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Puissante terre naissante
Une nouvelle terre incandescente, venant d’une profondeur de 20 kilomètres, est en train de naître. Sur son long chemin vers la surface, le magma a déjà provoqué des essaims sismiques sur la péninsule de Reykjanes en Islande en février 2021. C’est pourquoi Elisabetta Panza et son équipe du Laboratoire de volcano-tectonique de l’Université de Genève se sont rendues sur place. «Ce fut un réel événement. Normalement, je cartographie des parties de terrains plus anciens de zones à la tectonique toujours active. Elles pourraient aussi entrer en éruption, mais là, cela a eu lieu sous nos yeux.» Les scientifiques n’étaient pas seuls à assister au spectacle qui a débuté le 19 mars et a attiré une foule de badauds. «C’était une éruption effusive: la lave coulait lentement et régulièrement des cratères. On pouvait donc s’en approcher très près», note la chercheuse. Avions et hélicoptères ont même amené les curieux juste au-dessus de la terre naissante. Mais le 5 mai, l’espace aérien a été fermé durant les premières heures du jour pour laisser travailler les scientifiques et ainsi réaliser l’orthomosaïque, la photo ci-contre. «Je pilotais le drone, mon professeur et un autre chercheur observaient», raconte Elisabetta Panza. «L’éruption avait produit une topographie inédite et nous ne pouvions pas nous fier aux cartes. Il fallait vérifier à vue si le drone couvrait la zone.» L’équipe eut fort à faire pour coordonner le travail: garder les batteries au chaud sous leurs habits, rester à l’écart du vent lors du décollage et de l’atterrissage, veiller aux intrusions illicites d’avions, piloter et poser le drone entre deux fontaines de lave, crachées toutes les cinq minutes par le cratère. Mais le résultat fut à la hauteur de l’effort: des images précises de la structure du champ de lave. «Les cheminées sont en général l’expression en surface de la structure de la croûte. L’orthomosaïque nous donne une idée de la dynamique des fractures en dessous, note Elisabetta. Comme le paysage change chaque jour pendant les éruptions, celui montré sur la photo a disparu depuis longtemps, même les deux cratères. «L’image, très impressionnante, souligne la puissance de la terre que nous ne pouvons contrôler, seulement observer.»
Judith Hochstrasser (texte), Elisabetta Panza (image)