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Sommaire 1) Éditorial…………………… p4-‐5 2) L’humanité et le tatouage……………… p6-‐10 3) Les raisons pour lesquelles les individus se faisaient tatoués dans les sociétés traditionnelles……………. p10-‐12 4) Le tatouage en Polynésie………. p13-‐16 5) Le tatouage berbère-‐-‐-‐-‐-‐-‐-‐-‐-‐ p17-‐20 6)Le tatouage en Amérique du Nord………. P21-‐24 7) L’Irezumi ou le tatouage japonais : exemple des Yakusas………… p25-‐27 8) Le renouveau du tatouage……… p29-‐32 9) Pourquoi « Tattoo » tatouage ?...............p33-‐37 10) Vision qu’on porte sur les tatouages de nos jours…… p38-‐41 11) Mot de fin…………. P42 12) Bibliographie…………… p43
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ÉDITORIAL
D’OÙ ME VIENT MON INTÉRÊT ? Pendant le mois de décembre
d’avantage aux tatouages. Mon
2015 j’ai commencé à sortir
intérêt a encore grandit pour le
avec un gars tatoué; il s’était
tatouage. Quand je l’ai présenté
fait les deux bras, le cou, tout le
à mes sœurs et mes amis, tout
ventre et un petit tatouage
de suite, ils ont paniqué et ont
proche de l’œil. Je trouvais que
eu des jugements négatifs à
ça avait un charme et que
son égard à cause de son
c’était sexy. J’ai alors
apparence. J’ai donc été
commencé à a me demander
intriguée par ces jugements qui
pourquoi il s’était fait tatouer et
étaient plus souvent basés sur
au fait que pour chaque
le fait qu’il soit tatoué. J’ai donc
tatouage, il avait une petite
eu l’idée de faire des petites
signification. Dès lors, j’ai
recherches concernant les
commencé à m’intéresser
tatouages et j’ai appris un peu
plus sur le tatouage et le
utilisé la méthode de la
marquage corporel et j’ai aussi
scarification. Je me retrouve
apprit que c’est une technique
alors avec un marquage
qui remonte depuis les temps
corporel qui me rappelle un
anciens et a été pratiqué
événement douloureux de ma
principalement pour des
vie. Ces découvertes que j’ai
raisons prophylactiques et des
faite sur le tatouage m’ont
rites traditionnels et
permis de réaliser que le
initiatiques. De plus, avec ces
tatouage a un sens encore plus
découvertes, je me suis
profond que le seul fait qu’il
reconnu dans cette pratique. En
soit sexy et beau. De ce fait j’ai
fait quand j’étais enfant, j’ai été
décidé de présenter au grand
malade et ma mère m’a
public que le tatouage et la
procurée des soins
vision qu’on porte sur celui-‐ci a
traditionnels et le guérisseur a
connue une évolution. CHRISTELLE NDONGO.B
6
ÖTZI, L’HOMME DE SIMILAUN
Depuis les temps anciens et
nous pouvons le constater, les
ceux dans plusieurs sociétés du
hommes ont éprouvés à un
monde, les hommes ont portés
moment ou à un autre le besoin
un intérêt sur le marquage
de marquer leur corps de
corporel (peinture corporel,
manière indélébile. Aussi, tout
scarification, tatouage). Mais
autour du monde, il existe une
d’où vient le mot « tatouage » ?
grande similitude entre les
Le mot « tatouage » vient du
différents usages du tatouage.
tahitien « tatou » qui signifie
Au cours des millénaires,
dessin. On pourrait aussi être
qu’elles soient peintes ou
tenté de se demander d’où le
tatouées, les marques de
tatouage a prit ces racines dans
sacrifices, symboles de force et
le monde. En effet, il est
de courage, sont devenues
aujourd’hui impossible de
rituelles et sont faites
déterminer avec exactitude ce
volontairement lors des
qui l’a fait naître. Mais comme
cérémonies initiatiques.
8
Le tatouage est une technique qui se pratique depuis 3000ans avant notre ère. Certains auteurs, spécialistes du tatouage, font néanmoins remonter les débuts de cette pratique à la période Aurignacienne (30,000 ans avant Jésus-‐ Christ) se fondant sur la découverte de poinçons, d’aiguilles à tatouer en bois de renne ou même de silex à pointes aigues dans certains sites préhistorique. Bien qu’on ne peu pas dire avec exactitude les origines du marquage corporel, on a pu retracer à peu près la durée de cette pratique. En effet, l’un des plus anciens exemples dont nous ayons retrouvé la trace est celui d’Ötzi, un chasseur ayant vécu entre 3350 et 3100 avant Jésus-‐Christ, son corps conservé dans la glace vêtu et armé. Surnommé « Hibernatus », (cadavre âgé de 5300 ans découvert avec des tatouages) cet homme porte plusieurs marques tatoués
Destinées, semble-‐t-‐il, à soulager des affections articulaires ; et les
Alpes de l’Otztal dont il tire son
radiographies montrent que le
nom). Le corps d’Ötzi présente
chasseur souffrait d’arthrose à
une soixantaine de tatouages
certains endroits du corps. Bien
sous forme de croix et de traits.
qu’il soit difficile d’établir avec
Une théorie veut
certitude un lien
que neuf d’entre
entre les tatouages
eux
d’Ötzi et d’éventuels
correspondent à
soucis de santé, ceux-‐
des points
ci avaient probablement une
d’acuponcture, et que ces
fonction thérapeutique. En
tatouages aient été réalisés
outre, le corps d’Ötzi ayant été
dans un but thérapeutique.
découvert à la frontière de l’Autriche et de l’Italie (dans les
10
NB : Au-‐delà des traces relevées sur le corps d’Ötzi, l’hibernatus autrichien vieux de 5300 ans, les racines de la pratique se perdent dans les glaces éternelles.
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Les sociétés traditionnelles : les raisons pour lesquelles ils se faisaient tatouer et comment étaient perçus la pratique du tatouage
Tout au long de l’histoire les
tatouage. Aussi, le tatouage
sociétés dites primitives ont
était un moyen d’identification,
présentés un fort intérêt pour
permettait de souligner la
le marquage corporel et sa
beauté des femmes et le
pratique est vieille de plusieurs
courage des hommes. Plusieurs
millénaires. On en retrouve des
raisons poussaient les
traces tout autour du monde.
individus de ces sociétés
Ils prêtaient pour la plupart de
primitives à se marquer le
ces sociétés des vertus
corps.
thérapeutiques et magiques au
14
Les raisons
douze ans, les jeunes Polynésiens recevaient leur premier tatouage
Le tatouage en Polynésie est une pratique encrée dans la culture. Se faire tatouer était quelque chose de normale et très présente dans cette société et de nombreuses légendes expliquent la naissance du tatouage ou encore son utilité. En effet, en se tatouant, l’individu démontrait qu’il vient soit de la classe artisanale ou était un noble. Dès lors, le tatouage permettait d’indiquer le statut social des individus. Il servait aussi d’élément des rites de passage. En se tatouant, les individus devaient prouver qu’ils avaient franchi une nouvelle étape dans leur vie. Par exemple, à l’âge de
marquant leur passage à l’âge adulte. Le tatouage permettait aussi aux individus de s’intégrer socialement. Les filles par exemple se faisaient tatouer la main et c’est uniquement après s’être fait tatoué qu’elles étaient autorisées à participer à la préparation des repas ou à l’onction des morts. Et pour les garçons, leurs tatouages se poursuivaient tout au long de leur vie. En se faisant tatouer, ils affirmaient leur identité et affichaient leurs exploits aux yeux de la population. Le tatouage se pratiquait aussi pour faire preuve de courage et de bravoure. De ce fait, les chefs et les guerriers étaient abondamment marqués exprimant leur pouvoir
Figure 2 Tatouage de passage à l »âge adulte
Figure 1 photo d'un guerrier Samoan
Dans les Iles Hawaï par exemple, le
hommes et les femmes. À Samoa par
tatouage se nomme Kakau et il possède
exemple, ils sont alors des soga’initi qui
une forte signification magique en même
sont les personnes tatouées en opposition
temps que protectrice et sa pratique obéit
aux non tatouées les Pulâu. Les non-‐
à des règles strictes. Les motifs très
tatoués ont donc de la difficulté à trouver
reconnaissables, sont composés
une épouse et il se dit aussi que le
principalement, de lignes faites de petits
royaume des morts est interdit au Pulâu
triangles et de carrés noirs tracées le long
et sont condamnés à errer sur l’île Fidji.
des jambes.
Les hommes tatoués en Nouvelle-‐Zélande faisaient le rêve des jeunes femmes, car pour se marier, elles favorisaient spécialement les prétendants aux visages bien tatoués et méprisaient les hommes à la face lisse, car les hommes
La vision Vue que la pratique du tatouage est encrée dans la culture des polynésiens, il était donc très important d’être recouvert de marques corporelles. Se faire tatouer dans la société polynésienne constituait dès lors un enjeu très important pour les
avec beaucoup de tatouages étaient considérer comme étant courageux. Chez les Tong, où la majorité des hommes étaient tatoués, l’absence de tatouage était considérée comme indécente pour la population. Bref, en Polynésie les personnes qui ne possédaient pas de tatouage ou très peu de tatouages étaient méprisées par tous, tandis que ceux qui en
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portaient plusieurs bénéficiaient d’un
grand prestige.
POLYNÉSIE ET LE MONDE EXTÉRIEUR : l’arrivé des occidentaux Le tatouage polynésien tombe en disgrâce. Les missionnaires qui iront en Polynésie vont voir la pratique du tatouage dans cette région comme étant des vestiges de paganisme, et vont lutter contre ça en faisant pression sur les chefs Tahitiens. Dès lors les chefs eux mêmes vont abolir une partie de leur culture à travers le code Pomare signé à Tahiti entre les pères Blancs et le chef Pomare II au début du XIXe siècle « cette pratique appartient aux anciennes et mauvaises habitudes. L’homme et la femme qui se feront graver de tatouage, si la chose est manifeste, seront jugés et punis.» Aussi, les missionnaires qui combattaient la nudité, sont liés indirectement aux causes qui vont pousser la population polynésienne à abandonner progressivement la pratique du tatouage, car en s’habillant son corps qui autre fois était nu, on privait le tatouage de son rôle social et identitaire
18
L
es raisons
Comme la Polynésie la société Berbère
faisaient tatouer un motif qui protègera
pratiquait aussi le tatouage. Et à l’origine,
son couple des influences néfastes à
le tatouage avait pour cette société une
l’occasion de leur mariage. Il y a un style
marque magique et talismanique ayant
de tatouage qui s’étend verticalement de
évoluée vers une fonction prophylactique.
la lèvre inférieure au menton ; il est
Nous pouvons constater que dès la petite
appelé « siyyala ». Elle semble destinée à
enfance, les mères pratiquaient la
protéger l’orifice naturel de la bouche
« Ayyasa » qui était une sorte de
contre les influences nocives qui peuvent
vaccination magique destinée à éloigner la
le franchir et pénétrer ainsi dans
maladie (lors des premières années de
l’organisme. Le tatouage berbère a aussi
vie) et la mort. Elle est constituée soit des
un rôle esthétique, car ses marques
simples signes tracés au henné, soit de
étaient envisagées comme des ornements
scarifications ou encore de tatouages
embellissant les traits du visage, donnant
rudimentaires consécutifs à la coloration
davantage d’intensité au regard ou
de ses scarifications. Il permettait aussi de
affinant le menton. Bref, les « siyyala » qui
protéger le couple contre les influences
protègent les Berbères du mauvais œil on
néfastes. Par exemple, les jeunes filles se
une fonction préventive contre les
maladies. Et quand par malheur, cette
le plus fréquemment les membres et les
dernière s’est déclarée, le tatouage
régions articulaires que le tatouage soigne
devient thérapeutique. Et c’est alors la
sous la forme, la plus part du temps, de
localisation de la douleur qui détermine
lignes entrecroisées ou non et de points
son emplacement sur le front pour les
formant des bracelets autour de la région
névralgies ; dans l’angle externe des yeux
atteinte. En outre, le tatouage berbère
contre les affection de la vue … Mais c’est
revête un rôle érotique.
L
a vision
Le tatouage berbère, non seulement de
la vie : d’abord celle de la puberté, puis
porter des fonctions curatives, le signe de
celle de son mariage. À l’occasion du
la « siyyala » symbolise non seulement la
mariage, le tatouage est perçu comme un
femme, mais aussi la féminité. En fait, les
atout, un cadeau que fait la fiancée à son
tatouages tracés sur le front, les joues ou
futur époux, et lorsqu’un mariage est
le menton, sont parfois complétés et
décidé, la famille de la fille fait venir une
enjolivés plus tard, uniquement chez la
tatoueuse. Alors, le tatouage berbère était
jeune fille, lors des périodes capitales de
fait aux femmes uniquement.
20
I
nterdiction
Avec l’arrivée de la religion
naître en eux des passions. Je leur
musulmane dans la vie des
ordonnerai de couper les oreilles
berbères, la pratique du tatouage à
des animaux et de défigurer la
été interdite. Il se dit que c’est
créature » coran IV/III
serait une interdiction faite par le coran. Il dit « J’attaquerai, dit le tentateur, une partie de tes serviteurs ; je les séduirai, je ferai
«
Encadré Sur le front, le tatouage rapproche les sourcils, les
allonge et donne au regard une intensité singulière. Gravés sur le menton, il l’affine. Dessiné sur la face, il joue le rôle de masque érotique. Lorsqu’il se continue jusqu'à la naissance des seins et du nombril, il laisse soupçonner des voluptés inconnues. Sur les bras, les doigts et les poignets, il donne au geste une légèreté et une délicatesse émouvante. Quand il vient sur la cheville ou à la naissance des cuisses, il donne à ces membres une finesse qui n’aurait pas été remarqué sans lui »
Dr M.Sijelmassi. Les arts traditionnels au Maroc
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Les raisons L’Amérique encore connue sous le nom de
fantômes. Aussi, les tatouages que les
« Nouveau monde » abritait avant
Indiens appellent « griffure » ou
l’arrivée des européens des communautés
« éraflure » ponctuent les étapes par
autochtones. Ces communautés
lesquelles doit passer l’adolescent pour
pratiquaient le marquage corporel. Nous
accéder au stade d’adulte à part entière.
parlerons spécialement de cette pratique
C’est une épreuve qu’il fallait se soumettre
en Amérique du Nord. En effet, le tatouage
pour être accepté dans la communauté ;
y était pratiqué pour plusieurs raisons. Il
elle est souvent accompagnée de
semble que les indiens de diverses régions
l’attribution d’un nouveau nom. C’est donc
utilisaient le tatouage pour ses vertus
une sorte de baptême qui certifie le
curatives. Les Ojibwa, par exemple,
nouvel état-‐civil de l’individu et lui
tatouaient les tempes, le front et les joues
procure un nouveau statut.
de ceux qui souffraient de maux de tête ou
Comme chez tous les peuples primitifs ne
de dents. Le plus souvent, les tatouages
connaissant pas l’écriture, les tatouages
revêtaient des fonctions supposément
permettent d’identifier le groupe, la tribu
magiques. On sait par exemple que les
et la filiation du porteur. Il indique
sioux se faisaient tatouer pour pouvoir
également sa valeur guerrière, puisque
accéder au royaume des morts ; et sans
c’est un trophée de chasse ou des scalps
tatouage, ils se pensaient condamnés à
arrachés à l’ennemi rapportaient selon un
retourner errer sur terre sous la forme de
code préalable, autant de « griffure »
exhibées ensuite avec fierté: c’était donc
un moyen de prouver son courage.
En parlant de marquage corporel, nous entendons aussi parler des peintures corporelles. En effet, la peinture corporelle était utilisée par les guerriers Cherokee, qui combinent les motifs et les couleurs, censés les placer sous la protection des esprits
Dans la tribu des Natchez, le tatouage commençait dès le plus jeune âge par des petites marques faites sur le nez des enfants des deux sexes. Au cours de la vie et à chaque étape importante, de nouveaux motifs comme des serpents, des soleils et des symboles de guerre étaient rajoutés. Les notables et les guerriers les plus courageux pouvaient avoir le corps entièrement tatoué. En 1564, le peintre français Jacques Le Moyne de Morgues ramena d’une expédition en Floride chez les farouches guerriers Timucuas, une série de dessins et de récits où se remarquait la pratique courante de la peinture corporelle et du tatouage, notamment chez les chefs des indiens. Ces
Figure 3 Guerrier Cherokee avec la peinture corporelle
textes ainsi que les gravures qui s’y rapportent semblent indiquer que le tatouage était pour les Tamucuas une marque de statut social et touchait
24
essentiellement les indiens nobles. Dès lors, le tatouage était une étape de passage et c’était un signe de courage et de bravoure. À la vue des autres, une personne entièrement tatouée était plus respectée. Le tatouage permettait aussi à identifier les nobles des non-‐nobles et grâce une à une marque opposée dans le dos des hommes, il permettait de reconnaître de quel prince ils sont des sujets et quel est leur lieu natal.
Figure 4 Guerrier chickasaw
Les Chickasaw effrayaient paraît-‐il leurs
En général, le tatouage et les peintures
ennemis par le nombre de leur tatouages.
corporelles avaient pour but d’intimider
Les motifs, représentant des animaux,
l’ennemi ou servent tout simplement de
désignaient les guerriers et les notables
camouflage.
de la tribu.
26
Au Japon il est important de remarquer que l’historique du tatouage se perd dans la nuit des temps… Bien avant les influences chinoises et coréennes qui donneront au tatouage japonais sa principale iconographie, les habitants de l’archipel nippon devaient se tatouer comme en témoignent de curieuses figures en terre cuite, datée d’au moins mille ans avant Jésus-Christ.
le petit peuple d’Edo autant qu’un symbole de résistance aux classes La pratique du tatouage au Japon comme dans plusieurs endroits du monde est millénaire. Et comme dans de nombreuses sociétés traditionnelles, certaines ethnies attribuaient à leurs tatouages des fonctions magiques et protectrices. À l’origine, l’irezumi était une marque d’identification sociale pour
dirigeantes. Alors des groupes de rebelles se formaient, et pour se distinguer du reste de la population, ils pratiquaient le tatouage. Ainsi l’irezumi devient la marque de fabrique de cette classe sociale et le plus sûr moyen pour elle d’afficher sa différence. Les Bakuto, joueurs professionnels, ancêtres des yakusas, sont aussi de fervent
adeptes de la pratique. Ils adoptent
joueurs eux-‐mêmes pour signifier leur
comme valeurs le courage, la
inutilité sociale et leur statut de perdants-‐
loyauté envers leur clan, mais c’est
nés. Malgré la connotation négative que porte le mot « yakusa », les yakusas ont
aussi un signe de rébellion à l’ordre établi.
Les Yakusas
été parmi les premiers adeptes du tatouage japonais. Dès le début du 18e siècle, leurs ancêtres, les bakuto, des joueurs professionnels l’on adopté comme symbole de virilité.
Le terme « Yakusa » dérive d’une expression qui désignait le plus mauvais score possible au jeu de cartes des fleurs (hanafuda). La règle de ce jeu consiste à donner trois cartes à chaque joueur; le chiffre de leur total donne le compte de la main : le pire est le vingt, dont le total fait zéro. La combinaison perdante: huit, neuf, trois se dit en japonais Ya-‐Ku-‐Sa. Cette expression servait à désigner chez les joueurs professionnels quelque chose d’inutile. Elle s’appliqua plus tard aux
Aujourd’hui l’activité des gangs s’est diversifiée : racket, prostitution, contrôle d’établissements de jeux et des marchés immobiliers… Au total on estime à 90.000 le nombre de yakusas répartis en bandes affiliées à trois syndicats du crime : le Yamaguchi, l’Inagawa et le Sumiyoshi-‐Kai
BON À SAVOIR !
Le tatouage commence à être banni au Japon lors des réformes de Matsudaira (1759-‐1829) en raison de son ouverture à l’étranger: une vague d’occidentalisation balai le Japon donc il ne fallait pas paraître ridicule devant les Américains et les autres Européens. La pratique du tatouage est alors jugée comme étant indigne d’une nation civilisée.
28
Ils ont essayé d’éteindre sa flamme, mais elle a pu se créer un chemin vers la lumière
païenne» dès le 6e siècle. Au Moyen-‐Age,
Tout au long de l’arrivée des Européens
l’occident la proscrit. Alors qu’il est
dans d’autres peuples, ils ont essayé
facteur et témoin d’intégration sociale
d’abolir les cultures qu’ils trouvaient
chez les peuples primitifs, le tatouage
différent d’eux. Nous pouvons remarquer
endosse un rôle contraire dans les
que dans toutes les époques et sous toutes
sociétés modernes. Reprenons l’exemple
les latitudes, le tatouage et le marquage
de la Rome Chrétienne! Dans cette
corporel ont servi de moyen
société, c’était paradoxalement les
d’identification. Après le passage des
nouveaux convertis au christianisme qui
Européens dans d’autres contrées ils ont
se tatouaient, perpétuant une tradition
essayés d’abolir la pratique du marquage
venue des premiers chrétiens. Persécutés
corporel, la christianisation de l’Europe
pendant deux siècles, les martyrs
passa aussi par une tentative de
s’étaient, en effet marqué la peau de
suppression des pratiques païennes
symbole religieux, en signe de ralliement
jugées hérétiques, voire diabolique. Le
et de reconnaissance. Quelques siècles
Lévitique (19 :28) dit ceci: « Vous ne ferez
plus tard, en 787. Le Concile de Calcuth,
point d’incisions dans votre chair pour un
en Angleterre, tente d’unifier
mort, et vous n’imprimerez point de
définitivement l’Europe chrétienne en
caractères sur vous ; je suis l’éternel ». En
condamnant tout reste de pratiques
effet, Dès l’antiquité, Grecs et Romains ne
païennes et en particulier, le marquage
marquent que leurs esclaves, considérant
corporel. Malgré toutes ses interdictions,
le piquage comme barbare. Les chrétiens
la pratique du tatouage n’est pas
eux ils condamnent cette « pratique
abandonnée comme dans l’empire
30
chrétien d’Orient. Dans cette région, la
La deuxième Guerre Mondiale a été une
pratique du tatouage perdure et retrouve
autre tournure pour le monde en général
même, au 11e siècle, une nouvelle vigueur
et le monde des tatoués. En effet, depuis
avec le début des croisades. En 1097 une
cette guerre qui a fait tant de ravages,
loi de l’église assurait aux combattants
l’interdit biblique c’est durci pour de
une sépulture chrétienne à la condition de
nombreux membres de la communauté
porter sur eux le signe de la croix. Les
juive, car le tatouage reste pour beaucoup
autorités religieuses précisent sans
associé à l’holocauste.
toutefois les encourager formellement que les marques faites en l’honneur de Dieu (Jésus-‐Christ) soient admises. Ainsi, l’ambiguïté de ce document démontre l’embarras de l’église face au tatouage
et la ténacité avec laquelle cette coutume a résistée cinq cents ans aux tentatives d’éradication. Après le christianisme, il y a eu la colonisation faite par l’Europe. En effet, la colonisation a fait disparaître une grande partie des pratiques jugées païennes et le tatouage fut la première à être ciblée.
Figure 5 les marques des juifs pendant l'holocauste
Bien après la Guerre, l’identification des criminels a été l’une des grandes préoccupations des services de police. Ces marques se présentaient alors comme un moyen efficace de repérer les prostituées, les criminels et autres marginaux, les excluant davantage de la société.
Jusqu’à la fin du dix-‐neuvième siècle, et ce
marginalisant. Mais il perd aussi, peut-‐
depuis l’Antiquité, le tatouage était
être, une part essentiel de ce qui le
également utilisé comme marque
constitue : il prend le risque de perdre son
corporative à l’usage des ouvriers,
sens. Malgré que le tatouage ne soit plus
artisans et compagnons. Ces tatouages
éradiqué de la sphère sociale, la mauvaise
permettaient de représenter l’activité de
image qu’on porte sur les tatouages et les
l’ouvrier ou de l’artisan. Bref, la
personnes qui les portent est encore
colonisation, la mondialisation de
présente. En effet, aujourd’hui encore, il
l’économie et l’avancée de la science ont
semble que les marques corporelles
entrainé la disparition des sociétés dites
éveillent chez certains quelques
primitives, de leur organisation sociale
soupçons ; ceux-‐ci associant peut-‐être au
tribale, de leurs coutume et tradition ; ils
tatouage les crimes dont ils se
ont supprimé en générale une partie de
présentaient autrefois comme la punition.
l’identité de ces sociétés.
Celui qui choisit de se faire tatouer de
manière visible prend le risque d’être
Avec le temps et l’arrivée de la société
estampillé « voyou » ou « marginal »
contemporaine, nous assistons à un réveil
culturel et identitaire des société qui ce
sont vue privées de leur coutumes ainsi
que l’engouement occidental pour le
« tribal » ont relancé la pratique du
tatouage. Et en se démocratisant, le
tatouage perd son caractère
32
De n
De nos jours, le tatouage est accessible
l’on choisit, ainsi il expose aux jugements
pour tous et devient carrément une mode.
positifs comme négatifs. Dans tout ce
Les jeunes de tout âge son maintenant
projet de vie, le tatoueur a un grand rôle à
exposés à cette pratique, surtout avec les
jouer dans l’image que l’individu veut
« stars » qui sont posées come modèles à
montrer au monde. En effet, c’est à travers
imiter et leurs tatouages étant présentés
les qualités artistiques des tatoueurs et
comme étant des accessoires. Aujourd’hui
grâce au sérieux qu’ils revendiquent que
le tatouage ne porte plus ou presque plus
le tatouage parvient à se forger un certain
son rôle culturel représentant une
type de garantie, une forme d’authenticité.
conscience collective ; il évoque
Alors, le tatouage, comme les autres
maintenant l’expérience personnelle de
disciplines artistiques possède son
tout un chacun. Parce qu’il est personnel,
monde, ses codes, ses valeurs et ses
le sens que l’on donne à chacun de ses
représentants. En effet, plusieurs raisons
tatouages est parfois difficilement
peuvent pousser les individus à vouloir se
perceptible par les autres. En associant sa
tatouer. Le tatouage peut se présenter
marque à un texte un prétexte et un
comme l’affirmation de sa féminité ou sa
contexte, on prend nécessairement le
virilité ou encore rendre le corps plus
risque que ceux-‐ci ne soient pas compris.
beau et personnel. À travers le tatouage
En effet, le tatouage contemporain
on affirme ses goûts, ses valeurs, mais
correspond en partie à une volonté
aussi ses obsessions, ses peurs. Dans
d’attirer le regard, d’affirmer son
certains cas le tatouage peut être utilisé
existence pour soi et pour les autres. Il
pour affirmer un lien entre des personnes.
permet de donner une image de soi que
Le tatouage peut également être motivé
34
par pur esthétisme, se sentir adulte. En
au questions et 1 homme sur 14) ; pour
somme, le tatouage peut signifier
marquer leur histoire personnelle, leurs
« deviens ce que tu es » de Nietzsche :
origine (2filles sur 11 et 1 homme sur
accéder à la vraie liberté en s’acceptant tel
14). Pour des raisons esthétiques (3 filles
que l’on est. Le tatouage ne change pas la
sur 13 et 2 hommes pour un total de 14
personne qui le porte : il n’est que la
hommes) ; à cause de l’influence des
preuve d’un passage, la preuve d’un
autres ou être cool (un décompte de 1fille
engagement de soi à soi.
et 1 homme), pour un besoin de
Afin de pouvoir mieux observer le
s’identifier (une fille sur 13 et 2 hommes
phénomène dans la société québécoise j’ai
sur 14), pour renaître (1 fille et aucun
fait remplir des sondages pour pouvoir
homme), enfin par un coup de tête (2filles
connaître les raisons pour lesquelles les
sur 13). Nous pouvons donc voir à quel
individus décidaient de se tatouer. Il en
point les raisons pour lesquelles on décide
ressort de mon enquête qu’aujourd’hui
de se faire tatouer diffèrent aujourd’hui et
les personnes vivant au Québec se
pourtant à l’époque on se tatouait pour
tatouent, pour des raisons familiales (5
des mêmes raisons
filles pour un total de 13 qui ont répondu
Amina 27-32 s’est fait
entourage à propos de son tatouage elle dit : « Il
tatoué à 21 ans
a été très bien reçu, peut-‐ être mon petit frère qui aurait voulue que je me tattoo quelque part d’autre que le bras. Elle dit aussi que son tatouage la représente
À la question « pourquoi avez-‐vous décidez de vous faire tatouer » elle a dit : « J’ai toujours voulue avoir un tattoo qui me
étant donné que c’est la première lettre de son prénom ; et elle n’a aucun regret.
Un professeur, 33-38,
Pour la question « pourquoi avez-‐vous décidez de vous faire tatouer ? » il répond : « conserver sur moi une philosophie qui m’importe dont a traité Gandhi.» Son tatouage représente « Ne dis pas le mal ; ne vois pas le mal ;
représente, surtout quelque chose qui va
s’est fait tatoué à 24
n’entends pas le mal. » Il aimerait dire au futur
rester avec moi pour la
ans
tatoué de ne pas se faire
vie. Ensuite à la question tatouer pour se faire concernant la réaction tatouer. Et il regrette qu’a eu sa famille et son
36
d’avoir fait affaire avec un
représente la nature. Il
Courage To Live Anyone
« newb »
dit qu’il conseillerai les
Can Die »
L’artiste, 21-26 s’est
gens de se tatouer
Il c’est fait tatoué pour se
« seulement si il consente
rappeler de certaines
au norme ». Et il n’a
choses. Il c’est tatoué
aucun regret à porter son
pour sa mère, pour lui
tatouage.
rappeler de rester forte
Tony, 21-26, il s’est
malgré tous ses
fait tatoué à 16 ans
problèmes. Il voudrait
fait tatouer à 18 ans
conseillé au futur tatoués de se tatouer « après mûr réflexion, car il va te rappeler toute ta vie le
À la question « pourquoi moment de la avez vous décidé de vous signification de ton faire tatouer il a tatouage. » répondu : « L’art c’est ma
Sur son tatouage il est
passion » son tatouage
indiqué « Have the
38
Aujourd’hui le tatouage est présent dans
tatouage reste un critère de
nos sociétés plus que jamais. Il n’est plus
discrimination : « c’est le cas, par
vue comme marque d’une révolte ou
exemple, dans la vente, la restauration ou
d’une quelconque revendication. Il n’est
encore dans les métier de la santé.
plus non plus ou rarement, signe d’une
L’individu tatoué est en effet
appartenance à un groupe. Il devient
fréquemment victime de préjugés: s’il est
personnel, esthétique et s’inscrit dans le
envisagé comme marginal, il prend le
cadre du récit personnel de celui qui
risque de ne pas être pris au sérieux. » Il y
l’arbore. D’un côté, le tatouage peut-‐être
a aussi des parents qui sont contre le
envisagé comme marginalisant (l’homme
tatouage, car le tatouage dénature le corps
tatoué est un voyou ; la femme tatouée est
de leur enfant qui, en quelque sorte, est
vulgaire et provocante), mais de l’autre
leur œuvre, et ils sont exposés aux
côté il peut être envisagé comme le « petit
mauvais jugements des autres. Au
truc en plus » qui autorise à penser que
moment où l’on se fait tatouer, on estime
l’on est face à quelqu’un qui sort de
être cohérent, bien ancré dans ses
l’ordinaire. » Le tatouage se présente
opinions, ses choix et sa personnalité.
souvent comme élément d ‘érotisation du
D’après les réponses à mes sondages, la
corps, en particulier chez les femmes. Il
vision que les non-‐tatoués porte sur les
appelle le toucher, éveille la curiosité et
tatouages et les personnes tatouées
rend le corps moins « ordinaire ».
varient selon tout un chacun. La majorité
Toutefois, malgré l’évolution sociale, le
de personne s’accordent que les tatouages
sont une bonne chose, car ils le
ne sont pas en accord avec la pratique du
considèrent comme de l’art (7 personnes
tatouage sans raisons particulières (6
au total sur 42 répondants), aussi parce
personnes sur42 répondants) ; pour des
que c’est un moyen de s’exprimer (5
raisons religieuses (3 personnes sur 42
personnes sur 42 répondants). D’autres
répondants)
pensent que les tatouages sont beaux (3
personnes sur 42 répondants). D’autres
Quelques réactions des répondants Première Intervention
Deuxième intervention
Troisième intervention
« Je n’aime pas [les tatouages] c’est démoniaque ». Elle est
Quel est votre avis concernant les tatouages ? « Je n’aime pas le tatouage, je
contre le tatouage et le conseil qu’elle donnerait à un (e) qui
trop. Donc pour moi ça ne
déformation de la création de
pas une personne de se
tatouer parce que ce n’est pas
premier jugement qu’elle
Et le jugement qu’elle porte c’est
porte sur le tatouage dépend: « si c’est un petit motif, on peut dire que c’est beau des
visibles surtout quand il y en a
passe pas.. Elle ne conseillera
le fait pas, sinon tu iras en enfer ».
(spirituellement)
tatoues vulgaires, et trop
Dieu. » Elle pense que le
tatouage c’est égaré
les tatouages ? « J’aime pas les
trouve que c’est une
voudrait se faire tatoué est : « Ne
qu’une personne qui porte un
Quel est votre avis concernant
fois, mais si c’est tout le corps c’est de la folie. Et elle
trop catholique. Aussi, le premier jugement qu’elle porte sur une personne tatoué
c’est que c’est un « un délinquant, un drogué, un fumeur. Bref juste négatif
40
Cinquième intervention
Quatrième intervention
Pour lui, le tatouage serait « immature», il
Elle pense que le tatouage est « beau mais
lorsque le tatouage est bien réussi comme une
ne porte aucun jugement sur les
œuvre d’art » et le fait que son partenaire
personnes tatouer. Il ne conseillerait pas
possèderait un tatouage ne compromettrait pas
un (e) ami (e) de se faire tatouer parce
sa relation
qu’elle ou il « risque de regretter un jour ». Et il ne remettrait pas en cause la relation amoureuse d’une amie, car « le tatouage n’a rien à voir avec la personnalité ».
MOT DE FIN En définitif, le tatouage a connu une évolution dans le temps. Elle est partie d’une conscience collective pour des raisons curatives, de bravoure, identitaire, pour une conscience individuelle. Aujourd’hui, tout tatouage est fait sur des bases strictement personnelles. Toutefois, pour porter un jugement sur une personne qui possède un tatouage il faut avoir un regard objectif, car la vision « marginale » qu’on porte sur les tatouages et les personnes tatouées est le fruit d’un construit social .
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