• www.ter-aelis.fr • 8 ans d’existence sur le Web • Association crée depuis 2013 • 7 prix nationaux de littérature & graphisme, (2012-2014)
edito
par Cassiopée, présidente de l’association Ter aelis Dépassant les valeurs reçues, le poète s’exprime. Armé de sa plume et de son verbe, il combine les mots, les sons, les rythmes dans le seul but d’éprouver la raison. Il s’offre en toute liberté le droit de rêver ou de se battre. Il laisse sa pensée devenir son combat, son amour... sa plainte. Le poète déborde les règles de la littérature, il n’a pas peur de la profusion et ne craint pas de quitter les limites de la syntaxe. Il la contourne et jongle avec la langue pour mieux s’extérioriser. Du débordement à l’insurrection, il n’y a qu’un pas qu’il franchit en libérant sa conscience. La poésie est, avec le visuel et la narration sous toutes ses formes, un des fondements de Ter Aelis. L’association, partenaire du Festival de la parole poétique 2015, a choisi de s’éloigner un moment du
Au fil des années, la communauté a constitué un véritable réseau de créateurs, prêt à collaborer et soucieux de toujours progresser. Le forum s’est doté d’un blog, d’un webzine, d’une association et continue d’évoluer afin de moderniser son site. La collectivité est devenue un authentique acteur culturel dont certains membres peuvent se faire valoir d’un professionnalisme reconnu. D’autres ont gagné suffisamment d’expérience pour être exposés dans des galeries, publiés dans des revues ou des anthologies ou encore gagner des prix nationaux de littérature et de graphisme (sept prix de poésie, de peinture et de nouvelles ces trois dernières années).
“Du débordement à l’insurrection, il n’y a qu’un pas qu’il franchit en libérant sa conscience.” monde de la toile informatique pour rejoindre les poètes insurgés. Elle anime les jeux littéraires lors de la nuit de la poésie. En encourageant quiconque à libérer sa parole un bref instant , elle souhaite voir grossir les rangs de ceux qui n’ont pas peur des mots. Ter Aelis est, au delà de l’association, une communauté virtuelle forgée par des membres passionnés. Tous créateurs, nous sommes réunis pour nous enrichir les uns des autres et ne pas stagner. L’envie d’apprendre et de partager est notre principal moteur. De la création numérique pure (le graphisme, la peinture digitale, les photomontages) à l’écriture de nouvelles, de poésies, de jeux narratifs à plusieurs, en passant par des réalisations plus traditionnelles comme la peinture, le dessin, la photographie ou la sculpture, Ter Aelis s’inscrit dans l’imaginaire. 2
Mêler les genres pour parfaire l’esthétisme invite les artistes à collaborer. Aussi, quand un dessinateur accompagne le poète dans sa démarche, la création s’enrichit du nombre de mains et de neurones, c’est ainsi que Ter Aelis peut offrir des calligrammes au Festival. Dans le partage des pensées et l’échange fructueux aboutissent parfois les plus surprenantes des œuvres. La transmission d’une passion est une source de stimulation phénoménale où anciens et jeunes s’abordent sans mesurer leur âge. Seules les compétences sont maîtresses. Ter Aelis est terre d’émulation sur le net, elle souhaite jouer ce rôle auprès d’un public amateur mais pas forcément écrivain. Le Festival est, pour Ter Aelis, un splendide moyen de donner la parole à ceux qui ne la prennent jamais mais que la poésie attire.
Dé bordement numér i q u e par dvb
Internet : ses réseaux sociaux, ses millions d’entrées, ses trusts commerciaux et son information trop rapide. Le monde virtuel a pris une place si importante aujourd’hui, dans une société où la connaissance se veut immédiate et partielle, qu’il est devenu pour certains le symbole d’une génération incapable de discernement. Les internautes, et principalement ceux nés avec un clavier et une souris dans les mains, sont-ils voués à demeurer les consommateurs des transnationales du commerce en ligne et les récipiendaires d’une communication à sens unique ?
auto-centrées. Ne serait-ce que par l’absence de frontière. L’exception culturelle française ne tient d’ailleurs plus lorsque sur un même site francophone se retrouvent des utilisateurs du monde entier, chacun apportant sa propre brique à un édifice transversal. L’horizontalité des rapports permet à tout un chacun d’être professeur et élève à la fois ; le partage des compétences et des techniques ne se fait plus dans un cadre scolaire ou par un lien hiérarchique. Enfin, et surtout, la rencontre permet souvent l’émulation et le dépassement de la réflexion individuelle.
“L’horizontalité des rapports permet à tout un chacun d’être professeur et élève à la fois” Ce qui, il y a quelques années encore, était considéré comme un espace de liberté absolue, a vite été rattrapé par les penchants capitalistiques d’un marché international tourné vers le seul profit ou l’exploitation de l’information privée, car « si c’est gratuit : c’est vous le produit », rappelle le célèbre adage du web. Pourtant, si l’on veut bien aller au-delà des sites les plus fréquentés en matière artistique et culturelle, c’est à dire ne pas se cantonner aux marchands de mp3 et aux supermarchés de la livraison en ligne, internet demeure un lieu de création et de transmission hors du commun pour celles et ceux encore curieux et avides de connaissances. Internet : ses forums, ses infinités de ressources et d’outils, ses réseaux d’artistes et leurs millions de galeries, ses tutoriels et sa bonne volonté de partage. Ter Aelis est quelque part à l’image de cet autre international network. Lorsque l’on voit de très jeunes créateurs grandir dans ce bouillon de culture et se diriger vers des carrières artistiques, du théâtre à la conception visuelle, en passant par le journalisme ou la technique musicale, on peut être en droit de se demander si ces initiatives n’ont pas pris le relais d’une éducation populaire qui aurait manqué le tournant de l’ère numérique. Là où les structures institutionnelles se sont au fil des ans embourbées dans l’ornière juridique et administrative, là où la Culture pleure sur le danger de la perte de ses subventions publiques, d’autres voies ont jailli et bifurqué. Sur les forums ou les blogs, il n’est plus question de directives ministérielles ou de politiques culturelles dépendantes d’instances
Ainsi naissent les vraies productions indépendantes, libérées des effets de mode ou des espoirs de retour sur investissement. Le financement participatif, c’est-àdire l’appel aux internautes intéressés par la réalisation d’un projet, en est un parfait exemple : les futurs bénéficiaires d’une oeuvre artistique (films, livres, expositions...) en sont les mécènes et producteurs volontaires. Loin des a priori et des caricatures du cyber-espace, reflet d’une population que l’on voudrait nous faire croire abêtie et manipulée par les médias, cet autre internet est le vecteur inestimable de vocations. Les exemples sont innombrables, de jeunes et de moins jeunes, issus de toute classe sociale, de toute formation scolaire ou universitaire, et qui par leur seule passion ont appris et développé leurs capacités en matière artistique, toutes disciplines confondues. Tant et si bien qu’aucune institution ou média classique ne peut plus ignorer ce creuset. Des blogs de passionnés sont passés du stade de l’initiative individuelle à celui de l’édition de livres, de films, d’albums de musique. Des sites fondés par une poignée de motivés ont donné naissance à de vastes réseaux de diffusion culturelle. Des maisons d’édition minuscules permettent chaque jour à des auteurs de se faire découvrir par le public, loin des géants de la presse. Et quand bien même tous ne franchissent pas le pas, par timidité ou par manque d’intérêt, il n’en demeure pas moins que tous peuvent jouir de la reconnaissance de leurs pairs, chacun à la mesure de ses ambitions. Jusqu’au moment où, grâce à ces opportunités, leurs créations trouveront un écho au-delà de l’écran. Jusqu’au débordement numérique. 3
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Le drapeau, par CassiopĂŠe et Erlidann
BattleGhost, par Smirt
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I LLUSTRATION DE LA CO L È R E par Ramrod
Le débordement, l’insurrection sont des thèmes applicables et déclinables au visuel : la représentation des sentiments d’un personnage est un passage obligé pour tout illustrateur. Pas simple (mais possible) de faire comprendre qu’un personnage est en colère sans le montrer, justement, en colère. Ainsi, comment reproduire visuellement, la colère, l’irritation ou la révolte ? Tout d’abord, on peut déduire aisément que cela passe par l’expression du visage : les sourcils froncés, la bouche serrée, les yeux intensément fixes. La contraction, dans sa définition la plus physique : aucun muscle n’est au repos, tout n’est affaire que de tension. Lorsque la colère est libérée, le visage s’entrouvre et jaillit par une bouche béante et carnassière et un regard fou de rage. On saupoudre d’un soupçon de folie dans les globes oculaires (l’iris très resserré, les paupières tirées vers l’arrière) et le tour est joué.
Dans le cadre d’une illustration, le cadrage et l’angle de vue sont aussi intéressants pour faire ressortir, selon ses souhaits, différentes ambiances. En guise d’exemple, adopter un cadrage très serré et une plongée (la «caméra» surplombe le sujet) ne fera qu’accentuer une colère contenue. A contrario, opter pour un plan plus large et une contreplongée (la «caméra» se trouvant sous le sujet), alliés à une gestuelle déployée et tendue d’un corps, une gueule grande ouverte feront ressentir le déploiement d’une rage incontrôlée. Surtout si on y mêle les couleurs, qui ont leur propre langage pour véhiculer des émotions. Des variations de rouges évoqueront évidemment la colère mais si on y verse un peu de bleu pour obtenir des violets, des indigos … On nuance la colère avec une maîtrise contenue : la violence sous un calme apparent, la bête qui gronde ou l’aube d’un matin en flammes.
“La lumière est un formidable vecteur d’émotion” Mais le visage, bien que premier jalon d’évidence, n’est pas le seul à être pris en compte pour bien traduire l’expression. Si on élargit le cadrage, il faut prendre en compte toute la gestuelle d’un corps. Si tant est que l’énervement est l’état sensitif où l’on se contrôle le moins, cela doit se voir sinon se ressentir dans nos gestes et dans notre attitude. Une tension musculaire suit inévitablement toute colère : les poings fermés, crispés mais également la rigidité des bras (qu’ils soient tendus ou repliés contre le corps) ou de la nuque. Les veines saillantes d’un cou, des jugulaires tirant sous la peau, la rougeur d’un front … Plus généralement, la position du bassin, du torse, des jambes : des nuances bien visibles dans l’attitude qui indiqueront qu’il n’est pas en pleine décontraction avec une tasse de thé et des biscuits. Il n’existe cependant pas que des astuces liées à l’expression faciale ou aux poses gestuelles. La lumière et les ombres sauront également accentuer une sensation : des éclairages violents, contrastés et aux ombres marquées, entretiendront mieux la noirceur d’une révolte qu’une lumière zénithale baignant la scène d’une douceur blanchâtre. Privilégiez donc le rapport aux noirs, osez les contre-jours et les reflets dramatiques. La lumière est un formidable vecteur d’émotion.
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Plus généralement, toute couleur pure et franche indiquera une tension et plus elle envahira la scène, plus cette tension sera palpable jusqu’à aller au mal-être. Imaginez la couverture d’un livre, baignée d’un rouge pur et plein. Au centre, tout petit, l’on devine la silhouette noire d’un personnage, arqué sur des jambes écartées et des bras tendus sur des poings serrés. Rien d’autre. Inconsciemment, vous en déduirez que le personnage est colérique. Sans toutefois avoir pu discerner son visage. Ainsi, l’on peut voir que la reproduction visuelle d’un sentiment, bien que liée à peu de facteurs primordiaux, peut se décliner finalement de bien des façons différentes. Et même le parallèle avec la littérature est rapide, tant la thématique que l’on aborde ci-dessus peut être déclinée textuellement. Travailler une ambiance ou adopter la symbolique du poing serré. Tout est affaire d’inspiration.
NĂŠvrose, par Chikoun & Mic
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J E UX L I TTÉRAIRES par Mike001
« Le cadavre exquis boira le vin nouveau » et il l’a bu depuis lors, à pleine gorge. Les jeux littéraires se retrouvent partout : dans les MJC, les associations, les groupes d’amis, les jeux de plateau ou encore internet. La simplicité de ces jeux qui peuvent se finir en dix minutes séduit, surtout lorsque la technologie accompagne leur organisation. Grâce aux réseaux sociaux, aux systèmes de messagerie instantanée, aux espaces de discussion numérique (forums, sites, blogs) cette activité d’écriture collective devient accessible au plus grand nombre. En considérant que sur internet la diversité s’exprime à tout-va, ce n’est pas un mal de pouvoir proposer un loisir rapide, amusant et créatif à qui le veut. L’imagination est la principale compétence qu’il faut déployer, tant pour concevoir des jeux que pour y participer. Un cerveau, voilà ce que ça réclame. Et s’il y a une panne d’inspiration, il suffit de naviguer quelques minutes sur le net qui est une porte ouverte en permanence sur l’art. Si une pléthore de jeux et de noms existent, force est de constater que leur déroulement s’articule généralement autour d’un même principe : l’ajout d’une contrainte. S’inspirer d’une œuvre (poésie, musique, image), écrire à partir de rimes ou de mots prédéfinis, modifier des textes, exclure une lettre ; autant de rails pour guider l’inspiration d’un créateur plus ou moins aguerri. Depuis près d’un siècle, plusieurs groupes et mouvements d’artistes ont arrangé les règles à leur convenance pour produire. Ainsi, DADA, les surréalistes et l’Oulipo ont créé et popularisé nombre de jeux : le bout-rimé, le cadavre exquis ou encore le « S + 7 », pour ne citer qu’eux. D’autres attendent de sortir de l’ombre pour s’immiscer dans les moindres recoins du web ; c’est le cas du « mélidenomots » (qui consiste en la rédaction d’un court texte à partir d’une liste de mots composée par les participants) et des « mosaïques » (écrire en cinq minutes d’après un thème). Partir d’un pot commun permet lors de la publication des rendus de constater les différences dans l’appréhension des contraintes ou du sujet et la manière de les traiter. De tels procédés ne peuvent qu’amener la diversité. Le joueur est seul face à sa page blanche l’espace de plusieurs minutes, il n’y a pas de bon ou de mauvais résultat ni de moyen de tricher ; l’unique pression est celle du temps, car toute chose a un terme. Même les petits plaisirs littéraires. 8
M OSA Ï QUES Sujet commun : L’inutilité peut être une fin en soi. par Mic Soit, mais pourquoi une fin ? Peut on vraiment penser qu’une fin puisse être en soie ? Ah non j’ai mal lu désolé. Ceci étant dit l’inutilité c’est un concept assez abstrait et totalement subjectif, dont la simple existence est entièrement liée à un utile de référence. Donc si l’utile de référence est lui aussi relatif à l’utilité d’un autre point de vue, il peut à son tour d’un autre point de vue devenir inutile et par là même l’inutile par rapport à lui peut devenir utile. Donc si utile et inutile sont relatifs, comment peuvent ils êtres une fin ? Et si la fin justifie les moyens, elle n’a pas les moyens de se justifier, donc qu’elle soit une fin est inutile. Donc ce sophisme abscons n’a pas de sens, si ce n’est de ne pas en avoir, de sens. Ce texte est inutile.
par Cassiopée A la fin, le jour pointe. La nuit se rétracte, inutile et nue. Elle s’applique à se perdre dans le néant sans nom, vers l’infini glacé, dans les méandres de mon oubli. Le jour naissant grésille de fureur de vivre. Il éblouit mes joues sous sa caresse de jouisseur. Je le laisse faire sans meurtrissure. Je suis prête à l’aimer en attendant la nuit où je deviendrai inutile et nue entre les bras de l’oubli.
par Chikoun Et je reste là, las des chemins à parcourir avant même d’avoir ressenti la moindre pression sur la plante de mes pieds. L’urbain autour de moi grésille sur ma peau comme autant d’agressions ; la vitesse, l’énervement, la lumière et les obligations. Les gens et leurs classes, les Hommes et leurs castes. Et moi. Moi je suis là, à parcourir l’attente comme on défait ses bagages — à demain. Les mains lourdes d’une arthrite psychologique, ballantes et ballottées, j’examine avec une attention toute particulière les aspérités de mon pantalon. Les griffures de mon tableau, comme autant de chemins qui me ramènent derrière moi.