Terre de Vins n12

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Rosés

RHÔNE

La saga

Guigal

d’été VACANCES le sud-ouest

Des chais

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ARCHI tendance

Spécial cognac et cocktails Stéphane Tillement (33), de l’agence œnotouristique Wine Tour in France


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EDITO

Terre de vins, magazine bimestriel Internet : www.terredevins.com Email : redaction@terredevins.com Entreprise éditrice Editions Périodiques du Midi Société en Nom Collectif Siège social Rue du Mas de Grille 34438 Saint-Jean-de-Védas cedex. Tel : 04 67 07 67 07 Co-gérants Société du Journal Midi Libre représentée par Joël Canis et Alain Plombat Associés Société Anonyme de Presse et d’Edition du Sud Ouest (SAPESO) Société du Journal Midi Libre

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Directeur de la publication: Alain Plombat Directeur délégué Rodolphe Wartel (rwartel@terredevins.com) Rédacteur en chef Sylvie Tonnaire (stonnaire@terredevins.com) Conseillers éditoriaux Michel Bettane (mb@bettanedesseauve.com) et Thierry Desseauve (td@bettanedesseauve.com) Rédaction Cyril Charon (ccharon@terredevins.com) Evénementiel, communication, partenariats Patricia Moureuille (pmoureuille@terredevins.com) Publicité Régie Sud Ouest publicité. Direction commerciale : Hervé Courregelongue (hcourregelongue@terredevins.com) : 05 35 31 28 26 Languedoc-Roussillon, Ardèche, Drôme, Vaucluse : responsable commercial : Bernard Ger (bger@terredevins.com) : 06 85 61 11 16 Paris et Champagne : La Régie du vin, 22 rue Chauchat, 75009 Paris. 01 48 01 90 10. Val de Loire (Nantes à Pouilly) : Corinne Kadi (02 40 38 28 67) Correction Service technique Sud Ouest PAO et photogravure Service technique Sud Ouest Création graphique Emmanuel Batifoulier/Blue press Impression Litografia Roses SA, Energia 11-27, Poligon La Post, 08850 Gava (Espagne).

Abonnements, service lecteurs, vente des anciens numéros 04 3000 6000 (N° non surtaxé), du lundi au vendredi de 8 h à 17 h et le samedi de 8 h 30 à 12 h. Prix de l’abonnement (6 n°+ 1 hors-série) en France : 29 € TTC Ventes en kiosque France : Messageries lyonnaises de presse. Tel : 04 74 82 14 14. Réassort points de vente, Boost media, Denis Rozes 06 43 73 16 37. denis.rozes@boostmedia.pro Sud Ouest : Service des ventes, 05 35 31 34 65 Languedoc : Jean-Christophe Clidi, 04 67 07 66 81 ; réassort points de vente, Thierry Nazon, 04 67 07 67 59 Ce numéro comporte un cahier spécial Cognac de 20 pages. N° Commission paritaire : 0714 K 79707. N° ISSN : 1296-9893. Dépôt légal : à parution Tous droits de reproduction réservés La reproduction, même partielle, des articles et illustrations de Terre de vins est interdite. Terre de vins décline toute responsabilité pour les documents non sollicités qui lui sont confiés. Les manuscrits, insérés ou non, ne sont pas rendus. L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. Le vin doit être consommé avec modération.

L

a France du vin a échappé de peu à une nouvelle stigmatisation après que le ministre de l’Intérieur eut soudain constaté que les chiffres de l’accidentologie routière atteignaient des sommets. Dans les couloirs des ministères a dès lors bruissé l’idée de réduire encore un peu plus le taux d’alcool au volant de 0,5 à 0,2 g. Et est apparue à nouveau la menace de spots télévisés et de mises en demeure, aux conséquences terribles sur le vin, son image et sa consommation, en baisse inéluctable en France depuis cinquante ans. Par bonheur, François Fillon et Roseline Bachelot ont, semble-t-il, joué l’apaisement… Etrangement, c’est au même moment que le ministre des Affaires étrangères et maire de Bordeaux, Alain Juppé, annonçait la désignation des architectes du cabinet X-TU, Anouk Legendre et Nicolas Desmazières, et de l’agence de scénographie londonienne Casson Mann, pour mener à bien le futur temple mondial du vin. Un projet à 55 millions d’euros, culminant à 37 mètres sur les rives de la Garonne, et dont la première pierre sera posée en 2013. Un lieu d’élégance et de magie où il ne sera pas question d’alcoolisation, de « binge drinking » et de delirium tremens… Mais de géographie, d’ampélographie, d’histoire, de géologie, de sens, de sensations... En somme : de connaissance et d’universalité. Car la France des cépages n’est plus celle où le vin constituait un nutriment permettant de résister à l’effort, et où le bacot, même s’il rendait fou, épongeait la soif. Elle est aujourd’hui celle du bon et du bon goût, devenu probablement abusivement une distinction sociale. Le Languedoc a brillamment compris cette mutation nécessaire entre volume et valeur. Ceux

qui, hier, faisaient « pisser » la vigne, produisent aujourd’hui de l’excellence promise au classement. Dix crus seront, en effet, promus au rang de « grands crus » tout prochainement. Ce sont ceux là que « Terre de vins » a dégustés pour vous faire profiter, en avantpremière, des trouvailles du Sud, du top à petit prix (lire notre Palmarès en page 64). En Languedoc-Roussillon, en Bourgogne, à Bordeaux, dans le Sud-Ouest dont nous vous parlons dans ce nouveau numéro avec 22 pages consacrées au Cabardès (Carcassonne) et à Duras (Lot-et-Garonne), cette France du vin dessine nos territoires. Notre photo aérienne sur le Sancerrois (page 12) l’atteste. Le fleuve a aimanté la vigne, qui elle-même a façonné dès le Moyen Age les arpents devenus hectares. Qui s’en soucie aujourd’hui, qui les défend, alors même que Bruxelles envisage de mettre un terme aux droits de plantation, régis jusqu’alors par la seule qualité du terroir ? N’est-il pas paradoxal d’accorder la possibilité de planter n’importe où, au moment où l’on subventionne l’arrachage ? Faire venir au futur Centre culturel et touristique du vin de Bordeaux chaque nouveau député à Bruxelles ou à Paris devra constituer une grande cause nationale pour la tribu du vin. Afin de combler ce nouveau paradoxe, exclusivement français, entre perception et réalité du vin, il faut s’y préparer. Les élus en sortiront différents. RODOLPHE WARTEL

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SOMMAIRE

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n° 12 I JUILLET AOUT 2011

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106 ACTUALITÉS 14 I LE RÉVEIL DE BORDEAUX

Il est des événements reflets de tendances profondes. La publication des premières esquisses du futur Centre culturel et touristique du vin de la ville de Bordeaux en est un. Derrière sa silhouette futuriste, tout un vignoble s’ouvre. Découvrez nos bons plans de l’été

24 I THIÉFAINE, « JOUISSEUR RECONVERTI »

Quelques semaines après la sortie de son dernier opus, « Suppléments de mensonge », l’enfant de Dôle délivre à « Terre de vins » quelquesunes de ses facéties mentales. Quelque part entre son « Eldorado » jurassien et Lautréamont…

DÉGUSTATION 48 I TROPICAL COGNAC

C’est sûr, l’été 2011 sera « so cognac » ! « Terre de vins » vous propose ses meilleures recettes de cocktails, réalisées par la crème des mixologistes. Suivez le guide !

51 I ROSÉS : CAP AU SUD

Vineux, délicats, complexes, désaltérants, francs, simples, de cépage ou d’appellation, les rosés du Sud règnent sans partage sur l’été. Voici

notre sélection pour trouver les meilleures cuvées, sous le parasol ou la tonnelle

64 I DE GRANDS CRUS EN LANGUEDOC

Une première tentative de classement émane des organismes professionnels de cette région. Objectif : hiérarchiser l’offre. Notre jury classe les prétendants. De l’excellence encore abordable !

ARTS DE VIVRE 76 I DESTINATION SUD-OUEST

Juste à la marge de vignobles à plus forte notoriété, les côtes de Duras comme le Cabardès, aux portes de Carcassonne, font figure de destinations bonheur. Ici, les propriétaires sont aussi les vignerons. Ici, on boit son vin à table !

100 I CHILI, TERRE DE CONQUÊTE

Immense, c’est ce qu’il faut dire du Chili. Notre reporter en est revenu enthousiasmé : par l’esprit de conquête, par l’éventail des possibles, par des paysages pour le moins grandioses

106 I CUISINE : SPÉCIAL CHAMPAGNE

Les deux tables des Crayères se veulent l’ambassade des champagnes. Chef et sommelier nous mettent dans la confidence des bons accords de la bulle

Ont participé à ce numéro : Pierre Arditi, Alain Benoît (Studio Deepix), Philippe Campa, Alain Chameyrat, Jean-Charles Chapuzet, Jefferson Desport, Vincent Dewitte, Pasquale Festa Campanile, Philippe Geluck, Séverine Joubert, Egmond Labadie, Benoît Lasserre, Philippe Menard, David Le Déodic, Marion Lefebvre, Isabelle de Montvert-Chaussy, Iris Mour, Franck Mulliez, Newsgraphe (infographies), Jacques Orhon, Emmanuel Perrin, Franck Perrogon, Alain Robert (Agence aperçu), Nicolas de Rouyn, Frédéric Sallet, Richard Sprang, Laurent Theillet, Anne-Sophie Thérond, Michèle Trévoux. En couverture : Photo réalisée par Laurent Theillet, avec Stéphane Tillement, à Carignan-de-Bordeaux (33).

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CIEL MON VIGNOBLE

SANCERRE (18)

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Cap sur

Photo Frank Mulliez

la Loire ! S

ancerre, en Centre-Loire. Du haut de ses coteaux calcaires culminant à 310 mètres au-dessus du niveau du fleuve, avec un peu d’imagination, on pourrait apercevoir les derniers rangs de muscadet, là-bas, à l’extrémité ouest du Val de Loire. Entre le sauvignon de Sancerre et le melon de Bourgogne du muscadet, sur quelque 400 kilomètres, la route des vacances est toute tracée. Orléans, Blois, Tours, Amboise, Saumur, Chinon, Angers, Nantes… Un jardin d’Éden pour les amoureux d’architecture et de vin. Inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco, le Val de Loire dessine cette alchimie unique à la croisée des routes des vins et des châteaux… Cet été, osez le tremplin sancerrois, prenez de l’élan, et lancez-vous à l’assaut des chais et coteaux de la Loire.


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TRIBU

ナ誰OTOURISME

Le futur Centre culturel et touristique du vin de Bordeaux

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Le réveil de Bordeaux BORDEAUX L’ANGLAISE S’ÉMANCIPE. LES PORTAILS S’OUVRENT, LA VIGNE SE DÉVOILE. VISITES INÉDITES, NUITÉES DE CHARME : DE L’ESTUAIRE JUSQU’AU SUD DU VIGNOBLE, LES PROJETS FLEURISSENT. POINT D’ORGUE DE CE RÉVEIL, LE CENTRE CULTUREL ET TOURISTIQUE DU VIN, MAGISTRAL LIEU DE DÉCOUVERTE, SYMBOLE D’UNE RENAISSANCE Par Cyril Charon. Adresses en page carnet

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alle comble à l’hôtel de ville de Bordeaux. Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères et maire, accueille la presse nationale et internationale pour ce qui constitue, dans la planète vin, de Hong Kong à la Nappa Valley, du Cap à Mendoza, un événement majeur. Nous sommes en mai et, moins d’un an après le lancement du concours international, les architectes du Centre culturel et touristique du vin (CCTV) ont été sélectionnés. Dans les valises d’Anouk Legendre et de Nicolas Desmazières (cabinet d’architectes parisien X-TU), de Dinah Casson (agence londonienne de scénographie Casson Mann), les premières esquisses du futur temple mondial du vin. Le projet était attendu au tournant, et beaucoup espéraient un acte architectural fort. Une impulsion, aussi, sorte d’électrochoc pour (re)lancer l’œnotourisme dans la région. NOUVELLE ÈRE On aime un peu, beaucoup, à la folie… ou pas du tout ! Mais, force est de constater que par son allure, son ambition, le projet en impose. Imaginé conjointe-

ment par deux cabinets internationaux, le dossier a été sélectionné parmi 150 candidatures en provenance du monde entier. Pourquoi lui ? « Pour son audace », répond sans hésiter Alain Juppé. Ce concept à 55 millions d’euros constitue, en effet, une petite révolution pour Bordeaux, la bourgeoise discrète, qui a tardé à prendre le train de l’œnotourisme. Retenir cette candidature, c’est aussi s’affranchir de la carte postale du classicisme XVIIIe, marque de fabrique de la ville classée au Patrimoine mondial de l’Unesco. La rupture est radicale. Bordeaux, enfin, s’offre son Guggenheim. Première pierre en 2013 pour l’édifice culminant à 37 mètres, et dont la spectaculaire charpente sera voilée d’une ombrière en verre sérigraphié, parsemée de capteurs photovoltaïques organiques… Ces capteurs donneront ses teintes changeantes au CCTV, du rouge doré au champagne, selon l’ensoleillement. La scénographie du temple du vin s’efforcera de le célébrer dans toute son « universalité », défendent ses architectes, avec pour fil conducteur un parcours inédit mêlant le sensoriel aux technologies les plus innovantes. De la cave au belvédère surplombant la Garonne, en passant par la « salle de dégustation polysensorielle », l’expérience promet d’être unique. Le projet

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PHOTO YANN ORHAN

INTERVIEW

HUBERT FÉLIX THIÉFAINE


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« Jouisseur

reconverti »

AVEC UN NOUVEL OPUS À LA HAUTEUR DE SON GÉNIE, « SUPPLÉMENTS DE MENSONGE », LE POÈTE JURASSIEN REVIENT DE TRÈS LOIN. ENTRE RÉDEMPTION, PROVOCATION ET MUTATION, THIÉFAINE DÉLIVRE ALORS QUELQUES APOSTROPHES SUR LES PLAISIRS, LES INTERDITS OU LES ÉMOTIONS D’UNE VIE VOLONTIERS BORDERLINE Par Jean-Charles Chapuzet

A

près des années de galère, Hubert-Félix Thiéfaine émerge à la fin des années 70 avec des titres qui deviennent rapidement cultes comme "La fille du coupeur de joints" ou "Je t'en remets au vent". Avec un style qui ne ressemble à rien d'autre, HFT se construit son public en multipliant les dates de concert. Les albums sortent et le chanteur aborde sans pareil la mort, le suicide, la repentance, le mythe, la dépression ou encore la vie... Oscillant entre "la tentation du bonheur" et "le bonheur de la tentation", pour reprendre ses termes, l'enfant de Dole délivre àTerre de Vins quelques-unes de ses facéties mentales. Hubert Félix Thiéfaine, réputé pour votre liberté de penser, avec une carrière sans jamais de concessions médiatiques comme idéologiques, quel regard portez-

vous sur la société de plus en plus hygiéniste, diabolisant toujours davantage les plaisirs ?

Je suis un jouisseur reconverti et c’est comme tel que je suis parvenu aujourd’hui à la jouissance ultime, celle des épicuriens, celle qui est une absence de souffrance, non une accumulation de plaisirs. Je reviens donc aux sources, je relis Lucrèce, Horace, Cicéron, Sénèque… et au bout du compte je ne les trouve pas plus obsolètes que Bukowski, Bret Easton Ellis ou Thomas Pynchon… Nous avons quitté le modernisme pour le postmodernisme, c’est-à-dire pour la régression et le retour à la barbarie. Nos contemporains sont redevenus des bébés jouisseurs, un tantinet autistes et pervers. On les voit parler tout seuls dans la rue sur de vulgaires bouts de bakélite. On les voit se jeter en hordes sur les soldes. On les voit courir mourir dans les cimetières !

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TERROIR

LANDES (40)


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Les pieds dans le sable TOURNEZ LE DOS AUX SPOTS DE SURF, LÀ À CAPBRETON. AU CŒUR DES LANDES, NICOLAS TISON REDONNE VIE À UN VIGNOBLE OUBLIÉ. GOÛTEZ, C’EST DE L’HISTOIRE Par Jefferson Desport, photographies David Le Déodic. Adresse en page carnet

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’histoire ne serait qu’un éternel recommencement ? Dans le sud des Landes, à Capbreton, à 800 mètres de l’océan et de ses rouleaux chers aux surfeurs, l’hypothèse se vérifie. En effet, produite ici, à l’abri des embruns, la Cuvée des Marins, cet agréable rouge aux arômes floraux, n’est pas le seul fruit d’un exotisme local. Cette bouteille renferme un peu plus. Un témoignage. Celui d’un vignoble qui s’était perdu dans la nuit des temps. Un vignoble qui avait tout simplement disparu et dont Nicolas Tison a entrepris, il y a seize ans déjà, de raviver le souvenir. Un travail d’Hercule que cet ingénieur agronome a attaqué à la force des bras. Car, avant de planter les premiers ceps, il a d’abord dû défricher ses 5 hectares de terre. Lesquels n’étaient pas piqués d’herbes folles, mais… de pins. Il a donc dû abattre, dessoucher, et aplanir pour renouer les fils de cette histoire interrom-

pue peu avant 1900, dans l’anonymat. « Cette disparition correspond à ce qui s’est passé dans les autres vignobles à partir de 1870, explique Nicolas Tison. Sauf qu’ici ce n’est pas le phylloxéra qui a sévi mais des maladies comme le mildiou et l’oïdium. La douceur de l’océan aidant, elles y ont trouvé un terrain favorable. Et, comme il n’y avait pas une grande culture agricole, les Capbretonnais ont abandonné. » Pourtant, les historiens sont formels. Le vin des dunes a eu son heure de gloire. Et même fait le bonheur des cours royales européennes entre le XVIIe et le XVIIIe siècle, comme le raconte l’historien landais, Jean-Jacques Taillentou : « En 1701, douze bouteilles de vin blanc et rouge de Capbreton font partie de l’imposante liste de cadeaux plus ou moins gastronomiques dont pouvait disposer le petit-fils de Louis XIV, Philippe V qui vient de monter sur le trône d’Espagne. » En outre, ces vins voyageaient

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ENQUÊTE

CHAIS ET ARCHITECTURE (33)

Chais archi

tendance

IL NE SUFFIT PLUS DÉSORMAIS DE PRODUIRE LE MEILLEUR VIN DU MONDE. IL FAUT AUSSI QUE L’ÉCRIN FRAPPE LES ESPRITS. ET LES PROPRIÉTAIRES QUI EN ONT LES MOYENS FONT DÉSORMAIS APPEL AUX « STARS » DE L’ARCHITECTURE. EXEMPLE LE PLUS MARQUANT À SAINT-ÉMILION AVEC CHEVAL-BLANC ET LA DOMINIQUE Par Benoît Lasserre et Cyril Charon

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Les nouveaux chais de château Cheval Blanc (Saint-Émilion)

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oué soit Saint-Émilion grâce à qui les deux architectes français les plus réputés et les plus respectés dans le monde vont être voisins. Jamais en effet Christian de Portzamparc et Jean Nouvel n’auront été si proches l’un de l’autre. À peine 300 mètres et un mince chemin de terre tracé entre les vignes sépareront leurs deux bâtiments, le nouveau chai de Cheval-Blanc pour le premier, l’extension du château La Dominique pour le second (lire par ailleurs). Mais si, dans leur profession, Portzamparc et Nouvel évoluent dans la même cour, celle des lauréats du Pritzker Prize (le Nobel des architectes), il n’en va pas de même pour leur projet respectif à Saint-Émilion.

UN TEMPS D’AVANCE Sur le circuit des vignobles, Cheval-Blanc est l’égal d’une Formule 1. Pourtant, de l’aveu même de Pierre Lurton, son directeur, le chai désuet et vieillissant du château dont Bernard Arnault et le baron Albert Frère partagent les rênes dépareillait presque au regard de son

prestige. Beaucoup de viticulteurs s’en seraient certes contentés. Mais quand on a atteint le sommet, il faut y rester. Rester aussi en avance sur ses concurrents. Faire appel aux « stars » de l’architecture est justement devenu une carte majeure que peuvent abattre les propriétaires qui ont le chéquier assez large. C’est bien sûr le cas des deux associés de Cheval-Blanc qui ont investi 12 millions d’euros dans l’édification du nouveau chai. Portzamparc avait déjà frappé un coup de maître à New York en bâtissant la tour LVMH. À qui d’autre que ce concepteur revendiquant « son exigence entière » Bernard Arnault pouvait-il donc confier l’édification du nouveau temple de Cheval-Blanc ? « Il m’a téléphoné, le projet m’a intéressé tout de suite », raconte l’architecte, qui n’a pas mis beaucoup plus de temps à séduire son commanditaire. Quand le président de LVMH a vu les premières ébauches du futur chai de Cheval-Blanc, il a juste lâché : « Voilà, c’est ça ! » Ce qui, pour Bernard Arnault, équivaut à un énorme compliment. Avant son inauguration début juin, à la veille de Vinexpo, le nouveau bâtiment s’est construit en quinze mois et avec ce soin du secret qu’on affectionne dans l’univers du luxe, même s’il était possible, depuis la

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SAGA

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CÔTES DU RHÔNE


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LA VITA È BELLA. PHILIPPE GUIGAL ET SON ÉPOUSE RAYONNENT DANS LE BELVÉDÈRE DE LEUR CHÂTEAU, À AMPUIS. ILS VIENNENT D’AVOIR DES JUMEAUX, CHARLES ET ÉTIENNE. LA RELÈVE EST ASSURÉE ; SANS NUL DOUTE, LA MAISON E. GUIGAL, PHARE DES CÔTES-RÔTIES, RESTERA ENCORE FAMILIALE POUR UN BON BOUT DE TEMPS. INCROYABLE DESTIN LORSQUE L’ON SAIT D’OÙ VIENT CETTE FAMILLE ! Par Jean-Charles Chapuzet, photographies Alain Benoît (Deepix)


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PORTRAIT

CORSE


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PORTRAIT CORSE

premiers hectares en 2009, au cœur du Patrimonio, « à 7 250 pieds hectare comme on faisait avant que les pieds-noirs n’imposent 4 000 pieds pour produire plus ». Il procède en perfectionniste : « Pendant l’année, il faut être le meilleur producteur de raisins, la taille permet de faire le point sur la santé de chaque cep, j’ai divisé par deux les doses de soufre et de cuivre préconisées. Et pendant les vinifications, je ne fais que du ménage ! Le vin nature a besoin d’être protégé. Je suis une sage-femme obsédée par la propreté. » Tout ça pourquoi ? « Pour le bonheur de vivre avec le soleil, le bonheur d’être agriculteur, et sur l’île, en plus ! Le bonheur d’être en harmonie avec le rythme de la nature et de la vigne en particulier, de devenir une composante du terroir. Pour une dimension politique aussi. Maintenir le vignoble protège le patrimoine naturel de l’urbanisation. » À deux pas du petit port de Saint-Florent, devenu station balnéaire grignotant le littoral, la réflexion prend tout son sens. Un engagement viscéral en faveur d’une agriculture saine, au service de l’environnement et d’une perpétuelle quête de la typicité des vins de Patrimonio. Voilà les points d’orgue de la partition vigneronne de Nicolas Mariotti.

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Le Vermentino 2009 Pastoreccie (17 €), droit et vif, conjugue silex et agrumes, on croque le combawa jusqu’en finale. Le Niellucciu 2008 Porcellese (15,20 €), issu des plus vieilles vignes de l’appellation, offre une signature sauvage : du cuir frais, du sang, puis bigarreau et tapenade, tout en tension, en retenue. « Je suis pour le monocépage à fond, le côté austère, brut, c’est le caractère du Patrimonio, des vins à attendre, je ne ferai pas de concession là-dessus parce que je place le vin au-dessus de tout. » Tout est dit n « TERRE DE VINS » AIME Reportage réalisé la première semaine de janvier, dans une Corse déserte et magnifique. L’équipe pointe l’accueil formidable, au débotté et en dehors des heures de service, du restaurant L’Europe, sur le port de Saint-Florent. Carte des vins pointue et plateau d’oursins mémorable, ça aussi, c’est dit. Hôtel-restaurant L’Europe, quai du port de plaisance, place des Portes, 20217 Saint-Florent, 04 95 35 32 91. Les vins de Nicolas Mariotti sont disponibles chez Nicolas Stromboni, le chemin des Vignobles, 16, avenue du Docteur-Noël-Franchini, 20090 Ajaccio, 04 95 51 46 61, www.corsevins.fr. Pas de caveau sur place, mais un accueil garanti par le vigneron si vous venez de notre part, Nicolas Mariotti : 06 12 05 24 59, 20232 Poggio d’Oletta.


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Le rosÊ, la troisième voie pages 52 à 62

LE PALMARĂˆS DU GRAND JURY Crus du Languedoc : Ă la hauteur de l'ambition ! pages 64 Ă 71

TALENTS Tavel : une appellation, une couleur page 72

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l y a quelque chose d’enthousiasmant Ă considĂŠrer le marchĂŠ. C’est suffisamment rare pour que nous nous en rĂŠjouissions. On a coutume d’entendre que le monde du vin est plutĂ´t long Ă la dĂŠtente, soumis qu’il est par la nature au rythme paisible d’une rĂŠcolte par an. Erreur. Le monde du vin a vite fait de comprendre que le rosĂŠ reprĂŠsente pour tous une chance inespĂŠrĂŠe d’aboutir enfin Ă une trĂŠsorerie Ă peu près propre. Pour tous ceux qui n’ont pas inventĂŠ les primeurs, le rosĂŠ vient Ă point. VoilĂ que le vignoble s’est mis Ă l’Êcoute du consommateur. Au dĂŠbut, il a eu un peu de mal et beaucoup de condescendance. Les rosĂŠs chĂŠris du grand public ĂŠtaient d’improbables jajas, moquĂŠs par les amateurs, grands et petits, et rĂŠservĂŠs aux occasions les plus triviales et les moins gastronomiques. Comme toujours, quelques snipers ont dĂŠgainĂŠ de belles bouteilles qui ont aussitĂ´t rencontrĂŠ l’assentiment des critiques et chroniqueurs ravis de pouvoir enfin entrer dans la danse. Du haut de leur importance, ils ont entrainĂŠ dans leur sillage les plus chic des buveurs de vin. La locomotive s’est ĂŠbrouĂŠe et le train tout entier s’est mis en mouvement. Partout – c’est-Ă -dire dans TOUS les vignobles – on s’est mis Ă faire du rosĂŠ. Les Alsaciens qui l’avaient abandonnĂŠ y reviennent. La Bourgogne a les doigts dedans. La Loire, le RhĂ´ne viennent semer le trouble sur les chasses (mal) gardĂŠes des Provençaux. Le Languedoc sort l’artillerie lourde. Jusqu’à Bordeaux qui, il y a peu, ricanait Ă l’Êvocation des clairets. Certains avaient gardĂŠ les secrets de fabrication et, bravement, gratifiaient les connaisseurs de quelques flacons. Nous pensons au clairet de Troplong-Mondot, par exemple. Et voilĂ que Bordeaux envahit, aussi, les marchĂŠs du rosĂŠ. Tout le monde s’y colle du plus grand au plus petit. MĂŞme les très grands. Ainsi, Haut-Brion, Giscours, Lafon-Rochet ou Clarke sortent bordeaux rosĂŠ ou clairet Ă qui mieux mieux. Faut-il comprendre que nous allons boire du haut-brion rosĂŠ ? Non. Il suffit de penser que ce sont les mĂŞmes qui ĂŠlaborent les grands vins et les rosĂŠs des domaines concernĂŠs. C’est dĂŠjĂ beaucoup. Pour tenter d’apporter une rĂŠponse adaptĂŠe, la Provence se met Ă produire des rosĂŠs haut de gamme, voire plus. Le rosĂŠ Ă 80 euros la bouteille ne vient pas des chais d’un premier cru classĂŠ du MĂŠdoc, mais d’une propriĂŠtĂŠ de Provence dont le moins qu’on puisse en dire, c’est qu’elle n’a pas une notoriĂŠtĂŠ ĂŠnorme. Trop drĂ´le. Nicolas de Rouyn


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$ % ! Dossier rĂŠalisĂŠ par Alain Chameyrat I photographie Fabrice Leseigneur

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efrain connu entre amateurs de vins, le rosĂŠ inspire au mieux la condescendance et plus souvent un dĂŠdain affirmĂŠ. Pire encore, il plaĂŽt au plus grand nombre et affiche des progressions quantitatives spectaculaires. Cet engouement du public renforce la conviction des hĂŠrauts du blanc et du rouge de s’Êcarter de ce rosĂŠ dĂŠcidĂŠment trop populaire. Certes, l’immense majoritĂŠ des flots de rosĂŠs qui couvrent les gondoles de la grande distribution dès le printemps n’a rien de palpitant. Toutefois, on pourrait en dire autant de bien des blancs et des rouges. Ces rosĂŠs vite faits, mal faits, Ă la teneur en soufre renforcĂŠe vous rappelleront leur misĂŠrable existence par la migraine du lendemain. Les arĂ´mes seront au mieux amyliques, bonbon acidulĂŠ, presque toujours simplifiĂŠs, voire inexistants quand ils ne sont pas vulgaires. En bouche, leur finale durcie interdit la notion de plaisir pendant la dĂŠgustation. Dans ces conditions, pourquoi expier le lendemain un plaisir fautif qu’on n’a pas eu la veille ? On en est arrivĂŠ lĂ par facilitĂŠ. L’absence de sĂŠlection des seuls raisins sains oblige Ă sur-soufrer. Les rendements plĂŠthoriques d’un vin vendu peu de temps après la rĂŠcolte diluent les saveurs. Et bien d’autres travers ont dĂŠtournĂŠ dĂŠfinitivement les amateurs sincères de ce rosĂŠ-lĂ . Mettons ces vins une bonne fois pour toutes au caniveau. Ce ne sont pas ceux que nous dĂŠfendons. Faisons place au rosĂŠ d’artiste qui nĂŠcessite pĂŞle-mĂŞle une technicitĂŠ pointue, du talent et l’envie de faire un grand vin. Il ne sera jamais un sous-produit qui a permis de concen

trer le vin rouge du domaine, objet de toutes les attentions. Il sera rĂŠalisĂŠ Ă partir de raisins destinĂŠs Ă faire du grand rosĂŠ et vinifiĂŠs dans cette seule optique. Il n’y a pas de modèle universel. Parfois tendre et dĂŠlicat, souvent de couleur pâle, parfois d’une intensitĂŠ de saveurs ĂŠblouissante, sa couleur est alors souvent plus soutenue. Le grand rosĂŠ montre des arĂ´mes et des saveurs nobles, expression olfactive et gustative d’un panier de fruits sains et mĂťrs complexifiĂŠ par d’envoĂťtantes senteurs florales. Sa finale, sans duretĂŠ de bouche, doit ĂŞtre dĂŠlicate, longue et complexe. Ă€ ces conditions, le rosĂŠ est le plus accommodant des vins quand on passe Ă table. Il accompagne la plupart des viandes quand il est intense, la plupart des poissons quand il est plus tendre. Il passera sur les prĂŠparations composites ou exotiques qui mĂŞlent les amers, les salĂŠs, les sucrĂŠs et mettent en dĂŠroute rouges et blancs. S’il vous faut apporter le vin qui conviendra Ă ce carrĂŠ d’agneau aux topinambours relevĂŠ de noix de coco et d’agrumes, n’hĂŠsitez pas. C’est un rosĂŠ qu’il vous faut. La plupart des cuisines asiatiques lui vont aussi Ă merveille mĂŞme si les asiatiques ne le savent pas eux-mĂŞmes. Ou pas encore. Nous vous prĂŠsentons dans ces pages une sĂŠlection des meilleurs rosĂŠs du Languedoc-Roussillon et de la Provence complĂŠtĂŠe par des rĂŠussites venues de vignobles plus au nord, de Bordeaux et du Sud-Ouest. La plupart des vins prĂŠsentĂŠs est Ă consommer jusqu’à cet automne. Quelques-uns, notamment les bandols, pourront vieillir harmonieusement jusqu’à l’automne 2012. Mais pourquoi attendre ? Pour tous ceux qui refusent la dictature de la pensĂŠe binaire, rouge ou blanche, le bon rosĂŠ est une troisième voie. Empruntons-lĂ quand elle est savoureuse.


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NOTRE PALMARÈS LANGUEDOC

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Michel Bettane et Thierry Desseauve sont les

Alain Chameyrat et VĂŠronique Raisin I photos Fabrice Leseigneur

auteurs du Grand Guide des Vins de France et conseillers ĂŠditoriaux de Terre de Vins. DĂŠgustateurs depuis plus de vingt-cinq ans, leur expertise pointue est reconnue dans tous les vignobles. Fins connaisseurs du Bordelais, leur expertise est très pointue sur la rĂŠgion des Graves. Alain Chameyrat est l'un des dĂŠgustateurs phare du Grand Guide des Vins de France En dĂŠgustateur chevronnĂŠ, il passe plusieurs mois par an sur place Ă la recherche des meilleurs vins et vignerons. Sylvie Tonnaire est rĂŠdactrice en chef de Terre de Vins. Observatrice privilĂŠgiĂŠe de l’Êvolution des vignobles du sud de la France, cette fine gastronome ne manque jamais de glisser un accord sur chaque vin qu’elle goĂťte. VĂŠronique Raisin est journaliste et dĂŠgustatrice. Voyageuse infatigable, elle parcourt les vignobles de l'Hexagone et ceux du monde entier.

" ) $, *H) GĂŠrard Sibourd-Baudry est le propriĂŠtaire des Caves Legrand, l'une des caves les plus emblĂŠmatiques de Paris, installĂŠe au cĹ“ur de la galerie Vivienne. A la fois cave, ĂŠpicerie fine et bar Ă vin, elle recèle des flacons Ă faire tourner les tĂŞtes. Egmont Labadie fait partie de la jeune gĂŠnĂŠration des dĂŠgustateurs. Journaliste pour Terre de Vins, passionnĂŠ des accords mets et vins, il vient de publier un guide de Paris des Meilleures adresses des amateurs de vin, son deuxième ouvrage après les Zinzins du Zinc. Jean-Alain Baccon est le sommelier du restaurant Kilimandjaro Ă Courchevel, dont il constitue la cave depuis 2001. S'il avoue un faible pour la Bourgogne, il s'intĂŠresse Ă toutes les rĂŠgions et tous les formats, et veille sur un millier de bouteilles... Xiaoning Dorra est une journaliste chinoise, native de Canton, amoureuse des vins français et diplĂ´mĂŠe de sommellerie. Correspondante pour deux magazines, elle collabore aussi au plus important site chinois d'information sur le vin.

" )H" * %$ Ce palmarès a ĂŠtĂŠ ĂŠtabli Ă partir des crus du Languedoc rouges les mieux notĂŠs dans le Grand Guide des Vins de France 2011 et d'une sĂŠlection de vins dĂŠgustĂŠs lors de la Semaine du MillĂŠsime qui s'est dĂŠroulĂŠe au printemps dernier dans le Languedoc. En plus des dix crus officiels, nous avons ĂŠgalement ajoutĂŠ des vins de Faugères et de Saint-Chinian, appellations phares qui nous ont semblĂŠ indispensables d'associer Ă ce palmarès. Les vingt-neuf vins prĂŠsentĂŠs des millĂŠsimes 2002 Ă 2009, sont tous disponibles Ă la vente, Ă partir de dix euros. Tous les vins ont ĂŠtĂŠ dĂŠgustĂŠs Ă l’aveugle. La note est la moyenne arithmĂŠtique des notes des dĂŠgustateurs.

Les vins dĂŠgustĂŠs et l'intĂŠgralitĂŠ des notations sont disponibles sur www.terredevins.com

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a hiĂŠrarchisation des vins en Languedoc vient de franchir une nouvelle ĂŠtape avec la crĂŠation des crus. Très en retard, la rĂŠgion doit mener cette dĂŠmarche complexe de classification au pas de charge. Elle n’a pas le mĂŞme recul que la Bourgogne qui a mis près d’un millĂŠnaire pour identifier ses terroirs, un puzzle de plus de 30 parcelles de grand cru, et plus de 500 premiers crus sans compter les innombrables climats dont le nom peut ĂŞtre accolĂŠ Ă celui des appellations. Le Languedoc s’est engagĂŠ dans la voie de la qualitĂŠ depuis 25 ans pas plus. Sans l’acharnement des moines bĂŠnĂŠdictins et des cisterciens bourguignons, mais avec des moyens techniques bien supĂŠrieurs, ce quart de siècle d’expĂŠriences qualitatives a permis au Languedoc de commencer la dĂŠlimitation de ses meilleurs terroirs. La pyramide de la qualitĂŠ en Languedoc commence par les indications gĂŠographiques protĂŠgĂŠes (IGP), nouveau nom des vins de pays. Qu’ils soient d’Oc, de l’Aude ou de l’HĂŠrault, ces IGP sont produits avec des rendements importants qui permettent des prix de vente raisonnables. Ils peuvent ĂŞtre gourmands et dĂŠpassent parfois le standard qualitatif que l’on attend. Les vins de pays d’oc mettent en avant leur gamme ÂŤ collection Âť qui lorgne rĂŠsolument vers le haut de gamme. Avec des contraintes supĂŠrieures aux IGP, viennent ensuite les AOC devenues AOP, appellations d’origine protĂŠgĂŠes. Le socle des AOP est la nouvelle appellation rĂŠgionale Languedoc. Le futur montrera si cette AOP Languedoc pourra fĂŠdĂŠrer tous les producteurs autour d’un nom fort, comprĂŠhensible Ă l’international. Le niveau supĂŠrieur est constituĂŠ par les appellations sous-rĂŠgionales qui regroupent des zones larges telles que les corbières, les minervois et d’autres. Curieusement, les coteaux-du-languedoc ne seront plus une appellation sous-rĂŠgionale mais se fondront Ă terme avec l’appellation rĂŠgionale. Au niveau encore supĂŠrieur, viennent les appellations communales circonscrites Ă un pĂŠrimètre resserrĂŠ tel que Faugères ou Montpeyroux. Au sommet de la pyramide qualitative languedocienne, dix crus de haute qualitĂŠ viennent d’être identifiĂŠs et sont l’objet de cette dĂŠgustation. Ils doivent rĂŠpondre Ă un cahier des charges exigeant et leur prix de vente doit ĂŞtre de 10â‚Źau minimum. Cette limite empĂŞche l’AOP communale Faugères de devenir l’un des nouveaux crus car la coopĂŠration commercialise sous ce nom d’importantes quantitĂŠs vendues Ă un prix bien infĂŠrieur‌ Pour des raisons similaires, Saint-Chinian n’a pas pu prĂŠtendre au classement en cru. Seules deux zones de la partie nord de l’appellation, Berlou et Roquebrun ont pu rejoindre la bande des dix crus. Notre dĂŠgustation a portĂŠ sur les meilleurs prĂŠtendants de ces nouveaux crus du Languedoc. Convaincus que Faugères et Saint-Chinian possèdent des terroirs et des vignerons d’exception, nous avons ajoutĂŠ de notre propre chef des reprĂŠsentants de ces appellations Ă la dĂŠgustation.


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ESCAPADE

AUDE (11)

Cabardès dans le 76

vent !


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AU PIED DE LA MONTAGNE NOIRE, L’AOC CABARDÈS ASSOCIE L’ENSOLEILLEMENT MÉDITERRANÉEN À LA FRAÎCHEUR OCÉANIQUE. UNE TERRE PROMISE POUR LA JEUNE GÉNÉRATION DES VIGNERONS SÉDUITE PAR CE VIGNOBLE AUX PORTES DE CARCASSONNE, LE PLUS OCCIDENTAL DU LANGUEDOC Par Iris Mour, photographies Emmanuel Perrin

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WORLD ESCAPADE

CHILI

L’ESPRIT

pionnier EXPLORATION DE NOUVEAUX TERROIRS, ACCLIMATATION DE NOUVEAUX CÉPAGES, DESIGN HALLUCINANT DES CAVES… LE CHILI VITICOLE SEMBLE INSATIABLE DANS SON ENVIE D’ENTREPRENDRE. DANS CE PAYS DES EXTRÊMES, AUX PAYSAGES STUPÉFIANTS, LA VITICULTURE, SANS RENIER SES CINQ SIÈCLES D’HISTOIRE, GARDE UN ESPRIT PIONNIER Par Michèle Trévoux

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e 13 mars 2011, à midi, dans la petite station balnéaire de Cartagena, à une centaine de kilomètres au sud de Valparaíso, sur l’océan Pacifique. La mer se creuse et les vagues prennent de l’amplitude. Pourtant, aucun signe d’effervescence au sein de la population, qui, dans quelques heures, devra évacuer les quartiers du bord de mer pour échapper à la réplique du meurtrier tsunami survenu il y a quelques heures au Japon. À tous les coins de rue ou presque, des panneaux indiquant le sens d’évacuation en cas d’alerte

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tsunami témoignent de l’omniprésence du risque sismique dans le quotidien des Chiliens. Idem dans la région des volcans, où les menaces d’éruption sont gaillardement placardées à l’entrée des zones à risques. Mince cordon de terre de 5 000 kilomètres de long arrimé entre océan Pacifique et cordillère des Andes, le Chili est façonné par les éléments naturels plus que par la main de l’homme. Et le peuple chilien s’en accommode : sans chercher à dompter cette nature sauvage,


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TENDANCE

LIEUX DU VIN

LA SÉLECTION D’EGMONT LABADIE

d’Epernay à New-York by Champagne C comme / E P E R N A Y

Flûte bar / N E W

La cave-bar de JeanNoël Pouille et Frédéric Dricot, qui présente les Champagne de cinquante vignerons indépendants de tout le vignoble, a fait peau neuve. Un bar plus grand, une cuisine ouverte, de vrais plats, un musée des « erreurs » de la Champagne, des concerts de jazz et des « mercredis avec les vignerons » viennent compléter une sélection de champagnes à la coupe qui permettent de comprendre les subtilités entre blancs de noirs, blancs de blancs, assemblages, rosés, et bien sûr les terroirs, de l’Aisne jusqu’à l’Aube. C comme, 8, rue Gambetta, 51200 Épernay. 03 26 32 09 55. Ouvert du dimanche au mardi, de 10 à 21 heures, du mercredi au samedi de 10 heures à minuit.

Après avoir désespérément cherché un endroit où boire un bon champagne dans une ambiance « lounge » à New York, Hervé Rousseau a ouvert dès 1997 sa première adresse, suivie d’une deuxième, en 2000, puis d’une autre à Paris, qui vient d’être refaite à neuf. La sélection sans œillères (de Charles Heidsieck à Moutardier en passant par Drappier, Paul Goerg ou Salon) et largement disponible à la coupe (en deux tailles) a fait le succès du Flûte Bar. Au point que trois autres adresses devraient ouvrir prochainement en France, et une à Londres. Flûte Bar NYC, Gramercy 40 East 20th street, 212 529 870 ; Midtown 205 West 54th street, 212 265 5169. Ouvert tous les jours à partir de 16 heures.

YORK

Call me bubbles

Terre de bulles

Bar à bulles Lavinia

PARIS

TROYES

LA DÉFENSE

L’ancien steward Marc Coquerelle s’est reconverti par passion pour le champagne et par frustration de ne pas trouver à Paris de bonnes bouteilles à la coupe. Il s’est donc lancé à la découverte du vignoble, a constitué sa sélection avec l’envie de faire découvrir des noms méconnus. Dans sa cave-bar, on déguste à la coupe toutes les cuvées de Dosnon-Lepage, son chouchou, et on peut ouvrir, moyennant un droit de bouchon raisonnable, des bouteilles d’Agrapart, Lepreux-Penet, Saint Gall, René Geoffroy ou Cattier. Le tout dans une super-ambiance ! Call me bubbles, 54, rue Custine, 75018 Paris. 06 48 27 14 76. Ouvert du mardi au samedi, à partir de 16 heures.

Troyes est un lieu de pèlerinage habituel pour toutes les familles désireuses d’acheter des vêtements à prix d’usine, mais bien peu savent que la ville est au cœur du vignoble champenois. Grâce au bar-boutique de Frédéric Sonzogno, l’oubli est réparé. Les références locales (Moutard, Devaux) côtoient les grandes maisons et les trouvailles (Peters, Chorlin, Brigandat, Petit Camusat) à des prix très proches du caveau, classées selon leurs arômes (floral, fruité, minéral, boisé, épicé). Terre de bulles, Village des marques, voie du Bois, 10150 Lavau. 03 25 43 03 32. Ouvert du lundi au samedi de 10 à 19 heures, et six dimanches dans l’année en périodes de soldes.

Le grand magasin Lavinia (dix adresses dans le monde) a ouvert en mars sa deuxième adresse française au cœur de La Défense. Pour créer une animation œnophile et festive, un bar à bulles sera actif pendant les périodes promotionnelles, avec la possibilité de boire une coupe de champagne en grignotant des tapas et d’acheter une bouteille à boire sur place ou à emporter. Pour y aller, il faudra malheureusement attendre septembre ! Bar à bulles Lavinia, Agora, centre commercial du CNIT, 2, place de la Défense, 92800 Puteaux. Ouvert en mars, mai, septembre, novembre, décembre, du lundi au samedi de 10 à 20 heures.

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CUISINE

REIMS (51)


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Champagne

canaille AVEC 450 RÉFÉRENCES À LA CARTE, LE CHÂTEAU LES CRAYÈRES FAIT FIGURE D’AMBASSADE DU CHAMPAGNE. PHILIPPE MILLE, SON NOUVEAU CHEF, SE DIT INTERPELLÉ PAR UN VIN QU’IL CONNAISSAIT PEU. IL LE PROUVE AVEC LES PLATS CANAILLES SERVIS À LA BRASSERIE « LE JARDIN », SECONDE TABLE DU RELAIS & CHÂTEAUX. COMPLICE, PHILIPPE JAMESSE, LE SOMMELIER MAISON, SE REVENDIQUE « MILITANT » DE LA BULLE Par Pasquale Festa Campanile, photographies Richard Sprang. Adresses en page carnet

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hilippe Mille est arrivé aux Crayères il y a un an. « Déguster, élaborer des plats autour du champagne..., cela a radicalement transformé la vision que j’en avais. Je connaissais le champagne comme apéritif ou vin de dessert. Aujourd’hui, si j’ai une certitude, c’est que le champagne n’aime pas les desserts, qu’il a horreur des œufs, de la crème et du chocolat. » Voilà qui est dit ! Le château Les Crayères, c’est « Le Parc », un restaurant gastronomique, et « Le Jardin », proposant une carte de brasserie. Facile au gastro d’accorder turbot, caviar et champagne. Exercice plus difficile avec des recettes bistronomiques. Et c’est ce que nous avons demandé au jeune chef, ancien second de Yannick Alleno au Meurice : marier champagne et plats de brasserie ! Il a poussé le défi jusqu’à la confrontation à une mayonnaise et à une purée d’herbes ! Mais Philippe Mille adore ce challenge. Il cisèle chaque plat en fonction des bulles. « Fines, grosses, rapides ou lentes, elles permettent d’innombrables accords, de jouer sur des textures différentes. » En écho, Philippe Jamesse affirme : « L’effervescence est l’ADN du champagne. » Chef sommelier aux Crayères depuis 2000, en Champagne depuis 1993, pour lui, « le champagne est un terrain de jeu formidable pour les accords mets et vins. Il y a toujours une possibilité différente, en fonction du

cépage, du style du champagne, du vieillissement, du taux de sucre ». Évidemment, Philippe Mille, à force d’essais, a ses préférences. Un Krug 98 sur un saint-pierre accompagné d’un beurre d’algues, d’une purée bien beurrée et d’un peu de caviar, lui vaut ce commentaire : « Face à l’iode du caviar et au côté gras du beurre, il faut un champagne puissant. Ce Krug s’impose. » Il ne dit pas non à un mariage viande rouge-champagne, citant un Krug rosé sur du bœuf poché. Ou un Comte Taittinger rosé sur un pigeon et liqueur de cassis : « Ça marche super bien. » Philippe Jamesse commence un repas par du champagne. « J’aime me mettre en appétit avec la salinité, l’iode. C’est un dynamiseur de goûts, il côtoie aisément les produits de la mer, le yuzu, le cédrat, le citron vert. Il donne un brillant écho aux câpres, à l’oseille, au fenouil, au céleri. » Les deux hommes se livrent aux mêmes exercices pratiques. « Une soirée par mois, deux vignerons nous présentent leurs vins, on les déguste et on réfléchit aux plats. Aucun ne doit prévaloir. L’harmonie est essentielle », souligne Philippe Mille. Philippe Jamesse insiste sur la nouvelle priorité des vignerons champenois. « Le souci du respect de la nature. Il y a désormais dans les bouteilles, l’émergence de ce qui se trouve dans le sol. L’effervescence est d’un niveau de pureté jamais atteint », juge le sommelier n

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TROPICAL COGNAC ! Cocktails 4 étoiles - Notre top 5 - 20 pages spéciales


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Les agités du cognac

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l’évidence, les grands cocktails continuent d’incarner un signe extérieur d’élégance dans le monde entier. Avec des noms de chevaux de courses, les cocktails ont très facilement épousé dans les années 20 le cognac, spiritueux de terroir pourtant aux antipodes des bars de nuit. Du jazz au rap, la communauté afro-américaine n’est pas étrangère à cette rencontre, achevant de populariser la consommation du cognac jeune en long drink dans les années 70 et 80. Depuis, l’eau-de-vie s’invite un peu

partout au gré des créations des barmans et du Bureau national interprofessionnel du cognac qui la promeut en cocktail, à l’instar du Summit (lire en p. 11). À l’effet d’un Molotov dans la mare, c’est le cocktail qui aura dépoussiéré l’image d’un alcool trop souvent associé au salon proustien avec l’épaisse carafe dorée, le cigare et les moustaches en guidon de course. Par Jean-Charles Chapuzet, photographies Alain Robert

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LA CUISINE CHAMPAGNE


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