitaire, connaissent un affaiblissement des solidarités traditionnelles et risquent parfois l’éclatement ou l’implosion ; 2. Le patrimoine culturel est un élément constitutif primordial de l’identité euro péenne ; il relève de l’intérêt général et sa transmission aux générations futures fait l’objet d’une responsabilité partagée ; il est une ressource unique, fragile, non renouvelable et non délocalisable, contribuant à l’attractivité et au développement de l’Europe et, de manière essentielle, à la mise en place d ’une société plus pacifique, plus juste et solidaire ; 3. Une stratégie pour redéfinir la place et le rôle du patrimoine culturel en Euro pe est dès lors une réponse nécessaire aux européen ; enjeux actuels en regard de l’évolution du contexte socio-économique et culturel 4.
Cette Stratégie :
4.1 doit s’appuyer sur les valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe : la démocratie, le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, l’ouverture et le dialogue, l’égale dignité de toutes les personnes, le respect mutuel et la prise en compte des diversités ; 4.2 doit promouvoir une approche partagée et fédératrice de la gestion du patrimoine culturel, en s’appuyant sur un cadre légal efficace assurant la conservation intégrée du patrimoine et en associant les principaux acteurs, institutionnels ou non, les représentants des professionnels et de la société civile, aux niveaux international, national et local ; 4.3 doit proposer une vision et un cadre de travail pour les dix prochaines année , identifier des actions et des projets susceptibles d’avoir un impact durable dans les Etats membres et être mise en œuvre en s’appuyant prioritairement sur les instruments et les outills existants, notamment les conventions, en les actualisant et en les développant, si nécessaire ; 4.4 doit s’articuler autour des axes prioritaires suivants : • la contribution du patrimoine à l’amélioration de la qualité de vie et du cadre de vie des citoyens européens. • la contribution du patrimoine à l’attractivité et à la prospérité de l’Europe, basée sur l’expression de ses identités et de sa diversité culturelle ; • l’éducation et la formation au long de la vie ;
M
104
M
• la gouvernance participative dans le domaine du patrimoine ;
4.5 doit s’inspirer des propositions de thématiques telles qu’identifiées dans les lignes directrices de laStratégie du patrimoine culturel en Europe pour le 21e siècle, jointe s à l’annexe à la présente Déclaration dont elles font partie intégrante ;
4.6 doit inclure des méthodes de suivi et d’évaluation adaptées s’appuyant sur les instruments et outils existants, notamment dans les conventions ;
II. DEMANDENT AU COMITE DES MINISTRES DU CONSEIL DE L’EUROPE :
5. de confier l’élaboration et le suivi de la mise en œuvre de cette Stratégie au Comité directeur de la Culture, du Patrimoine et du Paysage du Conseil de l’Europe, en lui donnant les moyens d’achever cette tâche ; 6. de prendre à cet effet des décisions appropriées dans le cadre du programme et du budget du Conseil de l’Europe pour 2016-2017 ;
7. de l’adopter de préférence en tant que Recommandation du Comité des Ministres aux Etats membres et ce, avant la fin de 2016 ;
III. SOUHAITENT QUE LES EFFORTS EN FAVEUR D’UNE STRATEGIE EUROPE ENNE DU PATRIMOINE FEDERENT LE PLUS GRAND NOMBRE D’ACTEURS ET À CETTE FIN :
8. invitent l’Union européenne à s’associer à l’élaboration de la Stratégie et à contribuer à sa mise en œuvre, tant au niveau européen qu’à celui des Etats membres ;
9. saluent, au titre de bonne pratique, l’initiative de l’Union européenne d’organiiser une année européenne du patrimoine et demandent que le Conseil de l’Europe et l’ensemble des Éttats Parties contractantes à la Convention culturelle européenne soient invités à y participer ;
10. invitent les Etats membres qui ne l’ont pas encore fait à signer et ratif ier les quatre conventions suivantes : la Convention pour la sauvegarde du patrimoine architectural européenne pour la protection du patrimoine archéologique (révisée), la de l’Europe, la Convention européenne du paysage, la Convention-cadre sur la valeur du patrimoine culture pour la société ; 11. invitent en outre l’UNESCO et l’ICCROM à collaborer de manière plus large avec les institutions européennes afin
M
105
M de favoriser l’échange d’expériences et de bonnes pratiques, et de créer des synergies avec les autres régions du monde ;
12. rappellent l‘importance de développer cette future stratégie avec le concours des acteurs de la société civile et les organisations qui œuvrent en matière de patrimoine, en ce compris les réseaux de Villes. Annexe
Lignes directrices de la Stratégie du patrimoine culturel en Europe pour le 21e siècle
Il reviendra à chaque pays de mettre la Stratégie en œuvre en fonction des com pétences et responsabilités propres à chaque niveau de gouvernement et des législations y afférentes, en privilégiant parmi les thématiques et les pistes d’actions préconisées celles qui répondent davantage à leurs préoccupati ons ou objectifs prioritaires, tout en s’efforçant de mettre en œuvre l’ensemble de la Stratégie de façon harmonieus e, intégrée et cohérente. Les lignes directrices qui suivent prennent en compte des hématiques consensue lles et fédé atrices tout en respectant les différences de perception du patrimoine et de certaines problématiques par les différents Etats et les différents acteurs. Elles identifient des axes d’actions prioritaires à décliner de manière opérationnelle, et doivent s’appuyer sur les outils du Conseil de l’Europe à disposition :
• les conventions, les résolutions et les recommandations développées depuis 1 969 par le Conseil de l’Europe ; • les bases de données et de connaissance et les réseaux institutionnels (HEREIN, ELCIS et Compendium des politiques culturelles) ; • les actions menées avec les entités locales dans l’esprit de la Convention-cadre de Faro; • le Programme de Coopération et d’Assistance Techniques relatives à la conser vation intégrée du patrimoine culturel ; • les réflexions en cours sur la contribution du numérique à toutes les thématiques proposées. Il convient de tenir compte également des programmes de l’Union européenne qu i concernent le patrimoine culturel, à travers ses différentes politiques sectorielles. Les thématiques consensuelles et fédératrices proposées sont :
• PATRIMOINE ET CITOYENNETE
o Enjeux : établir une bonne gouvernance et favoriser une gestion participative pour l’identification et la gestion du patrimoine culturel ; optimaliser la mise en œuvre des conventions ; favoriser une approche sensorielle et sensible du patrimoine plus en concordance avec le vécu de la population ; o Lignes directrices : faire progresser l’éducation et la formation pour tous en ma tière de patr moine culturel
M
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M ; faire travailler ensemble tous les partenaires ; impliquer davantage la société civile et les élus ; sensibiliser et conscientiser aux droits et responsabilités du patrimoine ; permettre aux citoyens de s’approprier ou se réapproprier le patrimoine ; poursuivre les actions menées dans l’esprit de Faro ; dialoguer et établir des partenariats avec les institutions nationales et internationales, et avec les ONG ; contextualiser les conventions et autres textes de référence en veillant à une meilleure mise en œ uvre.
• PATRIMOINE ET SOCIETES
• PATRIMOINE ET ECONOMIE
o Enjeux : vivre en paix ; améliorer la qualité de vie et le cadre de vie ; contribuer au bien-être des personnes, à la bonne santé des individus ; préserver la mémoire collective ; o Lignes directrices : prendre en compte le patrimoine du quotidien de la popula tion qui constitue son cadre de vie primordial ; prendre appui sur le patrimoine pour relier, voire réconcili er l’être humain avec la vie, avec ses semblables, avec son environnement et son histoire ; reconnaître le patrimoine culturel comme vecteur de transmission privilégié des valeurs à travers les générations ; favo riser la prise en charge du patrimoine par des acteurs et des communautés de citoyens plus autonomes , avec l’appui des experts ; lutter contre l’uniformisation.
o Enjeux : construire une société plus inclusive et cohésive ; développer la prosp érité ; favoriser le bien-être public ; o Lignes directrices : prendre en compte le patrimoine comme source de réflexion et d’inspiration ; utiliser les ressources patrimoniales de manière respectueuse, créative et innovante ; favoriser l’attractivité de l’Europe et son expertise en matière de patrimoine culturel ; atténuer l’usage intensif et l’exploitation excessive de certains sites patrimoniaux ; diversifier l’offre de sites patrimoniaux ; développer l’accès au patrimoine culturel y compris au moyen de l’e-contenu ; favoriser l’utilisation du patrimoine culturel pour l’éducation, la recherche, la coopération scientifique et technique, et le tourisme ; élargir le champ des itinéraires culturels européens ; favoriser les rapprochements culturels entre citoyens et communautés (jumelages) basés sur le patrimoine culturel ; mettre à jour le portail des Journées européennes du patrimoine en tant que plate-forme e-patrimoine ; promouvoir les techniques de réalité augmentée fondées sur une véritable connaissance du patrimoine culturel ; envisager des modèles ou des instruments de financement alternatif ; encourager la réutilisation et la régénération du patrimoine comme créateur d’emplois et utilisateur des ressources locales.
• PATRIMOINE ET CONNAISSANCES
o Enjeux : favoriser une société de la connaissance ; veiller au maintien et à la transmission des connaissances, des méthodes et des savoir-faire ; conscientiser et responsabili ser au patrimoine culturel et aux valeurs qu’il
M
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• PATRIMOINE ET GOUVERNANCE TERRITORIALE
véhicule ; assurer un accès à la formation tout au long de la vie ; combattre le « dumping social » en matière de main-d’œuvre pour les travaux de restauration ; o Lignes directrices : soutenir l’échange des connaissances, des idées et des bonnes pratiques; développer et coordonner les actions de l’Union européenne, du Conseil de l’Europe et de l’ICCROM ; favoriser l’échange d’experts et d’expertises, des apprentis, des chercheurs, des étudiants (élargir les programmes d’échange existants) et des volontaires (actifs sur chantiers archéologique s ou de restauration des monuments par exemple) ; travailler sur l’élaboration de politiques fondées sur des preuves.
o Enjeux : définir le rôle des institutions et la responsabilité des citoyens à trava iller ensemble pour assurer l’amélioration du cadre et de la qualité de la vie de tous ; mettre en place une gestion patrimoniale au service du vivre ensemble, du bien-être et du développement ; o Lignes directrices : dans l’esprit de la convention de Florence, affirmer le territo ire comme une entité qui se distingue par ses caractéristiques patrimoniales et qui peut dépasser les frontières : spécificités paysagères et environnementales, identité forte, sentiment d’appartenance affirmé par l’ensemble d’une population locale, etc. ; favoriser la spécificité comme force motrice de la transformation positive du cadre de vie ; promouvoir une bonne gouvernance innovante des territoires basée sur le patrimoine comme ressource ; promouvoir la coopération entre les territoires dans transfrontalier.
• PATRIMOINE ET DEVELOPPEMENT DURABLE
o Enjeux : donner les moyens adaptés au secteur public pour être plus efficace en vue de l’amélioration de la qualité de la vie et du cadre de vie ; o Lignes directrices : améliorer la capacité de gestion du patrimoine culturel par lle secteur public pour gérer le patrimoine comme une véritable ressource locale et régionale ; promouvoir le patrimoine culturel comme élément de cohésion sociale, territoriale et de qualité des paysages ; renforcer l e rôle du patrimoine culturel dans l’aménagement des espaces publics, analyser les risques pour le patrimoine culturel ; élargir le champ des missions d’assistance technique et de coopération du Conseil de l’Europe et assurer plus de permanence sur le terrain ; s’appuyer sur les projets européens (Union européenne) en soulignant l’importance du patrimoine pour les autres politiques sectorielles ; dévelop per des partenariats avec l’UNESCO, l’Union européenne, ICCROM en matière de gestion des risques pour le patrimoine culturel.
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M ! E L B I S I V E R P
N E I M I D I ’ T L O U R I Q O U V A S E U PRE Q
S I R L S A I E N D O N M I O I R T T S A E P G E LA D N O M E L DANS B e d es
n o h p o c n a r F l b s s e t a s i s v e i l l h e c x r u A r s B e e d i n n o l l tio a W M s o Icom e d u t é ’ d e e é r n b r o u t c Jo o 2 2 , ) z e e B e d s n i l u o M ( r u m a N 3
M LA GESTION DES RISQUES DANS LE MONDE PATRIMONIAL : LES MISSIONS D’UN GOUVERNEUR MOULINS DE BEEZ LE 22/10/2010
1. Introduction
Avant d’aborder les notions de situations d’urgence et du rôle du Gouverneur en la matière, il faut à mon sens contextualiser la fonction de Gouverneur. En effet, le Gouverneur est nommé par le Gouvernement régional, sur avis conforme du Gouvernement fédéral et est un commissaire de ces deux exécutifs ainsi que de l’exécutif communautaire. A ce titre et en vertu des diverses dispositions légales, il exerce donc des compétences fédérales, régionales et provinciales (il est toujours un organe provincial).
En tant que commissaire du Gouvernement fédéral, le Gouverneur est également revêtu de la qualité d’officier de police administrative et jouit de compétences importantes en matière de sécurité (civile et policière). La planification d’urgence et la gestion de crise font partie de ces prérogatives, en constituant même le « core business ».
La planification d’urgence existe depuis longtemps et était déjà prévue dans loi sur la protection civile du 31/12/1963, mais elle a fait l’objet d’un encadrement législatif précis avec l’arrêté royal du 16/02/2006, reprécisant les acteurs de crise par disciplines, les procédures et les mécanismes de déclenchement de plans. Les situations d’urgence et de crise y sont définies comme : « Tout événement qui entraîne ou qui est susceptible d’entraîner des conséquences dommageables pour la vie sociale, comme un trouble grave de la sécurité publique, une menace grave contre la vie ou la santé des personnes et/ou des intérêts matériels importants, et qui nécessite la coordination des disciplines afin de faire disparaître la menace ou d’en limiter les conséquences néfastes » Dans la plupart des cas, il s’agit d’une menace ou atteinte à la vie/santé des personnes, à l’ordre public ou au potentiel socioéconomique. Cela nécessite des décisions urgentes et une coordination multidisciplinaire indispensable. 2. Rôle du Gouverneur
Il existe en fait 3 phases de planification et de coordination :
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M - La phase communale : sous la responsabilité du bourgmestre lorsqu’en cas de crise, les moyens locaux et les renforts nécessitent une coordination multidisciplinaire communale. Le Gouverneur en est informé systématiquement et peut déjà à ce stade venir en appui des autorités locales - La phase provinciale : sous la responsabilité directe du Gouverneur, lorsque plusieurs communes sont concernées et au vu de l’ampleur de la situation (conséquences et moyens requis). Mais aussi si les aspects émotionnels et/ou médiatiques d’un événement le nécessitent. - La phase fédérale : sous la responsabilité du Ministre de l’Intérieur, lorsque plusieurs provinces sont touchées ou en fonction de l’ampleur et nature de l’événement (nucléaire,…)
1° Centre de crise
Au niveau provincial, nous disposons à Namur d’un centre de crise installé dans les sous-sols du palais provincial, multi-équipé et en configuration « nid d’abeille » pour un fonctionnement optimal. 2° Cellule de sécurité/comité de crise
Le Gouverneur et l’équipe qui l’entoure constituent la cellule de sécurité ou comité de crise selon que l’on se trouve en période de crise ou non. Son rôle est la gestion stratégique ( et non opérationnelle) multidisciplinaire, c’est-à-dire regroupant toutes les disciplines impliquées : pompiers, secteur médical et santé publique, police, logistique(protection civile, défense, Région wallonne) et communication. Avec le cas échéant des experts « invités » dans des matières spécifiques. La tâche est avant tout d’évaluer les situations d’urgence afin d’engager les moyens et les solutions spécifiques aux problèmes ( p.ex. en cas d’évacuation ou de confinement) Une liaison permanente est toujours établie avec le terrain, c’est-à-dire le PC Ops (ou poste de commandement opérationnel) et une assistance mutuelle transfrontalière avec la France est également prévue. Des procédures strictes sont établies et le centre de crise est d’ailleurs certifié ISO9001. 3° Management de crise intégré : Avant-pendant-après la crise
- Avant la crise. Avant toute crise, nous devons agir sur les moyens de réponse en termes d’équipement, de formation, d’information des services concernés (ex : fonctionnaires planu), mais également des autorités (conférence des bourgmestres – vade mecum) et de la population. Il faut donc analyser les risques, les informations et envisager toutes les opérations liées à la planification.
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M Un plan d’urgence est un instrument qui prend en compte les actions et mécanismes de coordination à mettre en œuvre en cas de survenance d’une situation d’urgence (cfr définition supra). Ce n’est pas un document inerte mais bien vivant, souple et évolutif Selon les phases vues précédemment, l’on distingue donc des plans à chaque niveau ; communal, provincial et fédéral, avec des plans généraux (PGUI) ainsi que des plans particuliers pour couvrir certains risques spécifiques (Seveso, nucléaire,…) Au niveau des plans communaux, le Gouverneur met tout en œuvre pour accompagner les communes dans leur travail de rédaction et in fine, c’est lui qui les approuve. Différents types d’exercices sont aussi organisés, qu’ils soient « table-top » (sans déploiement) ou sur le terrain.
- Pendant la crise En cas de phase provinciale, nous activons le centre de crise (pré-alerte, alerte). On procède à la récolte d’informations, en les vérifiant et en les analysant pour pouvoir prendre des décisions au niveau stratégique : il s’agit de superviser la réponse aux besoins (une crise étant toujours le résultat d’une inadéquation entre des besoins et les moyens), de faire opérer les services de la manière la plus adéquate et coordonnée possible au niveau interdisciplinaire. - Après la crise Favoriser le retour à la vie normale. Partage d’expérience, débriefings, relais, procédures d’indemnisation en cas de calamité naturelle.
3. Protection du patrimoine
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1. Protection des biens culturels
Définition des « biens culturels » : il n’existe pas de définition générale mais chaque norme, nationale ou internationale, possède ses propres critères pour les définir, en fonction de la nature des biens qu’ils cherchent à protéger. Cette absence de définition ne ma paraît pas normale.
En tout état de cause, il existe donc des régimes de protection différents selon les niveaux de pouvoir (international, national, régional et communautaire), qui basent leur approche selon que l’on se trouve en temps de paix ou en temps de guerre. Il y a manifestement aussi un 3ème temps qui est celui de la crise
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M 1° En temps de paix
1) Au niveau international
- La Convention UNESCO peut s’appliquer pour les biens « relevant du patrimoine culturel et naturel mondial ayant une valeur universelle exceptionnelle » - Les Etats membres s’engagent à prendre toute une série de mesures de protection, de conservation et de valorisation du patrimoine culturel et naturel : moyens suffisants( y compris humains), mesures juridiques, techniques, administratives scientifiques ( y compris la recherche)
2) Au niveau national
- En vertu des articles 127 et 134 de la Constitution, les Communautés sont compétentes pour les biens mobiliers et les Régions pour les biens immobiliers - CWATUP et décret du 01/04/1999 pour la RW, et Décret du 11/07/2002 relatif aux biens culturels mobiliers et au patrimoine immatériel pour la Communauté française.
2° En cas de conflit armé
- Convention de La Haye de 1954 et protocoles, avec intégration en droit belge : principes de protection générale, spéciale et renforcée
2. Sécurité civile VS Patrimoine ?
1) Les situations d’urgence visées par l’arrêté royal du 16/02/2006 sur les plans d’urgence visent, outre la vie et la santé des personnes, des « intérêts matériels importants ». Il est clair que si cet AR vise avant tout la sécurité des personnes (principe de subsidiarité), la préservation d’intérêts socioéconomiques est également prévue. Bien qu’il n’est nulle part fait mention « d’intérêts culturels », ceux-ci pourraient être inclus dans la notion « d’intérêts matériels importants », s’agissant de biens faisant partie d’inventaires ( liste du patrimoine mondial, p.ex.) ou faisant partie de « classements » selon les normes juridiques des entités fédérées. Les biens à protéger sont considérés comme « d’intérêt public » et les autorités sont obligées de par la loi de prendre toutes les mesures nécessaires à leur protection, conservation et valorisation. L’AR du 16/02/2006 et l’ensemble des dispositions visant la protection des biens culturels, en compris le décret du 11/07/2002, ne sont pas incompatibles et ces biens pourraient bénéficier de la planification d’urgence et de la coordination stratégique opérée au niveau des gouverneurs de province.
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M 2) La protection et la sauvegarde des biens culturels disposent déjà de plusieurs outils, tant au niveau national qu’international :
a) Au niveau international :
- La Convention de La Haye de 1954 prévoit une série de mesures (protection spéciale renforcée, etc.) mais s’applique aux cas de conflits armés. - La dynamique initiée dès 1996 par le Comité international des monuments et des sites (ICOMOS) avec le « Comité international du Bouclier Bleu » : → Formation d’experts aux situations d’urgence → Déclaration de Radenci (Slovénie) en 1998 : intégrer la protection et la sauvegarde des biens culturels au seinde stratégies nationales, en cas de situation normale aussi bien qu’en cas de situation exceptionnelle (conflit armé ou catastrophe naturelle)
b) Au niveau national
- Les Comités nationaux du Bouclier Bleu : actions communes, en essayant de renforcer leur efficacité par la mise en place de groupes de travail rassemblant les différentes professions, experts, instances fédérales et régionales, services d’intervention et forces armées. - Plans d’urgence interne des établissements ou organisations qui abritent des biens culturels : liste des personnes ressources (répertoire, coordonnées), listes à établir (collections prioritaires,…), plans des locaux, duplicatas, procédures de sauvetage, etc.
3. Vision intégrée et perspectives
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Il existe donc une série d’instruments existants, tant au niveau de la protection du patrimoine en tant que tel, qu’au niveau de la gestion de crise au sens entendu par la sécurité civile. Certains sont limitatifs, comme la Convention de La Haye qui ne vise que les conflits armés, même si la dynamique « Bouclier Bleu » a étendu le champ d’action aux catastrophes de tout poil.
Nos PGUI quant à eux, ne traitent pas explicitement de la protection des biens culturels, mais la notion d’intérêt matériel important pourrait également être élargie pour inclure les intérêts culturels. Ces éléments pourraient dès lors faire l’objet d’une réflexion visant à intégrer une dimension « patrimoniale » dans nos outils de gestion de crise et de planification d’urgence.
L’on quitterait alors la logique « temps de paix – temps de guerre » pour arriver à une approche processuelle de la gestion de crise
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M (avant-pendant-après) adaptée à la protection patrimoniale.
Les principes d’actions en matière de sécurité civile peuvent différer selon le type de crise auquel il faut faire face. Ainsi l’on parlera de « cinétique rapide » pour des phénomènes tels qu’incendies, explosions, foudre, etc., c’est-à-dire dont le déroulement est limité dans le temps (même si les conséquences nécessiteront des actions ultérieures), ou bien de « cinétique lente » lorsque le phénomène s’étire dans le temps (inondations, pollutions, etc.)
En cinétique rapide, le principe qui prévaut est généralement la sécurisation du site via des « périmètres » de sécurité, et ce afin de protéger l’extérieur. Or, dans certains cas, une protection des biens abrités par le site doit être envisagée et faire l’objet d’une attention particulière, non plus au regard de la sécurité civile, mais sous l’angle patrimonial (détérioration naturelle ou du fait de l’homme, pillages, etc.)
1) Avant la crise : préparation et planification
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2) Pendant la crise
- Etablir, en collaboration avec les autorités régionales et communautaires, la liste des sites et établissements rassemblant des biens culturels qui présentent un intérêt remarquable - Vérifier si tous les sites répertoriés disposent d’un plan d’urgence interne - Mise en perspective des plans internes et des PGUI - Lister les priorités - Pro-agir en ayant les données ressources (personnes de contact, procédures d’évacuation, …) afin de ré-agir de manière adéquate et coordonnée. - Formation des acteurs : pourquoi ne pas intégrer l’aspect patrimonial dans les séances de formation, notamment PlaniCom, via un expert de la branche ? - Organisation d’un exercice impliquant la protection de biens culturel
- Mise à l’épreuve des plans et procédures - Détachement d’un expert au Comité de coordination et de crise - Contacts avec les institutions culturelles à proximité du lieu de la crise
3) Après la crise
- Retour à la vie normale - Actions et relais vis-à-vis des autorités nationales et internationales
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Le Gouverneur de la Province de Namur Palais du Gouverneur Place Saint-Aubain 2, 5000 Namur Tél : +32 81 256 845
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Conception & réalisation : Imprimerie provinciale - mai 2016 / Editeur responsable : Denis Mathen / Crédit photos : André Dubuisson (photopresse) et photothèque de la Fédération du Tourisme
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