Sam Gave je n'ai de libre que ma chute

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Sam Gave

Je n’ai de libre que ma chute TOME I - Nouvelles poétiques

Éditions EDILIVRE APARIS 75008 Paris – 2010

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www.edilivre.com Edilivre Éditions APARIS 56, rue de Londres – 75008 Paris Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50 – mail : actualites@edilivre.com Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction, intégrale ou partielle réservés pour tous pays. ISBN : 978-2-8121-422-77 Dépôt légal : Novembre 2010 © Edilivre Éditions APARIS, 2010

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Sommaire LES PAPILLONS BLEUS .................................... 11 NESTOR ............................................................... 13 ALORS QUE LA MER SORT DU PRESSING ... 15 L’IMPARDONNABLE RAVEL .......................... 17 LE COULOIR NUMERO QUATRE .................... 19 LE RANCARD A L EGLISE ............................... 20 LA FEMME IDEALE DU JOUR ......................... 22 VERS MOOREA .................................................. 23 AU DESSUS DES NUAGES................................ 25 L’HOMME DE PLEXI ......................................... 27 ENVIE DE MOI ? ................................................. 30 ROUGE ................................................................. 32 DES CILS VERTS ET UN CŒUR ORANGE ..... 33 L’HEURE .............................................................. 35 LAISSE BETON ................................................... 36 QUAND ELLE M’A REGARDE ......................... 38 5


ET TOUT RECOMMENCE.................................. 39 ET TOUT FLAMBA ............................................. 42 C’EST BEAU COMME LA VIE QUI PASSE ..... 44 UN PEU DE ROUGE LA OU IL FAUT............... 46 MA SEULE MAITRESSE EST LA LIBERTE .... 48 MUSEE GREVIN .................................................. 50 EN TALONS DE GAZELLE ................................ 53 CASTING .............................................................. 55 LA PLUS BELLE FILLE D’EIVISSA ................. 56 QUAND LA BOULE SE MEURT........................ 58 LE CHENIL ........................................................... 59 LA BOUEE DE SAUVETAGE ............................ 61 LAUREEN ............................................................. 63 ECRIS MOI UN POEME ...................................... 65 PUTAIN CE MEC ................................................. 68 LE BAIN ................................................................ 69 AU FEMININ ........................................................ 71 PERFORE JUSQU AU CŒUR ............................. 72 FLIRT AVEC LE PIRE ......................................... 74 SON AME BAT COMME L’HORLOGE ............ 75 LA LUNE FLIRTE AVEC LES AIGUILLES DE PIN ......................................................................... 76 LA FILLE D’A COTE........................................... 78 BOUCHE DE MEGOTS ....................................... 79

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UNE BOMBE DANS L’CŒUR ........................... 81 L’ELEPHANT VERT ........................................... 83 TOULOUSE LAUTREC ...................................... 86 CHAQUE JOUR EST UNE ETERNITE .............. 88 LES SORCIERES ................................................. 90 DES FLEURS ROUGES....................................... 92 LA LOUVE NOIRE .............................................. 94 TE HAIR D AMOUR............................................ 96 UN DROLE DE GOUT D ENCENS .................... 97 MAIS DE QUOI PARLAIT-ON ? ........................ 99 GALILEE .............................................................. 102 LE CAFE CALABRAIS ....................................... 104 LA POSITION QUE JE PREFERE ...................... 106 COMME DES CHIENS ........................................ 108 LALA .................................................................... 109 STILL ALIVE ....................................................... 111 ENCORE ............................................................... 113 LES MALABARS ................................................. 115 LA VRAIE QUESTION ....................................... 117 ET AVA ? .............................................................. 119 LA MORT AUX FESSES ..................................... 121 J’ME TIRE EN SOLO .......................................... 123

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L’homme est une coccinelle fragile. Si vous la laissiez libre, elle grimperait dans votre corps et vous porterait bonheur. Au contraire vous refermez votre main pour l’empêcher de s’enfuir et vous vous privez de sa fantaisie, de ses rêves et de son amour.

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LES PAPILLONS BLEUS Les papillons bleus flottent dans la cuisine Elle est accoudée sur la mousse au chocolat Et moi j’fais d’l’équilibre entre les bouteilles vides L’évier déborde de jus de poulet – J’vais faire la vaisselle, dit-elle – Laisse tomber, l’évier est bouché Viens plutôt sur l’lit Elle se ramène avec la mousse au chocolat Et me fait manger à la cuillère Comme un bébé A mon tour je lui fais des moustaches Puis des bretelles sur les seins Et un porte-jarretelles en chocolat Ça fait longtemps qu’une blondeur Au sexe pas très clair Ne m’a pas fait bander autant Je plonge sur le porte-jarretelles M’empêtre dans les bretelles Et la viole comme un nègre Y’a du chocolat partout Dans les draps Dans les ch’veux Dans l’ventilo 11


Et sa chatte ruisselle Comme des œufs en neige – Elle est où la salle de bain ? – Tu n’peux pas y aller Y’a la vaisselle d’la semaine dernière Les papillons bleus flottent dans la chambre Et le plombier n’est toujours pas passé

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NESTOR C’est mardi gras tous les jours Me dit le clown d’en face Alors que j’ai le gout âpre du matin Dans la bouche Et que ma tête ne va pas mieux La voisine sonne à la porte Un rouleau de papier chiotte à la main – Ma chasse est coincée Tu veux pas regarder ? Je plonge à pleines mains dans la flotte Et je récupère un poisson rouge Qui n’a rien à faire par ici – Tu n’peux pas savoir comme je suis heureuse Ça fait tellement longtemps que je le cherche Ce brave Nestor Viens faire un câlin dans l’lit Et je plonge dans l’lit Sans même me laver les mains Les cheveux de la voisine ressemblent A un commando de trigonocéphales Déchainés autour de ma chair fraiche Au moment où je meurs asphyxié Une piqûre de venin me laisse inanimé 13


La voisine halète Heureuse et repue Quand je reviens à moi Elle me demande De retirer la main de son vagin Et je retire le poisson rouge Encore vivant Qui n’a rien à faire par ici Alors que ma tête ne va pas mieux Je vais raconter ça au clown d’en face En lui montrant Nestor Il éclate de rire En avalant le poisson rouge Et en me répétant Qu’c’est mardi gras Tous les jours

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ALORS QUE LA MER SORT DU PRESSING Alors que la mer sort du pressing Alors que le soleil n’a pas une ride La plupart des gens vivent sans amour Et j’aime ton ventre doux Collé au mazout Alors que la mer sort du pressing Alors que le soleil n’a pas une ride La plupart des gens baisent comm’des suppos Et j’aime ta langue qui coule Sur ma bouche comm’du blues Alors que ton corps fait dans ma tête Des bosses partout Et qu’j’ai des bleus sans dessus-dessous L’amour va et vient comme l’océan Et j’aime quand tu t’maquilles Sans ouvrir les volets Alors que j’t’fais manger des pâtes vertes En barbouillant tes lèvres de crème bleue Alors que les gens oublient en baisant J’aime quand tu dessines une couture Derrière le mollet

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Alors que j’ai deux grammes trente trois de désespoir Alors que les gens jouissent de leur p’tite mort Je plonge dans l’gouffre de ton trou noir Et j’aime quand j’t’caresse Sur le fil du rasoir

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L’IMPARDONNABLE RAVEL J’aime la serveuse qui n’a l’air de rien En body de dentelle J’aime les passants Car ils ne font que passer Je n’aime pas les vieux Qui croient en Dieu Au lieu de croire en eux J’aime les mecs Dont on ne parle pas Car ils ont encore du génie J’aime écouter au pied des églises Les petits cris stridents Des religieuses Jouant avec leurs doigts Je n’aime pas le boléro De l’impardonnable Ravel J’aime mon cloaque personnel A condition que personne N’y fourre son nez J’aime le strip-tease des sens Car en dehors Il ne reste pas grand-chose 17


Je n’aime pas baiser dans l’lit Quand il y a des miettes Je n’aime pas les mal baisées Derrière leur guichet Mais j’aime les premiers de cordée Les métamorphoses de la chair Et le rouge Les filles dans la rue La lumière du matin Les images d’enfants Les îles La quatrième de Brückner Et la huitième Le hasard Et le jeu du destin J’aime envenimer Les passions les plus violentes Et contrôler à mort Ma tendresse Je n’aime pas la gentillesse J’aime que tu m’aimes

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LE COULOIR NUMERO QUATRE Je connais une fille à Santa Monica Elle est championne de cent mètres Elle court avec des écouteurs Car elle est aveugle On lui dit à droite On lui dit à gauche Pour ne pas qu’elle sorte du couloir Elle n’a qu’une chose à faire Courir vite et gagner Sinon elle sera une aveugle comme les autres Elle a les plus belles fesses Sous le nylon fluo Dans le couloir numéro quatre Mais les juges en profitent Faux départ ! Les salopards Moi aussi j’ai des écouteurs On me dit à droite On me dit à gauche Et si je sors du couloir Je serai un aveugle comme les autres

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LE RANCARD A L’EGLISE Je sors de l’église Où j’avais un rancard Avec ma fiancée C’est le seul endroit frais D’la ville Elle n’est pas venue Tant pis pour elle Y’a d’la crasse Et du soleil partout L’indienne a l’air heureuse Avec ses écouteurs à héroïne Le gringo a des antennes de télé Branchées dans les ch’veux L’émission a l’air bonne Une blonde accroupie Rafistole son maquillage Les pieds nus dans l’vomi Ma fiancée arrive Le regard bleu et rouge Les lèvres noires Et les ch’veux orange Elle a des paquets partout De tampax 20


De protège-slips De shampooings colorants Elle a du vernis à ongles argent Des bagues de mort à tous les doigts Et des colliers plastoc aux fesses – Alors j’t’ai attendue à l’église – J’étais à la pharmacie La chaleur blanchit Et son sexe est soudain phosphorescent Les vautours piquent du nez Histoire de s’rincer l’œil – Ramènes-toi – Où ça ? – A l’église, pour te confesser – T’as pris un coup d’chaud ? J’suis même pas baptisée Les charognards reprennent leur ronde Le temps s’arrête en silence – Fais un signe de croix – C’est dans quel sens ? – Enlève ta culotte J’vais t’apprendre une prière

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LA FEMME IDEALE DU JOUR – Tu peins ? – Ouais tous les matins – Et comment tu peins ? – J’fais comme tous les peintres J’prends un tablier Une palette Et un pinceau – Non j’veux dire « quel est ton style ? » – Je mélange un peu d’blonde Un peu d’rousse Et un peu d’brune Et j’m’fais La femme idéale du jour – Et moi ? J’suis quoi dans tout ça ? – Toi ? La femme idéale du jour – Du jour c’est tout ? – J’ai tellement peur Que ce soit pour toujours – Menteur Elle m’assomme avec l’oreiller Et les plumes volètent dans la pièce Et se collent une à une Sur la peinture encore fraiche Du matin

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VERS MOOREA Il faut mettre le monde par terre Et le refaire Au lieu de s’gaver d’télé Et d’congés payés Même si t’as vingt ans Et des balles dans l’dos La fille sur la moto Avait des cuisses grasses A cheval sur l’réservoir Où était dessiné Un ange noir Ma tire glissait Le long de la Harley Le mec aux lunettes noires Pensait que j’reluquais sa bécane En fait c’était la chatte rousse De sa fiancée Qui m’intéressait Les poils rouges s’échappaient Du slip rose Et dessinaient des boucles Collées de sueur Sur l’ange noir Du réservoir 23


Je les ai suivis longtemps La campagne était belle Et orange Les papillons brulaient Dans le soleil couchant Le mec s’est arrêté Pour pisser J’ai rangé ma tire Contre l’ange aux boucles rouges – Salut j’peux avoir un autographe ? T’es une star Et j’aime les stars Elle m’a dessiné Un papillon brulant Sur le papier du hot dog Puis elle a sauté Dans ma tire Le mec se battait encore Avec sa prostate Quand on a tourné A droite Vers Mooréa Face au soleil couchant

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AU DESSUS DES NUAGES – Allô c’est quoi encore ? – C’est moi Torticolis d’enfer Vertiges Envie d’vomir – T’as encore picolé Mets la tête entre les cuisses Ou appelle l’ostéo – Peux pas m’déplacer Vais essayer la tête entre les cuisses – Allô c’est qui ? – C’est moi – T’as encore déconné ? – Non mon mari est mort hier soir – Ma pauvre – Il voulait qu’on s’jette dans l’feu – Et alors ? – J’n’étais pas chaude – Allô j’ai peur Il va y avoir un mort – C’est qui cette folle encore ? – Les forces de la Jettatura Se déchainent – Mais qui es-tu ma tendre ? – La strega voilée de noir 25


– Je te connais ? – Je suis ta mort Ton cœur est de glace – Mais ma chair brule – Dans la rue de nuit N’y va pas Les morts viennent mordre – Ok mais auparavant jette le temps Et ses fils de fer barbelés Mon acte de naissance Et les machines à calculer Le temps perdu Les ordis cyniques Qui piétinent ma liberté Et mon passeport périmé Puisque je n’ai plus d’drapeau Mon carnet d’vaccinations Ma fiche de pointage aussi Suis pas allé au turbin c’matin Tiens salue l’dirlo Des échecs humains Et laisse-moi vivre au feeling Cette dernière seconde C’est peut être L’éternité – Allô t’es passé où ? Pourquoi as-tu quitté La vie terrestre ? – J’vis au dessus des nuages Et j’regrette de ne pas y avoir pensé Plus tôt 26


L’HOMME DE PLEXI L’amour ne m’dit plus bonjour Comme disait Gainsbourg Me casse dans les bars L’âme en vrac Dans mon smoking plexi Sans rien dessous Pour qu’elles aient des regrets Et les poches bourrées de billets Pour qu’elles les voient Sous le plastic transparent La concierge et son pitbull Aboient dans la cour La fille mongolienne Miaule à la cave Le mari alcoolo se biture Sous un regard hilare Et dehors il y a toujours du ciel bleu Pourquoi ce bouquet sec Sur le pare-brise ? Une givrée qui m’jette un sort ? Une amoureuse qui m’aurait laissé Des fleurs fraiches voici bien longtemps ? Ou la mort qui m’guette haletante ? 27


– Prends pas la bagnole, me dis-je, on n’sait jamais Les putes bigarrées sifflent de jalousie – Hé les filles c’est cool vos escarpins en plexi – Tu veux les essayer ? – Non j’n’ai pas fait ma french manucure Balade ma dégaine de trans’ Dans l’premier bistrot – On n’veut pas d’ça ici, gueule le patron – J’paye cash – Va t’faire mettre chez les curetons N’veut rien savoir, il doit être français J’aurais du v’nir en fauteuil roulant Y’a une place pour handicapé au bar J’aurais pu boire un coup à l’œil Et dehors il y a toujours du ciel bleu Entre dans la première église Histoire de prendre le frais Trempe les doigts dans l’bénitier Puis branche un cierge électrique Et prends l’jus Dieu soit loué, suis vivant Dieu n’est-il pas fait pour ça ? C’est plus sûr les cierges en cire Qui dégoulinent comme les barbes Des druides d’antan Terminons par une prière de mécréant Pour mater son nylon transparent Les préposées municipales Font les grues sur le parvis Elles lookent mon sexe A travers le plastoc 28


Et me demandent illico mes papiers – T’es né quand ? – 28 octobre avant Jésus Christ – Fais gaffe à l’alcool Sinon on t’ramène a l’asile – Qui picole le plus m’attrape ! Et j’détale à la Usain Bolt – Taxi ? Au musée de cire Le regard figé La cervelle dans l’oubli Le cœur aliéné Là je trouve ma niche Ma laisse et mon collier Et dehors il y a toujours du ciel bleu Je prends la pose Comme un toutou synthétique Dans mon enveloppe de plastique Car pour un salaire de misère Je représente l’esthétique De notre temps

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ENVIE DE MOI ? Envie de prendre un verre sur les vagues Accroché aux nuages Avec cette fille qui pense Deux fois plus vite que moi Alchimie sensuelle ? Alchimie affective ? Alchimie spirituelle ? Ou rien de tout ça ? Elle décide de tout Combien de vitamines le matin Combien de viagra le soir Mettre la chemise sur la ceinture Marcher d’un pas léger Pas d’avis sur les chaussures Car n’en ai qu’une paire Elle est fière de m’exhiber Comme un nain Car sait qu’ils sont bien pourvus Ne sort qu’avec ses copines Car ont des tas de choses à se dire De moins en moins Les filles partagent leur quotidien Avec leurs mecs 30


Défaut de communication On s’appelle par 1 phone Mais on ne parle pas Quand on baise J’aime la voir se mouvoir Comme une silhouette animale Sur l’horizon en flammes Soudain elle me dit J’ai envie d’un gros bébé de toi Mais a-t-elle envie de moi ?

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ROUGE J’aime les histoires d’amour Et je viens de chier du sang rouge Je l’ai vue chez l’fleuriste Elle m’a offert des fleurs Je l’ai amenée vers l’océan Regarder les mouettes On a marché dans les boites de fer Comme deux papillons brulés Sur une mare de boue Je crois qu’elle m’aime J’aime les mouettes aussi Je suis rentré Et j’ai refait du sang rouge

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DES CILS VERTS ET UN CŒUR ORANGE T’as pas vu passer Lola ? C’est celle qui passe ses amants A l’eau de javel Elle m’a balancé du sixième Dans le vide-ordures Je n’sais plus ou m’raser Je n’sais plus ou m’laver Le quotidien bouffe ma cervelle Et ma queue à la dérive Arrose les géraniums T’as pas vu passer Lola ? Elle a des cils verts Et un cœur orange Elle n’a besoin de personne Comme le soleil couchant Derrière le phare Est-ce qu’il y a des mecs Qui se sont déjà flingués En s’tirant une bastos dans l’cul ? Quand elle m’a balancé dans l’vide J’ai atterri sur les cordes à linge Du deuxième J’ai mis deux jours pour sécher 33


T’as pas vu passer Lola ? Dis lui que je suis obligé de faire la bouffe De laver mes slips Et que ça m’emmerde Dis lui qu’je suis mourant Et qu’je n’ai plus d’aspirine La vie est frigide Comme cette fille qui m’rend dingue J’ai beau la lécher des ovaires à la cervelle Elle ne bronche pas d’un poil Et pourtant j’y suis toujours après

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L’HEURE Plus je t’aime Plus je suis à l’heure Plus je suis à l’heure Moins tu l’es Moins tu le seras Moins tu m’aimeras L’amour passe

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LAISSE BETON La piscine est en béton L’hôtel est en béton La fille habite l’hôtel Un nageur fait un crawl ventilateur Devant la fille indifférente Puis vomit du ciment Et son protège-dent Fier comme un gladiateur Il pique une tête dans le bassin Et reste planté comme un poireau Dans le ciment humide Les marteau-piqueurs et la grue N’y pourront rien Le lendemain le béton a séché La fille hautaine est toujours là Et le type a disparu Probablement enseveli Le revoici dans une faille Transformé en lézard ahuri Mais heureux de griller au soleil Sans avoir à nager ni à plonger Pour séduire la fille

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Il rampe vers ses jambes Elle ne bronche pas Il se hasarde dans son sac Puis lui caresse les cheveux Il se glisse entre les seins Et s’aperçoit qu’il est devenu Une bestiole à sang froid La fille reste de glace aussi Dans un coup de folie insensé Il plonge dans son sexe Et à nouveau Reste planté comme un poireau Dans le ciment humide Car la fille est en béton aussi

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QUAND ELLE M’A REGARDE Quand elle m’a regardé Un bulldozer est entré dans ma poitrine Une histoire d’amour comme du diam’ Et la douceur de la violence Et l’humour pour gober les drames Et la lumière pour mater son âme L’hôtel s’écroula Les hélicos passèrent Et repassèrent Les Jaguar 747 Et les gazelles 277 Puis les ambulances arrivèrent La société n’aime pas Les histoires d’amour Et les écrasent

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ET TOUT RECOMMENCE Je viens de faire une mise en plis A mon bolide fraise pistache Le soleil bombarde les chromes Comme un feu d’artifices Une caisse pourrie me coupe la route Et défrise le prototype J’m’colle aux fesses de l’épave Et la coince au premier feu La fille est grave allumée Elle s’agite comme un mixer Dans un cercueil – T’es énervée ça va t’faire du mal – Vous m’avez fait une de ce peurs – C’est quoi l’numéro d’ta douche ? – Je t’le donne si tu veux Mais on s’fait une pizza avant ? On stoppe à La Dent Creuse Ça appartient à un d’mes potes Qui vient d’sortir de taule J’commande une pizza Un hot dog et deux pressions Bouscule un flic collé au bar Et vais pisser derrière en répétant 39


– J’suis libre Et j’t’emmerde connard Le jet est vigoureux J’monte sur une caisse Pour mater mon sexe Dans la glace écaillée Toujours une bonne canne Mais les marques du temps Sur les boules Faudra que j’remonte ça J’prends la fille au vol Avec le hot dog et la pizza Saute dans le spider Remonté à bloc Et fais un bras d’honneur Au flic ahuri En démarrant comme un jet – On n’se connaît pas dit la cruche Qu’est-ce que tu aimes dans la vie ? – J’aime pas faire le sucre Dans la vie d’la pince à sucre – Ni dans la gueule d’un flic J’vois ça – C’est quoi ton turbin ? – Secrétaire – De jour ou de nuit ? – Ça dépend d’mon patron Glousse-t-elle – Il te faut combien de secondes pour jouir ?

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Elle se marre C’est bon signe « Fais les marrer » Disait mon père « Sois tendre mais rapide Les filles n’aiment pas les mollassons Et n’te prends pas pour un héros Tu n’sais jamais Ce qu’il se passe au bout d’ta queue » – J’suis l’homme de ta vie Aujourd’hui – Ah ouais ? Ricana la gourde – Demain on est mort, T’as pas l’choix On s’enfuit alors Vers l’océan orange Et tout recommence

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ET TOUT FLAMBA Quand le soleil s’est levé ce matin La première lueur m’a embrasé Il y avait des p’tits bouts d’cervelle Partout dans la chambre Mon âme était en confettis Les hélicos faisaient des ronds Au dessus du lit Et son odeur bestiale me collait Comme du chewing gum Sur le goudron fondu – tu n’trouves pas qu’ça sent l’essence ? – non ça sent l’amour mon bébé – t’as fait grimper l’audimat hier soir – pourquoi t’as pas aimé ? – J’t’assure ça sent l’essence – Faut pas jouer avec les allumettes mon bébé – Dis moi un truc Tu fais semblant pour m’faire jouir Ou pour faire jouir mes voisins ? – Va t’faire foutre

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Elle jeta sa cigarette dans les draps Et tout flamba Les hélicos Le chewing gum Le goudron Les p’tits bouts d’cervelle Et notre amour

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C’EST BEAU COMME LA VIE QUI PASSE La lumière dans ses cheveux rouges Et ses yeux clairs C’est beau comme la vie qui passe Quand la maison brûle Elle vide le frigo Avant d’éteindre l’incendie C’est beau comme la vie qui passe Le tatouage sur son pubis C’est les initiales de son mec Qui s’est fait flinguer C’est beau comme la vie qui passe Les planètes mortes brillent Comme des étoiles Pendant qu’elle bouffe des sardines A en gerber C’est beau comme la vie qui passe Le soleil est posé sur la colline Les hommes divorcés jouent Avec leurs gamins sur la digue C’est beau comme la vie qui passe

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Elle a une bouche Comme mon cancer On s’croise sur le palier Tous les matins – Bonjour comment ça va ? me nargue-t-il – Ça va, comme la vie qui passe

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UN PEU DE ROUGE LA OU IL FAUT Fais attention à tes fesses Elles grossissent Avec les ans et les grossesses Il faut faire des exercices Ne penses pas qu’aux gosses Tu es une star Surtout quand tu mets Un peu de rouge Là où il faut Enlève ce torchon Dans les cheveux Regarde tes seins Pointés vers le ciel Comme une demande en grâce Tu es une star Surtout quand tu mets Un peu de rouge Là où il faut J’ai acheté du poulet Des pommes frites Des cacahuètes Et des gâteaux sucrés 46


Pour le thé Et aussi un string Mets-le Tu es une star Surtout quand tu mets Un peu de rouge Là où il faut J’vais faire le thé

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MA SEULE MAITRESSE EST LA LIBERTE Ma seule maîtresse est la liberté Et la seule femme que j’aie aimée Est celle qui lui ressemble Si je partais pour les îles C’est elle que j’emmènerais Car elle a des yeux comme des lagons Et ce sont les mêmes que les miens Les vagues y sont comme les yeux Des filles de vingt ans Elles n’ont pas de rides Et ne parlent que d’amour J’aime voir l’horizon tout rond Comme une boule de cristal Et savoir ce qu’il y a De l’autre côté Le pire est que la terre est ronde Et que l’on revient toujours sur soi Je suis allé au bout de mes rêves Et les autres y ont mis le feu Alors mes neurones se sont fait la belle En montgolfière bleue 48


Depuis J’aime faire l’amour dans les nuages Mais la météo n’est pas très bonne Aujourd’hui

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MUSEE GREVIN La vie s’évapore comme l’éther Un jour la mort arrive Comme un cheveu sur la soupe Pourquoi m’envoient-ils de l’eau Et du sable sur la tête ? Ne pourraient-ils pas m’enterrer Sur la plage ? S’il doit y avoir un miracle Qu’ils changent la mer en vin Et qu’ils fassent une grande fête Sur la grève Puis qu’ils jettent mes cendres Au large dans un bénitier Pourquoi cette cérémonie ? Pourquoi pas un concert ? Qu’ils ressuscitent les Floyd Les Doors, les Stones Queen Et Paul Mac Cartney Et les Beatles bien sûr Qu’ils invitent Toutes les femmes qui m’ont aimé Marrant de les voir ensemble éplorées 50


Alors qu’hier encore elles s’étripaient Je n’ai pu haïr suffisamment de femmes Pour être vraiment heureux L’amour est exclusif Le sexe est multiple La séduction est vagabonde Ai gouté modestement aux trois Esclave de l’amour Mais libre d’envies Pourquoi bannir ce délire sensuel De mon vivant Alors qu’on vit aujourd’hui En plein délire rationnel ? Tiens voici le ministre des rêves Tiens celui des cauchemars N’est pas loin Voici les ministres des délires Eux ils sont nombreux Mais où est le professeur de magie ? Celui qui devrait nous apprendre à rêver Ne fouillez plus dans mes poubelles Vous n’y trouveriez que des mouchoirs Ne pleurez plus dans vos souvenirs Les larmes sont comme les taches d’amour Elles ne s’effacent jamais Ne cherchez plus de chaleur Dans le no man’s land de mes sens Ma vie fut un désert irrigué de plaisirs Une ruelle sombre de roman Un cœur errant aux portes du dégout

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Il ne faut pas en vouloir aux gens D’être mauvais Il faut un grand talent Pour ne pas l’être L’heure est au leurre L’éducation la philosophie et l’expérience Peuvent gérer les vices de la vie Mais les interdits obsessionnels Issus de l’incommunicabilité, Et de l’absence de relation humaine Font chou blanc La mort espère en secret Me prendre le bras Pour me faire connaître La désespérance du monde Lâche et fidèle à moi-même Je m’enfuis avec elle La main dans la main L’homme d’église dit alors à la foule « On espère un jour Te retrouver avec nous » Mais non c’est fini Fini Accrochez ma cervelle Au musée Grévin Et laissez-moi frotter Quelques neurones entre eux Et faire du feu

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EN TALONS DE GAZELLE Je cherche Dieu Dans les yeux d’la serveuse En talons de gazelle Les requins prennent l’apéro En jouant au 421 Mahler crache du feu dans ma tête Dommage qu’il n’ait pas connu cette fille Qui m’tranche la gorge Avec son sourire Son avenir n’est pas à la cuisine Les autres m’emmerdent Les top-models Les raclures de casseroles Les tailles fines Les tailles épaisses Qui débordent du jean Les trav’s Les gouines Les hétéros, les trans, les homos Les fonctionnaires Et ceux qui s’font passer pour quelqu’un Et ma voisine qui n’ressemble à rien Des fesses flétries Un sexe qui pendouille 53


Des muqueuses rougies Par les mycoses de tous les jours Elle ne franchira pas l’histoire Et soudain un mec en sac à dos Fait tout sauter Mahler vomit Les requins aussi Alors que je cherche Dieu Désespérément Dans le lagon d’eau sale Mais où est passée la serveuse En talons de gazelle ?

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CASTING Lui a une allure rouge sang Cheveux permanentés Lunettes Jag Elle a une chemise de mac Jean moulant Et lunettes Dior Attention shooting Clichés romantoc-spaghettoc Pour pub de coke Superbe Reflet des poubelles Dans les lunettes C’est fini passez à la caisse Il retire ses Jag D’un geste travelling avant Il a un profil cité Des galeries Barbès Elle jette ses Dior D’un geste travelling arrière Elle a un profil à faire les ongles A la Samaritaine Une belle histoire d’amour commence

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LA PLUS BELLE FILLE D’EIVISSA Eivissa C’est le seul endroit Où l’on n’ai pas envie De conquérir le monde Mais juste cette fille divine D’un mètre quatre vingt En cuir moulé jusqu’aux chevilles Les cheveux blonds dans les reins Qu’illumine le soleil de sept heures Elle marche seule Les escarpins à la main Droite et majestueuse Dans l’aube agonisante Comme Phèdre sur Sunset boulevard La fête est finie Les rats overdosés roupillent dans les igloos Les mouches ont le nez dans l’café Dehors le tintamarre des poubelles Que sortent les vieilles en noir Avant d’aller prier à la chapelle

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La plus belle fille d’Eivissa Rentre seule En cuir moulé jusqu’aux chevilles Les cheveux blonds dans les reins Alors que le soleil de sept heures Illumine une multitude de scalps Accrochés à sa taille Alors que le soleil de sept heures Illumine une multitude de scalps Accrochés à sa taille

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QUAND LA BOULE SE MEURT Tu existes par l’amour L’amour de tout Des gens qui passent Des gens qui tombent Des gens qui gagnent Si tu n’étais pas une femme On te prendrait pour Dieu Moi je suis un homme perdu Dans les nuages Ton image m’a pris en otage Elle est si haute Que je ne peux l’atteindre Sinon dans mes rêves Alors je me bats Contre les gens qui passent Les gens qui tombent Les gens qui gagnent Si je n’étais pas un homme On me prendrait pour le diable N’oublies pas de faire rêver ton mec Car ce n’est pas tout de l’aimer Enlève quelques barbelés Pour qu’il puisse regarder Derrière l’horizon Quand la boule se meurt 58


LE CHENIL J’ai peur des fourmis La samedi après-midi Qui vont par grappes Chercher à bouffer Au centre commercial J’ai peur des souris En quatre quatre Les pattes manucurées Qui font la queue au parking Pour guetter les mecs divorcés J’ai peur des grues Qui plongent la main Dans mon jean Pour vérifier les étiquettes J’ai peur des lucioles Qui s’entassent Dans ma cage thoracique Pendant que les camion-poubelles Font des ronds dans le ciel J’ai peur des phacochères Qui courent après moi Les pantalons baissés

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J’ai peur des p’tits fours A cinq heures Et des vicieuses en vison Dans les bordels à thé J’ai peur de glisser dans sa baignoire Et de voir un jour Mon sexe en ivoire Sur sa cheminée J’ai peur d’être changé en chien Après l’amour Et de dormir au chenil Avec ses amants Changés en chien à leur tour…

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LA BOUEE DE SAUVETAGE Suis un fou Dans la foule D’un mètre quatre-vingt quatre Et vingt trois centimètres Aime la chair et les sens Traite l’amour Comme un état de choc Par l’oxygène et les tonicardiaques Aime la femme sur l’Himalaya A condition que la météo soit bonne Hais le pipi caca dodo Et la télé avant vingt quatre heures Hais les préservatifs Et les gens de tous les jours Hais leurs manies et leurs maladies Alors j’attends qu’ils passent Comme la pluie Ai peur Qu’il n’y ait plus de hasard De mystères De magie De lumière De chaleur 61


De déserts D’infini D’absolu Ni de sens A notre vie giratoire Ou l’on revient toujours Au même point Entouré de poils Et de glaire Pourtant la fille rousse avec moi A une bouche en bouée de sauvetage Qu’on lance à la mer Quand un homme se noie Une bouche en bouée de sauvetage Qu’on lance à la mer Quand un homme se noie

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LAUREEN Un nuage de chaleur Me transforme en éponge vaisselle Là comme ailleurs personne ne m’attend Trouve un hôtel pas cher Dans un quartier de putes pas chères Escalier pourri Le matelas aussi Des bestioles partout Les grille au zippo Et mets le feu à l’hôtel Un clodo se consume devant la porte Les pompiers n’sont pas encore là Des gamins m’refilent leur coke Jamais pris d’ces saloperies « Gringo de merde » ils me lancent Parce que je n’veux pas d’leur daube Me planque dans un bar Y’a d’la chair partout Ça m’convient Sens des pognes familières sur les fesses Pas eu l’temps d’mettre Ma ceinture d’chasteté

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– Fais moite ce soir, trouvez pas ? dit Laureen – Hi love ! Bogart t’a filé une perm ? Elle craque sur mon vingt trois centimètres Et j’plonge à fond dans l’décolt’ – Tu es mignon Bogart, ça m’va – Cigarette ? Coup de bol, j’trouve un paquet sur l’comptoir Manque de bol son proprio n’est pas loin Et m’écrase son mégot sur le naze J’aime pas faire l’allume-cigare Et ça s’termine au placard Maintenant l’araignée tisse sa toile Dans la raie d’Laureen L’enseigne clignote en jaune pisseux Le sperme sèche plus vite que l’alcool, me dis-je Alors que le jour pointe en bleu marine Beignets et café gras Les gamins détalent comme des rats Les sirènes de flics déchirent l’aube En haut d’la rue – Pourquoi t’es v’nu ici Bogart ? C’est la jungle – C’est la jungle partout, poupée – J’aimerais faire… Comment dire ? Un bout d’chemin avec toi – Cigarette ?

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ECRIS MOI UN POEME – Ecris-moi un poème – Ok mais tu m’caresses en même temps Je lui demandai du papier à écrire Elle chercha dans son sac Entre les tickets d’parking Les tubes de rouge Et les contredanses du jour – Tu peux écrire au dos d’ces factures Je n’les paye jamais Alors qu’elle s’y mettait Je vomis quelques notes du genre « Goûte le vertige A la limite des sens Et de l’obscène » Mon sexe battait la mesure Au rythme d’Eric Satie J’adore l’amour sur du Satie – Qu’est ce que tu aimes en moi ? Dis-je en cherchant des idées – J’aime quand tu souris Mais tu ne souris jamais – Tu es la fille Que j’aimerais aimer tout’ma vie 65


Et j’écrivis « Je suis en chute libre pour la vie » Je la mangeai maintenant Dans le creux du coude Puis dans l’aisselle Et la base du cou J’appuyai très fort sur les carotides Jusqu’au vertige Puis je mordillai les têtons Jusqu’au sang J’enfonçai la tête dans son ventre Pour la faire hurler de plaisir Comme un accouchement de phacochère J’avalai sa chair Doucement Très doucement Puis plus vite et plus fort Puis très vite et très fort Elle pleura par saccades Pourquoi pleurait-elle ? Je vomis d’autres notes La tête posée sur ses fesses Alors qu’elle sanglotait Je saisis les hémisphères De son globe d’écolier Et plongeai comme Jules Verne Au centre de la terre Plus tard je balbutiai Des mots ivres du genre « tu es la fille que j’aimerais aimer tout’ma vie, Je suis en chute libre pour la vie » 66


Je lui donnai les notes vomies Sur les factures impayées Je constatai que je n’avais de libre Que ma chute La lune était ronde Comme un globe d’écolier Je n’m’étais même pas aperçu Que j’avais oublié de jouir

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PUTAIN CE MEC – Putain ce mec ! Qu’est-ce qu’il la ramène Il fait son mariole Un sourire nauséeux Des yeux vides Une cervelle mitée Dans un look de série B Les filles le dissèquent En brassant un coca light Avec leur bâton de rouge à lèvres – Pourtant il a l’air d’un gamin En jean trop court, dit l’une – Mais sous le jean, dit l’autre Y’a un sexe qui bouge Un putain d’mec quand même

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LE BAIN – Pourquoi tu m’envoies un SOS en SMS ? J’m’arrachai en éventrant la concierge Un comprimé de trinitrine dans la glotte Et enfonçai la porte de la fille Contre l’avis d’mon toubib – Qu’est-ce qu’il se passe ? – Je divorce j’ai trente-huit ans Et ma mère est morte d’un cancer du sein – Qu’est-ce que tu veux que j’y fasse ? – Fais-moi des spaghettis au Single Barrel Et viens dans l’bain – C’est pour ça tout ce cirque ! – Tu écris toujours ? – Ouais j’crève la dalle Mais j’aime pas les spaghettis – dépêche toi Enlève tes fringues – Tu es dans les nuages mon chou T’as des états d’âme Et moi la facture du gaz – Allez fais pas d’manières – Pour toi ça roule Tu as un cul de reine 69


Tu pourras toujours vendre des pizzas J’balançai les spaghettis dans l’bain Avec le Single Barrel Puis la découpai A la lame Gillette En fines lamelles de phacochère

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AU FEMININ Fais gaffe à celles qui forcent sur la thyroïde Les seins pointus Comme des flèches de curare Fais gaffe à celles qui achètent Leur stérilet au supermarché En buvant du sperme allégé Fais gaffe aux pyromanes Qui un beau soir d’été Incendient ton âme Fais gaffe à ses yeux comme des phares Dans tes jours obscurs Et au téléphone qui sonne C’est peut-être la morgue Le pire est que la mort Soit au féminin

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PERFORE JUSQU AU CŒUR Il sauta dans sa tire Mit la gomme Et s’enfila une red stripe Y’avait d’l’amour sous l’capot Elle lui avait laissé un mot Sur l’répondeur Mais il n’savait pas qui c’était Ça doit être Wanda Elle a une bouche énorme Comme un incendie En plein mois d’août – Allô ? Wanda ? C’est toi qui m’a laissé c’message ? – Quel message ? – « Ta langue sur mon sexe Pour qu’il te perfore jusqu’au cœur » – Sale dégueulasse, va t’faire foutre Pas de chance avec Wanda – Allô Sarah ? Ça doit être Sarah Car elle a un cœur à ma portée A la portée de bien des mecs d’ailleurs Du genre has been Qui ont tout perdu 72


Sauf un peu de ciel clair au fond des yeux – C’est Bob, qu’est-ce qu’tu veux à Sarah ? – Je crois qu’elle m’a laissé un message – Quel message ? – « Ta langue sur mon sexe Pour qu’il te perfore jusqu’au cœur – Pov’pédé, si je t’attrape j’t’enfile Pas de chance avec Sarah Il roula tout’la journée Sous le canardeur impitoyable Vida son stock de Red Stripe Et jeta ses espoirs à la mer Bien plus tard il sut l’origine du message Il s’agissait d’un vieux trav’ Du coin d’sa rue Qui vint le lui dire A l’hosto Alors qu’il se réveillait du coma Perforé jusqu’au cœur

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FLIRT AVEC LE PIRE – Chéri je t’ai fait une surprise J’ai un nouveau stérilet – Rends-moi service mon chou J’ai une poussée d’herpès Tu n’veux pas regarder la télé ? – Mon mari est passé sur la cinq, tu l’as vu ? – Faut qu’j’lui rende ses boutons de manchettes Il a l’air programmé comme une machine à laver Fais-moi plaisir coupe tes étiquettes Fais-toi griller au soleil Et flanque la télé aux ordures D’ailleurs tout va à la poubelle Un jour ou l’autre – Mon mari aussi ? Fais un trou dans ton crâne Frotte au vitriol Et laisse entrer les miracles Qui flottent dans l’air – Chéri tu n’veux pas baiser quand même Avec une capote ? La vie est belle Mais elle flirte avec le pire

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SON AME BAT COMME L’HORLOGE Ses collants troués vont et viennent Le ventilo fait voler les toiles L’air est lourd Son vagin me fait naître et mourir Son âme bat comme l’horloge C’est la seule qui soit à l’heure dans l’quartier

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LA LUNE FLIRTE AVEC LES AIGUILLES DE PIN Dieu s’emmerde Y a-t-il un miracle Entre tes cuisses ce soir ? Les filles rodent Parmi les gens solubles Et les sexes en solde Les ruelles sentent le sperme daubé Alors que la lune flirte avec les aiguilles de pin Des éclairs rouges cisaillent ses yeux J’ai claqué mes neurones Pour ces yeux qui brulent Alors que tout est mort dans ma tronche Ma cervelle en a pris cinquante Et même plus un billet pour boire le dernier – T’as pas cent balles ? – Où ça ? La portoricaine m’a tout piqué – C’est pour bouffer il fait froid – T’as qu’à bouffer avec moi – Hey man ? Un double hot dog moutarde Et de l’aspirine mais à crédit

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Les gens vrais sont au tapis Les autres butinent les tapins Les bombasses tapinent les lascars Les arthropodes schizophrènes Font régner la justice Alors que les papillons fétides Copulent dans les phares Et que les mégères acariâtres Pourchassent leurs maris – Pourquoi t’es encore là ? J’ai plus un radis dis-je à la portoricaine – Mais t’as des cuisses de mec de foire mec – C’est pas une raison, je n’t’aime pas – C’est faux, de quel droit tu ne m’aimerais pas ? Les camion-poubelles Font leur rodéo devant les filles Un cow-boy plie un réverbère Y’a un maccab par terre Le bitume est rouge vif Et tout le monde se marre Les containers se remplissent De bières vides De papiers gras De capotes trouées Et de lettres d’amour Je jetterai bien la portoricaine aussi Alors que la lune flirte avec les aiguilles de pin

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LA FILLE D’A COTE Dieu que c’est beau une femme qui jouit Mais elle fait souvent semblant La fille d’à côté fait un vacarme d’enfer J’aime avoir l’oreille collée à la cloison J’imagine tous les vits alentour Se dresser d’envie Et leurs épouses leur tourner l’dos Vexées au fond du lit Dehors le jour renait bleu foncé On entend les sirènes Et le vent coule comme de la bière Sur ma peau humide

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BOUCHE DE MEGOTS Ils baisaient on line Bien sûr Line de coke Evidemment Elle Tongues en plastoc PVC Friande de coups de hanche Regard mauve cendré Bouche de mégots bleutée Et langue machée Comme une queue de billard Lui Tro dla balle Extrême viril et romantoc Joueur de gland Et homme de porc Avec qui elle kiffait à mort Question orgasmes Elle N’était pas présentable N’était pas parisienne Mais si amoureuse

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Ils avaient parlé Du bouquin Et de mon héros qu’on désosse Un amoureux du hasard Que dans son jeu pervers La vie met en pièces Ils avaient parlé du chaos Autour de lui Comme un atoll De requins unijambistes Dans un lagon déliquescent Ils avaient parlé du moment Où les sentiments Eteignent la conscience Et où tout recommence Elle s’était mise dans un coin Avait lu le premier chapitre Et avait eu des éructations – Ne vomis pas, ordonna-t-il Faut pas gâcher

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UNE BOMBE DANS L’CŒUR « Vous avec une bombe dans l’cœur » C’est ce que m’a dit le doc’ – Vous fumez ? m’a-t-il demandé – Cinq ou six par jour – Pouvez m’en offrir une ? J’avais encore un peu de temps Avant qu’on ne découvre mon cancer Depuis le toubib est mort du sien Moi je suis encore vivant Mais j’ai une bombe dans l’cœur Quand on est un jeune con On vit au dessus des règles On brûle les feux rouges Pour bouffer une pizza On pique un sac de géronte Pour faucher ses perlouzes Réaction anar Contre un monde Qu’on n’a pas choisi Et puis on rentre dans l’rang Pour bouffer des œufs d’lump On accepte les règles En mettant des cadenas 81


Dans la vie des autres Et un jour on s’retrouve Un vieux con Cadenassé et scléreux Pris au piège à son tour On se dit alors Qu’il y a pire que les jeunes cons Il y a les vieux cons Qui fleurissent dans les champs de l’abandon Avec une bombe dans le cœur

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L’ELEPHANT VERT Le téléphone rugit dans les chiottes – C’est qui encore ? Si j’suis en vie ? Ouais j’suis en retard Ok je t’aime Et j’suis illico dans l’parking J’allume le poste Deux étudiantes retrouvées dépecées Des mille-pattes ont la sclérose en plaques Pub « changez d’tampax » J’éteins ce bouillon de culture Et pile au rouge Désespéré Il pleut l’déluge Y’a du Bob Marley qui sort De je n’sais où Une jamaïcaine m’aperçoit A l’arrêt du bus Décroise les genoux Le gauche puis le droit Le temps d’apercevoir Son nylon jaune

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Je suis comme un comprimé d’aspirine Effervescent sous la pluie Elle déplie ses rayures rouges Puis ses rayures vertes Et s’avance vers moi Comme un tank amphibie – Tu montes ? On va faire un tour ? lui dis-je – Où tu m’emmènes ? dit-elle – Au bout du monde Si j’ai assez d’essence Le soleil bleu foncé a chassé la pluie Derrière nous se dessine Un arc en ciel vert, rouge et jaune Alors que les cadavres Gisent dans les flaques – Quelle merveilleuse journée n’est-ce pas ? – Ouais c’est une belle journée – J’suis vach’ment content d’t’voir – J’suis vach’ment contente aussi – Quoi d’neuf dans l’quartier ? – Les flics chassent les éléphants roses – Tu fais toujours un mètre soixante quinze ? – Toi t’as grossi – T’as des chaussettes cool – J’les ai achetées sur ebay aux enchères – L’important est qu’il y ait Une femme comme toi Dans ma tête – Le problème est qu’les filles Ne captent rien aux rêves des mecs, dit-elle 84


– Tu m’bouleverses tu sais – Tu m’bouleverses aussi On a regardé le coucher violet Et on a parlé d’ses règles La vie est superbe Comme un éléphant vert

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TOULOUSE LAUTREC J’m’prends pour Toulouse Lautrec Et j’écris à la terrasse des bistrots En trempant ma plume dans l’expresso Les filles me parlent du talent – Le talent les filles c’est vous qui l’avez Quand le vent remonte vos jupes Et qu’il nous fait rêver Et elles se mettent à rire Comme des cerises à moitié croquées Sur un air de Satie Elles parlent du plaisir Et de l’amour Et des miracles Qu’il ne faut pas laisser passer – La vie il faut en profiter dit l’une – Il faut jouir du bien et du mal dit l’autre – Bien malin peut dire Ce qui est bien Et ce qui est mal – Il faut passer de l’un à l’autre Moi je suis le bien dit la première – Et moi le mal dit la seconde

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Un mec arrive alors Avec des yeux bleus A la place des boules Elles partent aussitôt avec lui Ce mec est le bien pour elles Mais le mal pour moi Il a un sacré talent Je retire ma plume de l’expresso Et je range mon boulier marron La vie triomphe Avec ses drames Et ses yeux clairs Car c’est elle qui a du talent Et Toulouse Lautrec n’y peut rien

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CHAQUE JOUR EST UNE ETERNITE Il faut dix minutes Pour faire ses besoins Tous les matins Il faut trente minutes Pour prendre le métro Il faut cinq minutes Pour s’faire sucer Par sa secrétaire Il faut l’éternité Pour payer ses dettes Il faut dicter l’courrier Et j’n’ai pas le temps Il faut neuf mois Pour attendre le deuxième Il faut une seconde Pour changer l’heure d’été Il faut un instant Pour tout lâcher Ou alors Ça n’arrive jamais Il faut quarante minutes Pour attendre son patron Et une minute Pour s’faire virer Il faut vingt minutes 88


Pour appeler Véra Car c’est toujours Occupé – Hey c’est toi ? On baise un quart d’heure à midi ? – Non j’suis à la bourre J’ai un casting – Ok j’boufferai en cinq minutes Et la journée continue Et la nuit Et un autre jour Où se noient les minutes Les secondes Les heures Et les choses futiles Et les actes futiles Et les contraintes futiles Et les emmerdements futiles Et les coïts futiles Et les filles futiles Mais à tout moment Peut se produire le cataclysme Qui va te faire jouir Devant une fille bleue En transe Que tu ais vingt ans Quarante ou quatre vingt Car pour ça Le temps ne compte pas Et chaque jour Est une éternité 89


LES SORCIERES Les sorcières déambulent dans le ciel Elles n’en veulent qu’à mon sexe Qu’elles prennent pour un chou Alors que je cherche un sexe Qui parle d’amour V’là v’nir Suzy Elle a une bouche de dix huit Et des seins d’cent dix Ça c’est du chassis Elle s’maquille au ketch up Et prend mon âme Pour une tarte au citron V’là v’nir Murielle C’est d’la chair de fée Comme je n’ai jamais croquée Je m’suis grillé les ailes Derrière elle dans le ciel Elle me fait sauter sur ses g’noux Et prend mon sexe Pour un coucou

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V’là v’nir Rosy – Y’a plein d’mégots dans l’ciel Comment veux-tu qu’on baise ? J’aime tes grosses fesses Comme des nuages T’es un geyser Et j’suis en nage Je n’sais pas Si c’est bien prudent Les sorcières déambulent dans le ciel Elles n’en veulent qu’à mon sexe Qu’elles prennent pour un chou Alors que je cherche un sexe Qui parle d’amour

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DES FLEURS ROUGES Ça sert à quoi De parler de cul et d’amour ? Y’en a un qui est bègue Et l’autre qui est sourd Ma joue est posée Sur ses fesses douces Et je regarde les mateurs Tourner autour Y’a l’flic qui t’arrête Pour la ceinture sur tes seins Y’a l’gamin qui t’pique ton sac En t’mettant la main au cul Y’a l’facteur qui t’monte Les lettres d’amour Quand t’es sous la douche Y’a l’laveur de pare brise Qui t’asperge au carrefour Quand t’es en décapotable Y’a l’chien qui s’glisse Sous ta jupe Pour t’arracher ton string

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Ça sert à quoi De parler de cul et d’amour ? Y’en a un qui est bègue Et l’autre qui est sourd J’étale des fleurs rouges Sur sa peau de soie Ma joue posée Sur ses fesses douces Et je regarde les mateurs Tourner autour

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LA LOUVE NOIRE Une louve noire entra dans la boîte Comme une reine du boxing buissness Une auréole de lasers Autour d’une robe noire Fendue jusqu’à la thyroïde Une voilette sur le visage Et un collier argent D’où pendait une laisse Sans personne au bout La bête cherchait son maître – Qu’est ce que tu fous à cette heure ? Le zoo est fermé – Je cherche un mec qui m’aime – Ça devrait coller Pour les bêtes sauvages J’fais gratis Il l’empala derrière le bar En tirant sur la laisse comme un malade Elle gueulait de toutes ses forces Mais la sono était grave Personne ne pouvait l’entendre

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Il était ivre de lumière Aux commandes d’un vaisseau spatial Seules des ondes d’amour Le reliaient à la terre Très vite il implosa Dérivant dans le vide La cervelle en miettes dans les étoiles Et s’affaissa derrière le bar La laisse encore à la main – Embrasse-moi Balbutiait la bête Embrasse-moi je t’en prie Il lui manquait l’essentiel Qu’on l’embrasse Après l’amour Alors que les sniffeurs de sucre Buvaient de l’eau d’vaisselle Derrière le bar Elle disparut Avec sa voilette Son collier argent Et sa laisse noire Sans personne au bout Sans doute pour chercher l’amour Comme si on pouvait chercher l’amour

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TE HAIR D’AMOUR Aimer tes fesses sans limites Comme le désert Donner ma vie Pour une gorgée d’amour Mais peu de gens sont sans limites par ici Séduction vagabonde Sexe multiple Amour exclusif Ne tromper l’amour Que par l’amour Ecrire pour qu’une femme me désire Mais m’aimera-t-elle ? Romantique imprévisible et fou Haïr baiser à la même heure Aimer quand l’émotion me viole Paniquer quand la raison arrive Faut-il avoir la prétention de croire Qu’on n’est pas là pour rien ? Faut-il jouer au prompteur de la vie ? Jouer au clonage pour survivre ? Ou au hasard pour exister ? Etre l’esclave de l’incertitude Aimer les silences pour se comprendre Jouer à te haïr d’amour 96


UN DROLE DE GOUT D ENCENS Elle avait le même coiffeur que son chien Un look de cocker ménopausé Elle m’offrit du thé Me dit qu’elle aimait mon écriture Les yeux baissés sur j’n’sais quoi Le thé avait un drôle de gout Mes neurones flottaient Dans un lit d’encens Elle pressa mes testicules Jusqu’à la dernière goutte Puis découpa ma verge En tranches Sans enlever les bouts d’capote Gouta Et donna le reste à son clebs Le cocker platine se mit à écrire On le lut dans les salons On le regarda les yeux baissés Sur j’n’sais quoi Le thé avait un drôle de gout D’encens Elle pressa ses testicules Jusqu’à la dernière goutte Puis découpa sa verge 97


En tranches Gouta Et donna le reste à ses amies Elles se mirent A écrire comme moi Et furent décapitées Sur la place publique Les cabots du quartier Se partagèrent les restes Depuis ils s’écrivent Des lettres d’amour Avec un drôle de gout d’encens

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MAIS DE QUOI PARLAIT-ON ? On était une bande de déjantés En bagarre avec la société On n’voulait pas consommer On n’voulait que d’la bonne Et s’la partager Mais de quoi parlait-on ? On était une bande d’empaillés Qui attendions sereins La tombée du soir Dans le slide des guitares Quand je vis cette fille Ce fut l’éclipse Et je devins aveugle Ça dura l’éternité Que ça cognait fort dans mes côtes ! Le premier mot qu’elle dit : – Vous n’êtes pas le chauffeur de bus ? – Non pourquoi ? – Parce que le bus ne vient pas jusqu’ici – Vous savez où on peut manger ? – Non mais on peut chercher – C’est quoi votr’kif dans la vie ? – Ingénieur nucléaire – Vous croyez qu’on a des atomes crochus ? 99


La serveuse avait une bouche de vingt trois Elle faisait de la philo d’comptoir « L’amour c’est comm’la vie On n’en sort pas vivant » disait-elle – Pas d’accord l’amour c’est notre vérité – C’est mieux d’exister – C’est bien c’qu’j’disais Elle mettait mes chemises Sans rien dessous Je mettais ses culottes Sans rien dessus Je lui passais du Fats Weller Et la quatrième de Brûckner Ou la huitième « L’amour c’est pas du Nutella » disait-elle Je lui faisais ses courses intimes Et elle m’apprit ses caresses Je la rasais tous les jours Et elle faisait de même « J’ai horreur de baiser comme un réveil-matin » – Moi de même, disait-elle Au mac do’son entrejambe brillait Tel un lagon émeraude Je la caressais sous la table Et elle matait ma main Dans le reflet des carreaux – Qu’est ce que tu fais Avec un lascar comm’moi ? – Viens on va à l’hôtel – C’est normal que l’eau chaude Soit à droite 100


Et l’eau froide à gauche ? C’est tellement simple la vie Y’a qu’à la regarder dans les yeux Et attraper son âme Le temps de faire sécher Sa chatte sur le radiateur Elle faisait tournoyer mon sexe Comm’un hélico du Viet Nam Alors que mon âme grillait Dans les embruns du soir – J’ai l’impression que mon corps Coule dans tes veines – Viens on va s’marier Je suis enceinte de toi – Mais il faut publier les bans Et faire des prises de sang ! Elle m’embobinait car elle ne savait pas Que j’avais subi une vasectomie On était une bande de déjantés En bagarre avec la société On n’voulait consommer Que d’la bonne – Elle envoie – Elle n’est pas mauvaise – Elle est excellente Mais de quoi parlait-on ?

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GALILEE J’aime tes fesses tendres et dures S’éloignant vers les dunes Tu es ma chair et mes chromosomes Tes protons et tes neutrons Sont les mêmes que les miens Et tiennent dans une tête d’épingle Tout le reste Est de la poudre aux yeux Tu vas apprendre des tas d’conneries Que la terre est ronde Et qu’elle tourne autour du soleil Que les étoiles sont loin Et qu’il faut envoyer des satellites Pour connaître la météo Et les orages nucléaires Et puis un type viendra Et t’enlèvera derrière les dunes Tu comprendras Qu’il y a un grand trou derrière l’horizon Que Galilée était fou Que les étoiles tournent autour du soleil Que le soleil tourne autour de la terre Et que tu te fiches de la météo Et du nucléaire

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Ce jour là Tes fesses tendres et dures Auront disparu derrière les dunes

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LE CAFE CALABRAIS Ma vie ressemble a un rouleau de papier-chiottes En fin de parcours Ne me mettez pas au zoo Ni à l’hôpital Ni en prison Ni chez les fous La vie est faite de cages Et on quitte une cage pour un autre Bouffer des cacahuètes lyophilisées Du chewing-gum bio Ou du latex à la fraise Construire ses barreaux Et choisir son poison Voilà ce qu’on m’impose Ma femme est calabraise Et son cul ordinaire L’employé de la dératisation Baise la concierge Mon directeur se fait ma secrétaire Le flic du coin s’enfile la postière Pendant que la boite Déborde de lettres anonymes

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Ma secrétaire baise sa belle sœur Sa belle sœur se fait mon directeur Le dératiseur s’enfile le flic du coin La postière la concierge et la belle sœur Font ménage à trois Dans la pissotière d’en face Et le téléphone sonne sans cesse Et ma fille fait ses devoirs Et ma femme calabraise Pour me garder dans son lit Trempe un sucre dans le sang de ses règles Avant de le mettre dans mon café Ne me mettez pas au zoo Ni à l’hôpital Ni en prison Ni chez les fous A moins que je n’y sois déjà

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LA POSITION QUE JE PREFERE Je lorgne la fille De la tête aux pieds Par chance on ne voit Ni les orteils ni les talons Car c’est ce qu’il y a de plus laid Il faudrait donner des sandales Aux galériennes Et les escarpins aux models De Lucrèce Borgia Les mollets gainés de noir Cisaillant les cuisses avides Comme les dunes en plein désert Marbrées de lumière hésitante Sous la lune éprise Que dire des mamelles de Khéops Brillant dans des étoiles Amidonnées et arrogantes Comme les cols de Lagerfeld ? Que dire de cette bouche sanguinolente Comme une fraise de mai Tranchée d’un coup de dents Pour lui voler un baiser ?

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Ma main tremblante Dévore ses yeux Pour caresser son âme Alors que l’émotion filtre Sous ses paupières Comme si Dieu allait parler Le tour du proprio Se termine enfin Par ses fesses Rondes et dures Car c’est la position Que j’préfère

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COMME DES CHIENS C’est marrant Comme les chiens Ont des noms d’humains Et les humains Des noms de chiens Voyez les américains Bob, Rex ou Burt Et les chiens européens Hitler, Staline ou Ceausescu J’ai croisé un pitbull orange dans le bois « Au pied Hitler » hurla Bob des cités Un doberman gris fondit sur lui « Attaque Staline » gueula Rex du seizième Un dogue allemand se mêla à la bataille « Couché Ceausescu » vociféra Burt de Boulogne Marley, Harisson et Lancaster Se battirent comme des chiens Sous les regards ahuris D’Hitler, Staline et Ceausescu Qui pour la première fois Se serrèrent la patte

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LALA SOS SANG s’arrête au feu rouge J’passe sur l’trottoir Ecrase un flic Le sang d’flic Ne doit pas partir facilement Balance un cyclo dans l’caniveau Et arrive à la clinique Elle m’avait dit Je veux un enfant de toi Depuis je m’croyais intouchable Il m’en est arrivé Plus que ma dose Aujourd’hui j’ai tout oublié Juste le temps de trancher le cordon Et LALA est sur son ventre Elle vient de faire quinze rounds Sans protège dents Mais elle est championne On la met au sein Pour l’empêcher de crier Sa mère est calme Avec une perfusion d’héroïne Et des électrodes sur le front 109


On lui enlève LALA Pour la baigner dans l’eau d’javel Et lui faire un shampooing colorant Elle a l’air contente Avec ses grands yeux ouverts On en profite pour lui balancer Une giclée d’acide Et lui tremper les pieds dans l’encre rose Pour les empreintes LALA est la plus belle fille du monde

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STILL ALIVE Il est 10h24 C’est mon dixième café Et je suis toujours vivant Une fille couverte de filets de pêche Passe entre les tables Ses seins passent à travers les mailles Elle a une perruque vert pomme Et une mèche collée De la même couleur sous l’aisselle Car elle est italienne Sa chatte permanentée Est vert pomme aussi Les coiffeurs du coin Ont un sacré talent Il est 10h25 Et je suis encore vivant Son jeu de jambes est super Chaque mouvement de hanche Est un crochet du croit Puis du gauche Que dire de son uppercut Au troisième round je suis KO Le marteau piqueur a labouré mes synapses 111


Dans ce monde J’ai toujours été en cavale Sans savoir ce qu’on m’reprochait Il est 10h34 C’est mon quinzième café Et je suis encore vivant

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ENCORE Je suis de bonne humeur ce matin Le sexe s’est bien passé hier soir La fille prépare des œufs au bacon Et m’apporte le canard au lit Cent soixante dix sept mineurs Périssent dans une mine d’or Les cours vont grimper Le baril dégringole Les banksters s’font la malle Les vieux vont trinquer Comme d’hab ! Une bombe explose à Moscou Trente quatre morts Medvedev va piquer une crise Quatre centième partie Contre Kasparov Karpov gagne Encore ! Pat Phœnix âgé de Soixante deux ans Meurt à Manchester D’un cancer de la langue Mort d’un prêtre pédophile Encore ! 113


– Les nouvelles sont bonnes mon chou ? – Excellentes ! J’ai une faim de loup Et si on remettait ça après ? – Encore !

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LES MALABARS Le soleil organise un barbecue géant Dans le va et vient des mouches Les filles lèchent des glaces roses Et dansent comm’des papiers gras Une contorsionniste s’écrase Des points noirs sur les fesses Et aspire le sang après Les héros massent leurs tatouages A l’huile de vidange Les femmes enceintes fondent Comme des icebergs au micro-ondes Sentez-vous l’odeur froide De mon vitriol ? « On va s’éclater » disent les filles En entrant trois par trois aux WC Leur chair crame à petit feu Au rythme d’un rappeur NBA Libéré sous caution J’reluque une liane noire En string rose et talons verts La cervelle défrisée aux abonnés absents Elle mâche de la gomme Qu’elle étire en tous sens 115


Tina Monrœ tel est son nom Fait gonfler la bulle orange Entre ses lèvres pailletées Soudain l’air bag explose Sous mon nez Comme un feu d’artifice de paillettes Voletant dans les étoiles Que dire de mon allergie Aux malabars ? Voyez-vous les moignons Répugnants de ma colère ? La fille prend ça Pour un plaisir érotique Et un sentiment de puissance Comment gérer le vide du cœur Et le chaos de l’âme dans ce cas ? Le soir tombe comme une anesthésie Le sexe et l’amour ont toujours été ambigus Comment l’homme pourra-t-il mettre la femme Sur l’Himalaya de sa spiritualité Tant que les filles lui feront éclater Leurs malabars sous le nez ?

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LA VRAIE QUESTION Qu’est-ce-qui te fait rêver ? L’amour ? Les mots d’amour ? Les images d’amour ? Qu’est-ce-que tu aimes chez l’homme ? Sa peau sa poitrine ses yeux ou autre chose ? Et chez toi qu’est-ce-que tu aimes ? Tes seins tes jambes ou au milieu ? Tu aimes qu’on te lèche ? Les lèvres le bouton ou autour ? Tu aimes au fond ? A l’entrée ? A l’entrée et sur le bouton en même temps ? Tu aimes le sexe ? Un sexe ? Deux sexes ? Tu aimes les filles ? Un homme et une fille ? Qu’est-ce-que tu kiffes chez ton mec ? Et chez les autres ? Tu aimes être vue en train d’aimer ? Tu aimes voir les autres aussi ?

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En fait la vraie question Est de savoir si Parmi les mines les barbelés et les tranchées Un champ de fleurs Peut encore te faire rêver ?

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ET AVA ? Evitons le regard d’une femme Qui nous figera à jamais Regardons-la de bas en haut Par dessous ou par derrière Commençons par ses chevilles graciles Martyrisant ses escarpins agiles Puis remontons la couture noire Pour flâner à l’arrière du genou Et la naissance de la cuisse L’illusion fera le reste Nous emportant dans la magie En torturant notre imaginaire Au lieu de cela Nous matons la plupart du temps Des tongues martyrisées Par des chevilles lourdes Recouvertes d’un jean effiloché Trop grand et rapiécé Nous remontons par la force des choses Dans un sac de jute Où se perdent des fesses molles Désarticulées sous une taille épaisse Et des hanches masculinisées Des seins ? Il n’y en a plus 119


Ou esquichés sous des coques de mousse Nous découvrons alors un regard délavé Sous une mèche triste en vrac Cool et décontract’ Comment rêver ? Où est la magie ? Où est Jean Harlow ? Et Rita Hayworth ? Et Jane Russel ? Et Lane Turner ? Et Sophia ? Et Brigitte ? Et Ava ?

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LA MORT AUX FESSES J’rêve de folie A tes g’noux Dans une bulle d’absinthe Pour le rock and roll Le granit de tes seins Et les aigus de Gilmour, La mort aux fesses Mon image de dingue Court-circuite tes zones érogènes Dans ta tête éblouie de stilnox – Plus un kopeck Tu m’sors ce soir ? – T’as un canif ? On va s’faire pisser d’ssus – Qu’importe C’est pour le rock and roll Et les aigus de Gilmour, La mort aux fesses Les vioques à bloc Enchevêtrées dans leurs osselets S’essoufflent comme des cardiaques Dans les fumigènes Et la trance progressive 121


Vaudrait mieux s’payer Le club méditerranée – Le plein, dis-je au barman Sulfureux pédé Lisse et poudré Aux fesses épilées – Un jack, sans glace merde J’entends le zip du jean Derrière le zinc Les ailes cramées Les lèvres givrées Comme un ange glacé Me capturant dans ton délire Alors que tes orgasmes éclatent Comme les aigus de Gilmour, La mort aux fesses

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J’ME TIRE EN SOLO J’me tire en solo J’ai un plan d’évasion Les chromes de la jag’ Brillent comme il faut Je l’ai faite laver avant la pluie L’essence a la bonne température Y’a du jeu dans la roue avant Et plus d’essuie-glaces Mais il ne pleut pas Et j’crois que ça ira J’en ai marre des mecs merveilleux Qui gaspillent leur génie Pour le premier cul qui passe J’en ai marre des autres Qui paient leurs rêves à crédit Et restent coincés dans le vide-ordures Quand il faut aller bosser J’en ai marre des coiffeuses divorcées Des sexes dégriffés Des poussées d’herpes Et d’l’amour qui grince Comme les ressorts du lit

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Alors je file Car j’attends l’huissier J’ai mis la pancarte des chiottes Sur la porte d’entrée J’espère qu’il n’aura pas envie de pisser Les chromes de la jag’ Brillent comme il faut J’mets la gomme Ça déménage Pourvu qu’la pluie Ne s’mette pas à tomber

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