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Le local, une invention d'avenir ? Table ronde.......................................5 • Jacques Deplace, Vice-président de la Communauté de communes du Pays de Saint-Félicien. • Béatrice Four, Maire de Colombier-le-Vieux. • Dominique Chardon, Président de Terroirs et Cultures International. • Eric Baraud, Terroirs et Cultures International. • Gilles Fumey, Géographe Paris Sorbonne. • David Maisonneuve, agriculteur à Colombier-le-Vieux. • Milad Akoury, Président de l’Union des Municipalités de Deir el Ahmar (Liban). • Richard Fesquet, AOP Oignon Doux des Cévennes.
Samedi 12 octobre Quel panier de biens et de services au Pays de Saint-Félicien ?.............. 45 • Des Mots d'Accueil Jean-Paul Chauvin, Président de la Communauté de communes du Pays de Saint-Félicien. • Panier de biens & services ? Un concept très concret !............................................47 Mehdi Moalla, Jacques Fanet. • Pistes ouvertes par l'enquête participative............................57 Christian Astier, Jean-Pol Badouard…
Méli-Mélo festif..................... 121 • Menu terroir. • Atelier musiques traditionnelles. • Théâtre (Félixval). • Ecole de Musique et Danse, Chantelermuze, Lo Gavelier, Parlarem en Vivarès.
Ressources en chemin de terroir................... 131 • Terroirs du Monde................................... 132 • Terroir du Pays de St-Félicien, des ressources, un chemin.................................................. 134 • Actions Terroir 2014…........................... 135 • Le Pays de Saint-Félicien.......................... 136 • Visites en Pays de Saint-Félicien.............. 140 • Mémoires en Terroirs, cultures d'avenir... 141 • Saisons de cultures................................... 142 • Le Printemps des Poètes........................... 143
Les textes que vous allez lire sont pour la plupart la transcription d'interventions orales. Ils en gardent la fluidité ou la répétition pour ne pas risquer d'en altérer le sens. Toute production comporte évidemment des erreurs, des oublis ou des impairs. Que le lecteur nous pardonne nos imperfections et participe à les corriger avec la bienveillance qui anime le projet commun du vivre ensemble. Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
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Jean-Paul Chauvin
e retiens de ce deuxième acte des « Entretiens du Terroir – Planète Terroir » du Pays de Saint-Félicien quelques mots simples : Simplicité, Convivialité, Beauté, Joie, Partage, Enthousiasme, Projets. Envie … de faire bien - de bien faire … de rendre service … de servir … ses habitants, son économie, ses diversités, le Terroir. Envie donc de défricher de nouvelles pistes de développement endogène. Votre volonté d’agir avec Terroirs & Cultures International pour trouver des réponses, pour prouver qu’il existe des alternatives possibles pour des territoires sans richesse apparente m’a marqué. Elle a pris corps sur des points d’ancrages essentiels. Mobiliser les représentants des collectivités locales, les acteurs socio-économiques et environnementaux. Interpeller la puissance publique sur la démarche innovante de Terroir. Communiquer sur de tels enjeux. Faire le lien avec les dimensions bio-culturelles et toutes les ressources immatérielles du territoire. Prouver que chaque « local » et en particulier celui du Pays de Saint-Félicien a des atouts même si les handicaps semblent si lourds. Vérifier la force des énergies communes et collectives. Rassembler les hommes et les femmes qui se veulent partie prenante de leur devenir. La qualité des personnes impliquées dans cette démarche saute aux yeux. Elles sont pétries d’enthousiasme, de détermination, d'esprit entrepreneurial et par dessus tout, de leur amour de leur terre, de leur village, de leur métier, de leur profession, de leur terroir. Dans un esprit d'ouverture et surtout pas de repli identitaire. Apportant leur pierre à la construction d'un avenir désirable qui n'attend pas les décisions improbables des donneurs d'ordre nationaux ou internationaux aveuglés par les notions de ratios et de seuls résultats financiers. Et pourtant, réaliste face à l’ampleur des défis économiques, sociaux et environnementaux à relever. Après les phases de recherche, de détection, de vérification, il me semble aujourd’hui crucial que le Comité de Pilotage, autour de Jacques Deplace, son si délicieux animateur, prenne la voie de la réalisation autour des composants de votre « Panier de biens et services». Il mérite large appropriation, consolidation territoriale et valorisation. Il vous est nécessaire de commencer à pousser plus loin la caractérisation des produits de votre Terroir, à les amener vers l'excellence, à protéger l’origine et les savoir-faire, à les relier, à les promouvoir communément et bien sûr à les commercialiser, au moins pour les premiers. Oui, il faut encore marcher. Reprendre le bâton, avancer avec des objectifs communs. Comme chaque matin avec l'espérance chevillée au cœur. Avec joie et enthousiasme pour surmonter les épreuves du chemin. Elles ne manqueront pas. Mais, beaucoup sont surmontables si l'amitié et la convivialité deviennent force et énergie pour le projet. La confiance mutuelle éclaire alors la route pour aller, pas après pas, dans le sens de l’intérêt général et du bien commun partagé. C'est toujours le secret de réussite des équipes gagnantes. Avec le soutien des équipes de Terroirs et Cultures International heureux de participer à cette marche des acteurs de Terroir du Pays de Saint-Félicien.
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ans la suite logique des premiers entretiens du terroir du Pays de SaintFélicien, qui ont eu lieu à Saint-Victor en 2012, la deuxième édition s’est tenue les 11 et 12 octobre 2013, à Colombier-le-Vieux. Notre Pays, situé au cœur du Haut-Vivarais, a ses particularités. Sa richesse se trouve dans sa diversité. Diversité des cultures agricoles, diversité des paysages, tantôt de bois et forêts, de montagnes et de vallons, diversité des activités en général. Ce territoire compte des hommes et des femmes volontaires et audacieux. Après quelques années marquées par l’exode rural, les habitants de notre territoire ont pris leur destin en main. Ils ont la volonté de faire vivre ce Pays. Ils souhaitent valoriser les savoirfaire locaux pour que l’on y reconnaisse un terroir. La valorisation du terroir passe par la reconnaissance des atouts et des richesses dont dispose le territoire. En matière agricole, il est facile de constater, par exemple, que la saveur et la conservation des fruits, notamment cerise et abricot, sont bien supérieures en montagne qu’en plaine. Il en est de même pour le vin, qui est généralement supérieur en coteau qu’en plaine. Il ne s’agit pas que de pratique ou de savoir-faire liés à l’agriculture, mais également de ceux très nombreux liés à l’artisanat, à la culture, ou la manière de vivre. Nous sommes conscients des avantages du Pays de SaintFélicien. Situé dans un environnement de qualité, à proximité des grands axes et des grands centres urbains, ce territoire conserve une très grande attractivité que nous essayons de faire reconnaître. Revenir à la notion de terroir, consommer local, n’est pas un repli sur soi, mais une ouverture aux autres. Cette démarche s’accompagne bien entendu d’une grande volonté de la communauté de communes d’aller vers la modernité et notamment vers le développement des nouvelles technologies que sont la téléphonie mobile et le réseau internet haut débit. Le souhait que nous avons, de partager le bonheur de vivre ici, se traduit par notre volonté d’accueillir de nouvelles populations, si possible porteuses de projets. La communauté de communes du Pays de Saint-Félicien est enthousiaste à l’idée de participer à la reconquête du passé oublié ou perdu, des pratiques ancestrales qui ont fait l’originalité, la particularité d’un petit territoire, et enfin de faciliter l’émergence d’un terroir.
Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
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Vendredi 11 octobre
Dominique Chardon
Président de la Communauté de communes du Pays de Saint-Félicien
• Béatrice Four, Maire de Colombier-le-Vieux • Jacques Deplace, Vice-président de la Communauté de communes du Pays de Saint-Félicien. • Dominique Chardon, Président de Terroirs et Cultures International.
…Pascal Magnier, Damien Mathieu, Daniel Rouchier, Rémy Sapet, Luc Sovignet. • Lire et vivre le pays...............................80 Isabelle Thomas, Marc Nouaille. • Culture : lien d'avenir…la main dans le panier… .................................................87 Myriam Gery, Françoise Descaillot. • Un terroir à construire.........................90 Jean-Pol Badouard, Alexandre Buisson, Vincent Hariche. • Un espace à ménager............................93 Christian Astier, Nelly Chateau. • Esquisse d'une transition écologique......100 Pascal Magnier. • Le panier de biens et services du Pays de Saint-Félicien...........................104 Jacques Deplace, Eric Barraud, Denis Germain. • Regards croisés...................................108 Jacques Deplace, Milad Akoury, Sylvette Beraud Williams, Gilles Fumey, Eric Barraud.
Président de Terroirs & Cultures International
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Des Mots d'Accueil
Maire de Colombier-le-Vieux
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Vice-président de la Communauté de communes du Pays de Saint-Félicien
Octobre 1713, naissance de Denis Diderot, l’animateur de « l’Encyclopédie » et d’une équipe de chercheurs en connaissances et savoir-faire, à lier, à relier, à diffuser. Il décrit dans la « Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient » la richesse des perceptions par ceux-là mêmes, qui, pour une part, en sont privés. Comment voyonsnous le monde ? Comment le percevonsnous ? Comment pouvons-nous partager nos points de vue ?
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ctobre 2013, nous voici rassemblés pour ces deuxièmes Entretiens du Terroir qui s’inscrivent sur un chemin que nous avons ouvert il y a deux ans. Mais le temps court ne doit pas nous aveugler sur le présent et les multiples chemins déjà ouverts par quelques explorateurs. Pour en rester aux correspondances de dates, qui stimulent la mémoire :
Octobre 1813 naissance de Guiseppe Verdi, musicien, compositeur d’opéras dans une Italie naissante cherchant son unité dans les interstices des divisions séculaires. La voix humaine répond au violon ou à la trompette ; et le chœur en ses multiples voix compose une expression d’humanité en fragile chemin d’harmonie. Octobre 1913, naissance d’Albert Camus, déchiré dans son Algérie natale qui dit aux
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humains de son temps et à ceux qui suivent que « mal nommer les choses participe à augmenter les malheurs du monde ». On se laisse parfois aller à des querelles de mots mais ne sommes-nous pas des êtres parlants qui devont toujours tenter de s’accorder sur les mots et le sens de nos actions ? Octobre 2013, nous y sommes, vous venez d’entendre en ouverture quelques morceaux de musique des Andes interprétés par le groupe Los Chacos qui a quelque ancrage en notre Pays . Dans les années 70 ces joueurs de kena, guitare ou charango ont ouvert nos oreilles à d’autres continents, fait le lien entre les Andes et l'Europe, Antonio Vivaldi ou Jean Sébastien Bach … avant-hier, ils ont donné un concert à Villeurbanne … ils en avaient donné un à Saint-Félicien en 1975 … vitalité des musiques du monde …. Octobre 2013, nous continuons à explorer la clé des sols et des milieux de vie, nous continuons à inventer ensemble la partition du terroir du Pays Saint-Félicien. C’est ce que va introduire Eric Barraud, délégué général de Terroirs & Cultures International. Auparavant, dire merci à la commune de Colombier le vieux qui nous accueille par la voix de Madame le Maire, Béatrice Four …
Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
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onsoir à tous.
Tout d’abord, je tiens à vous souhaiter la bienvenue à Colombier-le-Vieux, à ces 2èmes Entretiens du Terroir initiés par la Communauté de communes du Pays de Saint-Félicien que je tiens vivement à remercier. Quand Jacques Deplace m’a proposé de faire le mot d’accueil, je me suis demandée comment faire une présentation de Colombier tout ça en lien avec cette 2ème édition des Entretiens du Terroir : Alors, j’ai retenu quelques mots en référence au thème de cette année : Paniers de biens et services, peut-on espérer le remplir à Colombier ? Et le mot culture… Alors Colombier, un des 7 villages de la Communauté de Communes du Pays
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Jacques Deplace
de Saint-Félicien, situé entre 2 rivières : Le Doux et La Daronne. Un village dynamique avec 662 habitants, une école publique, des commerces de proximité essentiels à la vie du village, où il fait bon se rencontrer, échanger, tout simplement de formidables lieux de vie. Colombier, c’est aussi de nombreux artisans : maçon, garagiste, plombier pour en citer quelques-uns. Un tissu associatif important : associations sportives, culturelles et bien d’autres. Je ne peux parler de Colombier sans parler de culture, à double titre. Culture comme culture de la terre. En effet, l’agriculture y est bien présente, des jeunes agriculteurs, des exploitations de différentes tailles : des petites ou des grandes. Une agriculture variée : des producteurs de fruits, de légumes, des produits transformés, des élevages. En tout cas, tous sont indispensables à la préservation et au devenir de notre territoire. Et enfin le mot culture, synonyme d’ouverture aux autres, de lien social, qui raisonne tout particulièrement à Colombier avec l'association culturelle et l'Ecole de Musique. Voilà, en quelques mots Colombier, un panier bien rempli !
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Béatrice Four
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Des Mots d'Accueil
Alors maintenant, je vais vous souhaiter une bonne soirée.
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Entretiens du Terroir vendredi 11 octobre 2013
Le local, une invention d'avenir ? Table ronde
Colombier-le-Vieux
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Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
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Jacques Deplace / Eric Barraud.
Intervenants Gilles Fumey, Dominique Chardon, Richard Fesquet, David Maisonneuve.
Introduction
Eric Barraud
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Délégué Général Terroirs & Cultures International
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erci Madame le Maire pour cet accueil qui ouvre les 2èmes Entretiens du Terroir du Pays de Saint-Félicien. L'année dernière, au mois d'octobre aussi, nous étions à Saint-Victor et pour nous à Terroirs & Cultures International, c'était la première manifestation de notre partenariat avec la Communauté de communes du Pays Saint-Félicien. Avec le Comité de pilotage du projet teroir autour de la Communauté de communes, nous avons voulu introduire ces Entretiens par une table ronde dont le titre a provoqué, parmi nous, beaucoup de discussions « Le local : une invention d'avenir ? ». Notre choix illustre cette volonté de lier l'ici d'aujourd'hui à un demain à construire. Il nous a semblé utile de réunir des personnes qui des Costières de Nîmes à Deir El Ahmar au Liban en passant par les Cévennes … et Colombier-le-Vieux nous aident à penser le territoire du Pays de Saint-Félicien. Je vais donc présenter les intervenants de la soirée autour de cette table ronde. D'abord parce qu'il est juste à côté de moi, Gilles Fumey, notre fidèle géographe, qui nous a déjà accompagnés lors de la première édition. Il est géographe de l'alimentation à l'Université de la Sorbonne à Paris. Nous allons pouvoir profiter encore ce soir de tes analyses et de ton regard. Tu as écrit quelques livres, qui seront présents demain à la table du libraire. Tu es un peu l'expert confiné, comme dirait Jacques, ce soir et on a quatre experts de plein air. Certains viennent de loin et d'autres de tout près. C'est le cas de David Maisonneuve, je n'ai pas eu la chance de visiter son exploitation, mais apparemment, elle est à quelques pas d'ici, c'est un éleveur de bovins lait, qui s'est lancé dans l'élaboration de yaourts fermiers. Donc, il va, ce soir, nous expliquer son histoire, la raison de sa mutation, parce que je
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crois que derrière, il y a une mutation, et comment le local a pu lui être utile dans cette mutation. Ceux qui étaient là l'an dernier se rappellent qu'on avait fait venir un terroir, je vais dire un terroir témoin, un terroir extérieur pour nous faire part de son propre travail, et de la dynamique qu'il menait et on avait fait venir le terroir d'Aubrac. L'expérience avait été appréciée et en comité de pilotage, on m'a demandé si dans tout le réseau qu'anime Terroirs & Cultures et dont Dominique parlera, on avait un terroir qui serait intéressant de faire témoigner. Et il se trouve qu'on a été sollicité par un terroir gardois (Dominique et moi nous sommes du Gard) qui fête aujourd'hui, les dix ans de son appellation d'origine contrôlée, c'est l'oignon doux des Cévennes. Et donc Richard Fesquet est, je peux le dire, jeune agriculteur, et président de cette appellation d'origine contrôlée. Avec Dominique, il y a une vingtaine d'années, on avait beaucoup œuvré pour l'émergence de cette appellation, après notamment ce qu'on avait créé et qu'on a retrouvé ici et qu'on voit un peu partout c'était la fête de la transhumance, à l'Espérou. Pour ceux qui ne connaissent pas, c'est tout à côté du Mont Aigoual. Cette fête de la transhumance qui est une transhumance ovine avait permis de largement valoriser, notamment avec les parents de Richard, le terroir des Cévennes et l'oignon doux qui
est un emblème très fort de ces Cévennes. Et, donc, je proposais qu'il puisse être là ce soir, à la fois pour témoigner de son expérience à l'occasion de ces dix ans mais aussi pour qu'il puisse vous présenter l'impact qu'a eu cette appellation d'origine sur l'économie locale des Cévennes. En quoi le fait d'avoir ce signe officiel de qualité, puisque nous avons bien un
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Animation
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signe de qualité a-t-il permis d'installer des jeunes, de maintenir une vraie vie rurale ? Donc il vous présentera tout cela tout à l'heure. Je sais qu'il y en a qui viennent de tout près mais d'autres viennent de vraiment loin, et donc à la droite de David, vous avez Milad Akoury, président de la Communauté de Communes de Deir el Ahmar. C'est sur les contreforts de la Bekaa, au Liban, où il était ce matin. Il
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du Terroir. Dominique est agriculteur bio, je crois qu'il préfère d'ailleurs que je dise paysan bio (mais il pourra, peut-être, s'expliquer sur ce terme) à Bellegarde dans le Gard. Pour vous situer, c'est entre Nîmes et Arles. Il fait des cultures méditerranéennes, c'està-dire, du vin, de l'huile d'olive, des fruits et des légumes et un tout petit peu d'élevage mais ça il pourra le dire. Donc il a créé, fondé, serait le terme le plus juste, l'association Terroirs & Cultures, il y a aussi dix ans, jour pour jour, quasiment. Pour exprimer une autre vision du local et montrer le message que dans ces territoires difficiles sur le Pays de Saint-Félicien où on est aujourd'hui mais aussi dans les Cévennes, pour ceux qui veulent venir, vous comprendrez, c'est comme à Saint-Félicien, comme à Deir el Ahmar à 1000 mètres d'altitude. Sur ces territoires, il y avait des hommes qui avaient envie de vivre de leur métier, qui étaient fiers de ce qu'ils faisaient et qui voulaient créer, résister, faire quelque chose de beau chez eux, de beau pour eux et de beau pour les populations. Il nous semblait que cette approche terroir qu'il va nous expliquer pouvait être un des outils, non pas le seul outil mais peut-être modestement un des outils qui permettrait de maintenir, justement, des hommes et des femmes debout sur des territoires. L'Entretien du Terroir, comme on en fait dans bien d'autres endroits, est un lieu d'expression et de construction de ce terroir pour créer de l'économie et de la valeur ajoutée locale qui est tout de même la base du maintien des hommes sur le territoire. Je vais lui laisser, tout de suite, la parole pour qu'il puisse un peu plus préciser mes propos. Dominique, tu as la parole.
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Dominique Chardon Président Terroirs & Cultures International
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'an dernier, je n'ai pas pu participer aux Entretiens, aux premiers Entretiens mais j'ai lu le document, le récapitulatif, la synthèse de ces travaux. C'était magnifique. Et, je l'ai distribué. On ne m'en a pas donné beaucoup… trois ou quatre. Je n'en ai plus, j'en réclame, s'il en reste un, cela me fera plaisir. Mais ce document était magnifique, Jacques. Je l'ai présenté et il donnait déjà sens, comme ce soir. Ici avec les visages que je vois en face de moi, parce qu'il y a des sourires. On se sent bien. On se sent d'autant mieux ce soir qu'il y a une ambiance.
Terroir …
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lors le mot terroir, il faut s'en méfier, ce n'est pas de la nostalgie, mais ça sent ici le bon terroir du Pays de Saint-Félicien que vous êtes en train de construire. Parce qu'il y a l'ambiance, c'est fabuleux. D'abord, il y a les châtaignes qui rappellent le pays. Et il y a le bois, le pain, je ne vois pas tout mais il y a, quand même, Madame le Maire, une bonne partie du panier de biens et de services de ce beau pays. Alors, je voudrais tout d'abord et à la fois brièvement, remercier, à la fois, le président de la Communauté de
Communes, les maires, je crois qu'il y en a plusieurs dans cette salle, parce que si ça se fait c'est qu'une initiative a été prise, donc on y est sensible. Je voudrais aussi remercier Jacques et Eric mais aussi tout le comité de pilotage. Alors Jacques et Eric travaillent à l'élaboration de cette méthode, dont on va peut-être un petit peu parler, mais on va surtout parler des Entretiens. Ils sont tous les deux des chevilles ouvrières de cette méthode que nous avons appelée « Chemins de terroir », et je dois dire que c'est un travail qui suppose non seulement une réflexion mais aussi avoir une grande expérience. Et donc, en particulier, Jacques, je voulais te remercier parce qu'on s'est retrouvés sur ce chemin, on a dialogué, on a marché et puis ce soir... cette salle pleine... cette ambiance, cela fait plaisir parce qu'on s'aperçoit qu'il y a des hommes et des femmes qui sont capables de se lever et de dire non à une seule forme de développement. Et nous réclamons là aussi la diversité, la pluralité des formes de développement alors que ce n'est pas toujours le cas dans nos pays et pas seulement dans nos pays. Milad pourra le dire et d'autres aussi puisque, en fait, le développement est surtout pensé plus haut et peu au niveau local. Et l'originalité de la démarche que nous avons faite, toute une équipe, c'est d'abord de nous retrouver, venant de tous horizons, de tous âges (intergénérationnel), mais aussi avec une expérience propre à chacun d'entre nous dans le local et dans les métiers. Nous avons aussi bien des paysans, des boulangers que des architectes, des chercheurs, il y en a, et également des historiens, des géographes, et il en faut. Nous avons donc la possibilité dans les échanges de mieux nous comprendre mais aussi d'élaborer cette méthode.
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a quitté son village, Deir el Ahmar, pour être avec vous ce soir. Il fait le voyage spécialement pour venir au Pays de SaintFélicien. Pour voir comment, à SaintFélicien, vous portez cette idée de terroir, comme il essaie de le faire, lui-même, avec son comité de pilotage, dans son village Deir el Ahmar au Liban, en montagne, où Jacques Deplace était avec moi, il y a deux ans pour démarrer l'action. Comme vous, c'est en montagne même un peu plus haut en altitude, avec les difficultés, j'allais dire, socio-politiques qu'on connait en ce moment sur cette zone. Il va venir s'inspirer de votre expérience pour essayer de faire quelque chose avec vous. Vraiment Milad, je suis très ému en plus de vous recevoir car avec Jacques, on a fait le voyage, il y a deux ans. C'est quelque chose dont on est très fier à Terroirs & Cultures de pouvoir accompagner des territoires comme le vôtre. Merci beaucoup d'être venu et puis merci de pouvoir, nous faire part de votre expérience. Alors, il restera avec vous jusqu'à dimanche parce qu'il est à 1000 mètres d'altitude et il a des pommes et il m'a dit : « mince, c'est la foire aux pommes à Pailharès et il faut absolument que j'essaie de voir si je ne peux pas ramener quelques idées ... » Et il passera aussi, rassure-toi Rémy, par Nectardéchois, si on veut faire quelque chose, il n'y a pas de problème. Voilà, donc merci beaucoup Milad. Vous pouvez l'applaudir car il est parti tôt ce matin pour s'envoler de Beyrouth,. On est un tout petit peu en retard, car pour vous dire toute la vérité : arrivé à Tain l'Hermitage, vous savez quand vous venez du Liban, ce n'est pas si facile que ça, il a oublié de descendre et on l'a récupéré à Valence. Venu de Beyrouth, c'est déjà un très bel effort. À sa droite, vous avez Dominique Chardon, on en avait déjà parlé l'an dernier dans le cadre des Entretiens
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lors dans la méthode, il y a des étapes, et une des étapes bien sûr c'est de construire d'abord un comité de pilotage, ça a été fait en son temps. Et puis avec « les personnes ressources » du pays et qui vont aider à construire ces chemins de terroir. Et puis il y a effectivement, comme ce soir, des Entretiens du Terroir. Les Entretiens du Terroir c'est un événement, un temps de réflexion pour échanger entre nous, pour vérifier
les travaux qui ont été réalisés et vérifier si ce chemin nous conduit véritablement à la construction puisqu'on est bien dans la construction du terroir. Alors certains vont penser tout de suite, pensent que c'est totalement utopique. Pour nous, on s'est dit : « en cette période de globalisation et de mondialisation, qu'est-ce qu'on fait ? On attend quoi ? On attend que l'État nous aide, que les subventions tombent ?». Je pense, je ne veux pas en rajouter, qu'en ces temps de mondialisation on a également une globalisation, je pense qu'on recrée une relocalisation. Et c'est le défi auquel nous sommes, vous êtes confrontés :
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comment faire vivre nos territoires ? Surtout des territoires qui sont à handicap naturel fort, qui ont moins de chance que d'autres. Ceux qui ont par la nature, par l'environnement de larges possibilités, proches des capitales avec des terres merveilleuses, avec un développement économique (pas garanti, il n'est plus garanti nulle part) mais facile à faire. Et il y a les autres ceux qui sont comme ici, comme à Deir el Ahmar, dans la montagne à 1000, à 1500 mètres, avec parfois deux mètres de neige l'hiver. Sur les Cévennes, on pourrait parler d'une grande partie de nos territoires qui sont exclus naturellement de ce que moi j'appelle, pour aller vite, du quantitatif et qui ne pourront jamais entrer dans la production de masse, et peut-être heureusement d'ailleurs. Ils ne seront pas dans une économie du volume pour aboutir à un volume diviseur de charges pour produire au moindre coût.
Valeur ajoutée … en humanité …
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ais ces territoires vont être obligés de construire, heureusement, de la valeur ajoutée. Ils vont être capables par les communautés humaines qu'ils représentent, de construire dans ces lieux précis une économie mais aussi une vie sociale, des relations humaines. Ils vont permettre de nous retrouver humains dans une économie qui a tendance à penser que finalement, il n'y a que le rendement financier. Et, chez vous,
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chez moi et ailleurs, ce n'est pas cela qui marche. Le rendement financier n'est pas au rendez-vous et peut-être heureusement encore. Donc notre démarche est celle-ci, si nous ne prenons pas la parole, si nous ne disons pas aujourd'hui dans ce monde que nous avons, nous aussi, des idées, que nous avons aussi la capacité de répondre à des défis. Ces défis sont énormes, il faut être capable de rassembler, comme on le fait, ici, ce soir, pour que des artisans, des paysans, des commerçants, des enseignants, des chercheurs, des historiens soient capables de faire vivre le pays, de donner du sens à l'activité, et de permettre aussi au terroir de rappeler que l'origine est aussi une valeur importante. Cela ne se fait pas en cinq minutes, nous avons de belles expériences, j'ai entendu tout à l'heure qu'il y a eu, l'an dernier, la présentation du terroir d'Aubrac, ceux qui connaissent savent ce que cela représente, mais je voudrais dire en conclusion qu'il y a toujours une possibilité de développement lorsque des hommes et des femmes sont capables de se retrouver comme ce soir, ici, à Colombier-le-Vieux, de se soutenir, de présenter les défis et de les affronter. La dernière chose que je voulais ajouter c'est que les Entretiens du Terroir, c'est aussi rendre visible, ceux et celles ou celles et ceux, qui sont là, debout. Vous êtes là ce soir, même assis, vous êtes debout pour votre terroir et pour le développement de ce pays … Merci à tous.
ce n'est pas encore très clair, que nous sommes engagés dans un processus. C'est vraiment un projet en cours d'élaboration. Dominique a parlé de comité de pilotage, comme son nom l'indique, son rôle est de piloter le projet. Notre tâche est, probablement après ces deuxièmes Entretiens et avant les troisièmes l'an prochain, notre tâche est d'en poser quelques pierres autour de ce « panier de biens et de services » dont nous parlerons surtout demain. Je n'en dis pas plus, c'est simplement pour indiquer que c'est un processus. qui passera évidemment bientôt à une phase plus concrète d'actions. Vous voyez sur la table un globe terrestre alors on pourrait dire qu'ils ont mis un globe parce qu'ils ont envie de dominer la terre. Vous savez, dans le Dictateur, on voit Charlot qui fait monter son ballon illustrant la volonté de maîtriser le monde. Mais vous voyez que la lumière, ici, vient de l'intérieur, discrète, voilà c'est ce que nous pouvons créer pour éclairer au mieux le monde où nous vivons et que nous souhaitons faire le plus harmonieux possible. Ce soir, la table ronde a comme objectif d'introduire aux échanges de
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… en chemins …
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Le local, une invention d'avenir ?
Jacques Deplace
Vice-président Communauté de communes Pays Saint-Félicien
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e sont nos Entretiens n°2, ce qui indique qu'un an après la première édition, on peut percevoir, même si
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Le goût de l'autre
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'est un livre d'économie.
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« Acheter du pain c'est un acte économique pas seulement parce qu'il permet de satisfaire dans le besoin physique de nourriture mais plus fondamentalement parce que derrière cet acte banal et quotidien, il y a toute une manière d'organiser la société (qui a produit le pain ? dans quelles conditions de travail ? avec du blé local ou importé ? bio ou pas ?), de penser le lien social (l'acheter chez le boulanger avec qui on échange les nouvelles du quartier, ou tout simplement quelques mots et un regard n' a pas le même impact que de le prendre dans un rayon de supermarché)… … L'économie apparaît comme un lieu où se construit la société. Évidemment, elle est concernée par les besoins, les biens. Mais sa finalité première est au-delà, elle sert avant tout à penser le vivre ensemble … … Associée au vivre ensemble, l'économie devient ainsi un lieu d'alliance et pas seulement de contrat, un lieu de confiance et pas seulement de stratégie, un lieu d'utopie et pas seulement de technique. »
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Alors, oui, le projet terroir du Pays de Saint-Félicien est aussi économique, nous en parlerons mieux ou plus, demain. « Le local, une invention d'avenir ? » C'est le titre que nous avons choisi après discussions poussées dans le Comité de pilotage. Pour introduire , je poserai trois petites questions et chacun des intervenants va répondre à sa façon, avec son expérience et il peut aussi reformuler ou refuser les questions. Ça fait partie du jeu. Il peut démonter les questions qui ne lui paraissent pas pertinentes, on n'a pas assez l'habitude de démonter les questions qui ne sont pas pertinentes. On voit que notre démocratie a besoin d'être alimentée par le refus des questions non pertinentes, ce qui suppose de donner vie au débat et à son organisation.
Un local local ? Un local bocal ? ou un local global ?
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n local local ? Une notion qui semble exprimer la maîtrise de notre vie, de notre petit territoire, comme en réaction à la phase actuelle de mondialisation mais nous risquons le local bocal. Nous respirons aux vents du monde et nos façons de vivre ici, nos décisions politiques ou d'entreprises sont déterminées aussi par ce qui se fait et se décide ailleurs, en d'autres lieux, à d'autres niveaux dans d'autres histoires. Évitons de nous étouffer dans notre bocal. Ne reproduisons pas le genre d'émission C dans l'air qui, malgré ses qualités et sa grande diffusion, est dans l'air d'un bocal avec un panel d'intervenants bien étroit … le local bocal nous guette aussi. Alors le local global ? Nous pourrions voir notre local comme l'expression sur notre territoire d'un flux d'humanité qui produit
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ici des effets, ailleurs des effets différents en multiples pays du monde. Mais si ces expressions différentes à Deir el Ahmar, près du Vigan dans les Cévennes, à Colombierle-Vieux, au Pays de Saint-Félicien, en Aubrac, si ces expressions différentes étaient les expressions d'un même flux d'humanité qui surgit ici ou là de façon qui nous paraît étrange ? Mais nous savons que les étrangers ne sont étranges qu'à nous, Étranges étrangers, merci Jacques Prévert. J'espère que demain soir il y aura Étranges étrangers, vous savez que tous les chemins mènent à Rome mais tous les chemins des Roms ne rencontrent pas la fraternité. Et si ces expressions différentes étaient partageables par enrichissement mutuel pour l'invention permanente de l'avenir plus harmonieux. Donc le local peut mettre au monde l'avenir, c'est un peu notre titre, à condition que … à condition que … ce n'est pas moi qui vais répondre, Gilles Fumey, qui démonte pas mal les questions et ouvre quelques pistes de réponses.
Gilles Fumey
Géographe Paris Sorbonne
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e local... Il faut que je précise un certain nombre de choses puisqu'on m'a affublé de gros mots à côté de mon
nom. Paris, je suis désolé, je ne suis pas de Paris, quand on vient de Paris en Ardèche.. Je suis parisien depuis quelques années, d'adoption, d'obligation, de je ne sais quoi. Quand j'ai dit à mes enfants que j'allais à Colombey-les-Deux-Eglises, ils m'ont dit : « mais tu te fous de nous parce que Colombey-les-Deux-Églises c'est en Lorraine, tu dis que tu vas en Ardèche ». Je suis désolé, j'avais confondu Colombier-le-Vieux et le Neuf, le Jeune. Mais finalement, ce n'est pas mal, Madame la Maire, si, un jour, vous pouvez faire une Communauté de Communes de tous les Colombier du coin, je pense que ça permettra d'aborder cette question du local qui est toujours à revoir en fonction des échelles dans lesquelles on se place.
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demain où nous allons réfléchir sur nous, sur ce que nous sommes, sur ce que nous avons comme ressources, ce que nous avons à faire. C'est surtout ce soir s'ouvrir un peu au monde, voilà pourquoi la question sur le local est une question de tensions entre un ici et un là et là-bas. Pour introduire, je vais citer une personne que nous prévoyons d'inviter l'an prochain, Elena Lasida , une économiste qui enseigne à l'Institut Catholique de Paris. On va l'inviter sur la question de la richesse dont il nous semble devoir redéfinir le contenu. Elle écrit ceci dans un livre qui s'appelle,
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De la Sorbonne …
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'autre gros mot, c'est Sorbonne. Étant d'un village de 300 habitants, la moitié du vôtre, une toute petite commune de 1600 ha, on est vraiment dans un endroit complètement perdu. Quand j'étais gamin on gardait des vaches, dans un hameau qui s'appelait la Borbonne. Et comme c'était en 68, avec les autres gamins, on avait renommé ce lieu-dit la Sorbonne. Quand mon grand-père, un jour, m'a dit : « toi tu pourras parler lorsque tu seras à la Sorbonne ». Je me suis dit : « finalement je vais prendre la forteresse » et je me suis senti très vite à l'aise, finalement j'ai pu faire le lien simplement et complètement ...désamorcé tout ce truc. En revanche, ce qu'on a pu faire à la Sorbonne et à Paris c'est quelque chose, qui est justement une réflexion que vient de présenter Jacques sur le local et le mondial. J'ai réussi à monter un Master Alimentation dans une université où on ne parle que de l'épigraphie romaine au IIIème siècle.
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… à Puy-Guillaume et ses lascars …
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'ai eu l'occasion l'année dernière, durant l'année qui nous sépare de ces Entretiens de Terroir, de rencontrer Michel Charasse que certains connaissent parmi vous, pour avoir été ministre du budget et maire de Puy-Guillaume dans le Puy-de-Dôme, de 2700 habitants. J'étais intéressé par ce personnage non pas parce qu'il fume des cigares et qu'il est finalement assez grossier, ce n'est quand même pas un personnage toujours très sympathique même si Mitterand l'aimait beaucoup. Mais Charasse avait eu, un jour, lorsqu'il était ministre du budget, la visite de quelques personnes bien cravatées venant lui demander l'autorisation de monter
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une grande surface, des lascars, c'est comme cela qu'il me l'a raconté. Les lascar s'étaient pris de la manière suivante dans le bureau du maire : avant l'entretien dans le bureau du maire, les 3 lascars déposent une enveloppe kraft, comme à l'époque de Mme Bettencourt. Il ouvre une enveloppe dans laquelle il y avait 500 000 francs en billets. Vous voyez le ministre du budget qui découvre le samedi matin une enveloppe avec des billets, vous imaginez. Et il leur dit : « voilà messieurs, soit vous avez essayé de me corrompre et j'appelle tout de suite le garde champêtre, soit vous avez pensé à mon centre social et auquel cas, je vous fais un reçu » et ils répondent : « Ah M. le Maire, évidemment c'est pour votre centre social ». Donc il a signé le reçu des 500 000 francs : « mes pauvres messieurs, tant que je serai Maire de cette ville il n'y aura pas de grande surface à Puy-Guillaume » « Oh mais quand même détendez-vous ». Donc pas de grande surface. C'était il y a vingt ans. Avec mes étudiants, on est venus vivre quelques jours à Puy-Guillaume, pour voir un peu ce qui s'était passé entre cette interdiction du maire et ce qui avait pu se passer dans la commune à coté. Puisque à 15km de Puy-Guillaume, vous avez une autre commune qui s'appelle SaintYorre, très connue avec des usines, une mairie communiste. Le maire s'appelait Jésus et nous a reçus de manière très sympathique. Jésus nous explique qu'il a été obligé de mettre des grandes surfaces parce qu'il habite à côté de Vichy et que tous les gens de Saint-Yorre allaient aux grandes surfaces de Vichy et que s'il voulait récupérer un peu de taxe professionnelle, il fallait qu'il mette des grandes surfaces à Saint-Yorre. Résultats : 2 700 habitants à Saint-Yorre, 2 700 à Puy-Guillaume.
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À Saint-Yorre vous avez une grande surface et un boulanger, c'est tout. Le reste est désert, fermé, à vendre, à louer, kebabs et tout ce que vous voulez et j'en passe et des meilleurs. À Puy-Guillaume, 13 km plus loin, interdiction totale. Charasse avait même blindé tout le périmètre parce qu'évidemment les lascars avaient été voir le maire d'à côté. Charasse avait dit : « si tu mets une grande surface, je te coupe l'eau parce que l'eau qui vient de chez toi, elle vient de chez nous. Tu n'as pas intérêt, je te coupe la flotte ». À Puy-Guillaume, vous avez 37 commerces de bouche, que de bouche, et qui sont représentés dans la grande surface d'à côté, qui est un Carrefour, pour ne pas nommer, c'est vraiment un mot très joli un carrefour, c'est toujours très beau un Carrefour. 37 commerces et vous avez notamment des boucheries, des primeurs etc... Vous avez des boucheries qui ont construit des circuits courts autour de Puy-Guillaume et qui font de la viande, qu'ils découpent etc. et qu'ils exportent dans une grande ville qui s'appelle Lyon. Un village du Puy-de-Dôme qui exporte de la viande à Lyon dans des restaurants 2 et 3 étoiles. Vous avez aussi un fromager qui vend du fromage avec un système sous vide. Grâce à un contrat avec La Poste, il vend ses fromages dans le monde entier sur les cinq continents, il envoie un colis toutes les semaines pour l'Australie dans le même village.
Les grandes surfaces : la grand-mère et les Tchèques
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ourquoi je vous raconte cela ? Parce qu'il me semble qu'on a, là, l'expression même de ce qu'a été cette
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Quand j'ai dit que je voulais faire un Master Alimentation, on m'a dit : « vous vous foutez de notre gueule, ça c'est bon pour la Franche-Comté mais pas pour la Sorbonne ». Et puis on a pu monter ce Master, en mettant notre programme, notre travail et notre enseignement sur notre site internet. On a des gens qui viennent du monde entier, des Brésiliens, des Japonais, des Chinois, des Ouzbeks. Finalement on se rend compte que cette question du local même traitée à Paris, c'est quelque chose qui intéresse beaucoup de gens. On s'est demandé pourquoi. On s'est aperçu que finalement en faisant un peu l'archéologie de ce mot local … qui au-delà des toponymes Sorbonne, Borbonne, Colombey-les-Deux-Églises et tout ce que vous voulez cela montre bien que l'être humain est attaché à un lieu et que finalement nous sortons de 30-40 ans au cours desquels on ne s'est pas rendu compte qu'on a eu en face de nous des entreprises de dépossession du local.
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brutale dépossession du local. Nous n'avons pas voulu la voir, elle s'est faite à notre insu en quelque sorte et a amené dans nos villages avec ces systèmes de distribution que nous connaissons, un autre monde. Je pense à ma grand-mère. Un jour, je l'emmène dans une grande surface et elle s'écroule devant un linéaire de paquets de café et me dit : « je suis mal », je lui dis : « pourquoi tu es mal ? » « parce que je ne sais pas comment choisir ». Elle n'avait jamais pensé qu'un jour elle pourrait, qu'elle aurait à choisir entre 40 marques de café. C'est ça la violence. Dans mon village nous avions un partenariat avec une commune tchèque à l'époque. Pour traumatiser nos Tchèques, ils venaient au village le samedi, on les emmenait au Mammouth de Besançon. Vous imaginez les Tchèques qui faisaient la queue dans les magasins. Ils arrivaient dans un Mammouth où ils voyaient des gens faire la queue à la caisse, des chariots pleins. Il fallait que nous leur expliquions que c'était modèle, que c'était bien, que c'était formidable d'écraser les prix et tout ce que vous voulez et qu'au fond tout ça était l'horizon radieux du monde.
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vec la génération d'étudiants que j'ai aujourd'hui qui arrivent dans mes prairies parisiennes, je suis obligé de raconter comment... pourquoi ils sont là aussi. « Qu'est-ce que vous venez faire ici ? » Les Japonais disent : « moi je veux apprendre le terroir français ? » Je dis : « Mais qu'est-ce que tu sais du terroir français ? Rien, du haut de...? Qu'est-ce que tu sais du terroir français ?» « Ah mais je sais beaucoup de choses ». Il a, en effet, lu de la littérature, il connaît Terroirs & Cultures, il a appris par cœur par internet. Évidemment il a toute une culture du terroir. Ce qu'on peut dire de tout ça c'est qu'il y a eu une véritable entreprise de déterritorialisation de notre alimentation, de notre culture, et au fond quelque chose qui avait pris la caricature que vous connaissez tous qui était après Apollo 9 ou 11 nous allions tous manger des capsules. Et après l'arrivée de Mc Do, je me rappelle, j'étais à Lyon, à l'époque, nous allions tous finir à manger de l'hamburger. Il y a eu quelque chose qui a été très dur, que nous avons vécu comme de la nouveauté et qui s'est révélé assez brutal et assez catastrophique. Et aujourd'hui nous avons, en face de nous, une nouvelle génération qui ne veut pas de ça et qui est au courant de tout ce qu'il y a derrière ce modèle du mondial et qui veut reconstruire autre chose. J'ai été frappé l'année dernière mais c'est beaucoup plus fort maintenant... J'ai des étudiants, aujourd'hui, qui en savent parfois sur le local pas plus que moi mais plus que la moyenne. Nous avons des générations qui arrivent avec un véritable désir de local parce que comme l'a dit Jacques très très bien... l'excès de mondialisation a
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appelé une réflexion sur nos racines. Et en politique il n'y a pas à chercher plus loin le succès d'un parti dont tout le monde parle, présidé par une jolie femme du prénom de Marine. C'est quelque part le retour, c'est une sorte d'angoisse. On veut se poser la question de savoir qui on est. Le local c'est ça. Alors en alimentation, ce n'est pas du même ordre mais c'est quand même quelque chose qui est de ce type là. Mais pour dire qu'aujourd'hui, nous sommes dans une phase où après 30 ans de destruction de l'alimentation que nous avons connus pendant notre enfance pour une certaine majorité d'entre nous, nous sommes dans une phase de reconstruction mais avec une génération de gens qui va réinventer à sa manière. On a parlé de l'AMAP (Association pour le maintien d'une agriculture paysanne), cela va plus loin. il va y avoir internet, il y aura des applications sur i-phone, enfin je n'en sais rien mais ils vont inventer un modèle dans lequel le local aura vraiment sa place.
Ardèche, Drôme, territoires du futur
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our terminer, je voudrais dire que dans votre région, j'en avais déjà parlé l'an dernier, il faut avoir conscience que ce que vous faites ici, à votre échelle (faire l'inventaire de la flore, de ce que tous les artisans peuvent apporter ici) est un laboratoire de ce que sera, avec des variations, le monde de demain et en particulier l'assiette de demain. Vous êtes dans le futur et pas dans le passé. Vous avez la chance, grâce à Jacques, à d'autres et à tous ceux qui ont monté cette soirée, de ne pas être dans le bocal. Vous êtes dans un mondial complètement maîtrisé. On ne mesure pas comment un petit
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outil comme le téléphone sur lequel il y a internet, « le smartphone »... peut-être que dans des régions moins accessibles et puis d'autres c'est plus compliqué. Vous vous rendez compte, pour moi, par exemple qui ai appris presque avec la plume d'oie qui ensuite ai travaillé au stylo puis à la machine à écrire à doigts, ai connu l'ordinateur, je me trouve en face de mes étudiants dans l’amphithéâtre qui ont tous internet au bout des doigts. Et si jamais je ne sais pas leur parler ils ne vont pas quitter la salle, ils ne vont pas faire de chahut, mais se mettre sur facebook, commenter, parler avec des Argentins, avec des Russes. C'est important de bien voir que toutes ces technologies, que tout ce monde numérique qui nous entoure, nous dématérialisent quelque part. Mais plus il nous dématérialise, plus nous aurons besoin de local. Et c'est en ce sens là je crois que l'Ardèche pour les raisons que j'avais évoquées l'année dernière, je ne vais pas revenir là-dessus, me paraît, moi, comme un laboratoire d'autant plus fort que vous êtes à quelques kilomètres d'une des plus grandes artères de circulation du monde. C'est 80 millions de personnes qui passent à quelques kilomètres d'ici. Vous êtes là, finalement pas un pôle de
résistance parce que vous ne résistez pas aux gens qui passent dans la vallée (à la limite vous vous en foutez) mais vous êtes des gens qui comprennent ce va-etvient entre le local et le mondial. Et il me semble, je le dis sans flatterie, sans rien, je le dis de vous et de la Drôme, le local en France, il s'invente dans la Drôme et dans l'Ardèche et en particulier ici. Voilà c'est tout merci. Jacques Deplace Gilles, merci pour cette stimulante provocation à la confiance en soi … On va venir au local sur Colombier avec David mais avec Dominique, nous pourrions faire un petit tour de quelques terroirs du monde nous conduisant à Colombier-le-Vieux, ici, où nous sommes ? Quelques terroirs du monde où tu as posé tes pieds en humanité ? Parce qu'on peut dire que tu trouves du local à chaque fois, du local différent mais que tu reconnais comme quelque chose qui ne t'est pas étranger.
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Nouvelle génération
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Dominique Chardon Je ne vais pas parler de ma vie mais il y a un mois j'ai fait quelques centaines de kilomètres avec un sac à dos sur le chemin de Saint-Jacques-deCompostelle en passant par la voie du nord et la voie du sud. Pour ceux qui connaissent, ceux qui ont vu, ceux qui l'ont fait, savent qu'on rencontre des gens, c'est sûr, lorsqu'il y en a, on rencontre des villages, beaucoup de fermés. Et lorsqu'on a fait le point le soir, on se dit mais qu'est-ce qu'on a fait ? Qu'est-ce que moi aussi j'ai fait ? J'étais responsable professionnel syndical. Est-ce
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L'exploitation au Brésil et les dégâts du « progrès »
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t puis, je vais vous donner une autre anecdote. Il y a un an, j'étais invité au Brésil, et je suis allé dans plusieurs régions, entre autres, dans le Mato Grosso. Ceux qui veulent y aller me demanderont le lieu. J'ai vu une exploitation, le mot était vraiment bien choisi, une exploitation agricole de 135 000 ha. 3 récoltes par an, anciennement la forêt amazonienne. Aujourd'hui, il y a quelques travailleurs, des avions et du matériel agricole, soja, soja voire coton et il y a 135 000 ha. Il pleuvait 8 000 mm il y a 20-30 ans, on est aujourd'hui à 1 millier de mm. Alors entre les deux, il y a nos villages, notre monde rural. Il y a ce que je viens de décrire ici, et le Brésil, c'est la même chose. Il y a des paysans sans terre, il y a des hommes et des femmes sur des petits lopins de terre. On voit bien que la question n'est pas posée pour nous, ici, en France. Elle est posée aussi beaucoup plus globalement. On voit les dégâts de la concentration et ça, si vous voulez ça doit
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déjà nous faire réfléchir. Donc le combat que l'on propose de mener, ce que vous avez mené, ce que vous avez commencé à mener concrètement, c'est celui de la proximité. Gilles a défini le local, c'est vraiment un enjeu considérable celui de la proximité. Réinventer la proximité, réinventer le lien social, être capable de faire revivre des morceaux de territoire et c'est là, où je voudrais faire la nuance avec le mot terroir. Le territoire est plus anonyme. Le terroir au sens où nous l'entendons, au sens moderne, ou postmoderne du terme, c'est un lieu de vie, une communauté. Parce qu'il n'y a pas de terroir s'il n'y a pas d'hommes et de femmes. Ce sont des activités multiples, des relations complexes, c'est la vie tout simplement. Ces territoires, ces lieux se définissent intimes finalement, déjà par l'histoire, la géographie, mais aussi par le relief, la réalité de notre environnement. Il faut savoir animer un certain nombre de ces lieux pour qu'on puisse les repérer et se dire qu'il n'y a pas de modèle unique, et pour le moment c'est ce qu'on nous a proposé.
3 conditions pour recréer le local
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'Ardèche ne sera jamais la Beauce. L'Ardèche ne sera pas le Nord, le Gard non plus, mais pour cela il va falloir que l'on aille rechercher toutes les ressources. Et le mot n'est pas bon pour moi quand je parle de ressources humaines mais, la première des ressources c'est quand même des hommes et des femmes et ça j'y tiens parce que partout où nous pouvons reprendre, repartir, reparler de possibilités, recréer du local, c'est là où il y a des hommes et des femmes. Et partout où je suis passé ces derniers temps, où il
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n'y a plus rien, ou si peu de vie (sauf l'été), il n'y a pas de possibilité aujourd'hui telle que je l'ai vu. Donc au démarrage, la première condition ce sont des hommes et des femmes. Deuxième condition, il faut faire appel à la fierté du pays, fier d'être là, ici. Le troisième, c'est d'être fier de son métier. Moi qui suis paysan, j'ai milité, comme d'autres, fait des choix qui comme d'autres n'ont pas été les meilleurs, je crois que c'est aussi redonner du sens à nos métiers redonner du sens aussi au travail manuel autant qu'intellectuel, c'est être capable de dire la vérité sur le métier de l'agriculteur où un certain nombre sont tombés dans un travail de tâcheron (pas tous mais un certain nombre). Et ça me fait mal à voir en tout cas. Valoriser les métiers et valoriser ceux qui détiennent les savoirs et les savoir-faire, c'est le premier repérage que l'on fait. Quand dimanche matin, je partirai au Maroc je rencontrerai dans le nord du Maroc des paysans qui tentent de survivre avec un peu d'huile d'olive, avec des dattes, ou avec quelques produits de céréales. C'est la majorité des populations locales et il faut absolument aider à valoriser sinon pas le quantitatif parce qu'il n'existe pas mais d'abord le qualitatif. La qualité de ces produits, l'origine de ces produits, les garanties que l'on peut amener, les garanties santé. C'est la construction du qualitatif. À la fin du mois, je repartirai chez Kora. C'est un agriculteur qui fait la même démarche que moi avec un comité de pilotage au milieu du Sénégal. Il a déjà fait le repérage de tous les biens, produits et services de ces communautés qui sont extrêmement pauvres et il a redonné espoir à la plupart des acteurs de ce terroir en construction : « oui, il y a de l'avenir chez nous et le rêve, » c'est lui qui le dit
« ce n'est pas d'aller en Europe, le rêve c'est de construire un demain, quelque chose ici ». C'est la même chose au Liban, c'est la même chose en Tunisie. Notre ami tunisien n'est pas là ce soir, on le regrette. Dans l'île de Kerkennah, en face de Sfax, il y a principalement des pêcheurs et des paysans. Ils ont absolument compris qu'il fallait trouver, dans ce lieu, dans cette île, des valeurs ajoutées. Il fallait absolument travailler tous ensemble pour qu'à partir de la pêche qui est une spécificité locale, la culture alimentaire, le repas, ils puissent travailler à redonner une vie économique, sociale et politique parce que le combat en Tunisie il est là. On pourrait continuer longtemps mais je peux vous dire que la majorité
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qu'on a mesuré le dégât dans un certain nombre de lieux du territoire, au point qu'il reste une population âgée. Et là, on n'est pas ailleurs, on est chez nous pas très loin d'ici, à quelques centaines de kilomètres. Des services qui sont de plus en plus éloignés, une concentration des terres : un ou deux agriculteurs par commune, plus d'artisan, plus de commerçant. Vous allez me dire : « c'est évident, vous me faites peur encore plus… » « non je dis ça avec réalisme ». Autant, j'ai envie de me battre pour justement le développement local autant le réalisme, c'est aussi de voir le dégât des ces 20-30 dernières années.
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des territoires sont des territoires sur la planète qui souffrent du handicap, qui ne peuvent pas lutter contre les territoires chanceux. On en n'est pas jaloux, plus particulièrement au Nord, mais tous ces territoires méritent respect, méritent aussi qu'avec eux on ouvre une nouvelle dimension, une vie pleine de développement. Et ça c'est notre combat et c'est ce qui mérite l'attention que nous avons tous ensemble, ici, sur les Entretiens du Terroir.
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Dominique, merci pour ce chemin d'humanité qui nous conduit, ici aussi … David, tu vas garder le micro, nous revenons à Colombier-le-Vieux qui est aussi un territoire du monde. Il y a quelques années, tu es passé d'une production de lait à une transformation yaourt avec tes vaches Montbéliardes. Tu vas en parler, il y a de la sélection là-dedans, il y a de l'alimentation rationnelle, puis il y a une valorisation, une valeur ajoutée, tu peux décrire un peu David qu'est-ce qui t'a conduit à faire ce passage ? Comment tu le vois aujourd'hui ? Quelles sont tes perspectives ?
David Maisonneuve
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Agriculteur à Colombier-le-Vieux
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'ai depuis 2002 des vaches laitières et un peu de cerises. Il y a trois ans ma femme travaillait à l'extérieur dans une coopérative fruitière. Tout allait bien. On a eu des enfants. Du fait du travail extérieur, dans une coopérative fruitière
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très saisonnière, mon épouse rentrait très tard le soir. Ça paraissait donc incompatible avec les enfants. Ça c'était un premier point, du coup ça nous a un peu dirigés sur la question de comment faire une activité supplémentaire sur l'exploitation ? Comment dégager un revenu supplémentaire ? Dans le même temps, une exploitation sur la commune cédait sa partie transformation. Tout cela nous a amenés à cette réflexion. On est allés voir comment ils travaillaient, qu'estce que ça allait changer chez nous. Sur le plan humain, ma femme ne voulait pas travailler toute seule dans son coin. C'est un peu le problème de l'agriculture dans certaines productions. On est un peu coupé du monde, le côté transformation a amené beaucoup de contacts, contacts dans la vie quotidienne, avec la reprise, on a repris les circuits de la commercialisation. À l'heure de la grande surface, à la petite épicerie de village, on a développé quelques magasins, on a développé aussi la partie restauration collective, je suis aussi dans un projet de point de vente collectif. Sur la partie production, j'avais quelques Holsteins que j'ai transformées... que j'ai remplacées par des Abondances pour avoir une meilleure qualité de lait tout ça pour donner un produit de meilleure de qualité. Tous les fourrages sont produits sur l'exploitation. J'ai une toute petite marge de manœuvre parce que j'ai une toute petite structure. Tout ce qui est céréales par contre, est acheté à l'extérieur. Toute la partie fourragère est vraiment produite sur l'exploitation. J'ai un petit peu d'irrigation. Il y a une ASA (Association Syndicale Agréée) sur la commune, une ASA gère une grande retenue collinaire avec tous les agriculteurs, pour l'irrigation notamment pour le maïs, ce qui nous permet de gagner en autonomie.
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Jacques
Question du public
Tu as parlé, tout à l'heure, du changement de race, de l'Abondance à la Montbéliarde, est-ce qu'on peut dire que dans cette transformation d'une partie de cette production pour yaourt, tu cherches peutêtre moins une production importante ? Le niveau de lactation a diminué : peux-tu décrire cela par rapport à la valeur ajoutée que tu as ?
Est-ce que la valeur ajoutée par la transformation compense la baisse de production ?
David "Oui, la production a diminué, j'ai dû perdre dans les 500 litres en moyenne par vache et par an. J'ai gagné presque deux fois mon TP (taux protéique). Ça m'a augmenté mon prix de lait de 30%. Le reste part en laiterie dans un circuit long. Toute la partie transformée ce n'est que bénéfique parce qu'on a un bon produit. Pour la partie vente en laiterie ça m'a quand même monté mon prix du lait." Jacques Je crois que le yaourt s'appelle Délices du bois madame. Ça me fait l'occasion de faire un petit clin d'œil à Fanfan et Claude Thé, ici présents, les pionniers de ces yaourts Délices du bois madame. Petit clin d'œil parce qu'il y a des transmissions qu'on voit et qui produisent quelque chose … … On pourrait peut-être laisser place à des questions, parce qu'évidemment c'est toujours difficile le rapport... on est en haut, sur la tribune, peut-être un peu lointains mais certaines personnes dans la salle aimeraient sûrement dire quelque chose, poser une question, donner un point de vue. Nous poursuivrons avec David, Richard, Milad entre les Cévennes et Deir el Ahmar.
David "Pas complètement, mais il y a une partie qui est difficilement mesurable, c'est le gain au niveau de la production transformée. Avec des taux comme j'étais l'an passé je ne sais pas comment ça a été produit." Jacques
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Tu as parlé de la restauration collective, estce que c'est un débouché si le mot convient qui te paraît intéressant avec quelques perspectives ? David
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"Oui, c'est un des débouchés qui me plaît presque le plus parce que finalement, on va toucher des futurs consommateurs. On va toucher un public qui est banalisé par des publicités de grandes marques et le fait de faire goûter un yaourt Délices du bois madame, à des élèves qui voient des publicités des grandes multinationales … je trouve cela tout simplement génial.
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Donc ça pose une question que ce soit pour Nectardéchois avec les jus ou pour les producteurs de fromages, de yaourts, les producteurs de miel, les collectivités, les associations, tous nous devons porter les produits de notre pays et en être fiers. Je crois que c'est un des éléments très importants. Il est désolant de trouver dans des « pots de l'amitié » du Fanta industriel, du Coca-Cola. C'est dommage. Non pas qu'ils n'aient pas le droit d'exister mais ça serait peut-être bien de porter une attention à ces produits locaux, peut-être que ça peut nous stimuler. Gilles "Sur la restauration collective, j'ai beaucoup travaillé en amont, avec ceux qu'on appelait autrefois des intendants, des gestionnaires ils s'appellent maintenant. Ils disent tous qu'ils attendent des professionnels comme vous, des propositions aussi parce qu'ils sont dans la routine dans leurs comptes. Mais quand vraiment des producteurs comme vous prennent le temps de les voir de leur expliquer qu'ils peuvent faire quelque chose, généralement l'accueil est bon. De l'autre côté du Rhône, j'ai rencontré une dame qui est maire d'un village. Elle
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s'était fait alpaguer par des habitants, comme vous devez l'être souvent, notamment l'été, quand les jeunes, comme souvent, avec leurs motos pétaradantes tournent dans le village et réveillent tout le monde. La mairesse a pris corps en l'occurrence avec les agriculteurs du village, notamment les producteurs d'abricots : « ces jeunes, vous allez les employer, la mairie va en payer une partie et vous allez en payer une partie, vous allez les embaucher, si possible le matin de manière à ce que le soir, ils soient vraiment crevés et qu'ils se couchent au lieu d'aller se retrouver » c'est extraordinaire ! Ils étaient embauchés le matin de 8h à 13h, les gars étaient sous la pluie comme des lapins le soir. Et ensuite cette production était utilisée entre autres pour le collège. Il y a tout un véritable circuit, je dirais, d'excellence, qui s'est monté autour de ce collège si bien qu'aujourd'hui 80% de ce qui est mangé dans le collège est produit dans les communes avoisinantes. Et ça c'est un exemple qui tient à la volonté d'une personne qui a eu cette idée et qui a impliqué tout le monde. Elle a fait d'une pierre deux coups. D'une part elle a réglé le problème avec les voisins, avec les parents, avec les jeunes et avec l'école.
de la Syrie voisine et de la Palestine depuis longtemps. Je crois que vous avez fait un choix Milad, tu me corriges, d'accueillir les réfugiés dans les villages et pas dans des camps, des camps fermés et je trouve que ça dit quelque chose de l'hospitalité. Je ne sais pas si ma remarque est pertinente mais c'est là l'occasion peut être de présenter Deir el Ahmar et cette tentative de construction de terroir qui est riche.
Milad Akoury
Président de l’Union des Municipalités de Deir el Ahmar (Liban)
restent dans des tentes aux alentours, sur les banlieues du village.
Deir el Ahmar dans la vallée de la Beqaa.
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propos de Deir el Ahmar, tout d'abord, Deir el Ahmar veut dire en français, si je traduis intégralement, le « couvent rouge », c'est pourquoi on l'appelle Deir el Ahmar. C'est une région de 10-12 villages mais le plus grand village c'est Deir el Ahmar, ça représente à peu près 50% de la population de toute
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Et une fois qu'ils y ont gouté, le message passe bien. C'est quelque chose qu'ils apprécient. Le seul bémol, c'est que pour nous ça nous demande assez de réactivité. Parce qu'un jour il n'y a pas de commande et le lendemain aussi bien il y a 1 000 yaourts à livrer, pour l'instant ça se passe bien mais en termes de débouchés, on arrive presque au bout du système."
Le local, une invention d'avenir ?
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Le local, une invention d'avenir ?
Jacques Ça s'appelle la gestion globale d'une situation, comme quoi, le local et le global ça va bien ensemble. Gilles a pris la parole, que chacun n'hésite pas. Milad, si on tourne un peu sur la terre, au bout de la Méditerranée, si tant est qu'il y ait un bout, on a ce petit pays qu'on appelle le Liban. Vous savez, aujourd'hui, je crois que le Liban n'a pas signé la convention de Genève sur les réfugiés. Et pourtant le Liban accueille des centaines de milliers, sauf erreur de ma part, de réfugiés notamment
Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
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vant de présenter Deir el Ahmar, à propos des réfugiés, l'expérience avec les Palestiniens, on ne nous a pas laissé faire des camps similaires pour les Syriens ou pour les Palestiniens. Ils sont dans le village, dans la plaine. Je peux parler de notre région Deir el Ahmar, ils sont hors du village et quelques-uns à l'intérieur du village. Ils ne peuvent pas payer, ils
la région et c'est pourquoi elle s'appelle la région de Deir el Ahmar. C'est très commun de faire au Liban des unions de municipalités. Au lieu de traiter avec des petits villages, on traite avec des unions. L'union de Deir el Ahmar est composée de 6 villages pour le moment et bientôt ce sera 8 villages. La population est à peu près de 22 000 habitants. Quand
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Un terroir en construction
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arce qu'à la fin de la guerre dans les années 90, l'État a promis des aides, des subventions financières pour arrêter la plantation des cultures illicites. La plaine de la Bekaa est reconnue dans le monde pour la plantation du cannabis, malheureusement. Malheureusement aussi ces promesses ne sont jamais respectées. Mais pour nous dans la région de Deir el Ahmar, la Communauté de Deir el Ahmar a pris elle-même les initiatives et les vignobles et les pommiers sont en croissance continuelle annuelle entre et 5 et10 % mais la politique de l'État n'aide pas. Par exemple, cette année, la politique pour arrêter la plantation de cannabis. Il y a beaucoup de gens qui sont revenus au cannabis parce que l'État n'a rien fait. Ils
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En mai 2012, lors du séminaire des Cités unies, Terroirs & Cultures International définit le territoire de Deir el Ahmar : « situé sur les contreforts de la plaine de la Bekaa, dans le centre Est du Liban, c'est un territoire de montagnes qui représente quelques handicaps naturels : altitude (qui commence à 1 000 mètres et se termine à peu près à 1 650 mètres), faible fertilité des sols, l'isolement géographique, ce qui limite. Alors que la mobilisation des communautés villageoises, sa richesse patrimoniale et ses spécificités agricoles lui fournissent le potentiel pour y construire un terroir. Alors nous avons l'obligation morale de créer, de valoriser ce terroir, c'est ce qu'on a fait ailleurs. C'est pour cela que nous avons collaboré avec Terroirs & Cultures International, pour créer une valeur ajoutée dans la région de Deir el Ahmar.
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on dit 22 000 au Liban on dit 22 000 inscrits mais l'exode rural pèse toujours lourd. Par exemple à Deir el Ahmar au lieu de 10 000 habitants on dit que la population est de 10 000 inscrits. L'hiver, par exemple, la population est de 2 500 seulement et l'été de 5 000. Que ce soit l'exode rural vers les villes ou bien vers l'étranger que ce soit vers l'Australie ou l'Argentine jusqu'au Brésil. C'est le destin de tous les Libanais. La diaspora compte à peu près 2 500 personnes. Tous les chiffres sont approximatifs par manque de statistiques. L'union se trouve à 100 km de la capitale Beyrouth et à 15 km du fameux temple et ruines romains de Baalbeck. D'après Terroirs & Cultures International, je cite à Deir el Ahmar : « nous sommes vraiment sur un terroir : territoire, nature, hommes et culture ».
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sont très pris par la guerre en Syrie, par les problèmes politiques et tout ce genre de problèmes alors ils ne traitent pas le problème du cannabis. Par exemple, pour la région de Deir el Ahmar, pour la vigne on a 250 ha avec un futur potentiel de 1 000 ha. Les pommiers il y a 300 ha, ça a toujours existé. Les cerisiers, oliviers, amandiers, à peu près 100 ha. Pour réaliser le projet à Deir el Ahmar, Terroirs & Cultures International a bien défini : les objectifs, les partenaires et la méthode . L'objectif de Terroirs & Cultures était de valoriser les productions locales de notre région ou de notre terroir ainsi que les atouts de ce terroir. Le partenaire officiel est l'Union des municipalités avec qui une convention de partenariat a été signée. Les partenaires sur le terrain c'est le comité de pilotage qui représente les divers segments de la société. Le process (la méthode) consiste en une première phase
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Vers les premiers Entretiens du Terroir …
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a réalisation d'une étude sur la biodiversité naturelle et culturelle de la région de Deir el Ahmar. Pour ceci une
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convention tripartite a été signée en 2012 entre L’Université Saint-Esprit (USEK), Terroirs & Cultures International et l'Union des municipalités. Toute cette démarche devrait aboutir à l'organisation des premiers Entretiens du Terroir au Liban à Deir el Ahmar. On l'espère, on l'estime au printemps 2014. Ces Entretiens permettront enfin d'informer la population et les décideurs locaux sur les résultats de l'enquête participative et surtout de présenter et de faire partager le plan d'actions qui mène à la création d'un terroir dans la région de Deir el Ahmar. Jacques Merci Milad, une petite remarque parce qu'il y a un lien avec notre tentative de valoriser l'espace naturel sensible. Tout à l'heure Milad a parlé de l'université qui s'appelle USEK à Beyrouth, il y a plusieurs universités à Beyrouth, et notamment on a rencontré monsieur Beirouty, qui travaille beaucoup, sur la richesse botanique de cette région. Donc quand on parlait de cette région, on parlait de biodiversité qui apparaît à certains encore comme un luxe alors que c'est un des éléments des conditions de vie du milieu et là, il y a un travail qui je crois est très intéressant. Et ça nous stimule d'autant plus peut-être, nous, à reconquérir cette perception de la richesse botanique notamment pour en prendre une, donc Christian, demain, en parlera avec « notre » espace naturel dit sensible. Eric Juste pour compléter … pour l'avoir vécu avec Dominique, la première fois qu'on a été à Deir el Ahmar (Dominique y avait été avant moi), il y a une expression qui a été employée par Dominique tout à l'heure,
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qui était de recréer le local. Je pense que véritablement à Deir el Ahmar c'est ce qu'on a commencé à faire. Je pense que bien sûr, compte tenu de l'histoire de la guerre qu'il y a eu au Liban, ce local a été quand même extrêmement affecté sur le plan physique, sur le plan de la dislocation des familles, sur le plan des personnes aussi. Et donc l'une des étapes clés que nous avons voulu faire et qui ressort encore plus fort qu'ailleurs à Deir el Ahmar, c'est de recréer ce « local ». J'ai le souvenir de la première réunion qu'on a faite avec Dominique, on a réuni, on appellerait ça ici, la société civile et coopérative. On avait une trentaine de personnes dans la salle venant d'associations, de coopératives, de tous les secteurs notamment l'association de femmes qui est très active à Deir el Ahmar. à la fin de la réunion ils nous ont indiqué que c'était la première fois depuis très longtemps qu'on avait réussi à mobiliser dans la transversalité l'ensemble des acteurs pour essayer de, alors on n'avait pas employé le terme à l'époque parce qu'il était inapproprié mais on avait essayé de refaire prendre conscience du « Panier de biens et de services » qu'il y avait sur Deir el Ahmar. C'est un terroir assez fabuleux par sa diversité, par sa culture alimentaire aussi avec l'université USEK qui travaille sur la cuisine libanaise, une cuisine fabuleuse et qui est l'expression de ce terroir. Un terroir déjà là … mais à travailler … Je crois que recréer le local, ça doit passer par cette prise de conscience, comme on le fait à Saint-Félicien et ailleurs, de cette richesse qui est sous nos pieds mais qu'on ne voit pas forcément. Alors bien évidemment, quand on est dans une économie de guerre qui est marquée par le contexte qu'on vit aujourd'hui, c'est d'autant plus compliqué. Mais on a senti qu'on avait cette volonté aujourd'hui à Deir el Ahmar d'essayer dans des difficultés qu'on a peine à imaginer, ici, bien évidemment, repartir du local. Parce
que là c'est vraiment le fondement, parce qu'il ne peut pas y avoir une réponse qui vient ni du national ni de l'international. Comment repartant du local, de ce que vous avez sous les pieds vos vignes, de vos oliviers, de vos abeilles, parce qu'il y a beaucoup d'apiculture aussi comment très modestement on pouvait repartir du local. On a fait un petit bout de chemin. Je suis sûr que ce qui va se passer pendant ces deux jours va continuer. On a beaucoup parlé de Terroirs & Cultures mais ce n'est pas Terroirs & Cultures qui est important. Ce qui est essentiel c'est de permettre des échanges entre terroirs. Moi je n'ai pas de réponse spécifique pas plus que d'autres sur la manière de développer ce local mais ce qui est sûr c'est que c'est la richesse des échanges qui permet de créer cette dynamique... comme elle est en train de naître sur Deir el Ahmar, comme elle est née avec Richard Fesquet qui vient de beaucoup moins loin. Cela a été un terroir aussi marqué par les difficultés économiques et je pense qu'il va en parler. Ces 30 dernières années avaient été riches notamment par le ver à soie, qui a été quelque chose d'essentiel pour les Cévennes qui s'est vu s'effondrer. Il y a eu le textile qui s'est vu s'effondrer. Vous avez été aussi obligés de repenser le local pour dire comment on fait pour s'en sortir dans une région qui était sinistrée et qui le reste encore fortement. Et vous avez relevé les manches, j'allais dire, pour essayer de repartir. Tu vas nous expliquer parce que je pense qu'il doit y avoir des outils pour cela, et ça vous les avez créés. Milad ,vous voulez ajouter un petit mot complémentaire.
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de sensibilisation parce que ça prend du temps pour que les gens comprennent. Et je suis sûr qu'il n'y avait pas que moi qui ne comprenne pas ce que veut dire terroir, mais ça a été un peu difficile surtout en arabe car il n'existe pas un mot qui traduit exactement le mot « terroir ». Une enquête participative a été réalisée sur le terroir de Deir el Ahmar pour bien déterminer le « panier des produits et services » de Deir el Ahmar. La collaboration avec Terroirs & Cultures a commencé depuis 2010 avant que je sois président de l'Union. Depuis 2010, Terroirs & Cultures International a commencé à appuyer la région dans l'émergence de notre terroir, des voyages de missions réciproques ont eu lieu entre 2010 et 2013. Moi-même je suis venu avec une équipe en 2012 en février à Nîmes et à Montpellier. Le dernier échange a eu lieu, en juin 2013, par la visite de messieurs Eric Barraud et Georges Truc au Liban, malgré la situation assez délicate de notre région. Plusieurs fois j'ai essayé de décourager Eric de venir parce que la situation en juin était assez délicate au Liban et surtout parce qu'ils devaient passer par la région de Baalbeck, une région du Hezbollah. Mais il était assez insistant de vouloir venir et on a trouvé les moyens pour qu'ils arrivent à Deir el Ahmar. La mission consistait à étudier les caractéristiques écologiques liées à la culture de la vigne et la vinification de la région de Deir el Ahmar et surtout pour élaborer une action qui pourrait être un déclencheur d'Entretiens du Terroir.
Le local, une invention d'avenir ?
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Le local, une invention d'avenir ?
Milad "Oui, vous avez parlé de la région de Deir el Ahmar, il est bien de mentionner que la région de Deir el Ahmar, c'est une région 100% chrétienne, catholique qui
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Eric Merci Milad de ces précisions. Je vais parler des 10 ans de l'AOC et Richard, tu peux nous dire comment vous avez abordé à travers les difficultés économiques, comment vous avez repensé le local sur ces terrasses des Cévennes ?
Richard Fesquet
AOP Oignon Doux des Cévennes
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'accord, merci. Tout ce que j'ai entendu jusqu'à présent sur la
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valeur ajoutée m'interpelle. Finalement, je me dis que la valeur ajoutée, ca été un peu le fil d'Ariane qui a été à l'origine du développement de la culture de l'oignon des Cévennes, donc au pied du Mont Aigoual. Et je pense que c'est important que la valeur ajoutée soit conservée par les producteurs ou les gens du pays plutôt que ce soit Carrefour ou Auchan qui s'en emparent eux-mêmes. Bien sûr, on a besoin d'eux pour travailler mais il faut faire la part des choses. Peut-être que certains d'entre vous connaissent les Cévennes viganaises qui sont au pied du Mont Aigoual, au nord de Montpellier.
Cévennes viganaises, bribes d'histoire
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'est un territoire qui est assez accidenté. Je me suis dit en arrivant que les routes qui arrivent jusqu'ici sont un peu comme les nôtres, avec des vallées encaissées où les cultures se développent essentiellement sur des terrasses. Des terrasses fort anciennes, elles étaient utilisées à l'origine pour la culture du châtaignier et des mûriers, ce qui permettait l'élevage du ver à soie qui était une véritable richesse dans la région. Du temps de mon grand-père ou mon arrière grandpère, c'était, en quelque sorte la culture qui ramenait de l'argent dans les foyers. Ça a duré jusque dans les années 50, puis le fil synthétique est arrivé, tout le ver à soie a disparu et c'est l'industrie textile qui a pris le dessus. L'industrie textile a bien fonctionné effectivement pendant 20-30 ans. Alors à ce moment là tous les producteurs, la plupart des agriculteurs partaient travailler dans les usines qui étaient implantées localement au Vigan, à Ganges, à Sumène …. Même s'ils
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restaient sur le territoire, ils délaissaient les traversiers et le travail de la terre. Dans les années 70-80 est apparue une chose un peu nouvelle : la délocalisation. Vous connaissez : la plupart des usines ont délocalisé et les emplois sont partis dans d'autres pays que les nôtres. Les usines, les unes après les autres ont fermé. On avait une usine qui fabriquait des collants « Well ». Elle employait, sur Le Vigan, 1200 personnes. Aujourd'hui, il n'y a pratiquement plus rien, il reste une cinquantaine de personnes. Donc vous voyez au niveau économique ça a été très difficile.
L'agriculture ?
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u niveau de l'agriculture, il n'y avait plus grand chose, si ce n'est l'élevage et un reste de culture d'oignons. Le problème qu'on rencontrait avec la culture d'oignons c'est que les gens produisaient de l'oignon mais se demandaient où les vendre. La difficulté était là. Alors il y avait quelques négociants qui étaient sur place. Ils les achetaient à mon père. Les négociants faisaient leur travail, ils gardaient la valeur ajoutée pour eux, c'est-à-dire qu'ls disaient toujours que le marché ne fonctionnait pas. Ils payaient les oignons au prix le plus bas possible, ça décourageait les gens parce qu'ils avaient leurs produits mais ils ne savaient pas comment les vendre.
La création d'une coopérative …
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e qui s'est passé dans les années 90... Il y avait un groupe de producteurs, ils n'étaient pas nombreux, ils étaient 5 ou 6. Ils se sont dit qu'il fallait essayer d'inverser cela et ils ont pensé à créer une coopérative.
L'idée c'était en fait de regrouper l'offre de produits pour être plus fort vis-à-vis des acheteurs. Cette idée fait son chemin et c'est en 92 qu'a été créée la coopérative qui s'appelait au départ la coopérative de l'oignon doux des Cévennes. Il y avait une trentaine de producteurs adhérents et ça n'a pas été facile parce que les cévenols sont très individualistes. Déjà au départ, ils voyaient cela d'un œil plutôt mauvais. La première année ça a plutôt bien fonctionné, la deuxième aussi. Et petit à petit les gens se sont bien rendus compte que c'était un outil de commercialisation vraiment intéressant et qu'ils pouvaient trouver là un débouché pour leur produit. Ce qui fait que petit à petit, la plupart des producteurs ont adhéré à la coopérative et le tonnage a augmenté, le chiffre d'affaires aussi. La coopérative s'est développée et a pris de nouveaux marchés car les marchés locaux d'il y a 20 ans ne suffisaient plus pour vendre les oignons. Aujourd'hui, la commercialisation se fait au niveau national et actuellement 15% à l'exportation.
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compte 20 000 inscrits. Elle est entourée par des villages musulmans qui comptent 300 000 à 350 000. Maintenant ça ne représente pas un problème mais pendant la guerre civile, ceci représentait un très grand problème, mais merci Dieu, on a pu résister. On n'a pas été éloigné de notre village malgré toutes les difficultés de la guerre et de tout cela."
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… et d'une AOC « Oignon doux des Cévennes »
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onc la coopérative est née. Puis deuxième chose importante. On s'est dit qu'on travaillait dans un pays qui était difficile : travail manuel avec un paysage accidenté, un travail difficile, et que ces difficultés et ces handicaps, il était bon de les valoriser et en tout cas, de les faire reconnaître. C'est ainsi qu'on a pensé à la démarche d'appellation d'origine. En fait l'appellation d'origine, c'est mettre un nom sur les difficultés et les handicaps, sur les spécificités qu'on peut avoir, le
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familles, pour notre région c'est très important. Il y avait des villages où il n'y avait plus trop d'enfants, de jeunes qui pouvaient vivre dans le pays. Et on constate que depuis quelques années, il y a un renouveau important. Ça permet aux villages de garder une structure économique, je pense aux commerces, aux écoles, tout ce qui fait la vie d'un village. On a des villages qui sont assez dynamiques où il fait bon vivre.
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démarche car il y a 10-15 ans, on n'était pas très concurrencé sur le marché de l'oignon doux, il s'en faisait beaucoup moins que maintenant. On peut dire que maintenant, depuis quelques années, il s'en fait beaucoup. Si on n'avait pas l'AOC, des gens qui n'ont pas les mêmes handicaps que les nôtres, des Espagnols notamment, feraient de l'oignon doux et l'appelleraient Cévennes sans problème. L'AOC nous protège. C'est quand même quelque chose d'important.
L'oignon … et la vie des villages.
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ujourd'hui, on est une centaine de producteurs à la coopérative. Sur l'appellation, c'est 120 producteurs parce qu'il y a une vingtaine de producteurs qui sont indépendants. Tout à l'heure, j'entendais parler d'une exploitation de 135 000 ha, je ne savais même pas que cela pouvait exister. Toute notre zone d'appellation représente 50 ha qui font vivre une centaine de
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Je voudrais juste vous montrer, pour que vous saisissiez, la photo de la plaquette de présentation de la coopérative oignon doux des Cévennes (« Origine Cévennes, la coopérative des petits producteurs », ndlr). Vous pouvez voir que le paysage des terrasses occupe dans l'image bien plus de place que l'oignon lui-même. Je pense qu'effectivement ce qui a fait aussi, au-delà bien sûr de l'AOC qui est le signe de protection, la réussite de l'oignon doux des Cévennes c'est qu'ils ont su accrocher à leur produit ce paysage de terrasses qui est assez fabuleux à voir au mois de juin. Et la valeur du produit est tout à fait liée à la valeur du paysage qu'il est capable de produire et d'élaborer. C'est ça qui fait aussi la richesse et la valeur ajoutée dont tu parlais pour l'oignon doux des Cévennes. C'est un élément vraiment fondamental dans la réussite de l'oignon doux au-delà de la qualité et de la coopérative commerciale qui a été créée et qui doit aussi inspirer la valeur du local. La valeur du paysage local qui n'est, a priori, pas délocalisable et qui est un élément majeur dans la réussite de l'oignon doux des Cévennes. Je pense que ça mérite d'être mis à la réflexion dans ce qui se passe dans le débat au Pays de Saint-Félicien. Audelà de ça, je pense aussi que, aujourd'hui, l'oignon des Cévennes est devenu un élément identitaire pour l'ensemble du département.
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Et la récolte finie (vous allez faire de l'oignon doux dans une quinzaine de jours, je crois) ce serait presque impensable, aujourd'hui, pour un gardois de ne pas acheter un sachet d'oignons doux venue la mi-octobre. Ça montre bien l'ancrage territorial et identitaire que vous avez fait sur ce produit, ce qui était quasi inimaginable il y a une quinzaine d'années. L'évolution a été locale et je le dis devant Dominique qui l'a vécue et qui pourra témoigner aussi. Quand on parlait des Cévennes dans le Gard, c'était l'arrière-pays avec ce que cela veut dire comme dimension sociale. Aujourd'hui les Cévennes sont vécues, sur le plan agricole, comme une réussite. On pourrait parler aussi de la pomme et du jus de pommes. Il y a une dynamique, aujourd'hui, qui fait exemple. Le pélardon, avec l'AOC qui nous rapproche de Saint-Félicien, a été une véritable réponse économique. Et ce, en valorisant comme tu l'as dit les contraintes puisque les éléments essentiels du cahier des charges de l'AOC « Pelardon des Cévennes » c'est l'obligation pour les animaux d'avoir un parcours en garrigue donc de sortir tous les jours. Par conséquent, faire de la garrigue qui peut paraître être un handicap par rapport à ces prairies du Brésil ou d'ailleurs, est une vraie ressource… je crois que Gilles Fumey souhaite intervenir … Gilles Fumey "Je voulais dire une ou deux choses sur l'oignon doux. C'est assez intéressant car la chose commence à changer dans les villes. Ma marchande des Quatre Saisons me dit un jour : « mais il y a longtemps que je ne vous ai pas vu monsieur » « bah, oui, je ne viens plus chez vous parce qu'il n'y a plus d'oignon doux des Cévennes » … « il n'y a que ça qu'il vous faut » « mais s'il n'y pas d'oignon doux, votre magasin,
il ne vaut rien » et maintenant il y a de l'oignon doux. Et c'est très important que vous fassiez tout cela parce que maintenant les gens en achètent. Ça c'est la première chose.
Paysage … du monde …
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a deuxième chose concerne les paysages. Je rebondis là-dessus car je crois qu'on a oublié, en France en particulier, où on est. Je le rappelle, la France, l'Italie et la Chine, sont les pays qui ont inventé le mot de « paysage ». Il n'y a pas de paysage alimentaire en Amérique Latine, il n'y en a pas aux États-Unis, il n'y en a pas en Afrique mais il y en a en Chine et en France. L'agriculture c'est du paysage. Et ce qui est frappant, ce que je vois dans ce qu'a dit Dominique tout à l'heure, c'est la chance des régions. Parce qu'on a beaucoup parlé de handicap, on a dit les pauvres, ils habitent en Ardèche, ils habitent dans les Cévennes. Comment peut-on vivre en Ardèche ? Moi qui suis né dans une montagne, quand j'entends Dominique Chardon qui vient des bords de Loire, et qui a en plus inventé une ferme dans le Bas Rhône (pas dans le Haut Rhône) pour lequel les montagnes sont un handicap, c'est l'occasion de parler que ceux qui habitent dans les montagnes... Moi qui suis né dans le Jura, je ne manque jamais une occasion de dire que depuis mon village, qui s'appelle, en plus, Déservillers, on voit le mont Blanc. Et bien on ne voit pas le Mont Blanc depuis la Loire ou depuis le Bas Rhône. C'est très important de montrer que le paysage c'est ce qui donne à voir l'espace agricole et que vous avez dans les régions de montagnes la possibilité de montrer la terre que vous travaillez. Et les Chinois
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mettre dans un cahier des charges, le faire valoir et le protéger. Donc en 1996, l'idée de démarche AOC a débuté. Une démarche AOC ça ne se fait pas en deux ou trois jours, c'est un travail de plusieurs années. On a commencé la démarche en 1996 et elle a abouti en 2003, donc vous voyez aujourd'hui, cela fait 10 ans. ça a été une bonne chose de faire cette
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… car le monde et les temps changent …
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a dernière chose que je voulais dire c'est que concernant le Liban, je ne sais pas si vous avez vu tout à l'heure, il y avait de belles photos de châteaux en ruine. Ça m'a fait penser aux châteaux en ruine dans les Cévennes, en Ardèche, il y a plein de châteaux en ruine. Ce qui est frappant, dans l'histoire … quand moi, j'explique à mes étudiants, le temps long, pourquoi les gens se mettent à faire des choses comme avant etc... En fait, la ruine, la guerre, vous avez parlé de la guerre, la crise chez nous... pour moi, les grandes surfaces c'est la crise, la ville telle que nous l'avons connue, qui est entourée, de ce que moi j'appelle la France moche, le gras autour des villes, vous voyez cette espèce de truc dans lequel, il y a des hangars vaguement éclairés d'orange et de machins qui scintillent, pour vous vendre
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des cochonneries, qui viennent d'Asie du Sud Est, tout ça c'est la crise. Et je crois que nous sommes dans une période, la guerre au Liban, la guerre aux temps des Camisards. C'est un moment durant lequel se reconstruit les choses, quand on est dans le temps présent on ne voit pas les choses qui se passent. Mais vous avez remarqué que d'ici quelques jours, l'Iran va redevenir un pays fréquentable. Vous allez apprendre à vos petits enfants qu'en 2013, l'Iran est redevenue une grande puissance. Vous allez leur apprendre qu'après un Pape qui ne disait rien du tout, on a un Pape très bavard qui raconte des trucs très bizarres. Vous voyez que peut-être il y a quelque chose qui est en train de changer ; les curés vont se marier, enfin des trucs très bizarres. Il y a quelque chose qui change. C'est important de comprendre que sur ce temps long, à des moments de crise, qu'il y a quelque chose qui naît. Et là, l'oignon doux des Cévennes, ça a l'air de rien mais avec la renaissance des terrasses, c'est quelque chose sur le temps long, d'exceptionnel. Parce que si ça se développe, si ce qui se passe dans les Cévennes, en Ardèche et ailleurs, et bien les 30 ans dont j'ai parlé pendant lesquels on va reconstruire une nouvelle alimentation, un nouveau rapport au territoire, c'est aussi quelque chose qui prend son départ aujourd'hui, aussi ici ce soir. Essayons d'imaginer que, ici, il y a 15 ans, il aurait été inimaginable de penser
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une assemblée comme nous ce soir pour parler de ce dont on parle. C'est donc très important de comprendre cela et donc : « vive les ruines ! ». Richard Fesquet
Gilles "Pourquoi il s'appelle les oignons doux et pas l'oignon qui fait pleurer ma petite mère qui fait à manger ?" Richard
"Oui, je voulais rajouter quelque chose par rapport au paysage. Effectivement, nous dans les Cévennes, on a ces paysages de terrasses qui sont particuliers, mais on n'en pas toujours eu conscience pour faire le lien avec le tourisme. On était dans notre coopérative, dans notre AOC. Les choses sont souvent très segmentées, il y a les agriculteurs d'un côté, les commerçants de l'autre, les hébergeurs, les gîtes, et il n'y a pas vraiment de ponts entre les différents acteurs de la vie économique. On en a pris conscience tardivement, cela ne fait que deux ou trois ans qu'on commence à y réfléchir. C'est pour cela que l'année dernière en 2012, on a monté une association à quelques personnes qui s'appelle Site remarquable du Goût qui met en valeur un territoire à travers un produit emblématique, et pour nous bien sûr, on a choisi l'oignon doux. Le but de tout ça, c'est de mettre du lien avec ce qui se fait dans le pays, c'est-àdire les restaurateurs. Les restaurateurs qui sont dans la démarche vont cuisiner de l'oignon, ils vont mettre en valeur les produits du terroir, les hébergeurs vont se faire les ambassadeurs des produits du terroir auprès des touristes. Les producteurs qui sont dans la démarche vont parler aussi des restaurateurs ; donc tout ça crée du lien entre les personnes. Je trouve que, au-delà de l'aspect de vendre des oignons ou de vendre un produit touristique, c'est vraiment important de tisser des liens entre les personnes."
"Tous les oignons font pleurer mais ça ne les empêche pas d'être doux, doux parce qu'il contient du sucre plus que d'autres." Gilles "Je les soupçonne un peu pas de commercial mais de quelque chose du genre un oignon qui ne fait pas pleurer."
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sont très fiers de ça, ils font des rizières sur des pentes. Non pas pour s'emmerder. On leur demande : « mais pourquoi faitesvous des rizières sur les pentes ? », d'ailleurs le mot pente n'existe pas en Chine. Ils répondent : « où est le problème ? » Vous voyez pour eux ce n'est pas un problème. Ce qu'ils font c'est quelque chose qui est beau. C'est très important, mon père me disait : « tu vois, tu écris des rédactions à l'école ; moi j'écris des paysages », je crois que c'est très important de bien comprendre que la richesse de la France c'est d'avoir des paysages agricoles qui sont des paysages alimentaires. Et dans vos régions de montagnes, l'identité visuelle, ce que disait Eric, est très importante. Et maintenant chez ma marchande des Quatre Saisons il y a une photo de votre paysage. Et en plus elle est Bretonne, la pauvre, vous voyez on lui fait vendre des choses...
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Jacques Il faut expliquer à Gilles qu'on peut pleurer de bonheur aussi. Il est tout de même 22h45, on va s'acheminer vers la fin, si tant est qu'il y ait une fin, pendant que Dominique nous prépare une petite conclusion générale.
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Le local, une invention d'avenir ?
Dominique "C'est la salle qui va la faire." Jacques Vous avez peut-être des questions à poser, des interventions à faire, des rires à transmettre. Vous avez repéré qu'on a un agent commercial à Paris pour ceux qui ont du mal à vendre leurs produits, il ne sera pas débordé avec tous ces étudiants et la marchande des Quatre Saisons. Régis Fourel "J'ai une question par rapport au consommateur de l'oignon doux. Je me
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"J'ai conscience que c'est difficile de toucher le consommateur. Je pense que les consommateurs, c'est un peu tout le monde mais localement c'est difficile. On a quelque fois une bonne image à l'extérieur, et localement on n'a pas toujours la même image. C'est effectivement quelque chose qu'on a pu constater ; pourquoi je ne le sais pas ; et à tort car quand on fait une démarche de développement, c'est intéressant et bénéfique pour tout le monde. On peut se rendre compte que tout le monde n'est pas consommateur et n'adhère pas à la démarche. Après ce qu'on essaie de faire c'est vis-àvis des consommateurs jeunes c'est de la communication. C'est d'attirer ces gens, de leur expliquer que le produit est bon pour le consommer. "
Avec la Chambre d'agriculture de l'Ardèche, il y a une tentative de voir comment élargir déjà le caillé doux de Saint-Félicien, le seul fromage élaboré localement, de l'herbe à l'assiette et qui porte ce nom. C'est vrai, il y a du travail à faire, un chemin peutêtre un peu long mais c'est sûrement une reconquête, si le mot convient. C'est difficile, pour certains impossible mais nous estimons qu'il faut tenter le coup. La notoriété, tout à l'heure, avec l'oignon doux, Eric parlait d'une identité... Évidemment, c'est une identité ouverte, elle est construite dans l'interaction. L'identité du bocal est une identité fermée. Comme produit emblématique, le « Caillé doux de Saint-Félicien », dans sa petite production d'aujourd'hui, peut peut-être porter un peu plus l'image des savoir-faire du Pays pour peu que le nombre de producteurs augmente. Et pour faire le lien avec la remarque de Régis, les consommateurs sont aussi les habitants, sont aussi les producteurs. Nous sommes tous des producteurs de quelque chose, des consommateurs de quelque chose, nous sommes des citoyens, nous ne sommes pas coupés en morceaux. C'est vrai que dans un projet terroir, il y a aussi le lien social que nous avons entre nous. Le lien que nous créons par nos échanges fait partie de ce que nous sommes, comme nous sommes liés au
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difficultés sur les marchés locaux à retrouver des jeunes qui consomment sur les marchés locaux, et non pas quelques pots de crème marrons qu'ils achètent quelque fois par an et l'essentiel de leur course chez le monstre comme on en a parlé le mammouth qui écrase les prix. J'ai l'impression que c'est parfois plus dur de mobiliser des gens du territoire sur cette idée de terroir qui est bien souvent assez lointaine et peut-être difficile à toucher du doigt."
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"Je ne veux pas remuer le couteau dans la plaie mais s'il y a un nom qui a une grande notoriété c'est quand même Saint-Félicien. Il faut reconnaître que la notoriété de Saint-Félicien est très reconnue. Je ne veux pas poser de problèmes, que vous le vouliez ou non. Après qu'il y ait une histoire.. mais c'est quand même vrai. Quand on dit Saint-Félicien, on vous dit fromage. Vous n'imaginez, peut-être pas à quel point... Je ne connais pas forcément tout, mais je sais que ça correspond à une notoriété."
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paysage dans lequel nous habitons et que nous transformons. Nous ne sommes pas seulement des consommateurs. Et c'est peut-être une de nos difficultés, c'est d'être tout à la fois et c'est de se dire que dans ce pays nous avons vraiment de quoi échanger nos produits qu'ils soient des biens ou des services. Et ça ne suffit pas, il faut échanger avec l'extérieur bien entendu. Dominique "Le produit, il ressemble toujours aux hommes et aux femmes du lieu. On a parlé du paysage mais le produit... Je ne connais pas suffisamment et j'en suis navré de parler sans connaître ce territoire mais si on parle du produit alimentaire ou du produit artisanal... Je vois des planches devant moi, j'imagine qu'il y a des artisans, maçons ou menuisiers, des gens de l'art, qui savent faire parler de leurs produits et les produits parlent aussi du lieu. Je ne sais pas si je me fais comprendre. Et ça me paraît essentiel. Les produits parlent des hommes … et des lieux … Quand on parle de notoriété, on a aujourd'hui, la marque commerciale. Ces grands débats auxquels on va être confronté : la marque commerciale par rapport à la marque collective. C'est un
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demande tout simplement, ça peut être des questions similaires avec des produits qu'on a en Ardèche. Est-ce que c'est des consommateurs restaurateurs, touristes ? Ou est-ce que la population locale s'empare aussi de cet emblème et veut dans son panier, dans ses 10 kg d'oignons qu'elle consomme dans le mois, par exemple, acheter des oignons doux ? Parce que nous, on a des
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territoires où il y a des terroirs qui vivent, petitement peut-être , mais qui vivent." Gilles
Jacques Alors on peut supposer que le rire étant communicatif, peut provoquer encore quelques interventions, on va aller vers la fin. N'hésitez pas, si le micro peut circuler, ça peut aider peut-être. Philippe Ranc "Je suis producteur de fruits sur Lamastre et c'est vrai que par rapport à l'oignon doux des Cévennes, c'est une AOC. Il y a là, une relation entre terroir et antériorité. Moi aussi j'ai travaillé et je travaille encore sur l'AOP Châtaignes
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"Je voulais juste dire pour terminer sur cette histoire de gisement et de SaintFélicien, une petite histoire qui m'est arrivée il y a 15 jours, chez mon fromager. Il y a une petite fille de 6 ans qui dit à sa maman, c'est une vraie histoire, ce n'est pas Toto sur internet : « maman, comment ils font les gens qui n'aiment pas le fromage ? ». Le fromager entend et lui dit: « Oh ma petite, qu'est-ce que tu as dit ? ». La petite : « comment ils font les gens qui n'aiment pas le fromage ? … On ne sait pas mais ils doivent être malheureux ». Le fromager : « ma petite, qu'est-ce que tu aimes comme fromage ? » « Saint-Félicien ! ». Une gamine de 6 ans, dans une métropole de 11 millions d'habitants, capable de dire qu'elle aime le Saint-Félicien, vous êtes sur un gisement bien plus précieux que n'importe quel gisement de gaz de schiste du monde."
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débat qui va être posé d'ailleurs dans les négociations qui devraient s'engager entre l'Union européenne et les États-Unis d'Amérique, ou du moins l'Amérique du Nord puisque le Canada sera aussi dans ces négociations. Ça va être le débat des gens d'une civilisation « récente », de pays neufs qui ont une histoire plus courte et qui ne connaissent pas et ne comprennent pas, y compris pour des raisons commerciales, la marque collective. Ils sont dans la marque commerciale uniquement. On ne va pas les citer parce qu'on ferait de la propagande mais tout le monde a à la bouche ces grandes marques qui dominent le monde. Alors que nous, on a référence à notre histoire, aux lieux, à notre culture, à nos paysages, à nos savoir-faire, à notre savoir : découper une planche … parce qu'on a parlé de l'agriculture, moi j'aime bien l'associer à la forêt. Je sais qu'il y a conflit quelquefois mais tout cela est issu de la terre. La terre c'est la vie. Et le rôle tant du forestier que du paysan c'est de produire, par la vie, de produire des biens. De mon point de vue, il y aura des confrontations très fortes sur ces questions culturelles entre l'Amérique du Nord et des pays comme nous. Nous serons broyés si nous n'arrivons pas à gagner cette exception culturelle. C'est un mot que vous entendez sur le plan journalistique mais qui a sa vraie valeur quand on est ici au Pays de SaintFélicien ou quand on est peu importe où dans le monde. Là où on ne peut pas se confronter au « quantisme », à la quantité, et là où on est, on est obligatoirement dans la qualité. Et ça je crois que nous devons l'expliquer. Les maires des communes rurales se battent aussi pour arriver à ce que la puissance publique dans les négociations soit capable de nous représenter et de représenter ces
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d' Ardèche. Par rapport à la coopération, souvent on me parle d'organisations de producteurs. Et en face des producteurs de fruits, nous on n'a que des structures dans la vallée du Rhône. Malheureusement on a beau être fier de son produit, malheureusement quand on est dans des zones difficiles, et bien en face des commerciaux de nos structures... Il y a les centrales d'achat, qui sont maintenant de moins en moins nombreuses, moins de dix. Elles demandent des quantités de produits par rapport à un calibre et je dirais presque qu'elles s'en foutent de savoir si ça vient de Lamastre ou de Turquie ou de je
ne sais où. C'est vachement dur pour être fier et pour dire aux commerciaux que : « moi non, mon produit, il a une autre valeur que ça ! ». On tire vers le bas et là pour moi c'est pas des organisations de producteurs, c'est des destructions de producteurs. C'est malheureux. Quand on est sur un marché comme l'oignon doux, on est sur des marchés de niche et on arrive à
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"Je n'ai pas de réponse toute faite mais je me dis que, finalement, une structure qu'elle soit coopérative ou autre, avant tout il faut qu'elle soit à taille humaine. Si on perd cette dimension, après c'est difficile de mettre à la place du producteur une personne d'une structure qui est énorme, une multinationale. Et on voit aujourd'hui des coopératives qui n'en ont que le nom où le producteur a bien un droit de vote mais théorique, même s'il y a un sens mutualiste, au fond. Estce que le sens premier de la coopérative ne serait-il pas que le producteur puisse dire ce qu'il pense, influer, aller au conseil d'administration, faire évoluer dans le sens qui l'entend ? Est-ce que dans les structures énormes, ca se passe comme ça ? On peut en tout cas se poser la question. Je pense que ce qui est important pour un produit c'est de mettre en valeur ses spécificités parce que dans un terroir tel qu'il soit on a quand même des spécificités. Le produit est spécifique d'un endroit à l'autre. Je pense qu'on ne fait pas la même pomme ici, sur votre commune qu'une pomme qui peut se faire dans le Haut-Gard ou une pomme dans le Limousin. C'est certainement deux choses différentes et les spécificités sont... quand on peut les faire protéger par un signe officiel de qualité que ce soit une appellation d'origine, un IGP et bien, disons que ça protège ces spécificités, ça permet après de les mettre en valeur et ça devient aussi une arme commerciale."
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Gilles "Moi il me semble que jusqu'au XIXe siècle, jusqu'à l'agriculture commerciale qui a abouti à ces centrales d'achat dont vous parlez, l'humanité a vécu avec un système de garanties et d'assurance sur la production agricole qui était très simple : la polyculture. Quand vous avez plusieurs produits, qu'il y en a un qui ne va pas bien... Ils sont très malins dans les Cévennes parce que l'oignon c'est quelque chose qui vis-à-vis de la météo ne pose pas de problème, il n'y a pas de risque de grêle, il n'y a pas de plein de choses, ça se conserve longtemps l'oignon des Cévennes. Ils sont un peu Hollandais, protestants, ils ont bien compris quelque part qu'ils avaient intérêt à faire ça plutôt que des abricots. Vous aviez aussi très peu de possibilités de faire des terroirs d'abricots. Donc ils ont bien compris que ça se garde bien que ça leur donne le moins de risques possibles. Pourquoi je vous raconte cela ? Parce qu'il me semble que quand on étudie avec les étudiants les anciens systèmes polyculturaux, on s'aperçoit que dans les productions paysannes, il y avait une sorte de répartition des risques avec des cultures différentes. Il me semble que dans votre question, il y a l'opportunité de réfléchir à une forme de diversification de vos productions. Pas forcément trop mais vous voyez une mutualisation des risques sur plusieurs choses. Vous voyez de manière à ne pas être dépendant d'un seul produit en cas de météo, etc. Parce que vous êtes météosensibles comme tous ceux qui travaillent dans ces métiers. D'autre part reconstruire un système de commercialisation. Ça c'est vrai que vous avez hérité probablement des structures locales qui ont fait que maintenant c'est
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la centrale d'achat. C'est vrai qu'il faut reconstruire autre chose. Mais pensez bien à une dose de polyculture, moi il me semble que c'est ce qui a sauvé l'humanité du désastre. Et c'est ce qui cause tant de difficultés aux gens qui sont monoculturaux. Regardez dans l'élevage, regardez les Bretons l'impasse dans laquelle ils se sont mis. Et faites des oignons, des choses un peu souterraines qui ne posent pas de problème, allez demander aux protestants, ils savent très bien."
pas être plantées n'importe où, il y a des régions spécifiques pour les vignes. Par exemple dans notre village, 20 % à 25% de la surface peut être plantée de vignes seulement. Il y a le raisin de table aussi. En majorité, le raisin de table. C'est maintenant que les vignes et les vignobles commencent à être plus reconnus parce qu'il y a de la valeur ajoutée. C'est ça le problème au Liban, l'agriculture a une rentabilité assez basse s'il n'y a pas de la valeur ajoutée."
Question du public
Gilles
Est-ce qu'on peut avoir une idée de la structure des exploitations dans la plaine de la Bekaa ? C'est-à-dire la taille des exploitations ? Quelles productions ? On l'a vu un petit peu... mais... Comment elles sont commercialisées, par des coopératives, par des négociants ?
"Sur la valeur ajoutée, ça rejoint ce que j'ai dit sur l'oignon doux. C'est pour cela que j'appelle protestants... Et tout ça c'est qu'à un moment donné dans les structures polyculturales, on trouve des produits qui se conservent bien comme le tabac, qui sont légers, qui se stockent et qui se vendent bien. Alors dans le tabac, on peut mettre du cannabis aussi, mais vous voyez, je ne dis pas géopolitique. Je dis simplement que ce sont des systèmes d'amortissement des crises, qui font que à un moment donné dans une région, vous mettez un produit qui se stocke, qui se garde, qui se vend un peu plus cher et qui va permettre de faire la soudure. C'est comme ça qu'il faut penser les choses Et les tubercules, c'est aussi parce que ce sont des cultures qui sont un peu moins dépendantes du climat que les céréales. C'est une mutualisation des risques."
Milad "Dans la région de la Bekaa, il y a plusieurs plantations. Je peux parler de notre région, la majorité c'est le tabac et le blé qui sont subventionnés par l'État qui achète la production. Il y a surtout les pommes de terre qui ont aussi une rentabilité assez haute au Liban, surtout maintenant qu'on n'importe pas de l'Égypte ou de l'Arabie Saoudite. Il y a dans la plaine de la Bekaa le blé en grande surface. La plaine de la Bekaa était nommée le silo des Romains. Le temple magnifique de Baalbeck... Les Romains étaient présents au IIe siècle av.JC.. et pour deux cents, trois cents ans et ça représentait les silos de Baalbeck. Il y avait beaucoup de blé et maintenant c'est un peu plus de cannabis, malheureusement, à cause de la situation géopolitique de la région, c'est toujours comme ça. Les vignes. Elles ne peuvent
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se différencier mais c'est pas facile dans des structures coopératives. Il me semble que vers chez nous, ça détruit pas mal d'exploitations, parce qu'on n'est pas arrivé à valoriser nos produits.
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Georges Astoin Si je comprends bien la valeur ajoutée du cannabis étant beaucoup plus importante que les autres productions agricoles, en définitif, en diversification, il vaudrait mieux planter du cannabis que des patates !
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"Le cannabis c'est une affaire de … la notion de base de l'économie c'est la demande et l'offre. Par exemple cette année, il y a beaucoup d'offres de cannabis, beaucoup de plantations. La tonne était à 3 000 $, cette année ça va être à 1 500. Il y a beaucoup de plantations, la valeur ajoutée dans le cannabis est pour le trafiquant. Pour l'agriculteur il n'y a pas. Pourquoi on plante le cannabis dans notre région par exemple ? Parce qu'il n'y a pas d'eau. Le cannabis, c'est pas de pesticide, pas d'insecticide, peu d'eau. Même sans eau, il y a du cannabis qui peut survivre. Il est facile à travailler en une seule fois, pas comme le tabac que tu dois cultiver trois ou quatre fois et qui coûte 30 à 40 % de main-d'œuvre. C'est la main-d'œuvre syrienne qui profite du travail du tabac. Alors que pour le cannabis la valeur ajoutée est pour les trafiquants." Gilles Fumey "Je crois que c'est important aussi de ne pas considérer le cannabis comme une plante qui est complètement intégrée à cette région. Chaque région dans le monde a sa plante à drogue, et le cannabis jusqu'au XIXe siècle était une plante qui servait à couper la faim. La coca ça servait, en Amérique Latine, à tromper la faim aussi. Faut savoir que la criminalisation d'un certain nombre de plantes qu'on appelle la drogue ça date de la fin du XIXe siècle, c'est une criminalisation de type européen et ensuite américain. C'est quelque chose qui n'a pas effacé totalement le fait que dans ces cultures là, le cannabis on le consommait au temps des Pharaons, c'était quelque chose qui était complètement intégré à la culture. Quand
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les Américains sont venus en Europe avec des statistiques, il y a quelques années, ils ont dit : « oh mais le vin, c'est de l'alcool » et vous avez vu ce que ça donne. Quand un Américain dit « le vin c'est de l'alcool » et qu'on a un ministre de la santé qui s'appelle Evin, il ne doit peut-être pas être content de porter son nom comme ça, on eu une législation qui est celle qu'elle est. C'est important de comprendre que dans toutes les civilisations, on a des plantes qui posent des questions et qui ont un poids un peu variable dans la culture selon les législations. Milad "Dans les années 60, le cannabis avait été acheté par l'État comme le tabac maintenant mais durant la guerre les choses se sont détériorées, c'est une économie de guerre en fait. C'est durant la guerre qu'il y a eu plus de structures pour la plantation pour … pour le tabac, il y a un quota, si tu plantes, si tu cultives 10 000 kg, tu as un quota de l'État de 5 000 kg et personne ne va acheter les autres 5 000 kg que tu cultives. C'est une économie de guerre, durant la guerre c'est devenu comme ça." Dominique "C'est la raison pour laquelle nos amis paysans travaillent, aujourd'hui, nous les soutenons, sur la plantation de vignes parce qu'il faut absolument, c'est quand même la volonté, des gens comme Milad, des présidents de Communautés de Communes, d'éradiquer cette question qui fait un dégât social et humain considérable. Il faut voir ce que ça veut dire parce que ça vient de l'extérieur. Donc l'objectif, c'est d'avoir, en mettant la vigne, un revenu
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pour les agriculteurs qui soit largement compensé par rapport au cannabis qui n'a pas tout à fait disparu mais qui était en voie de disparition avant les problèmes que nous connaissons avec la Syrie. Il y a trois ans, il n'y avait pas des champs de cannabis comme aujourd'hui." Georges Astoin Quand on prend le cas afghan, en Afghanistan, ils produisaient pas mal de haschich. Avec la guerre ils se sont mis à produire pas mal d'opium. C'est essentiellement pour le marché des armes entre factions. Je ne vois pas dans la poudrière qu'est devenu le Moyen-Orient comment ça va s'en sortir sans cet apport d'argent que fait le trafic de la drogue en fin de compte et qui sert essentiellement à l'achat d'armes de différentes factions.
peut pas raisonner l'effet de la culture sur l'angle uniquement économique. Il faut voir les dégâts, Dominique a parlé de dégâts humains mais des dégâts aussi en termes de développement des autres productions. Par exemple, pour l'avoir vécu au Maroc, c'est démobilisant pour l'ensemble de la population. Vous avez des gens qui peuvent vivre de ça de manière illicite alors qu'il y a des gens qui se battent pour faire vivre leurs produits, leur identité et qui se retrouvent détruits à cause de ça. Dans tous les cas, ça ne peut pas être une réponse globale pour un territoire. C'est destructeur de toute façon par incidence. J'en profite parce que j'ai le micro, pour
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Milad "On peut produire avec du cannabis des anesthésiants naturels mais malheureusement ça ne se passe pas au Liban. Pendant les années 80 au Liban, il y a eu aussi de la plantation de l'opium, mais ça a été très dangereux. L'État est intervenu, même les Américains ont payé les Syriens et le gouvernement libanais pour arrêter la plantation d'opium. Pour le cannabis, ils sont un peu plus tolérants malheureusement." Eric Juste pour rebondir, pour l'avoir vu dans d'autres pays, j'allais dire aussi, qu'on ne
répondre à la question de l'oignon doux qui était posée tout à l'heure, puis je vais laisser conclure Dominique. Je veux dire qu'il n'y a pas plus standard dans le monde que l'oignon. C'est un produit qu'on retrouve partout même en France. Le fait de la niche... à chaque fois qu'on défend cette notion de terroir, je le dis parce que ça revient tout le temps : « oui, mais vous, vous pouvez le faire parce que c'est une niche ! ». J'entends bien, mais la niche, ils l'ont construite. Et sur l'Aubrac,
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permet le lien entre le local et le global. Et ce qui s'est dit à Rome... Les milliards qui sont investis pour aider les peuples pauvres et les gens à se nourrir doivent arriver au local. Cette déperdition de l'aide qui est apportée par le monde et qui n'arrive pas au petit paysan qui essaie de produire, de survivre et qui n'arrive pas à faire la soudure comme ils disent... Le local est attendu par le global ça je l'ai vécu et je peux le dire. Alors ce n'est pas toute la réponse mais je l'ai vécu pendant deux jours et c'est une réalité. Jacques Dominique on va aller vers le mot conclusion le terme ne convient peutêtre pas tout à fait. Tu pourrais peut-être conclure provisoirement, je signale qu'après on pourra partager le pot de l'amitié, que demain cela continue, ici dans cette même salle avec une réflexion autour du Panier de biens et de services. On va tenter de penser le local, on a vu que c'était difficile de penser le local sans l'élargir et sans voir le global et demain on se centrera un peu sur nous : « Quel panier de biens et de services pour le Pays de Saint-Félicien ? », entre 14h et 19h et puis à 19h30 il y a un repas de terroir et à 21h un méli-mélo festif préparé par les associations Felixval, Lo Gavelier, Chorale, l'Ecole de Musique et Danse de Colombier et Chantelermuze. Revenez demain bien sûr. Dominique "Moi je n'ai pas de grandes compétences pour faire une synthèse ou une conclusion mais simplement deux mots. Dans un monde de peur, parce qu'on vit quand même dans un monde de peur aujourd'hui, je pense que la proximité est une sécurité, on peut essayer d'y réfléchir. C'est important de savoir le lieu et les hommes
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qui ont produit, travaillé, transformé. Deuxième point, c'est que dans un monde du quantitatif, on sourit lorsqu'on parle de niche. Mon voisin qui était agriculteur me disait toujours (il est décédé) : « Tu sais, Dominique, il y a des petites niches et des grandes niches, parce qu'il y a des petits chiens et des gros chiens » et il avait raison. Parce qu'en fait, qu'est-ce que c'est qu'une niche ? On l'imagine toujours microscopique mais quand vous réfléchirez à cette notion, il n'y a aucune raison qu'il n'y ait pas une segmentation si fine et c'est l'intérêt du lieu, du terroir lorsqu'on va agir dans la construction de valeur ajoutée. Il y a un des éléments qui est l'origine, qui est intéressant, qui est comme on l'a dit tout à l'heure, l'oignon doux, l'appellation. Moi-même j'ai cette chance d'avoir plusieurs appellations, des vignes, du vin, des vins au pluriel plutôt, des huiles d'olive, des olives. Mais aussi j'ai construit avec l'agriculture biologique depuis 25 ans et puis la biodynamie etc. et même mes terres, on a construit avec mes enfants et ma femme, parce que vous avez compris, je ne suis pas tous les jours au travail, on a construit ces valeurs ajoutées. Et individuellement je pense qu'on ne pouvait pas passer, donc en dehors du vin, on a créé cette coopérative, il y a 25 ans on a créé cette coopérative qui s'appelle Univert. Et ce qui me fait vraiment plaisir aujourd'hui avec le recul, c'est que cet outil qui n'a pas de directeur (on n'a rien contre les directeurs) mais qui a une dynamique interne, qui vit avec 40 producteurs, qui a acquis une notoriété capable de fournir, aujourd'hui, une alimentation saine à des jeunes des écoles ou aux collèges et à des collectivités et ça c'est quelque chose que je trouve très très beau. C'est construire et en même temps c'est là où s'installent... comme dans les Cévennes, c'est quand même incroyable, vous connaissez un peu le Gard,
et bien les installations de jeunes se font sur les lieux les plus difficiles aujourd'hui ou sur les surfaces les moins importantes. Je ne connais pas si, ici, c'est la situation mais c'est quand même, ça nous interroge. Donc ça, c'est la construction de valeur ajoutée. Et puis il y a quelque chose aussi que je voudrais dire en conclusion, il n'y a pas de terroir sans rencontres, sans dialogue, sans partage et sans amitiés créés. Vous avez parlé du verre de l'amitié, mon cher Jacques, mais s'il n'y a pas d'amitié, s'il n'y a pas de lien très étroit entre les personnes pour dire qu'on va s'en sortir au-delà de nos propres considérations individuelles, philosophiques, personnelles, peu importe. S'il n'y a pas cette volonté de partage, il n'y aura pas de construction d'un terroir. Vous allez me dire que cette dimension est un peu utopique mais moi je crois que les hommes et les femmes avancent aussi, ont un destin commun, ils ont la volonté commune et un partage et celui de l'amitié me semble très important.
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on a dit ça sur l'aligot, sur la poire dans la Valloire qu'on est en train de faire, sur le vin, sur des tas de fromages, mais la niche ça se construit. C'est l'enjeu du local, c'est de construire la niche qui va faire le revenu. J'ai eu la chance pour Terroirs & Cultures, d'être cette semaine à la FAO (organisation des Nations-Unies pour l'alimentation) où il y avait le Conseil Supérieur de l'alimentation, vous l'avez peut-être vu dans la presse. Je peux vous dire qu'on était dans le global le plus global. Il y avait tous les pays du monde, toutes les institutions internationales, tous les ambassadeurs, toutes les organisations paysannes, des milliers de personnes réunies, pour travailler au droit de l'alimentation des peuples et principalement des paysans, ça se finissait aujourd'hui. On oppose souvent local et global. Et là, j'ai vécu le global et je peux vous dire qu'au-delà des grandes réflexions sur l'agrocarburant etc. qui ont eu lieu, je ne sais pas, concrètement, quels seront les effets sur le paysan...parce que... Ce qui est énormément ressorti des conférences que j'ai écoutées, et c'est pour répondre au thème de la soirée : « Le local est-il une invention d'avenir ? », c'est que le global ne pourra jamais remplacer le local. Et si le global est ressorti en apportant un certain nombre de valeurs essentielles et de principes, c'est que tout le monde convient aujourd'hui que la réponse est peut-être, même dans ces grandes institutions, dans le local. Les réponses du problème qui se pose aux paysans et au développement du monde ne peuvent pas être pensées ni à Washington, ni à Rome, ni à je ne sais où autrement que sur le terrain auprès de chacun. Et ça je pense que Gilles le disait aussi, il y a vraiment une prise de conscience dans ces grandes institutions de la nécessité et c'est sans doute là toute la difficulté. Et c'est peut-être là où le terroir peut porter une petite pierre, trouver le bon rouage qui
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Merci Dominique, Milad, David, Richard, Gilles, Béatrice, Eric et merci à vous d'être là et de partager le pot de l'amitié pour ceux qui peuvent rester un petit moment et sinon pour les autres et pour tous à demain, 14h au même endroit.
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Entretiens du Terroir samedi 12 octobre 2013
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Jean-Paul Chauvin pan i e r d e b i ens & d e se rv i ces
Président de la Communauté de communes du Pays de Saint-Félicien
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onjour, Juste un mot pour ouvrir ces Entretiens, bien préparés par notre viceprésident Jacques Deplace, Eric Barraud de Terroirs & Cultures et le Comité de pilotage. Notre collectivité rassemble 7 communes avec 4 000 habitants et a pour compétences le développement économique comme l'aménagement de notre territoire, ce qui est bien dans le domaine des Entretiens du Terroir d'aujourd'hui. Sur notre territoire, de nombreux artisans notamment du bâtiment, une agriculture bien présente mais fragile, des services de santé avec hôpital, pharmacie, infirmiers, dentiste, médecins, kiné … nous avons donc des ressources. Alors, bon travail à tous. Eric Barraud Monsieur Chauvin, merci, on va démarrer ce temps. Je suis Eric Barraud, délégué général de l'association Terroirs & Cultures mais beaucoup me connaissent ici, donc je crois que ce n'est pas la peine de me présenter plus longuement. Simplement, on a voulu consacrer ce temps pour valoriser la deuxième phase du « chemin de terroir ». On a commencé à la défricher depuis l'an dernier. Cela s'est traduit cet hiver par le
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Panier de biens & services ? Un concept très concret ! Mehdi Moalla, Jacques Fanet
Mehdi Moalla
Economiste Université de Grenoble
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erci Eric, je remercie le comité d'organisation de m'avoir invité aujourd'hui à ces deuxièmes Entretiens de Terroir du Pays de Saint-Félicien. Je suis Mehdi Moalla, je suis économiste, donc je suis enseignant-chercheur en économie et spécialisé dans l'économie rurale. Durant mes recherches, j'ai travaillé sur ce concept de panier de biens avec l'équipe grenobloise, notamment Amédée Mollard, mon directeur de thèse. Je poursuis encore mes recherches sur ces thématiques. Aujourd'hui, je vais vous retracer l'historique de cette notion de panier de biens, comment elle est née. Par la suite, je vais essayer de généraliser ce concept afin de mieux l'assimiler.
environnementales, notamment les paysages et la troisième composante est la composante touristique. Ce panier sera, donc constitué de l'agriculture, l'environnement et le tourisme. On a essayé de répondre à la question de : « Comment ces ressources peuventelles interagir pour constituer un modèle de levier d'éco-développement territorial ? ». Dans mon exposé, je vais présenterun exemple pionnier qui est le cas des Baronnies. Nous avons entamé ces recherches en 2000 jusqu'à 2005 sur la région des Baronnies qui a été le terrain d'analyses de ma thèse. Par la suite, on va essayer de généraliser le modèle donc voir quelles sont les conditions de sa transposition dans d'autres terroirs et notamment dans le Pays de Saint-Félicien. Je retrace l'historique et les principaux résultats sur la région des Baronnies.
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Accueil
travail d'Andréa Blanchin, qui était en stage ici pendant plusieurs semaines. Avec les membres du Comité de pilotage, elle a mené un travail d'enquête participative auprès des acteurs de ce terroir pour essayer de capter les ressources territoriales qui existaient sur ce lieu, pour essayer de remplir, ce qu'on peut appeler symboliquement, le panier de biens et de services. Cette expression symbolique représente un concept qui a été mis à l'étude par des chercheurs, notamment de l'Université de Grenoble, dont Amédée Mollard. Il avait pris comme stagiaire universitaire Mehdi Moalla qui a été à l'œuvre pour travailler sur l'élaboration du concept de panier de biens et de services qu'il va vous présenter. Voilà pour dire que derrière les mots il y a une réalité qui permet de faire vivre les territoires. On va décliner ensuite cette réalité sous deux façons avec un regard extérieur mais déjà connu du Pays de Saint-Félicien. Certains le reconnaitront Jacques Fanet, administrateur de Terroirs & Cultures, ancien directeur adjoint de l'INAO (Institut national de l'origine et de la qualité), viendra, rebondissant sur les propos de Mehdi, témoigner de ce que peut être la concrétisation de ce panier de biens et notamment en partant d'un exemple italien. Puis je lui demanderai de réagir aux témoignages qui vont suivre présentant les travaux de l'enquête participative menée cette année. Nous aurons quatre témoignages sur quatre thèmes différents qui succèderont à l'intervention de Mehdi et de Jacques. Je demande déjà aux futurs intervenants de se préparer à nous rejoindre quand Jacques Fanet aura terminé son propos. Mehdi, sans plus attendre pour entrer dans le vif du panier, je vais te demander 1. te présenter et 2. de tracer en quelques minutes ce qu'est un panier de biens et de services ? Après l'intervention de Mehdi et Jacques, on prendra peut-être un petit temps avec la salle pour éclaircir les questions sur le concept qui pourraient se poser.
L'objectif du modèle du panier de biens est un modèle d'éco-développement territorial. La question de départ était : « comment et sous quelles conditions la valorisation des produits de qualité de terroir peuvent être un levier du développement régional ? ». C'est le questionnement d'origine. Nous sommes situés dans une sphère composée d'une partie de l'agriculture, c'est-à-dire des produits de terroir mais aussi de l'environnement, tout ce qui est ressources
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Exemple des Baronnies
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a question du prix. La région des Baronnies est située au sud de la Drôme. Elle est constituée de quatre cantons et de 136 communes. Maintenant le territoire prend un peu plus de place grâce à la création d'un Parc Naturel Régional. Notre premier constat c'était : « Pourquoi l'huile d'olive de Nyons se vend plus cher par rapport à des huiles de qualité équivalente soit françaises soit étrangères notamment des huiles italiennes ou espagnoles ? ». Nous avons constitué, à l'époque, un prix au litre avoisinant 20 euros contre 5 euros le litre pour une huile d'olive standard importée notamment d'Italie. Pour répondre à cette question, j'ai mené une enquête sur l'évolution du prix de l'huile d'olive en France, dans les 5 régions d'huile d'olive françaises, par rapport à la moyenne qu'on a relevée de statistiques de l'INSEE. On a remarqué que l'huile d'olive de Nyons se vendait nettement plus cher que les autres huiles d'olive françaises qui ont obtenu le label AOC. L'huile d'olive de Nyons était la première huile d'olive qui a obtenu le label AOC. Par la suite, celles de Nice ou des Baux de Provence ont été labellisées. Mais nous avons constaté que l'huile d'olive de Nyons se vendait plus cher et ça a été le questionnement de notre recherche. Les éléments de réponse sont que : on a pensé à l'effet tradition très ancienne, le produit porteur de multi-attributs, c'est-à-dire qu'en consommant de l'huile de l'olive ça peut donner une image au consommateur qui va donner une différenciation à ce produit. Il y a aussi des aspects liés à la qualité avec le cahier des charges de l'appellation et aussi nous avons constaté que la majorité de l'huile de Nyons se vendait à travers la coopérative qui
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Quel panier de biens & de services ? Le panier des Baronnies : biens et services
développait une bonne coordination entre les acteurs du territoire. Nous avons mené des investigations sur ce surplus de prix et nous avons constaté que c'était une rente, c'est-à-dire que c'est un surprofit que tirent les producteurs d'huile d'olive à Nyons par rapport aux autres huiles françaises. Ce qu'on appelle la rente de qualité territoriale c'est une partie de la rente qui est due à la qualité, plus de qualité. Et l'autre est due à l'effet territorial c'est-à-dire à l'image du marketing de la région des Baronnies vis-àvis des consommateurs. Pour étendre plus l'analyse, nous avons généralisé cette étude sur les vins qui a donné les mêmes résultats, et aussi sur l'hébergement touristique notamment. Pour la comparaison, j'ai pris la location des gîtes ruraux, labellisés Clés Vacances ou Gîtes de France dans la région des Baronnies, par rapport au reste du département de la Drôme. Nous avons constaté aussi que les gîtes ruraux dans la région des Baronnies se louent à la semaine plus cher que leur équivalent dans le reste du département de la Drôme qui reste une département touristique.
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n 2003, j'ai conduit une enquête dans la région pour voir ce qui forme ce panier. Il y a bien évidemment des produits de la région mais aussi le service, notamment, le service touristique c'est-àdire, l'hébergement touristique, les gîtes ruraux, mais aussi les activités de plein air etc. Donc ça forme un panier de biens et de services. Il y a une partie de biens tangibles et des services touristiques, les activités de plein air, le paysage, donc tout ce qui est services non-marchands. Voilà à peu près les principaux constats qui nous ont amené à modéliser ce modèle de panier de biens et de services.
Le panier formé par les consommateurs
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L'association de plusieurs produits
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e sont les premiers constats qui nous ont amené à poser une analyse pour aboutir à ce modèle de panier de biens et de services. Ici c'est un schéma qui reflète cette notion de rente, c'est-à-dire, c'est un peu l'aspect marketing. Le surplus du prix est dû à l'aspect marketing des produits du terroir. J'ai conduit par la suite deux enquêtes à la sortie de la coopérative de Nyons. Nous avons observé que les produits de terroir, les produits des Baronnies ne se vendent pas isolés mais ils se vendent conjointement notamment les produits
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viticoles et les produits oléicoles, donc principalement l'olive et le vin. Il y a aussi d'autres produits tels que les fruits ou les produits dérivés de l'olive notamment le savon etc. Ce schéma reflète cette notion de panier mais c'est un peu compliqué de le voir. Donc ici, il y a l'achat conjoint des consommateurs qui sont des touristes qui séjournent dans la région. Ils achètent très rarement une bouteille d'huile d'olive ou une bouteille de vin, ils les associent, c'est ce qu'on a appelé un panier. Voilà les premières investigations.
a spécificité de ce modèle c'est qu'il est formé par la demande. Ce sont les personnes qui achètent qui vont remplir le panier et non pas le producteur qui va offrir un panier tout prêt où il y a un assortiment de divers produits. Bien évidemment les offreurs montent une stratégie qui sera déclinée par la suite par les consommateurs qui vont acheter eux-mêmes spontanément. Ils vont faire un modèle de shopping, ils vont acheter comme on a vu dans le cadre de la coopérative de Nyons. Ils achètent conjointement des produits, séjournent aussi dans la région et vont former euxmêmes ce panier.
Trois composantes du panier …
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onc pour synthétiser ce modèle, il y a trois composantes du panier de biens. Une offre territoriale de biens privés, notamment les produits de terroir, le service touristique. Il y a une stratégie d'offre qui émane des producteurs locaux et une demande inélastique et spécifique composée essentiellement des touristes. Ils viennent sur la région sur des journées ou passer la journée, donc c'est eux-mêmes qui vont acheter les produits et reconstituer le panier. Enfin, il y a un écrin c'est-à-dire tout ce qui est biens publics disposés dans le pays, dans la région, donc notamment en termes de paysages etc. Donc nous allons développer ces trois points et aussi trois conditions de pérennisation. Il faut tenir compte pour monter un panier de biens qu'il y a ces trois composantes et il faut aussi une bonne coordination entre les acteurs privés.
… et des conditions de la pérennisation
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ans les Baronnies, il y avait la coopérative de Nyons qui fédérait cette coordination mais dans d'autres territoires il faut trouver une entité, un dénominateur commun qui va essayer de coordonner ce modèle. Les coordinations institutionnelles convergentes : il faut mettre en commun ce projet et une convergence entre l'action privée et publique. Ce projet se construit à travers des institutions et des acteurs locaux pour se réunir autour d'une table et mettre en commun leurs ressources et leurs stratégies. Comme je le disais, l'offre territoriale spécifique de biens privés : une gamme de produits conjoints et interactifs qui donne une image cohérente de l'aspect territorial, des productions de qualité spécifique, de terroir, de savoir-faire, d'innovation ayant
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une phase de susbtituabilité. Notamment on a remarqué tout à l'heure, l'huile importée du Maghreb ou l'huile d'olive de Nyons, il y a une énorme différence de prix, on bascule du côté spécifique au générique. Et enfin des services opérateurs de qualité qui facilitent l'accès au panier, c'est-à-dire le tourisme notamment la coordination d'acteurs comme, on va la développer. Rentre aussi en compte la ligne du tourisme, c'est-à-dire tout ce qui est activités de balisage, de circuits touristiques etc. Donc nous allons développer par la suite, les trois autres points. Une demande inélastique et spécifique, c'est-à-dire une importance au lien du territoire. Ce qu'on a remarqué dans la région des Baronnies, c'est qu'il y a un aspect de fidélisation des touristes qui reviennent chaque année, ils reconsomment et repartent avec le coffre plein d'huile d'olive ou de vin. Voilà ce qu'on appelle une demande inélastique, ils reviennent au moins une fois par an pour séjourner dans la région, il y a un lien au territoire qui est né. Une demande de produits liée à la qualité et la connaissance du territoire. Il y a un lien entre les touristes, notamment les gens qui sont étrangers à la région avec les produits. Une fois un Anglais m'a dit qu'il entendait le chant des cigales en consommant l'huile d'olive chez lui. La cohérence du territoire de l'offre et le territoire de la demande, c'est-à-dire qu'il y a une grande différence entre la perception de territoire par les offreurs et la perception du territoire par les consommateurs qui sont les touristes. Donc il faut harmoniser cette image.
Le paysage comme écrin …
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Quel panier de biens & de services ?
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nfin le troisième composant de ce panier est l'écrin, c'est-à-dire les paysages, les ressources territoriales, qui sont généralement des bien publics qui sont accessibles à tous. Un écrin est un bien public qui valorise le panier et notamment les services environnementaux. L'environnement et la nature, paysage, biodiversité, faune et flore etc. valorisent, rentrent dans le panier, dans le sens où on va retrouver dans la consommation des produits, ces aspects environnementaux. Donc aussi tout ce qui est patrimoine, culture, l'histoire, les traditions, les savoirfaire etc. Il y a une sorte de marketing territorial qui s'est établie pour faire vendre les produits de la région, transmettre l'histoire du pays ou le savoir-faire local.
Retour sur les trois facteurs de pérennisation du panier
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a mise en œuvre de la stratégie du panier de biens est nécessaire mais la pérennisation de ce modèle n'est jamais acquise définitivement. Une bonne coordination entre les acteurs privés est nécessaire. Un panier de biens cohérent est représentatif des produits du territoire d'origine : donc peu de produits sont exclus, normalement on va retrouver des produits de la région qui sont emblématiques qui ont un lien avec le terroir. Ils ne sont pas reproductibles ailleurs que sur ce territoire. Un accord sur le périmètre d'origine : il faut bien délimiter le périmètre de ce panier notamment du terroir pour mieux travailler ces produits notamment leur commercialisation et fidéliser une demande. Enfin la coopération et l'engagement
pour pérenniser ce qu'on appelle la rente de qualité territoriale. On l'a vu pour le cas des Baronnies, cependant cette notion de rente peut ne pas être présente dans tous les paniers de biens et de services mais idéalement elle pourrait exister. Si jamais elle existe, il faut quand même la pérenniser ce qui va se traduire par un revenu supplémentaire pour les acteurs locaux. Donc le deuxième facteur des paniers de biens c'est la coordination institutionnelle convergente. Tout ce qui est des échelles territoriales et sectorielles, donc une coordination entre des institutions locales notamment, les communes, les communautés de communes si jamais le territoire est assez grand. Donc la lisibilité des biens et des services du territoire, notamment la création d'une « Route du vin » … ou de la lavande », les principaux points sur lesquels le touriste peut s'arrêter. Et enfin une cohérence des politiques publiques locales pour préserver la qualité du bien public notamment par la protection par des labels de qualité etc. Enfin, l'équilibre et cohérence entre les actions privées et les actions publiques qui se mesure par une bonne coordination entre les acteurs privés et publics, c'est très important pour la construction de ce panier. Aussi, il ne faut pas mettre la stratégie de panier, sur un seul produit, isolé, il faut trouver deux ou trois produits dans lequel le panier sera constitué et valorisé. Donc en fonction de ces éléments, nous avons défini une typologie de paniers de biens. Il n'y a pas un seul modèle en fonction de ces variables : il y a le panier de biens et de services proprement dit tel que le cas des Baronnies mais aussi il y a d'autres formes. Le panier « top-down » (du haut vers le bas, ndlr) on trouve une absence de corrélation entre les acteurs
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publics et privés et notamment en Ardèche avec le slogan Goûtez l'Ardèche. C'est une initiative du Conseil Général, mais sans différenciation des différents terroirs qui se trouvent inclus dans le département de l'Ardèche. On trouve dans ce département beaucoup de biens de terroirs mais ils sont valorisés dans une stratégie un peu globale, surtout départementale. Aussi on trouve des modèles tels que dans le Vercors, une juxtaposition des produits sans une valorisation qui s'engage derrière. Donc il y a différentes typologies de ce modèle de paniers de biens. On va par la suite proposer un schéma synthétique qui va vous faciliter la lecture de tous ces critères.
Entre acteurs et ressources
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nfin, pour évaluer la qualité du Panier de biens & services, on va élaborer ce qu'on appelle le diagramme du diagnostic territorial. L'objectif de ce schéma est d'aborder cette construction du panier, notamment par deux axes : l'axe des ressources qui est vertical et l'axe des acteurs qui est horizontal. L'axe des ressources qui va être divisé en deux, la partie haute concerne tout ce qui est produits de terroir qui sont candidats à ce panier et on trouve l'écrin, ce qui est biens publics de la région. Et sur l'axe des acteurs, on retrouve sur la partie droite les acteurs privés et sur la partie gauche les acteurs publics. Dans ce schéma on trouve une notation de 0 à 5, donc il faut attribuer une note selon les cas à chacun des axes pour faire un auto-diagnostic du territoire en question. Plus on va vers le grand losange, plus on
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est près du modèle de panier de biens proprement dit. Ici j'expose le modèle du cas du Pilat, il y a de bonnes ressources que ce soit publiques ou des produits du terroir, une bonne coordination de la part des privés mais on trouve une absence de coordination avec la coordination publique. Donc ce schéma sert de diagnostic pour faire un auto-diagnostic pour le lancement du modèle de panier de biens pour voir quels sont les handicaps afin de les améliorer. En conclusion générale, il n'y a pas un seul panier mais il y a différents modèles. Donc il faut faire l'auto-diagnostic et essayer d'améliorer afin d'aboutir au modèle de panier de biens proprement dit. L'éco-développement territorial est une construction sociale, ça se construit mais n'est jamais acquis ni spontané notamment avec le panier des Baronnies qui peut choisir une autre configuration. Enfin selon les origines et les trajectoires, l'éco-développement aboutit à des cohérences plus ou moins fortes et à des niveaux différents de territorialité. C'està-dire l'image qui sera véhiculée lors de ce panier soit elle est forte et va conditionner la réussite de ce modèle, soit elle est faible et va moins consolider les produits qui sont le lien entre les produits du panier. Voilà, je reste à votre disposition pour répondre à vos questions. Eric Merci beaucoup Mehdi pour cet exposé, je sais que tu as l'habitude de le faire en beaucoup plus de temps mais cela nécessiterait un long moment pour en mesurer toutes les subtilités. Mais voilà, on a voulu en ouverture de cet entretien vous présenter brièvement ce concept. Je crois que ce qu'il faut surtout retenir au-delà du concept, c'est le schéma diagnostic que tu nous as présenté. Pour
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Quel panier de biens & de services ? essayer dans la perspective de construction de « Chemins de Terroir » voir comment le terroir du Pays de Saint-Félicien peut se situer sur ce diagramme et quels sont les axes qu'il aurait intérêt à développer pour élargir le losange et se rapprocher le plus possible du concept de panier de biens. Jacques, j'imagine que ce losange, vous l'aviez déjà un peu en tête et que surtout vous l'aviez, vous en tant que directeur adjoint de l'INAO, chargé de l'international en plus, largement vu à l'œuvre dans d'autres terroirs et territoires du monde. Je voulais voir d'après vous, compte tenu, de ce qu'a dit Mehdi comment est-ce que cela a été décliné dans certains terroirs et comment vous l'avez-vous ressenti avec votre œil d'expert de l'INAO ?
la plus-value qui est apportée au produit par sa spécificité, sa localisation est un des éléments de ce système en tant que développement rural, développement local avec un maintien de cette valeur ajoutée sur ce territoire, c'est ça qui est le fondement de l'appellation d'origine contrôlée. Effectivement, la plupart des appellations d'origines contrôlées en France, que ce soit dans le domaine du vin ou dans les autres produits, je les ai toujours vécues comme des entités uniques sur un territoire et j'avais été très très attiré par cette notion de panier de biens quand messieurs Pecqueur et Mollard ont présenté les résultats
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Quel panier de biens & de services ?
Jacques Fanet
Ingénieur agronome
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ui, d'abord merci Eric, de me donner la parole, je dois dire le plaisir que j'ai à revenir dans ce Pays de Saint-Félicien parce que j'étais déjà là, il y a un an. C'est avec un grand plaisir que je reviens dans cette belle région. Alors effectivement, j'ai passé une grande partie de ma carrière à l'Institut National des Appellations d'Origine dont une douzaine d'années à la direction de l'INAO à un moment où le champ d'action de cet institut a été étendu du secteur du vin aux produits fromagers et autres produits alimentaires. Bien entendu, le principe de l'appellation d'origine contrôlée est basé sur cette notion de valeur ajoutée par rapport à un produit standard, c'est-à-dire que l'appellation d'origine contrôlée est un modèle de développement où la rente,
de leurs recherches. C'est vrai qu'en France on a un certain nombre de régions dans lesquelles on a des produits d'appellation d'origine qui sont de forte notoriété. Ils sont parfois juxtaposés les uns à côté des autres et n'en tirent pas de profit conjoint par une forme de rapprochement de ces produits entre eux. Alors il y a quelques produits qui ont su par l'aspect du goût tirer des sortes de symbiose, de développement conjoint de leur notoriété par exemple, l'exemple très connu c'est le Sancerre et le Crottin de Chavignol.
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Picpoul de Pinet
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l y a aussi toute une série de produits dans diverses régions par exemple celle où j'ai fini ma carrière en Languedoc, il y a un exemple très connu qui est le Picpoul de Pinet qui est un vin blanc sec, le plus connu du Languedoc. Il est sur les pourtours de l'étang de Thau où on produit des moules, des huîtres et autres produits de la mer. Il y a une symbiose, une relation très forte entre ces deux produits. Je ne connais pas de producteur de Picpoul de Pinet qui va faire la commercialisation de ses produits sans amener des huîtres de l'étang de Thau. De la même manière, je ne connais pas de mareyeur de l'étang de Thau qui va commercialiser ses produits sans une bouteille de Picpoul de Pinet avec lui. Ce sont des exemples qui sont basés sur le goût mais les gens ont su tirer partie de cette association. D'ailleurs le Picpoul de Pinet, depuis des années, a un slogan qui s'appelle "Notre terroir c'est la mer". J'avais été très intéressé par ce concept de panier de biens en me disant qu'il y avait un certain nombre de régions mises à part celles dont je viens de parler qui auraient tout intérêt à essayer de développer cette notion de panier de biens. Je vais illustrer les propos de Mehdi Moalla par un exemple, j'ai été invité il y a 5 ans, à un colloque sur les paysages viticoles au niveau européen.
je me suis dit : « mais voilà des gens qui ont tout compris », on va voir comment ça se passe. Alors Montefalco, c'est un petit village qui est en Ombrie, qui est à peu près à 150 km au nord de Rome. Le paysage, je ne le trouvais pas terrible, terrible, mais des paysages de collines, de vallons, des paysages extrêmement agréables, très rieurs et très attractifs sur le plan touristique puisqu'on en a parlé tout à l'heure dans lesquels se mêle toute une série de produits. Le vin, l'huile d'olive et les olives sont les principaux produits mais on va trouver également des charcuteries, des fromageries, des fromages avec des fortes typicités locales. Pour vous situer Montefalco de manière un peu plus précise, ici, il y a un village, enfin une ville, on le voit c'est juste de l'autre côté de la vallée, c'est la ville d'Assise que le dernier Pape a remise un peu au goût du jour. Sur ce territoire de Montefalco, il se trouve qu'il y a une variété de vignes, qui s'appelle le Sagrantino. C'est une variété très spécifique à cette région de Montefalco, à la région de Ombrie et qu'on trouve quasiment nulle part ailleurs.
Montefalco
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a se passait dans un petit village qui s'appelle Montefalco, donc c'était un colloque international qui était organisé là. Et j'ai été frappé parce que cela faisait peu de temps que j'avais entendu parler de cette notion de panier de biens, et
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Quel panier de biens & de services ? Voilà une vigne de Sagrantino, avec une petite affiche qui explique Sagrantino à travers les murs, les jardins et les cloîtres de Montefalco. C'est une vigne ancienne qui a été plantée apparemment en 1850 d'après le petit médaillon qui est marqué. Donc vous voyez c'est un cépage qui est très implanté sur le plan local. Alors le produit principal qu'on fait avec le Sagrantino c'est ce qu'on appelle un Passito. Ce sont des vins pour lesquels on va les laisser mûrir, bien au-delà de la maturité normale avec un type particulier de maturation et lors de la vinification on va avoir des vins avec des restes de sucre. Donc jusque il y a une vingtaine ou une trentaine d'années, le Sagrantino était essentiellement destiné à cette production. Puis est arrivé un personnage qui s'appelle monsieur Caprai, quelqu'un qui travaillait dans le domaine de la communication au niveau international, et qui avait par sa famille quelques hectares de vignes dans la région. Il a développé cette fois-ci dans la région, une production en vin sec de Sagrantino. Donc ça donne des produits qui sont très charpentés, très typiques et grâce à la communication de cet homme, il a réussi à la fois à développer sa production et à entraîner avec lui, au cours des 30-40 dernières années, une forte notoriété du Sagrantino de Montefalco.
Un produit emblématique …
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onc nous voilà dans une région qui est un peu un pays de Cocagne, et on va produire des vins de très haute qualité et une forte notoriété sur Sagrantino et Montefalco mais également de l'huile d'olive et des olives mais des charcuteries, des fromages. Les producteurs de la région, je ne pense pas qu'ils aient jamais étudié le travail d'Amédée Mollard et Bernard
Pecqueur mais ils ont bien compris l'intérêt qu'il y avait pour eux de se fédérer et de proposer aux touristes, c'est une région qui est assez touristique, une espèce de signature commune. Et donc cette signature, ils l'ont, comme pour l'huile d'olive, dans la région des Baronnies, ici, c'est le Sagrantino qui est le produit phare de la région. Ils ont donc mis en place une route du Sagrantino : la strada del Sagrantino qui est une sorte de signature commune à tous les produits de la région. Comment elle se manifeste ? À l'entrée de chaque cave vinicole, et également à chaque huilerie et producteur d'huile d'olive ou à l'entrée de chaque fromagerie, on a ce panneau dans lequel on va retrouver, à chaque fois, un élément commun qui est la strada del Sagrantino avec une grappe de raisin. C'est ce qu'on appelait tout à l'heure, c'est le problème
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… et les services associés …
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e qui a d'intéressant, c'est qu'en fait cette déclinaison de la strada del Sagrantino, elle n'est pas cantonnée au seul produit de terroir, comme on l'a évoqué toute à l'heure, mais il y a un service. J'avais pris en photo les chambres d'hôtes dans lesquelles, on avait été accueilli. Vous retrouvez la même pancarte avec simplement la déclinaison du B&B, Bed and Breakfast, dans laquelle on était logé. Il y a d'autres services, d'autres fabricants qui utilisent ce même... alors je ne les ai pas tous pris en photo notamment à l'intérieur de Montefalco, il y a un fabricant de tissus, mais qui reprend exactement cette pancarte. Et cette production de tissus locaux s'intègre complètement dans ce concept de la strada del Sagrantino. Je voulais être très bref, mais je voulais montrer un peu comment dans une région, on a réussi à faire la synthèse de tout ce que vous venez de dire. Et j'avais retenu une phrase dans les travaux que vous aviez faits : « le panier de biens, c'est une mise en cohérence de l'image de chaque produit avec l'identité du territoire
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symbolisé par des produits leaders ». C'est bien la définition de ce qu'on retrouve, ici, dans cette région de Montefalco avec un produit leader comme les vins issus de Sagrantino et une déclinaison sur tous les produits non seulement de terroir alimentaire mais les services qu'on peut retrouver sur cette même bannière de la strada del Sagrantino.
Pistes ouvertes par l'enquête participative Christian Astier, Jean-Pol Badouard, Pascal Magnier, Damien Mathieu, Daniel Rouchier, Rémy Sapet, Luc Sovignet le plan de l'artisanat local ce qu'on pouvait mettre dans le panier. Parce que je trouve aussi que dans le concept de panier, il y a quelque chose de tout à fait intéressant : c'est très visuel et ça permet aux gens de... je le vois souvent sur le terrain .. quand vous avez un panier, vous mettez quelque chose dedans et vous vous rendez compte du poids de votre panier au fur et à mesure que vous le remplissez. Alors le poids de l'artisanat dans le panier c'est quoi ?
Eric Merci beaucoup Jacques d'avoir illustré de manière très concrète un exemple de valorisation du panier. C'est ça dont vous témoignez à travers ces quelques diaporamas. Alors, je vais demander aux premiers représentants du panier de biens du Pays de Saint-Félicien de me rejoindre donc à Luc, à Jean-Pol, à Damien, à Pascal, à Rémy de venir avec Christian sur la tribune. On va voir déjà à travers le travail qui a été mené cet hiver si on sent naître ce panier de biens sur le Pays de Saint-Félicien. Mais peut-être déjà, juste le temps qu'ils s'installent, on peut peutêtre, s'il y a un micro sans fil qui est par là... mais peut-être, s'il y a une ou deux questions tant par rapport à Mehdi, que je remercie encore d'avoir eu cet effort de synthèse qui n'est pas toujours facile à faire sur des notions complexes... Je ne sais pas s'il y a une ou deux interventions qui nécessitent un complément. Cela m'a beaucoup étonné que Jacques Deplace, ne réagisse pas sur le Top-down de l'Ardèche, je suis un peu étonné mais peut-être va-t-il le dire. Entre le top-down et le bottom-up, pourrions-nous échapper au power point et autres inventions du patois anglo-saxon … aujourd'hui le patois local reprend le nom de langue d'oc … ébauche de résistance et de création …
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des acteurs publics, c'est une opération qui est financée par la région de Ombrie, donc on va trouver ici « Ombria Route du vin », et ici la déclinaison locale de la cave, de l'huilerie, etc. On le voit ici, la strada del Sagrantino est une signature commune pour tous les produits du terroir, fromages, vins. Vous voyez, ici, c'était pendant le repas, on va retrouver des huiles d'olive faites en salade, du fromage, de la charcuterie. Voilà un peu tous les produits qui sont rassemblés ici sur ce buffet qui a eu lieu pendant ce colloque.
Enquête participative
Eric Peut-être un petit historique sur le travail qui a été mené. Au printemps, sous la conduite du Comité de pilotage, Andréa Blanchin (étudiante à l'Université Lyon 2) a mené une enquête auprès des habitants du territoire. À l'issue des premiers Entretiens de Terroir, on a listé un certain nombre d'atouts et de ressources territoriales. Il a été organisé des tables rondes et des entretiens individuels. Ce sera plus sur les tables rondes qui ont été animées autour de quatre thèmes principaux : l'artisanat, l'accueil nature, l'agriculture et le social et le tourisme... pour essayer en réunissant les acteurs... il y a eu à chaque fois des réunions, avec des responsables que vous avez sur cette tribune. Un travail a été conduit pour voir quelles étaient les composantes de ce panier de biens et voir comment il pouvait se décliner sur le territoire. On va rapidement faire le point de ces résultats de tables rondes et on va commencer par un sujet qui a été moins traité dans les exemples précédents par le propos de Mehdi : l'artisanat. Jean-Pol et Luc ont eu la lourde tâche de recenser sur
L'Artisanat Luc Sovignet et Jean-Pol Badouard
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onjour à tous. D'abord alors Eric, nous pose une question pour commencer alors qu'on avait un texte bien prévu. Le poids de l'artisanat sur notre territoire, c'est un fait, il est important mais on peut le différencier, c'est ce que l'enquête participative avait fait, en deux pôles. Le pôle alimentaire, boucherie, charcuterie, boulangerie... là je parle bien du côté artisanal de cette production des métiers de bouche parce qu'il peut y avoir, et on l'a vu hier avec d'autres personnes qui font de la production directe : les agriculteurs mais là c'est bien
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Enquête participative
Un état des lieux
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onc on recense à peu près une cinquantaine d'entreprises qui représentent 205 employés, 205 emplois sur le territoire des 7 communes des e Pays de Saint-Félicien. Grosso modo si on enlève les services en bas, là où il y a 12 emplois, c'est essentiellement des maîtres d'œuvres ou des paysagers, ça se répartit à peu près moitié, moitié entre la filière bois et puis tout le reste la maçonnerie et le second œuvre. Il y a au total une cinquantaine d'entreprises mais il y en a que 5 qui font plus de 12 employés, donc l'essentiel, ce sont des personnes qui sont seules qui ont un ou deux compagnons. C'est un tissu qui est assez important, assez large et qui rayonne très largement au-delà du territoire parce
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qu'on n'a pas besoin de 200 maçons ou de 200 employés uniquement pour la production locale. Donc autour de cette table ronde il y avait 7 artisans. Les questions étaient : pourquoi autant d'emplois dans ce secteur ? Voici ici un résumé des réponses qui ont été données à ce moment là.
Savoir-faire et dureté à la tâche
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avoir pourquoi il y a autant d'entreprises du bâtiment, sans doute qu'il y a des raisons historiques et culturelles et je pense qu'une des réponses qui a été apportée, ça c'est vraiment tiré de ce qui nous a été dit par des artisans : « Nous avons des savoir-faire qu'il n'y a pas dans la vallée du Rhône, et en milieu urbain, regardez sur le bois, les gars du plateau savent tous travailler le bois bien qu'on ne soit pas une région de bois. On est des fils de paysans élevés à la dure, donc aptes à réaliser des travaux de maçonnerie». Donc ça c'est une évidence : des conditions de vie qui étaient difficiles sur le secteur comme dans beaucoup de secteurs d'Ardèche qui ont fait qu'il y a eu des gens durs à la tâche d'abord dans le milieu agricole. Et lorsque, petit à petit, le milieu agricole a connu l'exode, ces fils d'agriculteurs sont allés travailler d'abord chez ces artisans. Je pense que, bénéficiant d'une main d'œuvre abondante, qualifiée et dure à la tâche, les artisans ont pu sûrement s'étendre dans d'autres secteurs que les secteurs d'origine. Vu aussi que les marchés locaux étaient tout de même assez limités, d'où et grâce, en particulier, à un lieu de grand développement qui est la vallée du Rhône, de Tournon jusqu'au Péage de Roussillon et en descendant jusqu'à Valence. Donc nos entreprises
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sont allées travailler dans ce secteur et ont pu bénéficier finalement de retombées plus importantes que celles de notre région.
Polyvalence et travail bien fait
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ui, c'est vrai qu'il y a une importance du milieu rural. Les agriculteurs sont des gens qui travaillent beaucoup et ils sont très polyvalents. Je crois que c'est cet héritage là qui a mis en œuvre ces artisans du bois et du bâtiment. Il y aussi un autre aspect, qui est cette tradition du travail bien fait. La plupart des artisans nous ont fait remonter qu'ils avaient ce qu'on appelle maintenant un avantage concurrentiel par rapport aux autres entreprises de la vallée du Rhône. C'est le côté de qualité du travail, de pertinence et de compétences. Ça a été repéré un peu partout, d'autant que ce sont des entreprises qui sont assez stables où il y a un faible turn-over (… rires …) et qui travaillent dans la durée.
Artisans dans le local
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oi je voudrais rajouter quelque chose sur les atouts importants et là on retrouve le terroir. Ces entreprises ont aussi bénéficié du fait que sur leur territoire elles régnaient en maître, que finalement les gens du cru ne faisaient pas forcément appel à des charpentiers, des maçons qui venaient d'autres lieux. On faisait appel au maçon du village, au charpentier
du village, je veux dire en période de crise, cela pouvait représenter un atout concurrentiel par rapport aux gens de la vallée du Rhône, au secteur d'Annonay qui faisaient sûrement beaucoup plus jouer la concurrence. Donc il y avait un panier, le mot est bien choisi, déjà bien rempli à l'avance. Et moi je connais, c'est mon secteur, de nombreux charpentiers, c'est peut-être moins le cas maintenant, mais qui pendant longtemps avaient sous le coude une grange à rénover à tel endroit et ça faisait 4 ans ou 5 ans que le propriétaire avait demandé que la grange soit rénovée, que le toit soit changé. Ils disaient : « j'irai le faire quand j'aurai rien d'autre à faire ». Et ça je crois que ce côté terroir a beaucoup fait pour que nos entreprises puissent perdurer.
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le pôle artisanal. Et puis il y a un autre secteur qui est très important et même sur-représenté sur notre secteur c'est le secteur de l'artisanat du bâtiment avec beaucoup de maçons, de charpentiers, plombiers et chauffagistes. Je crois que l'enquête participative s'est beaucoup concentrée surtout sur cet aspect là.
Enquête participative
Relève générationnelle
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n des atouts majeurs c'est qu'il y a eu une relève générationnelle, c'està-dire qu'on s'aperçoit que la plupart des entreprises ont des dirigeants qui sont dans la tranche 35-45 ans. Ils ont succédé à leur père parti à la retraite. Tout ça s'est accompagné d'un renforcement technologique, il y a eu de nombreuses innovations, des appareils ont été achetés et la plupart de cette nouvelle génération a fait des études que n'avaient pas fait leurs parents et donc amène un nouveau savoir-faire et amène aussi une sorte de développement commercial. Un certain nombre d'entreprises, ici, ont créé des filiales dans la vallée. Donc ils sont allés
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Enquête participative
Un réseau qui ne se nomme pas
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e voudrais revenir sur le sentiment d'appartenance, la collaboration, peutêtre pas entre tous... Mais en tout cas beaucoup d'artisans du bâtiment... par exemple, si c'est un maçon du secteur qui construit une maison dans la vallée du Rhône, si éventuellement la personne qui veut faire construire lui demande « vous n'auriez pas une idée d'un charpentier ? », il conseillera souvent une personne du coin et il lui dira : « oui, il y a tel charpentier qui travaille bien, il y a tel chauffagiste » et en général, ce sont des gens avec qui ils s'entendent bien avec qui ils aiment
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travailler et qui sont aussi originaires de notre terroir.
Des limites
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l y a des atouts mais il y a des limites. Parce qu'en même temps ce qu'on peut repérer c'est que la plupart des gens sont spécialisés dans de petites séries, beaucoup dans le sur-mesure, ce qui est aussi un frein à un développement plus large. Ça peut être un frein ou un atout mais on peut s'apercevoir qu'on n'est pas dans de grandes séries. Dans les limites, pour l'activité de l'artisanat, ce sont les normes. Il y a de plus en plus de normes, ce qui veut dire que les entreprises doivent s'équiper pour répondre aux normes et c'est assez coûteux. Il a été repéré aussi la rareté du personnel qualifié. Il y a beaucoup d'entreprises qui aiment bien avoir leur petit jeune apprenti et en fait, il se forme sur le terrain. Et on peut repérer aussi une certaine frilosité : beaucoup sont finalement contents de leur sort et ne cherchent pas à créer des emplois et ne cherchent pas à se développer. Alors c'est bien mais ça peut être aussi un frein si on s'endort un petit peu trop sur nos lauriers.
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La réalisation d'un souhait
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n emploie le mot de « frilosité », alors pour certains cela peut être de la frilosité. Pour d'autres ça peut être à la fois que finalement, ils ont l'entreprise qu'ils souhaitent avoir et qu'ils ont 5-6 salariés, ou ils sont tout seuls. Et c'est à la mesure à la fois de leur capacité et du marché tel qu'il est. Mais heureusement, il y en a qui se sentent les capacités d'aller au-delà pour connaître un développement plus important et heureusement qu'il y a ces gens qui, eux, génèrent plus d'emplois. Et ce qui est à souhaiter, c'est que ce soit évidemment dans la durée. Et c'est sûr que plus on développe une entreprise surtout dans le bâtiment, plus c'est difficile, plus il faut se battre pour arriver à garder ses emplois.
Un label « qualité Pays Saint-Félicien » ?
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ans le cadre de cette réflexion des Entretiens du Terroir la question était posée : est-ce qu'il était utile, opportun de créer un label qualité pour les artisans du Pays de Saint-Félicien pour mettre en évidence, par rapport à la clientèle de la vallée du Rhône, dans un secteur beaucoup plus large, les spécificités, les atouts du Pays de Saint-Félicien ? Donc on en a pas mal débattu. Les avis étaient très partagés parce que d'un côté ça peut avoir un effet d'entraînement. Ça peut amener de nouvelles entreprises, ça peut améliorer la visibilité, ça peut mettre en avant les avantages concurrentiels comme on dit maintenant. Mais d'un autre côté, ce qui a été dit c'est que c'est plus difficile, plus subtil de mettre un label sur la qualité de
service, sur les atouts ruraux des artisans du monde rural alors que c'est beaucoup plus facile pour des produits. Tout ce qui a été exposé jusqu'à maintenant c'était sur des produits agricoles qui peuvent être labellisés effectivement sur un territoire. Et les artisans présents lors de cette table ronde disaient : « c'est un peu plus difficile pour nous de mettre sur nos camions « Pays de Saint-Félicien, la qualité ». C'est plus compliqué que sur des produits agricoles.
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chercher le client, ils sont allés au devant de la clientèle. Et le deuxième atout c'est ce qui vient de dire c'est un sentiment d'appartenance au territoire, on se sert les coudes. Les entreprises travaillent beaucoup entre elles, et il a été révélé que les jeunes embauchent des apprentis, embauchent des jeunes et ça se faisait aussi sur le territoire dans la mesure où il y a une culture, un langage commun où les jeunes répondent bien à la demande de leur patron.
Enquête participative
Des métiers qui évoluent très vite
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'aurais encore quelque chose à ajouter sur le sujet, c'est peut-être quelque chose à mûrir mais qui me paraît difficile pour le moment parce que je ne vois pas le cahier des charges qui pourrait être mis en place pour correspondre effectivement à ce label. Ça serait très compliqué, sachant en plus que ce sont des métiers où ça bouge beaucoup où ça évolue très très vite, que ce soit dans les matériaux ou dans le matériel. À mon avis, ce n'est pas encore demain que cela verra le jour.
Des enjeux
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t pour conclure, ce qui a été repéré, les enjeux c'était la ruralité qui est un cadre à protéger. Chacun des participants se sentait bien dans son domaine du Pays de Saint-Félicien, à site protégé. Cette ruralité est une richesse mais ça peut aussi être l'inverse, c'est-à-dire si on s'endort ou si on rate des améliorations technologiques, on est vite dépassé. Les enjeux, c'est de garder tout ce système de proximité, ces interactions qui ont
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Enquête participative
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Eric Merci, je ne fais que la transition, je demanderai quand même à Jacques Fanet qui est passé derrière mais, je vois qu'il prend des notes, peut-être sur cette question du label pour les artisans, si vous pouvez y revenir. Mais on finit d'abord la table ronde mais notez-le car ça peut être quand même un sujet intéressant. Alors, sur cette table ronde, qu'on vient d'entendre, on a beaucoup parlé savoir-faire, c'était le thème plus spécifique des travaux qu'a menés Rémy. Je ne demande pas aux intervenants de se présenter aujourd'hui car tout le monde connait tout le monde, je pense qu'on peut faire l'économie de cette présentation. Rémy, votre atelier, c'était savoir-faire et jeunesse, alors est-ce que ça croise un peu avec ce que tu as entendu ?
Savoir-Faire sociaux et Jeunesse Rémy Sapet Rémy Sapet
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'atelier, on l'a animé à trois, il y avait Andréa et Daniel Rouchier
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qui est excusé. En fait, en introduction, on a abordé deux choses, savoir-faire sociaux, on avait réuni toutes, plusieurs associations du Pays de Saint-Félicien. Et notamment quand on dit savoir-faire sociaux, c'était ici, quelle idée du lien. Il y a un lien entre les personnes par le biais du monde associatif. Et puis on a parlé d'un deuxième point, la jeunesse. Malheureusement, la jeunesse était peu représentée mais on en a parlé, donc j'y reviendrai, c'était le 14 mai 2013. Quel enseignement sur la qualité du lien, sur les savoir-faire sociaux sur le Pays de SaintFélicien ?"
Diversité des savoir-faire sociaux
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lors déjà, ce qui s'est dit, ce qui ressort comme enseignement, c'est que les savoir-faire sociaux sont très diversifiés. On touche au culturel, il y a le théâtre, la musique, et j'en passe... il y a aussi des activités sportives, des activités liées à la citoyenneté, des activités liées à l'animation, aux loisirs, à l'environnement, au social, à l'accueil, au développement local, à l'école. Déjà toutes ces thématiques sont portées par les savoir-faire sociaux. Toujours dans les enseignements, on a dit aussi qu'on avait repéré les mots qui sont revenus souvent durant cette soirée, on dirait des mots
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à haute valeur ajoutée. Quand on dit des mots à haute valeur ajoutée, on dit « potentiel », « vivier », « savoir-faire ». Voilà des choses qui peuvent être utiles pour un panier de biens et de services. Quand on a parlé de savoir-faire sociaux, il y a aussi le mot « innovation » qui est revenu, « innovant ».
Innovation
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uand je dis « innovant » je vais donner un exemple, je pense notamment à Félixval, qui fait du théâtre, et qui s'invite chez les gens, c'est le côté un peu innovant du théâtre. Le collectif citoyen du Pays de Saint-Félicien pratique une démocratie tournante, il n'y a pas un président qui dirige, c'est aussi une manière d'innover. Un nouveau lieu d'accueil est basé sur Saint-Victor, c'est aussi une nouvelle manière de faire de l'accueil sur le territoire. L'association « Energies-Bâtisseurs » sur Bozas essaie de réfléchir à une maison de retraite un peu particulière. Voilà, c'est pour montrer que le tissu associatif local est porteur d'innovation.
Insertion
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nsuite, ça c'est une vérité, mais parfois les vérités sont bonnes à dire, il y a le côté savoirfaire social insertion, c'est-à-dire qu'il y a des gens qui étaient là ce soir là et qui sont nouveaux sur le territoire et qui ont dit que grâce au tissu associatif, ça a permis de s'insérer sur le territoire. C'est aussi important à dire que l'associatif a un rôle intéressant
par rapport à l'insertion locale. Aussi, le savoir-faire social a mobilisé, il y a des événements sur le territoire qui sont reliés, depuis quelques temps, entre elles comme « Terroir en Fête », avec des animations sur toute l'année. C'est une nouveauté, ça marche et elle est ardéchoise. C'est quand même un événement, c'est bien des acteurs du territoire qui se mobilisent et qui organisent des événements. Après ce panel positif d'enjeux, il y a aussi des interrogations.
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été évoquées tout à l'heure : les acteurs privés et publics qui travaillent entre eux, les savoir-faire et les savoir-vivre. L'idée c'était aussi de ne pas avoir un développement trop rapide et de trouver un équilibre et enfin de toujours mieux se faire connaître, comme il y avait eu l'expérience d'un salon de l'habitat qui a été créé cette année, dont je crois que vous allez entendre parler tout à l'heure.
Enquête participative
Interrogations
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e qui se disait ce soir, c'est que malgré tout il manquait de la communication, d'outils ou d'un lieu d'échanges, entre les villages, entre les associations, un manque de matériel, matériel commun peut-être. Il y aurait aussi un manque de visibilité du Pays de Saint-Félicien en termes de développement. Quelles sont les idées fortes, où le Pays de Saint-Félicien veutil aller ? On ne sait pas très bien, c'est un peu global mais … Quels sont les vrais ressorts ? Il y avait aussi une envie, et ça les Entretiens de Terroir le permettaient, c'était d'ouvrir de nouveaux horizons, besoin d'échanger, besoin de dynamiser les liens. Voilà toutes les interrogations.
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Enquête participative
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lors, la jeunesse, c'était surtout des habitués qui parlaient parce qu'il y avait peu de jeunes ce soir là à part Damien, qui était là, sinon on était tous des gens de plus de 45 ans – même si à 45 ans on l'est encore. Il y avait peu de jeunes dans les associations, que c'était difficile à faire bouger, pas très reluisant comme... Il y avait aussi un constat par rapport aux parents qui avaient des enfants à l'école et qui étaient aussi difficiles à mobiliser. Après, il y avait un autre aspect des choses, les jeunes qui avaient des projets d'installation ou de création d'activité, certains d'entre eux étaient confrontés à des difficultés de soutien bancaire. À l'inverse, on s'est dit : « est-on, nous aussi, adultes, assez attractifs, vis-à-vis de la jeunesse ? » « Est-ce qu'on va vraiment voir les jeunes ? ». Voilà les questions qui étaient posées durant la soirée. Et dernier point sur cette partie savoir-faire social et jeunesse, c'est sur les perspectives.
Perspectives
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lors on disait aussi que c'était intéressant d'avoir un projet semblet-il simple, innovant et collectif. Alors, on disait que pour dynamiser le territoire, c'était un peu une boutade, pourquoi ne pas lancer un concours de boîtes aux lettres sur le Pays de Saint-Félicien, lancé par... pourquoi pas la Communauté de Communes. Et on décore les boîtes aux lettres. Deux ans ou trois ans après les gens français, européens, à l'international, viennent visiter les magnifiques boîtes aux lettres du Pays de Saint-Félicien. Voilà, c'était une idée de mobilisation. On parlait aussi des portes ouvertes de Pays de Saint-Félicien. Des Portes ouvertes
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de Pays on en a aussi eu, à un moment donné, sur le territoire porté par le pays de l'Ay au Doux. Pourquoi pas ? Une idée à relancer. Il y avait aussi l'idée de renouveler le Forum des associations, voilà ça revient avec les interrogations de tout à l'heure. Il semble que les associations sont fortes sur le territoire mais il manque de liens, il manque de connaissances de ce qu'elles font. Parce qu'une association c'est un être vivant, et un être vivant, ça bouge, ça vit, ça évolue et régulièrement, il faut se connecter pour savoir ce que font les uns et autres. Et dernière chose, on a parlé aussi du Saint-Félicien, le fromage. On a dit que ça pouvait être une locomotive pour le panier de biens et de services pour le Pays de Saint-Félicien, sur un plan économique, sur un plan social, sur un plan touristique, sur un plan environnemental. Ce n'était pas partagé par tout le monde mais par une partie. Eric Merci Rémy, j'imagine que ça donnera lieu à pas mal de questions de la salle parce que notamment le lien à la jeunesse suscite beaucoup d'interrogations. Peut-être on pourrait avoir une réaction à chaud, du chargé de mission de l'Office de tourisme, sur l'idée des boîtes aux lettres ? Mais ce n'est pas le thème de ton intervention avec Christian. Vous, vous aviez la table ronde « Accueil - nature » pour montrer l'écrin du Pays de Saint-Félicien puisque le mot a été employé tout à l'heure par Mehdi. Est-ce que l'écrin et la biodiversité qui va avec l'écrin est quelque chose d'important dans le panier de biens et de services qui peut se composer sur Saint-Félicien. Alors j'imagine que vous y avez largement travaillé dans votre table ronde. Donc voilà Damien et Christian si vous pouvez nous faire part des réflexions que vous avez eues sur ce sujet.
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Accueil & Nature Christian Astier, Damien Mathieu
Damien
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éjà pour répondre sur la question des boîtes aux lettres, il s'avère qu'étant parti en vacances, il n'y a pas très longtemps, j'ai traversé un village sur ma route de départ, qui s'appelait « Village des boîtes aux lettres ». C'est vrai que l'idée n'était pas mal, parce qu'il y avait des boîtes aux lettres en forme d'animaux, il y avait plein de choses différentes alors pourquoi pas ? Après il faudra voir s'il y a des personnes prêtes à se mobiliser autour de ça et voir ce qu'on pourrait en faire. Revenons à nos moutons, alors nous c'était la table ronde sur « Accueil et Nature », on s'est quand même bien cantonné surtout sur le volet Accueil. Pour commencer, je vais d'abord faire une photographie à l'instant T de ce que nous avons aujourd'hui, en termes, de capacité d'accueil sur le Pays de Saint-Félicien.
Capacité d'accueil
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apidement quelques chiffres, il y a 8 exploitations agricoles qui proposent de l'accueil du public sur leur exploitation, j'entends bien, accueil qui accueille des touristes ou même des locaux, et non pas des exploitations agricoles qui ne produisent et ne commercialisent pas en circuit court, puisqu'il y en a beaucoup plus. Nous avons un hébergement collectif d'une centaine de personnes qui est à Colombier-le-Vieux. Deux sites d'hébergements insolites qui peuvent accueillir une soixantaine de personnes, 13 chambres d'hôtes qui peuvent accueillir une centaine de personnes, 13 chalets HLL (Habitation légère de loisirs) donc ça correspond au camping de Pierrageai de Saint-Félicien qui peut accueillir une cinquantaine de personnes. Les meublés qui sont l'essentiel de notre parc d'hébergement qui sont au nombre de 65 et qui peuvent accueillir 350 personnes. Grosse particularité, nous n'avons pas d'hôtel sur le Pays de Saint-Félicien. Peut-être parce que nous ne sommes pas sur une route de passage et donc on ne peut pas accueillir des clients comme les VRP ? Peut-être aussi parce que c'est un hébergement qui ne correspond pas à notre clientèle sur le territoire. Mais il s'avère que cela fait parfois défaut, il y a des personnes qui sont en itinérance, et qui aimeraient avoir un endroit où loger à la nuitée. 6 aires de campingcar qui correspondent à la difficulté de pouvoir héberger des personnes pendant la semaine de l'Ardéchoise. Pareil pour les campings, il y en a 6 avec un total de 200 placements et 9 restaurants dont 2 bistrots de pays et dont la vocation est de travailler les produits du terroir. Un maître restaurateur, le but était de travailler les produits frais et une ferme auberge. Alors petit aparté sur la partie restauration, je
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Jeunesse(s)
Enquête participative
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Enquête participative
Christian "Alors, je rappelle simplement le principe de notre table ronde : c'était d'inviter des personnes dans le cadre de la restauration et de l'accueil. Donc il y a un certain nombres de personnes qui ont répondu à l'appel. On va simplement tirer quelques lignes directrices de ce qui a été dit mais bien sûr ce n'est pas une liste exhaustive de tout ce que vient de nous énumérer Damien. Alors on va commencer par Edith Mignot, qui se définit comme une agricultrice et hébergeur, Ferme de Saute Lièvre à Saint-Victor. Donc elle fait un élevage de porcs, de volailles, culture de la lavande pour cosmétiques. Elle a une clientèle diverse et variée. À ce niveau, elle dit qu'elle a une clientèle familiale qui est locale et autour de la région Rhône-Alpes. Elle se fait connaître par un label qui est « l'Accueil Paysan » et sa difficulté majeure, c'est la
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maîtrise du temps. Le fait de concilier son activité de productrice à celle d'agricultrice et puis l'accueil. Elle a un projet d'accueil de jour pour enfants en lien avec le Conseil Général et une autre personne. Le deuxième, Sébastien Rosset, hébergeur, agriculteur, restaurateur, Ferme Auberge de Corsas à Saint-Victor. Donc production et valorisation par la Ferme Auberge : on produit bio, on produit sur la ferme, on transforme et on met sur la table ces produits. Origine principale de clientèle : RhôneAlpes, cadres supérieurs, des personnes qui ont un pouvoir d'achat important. Leur créneau (parce que c'est Sébastien qui est présent mais à chaque fois il y a un compagnon ou une compagne, on ne les oublie pas : Julie) : la qualité label bio. Les difficultés : allier agriculture et disponibilité avec le public. C'est toujours la même chose, ce n'est pas évident d'allier ces deux activités qui sont complémentaires mais aussi parfois opposées. Les perspectives : s'adapter de façon permanente à l'attente des clients puisque le but de la Ferme Auberge de Corsas c'est bien de vivre et de montrer qu'on peut vivre en Ardèche de cette activité. Jean-Luc Thomas et Isabelle, gîte de Fouard à Bozas, hébergeurs, là le cas est un peu différent, là ils sont là dans la salle, ils nous donneront des précisions. Donc au départ, c'est une envie de se lancer dans l'accueil, c'est d'accueillir des personnes, de faire vivre des personnes dans cette bâtisse qui a été rénovée. Et puis il y a un deuxième point pour ce site, c'est de valoriser la langue et la culture occitane, sur ce point, je n'en dis pas plus, tout à l'heure, ils nous donneront plein d'informations sur la chose. Les atouts sur lesquels ils appuient leur accueil, c'est la promotion de produits locaux de qualité, les paysages authentiques. Quand on va à Fouard, on a une très belle vue et un très beau paysage sur Saint-Félicien et audelà. Et tout le côté patrimoine qui est
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riche et qui est à découvrir et parfois un peu caché, pas facile à voir qu'il faudrait peut-être mettre en valeur. Difficultés : se faire connaître et se vendre. Ce n'est pas évident de concilier une activité professionnelle et puis de l'accueil. On a commencé un petit peu avec les ateliers numériques de l'Office... Puis il y a tout le côté «Label Occitan » que vous décrirez tout à l'heure. Envies : développer un caractère particulier autour de la langue et de la culture occitane. Michel Milesi et Evelyne, hébergeurs à Pailharès, sur la ferme de Theolier. Donc lui, il définit tout de suite son activité autour de l'écologie « éco-gîte » et cohérence pour un développement durable. Donc des valeurs autour de l'environnement, de la protection de la nature, la qualité des produits. Deuxième point : « Nous sommes du coin et pouvons difficilement vivre ailleurs ». Ils nous expliquent qu'ils ont tenté de vivre ailleurs dans un autre endroit que dans la vallée du Doux mais ils n'y sont pas arrivés et là enfin ils y arrivent, ils se sentent bien, ils sentent leurs racines. La clientèle : des cadres supérieurs aisés, des agriculteurs de l'est de la France qui, en général, ont, disent-ils, des fermes assez importantes qui n'ont rien à voir avec les fermes locales. Des personnes qui viennent aussi de départements un peu désertiques, ils entendent par là, la Lozère, l'Ardèche, ce genre de choses, on va dire comme ça. Et puis ils reçoivent des gens du monde entier avec le woofing : des personnes qui viennent travailler chez eux, ils ont eu des Australiens, des Néerlandais je crois, des gens un peu du monde entier. Difficultés : manque de temps, alors là, Michel avait une bonne astuce, si vous avez ce problème, il dit : « je les emmène au jardin » puisqu'il est agriculteur, il fait du maraîchage « pour être avec eux, et en même temps ils donnent un coup de main ». Il y a une certaine efficacité
pendant le temps de travail. L'envie c'est de retaper un bâtiment, une ancienne étable pour accueillir des groupes et pouvoir accueillir différentes cérémonies. Philippe Jan et Sandrine, restaurateurs à l'Auberge Buissonnière. Donc tout à l'heure on a eu leur prestation, une prestation de qualité, ce qu'il faut dire c'est que ces personnes sont installées depuis peu sur le secteur. « Au départ, ce n'était pas toujours facile de s'intégrer », c'est peut-être une question que nous devons travailler. Quand des gens extérieurs arrivent, comment on fait pour que l'intégration se fasse le plus rapidement possible. Ils sont sous le label « Bistrot de Pays », on l'a déjà dit, valorisation des produits locaux et animation culturelle ainsi que services divers et variés d'informations touristiques etc. Difficultés : intégration et manque de temps. Envie : développer des relations avec les producteurs locaux. Je crois que c'est quelque chose qui avance nettement parce qu'entre le début, ce qu'on pouvait trouver sur la carte de l'Auberge Buissonnière et maintenant, je crois qu'il y a beaucoup de choses qui ont changé et bravo pour ce qu'ils nous ont mis sur la table tout à l'heure."
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ne sais pas si vous aviez vu mais l'année dernière, L'Express a consacré un dossier sur la restauration en Ardèche et a essayé de répertorier les meilleures tables à moins de 25 € d'Ardèche. Il s'avère que la « Récrée », à Vaudevant, a été citée comme la meilleure table de moins de 25 € d'Ardèche et la Ferme-Auberge de Corsas qui est l'une des 3 seules Fermes Auberges en bio d'Ardèche. Donc hier, on parlait du qualitatif pour les territoires comme nous plutôt que du quantitatif, et bien c'est plutôt pas mal pour le territoire du Pays de Saint-Félicien, compte tenu de la masse de restaurants que nous pouvons avoir à l'échelle départementale."
Enquête participative
Damien "Hier soir, pour ceux qui étaient présents on a parlé de niches. Je crois qu'on en a bien fait la démonstration là, avec les différentes personnes qu'on a accueillies sur cette table ronde, qui ont quand même des spécificités assez différentes et des clientèles assez différentes. On est vraiment dans ce concept de niche.
Perspectives
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our terminer, on a décidé de proposer quelques perspectives, de vous livrer
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Enquête participative
Circuits courts et points de vente
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e développement des circuits courts, donc là aussi, David Maisonneuve, hier, nous en a fait la démonstration, c'est quelque chose... ce vers quoi on peut tendre, il n'y a pas besoin de vous convaincre pour ce domaine-là. Un lieu où acheter des produits, ça manque cruellement sur le Pays de SaintFélicien, c'est assez difficile de dire aux personnes qu'ils peuvent aller acheter directement sur l'exploitation mais il y a déjà une première problématique qui est l'isolement. Ce n'est pas toujours évident d'aller jusqu'à la ferme et du coup c'est plus, plutôt une spécificité de produits, il n'y a pas forcément d'exhaustivité. Et deuxièmement, les agriculteurs sont des personnes, en général, très occupées et ils ne sont pas forcément sur l'exploitation tout le temps. Donc, c'est difficile pour nous Office de Tourisme de dire : « dans une
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demi-heure vous trouverez quelqu'un à la ferme ». Si on avait un lieu, sous quelle forme, ça c'est à travailler, où les gens pourraient remplir leur propre panier, repartir avec les produits locaux, ça serait, je pense quelque chose d'intéressant pour le territoire.
Hébergements : entre thèmatiques et modes d'accueil
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a partie hébergement : j'en reviens au concept de niche. Pourquoi pas thématiser les hébergements ? Comme Isabelle et Jean-Luc qui travaillent sur l'aspect « Culture occitane », mais aussi aujourd'hui, il y a beaucoup de labels d'accueil : rando accueil, accueil des cavaliers, accueil vélo, la pêche aussi. Il y a une multitude de choses, il faut encourager les hébergeurs à se diriger sur un type de clientèle et à se spécialiser là-dedans. Nous pouvons organiser des éductours. Qu'est-ce qu'un éductour ? Pour commencer, c'est un moment où les prestataires se réunissent pour aller visiter des hébergements, des restaurants, des musées, des sites d'activités, des sentiers thématiques, etc. Alors quel est le but de ces éductours ? Ce n'est pas d'aller se balader, de prendre du bon temps, c'est d'une part apprendre à connaître la composante de son territoire pour que les prestataires puissent le restituer à la clientèle, mais aussi, on m'a soufflé cette problématique, c'est qu'il y a un manque de relation entre les différents corps de métiers. Et justement ces moments, permettent à chacun de se rencontrer, d'échanger, développer des projets ou d'éventuels plans de travail. On l'a bien remarqué sur un autre volet, sur les ateliers numériques avec Christian cet hiver, il y a vraiment une complicité qui s'est créée entre les prestataires qui ont suivi cet atelier.
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Ensuite du conseil à l'aménagement, c'est difficile aujourd'hui pour un hébergeur de se démarquer, de trouver sa clientèle, et d'être performant. Et il y en a beaucoup qui souffrent de ça. Ça serait bien de penser justement à développer ce conseil, que ce soit la mise en place du mobilier, la décoration, vers quelle spécialité s'orienter, afin de se professionnaliser. Aujourd'hui, l'accueil du public dans l'hébergement ça devient de plus en plus difficile. Et il faut vraiment se spécialiser par rapport à ça. Et enfin le petit panier de bienvenue. Je reviens sur mes vacances, il y a quinze jours, quand je suis arrivé dans mon gîte, la propriétaire, nous avait laissé un petit paquet d'une biscuiterie locale. C'est toujours agréable d'avoir ce petit geste, on se sent tout de suite plus à l'aise. C'est un petit plus et tous ces petits plus vont participer à la qualité d'accueil du Pays de Saint-Félicien. La partie restauration, alors ça c'est assez nouveau en Ardèche de devenir une étape savoureuse, proposée par Ardèche Goût. En fait, c'est l'idée d'associer un restaurant et un producteur. Les personnes vont manger le midi dans un restaurant, consomment des produits locaux, qu'ils vont pouvoir ensuite découvrir à travers une visite dans l'exploitation. Ils vont pouvoir voir comment est fabriqué ce produit et surtout repartir avec s'ils ont apprécié l'expérience culinaire qu'ils auront vécue pendant leur repas. Nous pouvons mettre en valeur les fournisseurs locaux, donc ça l'Auberge buissonnière le fait actuellement à travers sa carte. Elle précise la provenance de tous les produits, donc on sait ce qu'on mange et d'où ça vient, chez qui ça a été fabriqué. Donc je pense que c'est quelque chose
qu'il faut généraliser auprès de tous les restaurateurs du Pays de Saint-Félicien du moins ceux qui s'approvisionnent en local. Et on peut peut-être imaginer de mettre un petit grain de folie, de l'originalité dans la mise en forme, donc ça c'est à réfléchir, je suis preneur s'il y en a qui ont des idées. Toujours dans un partenariat restaurateurs-producteurs, pourquoi pas les associer ? Par exemple, chaque mois, on peut imaginer qu'il y ait un restaurateur et un producteur qui nous proposent une recette. Le restaurateur va travailler le produit qu'il aura trouvé chez l'agriculteur et ainsi tourner sur les restaurants et les différents producteurs. Ça nous permettrait de communiquer autour de ça et de faire parler toujours plus autour du Pays de Saint-Félicien. Et enfin le lien avec la culture, Christian en a parlé notamment avec les Bistrots de Pays, il est indiqué dans le cahier des charges qu'il faut avoir au moins trois manifestations culturelles dans l'année.
pan i e r d e b i ens & d e se rv i ces
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quelques idées bien sûr à retravailler pour chaque secteur d'activité. Je vais commencer avec les producteurs, pourquoi pas créer un label local ? Hier on a eu la démonstration avec l'Oignon doux des Cévennes, c'est vrai que c'est vraiment une plus-value pour le produit, pour sa mise en valeur et pour sa commercialisation. Donc là j'ai repris le label « Origine France Qualité » que j'ai modifié avec le logo du Pays de Saint-Félicien. Par exemple, le marché des producteurs locaux du dimanche matin accueille pas mal de personnes et est apprécié justement parce que les gens peuvent consommer local. Ça serait peutêtre bien de pouvoir acquérir la démarche qui est mise en place par le département et qui labellise justement les marchés de producteurs de pays. Ça nous permettrait d'augmenter en visibilité ce marché.
Enquête participative
Les paysages
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onc ça finalement, on n'en a pas énormément parlé mais bon, c'était bien la table ronde « Accueil et Nature ». Donc on a proposé aussi quelques idées, la labellisation des paysages. On a
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Enquête participative
Événements
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es événements, c'est quand même la vitrine de notre territoire. Donc on a commencé, il y a quelques années, avec Jacques, en lien avec les associations des événements villageois estampillés « Terroir en Fête ». Je pense que vous connaissez tous aujourd'hui, la charte graphique, mais on pourrait peutêtre le développer au travers des autres types d'événements. On pourrait avoir
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« Culture en fête » demain, ou ce que j'ai appelé la conquête des paysages : ça serait de fédérer tous les événements qui sont en lien avec la nature, en pleine nature donc tout ce qui est rando, rando naturaliste, événements cyclo etc. Et donc pour conclure, une touche d'optimisme, puisque la saison 2013, pour le Pays de Saint-Félicien a été très bonne comparée à la moyenne nationale. Nous accusons plus de 28% d'augmentation pour juillet/août au passage à l'Office de Tourisme, donc j'entends bien, passage à l'Office de Tourisme et non consommation sur le territoire. Mais c'est plutôt positif quand on compare à l'Ardèche Verte qui fait en moyenne plus 2%. On a à ce jour, plus de 14 000 visites sur le site internet de l'Office de Tourisme depuis le début de l'année, ce qui montre qu'il y a quand même une curiosité, qu'on attire de plus en plus le client et que se pose, de plus en plus, la question de venir découvrir notre territoire. L'Ardéchoise, bien sûr, on n'en parle plus, 13 000 personnes qui sont accueillies sur une semaine. Saint-Félicien, 1 300 habitants, on multiplie par 10 la population durant une semaine. Les visites à la Ferme qui est un concept qui plaît toujours. Quasiment 400 personnes ont été accueillies dans les exploitations, rien que dans ce modèle-là, visite à la ferme. Après, il faut ajouter toutes celles qui arrivent de leurs propres moyens dans les exploitations. Et enfin, surprise depuis deux ans, le mois de juillet semble s'orienter de plus en plus vers la clientèle étrangère car elle représente 20% de notre passage dans l'Office de Tourisme, cette année. C'est une nouvelle tendance qu'il va falloir surveiller de près dans les années à venir. Voilà ce qu'on avait à dire sur le côté Accueil-Nature. Eric Merci beaucoup. Je crois qu'à travers vos
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deux interventions chacun a pu prendre conscience du travail effectué par cette table ronde, de la richesse des propositions que vous venez de faire pour enrichir le panier de biens et on le voit est déjà bien garni à l'issue de ces trois interventions. Peut-être que la dernière, on va passer de la nature à l'agriculture, on va mettre un peu plus de vert dans notre table. Comment cela va se passer ? Tu peux nous dire, Pascal ?
Agriculture Pascal Magnier
D'abord merci aux participants, c'est vrai que tous ceux qui étaient convoqués ne sont pas venus mais les participants étaient là avec enthousiaste, et on voit qu'il suffit de remuer ses méninges, merci à Damien pour le professionnalisme de son exposé, et de se réunir pour voir que la somme des idées produites est vraiment intéressante. Merci à Andréa pour l'organisation et la retranscription de cette table ronde. Merci à la Communauté de Communes pour ces Entretiens, bien sûr. Cette table ronde sur l'agriculture est un moment clé pour la recherche d'éléments de terroir dans le Pays de Saint-Félicien. Et je le répète pour moi ici, pour son territoire, son avenir, l'agriculture est la force et la faiblesse.
pan i e r d e b i ens & d e se rv i ces
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commencé un peu avec le label « Station Verte » à Saint-Félicien cette année. Et je pense qu'on peut encore plus pousser et faire en sorte que les gens viennent pour ce paysage-là, du Pays de Saint-Félicien. La Rando-croquis, ça aussi, c'est une réalisation de cette année, qui participe bien à la mise en valeur de ce paysage, puisqu'elle propose aux randonneurs de regarder sous un œil différent, d'apprendre à le dessiner voire même à apprendre à le photographier. Les sentiers thématiques, c'est quelque chose qu'on fait depuis quelques années, au travers des randos Tub', l'arboretum à Saint-Félicien, le site d'interprétation à Pailharès... il y a encore des projets en cours, des choses qui fonctionnent plutôt bien et qu'il faut pérenniser. Et ce que j'ai appris : ménager des espaces de contemplation. Donc là, je m'inspire de la route des paysages qui a été créée en Norvège, à des échelles différentes et avec des moyens différents mais je trouve l'idée intéressante. Il y a des architectes qui ont proposé des aménagements pour regarder différemment le paysage. Par exemple, une avancée sur une passerelle, avec un gros dos d'âne qui permet de se surélever et de voir différemment. Ça incite l'automobiliste à s'arrêter, à prendre le temps de regarder et d'apprécier, voire même de repartir avec un souvenir du paysage.
Enquête participative
Une force …
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u vert, sûrement oui. Alors, moi j'ai participé à cette table ronde avec beaucoup d'enthousiasme et la phrase que j'ai envie de dire pour exprimer cette table ronde c'est que l'agriculture est la force et la faiblesse de ce territoire. Et c'était une table ronde qui était vraiment riche en échanges informatifs, des réflexions pointues et des apports constructifs. En faire une synthèse, je l'avoue modestement, c'est obligatoirement exprimer ce que moi j'ai perçu. C'est faire des choix, c'est exprimer mon ressenti, c'est placer ce qui a été dit par le filtre de mes oreilles et de mon regard, et c'est en cela qu'il est critique, donc je vous demande de comprendre mon rendu, comme ça. Comme l'expression de moi.
'est une force, nous sommes dans un territoire rural et ça c'est important. C'est une production agricole dite diversifiée avec des produits de base, d'élevage (vache, brebis, porc, poulet, chèvre), la production végétale, les grandes cultures de céréales et autres, les fruits (cerise, abricot, pêche, pomme etc.), et des productions plus fines (des petits fruits : framboise, cassis, fraise), des plantes aromatiques et médicinales. La palette est grande, d'autant plus qu'elle s'agrandit avec des produits transformés sur place dans les fermes ou dans les ateliers adéquats. C'est une force, cela a été dit lors de la table ronde, la transformation et la vente directe ont sauvé des fermes. L'ensemble de ces produits est une force pour identifier le Pays de Saint-Félicien. Il y a des savoir-faire, de la fierté et de la volonté de qualité. C'est une force parce qu'il y a chez ces agriculteurs, des hommes et des femmes capables de réfléchir, on l'a vu à cette table ronde et de travailler ensemble. Réfléchir et travailler ensemble pour la production : combien de GAEC,
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de CUMA et de montages en commun. Pour la transformation, Nectardéchois en est un exemple et d'autres ateliers collectifs. Pour la vente, saluons le travail significatif des amis de la Truffole, présents à cette table ronde, pour la valorisation d'un produit un peu plus banal, la pomme de terre. « Terroir en Fête » par la production de ses marchés de producteurs, n'oublions pas bien sur les Marchés à la ferme des Fermiers & artisans du Pays de l'Ay au Doux. Et bien sûr c'est une force pour la qualité de ces productions, la qualité des produits transformés et la qualité de la vente.
… et une faiblesse
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ne faiblesse, je l'ai dit : parce que le monde agricole est diversifié et disparate, parce que le monde agricole est complexe et tiraillé, parce que le monde agricole est local et mondial. Et de l'état de ce monde agricole vous pouvez en faire le constat, nous pouvons en faire le constat, et il vaut mieux le constater avec objectivité de ses forces et de ses faiblesses. Je sens beaucoup d'espoir du travail des Entretiens du Pays de Saint-Félicien en est l'illustration. Deux mots ressortent de cette table ronde c'est fierté et qualité. Eric
Enquête participative Jacques
Sylvette Beraud-Williams
Ça peut être l'animateur qui l'assume tout seul mais nous pouvons assumer ensemble la discipline collective nécessaire. Vous savez que le temps c'est très délicat à maîtriser... tous les éléments du temps. Puisqu'on est contraint d'anticiper, sachez que ce soir avant 21h il faut que la salle soit dégagée pour Meli-Melo festif. Auparavant, on aura eu le repas-terroir 19h00-19h30, ce qui suppose d'avoir débarrassé aussi la table et d'avoir nettoyé. Évidemment, nous ne sommes pas en avance. Nous les animateurs, avons à assumer, y compris parfois l'agressivité de ceux qui se sentent frustrés et l'organisation du temps. Avant de passer aux questions, pour anticiper un peu, vous avez remarqué qu'il y a des expositions tout autour, notre libraire du Grillet, Luc Jullien, qui est là-bas, qui vous propose des livres. On prendra un petit moment tout à l'heure pour présenter Jean Collin et ses sculptures qui aura quelque chose à dire et qui illustre un des éléments de notre terroir en construction. Dans cette anticipation là, on peut dire que si on a 10 minutes de questions, ensuite 20 minutes de pause et on aura au global une demiheure de retard. Simplement, j'annonce ce qui peut se passer mais nous sommes ouverts à tous les possibles.
"Il y a combien d'exploitations agricoles sur le Pays de Saint-Félicien ?"
Merci beaucoup. On a entendu tes propos et on a senti la fierté et la qualité du travail que vous avez mis aussi dans cette réflexion. On a fini ce tour de table en retraçant ces tables rondes. Jacques on est en retard mais ça mérite tout de même qu'on prenne quelques instants pour vos réactions et commentaires, peut-être des questions.
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Pascal "Je ne sais pas si le recensement a été fait mais en tout cas quand on se plonge dans les chiffres, et bien vite on se noie. Et ça ce n'est pas mon truc, alors, il y a peut-être quelqu'un d'autre qui peut répondre à ça ?" Jacques Je vais m'adresser au technicien Chambre d'agriculture, qui s'occupe du Comité local à l'installation. Et nous avons aussi Philippe Costet qui est Vice-Président de la Chambre d'agriculture, je le signale pour ceux qui ne le connaissent pas. Alors Denis, voilà, je crois qu'on a fait un état des lieux du nombre d'exploitations, avec difficultés, sur le Pays de Saint-Félicien. Denis Jammes "Alors, c'est un peu la question piège. Disons que grosso modo, on peut compter sur 150 exploitations sur le Pays de SaintFélicien. Alors, en équivalent temps-plein, on arrive à peu près 400-500, si on compte les conjoints d'exploitants, les associés pour les exploitations en société, les saisonniers pour les fruits. J'aurais pu préparer un peu plus de précisions dans ces chiffres là, pour situer un petit peu. En comparaison, il y a un peu plus de 5000 agriculteurs en Ardèche, et sur le Pays de Saint-Félicien, le nombre d'exploitations et l'évolution du nombre d'exploitations suit à peu près la moyenne départementale. Malheureusement, on constate une diminution du nombre d'exploitants, d'un recensement à l'autre, recensement qui a lieu en général tous les 10 ans. Sinon, les évolutions sont à peu près identiques à
l'échelle départementale, c'est-à-dire qu'on baisse en nombre d'exploitations. On perd parfois en surfaces agricoles utilisées. On a une augmentation d'exploitations sous forme sociétaire. Le nombre des hommes et des femmes diminue en général plus rapidement que celui des surfaces exploitées. Donc les exploitations qui s'agrandissent le plus souvent, et malheureusement aussi des surfaces qui sont abandonnées, avec une concentration dans les secteurs les plus faciles à exploiter. Malgré tout sur le secteur de la Communauté de Communes du Pays de Saint-Félicien, si on regarde un petit peu avec l'agriculture que l'on a, on constate que des communes qui ne sont pas forcément très favorisées, d'un point de vue agricole, je pense à la commune de Pailharès, par exemple, où on est sur des secteurs avec plus de pentes que d'autres communes du secteur. C'est pas dans ces communes là que la baisse du nombre d'exploitants est la plus importante. Ça veut dire que dans ces communes-là, il y a aussi des exploitants qui trouvent des ressources pour créer des activités, pour s'installer et vivre dans ce pays-là."
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Enquête participative
Philippe Costet "Peut-être pour répondre à ce que vient de dire Denis, pour compléter son propos, sur le Pays de Saint-Félicien, l'agriculture est encore très présente par rapport à l'ensemble du département. C'est encore un secteur sur lequel, même si c'est assez difficile, tout le monde le dit .... après il ne suffit pas de le dire, il faut savoir comment on fait...il y a encore l'installation de jeunes agriculteurs parce que c'est pas le cas partout. Il y a encore une agriculture présente, il y a encore des agriculteurs, il y a encore des gens qui s'installent, les systèmes d'exploitation évoluent et tant mieux parce que la transmission de l'agriculture, ce n'est plus
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Enquête participative
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Eric Merci, on y reviendra. Une autre question. Gilles "Oui, une question sur les jeunes. Ils font du sport, ici, les jeunes ? Je n'ai pas entendu parler d'associations sportives, je me suis demandé s'ils fumaient dans leur coin ? J'ai vu des stat', des choses comme ça mais on ne voit pas l'évocation de matchs, de personnes âgées qui venaient applaudir pour voir des matchs, enfin je veux dire toute sorte d'interaction qu'on a ailleurs. Alors voilà chez vous, où sont-ils ?" Rémy "Alors en fait, pour la table ronde, on avait invité des associations et tout type d'associations, et il y a même des Conseils municipaux de jeunes, comme à Saint-Victor. On les a invités, ils ne sont pas venus. Les Foyers des jeunes, on les a invités, ils ne sont pas venus. On avait invité des associations sportives aussi, point. Après, il y en a sur le territoire, ils font du football, il y en a qui font du basketball, du handball, ce soir là, il n'y avait pas d'association présente à la table ronde. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'association sportive sur le territoire. Tu peux compléter, Andréa ?"
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Andréa Blanchin
Jean François Gallet
"Oui, justement pour compléter un petit peu. Peu d'associations représentant des jeunes, du sport notamment des jeunes étaient là, après c'était un contexte un peu difficile. C'était une période de cours pas de vacances. Ensuite, là où je voudrais intervenir c'est qu'elle n'a pas pu être présente à cette soirée, mais on a quand même une école de musique, ici, à Colombier-leVieux, dont on reparlera plus tard dans l'après midi, il me semble. Elle est quand même très active, elle est une antenne départementale, qui arrive à envoyer énormément d'élèves au conservatoire de Lyon ou de Vienne, ce qui est un atout pour le pays. Et ce qu'on n'a pas dit mais vous pourrez le constater par vous-mêmes dans l'exposition sur le côté, on a la compagnie de FélixVal. Il y a aussi beaucoup de jeunes qui font des activités musicales dans des groupes de musique, d'animation on a aussi une Batucada qui est assez active sur le territoire du Rhône-Alpes. Donc c'est vrai qu'on n'a pas eu tous les représentants ce soir là mais c'est quand même un territoire actif. Et d'un certain point de vue, ce serait bon de le prendre un plus en compte dans une perspective de développement. C'est la future richesse du pays et puis il faut le dire parfois, un terroir s'alimente des nouveautés qui sont créées dessus. Ça c'est encore une piste à explorer."
"Oui, ma question, c'est pour revenir à ce qu'on évoquait sur les exploitations agricoles, dans la façon dont ces exploitations vont se valoriser. J'ai cru comprendre qu'il y avait une forte tendance circuit court. Donc pour être un peu schématique, le panier, mais une autre approche qui est le caddy, où c'est plutôt le rapport de force. Dans un cas, c'est le producteur qui peut mettre en valeur ses produits, dans l'autre cas, il est obligé de se faire valoir en étant moins cher. Comment ça peut se répartir ? Cette approche circuit court est privilégiée ?"
Eric Jacques Fanet qui revient dans la salle, il avait dû s'absenter. Peut-être par rapport à cette idée de label des entreprises artisanales du Pays de Saint-Félicien, possible ? Pas possible ? Et puis après une question, oui allez-y posez votre question d'abord.
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Eric Panier ou Caddy ? Pascal pour le Pays de Saint-Félicien ? Pascal "D'abord, je crois qu'il faut avoir quelque chose à vendre. Et en fonction de la forme de ce qui est à vendre, c'est-à-dire un produit fini ou un produit brut, le schéma de commercialisation se pose à ce moment là. Donc vendre un produit brut, c'est vendre à des acheteurs à une coopérative. Et vendre un produit, il suffit de se plonger pas très longtemps dans les chiffres pour comprendre que c'est beaucoup plus intéressant de faire des circuits courts. L'organisation des circuits courts, c'est chacun qui est capable de se la faire, on a quelques tentatives avec l'association des Fermiers Artisans du Pays de l'Ay au Doux de réfléchir à la vente directe au travers des deux « marchés à la ferme » qu'on fait. C'est-à-dire qu'on est vraiment critique par rapport à ce qu'on propose, par rapport à comment on vend, comment on s'organise autour de ça. Mais c'est vrai que la solution des circuits courts, elle est, pour l'instant,
individuelle, des circuits courts et de la vente directe. Et puis, il n'y a pas de solution définie et préconisée à l'avance et c'est une bonne question, peut-être qu'il y a à s'organiser autour de ça. Jacques Une dernière intervention rapide avec une contrainte immédiate de circuit court … surtout en temps … avec Jacques et Mehdi qui doivent partir pour récupérer le train à Tain l'hermitage.
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de père en fils, ça aussi tant mieux. ça bouleverse les habitudes, ça bouleverse un peu le schéma dans lequel était l'agriculture ces 20-30 dernières années, avec des gens qui viennent de l'extérieur, des activités nouvelles, globalement, on peut dire qu'il y a encore des atouts pour que l'agriculture au sens large du terme puisse trouver sa place encore au Pays de Saint-Félicien."
Enquête participative
Jacques Fanet
La question du label « Qualité Pays SaintFélicien »"
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ar rapport à la question que posait Eric en toute première partie de la présentation. Moi j'étais très intéressé par cette prise de conscience d'un artisanat de qualité dans le domaine du bâtiment dans la région. Ce n'est pas quelque chose que j'ai l'habitude de manipuler, comme les produits agricoles. Je pense que ce n'est pas impossible de mettre en place une forme de label, une distinction particulière qui pourrait prendre la forme d'une marque collective, mais ça c'est à chercher. À mon avis, le principal problème est dans l'élaboration d'un cahier des charges. Si les gens du secteur ont une prise de conscience qu'ils font un travail de qualité supérieure à ce qu'il se fait en dehors du secteur, il faut essayer d'avoir une discussion en commun pour établir : quels sont les éléments qui font la particularité de la qualité du travail des artisans du bâtiment de la région ? Et voir s'il n'y a pas la possibilité d'établir un cahier des charges plus ou moins exigeant en fonction du nombre de personnes et du niveau auquel ils peuvent se situer. Mais vous savez dans le domaine
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agricole aussi, établir la mise en place d'un label ou d'une appellation d'origine, ça passe souvent par la mise en place d'une discussion sur le contenu d'un cahier des charges et de savoir si on peut faire quelque chose qui soit suffisamment intéressant sur le plan qualitatif. Moi je me rappelle dans le Jura, par exemple, d'un produit comme le Macvin du Jura qui est un assemblage d'eau de vie et de jus de fruits, il y avait 25 ou 30 producteurs, 25 ou 30 façons de faire le Macvin. Mais il n'en restait pas moins qu'il y avait un produit, il y avait un savoir-faire qui était local, qui était très précis. À force de travail des intervenants du secteur, ils ont fini par se mettre d'accord sur un cahier des charges. En l'occurrence ça a abouti sur un AOC mais ça peut aboutir sur une marque collective. Moi ça ne me paraît pas du tout impossible, moi ça me paraît tout à fait faisable, à condition de se mettre autour d'une table, de chercher les points communs et de voir comment les traduire. Merci Jacques et Mehdi, parce que vous devez partir pour votre contribution au panier de biens et services du Pays de Saint-Félicien. Nous prenons 2, 3 questions à la suite et après on va se débrouiller à répondre.
Enquête participative naturels du Pays de Saint-Félicien ou celui du Mastrou qui vient de ré-ouvrir et qui pourra apporter un flux de population. Et on n'entend pas parler non plus de valorisation des espaces de ruisseaux, de rivières autour de Saint-Félicien. Est-ce que là-dessus, il n'y a pas quelque chose qui peut être travaillé ?" Eric Deuxième question, rapide si possible. Daniel Jullien "Ce n'est pas une question, c'est un complément par rapport à ce que dit Pascal sur les modes de commercialisation de vente directe. Car aujourd'hui, il existe aussi d'autres regroupements que ce style de magasins, il n'y en a pas sur le Pays de Saint-Félicien mais il en existe pas très loin et il y a des gens qui participent à ces activités là. Après, je dirais que la majorité de l'agriculture du Pays de Saint-Félicien, c'est le cadre classique de production, c'est-à-dire, fournir l'industrie et non pas amener à de la valorisation, là, il y a une grosse piste de travail à faire."
Frédéric Black "En termes de label au niveau de Saint-Félicien, je suis étonné qu'on ne parle pas trop de l'Ardéchoise, et du fait que l'Ardéchoise pourrait devenir une Ardéchoise permanente. Est-ce qu'un certain flux de population extérieure sur certains jours ne pourrait pas être aussi quelque chose qui pourrait être travaillée tout au long de l'année ? Et ce, par l'intermédiaire de la valorisation des espaces
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Eric
Christian
Merci et aussi pour la brièveté du propos.
"Je vais essayer de faire les deux et après on complètera. D'abord pour l'Ardéchoise permanente, bien sûr on y réfléchit, depuis le début de ce mandat, on a créé une commission tourisme que j'anime avec tous mes collègues qui appartiennent à cette commission. Bien sûr que c'est quelque chose qu'on prend en compte, on a créé un comité de liaison avec l'Ardéchoise, qui se réunit régulièrement. Les deux Jean-Paul et Jean Pol , pourraient nous en parler longuement puisqu'ils y participent, donc ça c'est le premier point. Alors, le deuxième point, ça va faire l'objet d'une intervention avec Nelly Château, technicienne de rivière juste après la pause, donc on vous donnera toutes les informations et vous pourrez lui poser toutes les questions et en plus on va vous annoncer une très bonne nouvelle à ce sujet, on va décaler la réponse."
Claude Thé "Comme c'était la même question, je vais en poser une autre. Enfin ce n'est pas une question c'est une remarque. Transformer ça suppose d'avoir des ateliers, souvent individuels mais quelque fois, par la dimension collective, parce qu'ils sont trop importants à l'investissement, et ça c'est très important. Et il y a l'exemple de Nectardéchois, qui permet de valoriser les fruits, sous différentes formes et en particulier le jus. C'est simplement pour vous dire qu'il y a un projet d'atelier de découpe de viande sur Quintenas. Je pense que c'est important, Sébastien, tu peux peut-être en dire un mot. Il est encore temps, je n'en sais rien." Sébastien Mourier "Oui alors juste pour préciser sur cet atelier de découpe … Sébastien Mourier, je suis un des producteurs engagés dans ce projet là depuis plusieurs années. C'est sur Quintenas, un atelier qui aurait pour but de découper, transformer les viandes, de qui en aurait le besoin. Ça correspond à une prestation, chacun est maître ensuite de sa commercialisation, qui semble répondre à des besoins importants et qui se développent sur le territoire : de la vente directe de produits à base de viande." Eric Merci pour ce Nectardéchois, façon viande. Alors, j'ai vu Christian s'avancer pour répondre j'imagine à la question sur l'Ardéchoise permanente, et j'imagine plus précisément, la question des sites naturels à mon avis; n'est-ce pas ?
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Enquête participative
Eric Merci. Jacques me fait signe, je pense qu'après autant d'attention, ça nécessite un petit temps de respiration. Au bar, j'imagine vous avez quelques verres, sur vos tables aussi, des jus de fruits, donc on s'arrête, combien ? 15 minutes, Jacques ? Jacques Oui, on va essayer de ne pas dépasser 15 minutes, vous savez qu'il y a toujours un adjudant pour ceux qui ont fait l'armée avec plus ou moins grand plaisir. Ils ont au moins un sergent ou un adjudant qui rassemble après, ou alors on envoie le chien berger. Mais quand même je vais faire quelques petites annonces obligatoires. Nous faisons appel à ceux qui ont une certaine aisance de clavier, que nous pourrons appeler une aisance clavière, pour faire la transcription des Entretiens qui
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Enquête participative
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sont intégralement enregistrés. Ça demande beaucoup de travail, l'an passé on s'en est occupé, cette année si on élargissait l'assise des compétences, qu'elle soit bénévole ou contre rétribution, nous en serions très contents. Ceux qui ont des oreilles pour écouter un enregistrement et des doigts pour taper sur un clavier et transformer ça en ce qu'on appelle forme numérique, pour faire la brochure des actes des Entretiens ça serait super : première annonce. Deuxième annonce, une telle manifestation, un tel projet, demande des partenaires et des financements. Donc la Communauté de Communes du Pays de Saint-Félicien a un partenariat privilégié avec Terroirs & Cultures International, un partenariat qu'on pourrait qualifier de technique. Et on est capable de distinguer que la technique fait partie de nous, elle n'est pas extérieure.Il y a aussi des partenariats financiers. La Communauté de Communes finance, évidemment, une part de ce projet Terroir dont ces Entretiens, mais aussi la Région Rhône-Alpes, par l'intermédiaire du Contrat Développement Durable Rhône-Alpes, signé par le Syndicat mixte Ardèche Verte, dans lequel nous sommes Communauté de Communes. Avec 5 autres Communautés de Communes, ça fait 80 000 habitants, sur le Nord du département. Et puis nous avons des financements par le Conseil Général de l'Ardèche, sur une base plutôt touristique, car vous savez les structures dans toutes les institutions; il y a des lignes qui sont adaptées plus ou moins à un projet. Nous c'est la ligne « Tourisme hors saison », vous voyez qu'on est assez élastique, dans le projet Terroir. Troisième partenaire financier, le Crédit Agricole Sud Rhône-Alpes, dont le président de la Caisse locale est ici présent, Philippe Costet, et la commune de Colombier-le-Vieux qui met à disposition la salle, comme l'an passé la commune de Saint-Victor. Voilà, c'est un travail de collaboration qu'il faut signaler. J'ai
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Enquête participative sûrement oublié des gens, des partenaires, c'est pourquoi la pause peut servir à voir l'exposition … j'ai parlé de librairie... que je n'oublie rien... je passe au suivant, et donc un petit temps avant la pause pour présenter Jean Collin, que j'ai perdu de vue... voilà, il est au fond, je vais m'approcher de lui. Jean est sculpteur sur bois, et anime un atelier de sculpture sur bois, dont vous voyez quelques éléments à la tribune et ailleurs, et Jean j'ai l'impression que vous avez quelque chose à dire sur vos sculptures, vous vous exprimez par le bois et aussi par la langue. Jean Collin "L'attention a été attirée sur le monde rural, agricole, les entreprises et autres et vous avez aussi mis en avant le côté culturel, qui fait aussi partie du Terroir et qui a sa place aussi importante qu'on peut le supposer. Je vais peut-être parler surtout de l'association Chantelermuze, qui est à Saint-Victor, présidée par Jeannine Pignerol et qui depuis une bonne vingtaine d'années, a plusieurs ateliers. Je ne vais pas tout dire, mais je vais vous en donner un ou deux : théâtre, vannerie, yoga, danse, patois, sculpture sur bois, randonnées, peut-être deux ou trois, un ou deux que j'ai oubliés. En ce qui me concerne, je m'occupe de l'atelier sculpture sur bois. Étant compagnon du devoir, il y a quatre ans, j'ai eu l'idée de proposer dans la perspective et la philosophie du compagnonnage, c'est-à-dire : « transmettre le savoir et toujours s'améliorer », de créer des ateliers de sculpture. Donc nous avons débuté avec 5 participants, il y a quatre ans. Et rapidement le succès a été tel qu'on a dû mettre en place un deuxième atelier. Donc nous avons un atelier, le mercredi aprèsmidi pendant trois heures, le samedi matin pendant trois heures. Chaque fois il y a 6 participants, on ne peut pas aller au delà, sinon ça serait trop important. Et
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on n'aurait pas la possibilité de s'occuper de chaque participant et surtout en fin d'atelier, de consacrer une vingtaine de minutes à ce que chacun montre ce qu'il a réalisé et que tous les autres puissent apporter leur appréciation, la critique ne devant jamais être négative mais toujours la plus positive possible. Nous avons, ainsi que l'association Chantelermuze, participé à l'exposition qui a lieu chaque année, au mois de juillet avec d'autres participants, d'autres artistes, vous avez peut-être pu y aller cette année, c'est un succès qui grandit chaque année pour l'ensemble de l'association puisque nous avons eu 680 visiteurs au mois de juillet. Nous travaillons si je veux rejoindre l'image du terroir, sur des essences locales puisque nous travaillons sur du cerisier. Le chapeau qui est là-bas est fait en cerisier et merisier, par Joël Sapet qui est menuisier à Saint-Alban d'Ay, ainsi que le sous-main que vous avez là-bas, qui est, lui, en tilleul. Nous utilisons aussi cerisier, merisier, tilleul, hêtre, c h â t a i g n i e r, cèdre, donc
des bois locaux. Il n'y a pas que l'atelier sculpture, il y a l'association Chantelermuze. Nous sommes à la maison de la mémoire à Saint-Victor, et tous nos ateliers sont ouverts à ceux qui veulent bien nous rendre visite. Mon atelier de sculpture, ouvert le vendredi après-midi, le samedi matin accueille très sympathiquement, ceux qui veulent venir nous voir travailler. Nous sommes complets pour l'année. Je crois avoir tout dit et je dois dire que c'est avec un grand plaisir que nous travaillons dans une ambiance et dans un état d'esprit de liberté et d'expression. Nous faisons partie de l'animation du terroir et de la vie de la région. Voilà si vous avez des questions à me poser."
Jacques Je pense que vous pouvez poser vos questions autour d'un verre de viognier ou de jus de fruits. Les différentes essences présentées par Jean pour travailler le bois ont un lien, au risque d'être grossier mais j'assume, avec … l'essence et autres carburants et la mise en service de la station essence du Pays de Saint-Félicien. Vous allez dire « il est quand même gonflé » et vous auriez raison … mais ça fait partie du service local, et c'est pas encore la transition écologique, Jean, mais on verra cela tout à l'heure, après la pause.
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Lire le paysage en langue d'oc
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Nous sommes dans le deuxième thème que nous avons intitulé « Lire et vivre le pays ». Vous savez qu'il y a un lien entre lire et lier, entre relire et relier, et sans en faire une religion, nous allons en faire une relecture. Donc lire le pays, c'est une façon de se lire soi-même bien sûr. On l'a entendu hier, nous sommes dans nos paysages. Ils ne sont pas extérieurs à nous. Parfois, ils le sont et c'est peut-être par routine ou par inattention. Que dire alors de la culture qui peut apparaître extérieure aux savoir-faire que nous explorons, comme un ailleurs de notre vie quotidienne. Mai la culture peut aussi, et c'est le sens de notre réflexion, vibrer en nos activités théâtrales, musicales ou patrimoniales dans les associations. Alors Lire et vivre le pays va se décliner en deux temps : Isabelle Thomas et Marc Nouaille nous ont préparé une présentation de notre pays autour d'une langue qu'on appelait patois : « Lire le paysage en langue d'oc ». Myriam Géry et Françoise Descaillot nous présenteront ensuite les réflexions de l'ensemble des associations locales sur la « culture comme lien d'avenir » … évocatrice d'une main au panier … de biens et de services évidemment !
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Lire le paysage en langue d'oc Isabelle Thomas
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e prends la parole, simplement pour présenter l'idée qu'on a eu à travers la présentation d'un diaporama que Marc va commenter. C'est l'idée de cette culture qui fait partie de notre patrimoine, enfin … aussi de mon patrimoine culturel puisque je suis fille du pays, fille de paysan. Cette langue que l'on a toujours entendu parler comme d'un patois est une langue qui a bercé mon enfance, et celle de mes compatriotes. Donc à travers les patronymes, des lieux, des noms de maisons, d'espaces, nous avons essayé
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"Nous avons intitulé, la diapo n°1, « Lire et vivre le pays en langue d'oc » , Legir e viure lo pais en lenga d'òc, c'est aussi utiliser la langue du terroir pour présenter les biens et les services mis dans le panier, ce fameux panier dont on a beaucoup parlé déjà. Tous ces produits du terroir sont issus du minéral, du végétal, de l'eau, de l'air du pays et du travail des hommes du pays. Tous ces éléments sont nommés depuis des générations, des siècles dans la langue du pays. Je ne reviens pas sur le nom de la langue, on en avait parlé l'année dernière. Cette langue officiellement pour l'éducation nationale, elle s'appelle occitan-langue d'oc. Elle est formée de différents dialectes, et nous ici, on est dans un de ces dialectes, dans sa forme utilisée par les gens ici, ce dialecte s'appelle le Vivaro-Alpin parce qu'il va des Alpes jusqu'au Vivarais. Ce que nous voudrions faire aujourd'hui, c'est seulement amorcer une réflexion
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Marc
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Isabelle Thomas, Marc Nouaille
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Lire et vivre le pays
sur comment utiliser cette langue pour valoriser les biens et les services proposés dans le panier. Pour ce faire, nous allons survoler rapidement le pays et présenter quelques noms de lieux (j'utiliserai aussi le mot toponyme qui veut dire la même chose en plus compliqué et plus savant) assez facilement identifiables. Il ne s'agit pas d'une étude scientifique de spécialiste. Vous verrez qu'il y a parfois plusieurs significations envisageables, le but n'étant pas de faire une étude toponymique mais de faire découvrir la présence de la langue dans le paysage et faire entrevoir ce qu'elle raconte de la culture du pays. Ensuite à vous d'envisager comment on pourrait utiliser cette langue dans la valorisation du panier de biens et de services.
Paysage : relief, exposition
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ous avons classé les noms suivant le ou les éléments du paysage, qui sont à l'origine de l'appellation. On a d'abord quelques noms qui sont dus au relief ou à l'exposition du lieu.
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de retrouver la trace et la place de cette langue, élément de notre patrimoine local. Localement, sur le Pays de Saint-Félicien, nous souhaiterions mettre en valeur cette démarche, autour de l'acquis, autour de cette langue, pour la parler, la reparler, la faire connaître, en tout cas, pouvoir nommer notre pays, et notre terroir, dans sa langue et sa culture."
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Lire le paysage en langue d'oc
Chirat : je pense que dans la salle, il y beaucoup de gens qui connaissent ces mots. Un chirat, ici chez nous, c'est souvent, un tas de pierres. Vous savez les tas de pierres qu'on a sortis de la terre pour pouvoir travailler et puis qu'on a mis en tas, au coin du champ. Pour les chasseurs, c'est aussi une façon d'empiler ces pierres pour qu'il y ait des galeries où les lapins puissent venir, c'est là où on introduit les lapins. C'est d'ailleurs plus subtil que ça, on trouvait une nichée de lapins sauvages, on la prenait juste avant qu'elle s'en aille, et on allait la mettre à l'intérieur. Ensuite les lapins prenaient l'habitude. C'était une sorte de clapier
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Les Clots : c'est un endroit que vous connaissez qui n'est pas très loin d'ici. Et bien ça n'a pas avoir avec les clôtures ici,
Malaurier : l'aura, c'est le vent en général, mal : mauvais. Le malaura c'est un mauvais vent, et Malaurier c'est « mal orienté par rapport au vent ». C'est exposé à des mauvais vents.
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Les arbres
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out à l'heure on a parlé du bois. Pinet ça tombe sous le sens, en français ça serait pinède. Le Roure : tous ceux qui sont d'ici savent qu'un roure c'est un chêne.
ça a à voir avec un endroit plat, un lieu qui est clòt c'est un endroit plat. Marie Mourier dans son poème où elle racontait qu'elle descendait de La Roue pour aller à l'école à Vaudevant disait : « couria sou lo cloto ». Alors le cloutou c'était justement un endroit plat, mais qui était très bref parce que là-bas, c'était plutôt dans ce sens là, et il y avait juste un petit endroit qui était plat et qu'on appelait le cloutou. Voilà, là c'est simple.
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Sauze : ce n'est peut être plus tellement utilisé par les gens qui parlent de désigner encore le saule par sause mais on a beaucoup d'endroits qui s'appellent Sauze, on a des noms de famille : Sauzet par exemple. La Seauve : on a des noms plus connus dans la Loire et la Haute-Loire la seauva ou seuva. Donc ici, je ne sais pas comment on prononce, c'est sur le Pays de Saint-Félicien ou à côté, la Seauve, donc du latin silva, qu'il faut prononcer la seuva à d'autres endroits, et qui désigne la forêt. Sapet : C'est comme Pinet, ça serait sapiniere. Sapet, c'est un petit sapin mais quand on désigne un lieu, le sapin il ne reste pas petit. Donc c'est plutôt, Sapet dans le sens, un lieu où poussent des sapins. Blache : blacha, ça c'est un nom bien de chez nous, les gens d'ici savent ce que c'est qu'une blache, en général : un petit bois, un taillis de chênes. Ça donne Blachette, quand il est tout petit. Ou alors, ça donne
La Croix du Fraysse : lo fraisse, le frêne du latin fraxinus. Le Fau. Fau : hêtre ou fayard (du latin fagus). C'est plutôt en altitude, il faut déjà être plus haut. Les Vernes : Verne ou Vergne qui peut être aussi un nom de famille, qui est en français l'aulne.
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L'Hôme : un nom qui est souvent déformé en Hôme, cela n'a rien à voir avec l'homme mais avec l'orme. Ça vient du latin, la racine ulm-; qui désigne l'orme, et donc c'est l'òume On voit bien la prononciation que le français a essayé de marquer avec un accent circonflexe sur le o, parce que òume donne l'impression d'un [o] un peu long alors que c'est un o suivi d'un [u].
des noms de famille comme Blachon.
Végétation, plantes
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égétation, plantes, donc on va faire... il n'y a pas que des arbres.
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Vagelas : alors, je ne sais pas où c'est mais il doit y en avoir, c'est Isabelle, Jean-Luc et d'autres qui ont trouvé ces noms qui sont donc sur le Pays de Saint-Félicien. Donc c'est le « val gelé ». À Annonay, vous avez le pont Valgelas, alors paraît-il, que ça viendrait d'un nom de personne, d'un monsieur Valgelas, sûrement que son nom de famille, venait d'un endroit d'une vallée qui était plutôt froide.
Le Besset : ça vient de beç, qui est un bouleau. Dans une zone de langue française, on appellerait plutôt l'endroit « la boulaie », parce qu'une zone plantée, une zone où poussent des bouleaux c'est une boulaie en français. Ici, c'est une besset.
Mahussier : alors la maüssa c'est une des prononciations de la fraise. Celle qui serait peut-être la plus courante, ici, ce serait peut-être : mayousso. Mais c'est étonnant car on a ce nom Mahussier. Joannès Dufaud, dans son dictionnaire, dit lo maiousso. Mais actuellement le mot utilisé ce serait plutôt maiosso.
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Serre : lo sèrre, c'est la même famille que sierra, la Sierra Nevada et tout ça, c'est un sommet, une montagne, ça peut être une chaîne de montagnes. Ce qui est intéressant à voir, c'est la redondance qui peut y avoir dans les noms de lieux, parce que Puy ça désigne aussi un sommet, donc ici, c'est le sommet du sommet.
Montpeyroux : le mont pierreux, peirós, ça vient du mot peire , quand il y a beaucoup de peire, « que peirós !». Les combes de Ladreyt, les combes de l'Ubac. On ne vas pas s'attarder, les endroits qui s'appellent « Los ubacs, los adrets » ou l'Ubac, l'Adret... on connaît ça.
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sauvage. Mais géographiquement, un chirat c'est un éboulis très important. Il y a des régions où il y en a plus que d'autres. Et paraît-il le Pilat est le nom d'une région qui est très connue pour ces chirats, ces grands éboulis, qui sont une sorte un peu de glaciers minéraux. On en a aussi quelques-uns qui sont pas mal du côté de Lalouvesc.
Lire le paysage en langue d'oc
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Lire le paysage en langue d'oc
Miallier : ça vient du miel, qui peut se prononcer lo mial ou lo miau. Et miaillier ça peut vouloir dire, mellifère ou cela peut être le nom de celui non pas qui cultive, mais celui qui récolte le miel. Donc ça pouvait être un apiculteur. Ou alors, est-ce que c'était un lieu où on mettait autrefois les ruches, ça peut même désigner aussi, un nid de bourdons ou d'abeilles sauvages.
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La Petite Planta : plantaa qui correspond au français plantée, vous constatez les deux « a » qui suivent comme il y a deux « e » qui suivent en français ce qui correspond, justement pour faire la différence avec d'autres dialectes occitans. Dans le Sud en provençal, ou en languedocien, ou même en Limousin, on aurait plantado et nous c'est justement la particularité de notre parlé, c'est que ces [d] qui sont entre deux voyelles, on ne les prononce plus, donc ça fait plantaa avec un [a] un peu long à la fin. Donc un endroit où on avait planté des arbres ou une vigne. La Routisse : alors, il y a des endroits comme cela, La Routisse, La Route, Les Routes. Alors la route, une maison qui est au bord de la route on l'appelle la route. Oui, mais alors pourquoi ici on l'appelle la route et puis là on ne l'appelle pas la route. En fait, ça vient d'un mot latin rompere qui veut dire rompre, parce que pour faire une route, on est bien obligé de tailler, de défricher, de bouleverser, d'enlever les rochers, d'aplanir la terre. Et donc La Routisse, La Route, c'est un endroit qui a été travaillé, qu'on a défriché, soit pour faire une route, soit pour installer une maison, soit pour faire des cultures. Et pour revenir à Marie Mourier, elle habitait quand elle était enfant, e lo Roa, à La Roue, sur la commune de Vaudevant, et finalement, comme je l'expliquais tout à l'heure, ces
Le paysage : les cultures, la marque de l'homme
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es cultures et la marque de l'homme, parce que ça l'homme a laissé sa trace.
Les Taillards : cela vient du verbe talhar qui veut dire tailler, c'est proche du français.
L'eau
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ans le paysage, la marque de l'eau.
La Sagne : c'est un endroit marécageux. Et quand on a la sanha, on suppose que la maison était au moins à côté, parce qu'ils étaient pas fous, ils n'allaient pas construire la maison au milieu du marécage. Leygas : encore l'eau, alors ici, aigat, avec le « l' » qui a été collé au mot, mais aiga, ça veut dire arrosé, ça veut dire inondé,
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Chenevier : chanève : chanvre. On a parlé du cannabis tout à l'heure, on s'aperçoit dans les écrits, même les écrits de fin de XIXe siècle, que le chanvre c'était une culture assez importante, parce que ça servait à faire des gants mais pas seulement. On faisait plein de choses avec le chanvre, les trousseaux des jeunes mariées, les draps. On faisait aussi des sortes d'allumettes pour allumer des mèches, avec peut-être de l'amadou quelque chose pour allumer. Donc, ça servait aussi de briquet. Malgaray : ça correspond au français « guéret ». Donc c'est une terre qui est
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Le Meilhat : alors ça c'est une interprétation qui peut être plausible, un endroit où on cultivait du millet, du blé noir. Le Meilhat. Chez nous, il y en a qui vont peut-être savoir, qui vont dire « oui, oui, je connais », il y avait de l'herbe qu'on arrachait dans les vignes ou ailleurs et qu'on appelait lo maioso, c'est de la même famille.
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La Riaille : je pense que c'est plus difficile de savoir d'où ça vient. …de lo riu, souvent prononcé ici lo rio ?, et qui désigne un ruisseau. Du côté de Lalouvesc, il y a un endroit qui s'appelle Le Riaille, les gens qui sont du coin prononcent [le rio] ou [le ria] ... on est toujours dans le ruisseau ou au-dessus du ruisseau pour la maison.
Béalière : bealèira, ce sont ces petites rigoles, que l'on creuse pour irriguer, pour les près surtout les près d'ailleurs. Si c'est un peu plus gros, c'est une beal, et si c'est la petite rigole habituelle, c'est la bealèira.
lettres qu'on ne prononce pas entre deux voyelles, et bien la Roue, Lo Roe ça serait certainement La Route, donc un endroit qui a été travaillé, qu'on a défriché, où on a ménagé un endroit plat pour pouvoir cultiver et puis construire une maison.
Froment : là, vous comprenez, froment mais qu'on prononce froumen.
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Les Chalayes : chalaias : fougères. On a aussi le mot, la fozere , il y en a au-dessus de Satillieu et dans le Pays de SaintFélicien.
labourée, donc en général, une bonne terre, mais ici, ce n'est pas le cas, c'est une mauvaise terre qui est quand même labourée mais ça ne doit pas être un lieu de bonne récolte : malgarait.
Lapras : la praa c'est comme tout à l'heure la prada, qu'on prononce la praa qu'on devrait écrire comme ceci. Après on trouve avec un « s » ou un « t » à la fin. Serve : serva c'est un réservoir, un réservoir d'eau en général. Serva ça veut aussi dire économiser.
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Balay. Le genêt : lo balai, ça ne manque pas ici, dès qu'une terre est abandonnée. C'était Jean-Claude Chabrol qui disait que « le jaune des genêts, c'était le deuil de la Cévenne », parce que cela voulait dire que c'était les endroits qui étaient abandonnés.
mouillé, humide. Ça désigne un endroit où il y a pas mal d'eau. Ici, ça ne pourrait pas vraiment être inondé car c'est tout de même à flanc de … mais bon. Alors, là on pourrait en trouver toute sorte, c'est les sources, les fontaines avec un qualificatif. Donc Fontfreyde : font freida, la source froide, qui a aussi donné des noms de famille. On a aussi Fonbonne, font bòna la bonne fontaine, la bonne source.
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Bruchet : alors là aussi, il est question de ruches. Plutôt que de brug : bruyère, parce que ici on a des noms de lieux où on dira plutôt, et la Bruyère, donc la racine brug chez nous elle devient bruy. Donc je pencherais plutôt pour brusc, lo bruso c'est aussi la ruche.
Lire le paysage en langue d'oc
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Lire le paysage en langue d'oc
Le paysage : le bâti : habitations, constructions Massa : c'est sur la commune de Bozas. C'est un gros Mas, le mas avec un
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Lire le paysage en langue d'oc
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& Le Calabert. La Cula. La culaa c'est peut-être la culée d'un pont ou d'un gros terrassement, une grosse retenue de terre. Les Claustres. Claustre : c'est une terre qui appartenait à un couvent.
Les métiers Théolier. Lo tèule : la tuile, soit teulieir : le tuilier, ça peut être aussi un grand toit. On va finir avec le « faore » : le forgeron celui qui travaillait dans la « foeria » ou
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Que faire de ces mots, de cette langue, on en a fait un petit clin d'œil à l'entrée de Colombier, une signalétique bilingue. Dans la graphie occitane beaucoup de noms révèlent le lien de famille avec les autres langues latines : l'espagnol, le catalan, le portugais, l'italien. Cette signalétique, c'est dire au visiteur, ce pays ce n'est pas seulement des montagnes, des rivières, des bois, des rochers, des maisons, des villages pittoresques, c'est aussi une culture, une langue, une histoire. Alors on pourrait aussi rendre visible la langue sur des étiquettes, choisir des slogans qui soient bilingues avec de l'occitan et du français. Nous vous invitons à notre stand pour discuter de ça, pour nous donner des noms de lieux que vous connaissez qui vous paraissent intéressants. Faisons que la culture aujourd'hui soit toujours en lien avec celle d'hier, pour forger celle de demain. C'est pourquoi nous passons la parole à Françoise Descaillot et Myriam Géry …
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Myriam Gery, Françoise Descaillot
Myriam Gery
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n va faire ça en duo, on avait remarqué qu'il n'y avait pas beaucoup de femmes donc on vient à deux. Tout d'abord on tient à dire que nous sommes très contents dans nos associations de participer aux Entretiens du Terroir, d'avoir été invités car nous n'avons pas à faire de complexe, la culture existe bel et bien en milieu rural, elle n'est pas chasse gardée de l'urbain. La longévité et le dynamisme de nos associations. Nous sommes porte-parole de toutes les associations qui peuvent exister sur le Pays de Saint-Félicien et notamment de Chantelermuze, FélixVal, qui ne sont pas à nos côtés mais dont le travail est affiché dans la salle. Lo Gavelier existe depuis 33 ans à Colombier, Chantelermuze depuis 22 ans à Saint-Victor et FélixVal depuis 23 ans
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à Saint-Félicien. Nous, on nous a transmis le flambeau. Il y a des personnes dans la salle qui l'ont porté pendant longtemps au niveau de Lo Gavelier et on les remercie d'ailleurs. On le porte un moment, on le transmettra, on espère. Donc c'est collectivement avec les associations que nous acceptons de mettre la main au panier de services évidemment, en souhaitant votre réflexion, vos observations tirées de nos pratiques culturelles différentes et semblables tout à la fois. Je laisse la parole à Françoise pour la première observation."
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Chazalet. C'est un nom aussi qui est resté, Chazalet c'est une chasal / chasau : une masure.
Culture : lien d'avenir... la main dans le panier...
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Le Mazel. Donc là, deux sens, soit c'est le masèl c'est une boucherie, ou un lieu de boucherie, il y a pu y avoir un massacre dans l'histoire ou alors quelque chose dans l'histoire, ou soit c'est tout simplement le même mot que tout à l'heure le mas avec un déminutif èl qui veut dire une petite ferme.
la « foerie » ou la faurie, fàuria : la forge. Donc on a fait un survol rapide de noms de lieux représentatifs. Ils sont tous identifiés au cadastre. Ceux-là ne risquent pas de se perdre sauf si la langue disparaissait. Par contre les micro-toponymes sont en danger, ceux qui sont propres à une maison, à un hameau, ceux désignant des lieux bien précis à proximité, connus et utilisés par les seuls habitués de l'endroit. Ils sont souvent très imagés. Il est urgent de les récolter tant qu'il y a quelqu'un qui les connaît car ceux-ci sont très rarement écrits. Il y a aussi des noms utilisés traditionnellement par des noms non officiels. Avec Christian on en avait parlé des noms qui ont un nom sur le cadastre, qui ont un nom sur la pancarte et sont désignés par un autre.
Françoise Descaillot
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augmentatif às : Massàs, du latin mansus « grande ferme ».
Culture : lien d'avenir…la main dans le panier…
Première observation : l'identité d'un territoire
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a culture telle que nous la concevons et pratiquons permet d'affiner l'identité d'un territoire et de ses habitants en développant sans aucun doute une appartenance commune. Comment ? Par le nom de nos associations, un nom évocateur, chargé d'un sens précis et global. Lo Gavelier : nom d'un cabanon en pierres refermant l'outillage pour cultiver la vigne, évoquant une mémoire patrimoniale et réactualisée. (On entend une voix dans la salle qui dit : "non ! non !") .
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Culture : lien d'avenir…la main dans le panier…
C'est tiré de la couverture, plutôt que des murs. Françoise
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"Chantelermuze, nom de la colline qui domine Pouyol, une colline de pierres résonne également au terme du paysage et du patrimoine. FélixVal, nom donné à Saint-Félicien pendant les années révolutionnaires, ajoute une dimension historique à cette identité d'un terroir qui se raconte et se vit aussi à travers une expression culturelle. Affirmer une identité à l'évidence mais une identité qui se nourrit d'apports artistiques, multiples et diversifiés. C'est ainsi que nos associations n'hésitent pas à nouer des partenariats avec des pôles ressources culturelles comme la Comédie de Valence, Quelque p'arts, le SOAR (Secteur Ouvert des Arts de la Rue). Et à Colombier, l'association Lo Gavelier a créé l'école de musique qui est devenue par la suite l'école départementale. Enfin l'antenne de Colombier appartient à l'école Ardèche Musique et Danse de l'Ardèche devenue aussi Conservatoire. Il y a à peu près 170 élèves sur l'antenne de Colombier, des élèves de toute la Communauté de Communes de SaintFélicien et même plus loin, donc de Lamastre, d'Etables."
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Troisième observation : les savoir-faire
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es pratiques culturelles aussi diversifiées soient-elles permettent de retrouver et de transmettre un savoir-faire à travers de nombreux ateliers. Jean Collin vous a parlé tout à l'heure de l'atelier sculpture, la vannerie, les paniers qui sont là ont été réalisés par Chantelermuze, les patchworks, la langue d'oc : « Parlarem en vivarès ». Des pratiques artistiques : danse, théâtre avec FélixVal, les affiches que vous voyez là. Le dessin : l'association Lo Gavelier a un atelier dessin faisant l'objet d'exposition. Retrouver un savoir-faire et l'exprimer à travers une pratique artistique, tel est le sens de cette démarche culturelle." Myriam
Quatrième observation : la découverte d'un territoire
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ar culture, nous n'entendons pas uniquement création, expression, animation mais également découverte et redécouverte du territoire sur lequel nous vivons. Les balades du lundi de Chantelermuze en sont un moyen comme les randocroquis de Bozas, les sorties nature de Lo Gavelier ou les mercredis de Pailharès. Ces moments là sont vraiment un temps de découverte et de redécouverte du territoire. En parlant de croquis, on a
fait des dessins dans l'atelier dessin que vous pourrez voir là-bas." Françoise
Cinquième observation : la culture dans l'espace public
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Monsieur X
Françoise
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nfin nous pensons que la culture se doit d'investir l'espace public afin que sa présence puisse, d'une part, permettre au plus grand nombre de s'approprier les événements et d'autre part d'impacter les décisions d'aménagement du territoire. La culture telle que nous l'envisageons et la pratiquons ne doit pas modeler voire structurer l'espace public. Dans tous les cas, il est question de se faire plaisir pour faire plaisir en même temps et offrir quelques outils pour résister aux normes imposées par l'extérieur.
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"Donc il y a les sarments sur un toit."
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n constat est de dire que dans notre milieu rural, sans doute, plus qu'ailleurs, la culture crée un lien social fort, non seulement entre les bénévoles qui animent et portent les différents événements mais aussi nos villages. Pendant plusieurs années, nos trois associations, Chantelermuze, Lo Gavelier et FélixVal se sont réunies et ont passé une convention avec la Comédie de Valence, pour faire venir à Colombier, sur les trois villages, du théâtre professionnel de qualité. Aujourd'hui, seul Colombier continue cette aventure. Mais on peut noter que les Entretiens ont permis de retisser des liens qui s'étaient peut-être un peu perdus entre les trois associations. Voilà un point positif dont on a parlé tout à l'heure parce que la communication entre les associations est parfois difficile. Enfin quand on parle de lien social, il concerne tout le monde, il est totalement intergénérationnel. Les spectacles organisés par nos associations sont pour la plupart du temps « tout public ». Le festival « La Nuit du Parvis » organisé en août par FélixVal en est un exemple concret. Ce sont plus de 400 personnes qui assistent à un spectacle théâtral de plein air à Saint-Félicien. Cette année, à noter qu'il y avait même des poussettes. Le Marché du soir à Colombier porté par Lo Gavelier, la commune et les Fermiers & Artisans du territoire qui exposent et vendent leurs produits est organisé dans le cadre de Terroir en Fête avec la Communauté de communes. Au cours de cette soirée qui est complètement intergénérationnelle, le partage et le lien se retrouvent de façon assez évidente.
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Françoise
Deuxième observation : le lien social
L'exposition artisanale en juillet-août est organisée par Chantelermuze ainsi que la Journée du goût qui arrive bientôt parce que c'est le 20 octobre.
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Gavelier, ça veut dire gaver en fait, c'est avec des sarments de vignes qui ont été mis en fagots.
Myriam
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Monsieur X… (Mille excuses pour cet anonymat).
… Alors main au panier, plus que jamais, pour un joli méli-mélo qui aura lieu ce soir."
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Un terroir à construire
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l'ensemble d'une grande partie des artisans locaux, s'est même élargi. Il a eu un rayonnement intéressant qui va dans le sens de cette valorisation, dans cette prise de confiance et de conscience de la qualité de travail et de savoir-faire local. Vous pouvez déjà présenter votre activité." Alexandre Buisson "D'abord bonjour à tous, Alexandre Buisson, travaux paysagers, basé à SaintFélicien. La société a été créée en juin
Jean-Pol Badouard
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la fin de l'intervention sur les artisans je vous parlais de la relève générationnelle, cette intervention est un exemple flagrant de cette jeunesse qui nous pousse et qui nous transcende. On va avoir quelques témoignages des activités de Vincent et d'Alexandre. Ensuite sur le thème de quelque chose en construction, on va vous évoquer une expérience qui a été faite pour la première fois sur le bassin de Saint-Félicien, c'est la création d'un Salon de l'Habitat. Il a fédéré, rassemblé
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Vincent Hariche "Bonjour ou bonsoir à tous, je suis Vincent Hariche. Je suis charpentier à SaintFélicien, couvreur-zingueur. La société c'est Lez arts du bois, vous m'excuserez car je ne suis pas habitué à parler avec tous ces regards, cela m'impressionne un peu. Il y a une première à tout. Moi je suis charpentier depuis 5 ans déjà, je me suis installé sur SaintFélicien. J'ai eu de grandes difficultés à démarrer, il y a eu deux ans très compliqués où ça a été dur, surtout quand on est tout seul. Je suis tout seul dans mon entreprise donc c'est compliqué. La troisième année j'ai eu l'opportunité d'avoir des subventions de l'ORC (Opération
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Merci pour la contribution et le lien d'avenir que nous allons continuer à explorer malgré les incompréhensions et les distances parfois provisoires avec les Artisans du Pays pour le thème n°3 que nous avons intitulé « Terroir à construire », à construire parce qu'il n'est pas donné. Il y a peu de choses qui sont données, y compris notre identité personnelle ou celle du territoire. L'identité est construction permanente en interaction avec l'autre, avec les autres. Dans cette construction, sans jeu de mots, les artisans jouent un rôle : Vincent Hariche dans « Lez arts du bois », Alexandre Buisson dans l'Aménagement paysager, accompagnés par Jean-Pol Badouard : chargé de mission à la Communauté de Communes. Les artisans du pays sont aussi les artisans du terroir …
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Artisans du Pays
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Jean-Pol Badouard, Alexandre Buisson, Vincent Hariche
Rurale Collective), c'est la Communauté de commmunes Pays de Saint-Félicien qui m'a permis de l'obtenir. C'est une subvention qui m'a permis d'acheter une grue et de tout suite développer mon entreprise. J'ai pu grâce à ça prendre des jeunes en apprentissage et les former et, petit à petit, je développe mon entreprise. On essaie de travailler le plus localement possible, on utilise des bois locaux, je travaille avec la scierie Luc Sovignet, donc un petit clin d'œil, c'est normal. On essaie de ne faire que de la charpente traditionnelle donc on reconstruit les vieilles fermes de chez nous, on remonte nos vieilles bâtisses qui sont abandonnées depuis des années, on essaie de faire des belles choses, je ne sais pas quoi vous dire de plus. On avait une Association des artisans et commerçants du Pays de Saint-Félicien. Grâce à cette association, on a créé une seconde association, l'UEPF (l'Union Economique du Pays de SaintFélicien). C'est une association qui est présidée par monsieur Jean-Luc Reynaud. Autour de cette association, Jean-Luc a eu l'idée de monter un Salon de l'Habitat à Saint-Félicien pour développer les artisans
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Un terroir à construire
2007 donc cela fait 6 ans pour tous les travaux liés à l'espace vert, de la création à l'entretien, tout ce qui est petite maçonnerie, travaux forestiers. Actuellement un employé, un apprenti. Au niveau de la zone d'action, la zone d'activité principale se situe sur le canton de Saint-Félicien, environ une vingtaine de kilomètres aux alentours. Ça représente à peu près 80% de l'activité. Pour le reste, les 20% on s'éloigne un peu, on descend dans la vallée, on s'écarte du secteur. Voici pour la première activité, la deuxième c'est le bois déchiqueté. L'EARL (exploitation agricole à responsabilité limitée) Lames des bois, à Pailharès : production de bois énergie pour le chauffage et de paillettes végétales pour tout ce qui est plantation. Voilà pour les deux activités qui sont essentiellement locales. Vincent à toi."
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Un terroir à construire
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Jean-Pol "Je crois que ce Salon était dans l'esprit de ces Entretiens du Terroir, de cette dynamique du terroir. Je crois qu'il y a plein de choses à en dire. Ce qui est intéressant c'est que comme on est dans un monde rural où il y a beaucoup d'interconnexions, c'était quand même bien relié avec les autres parties prenantes du Pays de Saint-Félicien. Par exemple, il y a plusieurs associations qui ont prêté leur matériel, par exemple, l'Ardéchoise, entre
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Eric Merci beaucoup. Rémy cherchait la jeunesse tout à l'heure dans sa table ronde, il n'a pas besoin d'aller la chercher très loin. Et sur la forme et sur le fond, merci beaucoup de votre intervention. A propos de l'idée de label, estce que le salon n'est pas déjà une certaine forme de promotion d'un label ? Ça ressort nettement. Merci. Jacques Donc vous voyez que les artisans sont capables
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pour ne pas trop l'esquinter et pourtant on est dans ce milieu. Et bien nature et culture, ça va pourtant bien ensemble. Mais les espaces à aménager, à ménager, Christian et Nelly vous avez beaucoup travaillé dessus. Et là vous êtes plus qualifiés que moi pour vous présenter et présenter ce travail.
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Un espace à ménager Christian Astier, Nelly Chateau
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Nelly Chateau "Bonjour, Nelly Château, technicienne de rivière sur le bassin versant du Doux. Je vais vous présenter un peu ce qu'il se passe en termes de gestion des rivières, et donc les projets en cours. Comment ça fonctionne, qui fait quoi ?"
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"Pour revenir au Salon de l'Habitat, on a démarré le projet à la fin de l'année 2012. Autour de nombreuses réunions on a développé tout ça, on a pu communiquer grâce à la publicité qu'on a pu faire dans les journaux et autres, grâce aux articles de presse du Dauphiné et autres journaux qui nous ont bien aidés pour annoncer ce fameux salon qui a eu lieu les 11 et 12 mai de cette année 2013. On était un petit groupe de 7 personnes pour monter le projet dont Jean-Pol Badouard qui nous a un peu tous chapeautés. Il était le chef d'orchestre pour mener à bien tout cela. En conclusion cela a très bien fonctionné, on a eu 45 stands de corps et de métiers différents. Les artisans en général ont été satisfaits des deux jours, ont pris pas mal de contacts et pour certains ont rempli des bons de commande on va dire, donc bon bilan."
de faire salon, conversation et lien, le lien entre les écoles, les associations diverses. On voit une culture du lien et ça peut être aussi... vous savez on dit aussi, il y a la culture d'un côté et la nature de l'autre... Et puis les sociétés humaines ont un environnement, on va essayer de protéger cet environnement
Qui fait quoi ?
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Christian Astier
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Alexandre
autres, le comité des fêtes, les collectivités locales ont donné leur appui. Il y a eu les écoles, il y a eu un concours de dessin qui a été fait dans toutes les écoles du canton du Pays de Saint-Félicien qui ont remonté. Il y a plein de gens qui sont venus intervenir aussi parce qu'on avait créé... il y a eu des exposés, des conférences, il y a eu 8 conférences au total avec des personnes, la plupart était du secteur. Ils sont venus donner des informations techniques sur les énergies renouvelables, les nouvelles techniques de construction. On a eu l'impression que la mayonnaise avait pris parce que plein de gens étaient intéressés. Les parents sont venus voir les dessins des enfants, les gens qui intervenaient ont amené d'autres personnes, les journaux locaux se sont fait l'écho … ça a même été un lieu de rencontres. Autrefois, les gens se rencontraient dans d'autres occasions à la sortie de la messe, là, ils se rencontraient dans les allées du Salon de l'Habitat. Il y avait des gens qui arrivaient à 14h et qui repartaient à 17h parce qu'ils n'avaient pas arrêté de rencontrer du monde et d'échanger. On est vraiment dans cet esprit de convivialité de co-fraternité de ce monde rural que nous souhaitons sauvegarder."
lors première chose, je vais passer tout de suite la parole à Nelly Château qui est technicienne de rivière et qui va vous présenter son travail. Moi ce que je veux dire c'est que le titre de notre intervention c'est : « ménager l'espace », ça veut dire aussi aménager car on est bien d'accord que l'homme est bien présent dans le milieu. Et je vous raconterai tout à l'heure comment ça s'est passé et comment cette discussion est arrivée sur la table, à la Communauté de Communes puisque c'est bien dans le cadre de la Communauté de Communes qu'on a fait avancer ce projet."
out d'abord, le bassin versant du Doux. Il y a beaucoup de rivières sur lesquelles ce sont des syndicats de rivières qui travaillent. Sur le bassin du Doux, il n'y a pas de syndicat de rivière, ce sont les Communautés de Communes qui travaillent au bon état des cours d'eau. Ici, on a le Pays de Saint-Félicien qui travaille dans le cadre d'une convention de partenariat avec la Communauté de Communes du Haut-Vivarais pour la partie amont du Doux, le Pays de Lamastre, la Communauté de Communes Rhône-Crussol, et la Communauté de Communes du Tournonais pour la partie aval. Ces 5 communautés de communes travaillent ensemble depuis 2006, et forment ensemble ce qu'on
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et leur savoir-faire localement, du coup on s'est entouré d'appuis avec Alexandre, Stéphane Huriau et d'autres que je pourrais nommer. On a créé le salon cette année, ça s'est bien passé pour une première. Peut-être qu'Alexandre aura quelque chose à ajouter."
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'est aussi travailler sur le Doux, sur la qualité et la quantité d'eau. Donc la qualité d'eau, le but c'est d'avoir des rivières en bon état, pas polluées. Donc là c'est pas forcément des Communautés de Communes parce que travailler sur les stations d'épuration par exemple, c'est essentiellement communale. Donc ce sont les communes qui travaillent au bon état des rivières. Il y a aussi mettre en place l'assainissement non collectif, c'est pareil, ça évite la pollution des cours d'eau et puis des projets Zéro Phyto par exemple pour essayer de réduire tant qu'on peut les produits phytosanitaires. Améliorer la quantité d'eau, ça aide aussi indirectement
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Préservation et amélioration des milieux : substitution aux pompages
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t puis un dernier volet qui est la préservation et l'amélioration des milieux, notamment les milieux aquatiques, donc les rivières, les zones humides aussi. Il y a une politique qui a démarré qui est la mise en place d'un Espace Naturel Sensible dont on parlera ensuite. Donc je vous ai parlé des programmes de substitution de pompages en rivières. À terme, il y a une réglementation qui risque d'être mise en place, qui va réduire, voire même supprimer les pompages en rivières. L'idée est la suivante : pour
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u'est-ce que la gestion du Doux, la gestion d'une rivière ? L'objectif c'est d'améliorer la qualité des rivières, de maintenir le bon état quand il est déjà là, et faire en sorte de concilier les différents usages autour de l'eau. Donc depuis 2006, les Communautés de Communes ont lancé déjà plusieurs actions dont certaines commencent, d'autres sont déjà en cours. Donc entre autres les Communautés de Communes travaillent à la mise en place d'un plan d'entretien de la végétation. Le but est de travailler sur ce qu'on appelle la ripisylve, c'est tous les arbres qui sont au bord de la rivière. Des travaux vont commencer
que les exploitants agricoles puissent continuer leurs cultures, quand ils ont besoin d'eau, on utilise un autre moyen que les pompages. Il faut donc trouver des moyens de stockage d'eau quand la ressource est présente, donc souvent l'hiver. C'est-à-dire faire des réserves en hiver pour pouvoir arroser en étiage donc souvent en période estivale. Et l'essentiel du pompage est situé sur le milieu du bassin versant, on va dire, donc en gros de Désaignes au Pont des Étroits. Donc l'objectif de substituer ces pompages par d'autres ressources en eau c'est d'augmenter le débit du Doux en étiage, l'été, et de l'augmenter de 100 litres/seconde. Et ça représente 1/5 de son débit en été. Sachant que les objectifs de réduction de prélèvements fixés par l'État sont pour l'instant de 50% et à terme, il faudra viser les 100% de réduction de prélèvements. Ce travail de substitution des pompages a été mis en place en consultation avec plusieurs structures donc déjà les 5 Communautés de Communes qui travaillent ensemble. Au début c'est surtout la Chambre de l'Agriculture qui allait au devant des agriculteurs pour savoir ceux qui étaient partants dans cette démarche. Puis on a des partenaires techniques et financiers : l'Agence de l'Eau, le Conseil Général, plus des associations qui participent au suivi de ces études.
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à la qualité des rivières. En gros plus on a d'eau, plus les quelques polluants qu'on aura seront dilués, et donc ça aide aussi à améliorer la qualité. Pour améliorer la quantité d'eau, on a lancé un programme de substitution des pompages en rivière, c'est un travail dont on va parler après. Et puis on va mettre en place un plan de gestion pour faire des économies d'eau et à toutes les échelles. Donc ce sera aussi bien les collectivités qui devront regarder dans leur bâtiment : voir comment faire pour faire des économies d'eau, sur les robinets des écoles par exemple, sur les chasses d'eau. Et de faire de la communication auprès de chacun car chacun est responsable aussi de ces économies d'eau.
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Gestion du Doux
normalement cet automne et vont partir sur 6 ans, c'est un programme qui est assez long. On va travailler sur le Doux, sur le Duzon et sur la Daronne. Parallèlement à ça on a mis en place une étude qu'on appelle « étude de transport solide ». Il faut savoir qu'une rivière a un équilibre. Souvent on voit le liquide et on voit la végétation, c'est un équilibre qu'elle fait entre ce transport liquide et ce transport solide. Donc tous les sédiments, le gravier, le sable que la rivière charrie fait partie du fonctionnement normal de la rivière. On a fait une étude pour voir comment le Doux fonctionnait, voir là où il y avait des zones de déséquilibre, où ça fonctionnait bien. Et puis quand il y a des déséquilibres et que en face de ces déséquilibres, on a des enjeux, des secteurs à enjeux, des traversées urbaines par exemple, et bien certaines fois, il faut prévoir des travaux pour rééquilibrer ça. Donc là on va passer dans la phase de réalisation.
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appelle « L'entente Doux et affluents ». Pour cette entente, on est deux personnes à travailler: mon collègue, technicien de rivière, Vincent Perrin, et moi-même.
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nsuite pour ce qui concerne la valorisation du territoire, il y a une politique départementale portée par le Conseil Général, qui concerne les Espaces Naturels Sensibles (ENS). Sur le département de l'Ardèche, le Conseil Général a identifié 14 sites qui sont dessinés en orange. Sur ces 14 sites, il y en a qui s'appellent les gorges du Doux, du Duzon et de la Daronne, donc dans lequel se trouve le Pays de Saint-Félicien, enfin un petit bout du Pays de Saint-Félicien. Sur ces ENS, l'objectif visé c'est de mieux connaître ces espaces pour mieux les gérer et les valoriser. Sur notre territoire vous avez ici le périmètre ENS proposé. Donc on voit celui qui a été proposé initialement par le département et puis après il y a eu un travail réalisé par les élus du Pays de SaintFélicien et du Tournonais pour modifier un peu ce périmètre. Sur ce périmètre,
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Christian "Moi je voudrais simplement revenir sur l'historique concernant l'ENS. C'est dans le cadre de la Commission tourisme de la Communauté de communes qu'on a réfléchi au départ à quelles sont les ressources et quelles étaient un peu les choses qu'on pouvait mettre dans ce panier, on ne parlait pas de panier à
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Espace Naturel Sensible
l'idée c'est de faire des inventaires faune-flore, par exemple, pour voir un peu ce qu'on a comme richesse, pour mettre à jour les données qui sont maintenant un petit peu anciennes. Mieux gérer, ça veut dire, une fois qu'on a regardé ce qu'on a comme richesse sur ce territoire, c'est cibler des plus petits secteurs sur lesquels il y a des enjeux et sur lesquels il faudra peut-être faire un peu plus attention. L'idée aussi c'est de valoriser ce territoire, quelqu'un tout à l'heure a fait allusion au Mastrou. Et bien voilà, par exemple, typiquement comme action qu'on peut mettre en place, on peut très bien prévoir la communication au niveau des gares du Mastrou avec des affiches qui vont expliquer ce qu'est un ENS et qui vont présenter les espèces qu'il y a sur cet espace. Là ce sont des exemples mais le Pays de Saint-Félicien a déjà lancé ses actions sur ce territoire donc il y a déjà eu pas mal de choses de faites dans ce cadre là."
l'époque mais ça ressemblait à ça. Et on a élaboré un petit document qui va bien nous servir maintenant car on arrive en fin de mandat. Et en fin de mandat il y a un peu un bilan qui est fait des actions qui ont été menées, on avait appelé cela : Schéma du développement touristique du Pays de Saint-Félicien. Et on avait parlé de ces ressources, de ces ressources naturelles qui étaient là. Moi j'habite au coeur de l'ENS, au bord de la Daronne, à la confluence du Doux et de la Daronne et ce que j'ai remarqué c'est qu'il y avait de plus en plus de fréquentation, c'est bien. Mais en même temps, il y a des conflits d'usage, autour de ces espaces et la collectivité s'est dit : « on va s'en emparer et gérer un peu ». Par contre il faut des moyens pour gérer tout ça, et il existe donc une action au niveau du Conseil Général de l'Ardèche, qui est l'activation de l'ENS. Il s'agit de s'engager dans une politique de valorisation et de préservation de la nature. Ces deux choses ne sont pas opposées, elles sont complémentaires, alors on peut imaginer de...qu'est-ce qu'on a fait ?
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es objectifs c'est réduire les prélèvements sur la moyenne vallée du Doux, ce que je disais tout à l'heure de Désaignes au Pont des Étroits, sur la Daronne aussi, donc là c'est quasi sur l'essentiel du Pays de Saint-Félicien. Gel des prélèvements, c'est-à-dire qu'on continue à autoriser les prélèvements tels qu'ils existent mais on n'en fait pas d'autre sur la partie amont du Doux, donc de Désaignes jusqu'aux sources, puis sur la partie aval donc en gros des gorges jusqu'à la confluence du Doux et du Rhône. Donc dans cette démarche, il y a 17 exploitants agricoles qui sont partants et 25 sites potentiels sur lesquels on va travailler. Ces sites potentiels on va regarder d'un point de vue environnemental et d'un point de vue géotechnique et financier leur faisabilité. Il y a deux cabinets qui ont été recrutés pour travailler là-dessus. Le but c'est par exemple : il y a un exploitant qui a 2 ou 3 sites potentiels, l'idée c'est de regarder sur chacun des sites ce qu'il est possible de faire, et après que lui sache d'un point de vue contraintes, dossier réglementaire et financièrement ce qu'il sera possible de faire. Ces études ont commencé cette année en 2013 et elles vont s'étaler sur tout 2014 voire en 2015 dans le cas où pour un exploitant on n'a pas trop de
solutions pour les sites proposés, peut-être qu'il faudra rechercher d''autres solutions.
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Objectifs de réduction pompages
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l y a une deuxième chose. Nelly nous a parlé du programme de substitution de pompages directes dans la rivière. Ça c'est quand même un sacré problème parce qu'on voit bien que chaque année...Je ne stigmatise absolument pas l'agriculture en disant cela, bien au contraire, c'est tellement difficile de travailler ici dans le monde agricole et il faut de l'eau pour faire pousser les plantes, les arbres etc. mais on voyait bien que ça ne pouvait
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"Un petit complément sur les ENS aussi que j'ai oublié de dire. Un Espace Naturel Sensible n'a pas de valeur réglementaire, donc il n'y a pas d'interdiction stricte sur ces espaces là. C'est vraiment une politique basée sur le volontariat pour mieux le connaître, mieux le valoriser, mais sans avoir derrière, le bâton des interdictions."
On vient de comprendre que les Espaces Naturels sont Sensibles et que nous sommes sensibles à la perception que nous avons des espaces naturels. Mais vous avez entendu à travers l'intervention de Christian suite à la présentation de Nelly c'est que nous gagnons toujours à établir des lieux d'échanges, des méthodes d'échanges pour arriver à comprendre au mieux, à bâtir un langage commun et un projet commun sur notre territoire. Nous faisons le pari que nous avons tous les capacités à échanger à peu près rationnellement même si parfois nous sommes passionnés. On a vu tout à l'heure les atouts et les contraintes du territoire dans la construction de terroir. C'est qu'un atout est aussi une contrainte, la passion peut être une contrainte si elle ne s'équilibre pas avec une raison notamment dans le cadre de l'échange pour tenter de bâtir le bien commun, c'est ça le projet de terroir. On a à apprendre des uns et des autres et cela fait la transition avec
Christian "Je rebondis là-dessus, parce qu'il y a eu beaucoup de réunions autour de cet Espace Naturel Sensible. Entre-t-on dans l'activation ou pas de peur qu'on empêche la construction, qu'on empêche de cultiver comme on en a envie et j'en passe et des meilleurs etc ? Chose totalement fausse. Il y a eu aussi une confusion, peut-être que vous l'entendrez parce
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Programme « substitution pompages»
que dans les journaux on va en parler de cette activation. Il y a eu une confusion entre la politique de la Drôme et de l'Ardèche. La Drôme est un département beaucoup plus urbanisé que nous, ils ont fait d'autres choix. Ils ont fait un choix de pastille, de micro territoires sur leur esapce où il n'y avait plus de réserve, il n'y avait plus de possibilité d'urbanisation et de transformation du milieu. Il y a eu confusion et on s'est dit l'Ardèche c'est pareil. L'Ardèche a une autre politique, d'un territoire plus vaste, d'espaces plus vastes. Il y a une politique de valorisation et les élus sont partie prenante, ça veut dire que si les élus ne sont pas d'accord, rien ne se fera. Par contre s'ils mettent de l'énergie là-dedans, la preuve, on l'a annoncé, je crois que les portes se sont ouvertes et on va faire de belles choses."
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lors on s'est lancé dans la mise en place d'un Sentier d'interprétation des gorges de la Daronne. Il sera effectif et fonctionnel en février 2014, juste avant la fin du mandat. On a lancé les « 24 heures naturalistes », on a travaillé avec la FRAPNA (Fédération Rhône-Alpes des Associations de Protection de la Nature). Le principe des 24 heures naturalistes c'est d'amener des scientifiques, des gens qui sont spécialistes sur des questions très précises. Là, il y avait un spécialiste des araignées, on a appris des tas de choses sur les araignées, il en est ressorti une petite exposition. Cette exposition est appelée à grandir puisqu'il y a d'autres personnes qui nous ont dit : « mais moi j'ai des photos, j'ai vu ça, j'ai vu ça ». Elle est diffusée dans les écoles, donc je relance l'appel à ce sujet, vous pouvez l'utiliser. Cet été, elle a été utilisée par diverses associations, voilà notre action. Puis on a lancé des sorties de sensibilisation de la nature, entre autres, on a fait tout un travail cet été sur les zones humides. Derrière ces panneaux vous avez toute une exposition qui a été réalisée par le Syndicat d'eau d'Eyrieux. Moi je suis très content ce soir de vous annoncer que la Communauté de Communes du Tournonais, a délibéré mercredi soir en faveur de l'activation de
plus durer puisque la rivière ça devenait l'Oued au mois de juillet, souvent on la voyait baisser. Le côté réglementaire s'est imposé à nous et on s'est retrouvés autour de la table, Chambre de l'Agriculture, élus, associations, Agence de l'Eau et j'en passe et des meilleurs. On est tombés d'accord sur ce programme de substitution que la Communauté de Communes de SaintFélicien est fière de porter puisqu'on est au cœur de la problématique agricole de ce territoire. Deux choses : en 2016, on a l'objectif qu'il n'y ait plus aucun pompage direct dans la Daronne et en 2023 pour le Doux. Alors vous allez me dire encore des dates, mais jusqu'à présent, il n'y avait jamais eu de date posée. Donc à nous de faire de sorte que les choses se réalisent pour que l'agriculture puisse survivre en ménageant l'espace. Merci."
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la procédure ENS, ça nous ouvre des portes pour l'avenir. Donc je pense que dans ce panier de biens et de services, la place prise par la prise en compte de ressources naturelles sera certainement plus importante qu'avant, je m'en réjouis et il n'y a pas que moi bien sûr mais j'y ai beaucoup travaillé, c'est pour cela que je vous dis cela ce soir.
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Actions ENS
Un espace à ménager
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Pascal Magnier
L'avenir de ce terroir aura un sens, si nous donnons de la force à notre responsabilité écologique
1- Y a-t-il quelque chose dans notre raisonnement qui ne fonctionne pas ?
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erci aux organisateurs de me donner la parole, j'avais dit pour l'écologie, c'est une heure ou 10 minutes… c'est 10 minutes. J'aborderai 3 points constat, analyse et perspectives. Constat : qui a envie : d'une énergie venant de centrales pleines de fuites, prêtes à exploser et produisant des déchets dangereux dont on ne sait quoi faire ? Qui a envie : de mettre dans son assiette des résidus, même infimes, de pesticides et autres poisons efficaces et désagréables ? Qui a envie : d'un changement climatique avec la température d'une planète qui s’emballe ? Qui ? Personne ? Pourtant on constate
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l y a distorsion dans notre perception de la réalité ! Voici une piste d'Analyse comment ça marche, le raisonnement ? Il y a la pédagogie : on comprend et on apprend de façon durable ce que l'on découvre. (je me souviens d'un professeur qui posait uniquement des questions tout au long du cours). Il y a l'élément déclencheur : On peut comprendre , comme ça, instantanément. Certains se souviennent de la série télévisée
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2 - Comment ça marche ?
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ans prétention voici quelques pistes à suivre. Pour être clair dans le contenu de mon propos, je souhaite uniquement porter votre attention sur nos réflexes qui conduisent notre pensée - en prendre conscience nous permet d'être sereins par rapport à nos raisonnements. Je vous propose un dessin, un triangle :c'est une structure qui me plaît bien. Au centre : notre perception du monde. En haut entendre la magie sémantique (ex. la France est la France) une tautologie que Charles De Gaulle aimait utiliser, pour ne rien dire et ne rien expliquer. Détourner l'attention, faire perdre le fil du raisonnement était le but recherché.
3 - Nous sommes prêts ?
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ous avons notre schéma conducteur de la pensée : parlons de ce qui est important. Je mets au centre la structure de l'écologie.
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que les éléments de dégradation de la nature augmentent plus que les actions en faveur des précautions écologiques élémentaires.
Soyons attentifs à ce que nous entendons. à droite voir : les surréalistes ont fait un bon travail sur le schéma conducteur de la pensée. Entre autres le peintre Magritte, vous avez sans doute été interpellé par cette toile où on voit une pipe avec en dessous la phrase « ceci n'est pas une pipe…» c'est la représentation d'une pipe ! Soyons prudents avec l'interprétation de ce que l'on voit. Autre exemple : la carte n'est pas le territoire. à gauche dire : nous connaissons tous la force de la parole, c'est le fond qui compte la rhétorique est un outil, nous sommes proches de la manipulation. Gardons notre sens critique. Nous nous fabriquons notre représentation du monde en subissant toutes sortes d'influences. Prenons conscience de l' « ici et maintenant ».
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Pascal Magnier
« Les 5 dernières minutes » (oui ? Bonjour les papy-boomers), c'était dans les années 60, il n'y avait qu'une chaîne de télévision, dans une série policière, l'inspecteur Bourrel trouvait la solution à son enquête (dans Les 5 dernières minutes) avec un « Bon sang mais c'est bien sûr ! » qui fait partie de notre mémoire collective. Il y a la force de la formule : souvent, j'explique, j'argumente et je fais des démonstrations épiques à mes amis sur les conséquences catastrophiques des marques distributeurs sur notre économie. Ils me font « oui oui tu as raison », et ils continuent à en acheter. Un jour la formule est tombée, Sophie était là et dit « c'est simple marque super U tu t'es fait U ». Les bonnes questions, les éléments de notre mémoire conditionnent notre pensée. intéressons-nous au schéma conducteur de la pensée.
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Esquisse d'une transition écologique
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donner leurs impressions sur cette journée, ce que nous avons appelé : Regards croisés pour une lecture commune. Alors, Pascal, une esquisse de transition écologique ? C'est un titre un peu lourd peut-être mais tu vas nous l'alléger ?
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la transition écologique que Pascal Magnier va nous esquisser. Et j'annonce tout de suite pour qu'on gère au mieux le temps : on va préparer le panier de biens avec Denis, une présentation pour pouvoir remplir ce panier. Gilles, Sylvette et Milad se préparent pour
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Esquisse d'une transition écologique
Esquisse d'une transition écologique
4 - Perspectives : dernier schéma, dernier point
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u centre : l'écologie tous ce qui fait du bien – si on l'exprime comme ça, ça change tout, c'est différent, c'est
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Alors voilà le terroir qui nous lie à Louis Aragon et Jean Ferrat. Merci Pascal, ce triangle nous aide à nous repérer, vous savez quand on est amis des cartes, il faut toujours trianguler. C'est bien on a le triangle devant nous entre l'entendre, le voir et le dire. L'entendre avec vous, écouter
à droite : les techniques culturales, nous avons à jardiner la planète à optimiser chaque parcelle de terrain pour réussir (l'association SOLAGRO a fait un travail passionnant sur une prospective de l'agriculture pour les 50 prochaines années).
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En haut : les énergies douces, les solutions techniques existent. Utilisons-les.
l'eau, écouter la source, et le voir, l'humus, et le dire, l'homme et la réflexion. Pascal, tu nous stimules à remplir notre panier, parce que c'est le temps maintenant que je sollicite Denis, je sollicite Eric pour Terroirs & Cultures. On va remplir notre panier de biens et de services symboliquement et vous allez repérer les vides … et nous proposer de les remplir.
à gauche : la réflexion des hommes. Sans réflexion – pas de solution.
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Comme le dit le cinéaste JeanPaul Jaud « Nos enfants nous accuseront » permettez-moi un : « Bon sang, mais c'est bien sûr ! ».
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L'homme c'est l'activité humaine qui est responsable du réchauffement, de la dégradation des sols. C'est l'industrialisation qui a l'impact le plus négatif sur l'écologie. J'ai tenu à faire ces schémas pour dire que : c'est notre prise de conscience qui peut changer les choses. Soyons modestes par rapport à l'ampleur de la tâche et conscients de la force de notre engagement.
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Il est temps surtout qu'en 1963 Jean Ferrat le disait déjà. Je citerai Aragon pour introduire les vers de sa chanson « Le poète a toujours raison ».
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L'humus c'est la fertilité du sol. En gérant l'humus, bien ou mal, c'est la capacité des sols à produire qui est en cause. Ayons un regard critique sur nos façons culturales. La pédologie, science délaissée, est une clef pour comprendre le fonctionnement des sols. Claude Bourguignon a fait des travaux remarquables sur le sujet.
positif : n’est-ce pas ?
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L'eau c'est le sang de la terre , sans eau pas de vie. Nous sommes ici sur la montagne sèche d'Ardèche, lorsqu'on fait une lecture de paysage, on le voit très bien, la forêt agit comme une éponge, c'est le capteur et le réservoir d'eau indispensable. Gérer la forêt c'est gérer l'eau.
Esquisse d'une transition écologique
"Ils avaient tous l'âme bien née noueuse comme un pied de vigne les filles veulent aller au bal il n'y a rien de plus normal que de vouloir vivre sa vie leur vie ils seront flics ou fonctionnaires le temps que la retraite sonne il faut savoir ce que l'on aime et rentrer dans son hlm … Pourtant que la montagne est belle …
Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
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L'aliment, de l'herbe à la table.
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Donc on prépare le panier, il est vide d'abord. Le panier de biens et de services, on a vu qu'une de ses qualités au-delà de la compréhension un peu délicate de cette notion, c'était de se dire que chacun des produits de biens ou de services pris isolément, on pouvait dire : « mais ailleurs, il y en a. Oh là, des fromages de chèvre, on sait en faire ailleurs, des paysages de moyenne montagne, il y en a bien ailleurs, du miel il y en a bien ailleurs, des ébénistes qui font des jolis meubles, des sculptures il y en a bien ailleurs... » mais tout ça pris ensemble, c'est peut-être cela notre panier et c'est cette interaction, ce lien entre ces différents biens et services qui fait notre particularité. Alors Denis, on commence par quoi ? Denis Germain "Alors d'abord il y a le foin qui représente le travail du paysan, la bonne alimentation des vaches, des chèvres, des chevaux, des moutons, de tous les ruminants de ce terroir."
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On peut souligner que ce foin séché... Quand on arrive dans le paysage de Saint-Félicien, peut-être ça ne vous saute pas aux yeux mais quand même ça saute aux yeux... c'est qu'on est sur une ressource essentielle qu'on voit partout mais qui peut échapper à l'œil un peu innocent en la matière, c'est l'herbe. Il me semble que l'herbe, c'est l'une des premières ressources du Pays de Saint-Félicien, je fais le lien avec ce que nous disions sur l'eau par rapport à l'utilisation... dans des productions un peu irriguées, il n'y a pas besoin d'irriguer forcément l'herbe. C'est une ressource de qualité. D'ailleurs dans l'amélioration qualitative des produits du terroir notamment laitiers, Gilles Fumey pourrait en témoigner sur le Comté, ce qu'on essaie de faire quand on veut aller vers la qualité c'est par exemple de supprimer l'ensilage pour utiliser le foin qui est meilleur pour faire un lait de qualité. On a un peu dévoyé l'herbe dans la modernité pour aller peut-être plus sur du maïs par exemple. Aujourd'hui, tout le monde revient sur l'herbe pour faire un lait de qualité. Et c'est ce qui couvre tous vos paysages avec la forêt. Donc je pense que dans le panier de biens et de services, l'herbe était un véritable bien qui peut paraître... qu'on oublie au passage alors que c'est la première ressource peut-être pour l'agriculture.
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"Ensuite, on va représenter l'ancien. Celui-ci est un vieil outil fait pour travailler le bois. Monsieur Sovignet pourrait nous donner son nom , une sorte de tarière. Il symbolise tous les métiers du bois. Il est là pour représenter le savoirfaire des artisans qui construisent les charpentes, les maisons, les meubles, qui sculptent des œuvres d'art… On a une scie… De vieux outils qui représentent tout ce beau savoir-faire des métiers du bois. Ici encore un outil d'époque, qui fait le lien avec le foin : une grande faucille, que l'on appelle un « volant » qui n'est plus utilisé mais qui fait le lien avec le fourrage… … Ensuite, on a le pain qui représente, l'alimentation, le savoir-faire, les échanges humains…parce que partager un bon morceau de pain est très convivial !
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Jacques Deplace, Eric Barraud, Denis Germain
Ne pas oublier « au passage » pour assurer la nécessaire transition...
On va revenir à l'alimentaire avec les confitures. Ce pot là, c'est de la confiture de mûres. Celles-ci poussent ici, tout le monde peut aller ramasser des mûres dans la nature. On continue avec ce miel, qui représente les abeilles, les ruches, qui va en même temps soulever la question de la disparition des abeilles, et de la pollinisation qui est très importante. Le jus de fruits qui rend la convivialité, le savoir-faire dans notre région. Les produits maraîchers, - il manque la truffole -, les carottes, les salades, les choux, les tomates… tous ces légumes qui vont faire nos soupes, nos salades. La tomme en salade, c'est un produit "de chez nous", le saucisson, le caillé doux de SaintFélicien…Et puis tous les artisans, les services, les associations, les manifestations qui contribuent à notre bien-être au Pays de Saint-Félicien.
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Le panier de biens et services du Pays de Saint-Félicien
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Le panier de biens et services
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Le panier de biens et services
Le pain, je donne souvent le sens et Gilles va compléter. Le pain a donné naissance au mot « copain » si ma mémoire est bonne. Partager le pain pour se faire des copains, le compagnon. Denis "Il ne faut pas oublier, toujours pour le bois, ces planches de châtaignier qui sont là grâce aux savoir-faire du bûcheron, du scieur, du sculpteur ou de l'ébéniste qui travaillent les formes pour en faire des meubles, des sculptures, tous ces objets que vous pouvez voir à la scène …
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Le panier de biens et services
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Jacques Rendons hommage à Charles Fourel, qui est ici présent. Il est un initiateur du syndicat du caillé doux de Saint-Félicien, merci d'être venu et bravo pour cette initiative, que nous espérons redévelopper, avec la Chambre d'Agriculture, même dans les difficultés et en général, elles ne nous font pas peur et essayons de les aborder rationnellement. On a fait pour cela, une petite réunion à Désaignes, auprès des producteurs du caillé doux, qui aujourd'hui sont une dizaine, et qui n'osent pas, non, n'osent pas n'est pas le mot mais qui ne se présentent pas comme faisant du « caillé doux de Saint-Félicien ». Et ce qu'on essaie de faire à travers un certain marquage de terroir, c'est bien l'idée d'avoir non seulement un caillé doux mais un caillé doux de Saint-Félicien, répondant au cahier des charges que vous avez élaboré déjà en 1979 sauf erreur de ma part, ce qui concerne 55 communes de moyenne montagne sur notre territoire. Ce cahier des charges, ce cahier des ressources c'est ce sur quoi on va travailler donc jeudi prochain à Désaignes avec une dizaine de producteurs pour voir si on peut élargir le nombre de producteurs présents aujourd'hui. Denis "Ensuite, Eric m'a amené ce petit « gugus » à vélo qui évoque l'Ardèchoise." Eric C'est le maillot jaune Jacques Quand on dit « gugus » à vélo, ce n'est pas très bien, mais on comprend qu'on est sur le vélo. La Communauté de Communes se penche aujourd'hui sur l'Ardéchoise permanente aussi avec la
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Le panier de biens et services nouvelle association. On n'a pas répondu à la question de monsieur Black tout à l'heure mais on est en train d'essayer d'y répondre, rassurez-vous, votre remarque est très pertinente et stimule tout à fait notre réflexion. Je signale au passage qu'il était question que l'Ardéchoise démarre d'Annonay, donc ailleurs que SaintFélicien. La Communauté de Communes s'est beaucoup bougée pour répondre aux demandes. C'était une demande, comme un cahier, un cahier de doléances pourraiton dire, et on y a répondu et on est très heureux de l'avoir fait puisque l'Ardéchoise continue à partir de Saint-Félicien et on peut même dire aujourd'hui, du Pays de Saint-Félicien puisque tous les villages de la Communauté de Communes sont concernés par l'Ardéchoise aujourd'hui. Denis "Pour finir, vous le voyez sur la scène, c'est une sorte de grand "panier", je ne connais pas son nom". Jacques Je crois que cela s'appelle un « âne-bée » et qui servait à porter sur le dos le fumier dans les chalais et auparavant, la terre pour construire les chalais (terrasses ou faisses dans le sud Ardèche). (Une voix : «L'âne-bée, c'est l'âne avec deux jambes.») Ce qui nous permet d'évoquer un dicton. concernant les ânes … contrairement à une mauvaise traduction, l'âne n'est pas la figure de la bêtise, c'est la figure contraire, on met un bonnet d'âne à ceux qui, encore ignorants, peuvent avoir accès à la connaissance, alors méfiezvous quand on parle d'un âne, il y a une inversion c'est comme les atouts et les contraintes n'inversons pas les affaires…
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Eric Alors non pas un clin d'œil mais pour ramener à tous les travaux qu'on fait depuis deux ans, j'ai trouvé çe document sur les tables à l'entrée. Il y en a qui l'ont feuilleté à l'entrée ? Il y a toutes les affiches de « Terroir en Fête » depuis quelques années, qui ont été rassemblées avec quelques articles de presse sur le sujet par Jacques. Je le mettrais dans le panier parce que cette pratique festive me semble un élément essentiel dans l'animation du panier. Je pense que ça mérite... Tout à l'heure, au même titre que les pratiques culturelles qui ont été évoquées... Et je trouve que c'est tout à fait important que les associations culturelles aient un peu frappé, manifesté l'an dernier pour rejoindre la dynamique des Entretiens du Terroir parce qu'on a vu l'importance que ça avait. Et puis, plus que symboliquement, ça c'est pareil on pourra les retrouver à l'entrée, c'est les Actes des Entretiens du Terroir du Pays Saint-Félicien, première édition, donc de l'an dernier, qui ont été réalisés. Voilà, quand on a démarré l'action, il y a deux ans, j'avoue qu'au Comité de pilotage, j'avais senti qu'on se demandait où tout cela allait nous mener : le Terroir, les Entretiens du Terroir, le Chemin de Terroir... Qu'estce que ça pouvait amener ? En quoi cela pouvait consister ? Le concept n'était pas bien compris... un peu rétrograde... et je trouve que ces deuxièmes Entretiens avec ce panier qui se remplit concrétise tout ce qu'on a fait depuis deux ans de manière symbolique mais bien plus que symbolique parce qu'il faut rajouter dans ces actes de ces Entretiens, tout ce qu'on a entendu aujourd'hui dans le panier de biens qui se rajoute, toutes les compétences, le savoir et les dynamiques humaines, et la communauté humaine qui est à la base du Terroir. Quand on avait présenté la définition l'an dernier, on était parti de la communauté humaine. Ça dans le panier, c'est le savoir-faire de votre
communauté humaine qui est essentiel à la construction du Terroir pour une première année seulement le panier, on va continuer, hein ? Jacques Oui, bien sûr, il y a toujours à lire et à relire, à lier et à relier … et vous voyez bien qu'on ne peut pas finir de remplir ce panier aujourd'hui. On a vu les artisans du bâtiment tout à l'heure, je crois qu'il y a un bout de pierre qui m'évoque quelque part, en faisant attention, parce qu'au fond l'architecture, n'est pas qu'une architecture royale de seigneurs et de châteaux, les maisons paysannes ont des architectures qui valent le coup d'être regardées. Et en imaginant les savoir-faire et les multicompétences, dont a parlé Luc Sovignet, des paysans qui construisaient les maisons. Là, le travail de la pierre … Vous voyez on n'a pas fait le tour, l'hébergement, la restauration, et surtout l'accueil qui pourraient rentrer dans le panier. Pour ne pas être trop lourd et alourdir le panier et surtout ne pas alourdir le temps et donc il faut tout de même penser à s'arrêter de parler même si j'oublie quelque chose d'important … … Je sollicite Sylvette, Gilles, Milad pour donner des impressions sur cette rencontre entre la table ronde d'hier et les Entretiens d'aujourd'hui, comme des regards croisés de leur expérience de vie, de leur connaissance. Vous pouvez aller sur la scène. Il manque tout de même, qui n'est pas un objet, me le fait remarquer Philippe (Bouvet) .. mais une production culturelle savoureuse de l'échange, notre fouasse … prononcez fouyasse … merci à Denis Croze de nous l'avoir fait redécouvrir et à Philippe d'avoir eu, avec la complicité de Luc (Sovignet), cette ténacité pour la mettre à l'honneur.,. Et bien on avait oublié, on oublie parfois le principal, mais nous partageons le principal, même si on oublie.
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B Eric Alors, peut-être à tout honneur tout seigneur, … on a fait monter Milad sur la tribune, je ne suis pas certain... tout le monde n'était pas là hier, tout le monde ne connaît pas Milad. Donc je me permets de le présenter avant de lui céder la parole. Milad nous vient de loin spécialement pour les Entretiens du Terroir, il est président de la Communauté de Communes de Deir el Ahmar, au Liban. C'est sur la montagne libanaise, au-dessus de la plaine de la Bekaa, il est président d'une Communauté de 6 communes, qui sont rassemblées au sein de ce groupe communal. Et au sein de Terroirs & Cultures on travaille depuis plus de deux ans avec lui puisqu'on a passé un partenariat avec la Communauté de Communes, et puis avec tous les acteurs locaux pour essayer de développer son panier.
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Nous on l'a rempli ici, il est en train d'essayer de le remplir sur Deir el Ahmar, alors c'est bien évidemment dans le contexte que tout le monde connaît, bien plus compliqué et bien plus difficile. Mais il n'empêche qu'on a démarré ce travail et l'objectif qu'on avait pour les prochains mois si l'actualité nous le permet c'est de tenir un Entretien du Terroir à Deir el Ahmar donc en janvier ou en février. Je l'ai invité avec, bien sûr, Jacques, qui était déjà là-bas il y a deux ans, pour lancer le Comité de pilotage. Il m'a dit « ça m'intéresse beaucoup de faire les Entretiens du Terroir. Il faut que je vienne pour bien comprendre comment ça fonctionne, comment on peut faire ça et comment on peut l'adapter aux réalités locales » … bien sûr, parce que l'intérêt du Terroir c'est aussi sa capacité à s'adapter aux spécificités locales. Donc, il a pris l'avion hier matin, spécialement pour être à Saint-Félicien
Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
Eric
onsoir à tous, je tiens à remercier tout le monde ici et Terroirs & Cultures International pour me donner l'occasion de participer à cet entretien. À propos de mes remarques ou de mes impressions, tout d'abord ça se voit l'ambiance est assez amicale et spontanée ici, je me sens chez moi. Aussi la bonne organisation, l'Entretien, ça se voit, est bien préparé et surtout avec amour. Le contenu est assez intéressant bien sûr pour des sujets plus que d'autres au moins pour moi pour ce qui est adaptable pour notre Terroir. Il a couvert beaucoup de sujets. Je sens qu'il y a une contribution d'un grand groupe de la société du Pays de Saint-Félicien. Le dynamisme, c'est normal, parfois j'ai trouvé qu'il en manquait à certains moments et c'est normal dans des conférences pareilles. Les idées, j'ai pris beaucoup d'idées que je pourrais appliquer sur notre Terroir, bien que d'autres peut-être ne sont pas adaptables, parce qu'il y a une différence de culture, de nature et d'autres. La prise de conscience, je sens qu'ici, elle
Merci à vous Milad d'être venu jusqu'ici, et moi j'aurais une proposition à faire à la société du Pays de Saint-Félicien … je trouve le mot joli. C'est que comme Milad est venu jusqu'à vous, j'espère que pour les Entretiens qu'on va faire donc en 2014, en février/mars, si tout va bien, et bien on aura des représentants de la Communauté de Communes du Pays de Saint-Félicien qui vont venir à Deir el Ahmar pour expliquer leur expérience, un peu comme vous avez fait et c'est ça qui serait intéressant et c'est ça qu'on essaie de faire à Terroirs & Cultures, à chaque fois de relier les hommes et de relier les terroirs. Donc, sous couvert de Milad et je sais qu'il est d'accord, l'invitation est faite pour qu'il y ait des représentants du Terroir de Saint-Félicien qu'ils soient présents pour témoigner aux premiers Entretiens de terroir de Deir el Ahmar. Milad "Vous serez les bienvenus." Eric Vous verrez que la cuisine est bonne à SaintFélicien mais qu'elle est excellente aussi au Liban.
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Milad Akoury
est beaucoup plus élevée que chez nous que dans la région de Deir el Ahmar. D'ailleurs ici c'est le deuxième Entretien et nous on en est qu'au début, on n'a pas encore fait le premier Entretien. Je sens que la prise de conscience de tous les sujets qui ont été discutés ici est plus élevée et même Eric pourra témoigner de cette chose. Ce qui est un défi pour moi et notre comité de pilotage, je sens qu'il y a un chemin à parcourir, vous avez parcouru un chemin je vous félicite. Le buffet est délicieux surtout la caillette, j'ai bien aimé le vin. Je vous remercie bien.
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Jacques Deplace, Milad Akoury, Sylvette Beraud Williams, Gilles Fumey, Eric Barraud
aujourd'hui avec vous et puis pour entendre, comprendre et appliquer en 2014. Voilà, on arrive au terme des Entretiens du Terroir. Je sais que vous restez aussi demain matin pour faire la Foire aux pommes, puisqu'il est sur un terroir de pommes. Et au passage pour dire aussi les choses dans leur réalité, la pomme est plus rémunératrice chez lui que le vin. Plutôt étonnant et il pourra expliquer pourquoi vu de France. Milad, vous avez la parole pour nous dire ce que vous avez pensé d'aujourd'hui et de cette soirée d'hier puisque hier vous étiez déjà avec nous.
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Regards croisés
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Regards croisés
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Regards croisées
Regards croisées
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Une volonté commune et un manque de liens ?
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t j'ai appris aussi que le Pays de SaintFélicien, contrairement à ce qu'il se passe actuellement où toutes les Communautés de Communes se regroupent en énormes collectivités…(je ne sais plus comment on appelle ça…en Pays, qui n'ont plus grand chose en commun…) le Pays de Saint-Félicien a tenu à rester groupé. Je trouve que c'est déjà quelque chose de très significatif. Cela prouve qu'il y a vraiment une volonté commune, un projet sans
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utre chose aussi, je dois dire que j'ai été très sensible à l'intervention de Marc (Nouaille) que je connais bien, par rapport à tout ce patrimoine immatériel de la langue. Dans ce pays là, il semble y avoir eu pas mal de transmissions puisque les exploitations agricoles se sont transmises. Au niveau de l'artisanat aussi il y a eu beaucoup de transmissions de père en fils ou peut-être plus que ça, je ne sais pas. Transmission aussi de certaines valeurs, comme la polyvalence… certaines pratiques qui étaient bien ancrées dans un monde paysan difficile comme la polyvalence que l'on pratique actuellement. Des questions qui se posent... ça relève toujours de ce manque de communication qui se pose semble-til. La commercialisation des produits locaux, chacun a l'air d'essayer de se débrouiller avec les moyens du bord. Traditionnellement ça a fonctionné mais on met peu de choses en commun à ce niveau là par exemple. Se pose la
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Jacques Il y en a eu un, l'idée serait de le relancer autour de l'ensemble des savoir-faire. Sylvette "Dans le panier, il manque ce qui matérialise le patrimoine immatériel mais
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Transmission et générations
bon ce sont de tout petits éléments et je vais passer la parole à mon voisin. Peutêtre qu'il me reviendra d'autres choses après."
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e n'ai pas pu être là hier soir et puis je disais à Jacques, qui m'a invitée à ces journées qu'il y avait peut-être erreur de casting, En effet, une grande partie de mon travail consiste à écouter les gens et, il me faut ensuite tout un temps de maturation pour arriver à extraire quelque chose de ce que j'ai recueilli de la mémoire des gens, donc là à chaud c'est un peu difficile. Je vous remercie beaucoup pour cette invitation car comme l'a dit mon voisin, on sent vraiment une ambiance chaleureuse, et une réelle volonté de faire quelque chose pour que ce pays vive, et avance. Déjà, c'est un point."
question des magasins de producteurs. Je viens de la vallée de l'Eyrieux, il y a une dizaine de jeunes producteurs qui sont installés depuis 5-6 ans qui sont tous en bio et qui ont créé un petit magasin de producteurs à Saint-Sauveur-deMontagut. Ils ont plein d'entrain et apparemment ça marche, ils ont le vent en poupe. Ils ont misé sur la qualité, le lien entre eux et la solidarité. Donc ça je pense que c'est très important aussi. Il y a des tranches de la population qui restent sur le bas côté, à un moment j'ai entendu que les parents d'élèves ne se sentaient pas trop concernés par ce qu'il se passait. On a parlé de la jeunesse qui n'a pas trop participé à ces Entretiens, qu'en est-il des personnes âgées et de l'intergénérationnel ? Alors, ça j'ai entendu que ça fonctionnait au niveau des ateliers et au niveau de la culture mais à part ça ? J'ai entendu qu'il y avait un projet de maison de retraite, mais les personnes âgées, quelle est leur place dans le projet global ? Je ne sais pas, il y a des questions qui se posent par rapport à ça, et par rapport à la transmission sans doute. Existe-t-il un forum des associations ? "
Eric Merci beaucoup d'avoir pris le risque d'une réaction à chaud qui est toujours difficile. Gilles, c'est une réaction à chaud mais ça fait deux ans que tu es avec nous, alors tu as le recul.
Gilles Fumey
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a va et puis je commence à connaître les visages et les usages de la région. Ce qui a d'intéressant c'est de voir ici comment se construit un Terroir. On est à la deuxième étape de l'accouchement, il y a une troisième étape l'année prochaine je crois, et ça c'est très intéressant. Et ce qui a été bien c'est d'avoir commencé par parler de ce panier. Parce que... ça me rappelle une histoire
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doute, dont les éléments se retouvent dans le panier. Mais ce que je retiens de cet après-midi, c'est qu'il semble manquer de liant. À plusieurs moments on a entendu qu’il n'y avait pas assez de liens entre les associations, qu’il n'y a pas assez de liens entre les acteurs privés et publics. J'ai perçu un petit moment un témoignage qui faisait état d’une difficulté d'intégration et je me posais la question par rapport à cela : y a-til beaucoup de nouveaux arrivants dans ce pays ? Comment sont-ils accueillis ? Y a-t-il des jeunes venant de l'extérieur qui veulent s'installer dans l'agriculture ? Trouvent-ils la surface dont ils ont besoin ? Il me manque beaucoup d’éléments pour percevoir toute cette vie du pays.
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Sylvette Beraud Williams
Regards croisés
La route
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t l'autre chose que j'ai trouvé bien aussi, vous en avez parlé c'est la route, la strada. On a dit au début, vous vous rappelez, le sentier, le chemin de SaintJacques-de-Compostelle.
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'autre point qui m'a paru important c'est qu'on a vu beaucoup d'acteurs, ça c'est très bien mais j'ai trouvé que beaucoup de gens se demandaient qui ils sont. Qui sommes-nous à Saint-Félicien ? Après une longue période de dépossession de notre identité, je crois que Pascal l'a très bien montré. Qui sommes-nous au fond ? Et d'ailleurs, vous avez répondu à la question par l'artisanat puis ensuite par l'accueil. Sur l'artisanat, j'ai bien aimé l'histoire...pourquoi il y en a beaucoup. Moi ce que j'apprends avec mes étudiants c'est que dans les endroits où il y a beaucoup d'artisans, la terre est ingrate. Il y a souvent un lien quoique ici elle n'est pas si ingrate que ça mais probablement qu'elle est plus ingrate que dans certaines autres régions. L'autre raison c'est évidemment la vallée du Rhône mais qui donne un avantage, je crois que ça a été très bien montré. Et cela m'a beaucoup plu de voir que c'était une piste que pouvaient emprunter les jeunes plus tard, parce que l'artisanat ce n'est pas quelque chose d'évident. Alors qui sommes-nous ? Nous sommes
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'autre point, c'est l'accueil. Alors qui vient chez nous ? Pour quelles raisons les gens viendraient-ils chez nous ? Pourquoi ? Et où viendraient-ils ? J'ai trouvé que l'accompagnement des touristes, le programme Eductour c'est pas mal comme idée. J'ai trouvé cela très bien. Les étapes savoureuses aussi. J'ai pensé parce qu'on est en Ardèche … parce que j'ai croisé des ânes ce matin, qui sont des gens savants, que les ânes ici auraient pu jouer le rôle de celui de Stevenson, il y a quelques kilomètres, une dizaine de kilomètres plus bas. Ce qui a permis à cet écrivain de se balader à travers l'Ardèche et de guider aujourd'hui les touristes puisque vous savez que beaucoup de gens font le chemin de Stevenson avec des ânes.
Evénementiel
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lors l'événementiel, alors on a dit : « qu'est-ce qu'on peut faire ici ? » Moi il me semble que dans une Communauté de Communes dans laquelle il y a de très jolis points de vue, moi j'ai été très impressionné par tout le diaporama que vous avez mis sur la gauche cet après-midi … des événements aux quatre coins de la course du soleil... Moi je rêve qu'il y ait des gens ici qui fassent des soirées dans les bois ou sur un point de vue au solstice
Labellisation
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a labellisation, alors je vais dire un mot parce que c'est vraiment mon travail. Il ne faut pas avoir peur de dire que les artisans sont du Pays de Saint-Félicien. Vous connaissez cette marque qui s'appelle Les déménageurs Bretons. Alors moi je me suis longtemps demandé ce qu'avaient de plus des déménageurs qui étaient Bretons aux Provençaux. J'ai vu qu'ils avaient des chapeaux ronds, ça on le sait mais en dehors de ça... Je trouvais que les bretons étaient plutôt petits, ils ne sont pas costauds, pendant très longtemps ils n'ont pas bu beaucoup de lait, alors je ne voyais pas pourquoi les Bretons déménageaient mieux que les autres. Mais en fait ce qui est intéressant, c'est que comme il y a beaucoup de Bretons qui viennent à Paris et des Parisiens qui retournent en Bretagne, ils ont créé une entreprise et une marque. Quand je vous entends parler de Label, de cahier des charges, il n'y a pas besoin de se prendre la tête avec ça. Si vous faites quelque chose qui s'appelle Les Artisans du Pays de Saint-Félicien, vous n'êtes pas obligés de graver dans le marbre, un cahier des charges. Après effectivement si un jour, il y a un abus, si quelqu'un pique votre marque, parce qu'elle est mondialement connue, et que vous trouvez à Kiev des déménageurs de Saint-Félicien, bon... on pourra aller à l'OMC mais on n'en est pas encore là. Je dirais : « Faites une marque ! », si vous trouvez que le travail est mieux fait
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Qui vient chez nous ?
d'été, au solstice d'hiver, à l'équinoxe au printemps et à celui d'automne. Les Bretons et les Aquitains vont au bord de la mer les jours d'équinoxes. Donc, voilà avec des grandes cérémonies païennes, ou chrétiennes enfin peu importe, mais qu'on aille sur le paysage, regarder le Liban, ce qui est magnifique, ce qui dépasse, ce qui défile et sur lequel on pourrait travailler.
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L'identité
des gens qui savons faire des choses, on a parlé de la fierté du travail bien fait. Là j'ai trouvé des choses assez curieuses mais pourquoi pas ? Il ne faudrait pas qu'il y ait trop de gens de la vallée du Rhône qui soient là et qui diraient même : « mais pour qui se prennent-ils ? Et faisons-nous si mal le travail en bas ? ». Mais ça c'est... débrouillez-vous avec tout ça !
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Moi j'aimerais un jour qu'il y ait le chemin de Saint-Félicien. Et on va aller où là, une fois qu'on arrive au bout du chemin de Saint-Félicien ? Je crois que c'est très important de se dire qu'aujourd'hui, on a dématérialisé énormément de choses. Moi je le sais car je suis géographe et on a tous des étudiants qui sont obligés de travailler... avec des étudiants qui ont tous Google Earth au bout de leurs doigts, et à qui je dois dire que les cartes d'Etat- Major au 25 millième, celles qu'on a présentées tout à l'heure, sont éminemment plus importantes pour saisir ce que dit l'espace.
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il y a quelques années, j'entre dans un supermaché, j'étais avec un panier et il y a un type à l'accueil qui me dit : « mais prenez un chariot », je lui dis : « mais moi je ne veux pas de votre chariot », « mais prenez un chariot parce que le panier c'est trop lourd », « mais moi je ne veux pas de votre chariot parce que c'est un attrape-nigaud, vous allez me faire mettre des trucs dedans, je n'ai pas besoin d'un déambulateur dans le magasin, j'ai besoin d'un panier, une fois que mon panier est plein j'arrête ». Et je crois que cette idée de panier qui m'a paru très saugrenue au début, je l'ai trouvée très riche car elle rappelle au fond, un outil qui est vraiment fondamental que nous avons tous de 7 à 77 ans, qui est notre culture locale. Elle est le contraire justement de ce putain de chariot que nous avons dû pousser dans les supermarchés, remplir de cochonneries, parce qu'on sait très bien qu'un tiers de ce qu'on achète dans les supermarchés, n'a pas été décidé à l'entrée et ça, ça alimente ce qu'on appelle les brocantes et les vide-greniers. En général, quand il y a un supermarché qui s'installe dans un endroit, 3 ans après, il y a un vide-grenier qui se met en place, parce qu'évidemment il faut débarrasser les baraques de tous ces trucs qui ne servent à rien. Donc le panier, j'ai trouvé ça très bien, un peu romantique à la fin, il y a des instruments bizarres, de faucilles qui ressemblent à des trucs dans les films d'horreur. Dans le prochain on mettra des choses immatérielles, peut-être un peu de dentelles aussi... Alors le panier, j'ai trouvé ça très bien.
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Quelle langue parlonsnous ?
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n a parlé de l'occitan. Alors pour moi il y a quelque chose qui renvoie à la question, toujours la même : qui sommesnous à Saint-Félicien ? Sur quelle planète sommes-nous ? Et ce qui m'a frappé c'est que vous tenez à rendre visible ce territoire, à vous à... Qui sommes-nous ? Et bien nous sommes un peu des occitans. En nommant notre territoire en langue d'oc, ça veut dire clairement, j'ai vu une
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La transmission
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uelle musique nous ressemble ? Alors sur la musique, ce que j'ai trouvé d'intéressant c'est le travail intergénérationnel, en étant assez frappé par l'attention qu'ont les femmes...Vous avez vu celles qui ont parlé de la musique ce sont deux femmes, ce ne sont pas des hommes... de transmettre aux enfants. J'ai trouvé cela très intéressant et qu'il y avait quelque chose de... j'ai trouvé que les femmes transmettent mieux aux enfants que les hommes, même si les hommes se rattrapent en transmettant des métiers de mecs aux jeunes gens charpentiers etc... Si un jour on fait une étude de genre, en Ardèche, les rôles sont encore bien séparés j'allais dire. Je pense que dans les barbecues
ici en Ardèche, les hommes s'occupent de la viande et la femme du reste... un peu comme un Cro-Magnon. Il y a quand même des fondamentaux ici qui font que les hommes sont bien à leur place et les femmes à la leur. J'ai trouvé une réflexion très intéressante sur votre identité, par les paysages, par vos représentations, par vos travaux, par ce que vous transmettez, un terroir très vivant. Je voudrais, c'est dommage qu'il n'y ait pas beaucoup de jeunes là, qu'on prenne conscience du fait qu'on voit une période assez passionnante où on voit se construire un terroir, avec une prise de conscience de la population locale qui est en train d'inventer ce soir quelque chose qui va être un peu la matrice de la société de la Communauté de Communes de Saint-Félicien dans quelques années. Et pour cela je crois que ces Entretiens ont vraiment joué un rôle parce que même s'il y a plus de gens, une moyenne d'âge plus haute peut-être que 50 ans aussi, ce qui n'est pas grave en soi. Mais ce qui veut dire au fond qu'au moins ceux qui sont plus âgés ont envie de transmettre à des plus jeunes, et ça c'est quand même très important et avec quelque chose qui vient du bas, quelque chose qui vient de l'initiative locale, et pas de la préfecture de Valence, et encore moins de Paris. Ça je trouve que c'est très intéressant et que c'est vraiment le point fort de ces Entretiens ici.
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carte là-bas, que nous sommes dans la France du Sud, implicitement, nous sommes dans la France du Soleil. Nous pouvons plaindre ces pauvres Parisiens, Dijonnais, Lillois, Strasbourgeois d'aller vivre dans la purée de pois d'un point de vue du climat bien sûr. De pouvoir vendre aussi quelque chose qui est de l'ordre du climat, pourquoi pas ? C'est vrai que le climat... même l'Ardèche du Nord, qui est du Nord pour des gens qui vivent à Privas, elle est quand même dans le Sud de la France.
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nsuite, comment accueillir les gens ? Je crois que cela a été dit, les hôtels, les campings. C'est vrai que la labellisation chez vous... Il y a quelque chose qui fait que chez vous, la vieille maison ardéchoise est très belle mais elle est quand même un peu noyée à la fois dans un bosquet de châtaigniers souvent, et puis dans de l'habitat qui est beaucoup plus commun. On ne peut pas faire un logo avec des maisons à colombages comme on fait dans la Bresse. Vous n'avez pas de clocher comme en Franche-Comté par exemple. Vous voyez les jolis clochers un peu autrichiens. Il manque en effet dans ce pays une silhouette. Mais en regardant les photos qui ont défilé cet après-midi, je vois qu'il y a des endroits avec des terrasses, il y a de quoi faire une silhouette, et ce n'est pas forcément un clocher, ou une maison de type bressan ou de type aquitain, mais c'est quelque chose qui pourrait être votre logo et qui pourrait vous permettre de donner un label paysager. Il y a beaucoup d'images qui ressemblent, dans ce qui a été pris dans le diaporama, à la Toscane, vous êtes un pays de collines, comme en Toscane. Mais il faudrait monter une commission dans votre Communauté de communes, qui serait le nettoyage du paysage. Vous savez ces vieilles bagnoles qui sont abandonnées, ces pneus, ces trucs... là il faut prendre des camions et de demander aux gens de débarrasser un peu tout ça, toute cette carcasse. Et de faire un peu attention à l'esthétique paysagère si on peut pour essayer de labelliser...
n pourrait très bien imaginer que la vallée du Doux ou la vallée de la Daronne soient un peu plus entretenues que certains coins, certaines entrées de village. Labelliser par l'écologie, moi j'ai trouvé très intéressant ce qui a été dit sur la protection de la vallée du Doux, et non plus de l'exploitation. C'est assez curieux de voir des gens de la commune qui veulent se poser la question de savoir ce qu'on fait de l'eau. Est-ce qu'elle est propre ? Ça c'est vraiment très très riche comme initiative et ça va très loin parce que c'est une sensibilisation que nous avons aujourd'hui, nous qui avons un certain nombre d'années sur le bilan environnemental de nos choix depuis 50 ans qui n'est quand même pas formidable. Le Doux, comme l'Ardèche, comme le Rhône, comme toutes les rivières en France sont des rivières très polluées. Je ne vous donne pas les comptes-rendus des géochimistes sur les rivières françaises c'est une catastrophe. Et il y a 80% des rivières qui vont supporter des pesticides pendant des dizaines et des dizaines d'années, et là je crois qu'il y a quand même une réflexion à faire et que je crois que ce qu'on a entendu c'est quand même très très bien.
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que dans la vallée du Rhône, si vous sentez que vous êtes beaucoup mieux armés par rapport à la concurrence, faites une marque !
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Appels et dates Ensuite, j'ai lancé un appel aux « transcriptions clavières », je le refais pour les gens qui n'étaient pas présents. Donc
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Un Comité de pilotage ouvert Voilà dans nos actions, chacun d'entre vous qui pense pouvoir s'investir dans le projet peut le faire. On a un fonctionnement du Comité de pilotage, qui est celui-ci : je le dis, bien sûr qu'il faut une direction, bien sûr qu'il faut organiser la prise de parole, bien sûr, il faut prendre des décisions parfois, mais on sait que chacun s'y investit à mesure de ses forces aussi, et de ses compétences. Ainsi si certains disent : « je ne peux pas venir régulièrement au comité de pilotage, mais je souhaite recevoir les travaux que vous faites », parce qu'on fait des comptes rendus des comités de pilotage. Alors tout ça c'est imparfait bien entendu, mais l'imperfection nous stimule, on sait bien qu'on n'arrivera jamais à la perfection mais que chacun puisse sentir qu'il a sa place dans le projet. La difficulté ensuite on la gère en fonction des perceptions qu'ont les uns et les autres. La question du langage, Gilles en a parlé, et d'autres en ont parlé, on a discuté un très grand moment sur : « Le local, une invention d'avenir ? ». On a discuté un très long moment sur le titre de l'après-midi : « Quel panier de biens et de services pour le Pays de Saint-Félicien ? ». Et ce n'est pas qu'une question de mots car mettre un contenu commun sur des mots c'est bâtir un projet commun. Et ce n'est pas si facile que ça de s'entendre sur les mots, il n'y a qu'à voir le mot liberté ce qu'il peut entraîner si
Je ne vais pas faire de conclusion internationale et en plus je vais revenir au local, je vais rebondir sur ce qu'a dit... parce qu'il a fait beaucoup de remerciements Jacques, et moi je voudrais faire un remerciement et je crois que je peux le faire au nom de tous, pour lui, parce qu'il est au cœur de tout le dispositif qui paraît simple mais qui est toujours complexe. Et moi je travaille au quotidien quasiment avec lui et il est toujours disponible, toujours à l'écoute, toujours médiateur pour que les choses s'arrangent et se passent bien. Vous l'avez dit aujourd'hui, vous ressentez une certaine ambiance, vous ressentez de la convivialité, vous ressentez une dynamique, et bien je pense que Jacques n'y est pas pour rien. Il est au cœur de tout cela, alors Merci Jacques. Jacques. Juste quelques mots parce que ce soir on est content. On a bien travaillé. Ce n'est qu'un début. On a marché. Tu as dit que l'on était sur le chemin. Et il ne s'arrête pas ce soir, le chemin continue....
Sensibilisation Appropriation Réalisation Deux, trois petites choses, il me semble que... l'an dernier on a réussi la phase de
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Alors bien entendu, je commence par les remerciements. Je peux remercier toute l'équipe autour du Comité de pilotage, vous avez vu des gens visibles, je ne vais pas tous les nommer, Christian, Luc, Jean-Pol, Philippe et les autres, qui ont fait les interventions. Vous avez pu les repérer. Et puis vous avez eu Adelin Samson qui a réussi à gérer notre foisonnement technique. Cette année on avait vraiment des aspects techniques délicats à résoudre, il faut manier les clés USB apportées par l'un ou par l'autre au dernier moment qui ne sont pas compatibles avec Duchnoc ou Durant. Merci Adelin d'avoir ménagé cette technique et, autre clé de patrimoine, merci à Philippe Bouvet pour sa ténacité "en fouasse".
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Remerciements
on commence à discuter là-dessus. Vous êtes tous invités à participer au comité de pilotage et si le nombre est très grand on verra comment on se débrouille à organiser des groupes. C'est comme ça, plus c'est vivant mieux c'est, on laboure un terrain où il y a un peu d'inconnu... Mais le temps n'est-il pas l'émergence de choses totalement imprévues même quand on fait des programmes ? Donc merci à tous et je pense qu'Eric tu vas faire une conclusion internationale.
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Eric fera une conclusion au nom de Terroirs & Cultures International. Je vais faire une conclusion provisoire pour la Communauté de Communes du Pays de Saint-Félicien.
peut faire quelque chose de façon volontaire. Et pour travailler sur ces paysages, à défaut de penser tout de suite de les labelliser, on a parfois besoin d'apports extérieurs. Ce stage qui sert la formation des étudiants avec leurs professeurs devrait avoir lieu si on se débrouille bien trois ans de suite, sur une petite semaine. Ils travaillent à mesure, ils avancent et font des rendus, des films, des propositions, voilà si on peut rentrer dans cette dynamique là, ça pourra nous être utile.
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Jacques
nous avons tout enregistré avec ce petit dictaphone miracle qui prenait très peu de place sur la table. Tout à l'heure, Eric a montré les Actes des Entretiens de l'année dernière, 108 pages au total, ce n'est pas pour vanter le nombre de pages, puisqu'on essaie de ne pas confondre quantité et qualité, mais c'est tout de même tout un travail. Donc s'il y en a parmi vous qui sont habiles à la transcription au clavardage ou à la manipulation clavière pour passer d'une audition à un texte numérique, ça nous rendrait un grand service. Nous poursuivons donc l'action, j'annonce donc quelques dates, le Comité de pilotage qui dépasse largement les gens, on va dire, visibles aujourd'hui... et j'ai oublié de nommer dans les associations qui commencent à s'y investir Agri Bio Ardèche, comme je vois Philippe (Fraisse), je vais nommer parce que nommer c'est aussi indiquer ce qui existe. Nous organisons donc une réunion la semaine prochaine sur le caillé doux, j'en ai parlé. Il y a un séminaire et le mot est un peu pompeux peut-être mais séminaire, la racine c'est quand même « semer » lors du Marché aux arbres organisé par Nectardéchois à Pailhares. C'est un peu pour faire un bilan collectif des Entretiens et élaborer, le projet de Terroir pour l'année et les années à venir. On n'aura pas fini évidemment à la fin de l'année mais au moins on aura mis noir sur blanc des actions concrètes, si le mot concret convient, qu'on pense mener, puisqu'aujourd'hui, c'est assez mûr pour qu'on puisse avancer, faire des propositions. Ensuite, on a parlé des paysages … on a aussi un projet d'accueil d'une centaine d'élèves de l'école d'architecture de Saint-Etienne, au mois de février, pour travailler sur cette question que vous avez vu apparaître à plusieurs reprises. La conscience de nos paysages n'est pas la conscience de quelque chose qui nous est extérieur. Nous y sommes dedans, nos prédécesseurs les ont élaborés, on peut dire, et puis ils évoluent, soit parce qu'on ne fait rien soit parce qu'on
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Conclusion
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Jacques Maintenant il va y avoir des modifications très brutales de l'espace pour en faire un espace de convivialité partagée, déjà présente, mais autour des produits préparés par les Fermiers et Artisans de l'Ay au Doux, sous la direction de Pascal Magnier …,sachant qu'après le repas, il y a le méli-mélo festif où la salle sera encore modifiée.
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on a ressorti plein de choses de Saint-Félicien, c'est parce qu'il y a des yeux qui sont venus de l'extérieur et qui vous ont dit sur SaintFélicien : « il y a des choses fabuleuses », et en venant sur d'autres terroirs vous allez les aider à grandir comme on fait depuis hier soir, où on a encore grandi un petit peu par rapport au projet qu'on avait il y a deux ans. Donc double invitation pour poursuivre le Chemin de Terroir avec Terroirs & Cultures.
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de venir à Deir el Ahmar. Je pense aussi que pour nourrir le séminaire, donc semer que tu as évoqué, il serait aussi intéressant peutêtre avec le Comité de pilotage et d'autres... ce n'est pas du tout fermé... moi je serai heureux d'amener des gens du Pays de SaintFélicien sur d'autres Terroirs. Il est venu l'Oignon doux des Cévennes hier, Jacques est venu plusieurs fois sur l'Aubrac. Donc je crois qu'il faut que ce Comité de pilotage, cette dimension dans la transversalité, que j'évoquais, il faut la nourrir. Et la nourrir, bon je sais que vous n'êtes pas du tout dans le bocal, donc ce n'est pas un problème, mais voilà, venez aussi avec Terroirs & Cultures International profitez de notre structure, du lien qu'on a avec un certain nombre de Terroirs pour aller sur d'autres lieux, alors à la fois pour vous nourrir mais aussi je sais qu'à chaque fois les lieux qui vous accueillent sont nourris par votre visite et votre regard. Si
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l’Espace Naturel Sensible qui peut amener énormément de choses dans la dynamique Terroir, sur la culture, sur ce qui était le patois l'année dernière et qui est devenu la langue d'oc... Et hier, on se demandait comment caractériser le local, et en regardant le diaporama je me disais ce n'est pas la peine de chercher loin, c'est sur les panneaux routiers repérer le local et le caractériser. Tout ça je sens bien qu'il y a eu un travail important qui a été fait, on pourrait partir sur une quinzaine, une vingtaine de projets. Ce qui me semble ce soir...ce qu'il faut qu'on garde à l'esprit... Il ne faut pas qu'on travaille dans la verticalité des projets, c'est-à-dire que le danger me semble-t-il, pour le vivre ailleurs, ça serait effectivement : « mince, il y a un beau projet sur le Saint-Félicien, on y va, il y a un beau projet sur l'habitat, on y va, il y a beau projet sur la zone naturelle on y va ». Mais ce qu'il faut qu'on essaie de garder tous ensemble, c'est la transversalité qu'on a vécue ce soir. Je crois que je l'avais dit l'an dernier, la valeur des produits, qu'ils soient agricoles ou autres, naît de la dimension culturelle qu'on est capable de leur mettre dessus. On achètera des produits de Saint-Félicien, vous l'avez dit pour les produits artisanaux parce qu'ils sont marqués par le savoir-faire par la dureté des gens qui le font, etc... Mais voilà c'est cette dimension qu'on doit arriver à accrocher sur tous les produits et qu'on ne parte pas si l'on peut bien sûr dans une dimension verticale où chacun va repartir sur son produit. Donc la vie du Comité de pilotage comme le dit Jacques, elle est essentielle, car on voit bien quand on disait qu'on travaillait sur les mots, c'est pas les mots qu'on travaille c'est le projet qui est derrière. Et ça c'est ce qu'on a vécu depuis plusieurs mois avec vous tous et c'est fabuleux. Donc gardons cette dynamique qui est exigeante c'est sûr, et qui permet de sortir d'une verticalité qui ne peut pas trouver la bonne réponse et n'amènera pas la valeur ajoutée qui est indispensable à l'économie locale ici. Continuons de travailler ensemble sur ces axes, et j'ai fait une proposition tout à l'heure, très sérieuse
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sensibilisation, sur : « qu'est-ce qu'était le terroir ? ». Je l'ai dit tout à l'heure, ce n'est pas forcément gagné et c'est normal, c'est une notion complexe, ce soir, je dirais avec mon regard mais ce n'est peut-être pas partagé qu'on a avancé sur la phase d'appropriation. C'est-à-dire que chacun aujourd'hui ici, je suis sûr qu'on ferait un petit questionnaire, aurait une notion bien plus claire que l'an dernier du Terroir de ce qu'il peut représenter en termes de projet. C'est un symbole que je fais pour Denis, je le voyais remplir le panier, tout à l'heure, là. L'an dernier, on l'avait mobilisé, il avait eu beaucoup de talents à le faire sur les actes, sur la réalisation des actes. De le voir aujourd'hui, remplir le panier, je trouve que ça montre aussi le chemin qui est fait. C'est-à-dire que les acteurs et tu en es un Denis, tu représentes le symbole. Quand je dis ça les gens qui viennent au comité de pilotage, comme le disait Jacques, ils viennent avec une fonction, une idée, une entrée et en fait, un an après c'est Denis qui remplit le panier qui s'est complètement approprié la notion et qu'au titre de son entreprise qui était là, il s'aperçoit que l'entreprise peut aussi servir le global... le global du Pays de SaintFélicien et pour moi c'est tout un symbole de voir ça avec Denis, ça montre l'évolution qui est faite avec la recherche d'identité, qui est essentielle dans la construction du terroir et qui n'est jamais finie. Mais après cette phase de sensibilisation et cette phase d'appropriation, maintenant l'essentiel me semble-t-il c'est de rentrer dans la phase de réalisation. Alors, vous en avez déjà fait énormément des réalisations, mais c'est la réalisation du terroir, des produits, des biens et services du terroir qu'on a commencé à élaborer hier soir. Dans cette dynamique, on sent bien ce qu'il y a dans le panier, on l'a vu ce soir, Jacques dit on va faire un groupe de travail sur la truffole, un groupe de travail sur le Caillé doux Saint-Félicien... Je suis sûr que tout ce qui est né du diaporama présenté par Damien qui est remarquable sur les perspectives du tourisme, ce qui est né de l'artisanat, ce qui est né de l'obtention de
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Le comité de pilotage des Entretiens De gauche à droite : Damien Mathieu (OT Pays Saint-Félicien), Denis Germain, Adelin Samson (notre technicien computeur), Béatrice Four (maire Colombier le Vieux), Bernadette Serayet (Félixval), Pascal Magnier (Fermiers et Artisans de l'Ay au Doux), Janine Pignerol (Chantelermuze), Philippe Bouvet, Isabelle Thomas (gîte accueil Fouard), Myriam Gery (Lo Gavelier), Luc Sovignet (CC Pays Saint-Félicien), Françoise Descaillot (Lo Gavelier), Christian Astier (CC Pays SaintFélicien et VP Syndicat Mixte Ardèche Verte), Yves Pezilla (Maison Charles Forot), Jacques Deplace (VP CC Pays Saint-Félicien). Manquent : Eric Barraud (Terroirs & Cultures International), Philippe Fraisse (Agribio Ardèche), Marc Nouaille (Parlarem en Vivarès), Daniel Rouchier, Rémy Sapet (SCIC Nectardéchois).
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Repas terroir du samedi midi pour l'accueil des intervenants, préparé par Philippe et Sandrine Jan (Auberge Buissonnière, Pailharès).
Menu Terroir... du samedi soir
Sorbet d'ici parfums d'ailleurs
Morgane Duchateau : Confitures, Saint-Victor. Guillaume Gilles : Vin (vignes à Bozas). Nectardéchois : Jus fruits, Pailharès. David Maisonneuve : Yaourts "Délices du Bois Madame", Colombier-le-Vieux. Ferme des Brottes : Boucherie-Charcuterie fermière, Colombier-le-Vieux.
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Pain, vin, jus de fruits du Pays Saint-Félicien
Eliane & Daniel Jullien : Tomme en salade, Saint-Victor. Sébastien Vert : Boucher Charcutier, Colombier-le-Vieux. Boulangerie Chabanel : Colombier-le-Vieux. Jean-Philippe Fourel : Caillé doux de Saint-Félicien. Denis Croze : Fouasse. Jacques & Aurélien Minodier : Yaourts des 3 Sources, Saint-Félicien.
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Crique de pommes de terre avec salade verte
à partir des produits des producteurs :
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Soupe au pistou avec les légumes de saisons
Atelier musiques traditionnelles Sylvette Béraud Williams présente le travail de collectage et les 4 chants de l'atelier musiques traditionnelles. • Au chant : Claude et Françoise Thé , Laurence Pastiaux , Marie Mortier, Suzanne Roche, Andrée Demonteil, Jacques Vey. • Les musiciens : Thierry Descaillot et Camille Bordes à l'accordéon , Jean Claude Nicolas à la flute , Sandrine Cantan au hautbois et Patricia Appert au violoncelle .
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Méli-Mélo festif
Théâtre (Félixval)
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Soy Boyero ( traditionnel argentin ) Noire Nounou ( Michèle Bernard ) Senzenina (Traditionnel africain ) Njetsvoda ( Jos Wuytack ) Nomade ( Michèle Bernard ) Marouchka ( Traditionnel russe ) Kumbaya ( Negro spiritual )
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Chorale de L'école de Musique de Colombier le Vieux
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Le Printemps des poètes.
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Christine et Pierre Jouvencel, François Causseque, Claude Frelon, Jean Claude Nicolas disent ou lisent Prévert, Baudelaire, Rimbaud, Rostand …
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Gavelier, Chantelermuze, Parlarem en Vivarès), Travelling théâtre de SaintEtienne. La Cie Traverse de Lyon… Les objectifs de l’association sont : • de faire découvrir le théâtre au plus grand nombre par la pratique théâtrale et par la programmation de spectacles de qualité, • de soutenir et de promouvoir les jeunes qui font le choix de la culture, en les programmant lors des événements, • d’amener sur le territoire des spectacles avec la conviction que la culture est un service public. D e p u i s s a constitution Félixval a joué une quinzaine de pièces. Depuis un an l’association élargit sa pratique dans une nouvelle forme théâtrale : le théâtre d’appartement.
L'association est créée en 1991, sur la commune de Saint-Victor, sous l’impulsion de Claude Paranque qui en assure la présidence jusqu’en 1998, Janine Pignerol lui succédant jusqu'à aujourd'hui. L'association a le désir de mettre en valeur le patrimoine et le développement rural de notre commune et des communes voisines (ce qui a participé au choix du nom "Chantelermuze", sommet de 850 m qui regarde tout le pays). Sous l'intitulé "Mémoires du Pays d’Aujourd’hui en Ardèche" (y a-t-il un futur sans passé ?)
cette volonté se concrétise par la mise en place de plusieurs Ateliers : balade, archives, vannerie, sculptures sur bois, occitan vivarois, théâtre pour adultes et enfants, patchwork, danse. Chantelermuze organise une exposition annuelle début mai qui fait l'objet d'un ouvrage détaillé. Elle a donné l'occasion d'une reconstitution d’un moulin à huile et la construction d’un four à pain en bordure de la salle des fêtes. Depuis 2012 une exposition estivale d’Artisanat d’Art met en valeur des artistes amateurs. En partenariat avec la commune de SaintVictor l'association a accueilli pendant plusieurs années un concert du festival Vochora, avec dégustation gratuite de
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L'association a été constituée en 1990 suite au bicentenaire. Son nom Félixval ou « vallée heureuse » est le nom donné à Saint-Felicien pendant la révolution. Un livre « images et paroles de felixval » a été initié par l’ association suite à cette manifestation. Félixval c’est surtout une troupe théâtrale composée d’une douzaine de comédiens et techniciens. L’activité de l’association est multiple : • ateliers théâtre, • formations, (jeu d’acteur, chant, maquillage, techniques corporelles..) • création d’affiches, • création d’ événements culturels : festival "Rocambole", festival "la nuit du parvis", • cinéma, • conférences débats... • printemps des poètes, • partenariat avec d’autres structures comme la comédie de Valence et les associations culturelles du canton (Lo Association
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Les associations
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Clins d'œil sur l'expo
"Lo Jaç de Foart", sur la commune de Bozas, chez Isabelle Thomas, est le premier gîte en Ardèche à être labellisé "òc per l’occitan" niveau 1 : "Aicì l’occitan nos agrada" (ici, on apprécie l’occitan). Ce label a pour but de valoriser l’emploi de l’occitan dans la vie économique et sociale. Il traduit la volonté d’Isabelle de promouvoir la langue d’ÒC.
Comme d’autres dans le pays de St-Félicien (Jean Dodet à St-Victor…). elle propose aujourd’hui de rassembler ceux qui, comme elle, ont été bercés par les sons de cette langue, ou ceux qui sont curieux de cette culture reléguée au dénominatif de "patois". Isabelle est aidée dans cette démarche par ses amis de l’association "Parlarem en Vivarés ", Marc Nouaille, Gérard Betton, Patrick Cros…
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O créateurs d'espaces sonores, déchiffrant les lignes du temps, de sols féconds cherchant la clé de l'âme humaine, en sillons inexplorés. O laboureurs de partitions mille registres à l'unisson, soprane répondant à la basse quand la charrue est bien réglée la terre s'ouvre comme étoilée. O serviteurs du chant liant l’accordé au désaccordé, c'est le champ des terroirs que vous ensemencez, entre la terre et l'onde, au tempo de la respiration du monde. Secquaj El Epdac, paysan berbère.
"Lès ànem?" (On y va?)
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exemples: gymnastique, dessin, danse de société, couture, déco de noël, stages pour enfants aux vacances scolaires, soirées théâtre (partenariat avec la comédie de valence), concerts, carnaval, marché nocturne , spectacles en partenariat avec la mairie et Quelques p ‘Arts .... L’association est à l’origine de la création de la bibliothèque en 1981, devenue par la suite bibliothèque municipale, puis de l’école de musique qui a intégré l’école départementale en 2001. Le but de l’association est de promouvoir le développement culturel en milieu rural avec un esprit d’ouverture, d’échange et de partage.
de qualité, de l’éveil pour les plus petits au cursus d’études musicales complet, sans oublier de nombreuses pratiques collectives...
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C'est une association culturelle et de loisirs agrée jeunesse et éducation populaire. Elle a été fondée en 1980 à Colombier . Lo Gavelier désigne en patois: petits abris que l’on trouvaient dans les vignes, bâtis en pierre et recouverts de toits de végétaux (paille, sarments,...) qui servaient à s’abriter et à déposer les outils. Pendant ces 33 années d’existence, elle a permis à la population de la commune et de ses environs de participer à des activités et manifestations culturelles très diversifiées. la liste est longue, en voici quelques
La création, en 2001, de l’école départementale a permis de regrouper des écoles de musique municipales ou associatives au sein d’une même structure administrative et pédagogique. Elle s’est progressivement étendue sur le territoire, proposant diverses formations
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(octobre) et des manifestations "Terroir en fête" fédérées par la Communauté de communes, l'association Chantelermuze organise, en collaboration avec la municipalité de Saint-Victor et la bibliothèque communale, une "journée du goût" avec la participation de producteurs locaux. Une dégustation de rotillée de châtaignes est offerte aux visiteurs.
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produits locaux (pour plusieurs centaines de personnes !). De 2004 à 2008, en partenariat avec la Communauté de Communes du Pays de Saint-Félicien et les associations culturelles : Félixval et Lo Gavelier, l'association a organisé des soirées théâtrales avec la Comédie de Valence. Dans le cadre de la Semaine du goût
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n cette époque "moderne" nous disposons de multiples outils pour porter nos messages. ntre la malle-poste et le courriel qu'une langue trop paresseuse appelle un "imayle", n'oublions pas le courrier postal et le pigeon voyageur … Regardons notre Pays de Saint-Félicien par l'œil de l'oiseau, le vol de l'abeille ou le pas lent et majestueux de la fragile salamandre. N'y trouverons-nous pas quelques ressources encore inexplorées, des savoir-faire trop peu connus, des liens humains à faire vivre ? Conducteurs de modernes voitures ! Portez attention aux animaux qui n'ont pas de passage protégé pour traverser nos routes ! (Message d'alerte d'une salamandre écrasée par une roue inconsciente de sa puissance).
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Actes des Entretiens du Terroir n°2 • Octobre 2013
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Ressources en chemin de terroir
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4ème Forum Planète Terroirs Dakar 2013 « Les paysans et la diversité des terroirs d’Afrique face aux défis alimentaires »
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e quatrième « Forum International - Planète Terroirs » 2013 s’est déroulé au Sénégal sur 3 journées du 5 au 7 mars 2013. Il a été coorganisé par : Terroirs et Cultures International (TCI), le Conseil National de Concertation et de Coopération des Ruraux du Sénégal (CNCR), le Réseau des Organisations Paysannes et des Producteurs Agricoles de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA). Il répondait à l’invitation faite par Mamadou CISSOKO, Président d'honneur du CNCR (Conseil National de Concertation des Ruraux) et du ROPPA et qui a participé à la création de T&CI, associé à Ibrahim COULIBALY, Président de la Plateforme malienne du ROPPA (Coordination Nationale des Organisations Paysannes du Mali), Vice Président du ROPPA, lors des Rencontres Internationales Planète Terroirs - Unesco, à Paris, le 1er décembre 2011. Ce rendez-vous de Dakar, était placé sous le Patronage de l'UNESCO, le Parrainage de la FAO et l'appui du Ministère Français de l'Agriculture et du Ministère de l'Agriculture et de l'Equipement Rural du Sénégal, de l'Agence Française de Développement, de l'Ambassade de
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France au Sénégal, d'Agropolis International, de la Chaire UNESCO Alimentation du Monde de SupAgro Montpellier, de la Commission Nationale de l’UNESCO du Sénégal. Plus de 300 participants étaient présents à ces journées, représentants 14 pays. Le Forum s’est déroulé en trois temps : Une première journée introductive en plénière à Dakar. Elle fut marquée par la dimension officielle. Monsieur le Ministre de l'Agriculture du Sénégal, Monsieur Abdoulaye Balde, nous a fait l'honneur de présider l'ouverture des travaux. Il était accompagné du Ministre de l'Environnement. Le deuxième jour était appuyé sur les réalités du terrain. Nous nous sommes rendus à Meckhé où nous avons été accueillis par l’Union des Groupement Paysan de Meckhé (UGPM). Des ateliers de travail en groupe ont été organisés sur cinq villages de ce terroir. La troisième journée nous a permis de mesurer la diversité des produits de terroirs d’Afrique de l’Ouest et l’action conduite par les paysans sénégalais pour en faire la promotion, lors de la visite de la Foire Internationale de l'Agriculture et des Ressources Animales (FIARA). Extrait de la synthèse de Claude Béranger, Secrétaire Général de Terroirs & Cultures International suite à la tenue des ateliers de Meckhé. La première ressource de cette terre c’est le dynamisme de la communauté humaine qui l’habite et la cultive. Elle s’exprime fortement au niveau de chaque village, de ses leaders et de l’organisation UGPM. Ce dynamisme est particulièrement marqué chez les femmes et chez les jeunes qui conquièrent progressivement leur reconnaissance, montrent leurs capacités, s’expriment, se soutiennent, s’organisent se forment et s’engagent. De nombreux acquis sont manifestes et réussis ou en bonne voie :
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• La faible fertilité des sols sableux, pauvres en matière organique et qu’il faut enrichir notamment en développant l’usage du compost, grâce à celui de l’élevage. • Le déficit en eau, en quantité et en répartition, qu’un accroissement des forages et une bonne gestion permettraient de pallier en partie. • La compétition pour le sol entre cultures
et élevages qui nécessite d’accroître les ressources fourragères, notamment grâce au développement des légumineuses. • Les problèmes d’accès au foncier qui sont prédominants : l’espace est limité, le s parcelles sont trop nombreuses et trop petites. Il n’y a pas de statut du foncier, de droits de propriété établis. La transmission familiale est figée dans des règles trop fermées. Toutefois des exemples de formes d’accès au foncier pour les femmes et pour les jeunes qui veulent se développer sont en marche et ouvrent des possibilités futures. • Le manque d’infrastructures : capacités de stockage, accès, électrification… • Les insuffisances de la commercialisation de produits trop peu connus et mal valorisés. • La faiblesse de l’auto-financement possible et de crédits extérieurs à des taux supportables. • Des manques d’appuis techniques spécialisés dans plusieurs domaines. • Le désengagement de l’Etat dans l’agriculture et la faiblesse de ses soutiens ; comme dans tous
les pays l’agriculture nécessite une politique agricole forte et stable. Certes n’ont pas permis d’aborder tous les aspects des problèmes Cependant ils montrent bien qu’ensemble nous pouvons bâtir sur vos acquis des voies d’avenir pour les exploitations familiales agricoles et les terroirs africains contribuant à nourrir les hommes en valorisant leur diversité. Pour en savoir plus : http://forumdakar2013.com
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Terroirs du Monde
• L’association de l’agriculture et de l’élevage au sein des fermes et des villages, permettant de fournir du compost qui accroît la fertilité des terres souvent dégradée, et aussi la fourniture de biogaz, économisant le bois de plus en plus rare et libérant du temps aux femmes pour d’autres activités que la ferme. • Des possibilités d’accroître la ressource en eau, souvent déficitaire, grâce à des forages et des pompes solaires. Ainsi davantage de cultures irriguées sont possibles. • Une grande variété de produits contribuant à une grande bio-diversité et fournissant une diversité d’aliments, de plats cuisinés réalisés avec art et originalité par les femmes, mais aussi des produits artisanaux tels que ceux issus du tissage. • Des semences paysannes de plantes et variétés locales, sélectionnées par des paysans chercheurs, d’après leurs savoirs, en association avec la Recherche institutionnelle. • La transformation sur place de certains produits grâce à des équipements tels que les fours pour le pain ou la presse pour l’huile, permettant de consommer et de vendre ces produits comme le bon pain de mil-maïs. • L’organisation d’appuis efficaces au développement, par des spécialistes de l’ingénierie ou des semences, par des groupes locaux, par l’UGPM et la FONGS. • La culture locale et régionale. Tout cela constitue un système diversifié, cohérent. Il est source d’aliments, d’emplois de produits valorisables et d’une richesse humaine, technique, organisationnelle et économique. Cela suscite l’admiration de ceux qui sont venus de loin vous visiter et travailler avec vous. Mais bien des obstacles, des freins, des blocages se dressent face à ces réussites :
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Panier de biens et de services : à Deir el Ahmar au Liban comme au Pays Saint-Félicien, l'affirmation d'une spécificité ouverte au monde.
Actions Terroir 2014…
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es groupes de travail ont démarré sur quelques pistes :
Jacques Deplace, Jean Pol Badouard, Christian Astier et l'Office de tourisme.
• La (re)création d'un annuaire des savoir-faire du Pays Saint-Félicien (autour de Françoise Descaillot, Lionel Tatibouet, Justine Bonne, Christian Astier) en lien avec les documents existants et le nouveau chargé de mission de la CC Gregoire Lopez-Rios qui anime la réflexion et l'action pour une politique d'accueil sur notre Pays.
• La préparation (par l'ensemble du Comité de pilotage) des Entretiens du Terroir en octobre 2014 à Saint-Félicien qui devrait rassembler une dizaine de terroirs du monde dans lesquels intervient Terroirs & Cultures International … Liban, Maroc, Aubrac, Costières de Bellegarde, Sénégal, Dentelles de Montmirail, Valoire, Tunisie …
• L'exploration de la pertinence de création d'une marque Qualtié Pays Saint-Félicien pour l'ensemble des produits afin de valoriser, pour les habitants, les visiteurs, des clients la spécificité de notre panier de biens et services. Une charte commune et des déclinaisons particulières selon les métiers, en évitant l'empilement de logos. Œuvre difficile mais qui nous semble utile. Le groupe est animé par Damien Mathieu, Denis Germain, Jacques Deplace, Luc Sovignet.
• L'appui à l'élargissement du groupe des producteurs de Caillé Doux de Saint-Félicien, un produit emblématique pour notre territoire.
• L'organisation du Comité de pilotage "terroir" dans son lien avec la Communauté de communes et le partenariat avec l'association Terroirs & Cultures International autour de Isabelle et Jean Luc Thomas, Philippe Bouvet, Eric Barraud. • L'exploration pour une valorisation des paysages du Pays Saint-Félicien, avec la stimulation apportée par le stage de 3 jours d'une centaine d'étudiants et de leurs professeurs de l'Ecole Nationale d'Architecture de Saint-Etienne (les 17, 18, 19 février) autour de
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Terroir du Pays Saint-Félicien, des ressources, un chemin
Une des deux zones artisanales de la Communauté de communes, à Fontay. La seconde zone est située aux Clots.
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Le Pays de Saint-Félicien…
Hôpital - Maison de Retraite à Saint-Félicien.
"La Courte échelle" : la crèche du Pays de Saint-Félicien fête son premier anniversaire (7 juin 2013).
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Promenons-nous dans les bois, inscrivons nos traces dans l'histoire toujours à revisiter.
Passage de migrateurs à Saint-Victor.
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Mémoires en Terroirs, cultures d'avenir
Visites en Pays de Saint-Félicien
Ressources en chemin de terroir
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Mémoire … nous entrons dans la commémoration d'un centenaire douloureux … et nous construisons l'avenir.
Monsieur Michel Créchet, Sous-préfet (Tournon) le 24 septembre 2013.
Au milieu des chèvres de Chomaise, en "caillé doux de Saint-Félicien" avec Jean-Philippe Fourel et Eric Barraud.
©Claude Paranque
à la scierie de Luc Sovignet.
à l'Auberge Buissonnière avec Jacques Deplace, Sandrine et Philippe Jan, Eric Barraud, Jean-Paul Chauvin, Christian Astier.
Un autre visiteur le 26 novembre 2013 : Perico Legasse (chroniqueur en terroir à l'hebdo "Marianne"), • à Nectardéchois avec Laurent Chupin (gérant de la SCIC) et Gérard Gagnaire (retraité de la CCI Annonay), • à la Ferme-Auberge de Corsas avec Julie et Sébastien Rosset (hôtes de ce lieu), Franck Deygas (paysan en Caillé doux de Saint-Félicien), Valérie et Emmanuel Barou (vigneron en Saint-Joseph), • au Fumet d'Antan avec Suzanne Serayet.
Un livre à découvrir … Sylvette Beraud Williams et Claude Fougeirol.
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Des Andes à Jean Sébastien Bach ou à Antonio Vivaldi … devant le vitrail central de la cathédrale de Chartres : Los Chacos, un groupe qui a quelque attache andine à Villeurbanne et en Pays Saint-Félicien …
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Saisons de cultures
Le doux commerce des mots, le Printemps des Poètes
L’Electroménager
L’Office de Tourisme
La Bibliothèque La Boucherie-Charcuterie
La Pharmacie
La Boulangerie-Pâtisserie
Le Café-Restaurant
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Ou comment (re)découvrir les commerces locaux en notre Pays de Saint-Félicien
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Lignes, parallèles d’un espace-temps, se croisent tradtion et modernité, non pas successives, mais entremêlées, tourbillon de la complexité. Nous ne vivons pas seulement une époque, nous les inventons chaque jour toutes à la fois, inscrites en nous comme traces indélébiles, qui nous inspirent, créations renouvelées de l’expérience vivante, qui nous paralysent, cristallisation nostalgique d’un paradis perdu. Lignes de la main qui modèle l’avenir, le blé répond à la pierre, le bois à l’osier, le fruit à la racine, gestes humains, empreintes d’humanité. Lignes de l’esprit qui souffle sur nos braises, désirs d’être et de lier, désirs de relier, intelligence du monde. Les savoir-faire se croisent sur un territoire, en un tempo spécifique, résurgence, émergence, en chaque parole, en chaque geste, à chaque pas, nous inventons les possibles d’un terroir, les possibles du monde. Lignes d’un espace-temps qui ne nous appartient pas, mais, qui dépend aussi de nous. Secquaj El Epdac, paysan berbère.
Savoir-faire de mots & d'images au Pays de Saint-Félicien & alentours
Comité de pilotage des Entretiens du Terroir du Pays de Saint-Félicien
Jacques Deplace Pour ses mots, graphiques… ses reportages photo
Photos non signées : ©Jacques Deplace
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Acteurs & Partenaires en Terroir
Association
Félixval Terroirs & Cultures 2 bis rue Jules Ferry 34000 Montpellier Tél : 04 67 63 37 95 contact@terroirsetcultures.org Communauté de communes du Pays de Saint-Félicien Place de l'Eglise 07410 Saint-Félicien Tél : 04 75 06 07 27 cdc.felicien@gmail.com
Prix : 10€
Une photo ne dit pas la réalité mais elle dit quelque chose de ce qui est vu et du regard qui en choisit le cadre. Comme le terroir, la photo est construction, une façon de lire le monde. Merci aux créateurs de regards qui nous en ouvrent les possibles.