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Tendances alimentaires actuelles: où se situe la Suisse?

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Office fédéral de la santé publique 3003 Berne, www.bag.admin.ch Janvier 2006/no 54

Prévention et promotion de la santé

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5e rapport sur la nutrition en Suisse. Le conseiller fédéral Pascal Couchepin a présenté, début décembre à Berne, le 5e rapport sur la nutrition en Suisse. Ce rapport souligne qu’en Suisse, les conditions sont optimales pour que chacun bénéficie d’une alimentation saine et équilibrée. Elles restent cependant trop peu exploitées, comme le démontre le rapport, élaboré à partir de plus de 70 études. Des mesures de prévention renforcées en matière de nutrition peuvent améliorer notablement l’état de santé de la population, augmenter la qualité de vie et faire baisser les coûts de la santé.

Comment la Suisse mange-t-elle? Le 5e rapport sur la nutrition en Suisse fournit des réponses diverses à cette question.

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es rapports sur la nutrition sont mis à jour tous les sept ans, sur mandat de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). La présente édition se penche à nouveau sur différents aspects de la nutrition. Elle confirme une nouvelle fois qu’en Suisse, les aliments sont sûrs. Les véritables risques sanitaires ne découlent pas de la «contamination» des aliments par des substances indésirables, mais plutôt d’une mauvaise alimentation. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les maladies liées à l’alimentation figurent en tête des facteurs de risque pour notre santé. Actuellement, 37% des Suisses sont en surcharge pondérale, voire obèses. Ce chiffre est en croissance constante, y compris chez les enfants et les adolescents.

P. P.

3052 Zollikofen

Des approches efficaces Le 5e rapport suisse sur la nutrition ne se contente toutefois pas d’étudier les problèmes de nutrition; il fournit également des solutions. Pour ce faire, les auteurs n’ont pas hésité à se servir des expériences faites hors de nos frontières. Un rapport finnois s’appuie sur des données extraites du projet «Carélie du Nord» pour démontrer que les habitudes alimentaires d’un pays peuvent être favorablement modifiées par des mesures adéquates. Sur une période de 30 ans et en s’alliant à l’industrie agroalimentaire, au secteur agricole, aux médias, aux écoles et à d’autres partenaires, les autorités sanitaires finnoises ont ainsi réussi à diminuer considérablement les maladies nutritionnelles. En 25 ans, le nombre de décès dus à des maladies cardio-vasculaires chez des hommes âgés de 35 à 64 ans a baissé de 64%. De tels résultats devraient donner un second souffle aux projets de pré-

vention en Suisse. En effet, des programmes à portée nationale, comme «Suisse Balance», «5 par jour» ou «action d», ont atteint plusieurs objectifs ces dernières années. Ce 5e rapport sur la nutrition en Suisse pose les bases qui permettront de développer une politique nutritionnelle suisse, conformément à la stratégie de l’OMS. L’OFSP travaille donc actuellement à mettre en oeuvre la résolution de l’OMS. Depuis la publication du 4e rapport sur la nutrition en Suisse, le clivage s’est encore accentué. En effet, en parallèle au problème grandissant de la surcharge pondérale, les hôpitaux notamment se trouvent confrontés à la dénutrition, phénomène peu connu jusqu’alors. Une enquête menée dans 50 grands hôpitaux a montré qu’environ 20 à 40% des patients hospitalisés présentaient des signes d’une alimentation carencée.

Sportifs de haut niveau et végétariens Outre ces thèmes majeurs, le rapport livre également des informations d’intérêt général, comme par exemple les apports nutritionnels des sportifs de haut niveau. Résumé: le faible apport en glucides, qui, en moyenne, n’atteint même pas l’apport minimum nécessaire aux sportifs amateurs, représente une véritable carence dans leur alimentation. Les dernières données récoltées sur le végétarisme sont également instructives. Les végétariens sont souvent en meilleure santé que les omnivores. Ils consomment plus de fruits, de légumes, de fruits oléagineux et de produits à base de céréales complètes et ont un mode de vie plus responsable en matière de santé. suite page 6

Entretien

Hans Ruh, expert en éthique sociale, souhaite une extension du principe de causalité: multiplions par six le prix des carburants pour couvrir les coûts occasionnés à la santé et à l’environnement, introduisons un impôt sur les matières grasses pour lutter contre les aliments malsains et augmentons les primes d’assurance maladie de ceux qui mettent leur propre santé en jeu (en fumant ou en s’alimentant mal). Il demande aux autorités sanitaires de se faire l’avocat de ceux qui sont mis en danger par d’autres, de renforcer les groupes de pression et d’étendre massivement la prévention. >> pages 4/5 Le tabagisme passif: ça suffit Le nombre de personnes qui ne supportent plus d’être enfumées contre leur gré par d’autres est en augmentation. Une enquête nationale souligne que la situation sur le lieu de travail et à la maison s’est légèrement améliorée. En revanche, elle est pratiquement inchangée dans les restaurants, bars et cafés – 56% des personnes interrogées (68% des non fumeurs) se déclarent fortement incommodées par la fumée. >> page 8


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Point fort: état et liberté

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Prévention du sida: un bilan intermédiaire Programme national VIH et sida 04–08. Après un tiers de la durée du programme, les responsables de l’Office fédéral de la santé publique tirent un bilan intermédiaire sur les objectifs atteints à ce jour et les défis qui subsistent.

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e 26 novembre 2003, le Conseil fédéral a adopté le quatrième programme national VIH et sida (PNVS), en vigueur pour la période 2004 – 2008. A l’échelle nationale, la direction stratégique et conceptuelle de la lutte contre le sida est le fait de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). L’Aide suisse contre le sida (ASS), organisation privée basée à Zurich, joue un rôle important dans la mise en oeuvre opérationnelle. Les questions de définition de la stratégie et de contrôle de la mise en oeuvre sont traitées par la Commission fédérale pour les questions liées au sida (CFS), une commission extraparlementaire instituée par le Conseil fédéral en 1983, et qui travaille également durant cette législature. Au mois de septembre, l’OFSP a présenté un rapport intermédiaire sur l’état d’avancement de la mise en œuvre du programme national VIH et sida après 20 mois d’activité. La première partie du rapport donne une vue d’ensemble de la situation actuelle, de l’état des travaux et des défis qui subsistent après un tiers de la durée du programme. La seconde partie est consacrée à des informations complémentaires et à la présentation détaillée des 15 projets mis en œuvre par l’OFSP pour atteindre les 12 objectifs du programme national VIH et sida 2004 –2008.

Situation épidémiologique La Suisse a réussi à maintenir l’infection au VIH au stade d’une épidémie qui se concentre sur des groupes spécifiques de la population. Néanmoins, un relâchement de la prévention et, donc, des comportements de

Forum L’Etat, ses lois et la liberté individuelle Dans bien des domaines de notre société, les citoyennes et les citoyens se voient confrontés à une diversité de règles souvent complexe, pour ne pas dire sibylline. Les exemples, outre ceux du code de la route, sont légion: interdiction de déposer des déchets dans les corbeilles à déchets montées près des arrêts de tram ou de bus, règlements intérieurs qui dictent la vie des locataires jusqu’au moindre détail dans les immeubles, obligations diverses et variées pour mener une «vie saine» (alimentation, sport, examens de prévention, etc.) et, à propos des scènes de violence dans les films, appel à une commission d’éthique ou à un autre organe d’Etat pour censurer les scènes inacceptables. D’une manière générale, ces règles se terminent

protection n’exclut pas la possibilité d’une généralisation de l’épidémie. La lutte contre le VIH/sida en Suisse a pour objectif central d’empêcher une telle péjoration. Les infections déclarées sont de 30% supérieures qu’en l’an 2000 et ce nombre doit diminuer. En comparaison avec les pays industrialisés occidentaux, la situation en matière de VIH/sida dans le monde est catastrophique: plus de 40 millions de personnes sont infectées par le VIH et 95% d’entre elles vivent dans les pays en voie de développement. Tous les pays de l’Afrique subsaharienne connaissent une épidémie de type généralisée selon la classification de l’OMS. Dans certains de ces pays, un adulte sur trois est infecté par VIH. Pour beaucoup de pays d’Europe de l’Est, d’Asie Centrale et du Sud-Est, mais aussi pour l’Inde et la Chine, ONUSIDA craint un passage d’une épidémie de VIH concentrée à celui d’une épidémie généralisée. La situation en Europe de l’Est, en particulier, doit aussi alerter la Suisse à cause de la prostitution, de la traite des êtres humains et du tourisme sexuel.

Trois tâches principales de la lutte contre le VIH/sida Le consensus perdure depuis 20ans quant au sens à donner à la lutte contre le VIH/sida, • empêcher de nouvelles infections au VIH par la prévention, • garantir aux personnes concernées l’accès au conseil et à la thérapie, • empêcher la discrimination des personnes concernées et promouvoir la solidarité.

sur la formule selon laquelle toute infraction sera passible d’amende ou d’une autre forme de sanction. Devant cette pléthore de devoirs et d’interdits qui règlent la vie moderne, nombre de citoyennes et de citoyens ont l’impression d’être tellement assistés et surveillés qu’ils ne respectent plus les règles et se sentent même provoqués au point de les enfreindre sciemment. Certains jeunes et adultes considèrent le détournement et la transgression des règles imposées par les instances étatiques comme un véritable «sport». C’est ainsi que des quantités impressionnantes de marchandises sont volées dans les magasins, non parce que les contrevenants en ont besoin, mais parce qu’ils ressentent du plaisir à violer les règles. La prolifération des prescriptions à respecter en matière de déchets incite également certains à agir par esprit de contradiction ; ils considèrent alors leur acte comme une protestation contre une restriction insupportable de la liberté individuelle. Les critiques contre les (trop) nombreuses lois recourent souvent à l’argument de la protection de la liberté personnelle des citoyens; on en ap-

Priorités actuelles de la prévention Un changement de stratégie dans l’information de la population est intervenu en 2005: en effet, le passage de l’infection au VIH du statut de maladie mortelle à celui de maladie que l’on peut traiter (sans la guérir!) a nécessité une reformulation des messages de prévention à l’intention de la population sexuellement active en termes de promotion de la santé: c’est ainsi que STOP AIDS est devenu LOVE LIFE STOP AIDS. Compte tenu du risque d’infection beaucoup plus élevé dans les groupes présentant une prévalence élevée ou une vulnérabilité accrue – les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes, les migrant(e)s de l’afrique sub-saharienne, des toxicomanes qui consomment par voie intravaineuse et des prostitué(e)s et leurs clients – dans la population générale ou parmi les jeunes, la prévention doit être poursuivie de manière ciblée afin d’éviter la propagation incontrôlée du VIH. Etant donné que le test VIH n’a aucune valeur préventive en soi s’il n’est pas accompagné d’un conseil approprié, et devant une qualité de conseil très disparate, il faut introduire une forme d’assurance qualité du conseil individuel autour du test VIH.

La prévention est-elle avantageuse? Un simple calcul montre que si des personnes infectées au VIH nécessitent une médicamentation sur seulement cinq ans aux prix actuels, dépenser 100'000 CHF pour la prévention pour une seule infection évi-

pelle à la responsabilité individuelle. Il s’agit sans aucun doute d’un argument à prendre au sérieux, car le respect des lois n’est fondamentalement possible que si les citoyens les comprennent et qu’ils sont prêts à les accepter. Contrôles et menaces de sanctions ne sont pas des mesures efficaces pour dicter un comportement. Trouver la bonne mesure entre trop et pas assez de règles étatiques est un véritable exercice d’équilibriste. L’excès de lois conduit à leur refus. S’il n’y en a pas assez, il faut craindre que les règles fondamentales de la vie en communauté ne soient pas respectées, au détriment d’individus ou de l’Etat dans son ensemble. Il me semble douteux, voire dangereux, de partir du principe que les citoyens développent d’une responsabilité individuelle suffisante pour préserver les intérêts de tous. Par ailleurs, une telle attitude serait l’expression d’une tendance de l’Etat à se décharger de sa responsabilité pour la reporter sur les citoyens. Des lois, en nombre raisonnable, ne constituent pas seulement des limites à la liberté individuelle, mais servent de points de repère dans cette complexité de la vie sociale encore indéchiffrable pour beaucoup.

tée est profitable, sans tenir compte les pertes économiques, la souffrance humaine et les années de vie perdues prématurément. Une étude américaine récente recommande l’investissement de fonds publics dans l’alliance de campagnes à destination de la population générale et la prévention de groupes cibles en raison de leur efficience et efficacité. En revanche, il faudrait renoncer aux programmes de test VIH à destination de la population générale parce que les coûts dépassent largement les bénéfices

Thérapie L’étude suisse de cohorte garantit la qualité de la thérapie. En Suisse, on peut admettre que toutes les personnes qui se savent séropositives ont accès à une thérapie.

Temps forts L’OFSP a intensifié la collaboration avec l’Aide suisse contre le sida et avec les instances cantonales responsables. Une nouvelle étude (CHATSurvey) doit améliorer les connaissances sur l’épidémie de VIH en Suisse et fournir les bases pour des mesures de prévention encore plus ciblées. Les connaissances régulièrement acquises sur le VIH et le sida sont systématiquement analysées dans le processus de gestion des connaissances afin que les tâches à accomplir correspondent à l’état actuel des savoirs. Contact: Roger Staub, chef Section sida OFSP, 3003 Berne, tél. 031 323 88 11 roger.staub@bag.admin.ch www.bag.admin.ch, Themen, HIV und Aids

En fixant des limites, l’Etat remplit une fonction qui, normalement, incombe aux parents. Or, de nombreux enfants grandissent sans ce type de règles et de valeurs inculquées par les parents et sont euxmêmes, adultes, encore largement tributaires de règles qu’il faut leur imposer de l’extérieur. Dans le fond, les règles fixées par l’Etat devraient être l’expression des valeurs applicables à la collectivité. Pour sortir de ce dilemme entre trop et trop peu de lois, je pense qu’il faut introduire la dimension éthique dans le débat public et renforcer la perception empathique envers ce que le respect des lois de cohabitation signifie pour d’autres personnes. Ainsi, les lois deviendraient des aides fructueuses à l’orientation et des incitations à la discussion.

Prof. Dr. Udo Rauchfleisch


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QuaThéDA, tout est là

En première ligne

QuaThéDA (Qualité Thérapie Drogues Alcool) est un projet Qualité de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) destiné au domaine des dépendances. Fondé sur les bonnes expériences faites jusqu’ici dans le secteur des thérapies résidentielles, le projet s’étend aux secteurs ambulatoire et de la réduction des risques. Avec ses huit modules, QuaThéDA couvre tous les domaines concernés, de la thérapie résidentielle au travail de rue. version papier et, simultanément, sur le site Internet de www.quatheda.ch. Il est accompagné d’un Guide consacré aux explications nécessaires pour appliquer les exigences qualité du Référentiel (interprétation, recommandations, exemples d’indicateurs et de standards) et d’un Manuel de gestion de la qualité type, qui permettra de se baser sur un exemple pour construire celui de son institution. Ces deux documents accompagneront le démarrage de la formation des responsables qualité en mai 2006.

Des renseignements précieux

L’

objectif est une conception de la qualité commune à l’ensemble du domaine des dépendances, reposant sur un Référentiel qui est conçu de manière modulaire pour tenir compte de la diversité des prestations offertes. Il s’agit d’une norme ISO compatible qui sert de base à la certification QuaThéDA. Toutes les institutions spécialisées s’occupant de prévention secondaire, de thérapie et de réduction des risques sont concernées. A ce jour, quelque 70 institutions sont certifiées, essentiellement dans le secteur résidentiel.

Référentiel en janvier Le nouveau Référentiel modulaire QuaThéDA paraît en janvier 2006 en

Tous les partenaires ont été invités à s’exprimer sur le projet de nouveau Référentiel au printemps 2005: 12 cantons, 5 villes, 17 institutions de Suisse romande, 2 de Suisse italienne, 41 de Suisse alémanique et 4 associations professionnelles ont profité de cette occasion. Cette forte participation démontre que le débat est maintenant largement ouvert autour de QuaThéDA. Cette procédure de consultation a révélé que l’introduction du Référentiel bénéficie d’un large soutien. Deux craintes principales ont cependant été exprimées: les coûts financiers et personnels nécessaires pour sa mise en application et le risque de formalisation d'un travail avec une clientèle imprévisible et exigeant une grande capacité d'adaptation. René Stamm responsable de QuaThéDA à l’OFSP: «Nous avons reçu un grand nombre de suggestions précieuses que nous avons prises très

au sérieux dans la version retravaillée du Référentiel.»

Formation et certification La procédure de consultation a également montré qu’il est nécessaire de concevoir des offres de formation adaptées aux besoins spécifiques des régions. Un effort particulier va être fait dans ce domaine. Une pré inscription a été organisée afin de permettre une planification optimale. 75 institutions issues de 15 cantons ont provisoirement inscrit un total de 90 collaborateurs. Le programme détaillé de la formation sera présenté à fin janvier; puis les institutions auront jusqu’à fin mars pour confirmer définitivement leur inscription. Les premières formations, d’une durée de 10 jours maximum établés sur une période de 18 mois, débuteront dès le printemps 2006. La parution du nouveau Référentiel constitue un pas important dans le processus de développement de la qualité en matière de dépendances. René Stamm: «Cela s’est révélé payant de prendre notre temps pour réaliser soigneusement avec les partenaires concernés ce nouveau Référentiel modulaire. Il est bien connu et bénéficie d’une bonne image de marque, relayée d’ailleurs par les institutions qui ont déjà introduit un système de gestion de la qualité et qui reconnaissent le profit qu’elles en ont tiré».

Contact: René Stamm, section Drogues, OFSP 3003 Berne, tél. 031 323 87 83 rene.stamm@bag.admin.ch www.quatheda.ch

Perfectionnement Migration et santé Programme cadre. Quelles sont les compétences transculturelles nécessaires aux acteurs du domaine de la santé pour établir l’égalité des chances d’accès aux soins pour tous dans une société de plus en plus pluraliste?

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n 2004, un groupe d’experts nommé par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) a défini les compétences que des offres de formation adaptées doivent transmettre aux professionnels de la santé pour respecter l’objectif central de la stratégie de la Confédération «Migration et santé 2002 –2007». La commission considère qu’il y a matière à agir dans les six domaines suivants pour acquérir ou étendre les compétences transculturelles: interaction, égalité des chances, intégration sociale, systèmes sociocentrés, traumatismes et genre. Les recommandations de formation peuvent être téléchargées sous www.bag.admin.ch, thèmes, migration, formation, projets.

Intégration dans les offres actuelles Actuellement, l’OFSP étudie la mise en oeuvre des propositions des experts dans le domaine de la formation. La priorité est d’encourager durablement l’acquisition de compéten-

ces transculturelles minimales dans l’ensemble du secteur de la santé. Il ne s’agit donc pas de mettre en place des nouveautés particulières mais bien plus d’intégrer les compétences transculturelles dans les offres de formation existantes. Pour y réussir, il faudra surmonter les obstacles suivants: • les changements de responsabilité induits par la nouvelle loi sur la formation professionnelle (LFPr) pour les professions non universitaires ainsi que le débat actuel sur la délimitation entre les professions régies par la LFPr et celles régies par la loi sur les hautes écoles spécialisées (LHes) accaparent actuellement fortement les ressources du secteur de la santé; • il en va de même pour les métiers universitaires de la santé dans le débat politique actuel autour de la nouvelle loi sur les professions médicales (LPMéd); • le personnel et les institutions sont soumis à deux pressions simulta-

nées: celle à la performance et celle à la réduction des coûts et du financement; de ce fait, ils sont actuellement indisponibles pour aborder des thèmes transversaux plus «anodins»; • les régions et les institutions ont souvent des conceptions fondamentalement divergentes de la mise en forme, du contenu et de la nécessité des compétences transculturelles, ce qui soulève des questions sur la légitimité, le bienfondé, voire sur les perspectives de succès des efforts de généralisation des compétences transculturelles.

Contact: Christina Eggenberger Section Egalité des chances et santé OFSP, 3003 Berne tél. 031 323 30 15 christina.eggenberger@bag.admin.ch

La liberté, liberté chérie, liberté individuelle – y compris au sens de «vivre et laisser vivre» – est une valeur primordiale. Pourtant, nul ne songerait à contester certaines prescriptions légales, comme celle du code de la route. Devant une situation de plus en plus complexe sur la route, avec et entre les usagers, qu’ils soient piétons ou automobilistes, il était indispensable d’établir des règles pour la protection et la sécurité de tous. Les prescriptions en matière de construction, c’est-à-dire des règles qui imposent parfois certaines limites à la phantaisie architecturale mais dont l’objectif est de préserver la sécurité, sont tout aussi indiscutables. Dans d’autres domaines – comme celui de la santé – les restrictions sont plus contestables. La prétendue tendance à contraindre le citoyen au bonheur, ou à vouloir lui imposer la «bonne» façon de vivre, est parfois vivement critiquée. Mais n’existe-t-il pas, encore et toujours, de nombreux facteurs de risque en matière de santé individuelle dépendant de la libre décision des individus – sports à risques, alimentation, consommation d’alcool et de tabac, comportement sexuel? Ici, chacun agit à sa guise. Pourtant ici aussi, bien que ces risques ne concernent que celui qui les prend et que ces actes ne puissent tout au plus être qualifiés d’insensés, l’Etat a la mission de permettre des «décisions sensées» en fournissant une information suffisante. Les membres d’une société «éclairée» sont davantage capables d’agir pour prévenir ou éviter des risques sanitaires qu’ils connaissent. La situation est complètement différente lorsque les risques mettent d’autres personnes en péril. On quitte, dès lors, le domaine du bon sens, pour accéder à celui de la morale. Donc, lorsque l’appel à la responsabilité individuelle ne suffit plus pour protéger d’autres individus d’effets nocifs, il faut des règles «venues d’en haut», comme celles destinées à lutter contre le tabagisme passif. Mais quid du style de vie à risque qui ne met, certes, que son auteur en danger, mais pour lequel la collectivité doit intervenir, notamment dans le cadre de l’assurance maladie sociale? Ce genre de mise à contribution de la solidarité ne mérite-t-il pas, aussi, une réglementation ? Conclusion: la santé a besoin de citoyennes et citoyens responsables qui, dûment informés, sauront prendre des décisions «sensées en matière de santé». Dès lors, les réglementations ne s’imposent plus que dans des situations particulières qui l’exigent, mais pas davantage.

Thomas Zeltner Directeur de l’Office fédéral de la santé publique


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Publications

Point fort: état et liberté

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«Nous devrions tourner le dos à l’él

Liberté ou Etat. La santé et l’épanouissement individuel font partie des biens les plus précieux pour la plupar Nous nous sommes entretenus avec Hans Ruh, expert en éthique sociale, pour savoir comment notre société est arriv

Qu’avons-nous appris? Prévention dans le travail avec les jeunes La nouvelle publication de la série «Qu’avons-nous appris?» de l’Office fédéral de la santé publique offre une vue d’ensemble de douze ans d’engagement pour la prévention de la dépendance et la promotion de la santé dans le travail avec les jeunes. Elle donne un aperçu de divers programmes de prévention du travail ouvert avec les jeunes et avec les associations, souligne les possibilités de prévention sur Internet et relate les résultats variés de cette collaboration fructueuse sous une forme condensée, accessible à tous les intéressés. Les programmes de prévention y sont présentés, ainsi que les enseignements tirés de différentes évaluations de la pratique. 76 pages, format A4. Commande: www.bag-admin.ch, Thèmes, Dépendances et drogues

Online Que font les hommes de leur temps? Une récente étude de Peter Döge et Rainer Volz, spécialistes des hommes, répond à cette question. Vous trouverez les résultats de cette enquête (en allemand seulement) sur la page Internet de la Plaque tournante – La santé au masculin: www.radix.ch, Allgemeine Angebote, Drehscheibe Männergesundheit, Themen. Contact: René Setz Radix Promotion de la santé Plaque tournante – La santé au masculin Schwanengasse 4, 3011 Berne tél. 031 312 75 75 setz@radix.ch

spectra: Historiquement parlant, comment la délimitation entre liberté individuelle et intervention de l’Etat a-t-elle évolué? Hans Ruh: à l’origine, la liberté était le fait de pouvoir mener sa vie en toute responsabilité. Mais il existe une acception «moderne» de la liberté qui ne s’arrête pas à l’aspect banal: je peux faire ce que je veux. Kant nous parle d’autonomie: je suis prêt, en toute responsabilité, à respecter une loi que je me suis fixée et qui peut également valoir pour d’autres. Nous avons complètement transformé cette idée. Aujourd’hui la tendance ultradominante est celle de la réalisation de son propre égo, de cette autonomie. Ce n’est pas un hasard si le jouet préféré de l’homme est l’automobile. Le chemin de l’autonomie à l’automobile est l’histoire de la déchéance de l’Aufklärung européenne. Nous avons «pragmatisé» cette idée de liberté, l’avons banalisée et affublée d’un contenu économique. La situation devient problématique si nous soulevons deux aspects: la question de la responsabilité et celles des conditions sociales de la liberté, car «je ne suis pas libre si je n’ai rien à manger». Il ne faut pas tout simplement maximiser la liberté du plus fort. Notre conception de la liberté nous démarque d’autres cultures, je ne voudrais pas en être privé. Mais la question centrale demeure: lier cette liberté à la responsabilité. Comment la notion de liberté s’est-elle modifiée avec le temps? Notre pays est fortement marqué par l’environnement européen où la notion de solidarité joue un rôle important. L’évolution historique a connu des hauts et des bas. Le début du XIXe siècle a marqué la victoire de la liberté – le libéralisme de Manchester – mais ensuite, la pensée de Marx est apparue, suivie par le développement d’une idée de politique sociale. Nous avions, en Allemagne, Bismarck, et en Suisse, les lois des fabriques, comme dans l’industrie textile glaronaise. C’est ainsi qu’est né, à la fin du XIXe siècle, un contre-mouvement en opposition aux débordements de liberté, surtout de la liberté économique au détriment des plus faibles. L’idée de l’Etat social est une correction, orientée solidarité, de l’idée de liberté. On a cherché à créer un équilibre. Au début du XXe siècle, la liberté avait de nouveau le vent en poupe, entraînant la crise économique dans son sillage et des réponses comme le communisme et, plus tard, le national-socialisme. C’est en pleine Seconde Guerre mondiale qu’a germé l’idée de l’économie de marché sociale, nouvelle tentative de trouver un équilibre entre liberté et solidarité. Ce modèle a fonctionné plus ou moins bien pendant 50 ans en Suisse et en Europe. Aujourd’hui, nous sommes de nouveau au creux de la vague: mondialisation, néolibéralisme et déréglementation sont les maîtres mots. S’il y a déréglementation, il n’y a plus de règles. Dès lors, il faut trouver l’équilibre entre la liberté et la solidarité dans le contexte de la mondialisa-

tion. C’est infiniment difficile, car les institutions qui ont réussi à le faire par le passé sont affaiblies. L’Etat ne peut pas assumer cette tâche, il faut donc trouver un nouveau modèle – analogue à la politique sociale du XIXe siècle et à l’économie de marché sociale du XXe siècle. La société civile doit reconquérir la solidarité, et l’économie doit veiller elle-même à mettre en place éthique et solidarité, car l’Etat n’est plus en mesure de le faire. L’économie est marquée par les extrêmes: les plus forts profitent toujours plus, les plus faibles… s’enfoncent toujours davantage En haut de l’échelle, les revenus progressent, en bas, ils s’enfoncent – situation inacceptable. L’Etat n’a aucune chance de pouvoir intervenir ici, car il se trouve lui-même en situation de concurrence internationale. S’il impose des salaires minima trop élevés, les entreprises délocalisent, et s’il introduit une imposition adaptée aux salaires, ce sont les contribuables qui désertent. La marge de manoeuvre de l’Etat en matière de réglementation est de plus en plus étroite. Il faut repenser les choses: tous ceux qui aspirent à un monde équitable, solidaire, sans terreur et pérenne doivent trouver de nouveaux modèles. C’est un défi gigantesque, notamment face aux Etats-Unis et à la Chine qui veulent nous «clouer au mur». Le moment est propice pour l’Europe: il lui faut apporter son modèle d’avenir; elle doit prendre 10 ou 20 ans d’avance en matière de nouvelles technologies, de nouvelles stratégies environnementales et de nouvelles formes de civilisation. C’est une chance inouïe, il ne faut pas la laisser passer. Comment d’autres cultures traitent-elles la liberté et les lois de l’Etat? Les Etats-Unis placent la liberté sur un piédestal, au détriment de la solidarité (au niveau de l’Etat). Il existe toutefois une forte tradition communautaire de la solidarité, de l’aide à son voisin dans ce pays. Par rapport aux Européens, les Etats-Uniens font figure de véritables champions du bénévolat. En Europe du Nord, l’expérience a démontré que solidarité et succès économique ne sont pas incompatibles. En revanche, en Europe de l’Est, les règles sont impitoyables, et il ne fait pas bon être pauvre. Intéressons-nous à notre sujet privilégié qu’est la santé. Que doit faire l’Etat ici? Peut-on, par exemple, faire plus que la campagne LOVE LIVE STOP SIDA qui préconise le port du préservatif comme meilleure protection contre le sida? En matière de prévention contre le sida, nos autorités sanitaires mènent un combat exemplaire. Dans ce domaine, seule la prévention est efficace. En effet, il n’est pas possible d’invoquer le principe du pollueur-payeur qui irait contre la dignité de l’homme et la protection des plus faibles. Il est, en revanche, possible d’accroître encore les interventions de l’Etat, notamment dans le secteur des théra-

pies VIH, en garantissant à tous l’accès aux médicaments. Comment l’Etat doit-il aborder le comportement à risque – comment réglementer les choses ici? A mon sens, le principe du pollueur-payeur est invocable en la matière. Lorsqu’un comportement particulier devient une charge pour la collectivité à cause des coûts sanitaires ou sociaux qu’il induit, il faut intervenir. Il faut fortement taxer les produits engendrant des coûts élevés pour la société. C’est une véritable révolution des esprits qui est nécessaire ici. Nous taxons le travail. Mais pourquoi? Le travail est une chose vertueuse qu’il faudrait encourager. Nous devrions taxer ce qui est préjudiciable pour la société. Il faut imposer, aux deux sens du terme: imposer pour le bien collectif, et imposer un comportement par intervention de l’Etat. En matière de drogues illégales, il faut renforcer les sanctions contre les dealers qui, à ce jour, sont trop bien traités. Il ne suffit pas de sanctionner la seule consommation, il faut punir aussi le négoce de drogue. A chaque problème sa propre stratégie. Dépénalisons, par exemple, la consommation de cannabis, mais multiplions simultanément les actions d’information. Car le cannabis peut causer des dégâts importants sur la santé, voire des maladies psychiques. Si punir les consommateurs n’a pas de sens, en revanche, la prévention doit toujours dénoncer les risques. Mais je vois un autre danger pour la santé: celui de l’excès de graisse dans l’alimentation, lié à un déficit d’activité physique. Ici aussi on pourrait imposer des taxes: 17 francs pour une saucisse pleine de graisse! Je suis favorable à l’introduction d’un impôt sur la graisse. Récompensons les membres des associations sportives en leur accordant des primes d’assurance-maladie moins élevées. Subventionnons les clubs sportifs. Nous pourrions ainsi faire d’une pierre deux coups: encourager le travail bénévole dans les associations et améliorer la santé des membres actifs de ces associations, grâce au sport et à l’activité physique. S’il faut renforcer la prévention d’une manière générale, faisons preuve de créativité. La carotte d’un côté, sous forme d’avantages pour ceux qui font du sport, mais doit-on brandir le bâton pour les réfractaires et ceux qui nuisent sciemment à leur santé?


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lectronique d’empâtement et de crétinisation.»

rt des individus. Où et comment l’Etat doit-il intervenir pour réaliser ces valeurs, où peut-on s’en remettre à la responsabilité personnelle de chacun? ée à la situation actuelle de «liberté individuelle versus intervention de l’Etat» et quels sont les défis à venir. En partie, oui, à condition de fixer un seuil de sanction afin de ne pas pénaliser les personnes socialement défavorisées. Mais le citoyen moyen, doté d’une intelligence normale et touchant un revenu normal devrait pas-

Autre exemple: compte tenu de l’inflation intervenue depuis les années 60, le prix du litre devrait être, aujourd’hui, de cinq à six francs. Les gros consommateurs de carburant sentiraient alors la différence. Et

l’on gagne de l’argent avec se genre de choses. C’est une erreur de soutenir sournoisement la consommation d’alcool, même si elle génère plus d’argent pour l’AVS. L’Etat ne doit pas avoir d’attitude ambiguë là-dessus. Je considère, par exemple, comme une parfaite hypocrisie de vendre des alcopops aux jeunes après le ski, dans les bars installés sur les pistes; on le sait, ces produits contiennent de l’alcool sous forme à peine dissimulée. Il faudrait taxer fortement ce genre de produit pour couvrir les frais de santé et d’accident. Mais souvent, on préfère fermer les yeux devant les problèmes sérieux. La production de tabac est subventionnée, comme la prévention. Qu’en pensez-vous? Il faut absolument abandonner ce genre de subventions et trouver, à moyen et long terme, une solution acceptable pour toutes les personnes concernées. Contrairement à ce qui se passe dans le cas d’une consommation modérée de vin, le tabac nuit directement au fumeur et à son entourage. Le tabagisme passif est tout simplement intolérable. Trouvons des stratégies cohérentes; c’est aux experts de la santé et aux milieux économiques de s’entendre pour trouver une politique cohérente.

Hans Ruh

ser à la caisse et payer une partie des coûts de la santé qu’il provoque. Par exemple des primes d’assurance-maladie plus élevées pour les fumeurs? C’est moralement tout à fait supportable. Fumer est nocif pour le fumeur ainsi que pour son entourage, alors, pas de pardon. Faudrait-il donc également pénaliser les personnes en surpoids pour leur comportement mettant leur santé en danger? L’intervention auprès des fumeurs est plus facile, car le comportement fautif est visible. Compte tenu de la plus grande complexité d’appréciation de la situation en matière d’obésité, je suis davantage enclin à privilégier un impôt sur le gras d’une part, et la promotion de l’activité physique d’autre part. Le citoyen normal qui mange trop passera tôt ou tard à la caisse. Je pense qu’il faudrait également fortement taxer les appareils électroniques – source d’empâtement et d’abêtissement. Et les voitures? Faut-il aussi les taxer? Si l’on incluait sérieusement les coûts de santé et ceux de l’environnement, le prix de l’essence devrait se situer environ à dix francs le litre. Ce serait la solution.

nous voici dans le débat autour de la protection du climat et des micropoussières – le centime climatique est ridicule, ce qu’il faudrait, c’est cent sous climatiques! Seulement voilà, la tendance est à l’inverse: le Parlement s’est récemment opposé à taxer davantage les gros consommateurs de carburant. Oui, je n’y vois que deux explications: un Sacrificium Intellectus, ou un Vaccum Intellectus. La combinaison des deux est fatale. Soit les parlementaires ont perdu l’entendement, soit ils n’en ont aucun. Je considère qu’il est indigne d’un être humain normalement pensant de ne pas prendre au sérieux le problème des micro poussières dans la situation actuelle. Certes, nous avons de petits poils dans le nez et les oreilles qui filtrent la poussière de l’air, mais nous n’avons aucun filtre intégré pour lutter contre les poussières fines, ces substances dangereuses qui arrivent directement dans nos poumons. J’ai 72 ans, je ne risque plus grand chose, mais mes petits enfants… Les drogues légales sont aussi un facteur économique important. Que pensez-vous de la réglementation actuelle? Il n’y a pas de quoi être fier, lorsque

Qui rassemblera ces parties aux intérêts si divers? Vous avez raison, et je déplore l’absence d’une culture de la reconnaissance publique de vérités intellectuelles. Nous palabrons beaucoup trop. Des gens prétendument intelligents se cachent derrière une prétendue bêtise du peuple. Pour moi, une véritable élite politique serait celle qui argumente publiquement et honnêtement. Mais l’élite s’y refuse intellectuellement. Qui dirige vraiment la Suisse? Bonne question. Ce sont en partie les craintes de la mondialisation, en partie des frustrations… On pourrait répondre aussi: personne. Notre pays vogue, au gré d’un mélange de frustration, de succès et d’avidité au gain, de cupidité et de stress.

Ce qui manque, c’est donc une confrontation avec la durabilité, une réflexion sur des choses qui vont au-delà de l’immédiat? Nous ne pouvons pas continuer à détruire le caractère prévisible de la nature. Pourtant, c’est précisément ce que nous faisons par nos interventions insensées qui la rendent imprévisible: tornades, éboulements de rochers, inondations, etc. sont ses réponses. Or, l’homme a besoin de pouvoir prévoir pour survivre. Quel devrait être le rôle des autorités sanitaires? Les autorités sanitaires devraient se faire l’avocat de ceux qui sont mis en danger par d’autres. Que ce soit par dommage direct ou parce que la collectivité doit ensuite payer des sommes considérables suite au comportement stupide de quelques uns. Il nous faut absolument une politique cohérente. Pour la réaliser il faut opérer un travail de conviction permanent sur les gens, forcer les politiques à l’honnêteté intellectuelle et mettre en place un groupe de pression puissant. Qu’est-ce qui est véritablement le plus important: la santé ou, comme le dit Bruno Frick, président de la Conférence des directeurs cantonaux de la santé, le bonheur? Le bonheur est un vaste sujet d’éthique; Aristote parlait de félicité. La constitution états-unienne a même ancré le bonheur comme un droit. Se pose, dès lors, la question du comportement à l’égard des autres dans la quête de son propre bonheur. La quête du bonheur est une chose, mais nous devons voir les limites du bonheur. Dans le fond, nous sommes dans une situation absolument privilégiée – et nous en tirons trop peu parti. Changer de comportement vis-à-vis de son corps, adopter une nouvelle corporalité, c’est la santé ET le bonheur. Nous devrions descendre de toutes les machines et tourner le dos à l’électronique d’empâtement et de crétinisation. J’ai un corps, je l’entraîne et je vais bien. Alors mon cerveau grandit aussi, je peux réfléchir et être heureux.

Notre interlocuteur Le professeur Hans Ruh (*1933) est professeur ordinaire et directeur de l’institut d’éthique sociale de l’Université de Zurich. Expert reconnu dans le domaine de l’éthique économique, entrepreneuriale, environnementale et du travail, il est l’auteur de livres et publications qui font autorité. Le professeur Ruh est connu pour ses nombreuses apparitions médiatiques. La pensée morale d’Hans Ruh est marquée par son maître, Karl Barth, auprès duquel il a obtenu le grade de docteur et pour lequel il est souvent allé en mission secrète dans le bloc de l’Est dans le cadre de la Mission Gossner. Au début de son activité éthique, le professeur Ruh a étudié les questions de paix et de pauvreté. Plus tard, il s’est également engagé en faveur de l’environnement. Ces dernières années, il s’est consacré à des questions éthiques issues de la libéralisation économique et du chômage. Ce faisant, il a dévoilé des contraintes et démontré que la qualité de la vie et la solidarité ont priorité sur la productivité économique. Hans Ruh est président du conseil d’administration de BlueValue AG, Zurich. L’entreprise se consacre à l’analyse éthique de titres et de pays, développe des produits financiers éthiquement corrects et conseille des entreprises en matière d’éthique.


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suite de la page 1 L’édition scientifique du rapport sur la nutrition (livre ou cédérom) compte 1070 pages et plus de 70 contributions. Grâce à l’élaboration d’une version abrégée (avec cédérom du rapport principal inclus) ciblant les enfants et les adolescents et d’un dépliant comportant des astuces à appliquer au quotidien, les données les plus importantes du rapport sur la nutrition sont aussi à la portée d’un large public. Contact: Esther Camenzind-Frey Résponsable a.i. du Service Nutrition OFSP, 3003 Berne tél. 031 323 36 83

Un bon départ dans la vie Durant les six premiers mois, l’allaitement est l’alimentation la plus naturelle et la plus complète pour le nourrisson, car le lait maternel couvre tous les besoins pour la croissance de l’enfant. L’allaitement favorise aussi le développement d’une

relation saine et harmonieuse entre la mère et l’enfant. L’allaitement réduit la mortalité infantile dans les pays en voie de développement et a également des effets positifs sur la santé des enfants dans les pays industrialisés. Les enfants allaités tombent moins souvent malades et résistent mieux aux infections. Leur développement est globalement meilleur. La surcharge pondérale est également plus rare chez les enfants allaités. L’allaitement a aussi une incidence positive sur la santé de la mère, dans la mesure où il contribue à réduire certains risques de cancer chez la femme. Allaitement et durée d’allaitement en hausse Selon une étude nationale de 2003,

94% des mères allaitent après la naissance, soit 2% de plus qu’en 1994. Les mères allaitent en moyenne pendant 31 semaines (contre 22 semaine en 1994). L’initiative «Hôpital ami des bébés» a eu à cet égard une incidence positive sur la durée d’allaitement. Toutefois, seules 14% des femmes suisses pratiquent l’allaitement exclusif jusqu’à la fin du sixième mois. Selon l’OMS, l’alimentation non maternelle commence trop tôt pour deux tiers des enfants. Les mères qui ont tendance à allaiter moins longtemps et à introduire plus rapidement l’alimentation non maternelle présentent les facteurs suivants: jeunesse, bas niveau d’éducation, tabagisme, surpoids.

www.ernaehrungsbericht.ch

L’acide folique est une vitamine qui agit contre les malformations du tube neural (spina bifida, «dos ou-

Troubles alimentaires chez les jeunes Plus que jamais, notre époque se caractérise par l’abondance d’aliments sains et variés. Malgré tout, anorexie et boulimie sont des phénomènes toujours plus fréquents.

Différences sociales et alimentation Une étude du 5e rapport sur la nutrition en Suisse a comparé les comportements alimentaires d’adultes résidant dans le canton de Genève. L’enquête a reposé sur un questionnaire rempli par 5761 femmes et 5725 hommes âgés de 35 à 75 ans auprès du Bus Santé entre début 1994 et fin 2003. 20 groupes alimentaires différents ont été constitués, combinant le pays d’origine et le niveau de formation des personnes interrogées. L’enquête révèle l’influence du niveau

l’acide folique pour la prophylaxie de la spina bifida, contre seulement 25% des femmes d’origine balkanique ou turque. Mais seulement 37% des femmes ont pris un supplément d’acide folique durant les quatre semaines précédant la grossesse.

Dans les pays occidentaux, le poids corporel moyen de la population évolue à la hausse alors que, depuis des décennies, les mannequins propagent un idéal esthétique qui reflète un déficit pondéral pour le moins excessif. Puberté et adolescence sont des phases de bouleversement que de nombreux adolescents n’arrivent pas à gérer. Il en résulte des troubles alimentaires, tels que consommation excessive pour compenser un chagrin, la mortification par le jeûne, ou encore des accès de boulimie. Voilà autant de signaux émis par les jeunes pour attirer l’attention sur leurs problèmes psychiques. Aujourd’hui, ce genre de perturbation affecte en par-

ticulier les jeunes filles et les jeunes femmes, parce qu’elles sont confrontées à des attentes contradictoires: elles doivent à la fois être belles, minces, intelligentes, sportives et bénéficier d’une bonne formation, mais elles doivent aussi séduire par leur féminité rayonnante, leur sensibilité, leur doigté et leur entregent. Ce mécontentement de soi qui naît de ce paradoxe peut conduire à des régimes diététiques de durée excessive ou se traduire par des comportements de type anorexique ou boulimique. Les troubles alimentaires figurent parmi les pathologies psycho-somatiques les plus fréquentes chez les adolescentes et les jeunes femmes.

d’éducation et de l’origine sur les habitudes alimentaires. Les moins diplômés non-méditerranéens ne consomment pas suffisamment de fruits, légumes, poisson et viande, mais trop de matières grasses à tartiner, charcuterie, bière et sodas. Les méditerranéens, et parmi eux particulièrement les femmes, ont conservé leur mode d’alimentation traditionnel et sain. Globalement, les changements dans la consommation des aliments ont suivi les recommandations alimentaires officielles (réduction des matières grasses à tartiner et des boissons alcoolisées, augmentation des légumes, fruits, produits laitiers et céréaliers, de l’eau et des huiles aux acides gras non saturés. Au cours des années 90, les différences sociales par rapport à l’alimentation ont persisté, voire augmenté chez les non-méditerranéens alors qu’elles se sont atténuées chez les méditerranéens.

Infographisme

Améliorer l’information La prophylaxie est encore insuffisante, surtout chez les immigrantes, les jeunes femmes et, évidemment, en cas de grossesse imprévue.Il faut intensifier l’information pour améliorer la prise d’acide folique chez les femmes exposées. Le groupe de travail

Prophylaxie par l’acide folique de la Commission fédérale de la nutrition recommande l’addition d’acide folique à la farine. Efficace, sûre et bon marché, cette solution règle du même coup le problème de la prophylaxie en cas de grossesse imprévue, car le pain est un aliment de base que la majeure partie de la population consomme quotidiennement. Mais d’après les expériences réalisées dans plusieurs pays, l’addition d’acide folique à la farine donne des résultats tout à fait probants.

Ils affectent également un nombre croissant de jeunes hommes, mais le rapport reste d’environ dix jeunes femmes pour un jeune homme. Comportements alimentaires anormaux L’anorexie et la boulimie touchent environ 1% des filles âgées de 14 à 17 ans. Mais les soucis d’esthétique et de poids sont beaucoup plus répandus. En effet, entre 62% et 77% des jeunes femmes souhaitent maigrir ou s’estiment trop grosses. Et elles sont nombreuses à se lancer dans des régimes allant souvent jusqu’à l’excès, à grands renforts d’inhibiteurs d’appétit, d’agents déshydratants et de laxatifs.

Accidents de la route mortels sous influence de l'alcool 1er semestre 2004

1er semestre 2005

60 50

52

40

33

30 20 10

–37%

Source: Office fédéral de la statistique

Avant la grossesse: acide folique

vert»). Les femmes qui envisagent une grossesse devraient prendre 0,4 mg d’acide folique sous forme de pilule pendant quatre semaines avant la conception et durant les trois premiers mois de grossesse – en complément à une alimentation équilibrée. Une enquête a été réalisée en 2002/2003 dans trois maternités de Suisse orientale sur les sujets suivants: importance de l’acide folique et de sa prise pendant la maternité, spina bifida, habitudes alimentaires. 60% à 75% des femmes de Suisse et d’Europe occidentale savent, par les spécialistes, qu’il faut prendre de

Les mesures entrées en vigueur en janvier 2005, comme l’abaissement du taux limite d’alcool et les contrôles de l’air expiré même en l’absence d’indices d’ébriété, déploient leurs effets sur le comportement des conducteurs de véhicules à moteur. Le nombre d’accidents graves de la route est en forte régression (–12%), notamment ceux dus à l’alcool (–26%). Le grand débat public, les campagnes d’information dans les médias, mais aussi les contrôles de police renforcés ont sans doute influencé ce changement de comportement. Les expériences faites à l’étranger confirment que le succès ne peut être durable que si les contrôles de police sont maintenus.


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Une Suisse en toute légèreté Evaluation Suisse Balance. Suisse Balance est un programme lancé conjointement par l’Office fédéral de la santé publique et Promotion Santé Suisse avec un objectif de politique sanitaire majeur: une balance énergétique équilibrée grâce à une alimentation saine et une activité physique suffisante. L’évaluation de la phase pilote de Suisse Balance recommande de poursuivre le programme et de donner à la politique axée sur le bilan énergétique une dimension stratégique nationale.

P

our les évaluateurs (Jacques Bury et Yann Boggio d’ADSAN), la réussite dépendra d’une politique cohérente et crédible avec un fil directeur et un langage commun.

Objectif: un poids corporel sain Le programme Suisse Balance a été lancé conjointement par l'Office fédéral de la Santé Publique (OFSP) et Promotion Santé Suisse (PSS) le 17 octobre 2002. Il poursuit deux objectifs majeurs: • D'ici à 2010 la proportion de personnes vivant en Suisse et ayant un poids corporel «sain» se sera sensiblement accrue. • D'ici à 2010 les conditions structurelles garantissant une évolution durable vers l’obtention d'un poids corporel «sain» auront été mises en place. Suisse Balance est un programme qui encourage et soutient le développement de projets locaux, régionaux et nationaux intégrant sous diverses formes le renforcement de comportements sains en alimentation et activité physique. Les enfants et les jeunes constituent les groupes cible principaux. La contribution financière des deux parties pour la phase 2002– 2004 s’est élevée à CHF 2,88 millions au total, soit CHF 960'000 en moyenne par an.

Notoriété et importance D’après les évaluateurs, le programme Suisse Balance a réussi à se positionner en quelques années en tant qu’acteur à part entière dans le paysage institutionnel de la promotion de la santé. Sa notoriété est d’ores et déjà garantie, et son champ d’action est reconnu comme étant complémentaire à celui de programmes similaires, tout en promouvant une approche novatrice. En s’engageant sur un terrain nouveau et peu balisé, celui de l’interface entre alimentation saine et activité physique, Suisse Balance tente une association entre des acteurs évoluant dans des univers très divers. Malgré cette dif-

ficulté, le fait qu’un peu moins de la moitié des répondants estiment que ce programme a un rôle central constitue une forme de reconnaissance du réseau du travail effectué. Dans l’ensemble, ce programme a réussi à se faire connaître et reconnaître en tant que partenaire institutionnel auprès de nombreux organismes. Par contre, ses propres projets ne fonctionnent pas encore comme levier pour une plus grande notoriété: ceux-ci sont à considérer comme (encore?) peu connus. Un des enseignements principaux de l’enquête est la faible appropriation du programme par les délégués cantonaux: ils connaissent moins bien le programme et leurs opinions sont également moins favorables à son égard. Le partenariat entre les deux grands organismes, l’OFSP et Promotion Santé Suisse, est accueilli favorablement et a bien fonctionné. La délégation de gestion hébergée par la Société suisse de santé publique (SSSP) est une formule heureuse. Promotion Santé Suisse et l’OFSP représentent sans hésitation les acteurs les plus centraux du système. Ils sont parvenus à tisser un réseau dense autour d’eux. Le programme est autant inséré dans le milieu des organisations actives en faveur de l’alimentation saine que dans celui en faveur du mouvement.

Un label mieux ancré L’évaluation arrive à la conclusion que le programme Suisse Balance doit être poursuivi. Suisse Balance doit construire sur le long terme et adopter une vision stratégique ambitieuse. Ceci suppose un programme d’ampleur nationale, appuyé politiquement, constituant un label, mais souple et travaillant sur plusieurs niveaux. Soit un programme «cha-

Impressum

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«spectra – Prévention et promotion de la santé» est un bulletin d’information de l’Office fédéral de la santé publique qui paraît six fois par an en français, en allemand et en anglais. Il publie également des opinions qui ne coïncident pas avec la position officielle de l’office.

Traduction: Marie-Françoise Dörig-Moiroud

Editeur: Office fédéral de la santé publique 3003 Berne Tél. 031 323 54 59, Fax 031 324 90 33 www.bag.admin.ch Réalisation: Pressebüro Christoph Hoigné, Allmendstr. 24, 3014 Berne hoigne@datacomm.ch Responsable de la commission de rédaction: Markus Allemann, markus.allemann@bag.admin.ch Textes: Collaborateurs de l’OFSP, Christoph Hoigné et d’autres auteurs

A Langenthal, des jeunes préparent un birchermuesli appétissant sous la direction du rappeur champion du monde de cuisine. Dans le cadre du progamme national Suisse Balance, le projet Freestyle Tour a sensibilisé des élèves dans toute la Suisse aux interactions entre des sports à la mode et une alimentation saine.

Un réseau dense

Photos: Christoph Hoigné Graphisme: Lebrecht typ-o-grafik, 3147 Aekenmatt Impression: Büetiger AG , 4562 Biberist Tirage: 7000 ex. allemands, 4000 ex. français, 1500 ex. anglais Il est possible de commander des numéros séparés et des abonnements gratuits à: Office fédéral de la santé publique, Section campagnes, 3003 Berne Tél. 031 323 87 79, Fax 031 324 90 33 kampagnen@bag.admin.ch Le prochain numéro paraîtra en mars 06.

peau» regroupant sous un thème central (bilan énergétique) des actions diverses en favorisant leur congruence. Il faut également reconduire le partenariat OFSP – Promotion Santé Suisse, éventuellement élargi, en construisant sur l’image de Suisse Balance: organisation «autonome». Il faut renforcer les liens avec les autres organisations (notamment l’OFSPO) et avec les cantons dans le cadre d’une vision stratégique partagée. Il faut obtenir de l’OFSP et de Promotion Santé Suisse un engagement à long terme et une garantie budgétaire adéquate.

Quelles priorités pour les projets L’efficience des projets est variable et devrait faire l’objet de réajustement en fonction de données probantes. Les projets évoluent constamment et exigent donc une «veille» permanente. Les évaluateurs recommandent de choisir des priorités d’action, de soutenir les meilleurs et de se désengager des autres. Il existe encore un potentiel pour des nouveaux

projets dans les domaines des inégalités sociales, de l’économie agricole et alimentaire, des supermarchés et des médias. Contact: Florence Chenaux, OFSP 3003 Berne, tél. 031 323 59 76 florence.chenaux@bag.admin.ch


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Point fort: état et liberté

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Demande de lieux sans fumée en augmentation Enquête sur le tabagisme passif. Par rapport aux années 2001/2002, moins de personnes ont été exposées en 2004 au tabagisme passif sur le lieu de travail et au domicile. Dans le domaine de la restauration, l’exposition n’a pas diminué et les clients sont de plus en plus incommodés; la nécessité d’une loi pour résoudre le problème s’impose de plus en plus. La situation s’est améliorée en particulier sur le lieu de travail et au domicile. Cependant un quart des nonfumeurs continuent d’être exposés contre leur gré à la fumée d’autrui pendant au moins une heure par jour. Trois employés sur dix travaillent dans des entreprises où il est permis de fumer. La protection contre le tabagisme passif est une priorité de la prévention contre le tabagisme. Sur mandat de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), l’Université de Zurich a, sous la conduite du Professeur R. Hornung, réalisé une enquête auprès de 2500 personnes âgées de 14 à 65 ans. Son rapport donne une image représentative de l’évolution de l’exposition au tabagisme passif ainsi que de l’incommodation ressentie.

Peu d’amélioration dans les restaurants En 2004, un quart des non-fumeurs et plus de deux fumeurs sur cinq ont été exposés à la fumée d’autrui pendant au moins une heure par jour. L’exposition totale à la fumée passive – cumul de tous les lieux à exposition – a légèrement diminué par rapport à l’enquête de 2001/2002.

Dans les restaurants, bars et cafés, ainsi que lors des manifestations socioculturelles, la situation n’a pratiquement pas évolué. Plus de quatre personnes sur cinq sont exposées à la fumée d’autrui dans les restaurants. Par contre, l’exposition au tabagisme passif a diminué sur le lieu de travail. La proportion d’employés exposés à la fumée d’autrui est passée de 54% à 47%. C’est dans les restaurants, bars et cafés que la fumée d’autrui est ressentie le plus souvent comme incommodante. 56% (2001/2002: 49%) des clients qui y sont exposés à la fumée d’autrui se sentent fortement incommodés; parmi les non-fumeurs cette proportion grimpe à 68% (2001/2002: 61%). Lors de manifestations socioculturelles ainsi que sur le lieu de travail, la proportion des personnes incommodées a moins augmenté.

Réglementations sur le lieu de travail Deux tiers des employés travaillaient, en 2004, dans un lieu où il était interdit de fumer de manière générale ou dans un lieu disposant d’espaces fumée délimités. Seuls

40% des employés savent qu’il existe des dispositions légales obligeant les employeurs à les protéger contre le tabagisme passif sur le lieu de travail (cf. directive du seco).

Eviter les établissements enfumés Dans l’enquête 2004, un quart des personnes interrogées ont affirmé éviter les établissements où l’on fume. Une majorité de 61% (2001/ 2002: 55%) est d’avis qu’il est nécessaire de prendre des mesures législatives afin que des espaces sans fumée soient érigés dans tous les restaurants. Résumé du rapport sur le tabagisme passif: www.bag.admin.ch, thèmes, dépendances, tabac, faits et chiffres Directive du seco sur la protection contre le tabagisme passif: www.at-suisse.ch/rauchfreie_arbeitsplaetze/pdf/wegleitung_seco_fr.pdf Contact: Philippe Vallat, Programme national pour la prévention du tabagisme OFSP, 3003 Berne, tél. 031 322 95 05 philippe.vallat@bag.admin.ch

Le Tessin montre l’exemple Le 12 octobre 2005, le Parlement tessinois a décidé l’interdiction générale de fumer dans les restaurants, les bars et les discothèques. Il est probable que le soutien de GastroTicino ainsi que les bonnes expériences faites par l’Italie voisine avec l’interdiction de fumer dans les lieux publics ont influencé cette décision adoptée par 46 voix contre 17 (et 13 abstentions). Les restaurateurs tessinois ont désormais un an pour mettre leurs locaux en conformité avec la nouvelle loi. Il ne sera ensuite plus possible de fumer que dans les restaurants disposant de «fumoirs» complètement séparés des autres salles et munis d’une ventilation efficace. Une intention similaire du Parlement cantonal bernois d’introduire une interdiction de fumer dans les restaurants n’avait échoué, à la fin du mois de juin 2005, qu’après le vote décisif de son président. Depuis le 11 décembre, il est interdit, en Suisse, de fumer dans tous les trains ainsi que dans les salles fermées des gares.

Ornements du corps – beauté fatale? Tatouage, piercing et maquillage permanent. Les ornements du corps, tradition ancestrale de nombreuses cultures ne sont donc pas une invention récente. Depuis quelques temps, les anneaux et les bijoux sur le visage, les langues percées et les tatouages artistiques font également partie de notre image quotidienne. Mais ce qui est peut être esthétique peut malheureusement être également dangereux.

C

’est pour cela, et pour combler l’actuel vide juridique dans ce domaine, que l’Office Fédéral de la Santé Publique (OFSP) a mis sur pied un groupe de travail spécifique afin d’élaborer une base légale pour la protection de la santé en matière de tatouages, maquillages permanents, piercings et pratiques associées. Si les autorités publiques se sont intéressées à ce mode d’ornement du corps, c’est que le piercing et le tatouage sont des pratiques provoquant des blessures de la peau. Le tatouage et le maquillage permanent désignent le fait de graver la peau en pratiquant des micro-injections de pigments dans le derme, à l’aide d’aiguilles spéciales. Quant au piercing, il désigne le fait de percer la peau, les tissus sous cutanés et parfois également le cartilage pour y introduire un objet à fonction esthétique. Une blessure physique est donc infligée, dont la guérison peut parfois être très

lente. Des corps étrangers ou des pigments de couleur sont implantés, contre lesquels le corps peut développer des réactions de défense, telles que des inflammations ou des réactions allergiques. Ce risque est plus élevé lors de manipulations incorrectes. D'autres problèmes sont les transmissions potentielles de maladies infectieuses et, en phase de guérison, l’apparition de cicatrices. Les inflammations peuvent provenir du manque d'hygiène lors de l’implantation d’ornements et de couleurs dans le derme, ainsi que de la négligence des soins dans les premiers jours ou semaines après l'intervention.

Beaucoup de questions sans réponses Au contraire des interventions chirurgicales exécutées par un médecin, il n'existait jusqu'à présent pas de dispositions légales spécifiques dans le domaine des tatouages, piercings, maquillages permanents ou pratiques associées, dans le but d'assurerune bonne protection de la santé des consommateurs. De plus de nombreuses questions des consommatrices et consommateurs restaient sans réponse, par exemple: qui est habilité à pratiquer le piercing en Suisse? Comment reconnaître un studio de tatouage sé-

rieux? Comment traiter un nombril fraîchement percé? Y a-t-il des contre-indications au piercing? Les encres utilisées par mon tatoueur sont-elles vraiment appropriées? Est-il possible de se faire faire un maquillage permanent autour des yeux sans en courir de danger? Quels sont les effets indésirables de telles pratiques? Un groupe de travail mis en place en 2003 par l’OFSP s'est penché sur ces problèmes. Il a élaboré les définitions légales et les directives générales pour une bonne pratique de travail.

Une collaboration exemplaire et peu conventionnelle Le groupe de travail de l’OFSP «tatouages, maquillage permanent, piercing et pratiques associées» réunit des experts provenant des sphères les plus diverses: tatoueurs, pierceurs, esthéticiennes, dermatologues, épidémiologistes, toxicologues, représentants des services de la santé publique cantonaux et fédéraux et des associations de consommateurs. Malgré la composition tout en diversité et les divergences partielles des attentes, la collaboration est très efficace. Avec un grand engagement, des solutions pragmatiques furent recherchées afin d’améliorer la protection de la santé des consommateurs. Les réglementations juridiques adéquates manquent dans presque tous les pays industrialisés, bien que les décorations corporelles soient très courantes de nos jours et fassent partie de notre vie quotidienne. Au vu de la complexité du sujet, le grou-

pe de travail s’est organisé en trois sous-groupes: «Aspects juridiques», «Bonnes pratiques de travail, hygiène et formation» et «Analytique et toxicologie». Le comité d'experts pour les produits cosmétiques du Conseil de l'Europe, dont la Suisse est un membre actif, a reconnu le besoin d'agir et a également élaboré une base scientifique pour la qualité des encres de tatouage. Sa résolution concernant les risques liés aux produits de tatouage a été ratifiée le 19 juin 2003 par le Comité des Ministres. Elle a servi de base pour l'élaboration de la législation suisse.

Législation en vigueur Autre résultat de ce groupe de travail existant depuis décembre 2003, l'ordonnance du DFI sur les objets usuels en contact avec les muqueuses, la peau et les cheveux, est entrée en vigueur au mois de janvier 2006. Par ailleurs, le groupe de travail a aidé les associations professionnelles à élaborer des directives de bonnes pratiques de travail et à mettre en place un label de qualité. Les directives, recommandées par l’OFSP et publiées sur son site Internet, existent désormais; quant au label de qualité, il est en cours d’élaboration. Les résultats des études du sous-groupe Analytique et toxicologie seront publiés au cours de l’année. Contact: Michel Donat chef de la Section objets usuels, cosmétiques et tabac, OFSP 3003 Berne, tél. 031 322 95 89, michel.donat@bag.admin.ch


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