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Dernier volet de notre série de dossiers «Élections présidentielles», le SE-Unsa vous livre son bilan des 5 ans écoulés en matière de politique éducative et vous propose sa vision de l’École.
DOSSIER
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L’ÉCOLE QUE
NOUS
VOULONS
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NOUS SOMMES DANS LA DERNIÈRE ligne droite des élections présidentielles. L’Éducation y fait l’objet d’un intérêt particulier de la part des principaux candidats et personne ne se plaindra que l’espace public et nos concitoyens s’emparent d’une question aussi cruciale pour l’avenir de la jeunesse et de notre pays. Cette question devient majeure tant notre système éducatif est aujourd’hui à la peine. Il est socialement de plus en plus injuste et abandonne trop de jeunes sur le bord de la route. Pour le sortir de cette ornière et lui redonner du souffle, deux projets s’affrontent aujourd’hui. D’un côté un projet fortement inspiré du libéralisme qui, depuis cinq ans, se met en place patiemment mais avec détermination. L’Éducation y est vécue comme un fardeau pour la Nation, les personnels y sont maltraités et le modèle proposé y est celui du privé. De l’autre un projet restant appuyé sur les fondements de la République mais qui devra fixer un cap nouveau pour les élèves et les personnels. Un projet innovant indispensable qui devra bousculer le poids des habitudes. Ce débat ne peut rester cantonné aux acteurs politiques. Le SE-Unsa a pris sa place dans le débat public. Il est porteur d’analyses et de propositions. C’est tout le sens de ce dossier. •••
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ÉVOLUTION
DU SYSTEME
Le Service public remis en cause La décentralisation du début des années 2000 s’est vite arrêtée. Renforcement des pouvoirs des préfets régionaux et externalisation ou privatisation des services publics fondent aujourd’hui la politique présidentielle.
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EN 2003, RAFFARIN FAIT MODIFIER LA CONSTITUTION DE LA FRANCE : «son organisation est décentralisée». Le fait le plus marquant à l’Éducation est le transfert des Atos aux collectivités. Depuis 2007, insidieusement, le chemin se fait en sens inverse et s’accompagne d’une privatisation des Services publics. Les pouvoirs des préfets de Région sont renforcés. Ils montent en puissance face aux exécutifs locaux, aux mains de l’opposition. La restructuration des Services publics fait disparaître les directions départementales au
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profit de structures interministérielles peu compréhensibles pour les usagers, comme pour les agents qui ne perçoivent plus le sens de leur action. Au passage, les restructurations permettent de sabrer dans les effectifs. Au prétexte -jamais démontré- de la plus grande efficacité des marchés, des pans entiers du Service public sont abandonnés au secteur privé. Les partenariats public-privé (le privé construit et gère un immobilier qui est loué à l’État) se développent : prisons, Défense… La Cour des Comptes pointe la dérive, coûteuse pour l’État. À l’Éducation, organisation des examens, plates-formes téléphoniques… sont externalisées. Jusqu’aux comptes-rendus des CTM, désormais confiés au privé. Le moins d’État, avec son corollaire de «moins de fonctionnaires», avait été affirmé dès 2007 par Nicolas Sarkozy. Aujourd’hui, l’Éducation nationale, Service public non régalien de l’État, est dans le collimateur.
L’AUTONOMIE À TOUTES LES SAUCES
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N VEUT NOUS VENDRE L’AUTONOMIE comme
une fin en soi. Pour le SE-Unsa, ce n’est pas un principe mais un moyen pour faire correspondre les exigences nationales (programmes, référentiels…) à un public scolaire particulier. Là est la véritable liberté pédagogique. À l’inverse, on veut nous vendre une autonomie qui ne vise que la déréglementation et la mise en concurrence : abandon de la sectorisation, dispositif Éclair, nouvelles modalités d’évaluation… les exemples récents ne manquent pas. L’actuel président ne cache pas son modèle : c’est celui de l’enseignement privé, comme il le confiait en 2010 au responsable de l’enseignement catholique. Un établissement a un projet propre, défini par le chef qui a tout pouvoir pour recruter ses équipes, les rémunérer et s’en séparer s’il le juge utile. Les discours présidentiels en comportent tous les prémices : remplacement progressif du recrutement statutaire par le contrat, individualisation de la rémunération confiée au chef d’établissement… Au SE-Unsa, nous condamnons cette orientation.
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COMMUNE
Socle et École
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LE SOCLE COMMUN, INSTITUÉ EN 2005, peut être le levier de transformation de notre École. Encore faut-il qu’il ne soit pas, comme c’est le cas aujourd’hui, métamorphosé en objet technocratique au service d’une évaluation de la «performance» et que le principe d’une scolarité commune jusqu’à la fin du collège ne soit pas remis en cause par la restauration d’une orientation en fin de cinquième.
Parce que la société française ne peut supporter plus longtemps que 150 000 jeunes quittent l’École sans diplôme, il faut d’urgence relever le défi du socle. Pour cela, il faudra redéfinir ses contenus et ses modalités d’évaluation, adapter les programmes, donner du sens aux apprentissages. Il sera également nécessaire de créer une véritable continuité
éducative entre école et collège et mettre en œuvre une politique volontariste de formation de tous les professionnels concernés, avec des moyens adaptés. Et il faudra affirmer haut et fort l’éducabilité de tous les enfants. Plus qu’un improbable
changement de structure sous la forme d’une fusion administrative entre école et collège, c’est un changement des représentations et des pratiques qu’il faut initier dans des «réseaux pédagogiques du socle» associant étroitement collège et écoles du secteur.
La maternelle, c’est essentiel Le SE-Unsa porte avec détermination le mandat de la scolarité obligatoire à 3 ans depuis 2004. L’école maternelle doit être reconnue comme la première étape du socle commun en s’insérant naturellement dans la scolarité obligatoire. Elle constitue un élément essentiel et original du système éducatif français. Les effets déterminants de la scolarisation en école maternelle sur le développement des enfants, sur les premiers apprentissages et sur la réussite scolaire ultérieure sont établis. Si de 97% à 99% des enfants de 3 à 5 ans fréquentent effectivement l’école maternelle, la rendre obligatoire sera d’abord très utile aux enfants qui aujourd’hui n’y vont pas mais, bien au-delà, instituera définitivement l’école maternelle comme vraie école aux yeux de tous : familles, élus locaux et pouvoirs politiques.
CONTRE L’ORIENTATIONPRÉCOCE AUCOLLÈGE
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’AVENIR DU COLLÈGE UNIQUE EST UN SUJET CLIVANT au niveau politique et syndical. Pour le SE-Unsa, il est primordial de renforcer la scolarité longue, obligatoire et commune, celle qui favorise le plus la réussite de tous les élèves, à travers le collège unique. Ce qui ne s’oppose pas à la nécessité d’évolutions dans les contenus de formation, les pratiques pédagogiques et l’évaluation, car le collège concentre beaucoup de souffrances et d’échecs. Nous dénonçons toute idée d’orientation précoce vers des voies professionnelles transformées en «filières de relégation» comme le promeut Nicolas Sarkozy. Le «collège pour tous», tel qu’il est défini par l’UMP, constitue un grand bond en arrière alors que les études et comparaisons internationales montrent les bienfaits, en terme d’égalité sociale et d’élévation du niveau de qualification de l’ensemble de la population, d’une scolarité unique qui s’inscrit dans la durée. Le collège doit être plus souple et inclusif et cesser d’être une «machine à trier» les élèves. Il doit permettre à tous d’acquérir un véritable socle commun de connaissances et de compétences qui pourra transformer l’essai de la démocratisation scolaire.
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Lycées professionnels, attaqués de toutes parts !
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LES PROFESSEURS DES LYCÉES PROFESSIONNELS ONT MIS EN PLACE, dans la difficulté, la «réforme du bac pro 3 ans». Ils constatent tous les jours que les élèves les plus fragiles pâtissent du rythme qu’on leur impose. Pour le SE-Unsa, le cycle en 3 ans vers le bac pro doit être un parcours possible sans être le parcours imposé à tous. Alors que les LP sont en pleine «déstabilisation», c’est l’association des Régions de France (ARF) qui achève de les «secouer» en demandant la régionalisation de l’ensemble de la formation professionnelle ! Le SE-Unsa attend des candidats qu’ils s’engagent à maintenir la formation professionnelle initiale dans le Service public d’éducation. Dans leurs discours, les principaux prétendants au titre ont fait l’impasse sur cette question.
Quant à la part de l’apprentissage dans la formation professionnelle, elle fait l’objet d’une surenchère de la part de Nicolas Sarkozy alors que celui-ci ne répond pas aux difficultés d’insertion des jeunes les moins qualifiés. C’est bien d’une hausse du niveau de qualification dont nous avons besoin, quelle que soit la voie de formation choisie. Et cela passe par une formation initiale solide.
Évaluation du système scolaire L’instrumentalisation des évaluations systémiques à des fins de communication politique a atteint des sommets inégalés. Évaluations «maison», corrections opportunes des résultats, interprétations tendancieuses, tout y passe ! Sans compter que seuls sont rendus publics les travaux qui servent la cause ministérielle : on attend toujours une évaluation sérieuse de l’impact de l’assouplissement de la sectorisation ou des internats d’excellence ou bien encore de l’opération «Cours le matin, sport l’après-midi»…
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Pour une réelle transparence, nous demandons que les évaluations soient menées par des institutions indépendantes. Nous demandons également que les évaluations bilans, comme celles de CE1-CM2, soient menées sur des échantillons tous les trois ans afin d’éviter les effets pervers bien connus, le formatage de l’enseignement dans les classes et la mise en concurrence des écoles par la publication de «palmarès».
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LYCÉE :UNE RÉFORME PLOMBÉE
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VEC L’INTRODUCTION DES ENSEIGNEMENTS
d’exploration en seconde, d’un tronc commun à toutes les filières générales en première et de l’accompagnement personnalisé à tous les niveaux, la réforme du lycée peut constituer une étape intéressante pour aller ensuite vers un lycée sans filières, aux parcours plus ouverts. Mais les objectifs affichés ne seront sans doute pas atteints au vu des moyens consacrés à sa mise en œuvre. Certes, les pratiques ont commencé à évoluer positivement ici ou là. Un début de travail collectif autour de l’organisation de l’accompagnement personnalisé par le biais des conseils pédagogiques est un acquis important qu’il faudra défendre. Les contraintes budgétaires imposées aux recteurs, avec les nombreuses suppressions de postes et les augmentations d’effectifs des classes qui en ont découlé, ont lourdement pesé sur la nouvelle architecture des lycées. Ajoutons les problèmes posés par la «réforme dans la réforme» de la série STI (déficience de la formation, accompagnement des équipes très flou…), et la réforme du lycée est souvent perçue par nos collègues comme ayant été seulement un prétexte à atteindre les objectifs de la RGPP… Pour le SE-Unsa, la gestion autonome par les établissements d’une partie de la DGH est une avancée démocratique à condition, bien sûr, qu’elle ne se résume pas à gérer la pénurie !
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MISSIONS
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ET SERVICE DES PERSONNELS
Quand on met en regard la mandature du ministre Xavier Darcos puis celle de son successeur Luc Chatel, le programme UMP sur l’Éducation et les discours de Nicolas Sarkozy, on mesure bien que ces cinq dernières années ne sont que le laboratoire GRH que l’UMP entend généraliser dans les années à venir.
Les personnels ont leur dose !
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L’AUTONOMIE DES ÉTABLISSEMENTS scolaires est la colonne vertébrale du programme de l’UMP pour une École plus libérale. Le ministre Luc Chatel qui décline concrètement ce principe à travers le dispositif Éclair évoque lui-même, comme aiguillon de sa politique, «le management mis en place dans ces établissements». Ce dernier induit également, pour l’UMP, un contrôle de proximité plus resserré sur les personnels à l’égard desquels le gouvernement n’a cessé de manifester de la défiance.
Le même fil rouge se retrouve dans les mesures issues du pacte de carrière que l’UMP propose d’ailleurs de renforcer. C’est le cas notamment de la réforme autoritaire conduite autour de de l’avancement de carrière via l’évaluation (voir p. 20). La rationalisation budgétaire conduit l’UMP à cibler des catégories de personnels que
derniers, qu’elle espère moins contestataires que leurs aînés, constitueraient les cobayes du nouveau credo de Nicolas Sarkozy : «favoriser le sur-mesure à la quantité». À défaut de mettre plus d’adultes dans les collèges (suppressions de postes obligent), il cherche à obtenir plus de présence des enseignants du 2nd degré dans les établissements pour d’autres missions que les heures de cours (tutorat, orientation,
concertation), moyennant quelques heures sup.
Le candidat Sarkozy envisage, pour cela, de créer un nouveau corps donc un nouveau statut pour les candidats actuels au Capes. Ce corps serait aussi accessible à d’autres personnels que les certifiés, sur la base du volontariat. Mais au final, pour les collègues concernés, il s’agirait de travailler plus pour gagner moins.
ce soit sur le plan de la revalorisation financière pour les seuls débuts de carrière ou sur celui des bonifications d’ancienneté, dans le cadre de l’avancement, pour les seuls «méritants».
Tester sur les jeunes enseignants une redéfinition du métier attire tout particulièrement l’UMP. Ces
REDONNER LA CONFIANCE
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ES MESURES CONCERNANT LES MISSIONS ET LE SERVICE DES ENSEIGNANTS reflètent une méconnaissance de la réalité du métier et des conditions de travail des collègues, présents dans les établissements scolaires bien au-delà des heures de cours. Le SE-Unsa revendique l’intégration, dans les heures de service, de certaines activités pratiquées depuis plusieurs années mais non prises en compte : concertation, accompagnement pédagogique des élèves, tutorat-élèves, équipe éducative pour la scolarisation des élèves en situation de handicap, suivi individualisé, aide au travail méthodologique, relation avec les familles et l’environnement des établissements, périodes de formation en milieu professionnel, etc. Il est bien évident que, pour le SE-Unsa, cela ne peut aboutir à une augmentation du temps de service, à une baisse de la rémunération, à une dégradation des conditions de travail. Oui il faut plus d’adultes dans les établissements et notamment plus d’enseignants avec une réelle formation professionnelle mais aussi des équipes de vie scolaire plus étoffées, avec des personnels stables et formés.
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STATUT
ET CONTRAT
Déboulonner le statut ?
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LE STATUT EST UN CARCAN, DÉCLARAIT N. SARKOZY EN 2007… prônant précise : «Tous les citoyens étant égaux à ses yeux (la Loi), sont ainsi explicitement son abandon au profit du contrat. L’idée également admissibles à toutes dignités, places et emplois est réapparue en février. Cette opinion, très libérale, ne résiste publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle pas aux principes qui fondent la Fonction de leurs vertus et de leurs talents». C’est de là publique. que découlent les conditions de recrutement La garantie La garantie de l’emploi n’a pas été instaurée par un concours anonyme et non le recrud’emploi au hasard. Il s’est agi en 1946 de lutter contre tement de gré à gré par contrat. empêche les dérives constatées. Lier l’emploi à Le débat sur l’avenir de la Fonction publique l’employeur immédiat pouvait conduire à certaines dérives reste inchangé depuis l’après-guerre. D’un côté, l’arbitraire et au favoritisme. À l’inverse, les partisans d’un statut garant de la neutralité, l’inscription dans la durée garantit la neutralité : le fonction- de l’indépendance et de la continuité d’un Service public au naire n’est pas au service d’un ministre, même s’il doit lui obéir, service d’usagers ; de l’autre, des tenants du libéralisme mais au service de l’État. voudraient lui appliquer des règles commerciales (compétiLe déroulement de carrière basé sur l’ancienneté et la valeur tivité, flexibilité) pour des clients, au risque de condamner des professionnelle (à l’exclusion d’un mérite subjectif) conforte pans entiers du territoire. ce principe. Le SE-Unsa, comme l’Unsa-Fonction publique, rejettent L’article 6 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen fermement cette deuxième orientation.
STOP À LA PRÉCARITÉ !
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N NOUS PARLE SOUVENT DE LA CONTINUITÉ
du Service public les jours de grève…et on l’oublie tous les autres ! La continuité territoriale doit garantir l’égal accès de tous à un Service public de qualité équivalente. La continuité dans le temps aussi. Le recrutement de titulaires formés en nombre suffisant pour couvrir les besoins en postes et en remplacement est la réponse apportée par la Fonction publique. Au SE-Unsa, nous y sommes attachés. À l’inverse, la réponse gestionnaire qui s’est développée ces dernières années consiste à recruter au coup par coup, en s’adressant au service de l’emploi, des personnels à statut précaire et à contrat limité dans la durée. Les contractuels qui sont employés ont droit à une autre considération que celle que leur donne l’État, aujourd’hui. Des droits sociaux et un salaire décents sont nécessaires. Mais, plus que tout, il faut ouvrir la possibilité d’accéder à l’emploi statutaire plutôt qu’au CDI. C’est dans ce sens qu’a agi l’Unsa en signant les accords Fonction publique. Pour le SE-Unsa, les deux angles, limitation de l’emploi précaire et accès à la titularisation, sont indissociables.
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REFONDER Alors que le niveau de recrutement s’élevait, la formation des enseignants et des personnels d’éducation a fait l’objet, avec la masterisation, d’un affaiblissement sans précédent. Les nouveaux personnels se trouvent aujourd’hui projetés dans une réalité que peu d’entre eux ont été en mesure d’anticiper.
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LA FORMATION EST DEVENUE un objet conceptuel. Enseigner est devenu un métier qui s’apprend certes… mais sur le tas ! Pour le SE-Unsa qui se place résolument dans la logique du socle commun, la formation initiale et continue doit être totalement refondée. Or, ces cinq dernières années ont surtout été l’occasion, pour les ministres de l’Éducation nationale, de régler leurs comptes aux IUFM, accusés de tous les maux. Ils étaient soi-disant aux mains de ceux que d’aucuns, tenants d’un pseudo élitisme républicain, qualifiaient de «pédagogistes». Le dogmatisme le disputait à l’esprit de
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LA FORMATION DES ENSEIGNANTS
Une formation professionnelle laminée revanche. Revanche sur quoi ? On se le demande encore. Quelques économies budgétaires plus tard, on mesure la compétence dont ces contempteurs ont fait preuve. Les recrutements sont en chute libre, la formation initiale est un champ de ruines et les situations de souffrance au travail ont explosé chez les nouveaux recrutés. Il faut donc rebâtir. Chacun connaît désormais les leviers à actionner.
Un parcours professionnel construit dans la durée. Pour le SE-Unsa, la formation s’inscrit dans un continuum. Il doit s’élaborer progressivement du cycle «licence» aux premières années d’exercice. Le modèle de formation consécutive (formation académique suivie d’un moment de formation ou d’adaptation professionnelle) est inefficace. Il est donc primordial de
s’inscrire dans une logique de formation intégrée.
Une cohérence nationale et indispensable. Il est impératif de s’appuyer sur un cahier des charges national de la formation, une carte des formations garantissant le respect du principe
d’égalité sur le territoire. Enfin, pour le SE-Unsa, si l’on veut que le cahier des charges soit réellement prescriptif, il faut que l’architecture et le contenu des concours en intègrent effectivement toutes les dimensions. Ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui.
La formation continue en panne Les coupes budgétaires de ces cinq dernières années ont eu pour première victime la formation continue. Déjà peu fournie dans le second degré, elle est désormais réduite à sa plus simple expression dans le primaire. La raison première en est la quasi disparition des moyens de remplacement. Chacun est aujourd’hui renvoyé à sa volonté propre, à charge pour lui de construire ou pas, à l’extérieur de l’institution, son parcours de formation. Pour le SE-Unsa, la formation tout au long de la vie est un impératif vital pour l’avenir du système éducatif. Chacun doit donc pouvoir bénéficier en moyenne d’une semaine de stage par an. Des dispositifs de Validation des acquis de l’expérience (VAE) doivent être instaurés. Ils peuvent s’appuyer sur le droit individuel à formation (Dif) et doivent être financés par l'employeur.
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DÉROULEMENT
DE CARRIERE
Évaluation : piège à divisions Le dossier de l’évaluation est le dernier avatar d’une gestion managériale des carrières. Il porte en germe l’éclatement de la notion de déroulement de carrière, constitutive du statut de fonctionnaire.
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LE MINISTÈRE VIENT DE PASSER EN FORCE SON PROJET DE RÉFORME de l’évaluation des personnels, adossé à une refonte du système d’avancement. Les collègues ont tout à y perdre : liberté pédagogique et pouvoir d’achat. Cette réforme relève d’une conception de l’École calquée sur le modèle de l’entreprise : une école concurrentielle avec des enseignants assujettis, mis en concurrence entre eux.
Si le SE-Unsa plaide pour une évolution du système d’évaluation et d’inspection, il exige que celle-ci ne dégrade pas davantage les conditions de travail déjà particulièrement difficiles. Évolution doit rimer avec amélioration !
Le SE-Unsa demande le retrait de ces textes et l’ouverture de discussions réelles permettant : • de prendre en compte les nécessaires regards croisés sur les différents éléments professionnels du métier ; • de mettre en place une évaluation de la «valeur professionnelle» qui soit juste, pertinente, transparente et la
L’individualisation des carrières, le manque de lisibilité sur les modalités de changement d’échelon, la limitation de l’avancement au rythme le plus défavorable (à savoir l’ancienneté) conduisent au mieux à un ralentissement de la progression de carrière, au pire à un recul, avec l’instauration d’une pénalité de deux mois pour ceux jugés en insuffisance professionnelle.
plus objective possible ; • de proposer, dans le cadre d’une amélioration des carrières, la réelle revalorisation attendue par tous.
POUVOIR D’ACHAT :PROMESSES NONTENUES
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OUR LA 3E ANNÉE CONSÉCUTIVE, les enseignants ainsi que les personnels
d’éducation et d’orientation ne sont pas augmentés. Depuis 2001, la perte de pouvoir d’achat de chacun des échelons atteint 11%. Si le salaire des enseignants a augmenté, en valeur réelle, dans la plupart des pays de l’OCDE, il n’en est pas de même en France. C’est d’ailleurs l’une des raisons de la désaffection des candidats aux concours enseignants. Pourtant, en 2007, dans sa «Lettre aux éducateurs», Nicolas Sarkozy s’était engagé sur le terrain de la revalorisation en ces termes : «J’ai bien conscience que votre statut social, votre pouvoir d’achat se sont dégradés au fur et à mesure que votre tâche devenait plus lourde, vos conditions de travail plus éprouvantes. La Nation vous doit une reconnaissance plus grande, de meilleures perspectives de carrière, un meilleur niveau de vie, de meilleures conditions de travail». Le SE-Unsa réclame : • la transformation des indemnités en bonifications indiciaires ou en améliorations de déroulement de carrière ; • une revalorisation annuelle du point d’indice au moins égale à l’inflation ; • la création d’un douzième échelon, pour tous, en classe normale ; • un élargissement de l’accès à la hors-classe.
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