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TOC TOC MERCATO
L’APRÈS cauchemars en cuisine
2021 promet une sortie de crise pour les restaurateurs, cafetiers et hôteliers, durement touchés, même si elle tient pour l’instant d’un mirage qui ne cesse de reculer. Si de nombreux établissements ne s’en relèveront pas, 1 sur 3 dit-on dans la profession, les chefs surprennent encore par leur créativité.
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PAR FLEUR TARI FLON
On ne compte plus leurs initiatives généreuses et innovantes. Certains chefs ont quitté la région, d’autres sont arrivés. L’histoire continue et l’on se régalera à nouveau entre amis au printemps, fêtant les évènements heureux, l’essence et les sens de la vie, dans des commerces dits non-essentiels… mais totalement indispensables. Vivement !
LA GÉNÉROSITÉ DES CHEFS
Impossible de ne pas citer l’initiative des 30 chefs et métiers de bouche qui,
aidés de Dalila Saadi et Alexis Sbriglio, Chefs Solidaires se sont mobilisés bénévolement, en octobre, pour préparer 2100 repas destinés aux SDF et personnes dans la précarité et à la totalité du personnel soignant. Yoann Conte a ouvert ses cuisines, mis à disposition sa brigade et accueilli ses pairs (Georges Paccard, Marc Veyrat, Benjamin Schwab…).
ETOILES CHANGEANTES
On ne sait pas encore quand commencera la saison en montagne - si elle commence un jour -, mais la valse des chefs étoilés a bien débuté en stations. A Courchevel, cette saison marque le retour d’un grand chef : Sylvestre Wahid qui retourne dans ses montagnes, là où il avait décroché 2 étoiles au Strato en 2012, avant de passer 5 ans à Paris. Pour la première fois chez lui, il ouvre un restaurant au cœur de l’Hôtel Grandes Alpes 1850. Une table intimiste pouvant servir de 8 à 20 couverts. Les Airelles, Hôtel Mademoiselle, à Val d’Isère, voit le départ d’Hélène Darroze, après à peine une saison. Elle est remplacée par Loulou, la table festive de Saint-Tropez, décorée par JeanCharles de Castelbajac. Julien Gatillon, à Megève, ex-deux étoiles du 1920, ouvre avec sa compagne Sonia Torland, une table dans son propre chalet « Nous ». Il y servira
Sylvestre Wahid
© MCBG Conseil
© DR
Julien Gatillon
ses plats signatures dans ce chalet qui fonctionnera en mode privatisé de 2 à 12 couverts uniquement. Une vraie nouveauté dans la restauration.
BONNE TABLE, TOUT SIMPLEMENT
Toujours à Megève à l’emplacement de la Sauvageonne, l’ex-chalet festif de Nano laisse place à trois types de restauration, imaginés par le groupe Yeels. Le « Verde Tribe » avec sa grande salle à manger, ses 150 couverts, sous la houlette d’un duo de chefs tropéziens, Yannick Plassart et Christophe Giorgi; le « Verde Paradis », au rez-de-chaussée, dans une ambiance de bar chaleureux et cosy ; enfin, le lieu le plus secret et le plus gastronomique, le «Verde Chef’s Table », où Paolo Boscaro, exétoilé aux belles références (AnneSophie Pic à Lausanne et chez Kei Kobayashi à Paris) cuisinera « sur mesure » pour 15 couverts. A La Folie Douce Val d’Isère, Luc Reversade entend nous en mettre plein la vue et l’assiette avec la Cucùcina, au décor de théâtre époustouflant s’inspirant des ateliers d’artistes de la Renaissance italienne et de Léonard de Vinci en particulier. Des sculptures
Yoann Conte dont certaines de plus de 4 mètres de haut ponctueront les lieux, avec vue sur les montagnes. C’est le chef Francesco Ibba, un ancien du restaurant étoilé El Lago à Genève, qui orchestrera les cuisines de cette Cucùcina, contraction de cucina (la cuisine) et cucu (fou). A Chamonix, Pierre Maillet, le chef 2 étoiles du Hameau Albert 1er, reprend le Bistrot des Sports, une institution. C’est Laurent Travagli qui sera aux fourneaux. Ensemble, ils souhaitent pratiquer une véritable cuisine traditionnelle française, loin des étoiles et plus authentique. Yoann Conte, devant le succès de son restaurant Côté Jardin, au bord du lac d’Annecy, ouvrira Le Roc, une bonne table, dans une annexe de son restaurant gastronomique. Pas encore étoilés, mais prometteurs, deux jeunes chefs, Antoine CeyvozMamy, chef de l’Incomparable à Tresserve, et Nicolas Roux, chef du tout nouveau Château Brachet, sont à découvrir dès que possible. Enfin, une arrivée pleine d’avenir, elle aussi : Valentin Marin, le fils de MarieChristine et Pierre Marin, à la tête du restaurant étoilé Lamartine (depuis plus de trente ans), sur le bord du lac du Bourget, a rejoint ses parents en cuisine, après un passage chez les plus grands chefs. De quoi se dire que les pays de Savoie auront de beaux jours
étoilés dans le monde d’après…
Pierre & Valentin Marin
©Matthieu Cellard
Antoine Ceyvoz-Mamy
RASES Tables
Ouverts. Fermés. Ouverts. Fermés… Après une année 2020 en pointillés, les bars, restaurants et un grand nombre d’hôtels attaquent cette nouvelle année rideaux baissés. Sans perspective datée et confirmée d’un retour à la normale. Dur de garder le moral.
PAR MÉLANIE MARULLAZ
Ils représentent plus de 30 000 emplois sur les 2 départements savoyards (source Savoie Mont-Blanc - chiffres clés 2019). A l’arrêt depuis le 30 octobre, certains ont essayé de trouver des solutions, comme la vente à emporter pour ouvrir a minima, d’autres se sont résignés. Sébastien Buet est vice-président de l’Union des Métiers et des Industries de aussi l’hôtel-restaurant Les Cygnes à Evian, véritable institution locale, dans laquelle il emploie près de 40 salariés, tous au chômage. Il nous fait part du ras-le-bol d’une profession qui se sent injustement stigmatisée.
Activmag : En écartant la date du 20 janvier pour la réouverture des bars et restaurants, est-ce qu’on vous a donné une autre échéance ?
Sébastien Buet : Non. On nous dit février, mais c’est complètement fantaisiste. Fausse ou vraie nouvelle, la date du 6 avril a aussi été évoquée, mais pas confirmée par le gouvernement. Ça nous ferait encore deux mois et demi à attendre… sans certitude. La seule chose à peu près sûre, c’est que les cafés et les bars ne rouvriront pas en même temps que les hôtels et restaurants. Comme pour les discothèques, ce ne sera pas avant l’été. Le problème, c’est qu’on est toujours dans le tâtonnement, de 15 jours en 15 jours. Si on nous disait : “voil’Hôtellerie (UMIH) des Savoie. Il gère
là, la situration est catastrophique, vous n’ouvrirez pas avant Pâques”, on serait les premiers à comprendre, mais au moins, il y aurait une perspective, on pourrait s’organiser. Parce qu’un hôtel ou un restaurant, ça ne s’ouvre pas d’un coup de baguette magique, c’est long ! Mais on s’en fout, on vous dira la veille pour le lendemain quand vous pourrez rouvrir. C’est une méconnaissance complète de nos métiers.
Qu’en est-il des aides ?
On a de la chance en France d’avoir ces aides, il faut le reconnaître. Même si parfois, elles ne sont pas adaptées. Le chômage partiel, par exemple, était nécessaire, mais il ne correspond pas à nos professions, parce que nos salariés sont plutôt à 40 ou 42h, et là, ils ne sont payés que sur 35, voire 39h. Ils perdent donc beaucoup sur leur salaire. Et puis les mesures, comme les dates, changent tout le temps. Quand une a été donnée le lundi, on reçoit le texte le vendredi, mais entre temps, le Premier Ministre a donné une conférence de presse qui le désavoue, donc on est obligé d’attendre la modification du décret, etc… On est dans une espèce d’imbroglio franco-français qui est épouvantable.
Celles qui ont quand même été mises en place vous permettront-elles de tenir ?
Le gros hic, c’est qu’on crée de l’endettement. Le Prêt Garanti par l’Etat (PGE) a bien fonctionné, c’était très rapide pour obtenir l’argent, mais quand il va falloir le rembourser, ce sera au taux que la banque va bien vouloir nous faire. Et pour ce qui est des frais fixes, le gouvernement a commis une erreur, il n’a pas voulu re-négocié le fait de proroger nos prêts, alors que c’est tout ce qu’on demandait. Du coup, on nous propose de prendre un autre PGE pour rembourser des prêts qu’on n’a pas prorogés, donc de rajouter de la dette à la dette… On marche sur la tête !
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