écrit par Sunwalker d'après une histoire et des personnages crées par Hideo Kojima
Texte distribué gratuitement sur www.suniverse.fr Metal Gear Solid : Rise Of Outer Heaven est une oeuvre relevant de la fanfiction réalisée bénévolement. Ce texte est sous lisence Creative Commons by-nc-nd. Merci d'en respecter les règles. Metal Gear Solid et les noms qui lui sont affiliés sont des marques déposées par Konami Digital Entertainment. Aucune exploitation commerciale n’est permise sans leur autorisation. Le site www.suniverse.fr et les textes qui y sont proposés ne sont en aucun cas associés avec Konami Digital Entertainment.
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Solid Snake tomba sur les camions, alors qu'il filait vers le Nord, à travers les arbres. Les cinq véhicules étaient arrêtés au bord du chemin. Trois mercenaires, agenouillés dans la boue, s'affairaient à remplacer l'une des roues du deuxième véhicules de la file, qui avait crevé en roulant sur une grosse branche. L'agent de Fox-Hound avait marché près de quarante minutes dans la direction supposée du Bâtiment A, sans rencontrer la moindre menace. Il avait fini par découvrir cette route, qui serpentait dans la forêt. Vu les nombreuses traces de pneus et la largeur de celui-ci, il supposa que ce chemin de terre devait être l'un des axes routiers principaux du quartier général d'Outer Heaven. Du moins c'était ce qu'il espérait, car il avait ensuite continué sa progression en longeant cette voie. Il avait alors entendu le bruit des moteurs, s'était dissimulé derrière un arbre, avait vu passer les véhicules chargés de caisses de matériel. Reprenant sa route, il avait fini par rattraper les camions seulement quelques minutes plus tard, alors que l'incident venait tout juste de se produire. Le convoi comptait sept soldats d'Outer Heaven. Cinq chauffeurs accompagnés de deux gardes. Ces derniers avaient pris la place du passager dans les véhicules situés en troisième et quatrième position de la file. Tous armés, évidement, mais ils ne craignaient visiblement pas d'être attaqués, vu leur effectif réduit. La carte qu'il avait vu dans le bâtiment administratif semblait indiquer qu'il lui restait encore quelques kilomètres à parcourir avant d'atteindre le Bâtiment A. De plus, au fur et à mesure de sa progression, la forêt devenait de moins en moins praticable et de plus en plus boueuse, presque marécageuse. Ces camions pouvaient être la solution pour arriver à destination sans soucis, même s'il n'avait pas non plus la certitude qu'ils aillent là où lui souhaitait se rendre. Les chauffeurs des trois premiers véhicules manipulaient comme ils pouvaient le cric pour soulever le camion en panne, mais son utilisation était délicate, puisque l'outil de levage s'enfonçait sans cesse dans la boue et refusait de rester en position. La remise en état du camion accidenté prenant plus de temps que prévu, les chauffeurs des deux derniers véhicules vinrent se joindre à leurs camarades pour leur prêter main forte. Tous discutaient avec animation pour trouver une solution à leur problème. Ils parlaient une langue que Snake ne comprenait pas mais qu'il estima être d'origine slave. Peut-être du serbe. Les deux derniers véhicules étant maintenant sans surveillance, Snake sorti des fourrés et prit pied sur la route avant de foncer se mettre à l'abri du dernier camion de la file. Il souleva la bâche de protection de la remorque et constata que cette dernière était chargée à bloc de caisses en bois, comme celles qu'il avait vu dans les entrepôts de l'avant-poste. Pas moyen de se planquer dans celui-là sans décharger la cargaison et il n'avait absolument pas le temps, ni la possibilité de faire cela. Une porte claqua tout près. Des bruits de succion dans la boue. Quelqu'un se rapprochait. Sûrement le garde du quatrième camion, qui avait décidé de se dégourdir les jambes. A moins qu'il n'aie remarqué quelque chose. Impossible de jeter un coup d’œil au coin de la remorque sans risquer d'être automatiquement repéré. Snake se jeta discrètement au sol et regarda sous le véhicule. Les bottes du mercenaire venaient de passer les roues avant du camion. S'il gardait cette foulée, il arriverait à la remorque dans moins de six secondes et découvrirait l'agent secret. Sans hésiter un instant, Snake se faufila sous le châssis et rampa le plus silencieusement possible dans la boue, vers l'avant du camion. Le mercenaire s'arrêta devant la remorque, se hissa sur le marchepied et entreprit de farfouiller parmi les caisses en bois. L'agent de Fox-Hound regagna l'air libre, prit appui sur le pare-choc avant pour se relever, puis pivota vers le quatrième camion. Il souleva la bâche. Chargé aussi, mais il avait la place de se glisser pardessus une caisse plus petite pour se cacher parmi la cargaison. Dès qu'il se fut hissé à l'intérieur, son oreillette commença à grésiller. Snake se figea en plein mouvement. Merde, se dit-il. Il repéra aussitôt les caisses argentées frappées de l'hélice à trois branches. Le garde sauta du marche-pied du camion suivant, provoquant des éclaboussures de boue, puis se 2
dirigea vers celui devant lequel se trouvait Snake. Plus le temps d'hésiter. Malgré l'avertissement du compteur Geiger, l'agent secret bondit par-dessus les caisses et s'accroupit comme il put. Le mercenaire s'arrêta au niveau de la cabine puis héla l'un de ses camarades. Snake commença à attendre, alors que le grésillement était constant dans son oreillette. Espérons que le voyage jusqu'au Bâtiment A sera bref, se dit-il. Voyager clandestinement était déjà risqué, mais le risque était d'autant plus grand, quand on le faisait près de caisses remplies d'ogives nucléaires. Bon, évidemment, il y avait peu de chance que le voyage dure assez longtemps pour l'exposer à une dose de radiation mortelle, mais tout ça n'avait rien de bien rassurant. Et puis il suffisait que le camion se plante quelque part ou quoi... Des bruits de course se rapprochèrent. Le garde et l'un des mercenaires échangèrent quelques mots, au niveau de la cabine, puis les pas longèrent son camion. La bâche fut brusquement soulevée. Snake se raidit, se dissimula davantage dans l'ombre, dégaina son pistolet. Le mercenaire grimpa sur le marche-pied puis, un pied-de-biche à la main, entreprit de faire sauter le couvercle de la plus petite caisse. Les planches craquèrent en cédant. Le mercenaire posa son outil, récupéra le panneau qui faisait office de couvercle et disparut, après avoir remit la bâche en place, sans apercevoir l'intrus. Ils allaient sans doute utiliser l'épais couvercle de bois pour caler leur cric, se dit celui-ci en se détendant un peu. Snake se pencha par-dessus la caisse qui venait d'être ouverte et y trouva des explosifs C4. Il en prit cinq blocs, de la taille de la paume de sa main, puis les glissa dans ses poches de ceinture. Ça pourrait toujours lui servir plus tard. Par contre, il ne trouva pas de détonateurs dans la caisse, ce qui était plutôt logique et témoignait d'un minimum de bon sens de la part des mercenaires. Entreposer détonateurs et explosifs dans le même container faisait courir le risque d'un accident et d'une explosion involontaire, si l'un des détonateurs était sujet à un dysfonctionnement. Et puis il y avait d'autres méthodes pour faire sauter du plastique, donc il n'avait pas nécessairement besoin de détonateurs. Cinq minutes plus tard, le mercenaire revenait jeter le couvercle sur la caisse puis les portières claquèrent et le convoi s'ébranla. L'agent de Fox-Hound ne parvenait pas à détacher ses yeux des conteneurs de têtes nucléaires. Tant de puissance de destruction enfermée dans une si petite boite. Pourquoi les mercenaires d'Outer Heaven avaient-ils décidé de déplacer les ogives ? Cela signifiait-il qu'ils étaient sur le point d'effectuer un lancement ? Et comment était-il possible que Gray Fox, son ami, ce soldat si intègre, soit impliqué dans de tels événements ? Peu après sa rencontre avec l'ex-agent porté disparu, Snake avait contacté Campbell pour lui annoncer la nouvelle. Le colonel s'était montré tout aussi surpris et choqué que lui. Visiblement, personne n'aurait pu imaginer que Frank Jaeger ait pu survivre au bombardement Gindran. Bien sûr, on n'avait pas retrouvé de corps, ce qui ne signifiait pas pour autant qu'il ait pu échapper à la terrible explosion qui les avait touchés, lui et le docteur Madnar, sur la berge de la rivière. Fox était officiellement porté disparu, depuis quatre ans, et n'avait plus donné aucun signe de vie jusqu'à aujourd'hui. Et il avait l'air en pleine forme... Campbell avait alors conseillé à Snake de se méfier de Fox, de le considérer, dorénavant, comme un ennemi. Inutile aussi de ressasser le passé ni d'essayer de comprendre ce qui lui était arrivé et pourquoi il se trouvait à Zanzibar. Focalises-toi sur ta mission, avait ajouté le colonel. Ne te laisses pas distraire. Marv, l'OILIX et la menace nucléaire sont ta priorité. Le trajet dura une quinzaine de minutes au cours desquelles Snake fut plus ou moins balloté dans tous les sens, à cause des irrégularité du chemin de terre, et dut prendre garde de ne pas se faire écraser par la cargaison, qui glissait sur le plancher, dans les virages serrés. Le camion s'arrêta brusquement. Snake entendit des voix qui discutaient à l'extérieur puis le convoi redémarra. Sans doute un poste de garde. L'agent secret jeta un œil, par le peu d'ouverture procuré par la bâche qui battait au vent, et aperçut des hommes armés qui faisaient glisser sur un rail un portail en fer pour refermer l'accès à la zone. Un A majuscule était imprimé sur la paroi de la guérite dans laquelle ces derniers s'engouffrèrent, ensuite. Quelques instants plus tard, la lumière extérieure se dissipa remplacée par l'obscurité d'un tunnel en 3
béton éclairé par des néons, puis le camion s'arrêta et le moteur fut coupé. Les mercenaires descendirent des véhicules et échangèrent quelques mots. Snake se saisit de son pistolet et mit tous ses muscles en éveil. C'était là que tout allait se jouer. Maintenant qu'il avait réussi à s'infiltrer dans le Bâtiment A, il allait falloir sortir du camion, sans être détecté, puis commencer à explorer les environs et tâcher de trouver le scientifique tchèque. Snake se mit à plat-ventre sur la caisse de C4 et entrebâilla légèrement la bâche. De là où il était, l'agent de Fox-Hound pouvait voir deux autres camions et une jeep. Les mercenaires du convoi s'étaient tous rassemblés autour d'un homme qui leur donnait des instructions. Ils étaient trop loin pour que Snake n'entende quoi que ce soit. Et suffisamment loin pour lui permettre de descendre du véhicule sans être remarqué. Solid Snake grimpa sur la caisse d'explosifs, passa la tête à l'extérieur, pour s'assurer que la voie était libre, puis se jeta silencieusement dehors. Il constata qu'il se trouvait dans un immense hangar où étaient garés bon nombre de véhicules et où étaient entreposés des caisses et des containers récemment déchargés. Rapidement, Snake contourna le camion pour se mettre à l'abri des regard des mercenaires, toujours en plein conciliabule, à une trentaine de mètres de là. Il s'accroupit un instant à l'avant, son arme à la main, puis balaya du regard le hangar, à la recherche d'un moyen de sortir de là. Rien en vue. Il allait falloir bouger. Et un coup d’œil vers le groupe de mercenaire, qui revenait vers les véhicules, lui indiqua qu'il allait falloir bouger très vite. Sans hésiter, l'agent secret se lança à découvert vers le camion le plus proche, jeta un œil sous le châssis pour localiser la position des ennemis en approche, puis fonça se mettre à couvert derrière un tank Goliath, stationné tout près. Les mercenaires commencèrent à ouvrir les remorques de leurs camions. Un bruit de moteur électrique attira son attention. Un chariot élévateur surgit de nulle part, roulant en direction des véhicules à décharger. Snake se glissa brusquement sous le char d'assaut pour éviter d'être repéré par le conducteur de l'engin de manutention. Les caisses métalliques contenant les ogives finirent par être déchargées avec précaution, puis le chariot-élévateur disparut dans le hangar avec son dangereux chargement. Quelques minutes plus tard, les camions étaient vides. Les mercenaires échangèrent quelques mots avec les soldats qui patrouillaient dans le hangar, puis remontèrent à bord de leurs véhicules et les dirigèrent vers la sortie. Snake attendit encore quelques minutes, avant de sortir de sous sa cachette. Il remarqua aussitôt un garde armé, qui naviguait entre des transports blindés. L'homme ne le remarqua pas et s'éloigna bientôt de sa position. Snake entreprit d'explorer le hangar pour en trouver la sortie. Il se faufila parmi les véhicules militaires et les caisses de matériel, se laissant plus ou moins guider par les lignes de couleur tracées sur le béton. Ces indications visuelles devaient bien mener quelque part, pensa-t-il. Il ne lui resta bientôt plus qu'une vingtaine de mètres à parcourir, avant d'atteindre l'extrémité du hangar. Du mouvement attira son attention et il se mit aussitôt à couvert derrière une jeep. Trois hommes s'affairaient près d'un local. Une caisse à ogives était posée devant l'entrée de la pièce. L'un des hommes, qui était accroupit près du conteneur, se releva. Ces cheveux platine, cette posture. Snake se raidit brusquement. C'était Gray Fox, en personne. Les deux autres mercenaires achevèrent de serrer les sangles maintenant en place la caisse sur un chariot, puis écoutèrent les indications que leur donna l'ancien agent de Fox-Hound : ― Déposez ces ogives au laboratoire du 3ème étage, commença Fox. Dites à Black que le docteur doit s'en occuper tout de suite. ― Maintenant ? S'étonna l'un des mercenaires. Je croyais qu'on devait attendre encore un peu, avant d'effectuer un lancement. ― Je vous rappelle qu'on a un intrus dans la base, dit Fox. Par conséquent nos plans sont bouleversés et nous devons en accélérer le déroulement. Restez en alerte et repérez tout comportement 4
suspect. Notre homme est sans doute déjà ici. Si vous avez besoin de moi, je serais au Bâtiment B avec Saladin, pour régler les derniers détails. (il indiqua du pouce la jeep stationnée contre le mur et à bord de laquelle attendait un passager.) J'emmène Owl avec moi, parce qu'elle ne peut pas conduire. Les deux hommes hochèrent la tête en signe de compréhension. Fox leur répondit par un sourire sincère, leur donna une tape amicale sur l'épaule puis grimpa dans la jeep. Il mit le contact, enclencha une vitesse, puis fit faire demi-tour au véhicule. Snake s'accroupit encore davantage derrière sa couverture, plus tendu que jamais, alors que la jeep venait dans sa direction. Le véhicule arriva devant sa cachette, passa à faible allure en faisant couiner ses pneus sur le sol. La passagère tourna violemment la tête dans sa direction. Et le vit. Snake pointa aussitôt son pistolet sur le véhicule, mais la jeep continua sa route sans ralentir et s'éloigna. Leurs regards s'étaient croisés, il en était sûr. Pourtant, la femme n'avait pas alerté Fox de sa présence. Comme si... elle avait senti sa présence mais ne l'avait pas vraiment vu. Snake laissa partir les mercenaires en charge des ogives puis sortit de son couvert et se dirigea vers le local. La porte était munie d'une serrure électronique et avait l'air blindée. Si le local contenait d'autres équipements nucléaires, il y avait fort à parier que les murs soient doublés de plomb sensés absorber les rayons et limiter les dangers d'exposition du personnel de la base. Impossible du coup de pénétrer à l'intérieur de la pièce pour tenter de dénombrer l'ampleur de l'arsenal nucléaire d'Outer Heaven. Rien ne garantissait non plus qu'il n'y ait pas d'autres lieux de stockage de ce type, ailleurs à Zanzibar. L'agent de Fox-Hound entreprit alors de suivre le container que les mercenaires devaient livrer au docteur. Passant de couvert en couvert, il suivit les deux hommes, en respectant une distance de sécurité lui assurant de ne pas se faire remarquer. Les mercenaires arrivèrent bientôt devant un ascenseur. Ils grimpèrent dans la cabine, après y avoir poussé leur chariot, puis les portes coulissèrent silencieusement. Restant à bonne distance, Snake vit défiler le compteur d'étage de 0 à 3, puis s'arrêter. Il attendit quelques minutes, afin de laisser s'éloigner une sentinelle qui patrouillait non loin, puis s'élança vers l'ascenseur qu'il appela en pressant le bouton, fiché dans la paroi. Son arme à la main, il attendit que les portes s'ouvrent, prêt à se débarrasser de quiconque aurait décidé d'emprunter l'ascenseur à ce moment-là. Fort heureusement, il n'y avait personne. Snake se glissa dans la cabine et sélectionna le troisième étage sur le panneau de contrôle. Les portes s'ouvrirent sur un couloir désert aux murs blancs, qui partait dans l'axe de l'ascenseur. L'agent secret jeta un rapide coup d’œil dans le couloir perpendiculaire à l'autre, puis prit pied sur le sol carrelé. Maintenant qu'il était au bon étage, encore lui fallait-il trouver laquelle des nombreuses portes s'ouvrait sur le laboratoire dans lequel il espérait trouver Marv. Prudemment, Snake s'avança dans le couloir. Son oreillette émit un bip discret. Il attendit un instant puis le son se répéta. Continuant sa progression, il remarqua que la fréquence du signal s'accélérait. Rapidement, il attrapa son récepteur GPS et remarqua aussitôt le point clignotant au bord de l'écran. L'émetteur implanté dans la dent du scientifique tchèque. S'orientant à l'aide de son appareil de localisation, Snake traversa le couloir, puis tourna à droite à une intersection, alors que le bip se faisait de plus en plus insistant dans son oreillette, à mesure qu'il se rapprochait de son objectif. Une porte s'ouvrit à l'autre bout du couloir. Snake fit aussitôt volte-face et retourna à l'intersection pour se dissimuler au coin du mur. Juste à temps. Un mercenaire sortit à reculons, en tirant le chariot vide derrière lui, suivi par celui qui l'accompagnait. Les deux soldats d'Outer Heaven marchèrent dans sa direction en échangeant quelques mots. Snake se dissimula dans un renfoncement, près d'un distributeur de boissons, pour les laisser passer. Ils tournèrent bientôt au coin du mur, puis partirent en direction de l'ascenseur. Snake sortit de sa cachette, s'assura que la voie était libre, puis s'engagea dans le passage menant à la porte par laquelle étaient sortis les ennemis. Le bip-bip étant presque continu dans son oreillette, il 5
éteignit l'appareil. Il posa la main gauche sur la poignée, leva son arme de l'autre puis ouvrit brusquement. Il débarqua dans une pièce en L qui s'orientait sur la droite. C'était bien un laboratoire, comme en témoignaient les nombreux équipements et matériels disséminés sur les tables. Snake referma la porte et avança prudemment dans la première partie de la pièce. Il remarqua que les tables contenaient beaucoup d'électronique avec des appareils de mesure, des composants, des cartes et ce qui s'apparentait à... une main. Cinq doigts, une paume et un avant-bras, constitués d'assemblages de fils et de métal, reliés à des ordinateurs. L'agent secret était fasciné par ce membre cybernétique mais éprouvait également un étrange malaise, en se demandant ce qu'Outer Heaven envisageait de faire avec cette technologie. Un tintement métallique le fit pivoter vers l'extrémité de la pièce. Il n'était pas seul. Lentement il se dirigea vers le coin du mur, jeta un œil à l'angle et remarqua aussitôt l'homme qui travaillait sur un établi, au fond de la pièce. Il portait une blouse blanche de laborantin et lui tournait le dos. Le scientifique semblait ne pas avoir remarqué sa présence, puisqu'il continuait sa tâche, comme si de rien n'était. Snake rengaina son pistolet et s'approcha du chercheur. ― Dr Marv ? Demanda-t-il. L'autre se figea quelques secondes et interrompit ses activités. Il ne répondit pas, ne se retourna pas, mais recommença très vite à bricoler. Snake arriva dans le dos du scientifique et lui posa une main sur l'épaule, pour lui signaler sa présence. ― Dr Marv ? Répéta-t-il. Avec une vitesse ahurissante, l'homme donna une tape sur l'avant-bras de Snake pour le repousser, puis il pivota brusquement et lui expédia un violent coup de pied qui fit littéralement décoller l'agent secret. Snake traversa la pièce et s'écrasa sur une table, renversant par terre tout son contenu. Le souffle coupé par la puissance de l'attaque, il lui fallut quelques secondes pour reprendre ses esprit et tenter de se redresser. Le scientifique lui faisait face, maintenant, mais ça n'était pas Marv. D'ailleurs l'homme en blouse n'avait pas vraiment l'air d'être... un homme. Il portait un étrange casque qui lui recouvrait entièrement la tête et empêchait de voir son visage. Lentement il retira sa blouse dévoilant une sorte d'armure noire en métal. On aurait dit qu'il sortait tout droit d'un film de science-fiction. Le cyborg leva son bras gauche au niveau de son visage. Il lui manquait tout l'avant-bras. Avec des gestes sûrs et précis, l'homme attrapa la main cybernétique sur laquelle il était en train de travailler, la positionna sur son moignon robotique et la fit pivoter. Un cliquetis résonna dans la pièce. Et les doigts en métal de la main, tout juste greffée, s'animèrent. ― Je t'attendais Fox-Hounder, lança le cyborg d'une voix électronique. Je ne suis pas le docteur Marv. Mais ça n'est pas lui que tu cherchais, pas vrai ? Le cyborg lui lança quelque chose. Une molaire couverte de sang séché tomba sur la table, près de lui. L'émetteur de Marv... ― Trop prévisible, reprit l'autre. Je m'attendais à plus... technologique de la part de la meilleure unité du monde. On m'a prévenu de ton arrivée, Solid Snake. Celui-ci se remit sur pied et afficha un visage surpris. ― Comment tu connais mon nom ? ― On m'appelle Black Puma. Je suis membre d'Outer Heaven. (le cyborg pointa son index sur Snake.) Fais-moi voir ce que tu vaut, Fox-Hounder. Une légère détonation claqua dans l'air, alors que le cyborg pliait son poignet. Instinctivement, Snake se jeta de côté pour éviter le projectile et se dissimula derrière une table. Un nouveau tir passa tout prêt de lui et l'agent secret découvrit de quel type de projectile il s'agissait, alors que l'un d'eux se fichait dans un casier : Ça n'était pas une balle, mais une lame d'acier effilée d'une dizaine de centimètres de long. 6
Apparemment, ce Black Puma projetait de l’agrafer, littéralement, au mur. Le cyborg apparut dans l'axe de la rangée de table, se tourna vers lui, tendit le bras et fit feu. Snake roula jusqu'à la rangée suivante, au moment où les lames se plantaient en rafale sur le sol. L'agent secret dégaina son M9, se releva brusquement, ouvrit le feu sur le cyborg. Les balles ripèrent sur l'armure du mercenaire qui broncha à peine sous l'impact des tirs. Tout en faisant feu, Snake traversa la pièce en courant, zigzagua entre les tables. Les lames de Black griffaient l'air sur son passage, sans le toucher. Snake renversa une table chargée de matériel électronique pour s'en servir de couverture puis éjecta le magasin vide de son pistolet pour le remplacer. Lorsqu'il jeta un œil par-dessus son couvert, il tomba nez-à-nez avec le cyborg qui le toisait de toute sa hauteur. Snake n'eut pas le temps de réagir. Black lui expédia un violent uppercut qui l'envoya s'écraser dans la rangée de table suivante. Le coup avait été violent mais, apparemment, sa mâchoire n'était brisée. Il s'en était sûrement fallu de peu. L'armure du mercenaire lui donnait visiblement une force surhumaine. Snake ne tiendrait pas longtemps, s'il continuait à encaisser les coups de la sorte. Black tomba de nulle part juste devant lui. D'un coup de pied, il désarma l'agent de Fox-Hound qui dut rouler sur le côté pour esquiver l'attaque suivante. Snake se releva et fonça vers l'autre extrémité du laboratoire. Le cyborg se lança à sa poursuite, comme l'indiquait le bruit sourd et rapide de ses pas. Sans arme, il allait falloir trouver une solution pour en venir à bout et très vite. L'agent secret avisa un extincteur fixé près de la porte. Il s'en empara, retira la goupille, dirigea le tuyau vers le mercenaire qui arrivait sur lui et actionna la poignée. Un nuage de dioxyde de carbone emplit rapidement l'air. Snake se déplaça tout en continuant de pulvériser son écran de fumée dans son sillage. Impossible de déterminer où se trouvait le cyborg, ni si ce stratagème fonctionnait. Snake essayait surtout de gagner du temps. Il finit par trouver ce qu'il cherchait entre deux tables : son M9 qu'il s'empressa de remettre en place dans son holster. Restant à cet endroit, il continua d'utiliser l'extincteur en tournant sur place, pour embrumer le plus de surface possible. L'appareil crachota puis cessa de faire son effet. Il était vide. La silhouette de Black se découpa dans le brouillard. Sa vue semblait être altérée par le dioxyde de carbone mais le mercenaire se rapprochait inexorablement de lui en renversant les tables et casiers qui se trouvaient sur son chemin. Snake prit le réservoir vide à deux mains et se précipita à la rencontre de son ennemi Sans lui laisser le temps de réagir, il lui expédia un violent coup dans l'estomac puis enchaina sur un autre dans le casque. Cela n'avait pas l'air de l'affecter, mais le coup sur la tête avait quand même l'air de le désorienter un peu. Snake en profita pour faire le tour du mercenaire et passer dans son dos, pour le frapper de toutes ses forces avec l'extincteur. Black plia légèrement les genoux pour encaisser le choc. L'agent secret se débarrassa de son arme de fortune, fouilla dans ses poches et planta un bloc de C4 entre les omoplates du cyborg. Ce dernier, ayant retrouvé sa contenance, pivota brusquement et envoya bouler Snake d'un revers. Sonné par l'impact, l'agent secret reprit connaissance, à plusieurs rangées de là. Il se saisit de son pistolet. Le brouillard se dissipait et le cyborg pointait son poignet vers lui tout en courant dans sa direction. Snake chargea Black. Les lames sifflèrent à ses oreilles, alors qu'il dansait d'un pied sur l'autre pour les éviter. Une violente douleur dans le flanc le fit grimacer à peine une seconde avant l'impact. Lui et le cyborg basculèrent par terre et roulèrent parmi les débris du laboratoire saccagé. Snake se releva avec difficulté, ne sachant plus trop où il se trouvait. Une vive douleur lui vrillait le côté. Il baissa les yeux et remarqua qu'une lame était plantée dans son uniforme au niveau de la taille. Un mince filet de sang s'écoulait de la blessure. Merde... Il y eut du mouvement, à moins de cinq mètres de là. Black se releva en titubant. ― Pas mal, Snake, lança-t-il de sa voix électronique On dit vrai te concernant : tu es courageux et 7
plein de ressources. Le cyborg, encore étourdis, le cherchait du regard, à travers le peu de brouillard restant. Au moment où l'ennemi lui tourna le dos, Snake renversa la table toute proche, se dissimula derrière, pointa son pistolet sur sa cible et fit feu. Une violente détonation secoua l'ensemble du laboratoire. Le souffle de l'explosion repoussa Snake et la table qui lui faisait office de couverture mais, par miracle, il ne fut pas blessé. L'agent de Fox-Hound se releva avec difficulté en prenant appui sur un fauteuil à roulette. Lentement il s'approcha du centre de l'explosion en se tenant le côté. Le plafond était partiellement éventré mais le sol était resté miraculeusement intact. S'il avait choisit de prendre des explosifs plus gros, l'étage se serait sans doute écroulé. Le système d'extinction d'incendie se déclencha et commença à arroser le laboratoire. Black était allongé sur le ventre, immobile. Le dos de son armure cybernétique était déchiqueté et laissait entrevoir des circuits électroniques fumant ainsi que... de la chair humaine carbonisée et ensanglantée. Il y avait donc bien un être humain dans cette combinaison, pensa-t-il songeur. ― Bon Dieu, qu'est-ce qu'il s'est passé, ici ? S'écria une voix dans son dos. Snake fit volte-face en titubant. Un type en combinaison étanche l'observait sur le pas de la porte du fond. Il secoua la tête, leva les bras au ciel puis s'approcha en pataugeant dans les débris. ― Bon Dieu, reprit-il. Je suis en train de manipuler des ogives nucléaires dans le caisson ! Qu'est-ce qui vous a pris de provoquer une explosion ? Vous êtes dingue ou quoi ? L'homme arriva au niveau de Snake et découvrit le corps du cyborg. Son regard passa, à plusieurs reprises, de l'agent secret au mercenaire mis hors de combat. Il balaya la pièce du regard, semblant analyser la situation puis alla actionner la commande du système incendie pour l'arrêter. ― Seigneur, qu'est-ce qu'il se passe, lança-t-il en russe. Il porta les mains à son casque et le retira, au moment où il faisait face à Snake, qui observait avec étonnement cet homme sorti de nulle part et qui avait l'air complétement perdu. Tous deux se figèrent. Le crâne dégarni, ce visage triste avec cette petite moustache grise... ― Dr. Madnar ? Fit Snake. ― J'ai l'impression de vous connaître, répondit le scientifique en plissant des yeux. ― Nous nous sommes rencontrés au Gindra, expliqua Snake en grimaçant un sourire marqué par la douleur. ― Snake ? (ce dernier acquiesça.) Bon sang, mais vous êtes blessé mon garçon ! Asseyez-vous sur ce fauteuil. Il jeta son casque par terre, se précipita vers des casiers renversés et revint auprès de Snake, munit d'une trousse de premier secours. Alors que Madnar s'occupait de sa blessure, l'agent secret commença à poser les questions qui lui brulaient les lèvres : ― Je vous croyais mort, commença-t-il. ― Oui, beaucoup sont dans votre cas. Ça n'était pas le but, mais ça n'est pas si mal, finalement. Attention, ça va sans doute faire mal : il faut que je vous retire cette lame. Snake grimaça au moment où Madnar s’exécutait et venait placer une compresse sur la plaie. L'agent secret repoussa le scientifique d'un geste et releva le haut de son uniforme pour lui permettre de soigner la blessure. ― C'est quoi ce... truc ? Demanda Snake en montrant le corps de Black. ― N'ayons pas peur des mots. Les cyborgs ne sont plus de la science-fiction, vous savez. Je suis ingénieur en robotique et les membres cybernétiques, qui sont en plein essor, pourraient bien être une alternative aux greffes de membres, dans l'avenir. Black Puma a bénéficié du projet Snatcher sur lequel j'étais en train de travailler. L’exosquelette qu'il porte le maintient en vie et multiplie sa force et sa vitesse. ― Il est aussi équipé de gadgets. ― Oui, le lanceur de lame dans son poignet. Redressez-vous un peu, que j'applique ce bandage 8
autour de votre taille. Voilà, très bien. Soyez rassuré, la blessure n'est pas si grave. Le projectile n'a rien touché de vital. Vous survivrez. Madnar acheva de bander Snake puis rangea le matériel dans la trousse de premier secours pendant que Snake se rhabillait. ― Qu'est-ce que vous faites à Zanzibar, Snake ? ― Je suis en mission. Je dois retrouver la formule d'une algue génétiquement modifiée et accessoirement empêcher une guerre nucléaire. La routine pour moi, plaisanta-t-il. Madnar écarquilla des yeux en entendant la réponse. ― Vous êtes venu pour Marv ? ― Vous le connaissez ? ― C'est un vieil ami. Il est détenu, ici, à Zanzibar. Les mercenaires ont besoin de l'OILIX qu'il a créé, afin d'effectuer un lancement nucléaire. J'étais justement en train de préparer les ogives qu'on m'a apporté pour les adapter à ce nouveau carburant. ― Vraiment ? Alors Outer Heaven dispose d'équipement pour effectuer un tir ? ― Évidement ! S'écria Madnar. Pourquoi croyez-vous que je sois là, à travailler de force sur un projet que je ne veut pas voir aboutir ? Ce que Snake pressentait était donc avéré et justifiait la présence surprenante du scientifique russe à Zanzibar. Il connaissait déjà la réponse à la question suivante : ― Vous êtes là pour la mise au point d'un Metal Gear ? Demanda-t-il. ― J'en ai bien peur, oui. L'assemblage et les tests préliminaires sont terminés, depuis deux semaines, déjà. Metal Gear D est fonctionnel. Le silence pesant qui suivit fut interrompu par la mise en marche de l'alerte générale.
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