Solidarité 1/2011

Page 1

www.oseo.ch

Le magazine de l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO • Février 1/2011

Suisse Traduire les nuances culturelles El Salvador Parés en cas de catastrophe


Editorial

2

Revue de presse

Chère lectrice, cher lecteur, Cette année, l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière fête ses 75 ans! Fondée par l’Union syndicale suisse et le PS en

1936, soit en pleine crise économique, l’OSEO a eu pour première tâche de venir en aide aux familles ouvrières nécessiteuses en Suisse et à l’étranger. Nous sommes aujourd’hui fiers de ces trois quarts de siècle d’engagement, en faveur des victimes de la guerre

d’Espagne et des réfugié-e-s en Europe, aux côtés de mouvements de libération en Amérique latine, dans l’intérêt des migrant-e-s et des personnes sans emploi en Suisse, de même que pour les victimes de catastrophes.

19.01.2011 Une «Pierre équitable» pour Onex Onex a reçu hier la «Pierre équitable», symbole de son implication contre l’exploitation des travailleurs dans le monde. C’est la première commune romande à recevoir la «Pierre équitable» décernée par l’OSEO. Onex s’est démarquée par «sa stratégie exemplaire afin d’acheter uniquement des biens produits dans des conditions de travail décentes», explique HansJürg Fehr, président de l’OSEO, qui a ensuite remis la distinction à Carole-Anne Kast, maire d’Onex.

Depuis que l’OSEO a vu le jour, certaines choses sont restées les mêmes, mais beaucoup ont changé:

aujourd’hui encore, nos activités se fondent sur la solidarité, une valeur que nous appliquons dans la pratique. Et la solidarité est aussi nécessaire de nos jours qu’elle l’était en 1936. Le monde n’est toutefois plus le même qu’il y a plus de sept décennies. Tout comme les modes de vie, la solidarité a évolué: il ne s’agit plus d’aide, mais de coopération entre partenaires. A l’occasion de notre anniversaire, nous nous offrons

13.12.2010 Le Père Noël est en avance cette année Depuis trois ans, des récoltes de jouets sont organisées dans les deux grands commerces de Martigny. Les jouets rassemblés seront acheminés dans les ateliers de l’OSEO Valais, à Sion. Ils y seront triés et réparés par des personnes au chômage. «On a en moyenne une dizaine de personnes à l’atelier-jouets qui ont ainsi une activité valorisante, motivante, qui leur permet par ailleurs de garder le contact avec le monde du travail», souligne Gérard Moulin, directeur de l’OSEO Valais.

donc un nouveau nom: Solidar Suisse. Dès début avril,

c’est sous nom que nous apparaîtrons, tout en conservant l’intitulé Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO, qui rappelle nos origines et souligne nos liens avec les associations OSEO régionales, qui conservent leur nom. Vous en apprendrez plus sur ce changement et sur l’anniversaire de l’OSEO en lisant les pages 9 à 11. Le prochain numéro portera déjà les couleurs de Solidar Suisse et nous espérons pouvoir continuer à compter sur

votre appui et sur votre fidélité. Ruth Daellenbach, directrice de l’OSEO

03.12.2010 «Russie 2018» et «Qatar 2022», marques déposées Le comité exécutif de la FIFA a confié, hier à Zurich, l’organisation des Coupes du monde 2018 et 2022 à deux hôtes inédits. Ce verdict laissera des traces. (…) L’OSEO n’a pas tardé à se déclarer «indignée et scandalisée» par ce résultat en faveur de deux pays qui «violent systématiquement les droits du travail et les droits humains». L’organe souligne notamment, concernant le Qatar, la discrimination envers les femmes qui ne bénéficient d’«aucune protection contre la violence domestique», et l’absence de «toute liberté syndicale».


SOMMAIRE

3

SUISSE Des interprètes communautaires favorisent la compréhension mutuelle

4

CONCOURS

8

POINT DE VUE Depuis 75 ans, l’OSEO s’engage pour une société plus juste

9

ACTUALITES L’OSEO devient Solidar Suisse

10

Les OSEO régionales et Solidar Suisse restent étroitement liés

11

INTERNATIONAL El Salvador: une préparation efficace réduit l’impact des catastrophes naturelles

12

Burkina Faso: la formation et de nouvelles méthodes agricoles améliorent le quotidien

14

DONS Ouvrir des perspectives grâce à un testament

17

PORTRAIT David Valère redonne confiance à des personnes cassées par la vie

18

SUISSE Le projet Derman, de l’OSEO Schaffhouse, forme des interprètes communautaires qui favorisent la compréhension entre population suisse et migrant-e-s. P. 4–6

ACTUALITES L’OSEO fête ses 75 ans d’existence et s’offre un nouveau nom. P. 9–11

Page de titre: une traductrice et une participante au cours présentent leur affiche sur les fêtes religieuses. Photo: Sabine Rock. / Dernière page: Au Salvador, une famille se met à l’abri du danger lors d’inondations. Photo: Mónica Vázquez.

Impressum Editeur: Œuvre suisse d’entraide ouvrière, Quellenstrasse 31, 8031 Zurich, Tél. 021 601 21 61, e-mail: info@oseo.ch CP 10-14739-9 Lausanne. www.oseo.ch Rédaction: Katja Schurter (resp.), Rosanna Clarelli, Christian Engeli, Hans Fröhlich, Alexandre Mariéthoz, Cyrill Rogger

INTERNATIONAL Au Salvador, une bonne préparation de la population permet de réduire les conséquences des fréquentes catastrophes naturelles. P. 12–13

Layout: Atelier Binkert, www.atelierbinkert.ch Traduction: Irene Bisang, Ursula Gaillard, Milena Hrdina, Walter Rosselli, Peter Schrembs Correction: Angelo Ciampi, Marianne Enckell, Jeannine Horni Impression et expédition: Unionsdruckerei/subito AG, Platz 8, 8201 Schaffhausen Paraît quatre fois par an. Tirage 37 000 ex. Le prix de l’abonnement est compris dans la cotisation (membres individuels 50.– par an minimum, organisations 250.– minimum). Imprimé sur papier recyclé

INTERNATIONAL Au Burkina Faso, des paysan-ne-s apprennent à lire et utilisent de nouvelles méthodes agricoles. Ils améliorent ainsi durablement leur quotidien. P. 14–15


Suisse

4

«Je ne me contente pas de traduire chaque phrase» Derman est un service d’interprétariat interculturel créé par l’OSEO Schaffhouse. Les interprètes communautaires contribuent grandement à la compréhension entre Suisses-ses et migrant-e-s. Texte: Katja Schurter. Photos: Sabine Rock La petite salle de cours est pleine de rires et de chuchotements. Trois semaines avant Noël, les participantes au cours d’information sociale de l’OSEO Schaffhouse se livrent à une activité spéciale: elles réalisent des panneaux sur les fêtes de leurs pays d’origine, depuis le ramadan jusqu’au Nouvel An thaï, en passant par le Noël russe. Puis, ces 30 femmes de tous âges se serrent autour des tables pour prêter une oreille attentive à leurs traductrices respectives. Dans les cours d’allemand proposés par l’OSEO Shaffhouse, une leçon sur trois est consacrée à l’information sociale. «J’apprends comment les gens se saluent en Suisse, comment ils mangent, comment ils vivent», explique Thunwa Moser. «Le système politique suisse n’a rien à voir avec le nôtre, en Thaïlande, ici, les lois changent chaque année.» Savoir comment circuler «est au moins aussi important que la langue», ajoute Nabila K., qui vit en Suisse depuis un an et demi. «Au début, je ne savais pas comment traverser la route, il n’y a pas de feux ni de passages pour piétons en Algérie.» C’est dire si les sujets abordés ici sont variés, ils vont de l’éducation au mouvement à l’alimentation, en passant par le logement, l’école et la santé. «Les pays d’où proviennent ces femmes ne connaissent pas le conseil», raconte Serpil Sahin, la responsable du cours. «Il ne leur viendrait pas à l’idée de chercher de l’aide, non pas parce qu’elles

n’en veulent pas, mais parce qu’elles ignorent comment ça fonctionne ici.» Elle accorde aussi beaucoup d’importance aux échanges entre migrantes: «Quand on parle du système scolaire, je leur demande de raconter comment cela se passe dans leurs pays respectifs et elles comprennent qu’il y a plusieurs façons de faire.»

Traduire et expliquer C’est le service Derman qui fournit les traductrices pour l’information sociale (voir encadré). Som Arias est thaïlandaise. Elle est arrivée en Suisse en 2004 et elle a suivi le cours d’allemand et d’information sociale de l’OSEO à Schaffhouse. Quand son enseignante lui a demandé si elle voulait faire une formation de traductrice interculturelle, elle a sauté sur l’occasion: «Je me disais, si elle pense que j’en suis capable, j’essaie.» Elle recevra son diplôme d’interprète dans quelques jours et elle se réjouit beaucoup. Quand on lui demande ce qui est spécifique à l’interprétariat communautaire, elle répond: «Je ne me contente pas de traduire chaque phrase. Je m’arrête pour expliquer des choses. Dans les services de psychiatrie, par exemple, j’explique qu’en Thaïlande il est normal d’être entouré d’esprits, ou que c’est un signe de respect

de ne pas regarder son vis-à-vis dans les yeux.» Aux Thaïlandaises, elle explique ce qu’est une classe d’accueil. C’est pour cela que les interprètes interculturels doivent être familiarisés avec les deux cultures.

Comprendre son rôle «L’histoire de Som Arias n’est pas un cas unique», explique Barbara Ackermann, la responsable de Derman. «Nous pressentons des gens et nous les encourageons à se former à l’interprétariat interculturel.» Nos interprètes sont souvent demandées dans les services scolaires, hospitaliers et psychiatriques. «Dans le canton de Schaffhouse, on a compris qu’il fallait recourir à la traduction intercultu-

«Je n’aurais jamais imaginé qu’il existe un calendrier pour la chambre à lessive.» relle pour discuter avec les parents, à l’école. Dans d’autres cantons, il arrive encore souvent que ce soient des enfants qui traduisent, c’est trop leur demander et cela induit un conflit de loyauté. À Schaffhouse, nous avons un problème avec l’hôpital, et les assurances sociales partent du principe que les gens n’ont qu’à se débrouiller pour comprendre les formulaires», ajoute Barbara Ackermann. Ellemême et le délégué cantonal à l’intégration


Suisse

5

Barbara Ackermann, Serpil Sahin et Michela Gallucci savent à quel point des interprètes communautaires sont importantes pour favoriser une bonne compréhension mutuelle.

Kongjong Yongynd, Thunwa Moser et Som Arias élaborent leur affiche sur le Nouvel An thaï.


Suisse

6

Hanadi El Kasti, Sareen Habeeb et d’autres participant-e-s de langue arabe sont fières de leur affiche sur la fête du sacrifice Aïd.

essaient depuis longtemps d’obtenir de l’hôpital cantonal qu’il engage des inter­ prètes communautaires, car il faut des gens formés qui soient au fait de leur rôle.

Valoriser les personnes migrantes L’office d’intégration du canton de Schaffhouse engage 80 fois par an les interprètes de Derman pour mettre en place des conventions d’intégration. Ces conventions sont obligatoires dans le canton pour toutes les personnes de «pays tiers» qui rejoignent en Suisse des membres de leur famille ayant un permis B ou C. Michela Gallucci, fonctionnaire de l’office, considère que cette obligation offre aux personnes de langue étrangère une aide pour s’y retrouver dans la jungle des cours d’allemand. «99 pourcent trouvent cela positif et apprécient le conseil.» Les interprètes communautaires permettent un contact beaucoup plus facile avec les migrant-e-s. «C’est important que les gens puissent s’exprimer et être compris. C’est aussi une forme de valorisation d’engager des interprètes pour eux, cela leur montre que nous les prenons au sérieux.»

Qu’en est-il des enfants? Les panneaux sont terminés. Serpil Sahin distribue une feuille sur l’assurance maladie. Les interprètes l’expliquent aux femmes dans leur langue respective. L’éducation des enfants suscite aussi beaucoup d’intérêt. Mona R. est Erythréenne, elle aimerait en savoir plus sur nos méthodes modernes: «Quand on nous demande si les méthodes qui ont cours ici

nous plaisent, la plupart disent non», ditelle. Serpil Sahin, la responsable du cours invite toujours un spécialiste pour rassurer les parents: «Beaucoup de migrant-e-s pensent que nous élevons nos enfants tout autrement que dans leur pays d’origine, et ils en oublient leur rôle de parents, ce qui me semble une grave erreur. C’est bien si une personne compétente leur explique qu’en Suisse non plus, les enfants n’ont pas le droit de faire tout ce qu’ils veulent.» L’OSEO a aussi mis sur pied une garderie pendant les cours d’allemand pour que les femmes puissent venir aux cours. Leurs bagages scolaires sont très différents, il y a les femmes analphabètes et des universitaires. «Les femmes restent plus ou moins longtemps, selon leurs antécédents scolaires», explique Serpil Sahin.

«J’avais peur de me rendre seule à l’hôpital, mais grâce à l’information sociale, j’arrive à me débrouiller maintenant. Remplir un formulaire par exemple, ou m’intéresser à la politique.» Les informations sur les usages locatifs suisses lui ont aussi été d’un grand secours: «Quand je voulais faire la lessive et que mon voisin me disait non, je pensais qu’il était raciste. Je n’aurais jamais imaginé qu’il existe un calendrier pour la chambre à lessive.»

Éviter les malentendus Sabreen Habeeb est irakienne. Elle est en Suisse depuis huit mois et va bientôt accoucher d’une fille. Elle se réjouit.

Derman Derman est un service d’interprétariat communautaire mis sur pied par l’OSEO Schaffhouse, qui forme et met à disposition des interprètes. Ces personnes peuvent faire un diplôme et suivre une procédure d’équivalence pour acquérir le certificat suisse pour les interprètes communautaires depuis 2009 (www.interpret.ch). Le service dispose d’un réservoir de 150 à 200 personnes formées, dont 40 à 60 travaillent régu­ lièrement, et couvre 60 langues et dialectes. Derman répond à environ 3000 appels par année, principalement de la part des écoles, du secteur de la santé, des services sociaux et du bureau de l’intégration. Les institutions paient Derman pour ces interventions, les interprètes sont engagés par Derman, la structure elle-même est cofinancée par le canton et la Confédération.


QUOI DE NEUF?

7

Des droits pour les employé-e-s de maison

Valais: mise en œuvre du SeVal

«Pierre équitable» pour Onex

Le travail domestique et la garde des membres dépendants de la famille forment un gigantesque secteur économique où règne l’arbitraire le plus total. Il était urgent d’en réglementer les conditions de travail, car la demande de main-d’œuvre «bon marché» est en forte augmentation, de même que l’offre venant de migrantes du Sud et d’Europe orientale. Les nouveaux barèmes salariaux des employé-e-s domestiques fixés par le Conseil fédéral sont entrés en vigueur le 1er janvier. Et une convention pour les employé-e-s de maison devrait être signée lors de la Conférence de l’OIT, en juin. Mais cela ne suffira pas: il faudra que les personnes concernées s’organisent pour faire valoir leurs droits. L’OSEO, UNIA et le réseau Denknetz organisent une journée de réflexion à ce sujet, le 2 avril, à Berne: www.oseo.ch/agenda

Depuis janvier 2011, le SeVal (semestre d’évaluation) a ouvert ses portes à Sion. Ce projet de l’OSEO Valais accueille des jeunes, à la recherche d’une solution professionnelle, pour lesquels un accompagnement spécifique au niveau pédagogique et social est indispensable. Quatorze jeunes bénéficient d’un accompagnement personnalisé. L’accent est mis sur l’apprentissage des comportements et des attitudes à adopter face à un futur employeur. Des techniques de recherche d’emploi sont également dispensées. Cette mesure se différencie du Semestre de motivation (SeMo) déjà existant par la durée du contrat (12 mois à la place de six), ce qui permet au jeune de mieux appréhender les règles de base nécessaires à son insertion dans le monde du travail. www.oseo-vs.ch

Le 18 janvier, Hans-Jürg Fehr, président de l’OSEO, a remis une «Pierre équita­ ble» à la commune d’Onex. Cette distinction récompense les communes qui ont défini une stratégie exemplaire afin d’acheter uniquement des biens produits dans des conditions décentes. Suite à une motion du PS acceptée en mai 2010 par le Conseil municipal, le Conseil administratif d’Onex a rapidement décidé de compléter sa pratique actuelle afin de mettre sur pied une politique d’achats durable et équitable. Onex est la première commune genevoise à prendre une telle décision, suite à une motion déposée dans le cadre de la campagne de l’OSEO «Non à l’exploitation grâce à nos impôts!». Depuis son lancement, plus de 50 communes romandes (dont une quinzaine dans le seul canton de Genève) se sont engagées sur la voie d’achats publics équitables. www.oseo.ch/news

Une antenne pour les sans-papiers à Lucerne Plusieurs organisations et des particuliers ont créé une association pour l’ouverture d’une antenne pour les sans-papiers à Lucerne, le 12 novembre 2010. L’OSEO de Suisse centrale a contribué à sa mise sur pied et elle en est membre. L’initiative vient des milieux ecclésiastiques et syndicaux. Comme dans d’autres villes de Suisse, les personnes sans titre de séjour disposeront désormais à Lucerne d’un espace où trouver conseil, aide et soutien. Marcel Budmiger (comité de l’OSEO de Suisse centrale) représente l’Union syndi­ cale lucernoise au comité de l’association. Pour devenir membre individuel ou collectif de l’association, s’adresser à: nicola.leider@kathluzern.ch


CONCOURS

8

Le mot caché de l’OSEO

Résultat du baromètre

1. Beaucoup de tailleurs de pierre chinois en souffrent. 2. Si l’OIT la ratifie en juin 2011, les conditions de travail des employé-e-s de maison s’amélioreront. 3. Ce riz pousse sur terrain sec. 4. Ces îles ont été frappées par le récent tsunami. 5. Un projet de l’OSEO Schaffhouse qui contribue à atténuer les malentendus. 6. La FIFA a choisi ce pays pour organiser le Mondial 2022, même si la situation des femmes y est désastreuse. 7. Est souvent détruite par les tempêtes qui frappent le Salvador. 8. L’association burkinabèe ADDI en distribue souvent. 9. Un centre de contact pour sans-papiers vient d’ouvrir dans cette ville. 10. Avec de telles pierres, l’OSEO récompense les communes qui veillent scrupuleusement à la dimension sociale de leurs achats. 11. Par ce biais, vous pouvez soutenir l’OSEO de manière efficace. 12. Nom d’un nouveau projet de l’OSEO Valais. 13. David Valère utilise cette méthode dans le cadre du projet ParcourS de l’OSEO Genève.

Pensez-vous que la coopération au développement ne s’attaque pas suffisamment aux causes de la pauvreté?

oui non pas de réponse

Quelles devraient être les priorités de la coopération au développement?

1er prix: une sacoche 2e prix: un petit sac en soie 3e prix: un étui

100 80

100 60

80

40

1.

60 20 40 0

2.

20

3.

0

La formation La lutte contre la corruption et l’évasion fiscale Le respect du droit du travail La construction d’infrastructures La participation de la société civile

4. 5. 6. 7.

La Suisse devrait-elle octroyer plus d’argent à l’aide au développement?

8. 100

9.

80 60

10.

40

oui non pas de réponse

20

11.

0

12. 13.

Envoyez la solution à l’OSEO via le talon-réponse ci-joint, sur une carte postale, ou par e-mail à info@oseo.ch, sujet «mot caché». Toutes les réponses correctes participent au tirage au sort. Ces prix sont amicalement offerts par l’atelier de l’OSEO Bâle. La date limite d’envoi est le 14 mars 2011. Le nom du gagnant ou de la gagnante sera publié dans Solidarité 2/2011. Le concours ne donne lieu à aucune correspondance, ni à aucun recours. Le personnel de l’OSEO et de ses associations régionales n’a pas le droit d’y participer. La solution de l’énigme de Solidarité 4/2010 était «Teste ta commune». Le gagnant a été tiré au sort: Marcellin Aubry, de Porrentruy, a gagné un bon d’achat de 50.- auprès de l’enseigne Outlet du Coq Sportif. Ce prix est amicalement offert par Cooqpit. Nous remercions tou-te-s les participant-e-s, ainsi que Cooqpit pour le bon offert.

Commentaire de Barbara Burri, responsable de la coopération au développement Nous sommes ravis qu’autant de personnes soient favorables à ce que le financement de l’aide au développement soit augmenté. La pauvreté ne peut être vaincue qu’en augmentant les fonds sur le plan global. Cependant, il est clair qu’au vu des énormes différences dans les flux financiers destinés à la politique économique et à la coopération au développement, cette dernière ne peut pas faire face toute seule aux causes de la pauvreté. Pour l’OSEO, il n’est pas question de se limiter à soigner les symptômes. Nous nous engageons en faveur du respect des droits du travail pour vaincre la pauvreté.


L’OSEO a de l’avenir Il y a 75 ans que l’OSEO œuvre pour une société juste sur les plans économique et social. Ce faisant, elle se distingue par son engagement pour le respect des normes du travail, une lutte plus cruciale que jamais. Texte: André Daguet L’OSEO a 75 ans! C’est en effet en 1936, en pleine crise économique, que l’Union syndicale suisse (USS) et le Parti socialiste (PS) ont fondé cette œuvre solidaire afin de venir en aide aux familles ouvrières en Suisse et à l’étranger. Avec leurs sections et leurs groupements locaux, l’USS et le PS sont aujourd’hui encore les parrains de l’OSEO. Au fil du temps, ces liens sont quelque peu tombés dans l’oubli. Les changements survenus ces dernières années au sein de l’OSEO, des syndicats et du socialisme les ont à nouveau resserrés.

L’idéal d’une société équitable et juste André Daguet Conseilller national PS et syndicaliste à Unia

A l’instar des syndicats et du PS, l’OSEO a de tout temps défendu l’idée d’une société juste sur les plans économique et social. Cet idéal reste d’actualité. Pour se rendre compte de l’ampleur de la lutte à mener, à l’échelle mondiale, afin de faire respecter les normes fondamentales du travail, il suffit de considérer quelques chiffres: la moitié environ de la maind’œuvre mondiale gagne moins de deux dollars par jour. C’est dire que quelque 1,5 milliard de personnes ont certes un travail, mais qu’elles ne peuvent pas en vivre. De plus, 80% des salarié-e-s sont dépourvus d’une protection sociale suffisante. Pire encore: malgré tous les efforts consentis de par le monde ces deux dernières décennies, le fossé entre riches et pauvres, entre Nord et Sud, entre ga­ gnants et perdants de la mondialisation ne s’est pas rétréci, ne cessant au contraire de se creuser.

Normes du travail en point de mire Voilà pourquoi l’OSEO s’est attachée ces dernières années à défendre les normes du travail. Les effets que la mondialisation a produits montrent clairement à quoi mène le capitalisme sauvage: les inégalités se creusent, on bafoue les normes du travail et l’équité des salaires, l’égalité des sexes et l’égalité des chances sont loin de devenir réalité, aussi bien dans les pays du Sud que chez nous. Au contraire, la précarité qui mine des couches entières de la main-d’œuvre ne se limite plus aux pays du Sud et de l’Est. Il y a belle lurette qu’elle touche aussi le monde industrialisé, où un nombre croissant de personnes ne parviennent pas à se nourrir et à nourrir leur famille avec le revenu de leur travail.

Penser global – agir local L’OSEO déploie surtout ses activités en Afrique, en Amérique latine et en Europe du Sud-Est, afin de lutter contre la pau­ vreté, faire respecter les droits de la personne humaine et les normes du travail, et promouvoir la participation démocratique. Pour réaliser ces objectifs, il importe aussi de changer la politique et les réalités sociales en Suisse. L’OSEO s’y attache par son travail de sensibilisation, telle la campagne «Non à l’exploitation grâce à nos impôts!» Ce sont ces efforts qui font de l’OSEO un organisme solidaire indispensable pour les syndicats et le PS. Car cette lutte, il faut la mener aussi bien chez nous que partout dans le monde.

Point de vue

9


ACTUALITES

10

L’OSEO devient Solidar Suisse Le 14 janvier, l’Assemblée générale de l’OSEO a décidé de franchir un pas vers l’avenir: l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO devient Solidar Suisse. Texte: Ruth Daellenbach. Cartoon: Anna Sommer

Notre nouveau nom marque à la fois la continuité et le changement: tout en restant fidèles à nos origines et à la solidarité, notre valeur fondamentale, nous nous ouvrons à de nouvelles perspectives. Fondée en 1936 par le PS Suisse et par l’Union syndicale, l’OSEO a eu pour tâche première d’apporter une aide concrète à des familles ouvrières en situation précaire. Au niveau international, l’OSEO a appuyé les victimes de la guerre civile espagnole, puis l’aide aux réfugiés a prédominé après la Seconde Guerre mondiale. Par son soutien, l’OSEO exprimait sa solidarité et prenait position en faveur de la justice sociale, et contre l’exploitation et le fascisme. Les valeurs fondamentales que sont la solidarité, la démocratie et la justice continueront à sous-tendre le travail de Solidar Suisse. La désignation Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO, qui figurera sous notre logo, rappellera notre lien avec nos origines et les associations OSEO régionales, qui conservent le nom actuel.

La solidarité internationale aujourd’hui L’OSEO a compté parmi les premières organisations suisses à pratiquer l’aide au développement. Avec le temps, la notion de développement a évolué: il ne s’agit plus de fournir une «aide directe»; par delà les pays, les régions et les continents, nous coopérons avec des partenaires, à

savoir des personnes et des organismes qui œuvrent contre la pauvreté, pour la justice sociale, la démocratie, les droits de la personne humaine et les normes du travail. Notre nouveau nom, Solidar, reflète cette évolution de la notion de développement.

Les activités de Solidar Suisse Dans les pays émergents et en développement, nous collaborons avec des partenaires locaux (groupements de femmes, syndicats, organisations sociales, etc.). En Europe, nous participons activement à des campagnes et des projets du réseau Solidar*. En Suisse, nous menons en collaboration avec nos parrains des campagnes pour demander une politique en faveur d’un développement solidaire. Solidar Suisse continuera de se concentrer sur les priorités suivantes: travail dans la dignité et normes du travail, démocratie et droits de la personne humaine

et aide humanitaire après une catastrophe. Comme ces dernières années, nous accorderons une place croissante aux conditions de travail décentes.

Nouvelles perspectives Pour ce qui est des normes du travail, nous allons innover en menant également des activités en Chine. En adoptant le nom Solidar Suisse, nous soulignons notre appartenance au réseau européen. En Suisse, le recours aux nouveaux médias nous permettra d’atteindre davantage les jeunes, dont nous aimerions attirer l’attention sur les activités de Solidar Suisse. De plus, le terme Solidar est universellement connu, que ce soit en Suisse, en Amérique latine, en Afrique ou en Europe de l’Est.

* Au sein du réseau européen Solidar, l’OSEO est associée à quelque 53 œuvres d’entraide issues du mouvement ouvrier, des syndicats et de la social-démocratie.

Baromètre de la solidarité Êtes-vous en faveur du changement de nom de Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO en Solidar Suisse? Le nouveau nom exprime-t-il nos valeurs et objectifs? Répondez à notre sondage au moyen du talon-réponse joint à ce numéro.


Invitation

Assemblée générale de Solidar Suisse/OSEO

Deux noms – une solidarité L’OSEO devient Solidar Suisse, les associations OSEO régionales conservent leur nom. Nous restons étroitement liés. Texte: directions des associations OSEO régionales

Vendredi 27 mai 2011, dès 16 heures Volkshaus Zurich Stauffacherstrasse 60, Zurich Programme* 16 heures: Assemblée statutaire Tou-te-s les membres de Solidar Suisse/ OSEO sont invités. Prière de vous annoncer d’ici au 8 avril au moyen du talon ci-joint, par courriel (info@oseo.ch) ou par téléphone (044 444 19 19). 17 h 30: Assemblée publique

Depuis la réorganisation de 2005, dix associations OSEO régionales indépendantes assurent les activités de l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière en Suisse: elles fournissent une aide variée (formation, conseils et programmes d’occupation) à ceux qui ont besoin d’un soutien pour assurer de manière autonome leur intégration professionnelle et sociale. L’Œuvre suisse d’entraide ouvrière est synonyme d’engagement durable et résolu aux côtés de ceux qui traversent une situation sociale et économique difficile. Cette réputation vaut aux associations OSEO régionales d’être régulièrement mandatées par les pouvoirs publics pour concevoir des programmes novateurs et réaliser de nouveaux projets.

Nouveau look Alors que l’OSEO change de nom, le magazine Solidarité se présentera sous un jour nouveau dès le prochain numéro. Les OSEO régionales continueront d’y rendre compte de leurs activités dans la rubrique «Réseau»

Le mouvement entamé en 2009 par la création d’un secrétariat national se poursuivra en 2011 par la constitution d’une organisation faîtière pour le réseau des dix associations OSEO régionales. Ces associations – qui comptent quelque 500 collaboratrices et collaborateurs dans toute la Suisse et constituent le plus gros fournisseur de programmes de réintégration ou pour chômeurs – vont ainsi renforcer leur position dans l’acquisition de mandats nationaux et se doter de structures qui leur permettront de mettre en commun leurs ressources et leur savoir-faire. De Schaffhouse à Chiasso, de Genève à Zurich, les associations OSEO régionales sont bien ancrées dans les trois régions linguistiques de la Suisse et continueront de porter le nom OSEO au-delà de 2011. Nous souhaitons à Solidar Suisse plein succès dans son travail international. Nés du même idéal, partageant une même histoire et des valeurs identiques, nous resterons étroitement liés à l’avenir. Que ce soit les OSEO régionales en Suisse ou Solidar Suisse à l’étranger: la solidarité est indivisible!

Y a-t-il matière à célébrer? L’aide publique suisse au développement a 50 ans. Solidar Suisse (anciennement Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO) a 75 ans. Un bilan. Quels sont les effets de la coopération suisse au développement? Sans notre engagement, le monde serait-il (encore) plus injuste? Notre aide aux habitant-e-s du Sud a-t-elle ouvert de nouvelles perspectives? Pourquoi la situation de pays comme le Burkina Faso, l’un des pays les plus pauvres du monde, ne s’est-elle guère améliorée ces dernières années malgré l’aide internationale? Ou alors s’est-elle améliorée? Micheline Calmy-Rey, présidente de la Confédération, et Odile Bonkoungou, minis­ tre de l’Enseignement de Base et de l’Alpha­ bétisation du Burkina Faso, débattront des succès, revers et perspectives de la coopération au développement. La fête d’anniversaire aura lieu ensuite et comprendra une exposition sur les projets de Solidar en présence des coordinatrices et des coordinateurs nationaux. * Sous réserve de modification. Programme définitif: www.oseo.ch/agenda

ACTUALITES

11


international

12

Au Salvador, l’OSEO met sur pied des structures afin d’éviter que la population soit prise au dépourvu par des catastrophes naturelles.

L’ouragan a tout ravagé le jour après les semailles Le Salvador est souvent touché par des catastrophes naturelles aux conséquences fatales. Leur incidence peut être moins dramatique si les gens sont préparés. Texte et photos: Mónica Vázquez Le changement climatique et l’action humaine font du Salvador un pays très exposé aux catastrophes naturelles. Il est régulièrement touché par des séismes, des tornades, des inondations, des éruptions volcaniques qui font des morts, des blessés et des sans-abri. La vaste commune de Zacatecoluca par exemple: sa zone côtière méridionale connaît souvent des inondations et sa zone septentrionale, au voisinage du volcan Chinchontepeque, est menacée de glissements de terrain, et toute la région est très exposée aux séismes. A la fin 2009, l’ouragan Ida y a provoqué de graves inondations et des glissements de terrain. Il a détruit une grande partie des récoltes, beaucoup de gens ont perdu leurs biens et leur bétail. «Nous avons réalisé que tout était inondé seulement une fois que l’eau était dans nos maisons et que nous avons dû nous sauver», se souvient

Carmen Cruz, qui a rejoint un comité de protection civile depuis lors.

Évaluer les dangers Les catastrophes naturelles risquent de se multiplier. L’OSEO a donc décidé de préparer la population. Elle a constitué des comités de défense civile et les a re­ liés à l’échelle nationale en collaboration

avec l’armée, les pompiers et les organisations de base locales. La mise sur pied de ce type de structure doit partir de la base. Il a fallu attendre l’entrée en fonction du gouvernement de gauche, en juin 2009, pour avoir des appuis. Le projet consiste à introduire des systèmes d’alerte précoce, à élaborer des plans d’évacuation et prévoir des abris de fortune. La population

Atténuer les effets des catastrophes naturelles À Zacatecoluca, l’OSEO a suscité la mise sur pied d’un système d’alarme précoce et de sauvegarde des bases existentielles de la population au début de l’année 2010, afin d’enrayer les conséquences des désastres. Grâce à une formation ad hoc, à la sensibilisation de la population et à l’établissement de plans d’évacuation, les acteurs locaux ont les moyens de réagir avant, pendant et après une catastrophe. Mónica Vázquez dirige le projet ainsi qu’une équipe de huit personnes. Depuis le début octobre 2010, cette action est soutenue par le service d’aide humanitaire de la commission européenne, dont un volet est consacré à la préparation aux catastrophes (Dipecho). www.oseo.ch/elsalvador


chronique

13

Hans-Jürg Fehr Président de l’OSEO et conseiller national PS

Victoire d’étape

Grâce à des plans d’évacuation, les habitant-e-s des villages peuvent se mettre rapidement à l’abri.

apprend à observer les précipitations, à évaluer la hauteur des rivières pour reconnaître à temps les risques d’inondation. Elle consigne les données, elle repère les zones dangereuses et les endroits où s’abriter. «En établissant ces plans, nous apprenons à mieux connaître notre commune et donc à trouver des solutions», estime Teodoro González après un cours de formation ad hoc. Des comités locaux préparent des animations théâtrales, réalisent des peintures murales et autres activités pour sensibiliser les villageois-es à l’existence du système d’alarme précoce et leur montrer comment réagir en cas d’urgence.

Éviter les récoltes perdues Au Salvador, la saison des ouragans coïncide avec la récolte du maïs et des haricots, ce qui a valu d’importantes pertes à Ida. La radio informera à l’avenir les familles paysannes des intempéries et de la sécheresse susceptibles de menacer les récoltes. En étant averties de l’imminence d’un ouragan, elles pourront récolter plus tôt ou semer plus tard et sauver ainsi une partie de la production. Ce qu’a vécu Carmen Cruz ne devrait pas se reproduire: «J’ai planté du maïs un jeudi du mois de juin et l’ouragan Alex s’est abattu sur nous le vendredi. Il a tout emporté, les semences et les engrais que je venais de répan­

dre dans mon champ. Nous ne récolterons rien, et je n’ai pas d’argent pour racheter des semences et des engrais.»

Se protéger Les gens simulent un état d’urgence. L’exercice permet de vérifier si les plans d’intervention tiennent la route. C’est un véritable événement, auquel participent tous les gens du village: «Je suis content de la participation, les femmes et les enfants aussi sont venus, ainsi nous serons plus nombreux à savoir quoi faire en cas de catastrophe», commente Teodoro González. Le système d’information et les plans d’évacuation ont servi pour la première fois en septembre de l’année dernière lors du passage de la tornade Matthew. Ils ont prouvé leur efficacité: les gens ont su comment se protéger et il n’y a pratiquement pas eu de blessés ni de bétail perdu.

D’ici à 2015, la Suisse augmentera son aide publique au développement (APD) pour la faire passer à 0,5% du produit national brut (PNB). Telle est la décision prise par le Conseil des Etats lors de sa session de décembre. Le Conseil national a, quant à lui, augmenté le budget 2011 de l’APD de 120 millions de francs consacrés à des projets dans les domaines de l’eau et du climat. Sa commission de politique extérieure a par ailleurs confirmé, début janvier, son soutien à une hausse de l’aide au développement à 0,5% du PNB. Beaucoup d’efforts ont été nécessaires pour en arriver là: une pétition munie de 200 000 signatures, une initiative cantonale (du canton de Berne), une majorité parlementaire allant à l’encontre de la volonté du Conseil fédéral et des partis de droite. C’est finalement une subtile manœuvre qui a mené au but: faire dépendre l’approbation des nouveaux crédits destinés au Fonds monétaire international (FMI) de la hausse des dépenses de l’APD. Ce fut donc donnantdonnant: les crédits du FMI pour les pays émergents et les Etats européens en crise, l’argent de la coopération pour les régions souffrant d’une pauvreté criante. Même si nous pouvons nous réjouir de cette victoire d’étape, elle laisse un arrièregoût amer. Le 0,5% est fort loin du 0,7% que la Suisse, comme nombre d’autres Etats au sein de l’ONU, s’est engagée à consacrer à l’APD afin de réduire de moitié la pauvreté extrême. Parmi ces pays, rares sont ceux qui ont tenu leur promesse et la Suisse, qui compte parmi les plus riches du monde, n’en fait hélas pas partie. Affaire à suivre!


international

14

Claire Quedraogo reçoit des commandes de légumes sur son portable.

«Je veux que mes enfants en apprennent plus que moi!» Au Burkina Faso, l’OSEO permet aux pauvres de suivre des cours d’alphabétisation et de formation en agriculture pour qu’ils puissent améliorer leurs conditions de vie. Texte et photos: Rosanna Clarelli

Pascaline Zomodo se tient à la lisière de son champ de riz, sa houe à la main, son bébé sur le dos. Au Burkina, le millet est l’aliment de base, car l’eau fait le plus souvent défaut pour cultiver du riz. Le riz pluvial constitue une exception: il pousse en terrain sec, se contentant de l’eau des pluies. Pascaline est fière de son champ. La jeune femme de 29 ans et les cinq membres de sa famille vivent à Nomgana, un village sis à 45 kilomètres de la capitale Ouagadougou. Elle a dû quitter l’école au bout de deux ans, car ses parents n’avaient pas les moyens de payer sa scolarisation. «A 13 ans, grâce au cours d’alphabétisation de l’Association Manegdbzanga, j’ai enfin appris à lire et à écrire. Il y a quelques années, j’ai aussi pu suivre une formation en culture maraîchère», raconte-t-elle. «Au début, ça a été dur. J’ai semé des oignons, mais la récolte fut mauvaise.» En optant pour le riz pluvial, elle a fait le bon choix. Sa première récolte fut si abondante qu’elle a pu s’acheter

un vélo avec l’argent gagné. «A présent, les trajets sont plus faciles et je me rends rapidement de la maison au champ et au marché», se réjouit Pascaline Zomodo. La situation financière de sa famille ayant évolué, ses deux aînés peuvent aller à l’école: «Je ne vou­ drais pas que mes enfants restent aussi ignorants que moi!»

n’a cependant pas trouvé de travail. En 2007, après avoir suivi un cours d’alphabétisation, il a reçu deux coqs et vingt poules de l’association Maneg-

«Le revenu de mon mari ne suffisait pas à nourrir la famille. Mes six enfants mouraient de faim.»

Le succès par la formation Idrissa Ouedraogo, 46 ans, a aussi bénéficié de l’appui de Manegdbzanga, dont on ne devient membre que si l’on est prêt à apprendre à lire et à écrire. Après avoir travaillé pendant des années comme chauffeur de poids lourds, Idrissa a décidé, il y a cinq ans, de retourner vivre dans son village natal, Nabigtenga, à quelque 50 kilomètres de Ouagadougou. Illettré, il

dbdzanga et s’est lancé avec enthousiasme dans l’élevage. Pour rejoindre la ferme d’Idrissa Ouedraogo, il faut emprunter une route pous­ siéreuse creusée de nids-de-poule. Les vingt-cinq membres de sa famille vivent ici dans plusieurs cases en bois. «J’ai eu tant de succès avec l’élevage de poules que j’élève désormais aussi des moutons, des bœufs et des chèvres», explique-t-il. «Tout cela, je le dois à l’aide initiale de


international

15

Une formation continue a permis à Idrissa Ouedraogo d’élever du bétail et à Pascaline Zomodo de cultiver du riz qui pousse en terrain sec.

Manegdbzanga.» Tout n’a pourtant pas toujours été rose, puisqu’une maladie a pratiquement décimé toutes ses poules il y a deux ans. Refusant de baisser les bras, Idrissa Ouedraogo a tenu bon. Au­ jourd’hui, il fait figure d’exemple dans le village et transmet son savoir à ses voisins.

La téléphonie mobile pour livrer à la capitale A Ipelcé, le marché a lieu trois fois par semaine. C’est le lieu de rencontre des hameaux environnants: des cinémas (tentes obscurcies alimentées par une génératrice) projettent des matchs de la Ligue des Champions ou des films de kung-fu, plus d’une centaine de stands proposent des légumes de la région et des marchandises d’Inde et de Chine, on peut recharger son portable et se sustenter auprès des stands de boissons et des cuisines ambulantes. C’est ici que Claire Quedraogo vend, sur un étal artistement arrangé, les tomates,

les aubergines, les courgettes, les poi­ vrons et les choux de son jardin. Il n’en a pas toujours été ainsi. «Le revenu de mon mari ne suffisait pas à nourrir la famille. Mes six enfants mouraient de faim», se souvient-elle. L’Association pour le développement du département d’Ipelcé, un groupement paysan, lui a fourni des semences et lui a permis de suivre des cours. Les légumes qu’elle cultive à présent assurent non seulement une nourriture équilibrée à sa famille, mais elle peut aussi en vendre une partie au marché. Plutôt sceptique au départ, son mari est aujourd’hui fier de ce succès. Depuis un an, Claire Quedraogo possède aussi un portable. Ipelcé ne se trouvant qu’à une heure de route (goudronnée) de la capitale, elle peut ainsi livrer ses pro­ duits à Ouagadougou: «Je reçois des commandes de restaurants par téléphone.» La productrice ne compte d’ailleurs pas en rester là. Elle entend quadrupler sa production de légumes et assurer un avenir

meilleur à ses enfants: «Je veux que mes enfants en apprennent plus que moi!»

La formation contre la pauvreté Au Burkina Faso, près de 80% des habitants vivent à la campagne et la misère est leur lot quotidien. Les partenaires de l’OSEO, l’association Manegdbzanga et l’Association pour le développement du département d’Ipelcé, organisent des cours d’alpha­bétisation et des ateliers pour améliorer les méthodes appliquées dans l’agriculture et l’élevage. Grâce à la formation et à une aide initiale, les paysannes et les paysans sont à même d’améliorer durablement leur situation. www.oseo.ch/burkinafaso


QUOI DE NEUF?

16

Droits humains – un mot inconnu à la FIFA Le 2 décembre 2010, la FIFA a attribué les Coupes du monde 2018 et 2022 à la Russie et au Qatar. Deux pays dans lesquels la situation des droits humains est absolument catastrophique. Le gouvernement russe adopte un style de gouvernement de plus en plus autoritaire: la liberté d’expression est fortement réprimée, la violence contre les membres des syndicats et les personnes qui défendent les droits humains est fréquente. Au Qatar, les femmes sont considérées comme des êtres humains de deuxième catégorie. Elles sont discriminées sur le plan légal et ne bénéficient pratiquement d’aucune protection contre la violence domestique. L’homosexualité y est punissable pénalement, les syndicats libres inexistants. On trouvera plus de renseignements quant aux droits humains et du travail dans ces deux pays sur: www.oseo.ch/fifa Si la FIFA souhaite que des Coupes du Monde se déroulent dans ces États, elle doit s’engager sur place en faveur d’une véritable amélioration sur le plan des droits humains. L’OSEO fera tout afin que la FIFA prenne enfin ses responsabilités.

Défendre le personnel de maison en Afrique du Sud

Aide d’urgence aux victimes du tsunami à Sumatra

Le syndicat sud-africain du personnel de maison (SADSAWU) éveille l’attention de l’opinion publique avec une campa­ gne sur les droits des employé-e-s de maison. En Afrique du Sud, ces derniers sont parmi les employé-e-s les plus mal payés et les moins protégés juridiquement. Leur degré d’organisation syndicale est faible. Il s’agit pour la plupart de femmes en situation précaire, gagnant leur vie dans des conditions tout aussi précaires. En juin 2011, l’Organisation internationale du travail (OIT) établira une convention afin d’améliorer la protection sociale et juridique du personnel de maison. Ensuite, cette dernière devra être ratifiée par les différents pays. Le SADSAWU veut profiter de l’occasion pour renforcer les structures d’organisation et améliorer les conditions de travail de ces domestic workers. www.oseo.ch/afriquedusud

Fin octobre, l’archipel des Mentawai, au sud-ouest de Sumatra, a été inondé suite à un tsunami. On y déplore 450 morts et beaucoup de personnes blessées. L’OSEO a aidé les villages de Purourougat, Muntei Besar et Maonei, entièrement détruits pas la vague mortelle, en leur fournissant des biens de première nécessité: denrées alimentaires et eau potable. La mer agitée et le déferlement des vagues ont d’abord posé d’énormes problèmes à l’acheminement de l’aide aux personnes frappées par la catastrophe. Presque tous les bateaux de pêche avaient été détruits; il n’y avait plus de ponton d’accostage et des villages entiers avaient simplement disparu. Juste après la catastrophe, le village de Maonai n’était plus atteignable qu’à la nage. L’OSEO a distribué des articles de ménage et d’hygiène comme des casseroles, des assiettes, du savon et de la poudre à lessive.

Engagement pour les droits du travail en Chine Beaucoup de pierres taillées et polies qui décorent nos bijoux viennent de Chine. Elles y sont souvent produites dans des conditions de travail épouvantables: salaires de misère, graves périls pour la santé et quasi-absence de prestations sociales. Un grand nombre de travailleurs et travailleuses sont atteints de silicose, car ils ne reçoivent aucun masque de protection. L’organisation Labour Action China s’engage pour une amélioration de leurs conditions de travail. Ainsi, les employé-e-s qui ont contracté la silicose ont déjà obtenu le versement d’une compensation financière. Depuis septembre 2010, l’OSEO, ainsi que le syndicat UNIA, soutiennent Labour Action China dans le conseil juridique et l’organisation des personnes travaillant dans la province de Gouangdon, dans le sud de la Chine.


Quand je ne serai plus là …

J’ai couché l’OSEO sur mon testament, je sais qu’elle fera bon usage de cet argent.

Quand je ne serai plus là, je donnerai aux enfants du Burikina Faso la possibilité d’avoir une bonne formation pour qu’ils aient de meilleures chances dans la vie. Désirez-vous savoir pourquoi il vaut la peine de rédiger un testament ou des renseignements sur des points importants? Vous pouvez commander nos notices ou nous appeler!

Nos notices (que vous pouvez commander au moyen du coupon réponse ci-joint) contiennent des informations détaillées sur les testaments; vous pouvez également consulter notre site www.oseo.ch/ testament ou prendre contact avec notre collaboratrice Frances Trezevant au 021 601 21 61 ou info@oseo.ch


PORTRAIT

18

«Se remettre debout» David Valère travaille comme formateur à l’OSEO Genève. Ce comédien s’emploie à redonner confiance à des personnes cassées par la vie. Texte: Alexandre Mariéthoz. Photo: Robert Hofer «J’ai longtemps éprouvé une certaine rancœur contre les personnes engagées dans le social. Pour moi, il fallait surtout compter sur soi-même. J’ai réalisé plus tard à quel point cette vision est caricaturale.» David Valère travaille à l’OSEO Genève, dans le cadre du programme ParcourS (voir encadré). Ce comédien très dynamique y enseigne l’expression orale. Il n’aurait pourtant jamais imaginé, il y a quelques années, exercer un jour le métier de formateur dans le domaine social. Retour sur un parcours singulier.

Trop grand décalage David Valère est né à Lille, en mai 1968, dans un milieu ouvrier. Dix ans plus tard, il s’installe avec sa mère à Genève. Il obtient sa maturité en 1988, puis enchaîne les petits boulots. En 1992, il est engagé comme responsable back-office chez un gestionnaire de fortune. «A ce moment-là, j’avais envie de gagner de l’argent. Je me disais que le fric rend indépendant.»

En 1999, David Valère quitte son emploi pour se consacrer exclusivement au théâtre. Il alterne pièces de théâtre, petits boulots et périodes de chômage.

Une vision du monde nuancée Exploiter ses ressources En septembre 2008, nouveau tournant professionnel. David Valère est viré d’une pièce de théâtre. «J’ai alors fait un bilan de compétences, qui a révélé de grandes aptitudes sociales et pédagogiques.» Peu après, il apprend que l’OSEO cherche un comédien pour dispenser un cours. Il envoie son dossier et est engagé comme formateur dès mars 2009. La plupart des participant-e-s au programme ParcourS sont peu qualifiés et d’origine étrangère. «Ils ont souvent été cassés par la vie, en particulier celles et ceux qui ont connu la guerre.» David Valère s’emploie à leur redonner confiance en eux. «Je témoigne d’une grande empathie à leur égard. Cela dit, je ne suis pas là pour pleurer sur leur sort. Mon rôle consiste à les aider à exploiter leurs propres ressources pour se relever.» David Valère accorde une grande importance à l’expres­ sion corporelle. Il intervient fréquemment auprès de ses élèves pour corriger certaines attitudes et leur apprendre à dégager davantage d’as­ surance. Parallèlement à son travail à l’OSEO, David Valère a produit «Un Homme debout». Inspiré d’un poème d’Aimé Césaire, ce spectacle évoque la trajectoire de Cyparis, un homme martiniquais qui rêve d’un

«L’après-midi, je travaillais dans un environnement purement financier.» Trois ans plus tard, il entame une école de théâtre. Le décalage devient alors trop grand entre son travail et sa vision du monde. «Le matin, à l’école de théâtre, je vivais dans un monde fait de réflexion et de questionnements. L’après-midi, je travaillais dans un environnement purement financier. Et le soir, je lisais des écrits critiques sur le capitalisme.»

monde meilleur. Ce descendant d’esclave appelle son peuple à se redresser et à se libérer de l’oppression.

David Valère est papa de deux jeunes enfants. Il se sent pleinement épanoui dans sa vie privée et professionnelle. «A l’OSEO et dans mes autres activités, je fais plus de bien qu’en regardant les cours de la Bourse monter ou descendre.» David Valère refuse cependant de parler de conversion lorsqu’il évoque son passage, progressif, de la gestion de fortune à l’OSEO. «Mon parcours de vie chaotique, fait de maturations lentes, m’a doté d’une vision riche et nuancée du monde. J’ai côtoyé différents univers. Toutes ces expériences ont fait de moi un homme debout, en harmonie avec lui-même.» A l’instar de Cyparis.

Favoriser l’insertion professionnelle Le programme ParcourS de l’OSEO Genève est destiné à un public non francophone faiblement qualifié ou dont les qualifications ne sont pas reconnues en Suisse. Il vise à favoriser une insertion professionnelle à long terme. Le cours dure trois mois, avec possibilité de renouvellement. www.oseo-ge.ch


PORTRAIT

19

Un parcours chaotique: David Valère est passé de la gestion de fortune à un emploi de formateur à l’OSEO Genève.


«Auparavant, nous remarquions les inondations une fois que l’eau avait envahi les maisons.» Au Salvador, des systèmes d’alarme aident la population à se protéger.

www.oseo.ch


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.