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m Seoul Garden Hotel SEOUL KOREA
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Airline Access Codes: SABRE 11 27B0) APOLLO (22125) ABACUS 113336) SYSTEM ONE (SELSED) DATA 11113336) AXESS (7443) SAHARA (SEL 13336) AMADEUS (SELSED) UoELToNU
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Le Pojagi
Pojagi nuptial "patchwork" du dfx-neuvihne sikle, 60 x 60cm, Museecoreen de 1a Broderiede seoul
Les pojagis sont des objets de Ia vie quotidienne tout empreints de !'esprit creatif des femmes de ces demiers siecles. La beaute plastique de leurs compositions multicolores ressemble a s'y meprendre a de Ia peintme mo-derne. Ils servent generalement a envelopper les objets a transporter et leur usage est tres repandu. Autrefois, les tissus etaient des denrees precieuses utilisees aussi comme monnaie d'echange. Les femmes conservaient soigneusement les chutes de tissu inuti.Jisees lors de Ia confection des vetements pour creer d~ magnifiques pojagis (encore appeles cbogakpo, litteralement "morceau"/"enveloppe") en les cousant bout a bout. Ces pojagis representent bien !'esprit
d'economie et l'esthetisme raffine propres aux femmes coreennes. Ils revetent des apparences variees rehaussees par une sensibilite liee aux quatre saisons en fonction de Ia nature des tissus en co ton, en lin ou --en soie. Le fait de lier des morceaux d'etoffes les uns aux autres exprime un souhait de longevite. Le soin apporte par les femmes a !'assemblage des tissus colores fait du pojagi une oeuvre d'art qui depasse !'utile. L'ame meme des Coreennes transpara!t a travers les pojagis, qui sont pourtant des objets appartenant a Ia vie courante, car, a travers eux, une sensibilite esthetique et une creativite typiquement coreennes s'epanouissent pleinement. •
_COUVERTURE : Avec Ia
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proclamation de "l'Annee de l'Arf; on aSliste aune remise en
0
question de !'art careen contemporain.
ee numero de M
KOREANA presente les artistes
eta letranw
caroms en Cb~
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4
L'art contemporain coreen: Histoire et particularites
par Lee Yil
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La lumiere et la couleur dans l'art coreen par Yujune-sang
16
E
Les approches contemporaines de la peinture "coreenne" par Oh Kwang-su
24
L'art contemporain coreen et les artistes coreens dans le monde
par Chung]oon-mo
30 '
ŠThe Korea Foundation 1995 Taus droits reserves. Toute reproduction, meme partielle, par taus procedes, sans autorisation prealab/e de Ia Korea Foundation,
est interdite. Les opinions exprimees par les auteurs ne representent pas necessairement celles de KOREANA et de Ia Korea Foundation. KOREANA, enregistre comme
trimestriel aupres du Ministere de !'Information, (Autorisation No. Ba-1003, du 8 aout 1987) est aussi publie en japonais, chinois, espagnol et anglais.
ARTISTES COREENS A L'ETRANGER
Sagesse de l'Orient : L'art de Seund ]a Rhee par Yoonjin-sub
34 TABLE RONDE
L'art coreen face au monde
ala recherche d'une identite 42 L'art contemporain coreen: Qu'en est-il aujourd'hui ? par Suh Sung-rok
48 L'art coreen d'aujourd'hui : Etat des lieux par Kim Dal-jin
•
Korea Foundation ~.L-i'!
Vol.l No.2 Ete 1995
56 KOREAN A
GROSPLAN
A' rttste de l'an /
par Song Misook
nee :Jheon Soo-cheon
64
526
CHEMIN FAISANT
Ch6ngs6n et y"ongwol dans la provin de Kangw6n
Foundation ' munno 5-ga Ch Seoul 100, ung-gu, 095, Coree
DIRECTEUR DEL
Choi Ch A PUBLICATION ang-yoon
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par Kim }oo-yo ung
Nam~!ore
. dePublicati La F on :nmestrielle Th ondauon de Coree
REDACTEUR EN CHEF
Lee]ong-up
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A LA DECOUVERTE La vache .. DE LA COREE par Lee Keu~gar de la vie de ferme
ISTIQUE
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Marie-Orange Rive BUREAU DE
Hahn ManLA REDACTION . young Ki Kim Kwang-on Kim Hyung-kook L. m Seong-wou Lee Ku-yeol Im Young-bang
76 ACTUALITES
Le Lee pavilion coreen / par Y'l1
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de laB'lennale de Ve . ruse
Ladestructlondu . 00 · gouvemement colo:ent de !'ancien
p . d ABONNEMENTS nx es abonn Coree 18.000 w, ements annuels· ons (22 US$) _ · Asie par avion· 37 etranger. 22 US$ ailleurs . · US$, Prix d par avion: 39US$ Ab u numero: 4.500 Wons (GUS$) onnement et Correspondance: ,
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KANG SHIN-JAE L'univers des nouvelles de Kang Shin-\!<'
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'ta\-0 part pour 1a ~ traduit du corien par Roger Leverrier I.e ieune ortne traduit du coreen par Patrick Maurus
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L'art contemporain coreen: Lee Yil Critique d'art, Professeur d'histoire de !'art al'Universite Hongik de Seoul
omment situer historiquement !'art contemporain coreen dans l'histoire de !'art et plus largement parlant dans l'Histoire tout court ? Si !'on considere seulement l'epoque actuelle du point de vue artistique, !'art contemporain coreen . est, de toute evidence, etroitement lie a !'art moderne. L'art contemporain a succede a !'art moderne alors que ce dernier n'etait pas encore assimile en tant que teL L'art moderne coreen ne se comprenait al'epoque que par reference a!'art europeen et a resulte d'une transplantation fragmentaire et d'un compromis avec !'art occidental japonise. Ainsi, il y a eu une absence de logique de succession fondee sur !'heritage et !'innovation, et un mouvement ou une ecole proprement careens n'ont pas pu se former. Cette situation s'est aggravee apres 1945 avec Ia confrontation ideologique et politique qui a sui vi Ia Liberation. Ce qui a mis fin aces conflits fut Ia guerre de Coree. De toute evidence, Ia guerre de Coree, comme Ia Liberation, qui est un evenement decisif dans l'histoire de Ia Coree, a marque un tournant considerable dans le domaine de !'art La guerre fut !'occasion pour les artistes de se detacher enfin de !'art moderne, ce qui a donne naissance au premier mouvement aitistique collectif coreen d'avant-garde qualifie "d'Art informel''. On decoupe generalement en quatre periodes le developpement de !'art contemporain coreen. Cette periodisation est un peu arbitraire et les dates avancees sont indicatives mais commodes: "!'Art informel" encore qualifie "d'Expressionnisme abstrait" na!t a Ia fin des annees 1950 et a cours jusque vers 1965; ''!'Art restauratif et expansionniste" commence a appara!tre au debut des annees 1960 et dis4
Eart careen minimaliste se distingue p:;tr sa transcendance du ratione~
p:;tr sa logique analy-
tique et JXlr sa conception plastique qui sont a Ia base de Ia vision de Ia nature proprement cora:rzne.
para!t dans le milieu des annees 1970; le ''Postminimalisme pan-naturaliste" debute dans le milieu des annees 1970 et est un courant encore vivant aujourd'hui; le "Nouvel Imagisme" voit le jour aIa fin des annees 1970 et est toujours de rigueur actuellement. Ces differentes periodes se chevauchent, ce qui est aussi caracteristique de !'art contemporain en tant que teL Le contexte historique de Ia premiere phase, celle de "l'Att informel'', s'inscrit dans Ia periode de l'apres-guerre de Coree qui ressemble a plusieurs egards a "l'apres-guerre" en France. Appeler Ia premiere vague de l'ait contemporain coreen "Art informel'' n'est pas un simple hasard. C'est Ia preuve meme que le premier mouvement d'art abstrait coreen etait plus proche de l'expressionnisme fran\:ais que de !'art abstrait americain. Ce rapprochement a ete exprime lors de Ia quatrieme exposition de l'Institut d'Art contemporain en 1958, dans un manifeste dont l'extrait suivant est tire : "Vu le chaos dans lequel nous vivons actuellement, nous nous devons, en tant qu'artistes, de reaffirmer directement notre desir de vivre". Ce propos temoigne de Ia sensibilite partagee par Ia generation de l'apres-guerre en Europe et par Ia generation pionniere de !'art contemporain appelee "generation de Ia guerre de Coree". Des tendances artistiques conflictuelles La periode de "l'Art restauratif et expansionniste" a ete un moment charniere dans le developpement de !'art contemporain, non seulement sur le plan ideologique mais aussi au niveau esthetique. L'evolution etait inevitable alors que "l'Att informel" etait arrive a un etat de saturation et que des concepts opposes apparaissaient simultanement. Ce phenomene impliquant des concepts opposes
dans un mouvement artistique collectif est sans precedents dans l'histoire de !'art postmoderne coreen. La coexistence d'elements opposes marque le debut d'une periode .artistique particuliere. Le terme "d'expansionnisme" se refere tout d'abord aun elargissement des concepts et du domaine artistique. n s'exprime concretement a travers "!'art-objet" qui, selon Marcel Duchamp, a introduit une nouvelle reflexion sur les objets, et a rapproche !'art de Ia vie quotidienne de chacun. Et il en resulte, surtout en sculpture, un rejet des formes achevees du passe et ouvre Ia voie a un nouvel horizon esthetique presentant des formes inachevees. En ce qui concerne '1'art-0bjet", ce qui nous distingue de !'ensemble de !'Europe et des Etats-Unis est conceptuel. Notre objet n'est pas un produit fabrique. Au contraire, il est exposeso us son aspect originel a l'etat pur, sans aucune touche artificielle. Le mouvement expansionniste est apparu sous sa forme concrete entre 1967 et 1%8. Les membres des groupes "Zero" (Mu) et "S.T' (Space & Time) qui avaient participe en 1968 a !a premiere exposition organisee par Ia "Coalition des jeunes Artistes Coreens" ont ete les protagonistes de ce courant. Mais au comble de l'ironie, avait participe a cette meme exposition, un groupe appele "Origine" (Olijin) de tendance radicalement opposee a celle de "!'art-objet". j'ai souvent qualifie leur nouvelle approche de Ia peinture abstraite, "d'art restauratif'. Les travaux de ce groupe de peintres issus de Ia deuxieme generation de "l'apres-guerre", identifiee encore comme celle de Ia generation de Ia revolution estudiantine du "19 avril 1960", etaient de Ia peinture "geometrique abstraite". Differemment de !'art contemporain europeen qui beneficie d'un heritage concer-
Nam Kuxm, Fonne transfonnee, 162 xJ3()cm, 1968
teristique fondamentale de Ia "post-abstraction picturale" reside dans ses surfaces a doubles dimensions combinees aune auto-restauration regulee. Ce style impose des couleurs simples et nettes, des figures physiquement libres et des !ignes egales. En Coree, "!'Art restauratif geometrique abstrait" avait done commence a renverser l'ordre etabli par l'expressionnisme abstrait et a revenir a Ia peinture abstraite aux couleurs tranchees et aux formes raisonnees. De ce fait, les artistes de Ia deuxieme vague de l'apresguerre ont ete tentes de considerer Ia surface plane et l'ordre plastique comme !'expression meme de !'art abstrait, structures qui etaient quasi absentes de !'art moderne coreen surtout pendant Ia periode de "l'Art informel''.
Ha In-doo, Sans titre, 162 x130cm, Park Seo-bo, Ecriture 910209, 130 x97 em, 1991 (page de droite) 1987 ( ci-dessus~
nant !'art abstrait geometrique, !'art contemporain coreen, parallelement a !'apparition du groupe "Origine", a ete confronte au travail de creation d'un nouvel ordre plastique asavoir ¡ de "l'art restauratif". (II est interessant de voir que, chose curieuse, c'est Ia meme chose aux Etats-Unis). II est certain que ce concept "d'Art restauratif" n'est pas recent II est a Ia base de Ia "post-abstraction picturale" americaine qui constitue Ia deuxieme vague de Ia peinture abstraite americaine, un courant oppose a Ia "peinture-action" ou a "l'expressionnisme abstrait". Le terme "picturale" se rapporte ici a l'expressionnisme. La personne qui a largement revendique cette forme de peinture abstraite est le celebre critique d'art Clement Greenberg. Dans son essai critique intitule "La Peinture moderniste", il affirme que Ia carac-
Un monde monochromiste Le troisieme courant de !'art contemporain coreen s'inscrit dans une periode de "!'art abstrait" fortement influencee par "le. minimalisme". II est anoter que le "minimalisme" n'est pas le courant auquel il s'assimile totalement ("!'art abstrait" etant egalement une appellation choisie a defaut de termes plus appropries). Car, en fait, une distinction claire doit etre faite entre le minimalisme coreen et le minimalisme dans l'acception traditionnelle du terme. Mise apart sa conception plastique rationnelle et analytique, le minimalisme coreen engendre un monde pictural nouveau base sur une conception de Ia nature propre aux Careens. Cette vision distingue !'art contemporain coreen du reste du monde et en meme temps le propulse sur Ia scene internationale. Le qualificatif qui correspond le mieux a ce courant est, pour moi, le "post-minimalisme" puisque ce courant se demarque du minimalisme standard et le transgresse. Cette conception coreenne de Ia nature rejoint Ia vision orientale de Ia nature en general basee sur !'idee que Ia nature n'est pas !'objet de Ia conquete ou du contr6le humains, mais une source de vie pour l'homme. Pour les Careens, Ia nature devient le miroir de soimeme, le coeur de Ia vie et un monde de meditation qui ramene toutes les choses aleur etat primitif. C'est sur cette conception que se fonde "!'abstraction minimale monochrome" qui donne sa forme unique en son genre a Ia peinture abstraite coreenne. Mais le monochromisme en peinture n'est,
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Motifs apeigne fin, 162 xJ3()cm, 1991 (en haut); Lee Ufan, Avec le vent S 8708-1, ll2 x221 em, 1987 ( ci-desms) Youn Myeung-~
ici, ni le produit d'un anti-colorisme ni le resultat d'un desinteret pour Ia couleur. II rejette seulement les couleurs materielles, sensibles, du concept pictural En ce sens, i1 serait plus juste de qualifier cet art de "pan-coloriste". Comrne dans Ia peinture orientale al'encre de Chine ou les couleurs demeurent a l'etat latent, ce monde de monochrornisme est riche en couleurs "spirituelles". II va sans dire que Ia correlation entre Ia peinture monochrome coreenne et Ia vision de Ia nature est evidente. La nature est definie comme une realite qui se montre dans son etat le plus original, ce retour aux sources est etroitement lie a !'expression artistique. Ainsi, Ia peinture monochrome coreenne se debarrasse de tout illusionnisme artificiel y compris de Ia couleur. En revanche, cette elimination ne doit pas etre confondue avec "!'Art de !'elimination" que !'on retrouve dans le "rninimalisme americano-europeen" qui est un produit artificiel d'une conception rationnelle. C'est dans cette difference que s'elabore Ia peinture monochrome coreenne, voire meme orientale. Des specialistes careens, acause de !'observation proprement coreenne de Ia nature, voient dans le naturalisme Ia caracteristique majeure de !'art coreen. Mais en fonction des definitions du concept de "naturalisme", son interpretation peut etre deformee. Le naturalisme est un concept artistique souvent utilise en Occident comme synonyme du "realisme". Au sens plus strict, c'est une version du "realisme .moderne" plus present dans notre conscience. En ce sens, il serait plus exact de qualifier !'art coreen traditionnel "d'anti-naturaliste", qu'il s'agisse du figuratif ou de l'abstrait. (En fai~ le figuratif et l'abstrait sont deux concepts qui n'existent pas dans !'art co ~ _ en traditionnel). En n~alite , !'art coreen est tres loin d'appartenir, par essence, au courant naturaliste tel qu'il est connu en Occident. Si !'on reconnait que Ia tradition de !'art coreen est fondee sur un "retour a Ia nature", je pense que le terme de "pan-naturalisme" est plus adapte que celui "d'anti-naturalisme" pour le qualifier. Car Ia nature presente dans !'art coreen n'est pas une realite objective mais une realite qui engendre Ia vie selon Ia philosophie de !'omnipresence de Ia nature tres proche de l'origine et de !'esprit de l'homme. C'est Ia com~
Ha Chong-hyun, Conjonction 89-07, 120 x 180cm, 1989
binaison de ce "pan-naturalisme" avec Ia tendance "post-minimaliste abstraite" qui donne a !'art coreen sa specificite. Qualifier quelque chose de "coreen" ramene a Ia question de Ia singularite de Ia culture traditionnelle coreenne. Et quand on en arrive a !'art contemporain, il apparalt inevitablement une confrontation entre Ia tradition et Ia contemporaneite. Cette confrontation est aussi en rapport direct avec un probleme d'identite qui ne se limite pas au domaine artistique. En un mot, le probleme est de savoir rehabiliter Ia tradition coreenne dans le monde moderne. C'est une question qui reste pour !'instant en suspens. A propos de cela, fairnerais citer ce qui a ete dit lors de l'e~positn d'art contemporain, tenue a Fuko~a en 1980, pour Ia premiere commemoration de l'ouverture de son musee d'art municipal : "Le maintien de Ia tradition est une urgence en Coree. En general, si !'art moderne
Les artistes d'aujJurd'hui
sont corifrontes directement a un prob!erne d'identite car ils doivent respecter leurs traditions nationales et en
meme temps tenir compte de !evolution de notre temps.
ne parvient pas a elaborer une tradition, il ne se reduit qu'a une illusion Depourvu de tradition, !'art contemporain coreen a du emprunter a !'Occident, ses concepts et ses expressions plastiques: C'est pourquoi !'art contemporain coreen, depuis le depart, souffre d'une "crise d'identite". II est done indispensable aux Coreens de retrouver leur subjectivite. Pour cela, revenir au langage plastique du passe tant sur le plan de Ia matiere que de Ia methode est inconcevable. En meme temps, il serait egalement vain d'essayer d'adapter le style traditionnel a Ia modernite. Les Coreens doivent plut6t chercher a remonter a Ia source de Ia structure traditionnelle propre a Ia Coree". Pour conclure on peut affirmer que !'art contemporain coreen doit se detacher de !'influence occidentale et etablir, par contrecoup, sa propre identite et considerer cette independance comme l'une des aspirations de !'art coreen. â&#x20AC;˘
La Iumiere et Ia couleur Yu}une-sang Critique d'art
1 y a un siecle, Ia calligraphie etait Ia forme artistique Ia plus appreciee des Coreens. Pourtant, ce ne sont pas les Coreens qui l'tnventerent. La calligraphie est nee dans Ia Chine antique puis sa pratique s'est generalisee non seule. ment en Coree mais aussi au Japon. La calligraphie symbolise Ia culture chinoise traditionnelle et influen<;:a !'Extreme-Orient de Ia meme maniere que Ia culture des pays de Ia Mer Egee influen<;:a !'Europe du Nord-Est. La calligraphie orientale est bien plus qu'une technique artistique; elle fait partie d'une plus large philosophie, le tao'isme, qui est a la base de Ia philosophie extremeorientale. Un erudit britannique resuma le tao'isme comme il suit : "Dans les arts visuels en Chine, les espaces vides sont aussi importants que les !ignes. Le but final de Ia mystique tao'iste est de transcender Ia "realite" ordinaire pour atteindre Ia conscience de Ia paix totale, au-deJa du temps et des changements, le Grand Extreme, le Tout , le mystere qui se cache derriere tous les mysteres, que les Chinois appellent le Tao".
I
En Coree, Ia calligraphie n'etait pas un art populaire. Comme dans routes les societes, "Ia culture" fait allusion a Ia culture de Ia classe dirigeante. En Coree, Ia calligraphie etait ['art des aristocrates, de !'elite Yangban. De ce fait, !'art de Ia calligraphie etait une distraction. L'Europe medievale connaissait un meme antagonisme e~tr ce que l'on appelait "!'art des aristocrates" et "l'artisanat des gens ordinaires". Un antagonisme similaire subsistait en Coree jusqu'il y a peu. Cette tendance a Ia discrimination artistique vient non pas 10
du savoir intrinseque mais de Ia conception propre a chaque classe sociale vis-a-vis de !'art, et est partagee par routes les cultures. La Coree est entree en contact avec Ia culture occidentale bien plus tard que ses voisins chinois et japonais. Les Coreens ont decouvert le style artistique occidental pour Ia premiere fois dans les annees 20. Cependant, ces 70 dernieres annees ont considerablement eprouve et transforme le peuple coreen. On peut dire que les oeuvres artistiques coreennes de ces 70 derniei¡es annees ont ere realisees dans un contexte de grandes mutations. En novembre 1994, le Musee d'arts de HoAm a propose une exposition intitulee "La lumiere et Ia couleur dans !'art coreen", visant a Ia fois a mettre en valeur ces oeuvres, a souligner aupres des visiteurs le role de Ia couleur dans !'expression artistique coreenne, et a rechercher un denominateur commun entre !'artiste et !'amateur. L'exposition etait divisee en quatre parties : "l'Ethique coreenne" (les couleurs traditionnelles propres a Ia Coree); "Exterieur et interieur" (les couleurs n'appartenant pas a Ia substance); "Impression et expression" (sensibilite et volonte) et "Lumiere et couleur". L'ethique coreenne
Traditionnellement, les Coreens ont conscience de 5 couleurs : le noir, le blanc, le rouge, le bleu et le jaune. Ces couleurs ne sont pas purement per<;:ues par les sens. Ce sont plutot des couleurs conceptuelles, qui symbolisent les Cinq Elen;tents formant le diagramme illustrant le cosmos tao'iste du changement eternel. Ces couleurs n'ont rien de scientifique, a cote des sept
.dans l'art coreen
Traditionnellement, les Careens avaient conscience de 5 couleurs: le nair, le blanc, le rouge, le bleu et le jaune. Ces couleurs, q14e l'on retrouve dans les peintures des temples et des palais, sont conceptuelles. Elles symbolisent les Cinq Elements du cosmos taoiste du changement eternel. 11
couleurs que Newton, le fondateur de Ia science des couleurs, a authentifiees au cours de ses experiences scientifiques. Mais le specialiste mondial des couleurs, Faber Birren, a fait une remarque interessante au sujet de Newton. Newton etait davantage un alchimiste qu'un scientifique, et sa perception des sept couleurs du spectre a ete influencee par son orientation mystique que l'on a sous-estimee. Sept etait le chiffre magique de l'alchimie, le chiffre sacre, le nombre des notes de Ia gamme diatonique musicale et le nombre estime de planetes.
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L'art audiovisuel de Paik Namjune, presenteau Musl!e national d'Artcontemporain (a droite), renvoiea Ia conception coreennede Ia lumiere materialiseedans le papier des portes coulissantes de Ia maison traditionneUe.
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Cela prouve que Newton n'etait pas un pur scientifique. II n'est pas apparu comme ~ a : c'etait un mystique, heritier de Ia riche tradition du mysticisme .europeen et de sa longue histoire. II n'a fait que prouver scientifiquement les mysteres du cosmos. Bien que les cinq elements de Ia pensee orient~l ne puissent etre prouves scientifiquement, les cinq couleurs sont presentes dans le coeur des ExtremeOrientaux depuis les temps anciens. Tout comme le chiffre sept etait magique pour les Europeens du Moyen Age, le chiffre cinq est un chiffre magique pour les peuples d'Extreme-Orient, Ia de des mysteres de l'univers. Le noir, le blanc, le rouge, le bleu et le jaune ne sont pas seulement des couleurs reservees aux scientifiques. Ce sont les symboles des principes de base de l'univers. Selon Faber Birren, le noir represente le savoir ou Ia sagesse; le blanc, l'integrite ou Ia vertu ; le rouge, Ia bienseance; le bleu, !'amour ou Ia bienveillance; et le jaune, Ia fidelite. Birren a egalement etabli un rapport entre les couleurs et les symboles de l'ordre, des saisons, des planetes, du son, de !'emotion, des visceres, entre autres. Ce systeme des symboles etait utilise par l'aristocratie, et pas toujours par le peuple. La culture extreme-orientale peut etre divisee en plusieurs cultures basees sur le bouddhisme Zen et le bouddhisme esoterique. La culture Zen avait tendance a eviter !'utilisation des couleurs. Les dessins
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issus de cette culture etaient generalement realises a Ia seule encre de Chine. En revanche, les cultures bouddhistes esoteriques utilisaient volontiers les couleurs comme c'etait particulierement le cas pour !'art populaire. L'art populaire coreen est etroitement lie a Ia croyance dans le pouvoir des incantations. L'iconographie de Ia tradition du Mandala (representations symboliques - des forces cosmiques, au centre du bouddhisme esoterique) est un exemple de !'utilisation vertigineuse de Ia couleur et des formes, symptomatique de ces cultures. Dans ce cas, !'utilisation des couleurs
Les couleurs vilwantes du Festi~Xl
de Lee ~shilz,
150 x 300 em, 1994 (a droite), rappellent Ia croyance~ pulaire traditionnelle, I'art populaireet le tanch'ong nwntres ci-dessous.
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n'a pas pour seul but de stimuler les sens de l'homme; elle vise aussi a evoquer une certaine extase religieuse a travers !'hallucination. Les couleurs que !'on retrouve dans ces peintures ne sont pas harmonieuses; elles sont criardes et violentes, primitives et instinctives. On peut qualifier d'oeuvres expressionnistes ces peintures pour leurs couleurs primitives. Exterieur et interieur
Cezanne, l'un des pionniers de Ia peinture moderne, disait de Ia couleur qu'elle etait "l'endroit ou notre esprit rejoint l'univers". L'univers est exterieur. Notre esprit est interieur. La couleur est un lieu ou les deux se rencontrent. Ainsi, Ia couleur n'est ni interieure ni exterieure; elle est entre les deux. Si Cezanne avait ete un philosophe, ses ecrits auraient assurement ete quelque peu abstraits. Mais heureusement, ce fut un peintre, et son "domaine" etait ce que !'on appelle "!'art" qui doit etre compris ¡ici comme Ia toile elle-meme. Ses toiles comportaient une li-mite entre "l'exterieur" et "l'interieur". La couleur etait sur Ia toile. Cezanne faisait clairement reference aux dimensions de Ia couleur. 14
Physiquement, une toile est un support rectangulaire. Les etres humains per ~ oivent ce type de plan orthogonalement. La surface de Ia toile est plane, et l'homme apprehende .Ja toile d'une vision frontale. Plus fondamentalement, les etres humains menent une existence verticale. Depuis que, les hommes vivent debout, ils ont conscience de l'espace et des distances. Pour eux, l'espace represente une sorte de topologie. Les fenetres d'une maison coreenne traditionnelle sont couvertes de papier blanc neige. Lorsque le papier devient rose pale, c'est le matin. Quand le papier est tout simplement blanc, c'est le jour. Lorsque le papier n'absorbe aucune lumiere, c'est Ia nuit. Les Coreens ont traditionnellement distingue "l'exterieur" de "l'interieur" en les separant a !'aide d'une simple feuille de papier. Le "domaine" de Cezanne ressemble beaucoup a cette feuille de papier des Coreens. On peut dire que l'histoire de Ia peinture est celle d'une forme realisee a travers !'application d'une certaine image et d'une certaine couleur sur un support a deux dimensions. L'histoire de Ia peinture occi-
\
dentale de ces cinq derniers siecles est l'histoire de diverses expressions sur des surfaces planes sous diverses formes et methodes. Chaque image est differente, mais Ia toile, une seule section de Ia deuxieme dimension, reste Ia meme. Comme Cezanne le predisait, !'art contemporain s'attache moins a savoir comment et pourquoi les choses sont representees sur cette surface qu'a Ia structure de ce "domaine" ou se rejoignent l'exterieur et l'interieur. L'art coreen contemporain s'est aussi oriente vers ce que !'on appelle aux Etats-Unis le "color field painting', ie "allover' et aussi vers le concept fran ~ ais du "support surface". Impressionnisme et expressionnisme
Comme nous l'avons mentionne plus haut, Ia Coree a decouvert !'art occidental dans les annees 20. A cette epoque, Ia Coree etait sous !'influence nippone et n'a pu adopter !'art occidental qu'indirectement, a travers le biais des Japonais. Ainsi, les Coreens ont parfois confondu !'art occidental japonise avec le veritable art occidental. Ce fut une terrible tragedie pour les artistes coreens. II n'existait alors aucune
careen est en constant changement.
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ecole d'art en Coree a cette epoque, et le seul moyen de recevoir des nouvelles de !'art occidental etait de passer par le Japon ou par les quelques etudiants careens a l'etranger. Bien entendu, Ia Coree a ses propres tra-ditions artistiques. Les artistes careens ont ete attires par les techniques modernes et le realisme representatif de !'art occidental. II est interessant de constater que beaucoup d'oeuvres impressionnistes ont ete introduites en Coree par des etudiants de retour du japon. Ce phenomene s'explique facilement par l'eloignement de Paris, Ia capitate internationale de l'art a cette epoque, et le gout commun des japonais et des Careens pour l'impressionnisme. L'impressionnisme ne s'est pourtant pas enracine en Coree, peut-etre parce que les concepts de beaute des Coreens sont moins objectifs que subjectifs, ont un caractere moins rationnel qu'ethnique. Les Careens viennent du Nord froid et obscur, et ont rec;; u pendant des millenaires !'influence de Ia culture chinoise. Bien qu 'ils aient ete recemment influences politiquement et socialement par les japonais, les Careens ont conserve intactes leurs car-
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acteristiques ethniques dans Ia culture et les arts. L'expressionnisme n'est pas un art forme!. Van Gogh a dit un jour: ')'exprime Ia passion effrayante de l'homme en rouge et vert". Van Gogh representait l'expressionnisme symboliquement. Le rouge et le vert n'etaient pas des couleurs car ils etaient per<;:us comme des donnees sensorielles; ils etaient !'expression d'une emotion feroce et violente, comme un valcan en eruption. Les elements expressionnistes qui sommeillent dans Ia conscience des artistes careens ont fait irruption a Ia fin des annees 60, comme provenant d'un volcan endormi pendant longtemps. Cette explosion a marque Ia renaissance de !'art moderne careen. Dans le monde occidental, les cultures mediterraneennes ont connu un vigoureux developpement artistique tandis que les cultures germaniques et slaves, au nord, sont restees silencieuses. Cependant, !'explosion de l'expressionnisme, qui a ete le principal courant artistique du vingtieme siecle, est nee de ces cultures jusqu'alors muettes. De Ia meme maniere, le magma explosif de !'art contemporain
La lumiere et Ia couleur Depuis les annees 60, Ia societe coreenne a connu toutes sortes de changements sans precedents, particulierement dans le secteur de l'industrie. Dans un sens, Ia societe coreenne est passee a !'age adulte, rampant avec une longue enfance marquee par !'isolation, pour devenir un membre de Ia communaute internationale. Bien entendu, dans plusieurs domaines, le pays n'est pas encore mur. Mais il est evident qu'il ne s'agit plus de Ia societe coreenne d'autrefois. Ces nombreuses mutations ont exerce une influence sur le chemin emprunte par l'art careen et ont permis aux artistes careens de realiser que !'art ne doit pas se developper seulement a partir de !'art local. Nous avons vu Ia naissance d'une approche interdisciplinaire. Cette approche represente !'emergence d'un nouveau mode de pensee sur Ia realite ultime et pas necessairement Ia decouverte d'une nouvelle realite. Paik Nam-june fut le premier artiste careen a adopter !'approche "art means new art''. Au debut des annees 60, il prevoyait que l'ecran de television remplacerait un jour Ia toile du peintre. Aujourd'hui, il est a Ia tete du courant international de !'art audiovisuel. Si Paik est bel et bien careen, son potentiel artistique n'a pas ete mis en valeur par Ia societe coreenne. II a exploite ses dons aux Etats-Unis, le pays le plus avance en ce qui concerne les supports electroniques. Son travail a encourage de nombreux jeunes artistes careens et a suscite une curiosite croissante pour !'influence potentielle des couleurs creees par !'in-telligence artificielle. john G. Hauhardt, du Musee Whitney, a fait l'eloge de Paik Nam-june pour avoir revolutionne notre perception de !'art. "La question n'est pas de savoir si Ia video est un art; elle est de savoir comment Ia video est en train de changer notre conception de !'art". Selon Hauhardt, Ia methodologie de Paik est basee sur ses recherches sur les fonctions sociales, culturelles, politiques et economiques du support electronique que nous appelons Ia television. â&#x20AC;˘ 15
Les approches contemporaines OhKwang-su Conservateur du Musee Whanki, Critique d'art
L'
appellation "peinture coreenne" (ou "peinture orientale") est utilisee en vue de faire Ia difference avec Ia peinture occidentale. Comme on designe Ia maison de style traclitionnel par !'appellation de ''maison coreenne'' en opJnSition aux ''maisons ocddentales", qui sont de style occidental, on designe sous !'appellation "habit coreen" le style traclitionnel des vetements, en opJnSition avec les ''vetements ou robes occidentaux" de style occidental. II s'agit Ia d'un phenomene commun a toutes les regions dExtremOin~ qui ont intrcxluit Ia culture et Ia civilisation mcxlernes de l'O::cident Dans Ia plupart des cas, le style occidental se caracterise par !'aspect d'un changement survenant au cours du temps, alors que les chases traditionnelles sont presentees comme appartenant a un style propre qui ne change pas Cela vient probablement du fait que les Orientaux ont conserve leur fac;:on de voir, qui a conyu comme mcxlele de !'Occident un style mcxleme qui, a l'epoque de son intrcxluction en Orien~ connaissait de rapides transformations Le style traditionneL lui aussi, ne peut que subir ses propres transformations Cepnda~ jusqu'a l'epoque actuelle, on a generalement considere comme occidentales ies chases caracterisees par le changem~ alors que le style traditionnel etait compris et conyu comme quelque chose de
pratiquement immuable. nfaut reconnaitre Ia le resultat de Ia pensee selon laquelle ce qui est vraiment propre a une nation ne change pas A ce sujet, il peut apparaitre de nombreuses polemiques concernant Ia tradition. Certains pretendront que Ia tradition consiste a ne ~ sortir d'un cadre et d'une sphere specifiques; d'autres pretendront que Ia tradition, elle aussi, doit reruurre et se renouveler en fonction d'une comprehension evoluant selon les epoqu~ et il y a une forte oprmtion entre les deux points de vue. En realite, quoi qu'il en soit des points de vue en question, Ia peinture coreenne, tout en etant d'un style traditionnel propre au peuple careen, comme on peut s'en rendre compte, n'a cesse de changer grace aux eforts - ~nsiderabl deployes depuis 1945. Reste a examiner au moyen d'une analyse appropriee s'il a ete realise des prcwes continus et souhaitables. Si !'on desire proceder a un examen des changements enregistres par Ia peinture coreenne, il est necessaire de remonter jusqu'a l'epoque anterieure a Ia liberation, avant 194~ et meme plus loin, jusqu'au 19eme siede. Pour Ia Coree, le 19eme siede fut une epoque de changements considerables aussi bien a l'interieur qu'a l'exterieur du pays. Ce fut a cette epoque que se prcxluisirent les evenements les plus regrettables de son histoire, tout particulierement Ia decadence de Ia dynastie de Chcron
Lee Sang-beom, Aube, 6.9x273 em, 1954
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avec Ia fondation de !'Empire Taehan, puis, aussit6t apres, Ia perte de sa souverainete nationale a Ia suite de !'invasion de Ia peninsule par les irnperialistes jl.ponais. Ce fut l'epoque de brusques transformations provoquees par le vent qui commenyait a souffler de !'Occident vers les pays d'ExtremeOrient Avee l'ebranlement du systeme traditionnel des valeurs peu a peu remplace par un systeme de valeurs nouvellement intrcxluit de l'etranger, le peuple careen etait alors en proie a de profonds dechirements. ny eut une oprmtion entre deux tendances, une qui preconisait le maintien coute que coute de Ia tradition, et une qui nhesitait ~ a proner !'abandon pur et simple de Ia tradition et !'adoption d'un nouveau style de vie, mais c'est Ia seconde qui l'emporta Tres vite ce qui venait de l'etranger commenya a dominer dans Ia societe coreenne et les elements traditionnels ne representerent plus qu'un style appartenant au ~ suranne et depa&se. Au cours des annees 1910, avec !'augmentation du nombre des "peintres a !'occidentale'', qui revenaient apres un sepur d'etudes a Tokyo ou ils s'etaient formes a Ia technique de Ia peinture occidentale, le style traditionnel de Ia peinture coreenne ne cessa de pericliter. La raison profonde en fut que les calligraphes et les peintres de style traditionnel en etaient restes a un formalisme desormais depasse et vieilli, sans chercher a operer
de Ia peinture "coreenne" un tournant necessaire vers un style plus modeme en procedaht a une analyse nouvelle des tedmiques propres al'art de la peinture orientale, ce qui aurait perrnis de faire face al'exrmsion du style de la peinture occidentale qui peu a peu envahissait la societe coreepne nfaut aputer qu'avec l'influence de la peinture japonaise qui deferlait sous Ia forme d'une veritable invasion culturelle colonialiste, le style traditionnel de la peinture coreenne ne pouvait eviter de suivre la voie de la decadence Independamment des genres, jusqu'au moment de la liberation de 1945, les arts careens furent profondement influences par la sensibilite et la technique des artistes pponais I.e domaine de la peinture traditionnelle fut tout particulierement touche. s~ au lendernain de la Liberation, un certain nombre d'artistes avises parvinrent acontrer cette influence japonaise et s'ils preconiserent !'elaboration d'un nouveau style artistique careen, c'est parce qu'ils avaient pris conscience de la profondeur de cette contamination culturelle la. necessite de se liberer de !'influence pponaise pour ce qui etait de la sensibilite et de la technique apparaissait comme un probleme plus urgent encore dans le domaine de la peinture coreenne que dans tout autre domaine A cette epoque-Ja, exceptes quelques peintres qui etaient tombes dans le formalisme conservateur et
quelques autres qui se consacraient ala peinture realiste en traitant des themes comme les paysages careens, presque tout le domaine de la peinture coreenne traditionnelle subissait soit directmn~ soit indirectement l'influence de la peinture pponaise la. raison pour laquelle il ne pouvait en rue autremn~ c'est que les ~unes qui se destinaient a la peinture et desiraient etudier la peinture orientale allaient s'adresser aux departements de pm ture orientale des diverses universites pponaises. En d'autres termes, la plupart des candidats a la peinture qui se rendaient auJapan pour etudier la peinture orientale n'avaient pratiquement pas d'autre solution que d'etudier dans les departements de peinture japonaise A cette epoque-Ja, meme les ¡ ~Ul)es ~ en autodidactes, etudiaient la peinture en Coree pouvaient tres difficilement echapper al'influence de la peinture pponaise qui dominait dans toute !a societe ~ au lendemain de la liberation, le mouvement destine aliberer les artistes de l'influence de Ia peinture japonaise apparut d'abord sous Ia forme d'un mouvement visant ase liberer de la tedmique de la peinture consistant apeindre sans tracer d'abord les lignes principales. la. peinture basee sur l'application directe des couleurs, contrairement a la tradition de la peinture orientale centree sur le dessin des lignes, represente une technique typique de la peinture japonaise Par
consequ~ le fait de se liberer d'une telle technique pouvait etre considere comme !a maniere !a plus directe et la plus rapide pour se liberer de l'influence de la peinture pponaise En meme temp; que la volonte de se liberer de !a peinture japonaise, on preconisait !a creation d'un art careen specifique la. methode concrete, dans le domaine de la peinture coreenne, consistait asaisir fob# en se centrant sur les lignes dans les coloris a l'encre de Chine. Cette methode qui accorde une grande valeur ala touche du pinceau est anl~e ala methode elite de la touche unique que l'on peut decouvrir dans les oeuvres picturales des lettres de pdis Ainsi devait s'accentuer la tendance visant a rechercher la tradition de la peinture orientale dans les peintures des lettres d'autrefois. En meme temps, on cherchait a aputer un esptit realiste enracine dans le monde reel et coner~ plut6t que dans la noblesse du monde de l'esprit vers lequel tendaient les oeuvres des lettres depdis
Depasser Ia tradition ll est toujours plus facile de decouvrir une volonte de changement chez les ~unes artistes que chez ceux. qui sont deja arrives a une certaine maturite Au cours des annees l<ril, il fut entreptis un grand nombre de tentatives et diverses recherches surtout dans les milieux des jeunes
Heo llaig-ryeon, Montagnes et mers profondes, 68xl80cm, 1959
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No ~hyeon,
Paysage, 124 x 67 em, 1956 ( ci-dessus) no x 155 em, 1981 (a droite)
Lee Ungno, Sans titre,
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artistes. Les resultats de tels efforts se concretiserent dans !'Association Paegyang qui fut fondee en 1957. Parmi les artistes qui furent membres de cette ;mxiation, on compte un certain nombre de peintres qui avaient dey subi une forte influence de Ia peinture ~ponaise Les resultats obtenus rm cette organisation dont les membres s'efforcerent de mettre fin a Ia technique et a Ia methode employees dans le passe et de rechercher un style nouveau de peinture, ne furent nullement negligeables et !'influence en fut considerable Le groupe qui fit son apparition ensuite fut !'Association Mugnim, qui fut fondee en 1960. Composee d'artistes plus ~unes que ceux de !'Association PatgJX~n cette ;mxiation etait composee d'artistes de Ia generation de l'apres- liberation sortis des facultes de beaux-arts etablies dans les universites coreennes apres Ia liberation Niant totalement toutes les formes et toutes les valeurs existantes, les membres de !'Association Mugnim ne cesserent de proceder ades tentatives souvent excessives. Ce qui etait commun atoutes ces experiences et tentatives de ces ~unes artistes, residait dans le choix et dans !'utilisation en toute lit.erte de nouveaux materiaux, dans Ia recherche de !'expression d'un nouvel espri~ en se liberant de toute ob~vite et de toute methode formaliste Aamdonnant les materiaux utilises traditionnellement dans Ia peinture orientale, ces artistes com-
Byeon Kwan-sik, Fin de l'automne dans un village de campagne, m x 264 em, 1957(en haut)
mencerent autiliser des materiaux employes dans cl'autres domaines de !'art pictural ou meme des materiaux ordinaires que !'on ne pouvait nullement envislger comme matiere de rnse de Ia peinture orientale. Le dessin n'etait plus vraiment dessine, mais realise au moyen de gestes qui consistaient a faire couler, a projeter ou a coller les
Heo Geon, Les trois pins, 130 x 103 em, 1974 19
Kim Ki-chang,SOsangdo n' 84,6 X 104 em, 1984 20
Sung Chae-hyu, Oiseaux en vo], 182 x 125 em, 1986
couleurs et les matenaux utifui<;. On ne ~urait cependant dire si les recherches et tentatives excessives de l'Awciation Mugnim furent limitees a cette association Nous ne pouvons resser sous silence ]a vague de ]a "peintureaction abstraite" qui, vers la meme ~e, deferlait dans les domaines de la peinture occidentale et de la rupture De plus, en ce qui concerne les diverses tentatives et experiences de !'Association Mugnim, qui etaient !'expression d'une ferme volonte de se liberer du pug de la tradition propre a]a peinture coreenne, il faut reconruu"tre qu'elles ont perrnis de creer un grand courant de sympathie pour !'art abstrait qui etait alors en v~e En opposition avec les experiences et tentatives entreprises swtout sur !'initiative de la ~une generation, .une partie des artistes dep connus ont alors fait p~euv d'un approfondissernent de !'art de leur generation Lee Sang-beam (Yi Sang-oom, pseudonyme: Ch'ong Chon), Byeon Kwan-sik (Pyon Kwan-sik, pseudonyme : So Hyang), No Soo-hyeon (No Su-hyon, pseudonyme : Sim San),
Park Re-hyun, Petit rnatin, 181 x 240 em, 1956
Heo Baig-ryeon (Ho Paek-nyon, pseudonyme : Ui Che) et d'autres peintres appartenant au groupe des plus anciens firent preuve d'une grande maturite, chacun dans un style particulier, surtout dans le domaine de la peinture de pay~ges Dun autre c6te, Lee Ungno (Yi Dng-no), Chang Woo-soung (Chang U-s6ng), Kim Ki-chang (Kim Ki-ch'ang), Chun Kyong-jl (Ch'on Kyong-jl), Park Re-hyun (Pak Nae-hyon), Sung Chae-hyu (SOng Che-hyu) et d'autres artistes de Ia generation suivante deployaient de grands efforts en vue de proceder aune recherche approfondie de lem univers en procedant parallelement adiverses tentatives. Yi Sang-oom et Pyon Kwan-sik sont consideres comme des peintres representatifs de la creation d'un style propre susceptible d'exprimer le charme particulier de la vision coreenne de la nature, et ils ont restaure la lignee des peintres de pay~ges realistes de la fin de la periode de Chos6n Sous leur influence, au cours des annees 1970, un certain nombre de peintres qui etaient alors ages de trente acinquante ans ont ete al'origine d'une sorte de
v~e de ]a peinture de pay~ges realistes grace a leur volonte de redecouvrir le monde de la nature "coreen''. Parmi les artistes qui ont fait preuve de la plus grande teriacite pom ]a recherche d'une methode susceptible d'exprimer dans un style plastique modeme, le monde de !'esprit specifique al'Oien~ on peut citer Yi Dng-no et Kim Ki-ch'ang. Pa~ti pour Paris au debut des annees 1~ , Yi Ong-no a cree son propre univers abstrait base sur les formes des caracteres de l'ecriture cuneifOime e~ ainsi, il a attire !'attention des milieux artistiques du monde entier. Au cours des annees 1970, en recherchant un style pictmal pmticulier, nouvelle vaJiation des peintures des lettres careens d'autrefois, Kim Ki-ch'ang proposa une methodologie modernisee de la tradition Le "Mouvement pour la peinture al'ena¡e de Chine'', appmu apaitir du debut des annees 1900, a ete, apres les activites de l'Awciation P~ngdes annees 1950 et de !'Association Mugnim des annees 1960, un mouvement qui presentait
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ParkSaengkwang,
Chamanisme,
133x133 em, 1985 (enhautit gauche); Chun Kyongja,
Portedela jeunesse,
145x89 em, 1968 (en bas agauche); Song Soo-nam,
Portrait demontagne, 180x195 em,
(enbasau milieu); Suh Se~k,
Sans
titre, 130x162 em,
1989 (en bas it droite)
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l'ideologie du domaine de Ia peinture coreenne Alors que !'Association Paemang et !'Association Mugnim etaient des organi£1tions bien definies, Ia arracteristique du ''Mouvernent JXlUf Ia peinture a l'ena·e de Chine" residait dans le fait qu'il s'agissait d'une vaste collectivite qui se reunissait selon les besoins du moen~ ~ qu'il existe une organi£1tion particuliere bien precise. Par exemple, il anivait que !'on voie se reunir dnquante, cent ou meme davantage, artistes JXlUf l'organi£1tion d'une exJXlSition et qui se dispersaient une fois cette exfD)ition terminee, tout en ]Xlursuivant de far;:on continue l'obp:tif commun des artistes concernes, qui etait Ia realisation dune approche vers !'esprit propre aIa peinture coreenne au moyen de !'utilisation de l'encre de Chine Comme le revele de fac;:on claire !'appellation de "Mouvement pour Ia peinture a l'encre de Chine'', Ia methooe employee par les artistes concernes consistait a rechercher Ia valeur picturale possedee ru· l'encre de Chine et aprcxroer aune systematisation de !'expression de Ia ser:sibilite en relation avec les arracteristiques picturales de ce materiau Vers le milieu des annees 1980, a son tour, ce mouvement a peu apeu perdu de son ardeur, il meiite cependant une mention toute particuliere etant donne qu'il a revele une continuite et a donne lieu aune promotion collective encore
pmais vue aurmavant dans le monde de Ia pein-
ture coreenne traditionnelle. A~ de Ia seconde moitie des annees l<:ID, un tel mouvement collectif ~ justifiant de moins en moins en tant que mouven~ il app:uut peu a peu un phenomene de dispersion ~us forme de travaux individuels e~ bien sfu, il y eut un bon nombre d'artistes qui, &u1S prendre JWt a de tels mouvements, ont travaille individuellement Ia methode specifique de Ia peinture a l'encre de Chine. la tendance app:uue a Ia suite de ce mouvement a ete celle qui acmrdait davantage de place a Ia couleur. ns'agissait Ia uniquement d'un travail destine a mettre en avant les artistes utilisant Ia couleur, couleurs qui avaient ete delai§ees a ca~ de Ia tendance precedente trop centree sur !'utilisation de l'encre de Chine, et on ne saurait lui accorder une signification particuliere en tant que mouvement En com~n avec les autres genres de peinture, le domaine de Ia peinture coreenne donne Ia forte impression qu'elle ne peut !XIS ~ liberer de Ia conception traditionnelle des materiaux et de Ia technique. Cest peut.etre parce qu'il n'existe aucun autre genre pictural qui subisse autant une influence directe pour ce qui est de Ia mise en oeuvre methodl~qu des caracteristiques des matenaux
et de Ia technique. Dans ce cas, les materiaux et Ia technique utilises ne sont pas seulement des moyens d'expression : on peut dire qu'il s'agit d'un systeme particulier et specifique de ~bilte qui cree une situation psychol~que. Par exemple, les materiaux utilises dans Ia peinture coreenne possedent une dimension emotive particuliere que !'on ne saurait comparer, dans le cas de Ia peinture occidentale, avec les materiaux utilises comme Ia couleur a l'huile ou a l'eau a tase d'acrylique. Miroir de Ia realite Comme nous venons de le montrer, on peut dire qu'il a ete possible poW' les peintres coreens de ~ liberer de Ia conception traditionaliste grace a une methode expe1imentale. Meme si les etapes et les expeliences realisees ~nt diverses, du fait que toutes ces expeiiences et tentatives ont poW' but de ~ liberer du pug existan~ on peut affi.rmer que pour tous ces artistes le point de depart est le meme. Cepnda~ en fonction des generations, on peut percevoir de profondes differences Plus on remonte vers les generations anciennes, plus on disceme 1,1Ile grande prudence dans les tentatives visant a se liberer de Ia tradition et dans Ia recherche d'une nouvelle intapretation de Ia tradition Plus on descend va'S les ~unes generations,
libem· de Ia tradition'' apparai't comme une entrp~ destinee a b~r une vieille coquille pour en ~rti, et plus les artistes cherchent a attlibuer de Ia valeur uniquement au fait de ~ liberer, &u1S que les artistes s'inquietent de Ia forme p~ par Ia liberation qu'ils preco~t En realite, ~uven les oeuvres des peintres de ces ~unes generations anivent a un srade qu'il est presque impossible d'accepter comme appartenant au genre de Ia peinture coreenne. la pluJ:XUt des artistes des ~unes generations ont tendance a s'inter~ aux phenomenes de l'epoque actuelle plut6t qu'a Ia tradition ellememe. Dans leur optique, peu importe que !'oeuvre ~it de Ia peinture coreenne ou de Ia peinture occidentale. lls pretnd~ tout simplement, travailler pour trouver Ia "peinture d'aujourd'hui", qui soit fidele a Ia realite d'aupurd'hui lls pe~nt que, de tout temps, les grandes oeuvres artistiques ont ete des oeuvres fideles a Ia realite de leW' epoque. Dans le passe, pour faire Ia difference entre Ia peinture coreenne et Ia peinture utilisant d'autres materiaux et d'autres techniques, on pouvait ~ ~r sur les pinceaux confectionnes en poil d'animaux, le papier, l'ena·e de Chine et les couleurs qui etaient les elements spedfiques de Ia peinture coreenne. Par contre, auprd'h~ une J:XUtie des oeuvres des a.ttistes des jeunes generations sont parvenues a un stade interdisant de proceder a une distinction basee sur les materiaux eux-memes. Si une telle tendance continue a s'accentuer, on ne pown eviter de voir dispa.t·a!tre les concepts de Ia peinture coreenne et de Ia peinture occidentale qui, jusqu'a pr~nt, ont permis de distinguer les deux domaines. nva d~rmais fallofr que !'on procede activement au debat concemant le bien-fonde d'une telle tendance. Ce qui doit attirer !'attention des specialistes, c'est le degre d'identite des oeuvres a·eees, et cela aussi bien si Ia peinture des artistes coreens reste ~us le nom de peinture coreenne, que si elle devient une peinture classee dans le cadre d'un concept unifie, apres Ia disJ:Xllition de !'appellation "peinture coreenne''. • plus"~
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L'art contemporain coreen et les artistes coreens dans le monde ChungJoon-mo Conservateur independant
'' L :ec~i1t!n;adu
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turel ou se melent les valeurs heterogenes de Ia moclernite et de Ia tradition En ce qui conceme planning'', '1e non-raffinement", Jes critiques d'art coreens, le probleme se pose de et "!'indifference" sont les attri- fa ~ on plus grave. Leur regard est en general "exterieur" car buts de !'art coreen d'apres Ko Yu-s6p, historien de !'art du debut du vingtieme leurs connaissances en matiere de critique se siecle. Selon Ju~ Je manque de details meticuleux fondent sur des criteres utilises par les critiques de Ia peinture coreenne lui aurait plut6t permis ocddentaux. Cela est dO en partie a Ia brievete d'etre comprise dans quelque chose de plus de l'histoire de Ia critique en Coree. Pour nos large que !'art, et de creer une ambiance chaude critiques d'art, Ia critique fut d'abord le moyen de et reconfortante. Le propos de Ko parait simple calquer un systeme occidental pour juger les mais il s'agit Ja d'une description e!oquente des oeuvres d'art coreennes. Pour eux, Ia theorie et caracteristiques de !'art coreen traditionnel. l'histor~ . de !'art sont comme des archetypes qui Pourtant cela ne suffit pas parce que !'art reflete ne charigent pas, a travers lesquelles on peut Jes tendances et Jes changements culturels de tout mesurer systernatiquement Ainsi a ete pratiquee Ia critique d'art. son temps. ¡L'art d'aujourd'hui, par exemple, est condi- L'histoire de !'art a egalement ete etudiee selon le tionne par son contexte social, culture!, his- point de vue de l'esthetique occidentale sans torique et religieux. En d'autres termes, il est dif- tenir compte de Ia realite coreenne. Cela a ete le cas depuis Ia naissance de !'art moderne Avec le developpement economique et la coreen. Bien sur, nous aurons a etre liberalisation des etudes l'etrangJ~ de plus en vigilants et a nous interesser atoutes les plus d'artistes careens gagnent une realisations artistiques de toutes reconnai!:>-sance internationale. les regions du monde pour etablir fidle de comprendre une oeuvre d'art sans con- une base esthetique acceptable par tous. Mais naitre Ia culture a laquelle elle est liee et qu~ nous devons aussi developper un critere d'autre part, exerce une grande influence sur Ia esthetique base sur nos traditions, religions et personnalite des artistes qui Ia cree. Pourtant, aIa heritage pour ne pas perdre notre identite et question de savoir si !'art contemporain coreen pour pouvoir etudier !'art coreen de ce point de est analyse et evalue en general en tenant vue-Ja egalement Cette tache doit etre prioritaire compte .de ce fait, Ia reponse est malheu- pour Ia communaute artistique coreenne. reusement non L'art contemporain coreen est ne dans un tu- L'esthetique coreenne multe responsable de sa dualite, de sa duplidte, Si !'on continue a analyser !'art coreen du de Ia confusion entre Ia tradition et Ia culture point de vue de l'esthetique ocddentale, il nous importee, et enfin d'une sorte de melange cui- sera impossible de retrouver notre identite et
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nous serons accables par Ia honte de constater que !'art contemporain coreen n'est rien d'autre qu'un epigone pathetique de !'art occidental. Pourtant, etant donne que Ia perception et Ia sensibilite des artistes, comme celles du public coreen, sont encore dominees par les traditions de pensee d'une culture agraire, l'esthetique coreenne est inseparable de !'art contemporain coreen quelle que soit !'influence ocddentale. On trouve fadlement des exemples. dans les travaux d'artistes qui ont plus de dnquante ou soixante ans et qui ont vecu personnellement Je style de vie agraire. Bien qu'ayant ete parfois accusees d'etre des imitations du modemisme ocddental, quelques-unes de leurs oeuvres sont maintenant considerees comme un substitut possible a!'art ocddental ou se font jour diverses tendances artistiques. La monochromisation est l'une des tendances que !'on espere substituer aIa confusion de !'art mocleme. Une autre tendance, qui lui est tout a fait opposee, est celle des nouvelles tendances artistiques : celles des artistes de Ia jeune generation ruibitues aIa culture ocddentale importee et aIa vie urbaine resultant du developpement industriel Bien qu'elles soient differentes l'une de !'autre, ces tendances ont une chose en commun : elles portent en elles des elements des traditions coreennes et de leur heritage sous une forme ou une autre. Bien que le monde entier s'interesse tres peu a!'art otiental, Ia structure unique de !'art coreen surgit comme une reponse potentielle aux valeurs confuses de !'art occidental. Ceci est perceptible atravers !'attention croissante portee par les Ocddentaux a!'Orient En plus, l'expressionnisme des annees 1980 et !'art d'installation des annees 19SXJ perdent de plus en plus de leur interet Par contre, on s'interesse dorenavant a !'art effectue sur des surfaces planes. Cela peut etre interprete comme bon signe pour l'avenir
Chung Chang-sup, Tag No.9009, 9Ixn6,5 em, 1990 ( ci-dessus); Kim Tschang-yeul, Gouttes
d'eau, 18lx227.c m, 1978 (a gauche)
de rart contemporain coreen Bien que diverses experimentations et approches aient ete entreprises dans !'art coreen, elles ont ete tres peu reconnues jusqu'ici Le style des annees 1970, decrit comme "individualiste collectif'' ou comme "caricature sur surface plane" a ete sous-estime puisqu'il etait qualifie de "style de Ia generation passee". Peut-etre que nous devrions reconsiderer maintenant notre jugement sur !'art de cette epoque et nous demander si nous n'avions pas ete intolerants ou trop subjectifs. La peinture monochrome, qui propose une "restauration de Ia coreanite", fut le fait d'une tendance minoritaire des mouvements artistiques careens du milieu des annees 1970 au 25
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debut des annees 80. Caracterisee par !'absence d'images materielles et par 1a domination d'une seule couleur, souvent le noir et blanc, 1a peinture monochrome a cherche amontrer l'absolu de 1a surface peinte Ce style s'est demode a cause de limites intrinseques que !'on peut definir comme sa personnalite collective, sa minimisation de l'individualite, son apparence uniforme et sa conceptualisation excessive. Nous avons essaye d'interpreter le travail des artistes de ce style a partir du point de vue du minimalisme qui etait a 1a mode en Occident a cette epoque, mais leur minirnalisme etait trop conceptuel Se fondant sur les theories occidentales, ces artistes ont tente de transcender et integrer Ia peinture et Ia sculpture Leur att semblait motive par 1a oise economique que connaissaient a cette epoque les Etats-Unis et !'Europe. L'instabilite sociale causee par des problemes financiers, le ch6mage et d'incessants conflits sociaux et 1a reprise par 1a presse de ces evenements, condui~ret les artistes ~ se tourner vers un style sans colotisation prodigue loin du confort de l'att pur. L'Arte Povera, ou Art appauvri comme il a ete appele, a ete represente en Coree par Lee Ufan (Yi U-hwan) et son ecole Mona Cest dans les annees 1970, quand il residait au Japon, qu'il a inspire de nombreux artistes careens par sa theorie et son style La nouvelle generation
Chung Sang-wha, Sans titre 88-9-24.162x130 em, 1988
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Entre-temps, un nouveau groupe d'attistes tres differents dans leur style et pat¡ leur esprit des artistes des annees 1970 a fait son apparition et s'est constitue, lui, en "groupe". Ages d'une vingtaine ou d'une trentaine d'annees, ils representent Ia nouvelle generation connue sous le nom de Tribu Orange. Ce sont les enfants du nouvel environnement culture! et social, heritiers legitimes du developpement economique et du modernisme qui ont ete eleves comme des princes ou des princesses par leurs parents dans une societe ou les consommateurs sont rois. lis sont habitues a1a television et aux medias audiovisuels, al'automatisation ou aux jeux video. lis preferent volontiers substituer au Kimch'i (choux fermente pit ~ ent pris traditionnellement achaque repas) le Coca-Cola et manger des hamburgers dans des restaurants fast food Leur influence s'aco'Oit de plus en plus. Ce sont eux qui detenninent Ia fonne et 1a
qualite des divers prcx:iuits industriels lls dirigent !'opinion des mass-medias et meme exercent beaucoup d'influence sur les affaires politiques. L'interet qu'ils portent a la vie politique est pourtant moins grand que celui de la generation precedente L'opinion publique porte sur eux un regard qui n'est pas toujours positif ni de bonne foi. Pour ceux qui ont consacre toute leur vie agagner de !'argent pour le developpement industriel du pays, la nouvelle generation represente l'ecroulement de leur propre legende A l'epoque actuelle de l'apres-guerre froide caracterisee par l'ecroulement d'ideologies et la reorganisation ambitieuse de l'economie mondiale qui oblige la Coree ase sourhettre ala globalisation economique et aux exigences du marche unique, la nouvelle generation leur semble annoncer une ere de confusion sans valeurs justes, notamment concernant les valeurs culturelles, qui semble etre plus qu'une simple tendance passagere Ce qui rend les choses pires encore, c'est la puissante industrie d'informations du Village Global qui ali.mente cette tendance de sensibilite denationalisee et uniforrne et de stimulation En !'absence de valeurs et d'ideaux, les artistes de la nouvelle generation laissent nean'moins une empreinte distincte dans l'histoire de !'art coreen. Leur apparition est le resultat de la croissance rapide de l'economie _ coreenne, du conflit entre la philosophie traditionnelle et conservatrice et la societe de haute technologie. Leurs oeuvres se rattachent souvent a "!'art pompier'' (kitsch), et ce qu'ils presentent est brise en morceaux et dissocie. En ce qui concerne les techniques, ils s'interessent enormement a l'audiovisuel et aux medias electroniques, ce qui est assez comprehensible etant donne qu'ils ont ete longtemps exposes a une abondance de procedes createurs d'i.mages. Leurs oeuvres sont differentes de la sensibilite contemporaine, etant exprimees grace aux suppo1ts des medias audiovisuels mcx:iernes tels que les televiseurs, la video, les journaux, les magazines, les bandes dessinees, le fax, les photocopieuses, la lumiere au neon, le laser, l'ordinateur.ou les hologrammes. Les artistes coreens de l'etranger Beaucoup d'artistes careens de tendances radicalement differentes atti.rent !'attention de la communaute internationale. Le plus connu
d'entre eux est sGrement Paik Nam-june (Paek Nam:Jun), !'artiste de l'audiovisuel, qui, conformement ason surnom de ''Pape de la video", est en train d'incorporer le media electronique ultramoderne dans son art. Lee Ufan (Yi Uhwan) qui a commence sa carriere d'rutiste et de theoricien au Japon, s'est distingue au Japon et en Europe avec sa minirnalisation de !'intuition orientale des lignes et des points. A Paris, Kim Tschang-yeul (Kim Ch'ang-ny61) mele !'esprit oriental et !'illusion optique en vue d'obtenir a partir de gouttes d'eau sur la surface peinte, un phenomene visible mais evanescent et naturel
Apres avoir suivi un stage de 17 mois au Studio de l'Anglais S.W. Hayter, Hwang Kyu-baik (Hwang Kyu-baek) est en train de travailler a New York sur la lithographie lyrique de couleurs raffinees en employant des techniques sophistiquees. En plus, des artistes comme Park Seobo (Pak S6-bo), Yun Hyong-keun (Yun Hy6ng-gun), Chung Chang-sup (Chong Chang-sop), Chung Sang-hwa (Chong Sang-hwa) ainsi que les artistes qui etaient les plus connus dans les annees 1970 se sont installes soit aux Etats-Unis soit au japon. Le sculpteur Cho Sung-mook
Paik Namjune, Relief COREE, 124xl5Jx44 em, 1991 27
(Cho SOng-muk) va exposer sa ''Serie de chaises'', oeuvres disfonctionnelles dans des musees et des galeries connus europeens au courant de l'annee 1995. Shim Moon-seup (Sirn Mun-s6p) est deja connu en Europe. Han Young-sup (Han Y6ng-s6p) qui va participer a11nternational de !'art de Los Angeles est attendu avec beaucoup d'attention de Ia part des critiques occidentaux qui apprecient ses peintures a l'encre ou les coups de brosse repetes rayonnent d'energie et de ferveur. La plupart d'entre eux sont ages d'une cinquantaine ou d'une soixantaine d'annees. Parmi les artistes qui ont Ia quarantaine, on trouve Hwang Ho-sup (Hwang Ho-sop), qui vit aParis, connu pour ses couleurs passionnees et puissantes et pour son mouvement tres rythmique. Cho Taek-ho, Kim Hyon-su et Ko Byong-jin sont en train de devenir connus. Kim Jin-soo (Kim Chin-su), artiste un peu excentrique, s'est fait remarquer par son art d'installation a Chicago. Ko Young-hoon (Ko Yong-hun) commence a percer .dans Ia communaute artistique avec ses representations acharnees autour du theme de !'existence. II realise ses oeuvres en Coree mais tient ses expositions plus frequemment en Europe ou aux Etats-Unis qu'en Coree. Le nom de Kang Jin-mo qui vit en Allemagne, est en train de se faire connaltre en Suisse et en Allemagne grace a ses sculptures de Ia nature graphiquement simples. II existe encore beaucoup d'artistes qui travaillent avec tenacite a l'etranger pour leur succes personnel et pour Ia gloire de leur patrie. C'est grace a Ia puissance Hwang Kyu-baik, economique de Ia Coree que de Cerises, 1987(en haut); nombreux artistes ont eu les Sculpture en bois de moyens de vivre a l'etranger. La Shim Moon-seup au mesure du gouvemement de lever Musee Fair de Seoul les restrictions sur les voyage a (au-dessus); KimJin- l'etranger et sur les devises a egalement encourage les artistes a soo, Environnement L s'installer al'etranger et ay travailler. 1989, (467 x 716 x 110 7 Beaucoup d'entre eux s'interessent em), installation au aux nouveaux types de medias : un centre culturel de la jour naltra peut.etre le successeur de Bibliotheque de Paik Nam-june, le grand artiste de video. Yoo Hyun-jung (Yu Hy6nChicago (a gauche) j6ng), Kim Young-jin (Kim Yongjin), Mun ]oo (Mun Chu), Cho Seung-ho (Cho Sung-ho), Hong Yoon-a (Hong Yun-a), et Choi In28
Des ¡travaux a l'encre de Han Young-sup, tels que Sans titre de 1988 ( au-dessus), sont attendus cet ete a Los Angeles. Les "Series de chaises" disfonctionnelles du sculpteur Cho Sung-mook avec Message 88-8 (a gauche) seront
exposees en Europe en 1995.
joon (Choe In-jun) sont deja sur Ia liste des successeurs potentiels de Paik. Kang Ik-joong (Kang Ik-)ung), qui vit a New York a deja "partage" Ia gloire de Paik Nam-june lors d'une exposition conjointe qui a eu lieu l'annee derniere. nsemble que ces jeunes artistes se sentent a l'etroi~ qu'ils refusent d'etre !'objet de restrictions et souhaitent mener leurs activites dans un monde plus ouve1t et plus grand que Ia Coree Ils meritent done un soutien de leur patrie y compris de Ia part du gouvernement, dans le sens ou Ia Coree a besoin d'a1tistes qui puissent contribuer a garder le domaine artistique et culture! du pays a Ia hauteur du niveau de son developpement econ01nique. Si ces artistes sont soutenus de fac;:on efficace, nous pourrons bient6t assister a un "miracle culture!" comparable au "miracle economique du fleuve Han". + 29
Sagesse de !'Orient
llirt de Seund Ja Rhee Yoonjin-sub Critique d'art/Directeur, Galerie Hyundai
e Chemin des antipodes de Seund Ja Rhee (Yi Song-ja), une serie d'images qui met en capsule une vie perturbee embrassant ¡presque quatre-vingts annees, progresse depuis le debut des annees 80. Comme un puits de lumiere sortant d'un univers d'encre noir, chacun est ne du corps d'une femme pour vivre et mourir sur terre, avant de finalement retourner a l'univers comme condamne par Ia providence: L'ame retourne aux extremites polaires de Ia terre, ou des pies coiffes de neige sont eclaires par !'eclat de l'aurore, sa demeure. Le Chemin des antipodes est aussi Ia cristallisation des cinquante annees d'art de Seund Ja Rhee et reflete Ia contemplation, Ia sagesse et le discernement que chacun glane au crepuscule de sa vie. Thematiquement c'est une continuation de La Nuit de Tourettes, une serie precedente des annees 70. Des points, gros et petits, sur un arriere-plan rose ou bleu suggerent des etoiles flottant dans le ciel. Les etoiles, regroupees dans une configuration distincte, se dissolvent dans l'espace infini qui represente l'univers, dont le vide apparent devient le point focal. D'une part, les etoiles qui flottent peuvent etre considerees comme des etres finis dans un univers infini, comme une metaphore de Ia fugacite de Ia vie humaine. D'autre part, Ia formation unique et l'echelle miniature des etoiles, qu'elles flottent dans l'univers ou qu'elles se dirigent vers les p6les, peuvent incarner Ia perspective objectivisee de Ia vie de !'artiste. En tant que critique d'art, Yu June-sang presente ceci succinctement : "La vie d'un artiste peut etre comparee a une derive dans l'univers. En fin de compte, Ia seule chose sur laquelle un artiste peut compter c'est luimeme. Cependant a cause de cette grande
L
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L'art de Rhee peut etre decrit comm.e une synthese de mysticism.e oriental et de l'eliJgante sensibilitefranr;aise, oill'artiste derive, cosmopolite, a travers I.e monde. independance, sa vie est caracterisee par Ia solitude et une perception de soi aigue. Ainsi, nous pouvons aussi dire que Ia demeure de !'artiste n'est pas du domaine terrestre mais celeste, et que le voyage de Seund Ja Rhee en tant qu'artiste peut etre compare a celui d'une derive dans le cosmos vers les poles, qui ressemble assez aux lies qui sont a Ia derive dans !'ocean". II n'est pas rare pour les grands artistes dans leurs annees crepusculaires d'exprimer
!'essence du travail de leur vie entiere, soit sous Ia forme d'une arne pure concretisee, soit sous celle de Ia beaute a travers Ia sagesse. La moelle de Ia vie de Rhee est Ia fructification de quatre-vingts annees d'epreuves et de luttes et de cinquante annees en tant qu'artiste. Rhee est nee le 3 juin 1918 dans Ia ville de Chinju dans Ia province de Kyongsang du Sud. Son pere etait un fonctionnaire gouvernemental de haut-rang et sa famille etait aisee, ce qui lui a permis d'etre eduquee a Ia fois selon Ia tradition confuceenne traditionnelle et sous le nouveau systeme occidental. Etait-ce le destin de Rhee que de vivre pendant !'occupation japonaise de Ia Coree et d'etre capable, en tant que femme, de continuer ses etudes au Japon ? Destin ou pas, Rhee a eu beaucoup de chance d'avoir eu !'occasion d'etudier au Japon dans une universite feminine. Apres trois annees d'etude, elle rentra en Coree et se maria aussit6t, a !'age de.vingt ans. Rhee mit au monde quatre fils mais le premier mourut a !'age de deux ans : ce fut sa premiere rencontre personnelle avec Ia tragedie. Mais Ia guerre de Coree fut le tournant le plus significatif de l'extraordin.aire vie de Rhee. Les immenses souffrances et les privations fac;:onnees par ce chapitre tragique de l'histoire coreenne ont amene Rhee a opter pour !'art. A travers les vicissitudes de Ia guerre, elle perdit toute sa richesse et fut obligee de se separer de ses fils en 1951, un an apres le debut de Ia guerre, pour etudier en France. Laissant derriere elle sa terre natale completement devastee, elle s'installa en France ou elle a vecu pendant les quarante-cinq dernieres annees. Pour Ia plupart des gens, Ia variable unique qui est Ia plus importante dans leur
Chemin des antipodes 92-1, 162x130 em, 1992
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lntemporel 765 jours, 160x130 en; 1975 (en haut), la Nuit des Tourettes, 150x150 em, 1979(ci-dessus)
Les formes que !'on trouve dans
les oeuvres de Rhee tirent leur
origine de !a philosopbie du yin et du yang qui est celle des
opposes complementaires. Son lang;tgJ
vient du cycle de !a
tune croissante et decroissante, dont le caractere repetitif symbolise le cycle de l'univers. 32
vie, est leurs rencontres avec les autres. En effet, plusieurs figures des ont eu une influence formatrice sur !'art de Rhee, dont Yves Brayer et Henri Goets de l'Academie Grand de Chaumieres ou Rhee est entree en 1953, deux annees apres son arrivee en France et Rodophe Buchi de !'atelier de gravure Hayter en 1957. C'est grace aBuchi que Rhee a commence a travailler Ia gravure sur bois. Gildas Fardel a contribue a son lani:ement en Europe a partir de 1960, alors que le poete Michel Butor, qu'elle rencontra pour la premiere fois en 1977, !'aida a voir le lien qui existe entre !'inspiration du poete et la creativite du peintre. Le Paris des annees cinquante, quand Rhee y arriva pour la premiere fois, etait la Mecque incontestable du monde de !'art, mais c'etait son apogee et son role declina pwgressivement dans la decennie. Bien que Matisse re\:Ut le Grand Prix de la Biennale de Venise en 1950, et que Georges Mathieu, Alfred Wols, Jean Fautrier et d'autres experimenterent la peinture "informelle", New york gagnait peu apeu de !'importance dans le moride;de !'art. Les "action paintings' de Jackson Pollock et la "Black Mountain School" conduite par John Cage representaient !'art d'avant-garde dont !'influence se repandait dans le monde entier. Cette metropole internationale impressionna Rhee quand elle y alla pour la premiere fois en 1969 pour une exposition de sa serie sur les villes. Elle fut inspiree par la perfection de l'esthetique urbaine fonctionnelle de New York et par son ordre geometrique. L'art de Rhee peut etre decrit comme une synthese du mysticisme ¡oriental et de l'elegante sensibilite fran\:aise. On n'a pas besoin de se referer ala theorie de l'art et de l'environnement de H. A. Taine qui affirme qu'une "oeuvre d'art est le produit de la mentalite, des coutumes et des traditions de l'environnement qui l'ont engendree", pour comprendre que le long sejour de Rhee en France a eu une influence decisive sur son art et justifie de son caractere "fran\:ais" a travers ses couleurs elegantes et ses formes parfaites. Mais bien que l'on puisse qualifier ses combinaisons de couleurs de "fran\:aises", les couleurs sont bien coreennes de par leur origine. Le bleu et le rouge, tels qu'on peut les voir dans les ornements faits de fils bleus et
rouges appeles norigae, sont a la base de l'esthetique coreenne. Ses couleurs elegantes et claires sont simplement des variations de tons derivees du bleu et du rouge de base. L'elegance de !'art de Rhee est le fruit des efforts constants qu'elle met dans son travail. Les formes que !'on trouve dans les oeuvres de Rhee tirent leurs origines de la philosophie du yin et du yang de celle des opposes complementaires. Son langage de formes, symbolise par le "concave" et le "convexe", vient du cycle de la June croissante et decroissante, dont le caractere repetitif est une codification du systeme cyclique de l'univers. Le principe du yin et du yang sur lequel le classique chinois 1ching(le livre des Mutations) est base, est un precepte fondamental de la culture morale de la societe confuceenne, qui a eu une grande influence sur le style de vie de la societe, sur les coutumes, les traditions et meme sur l'ornementation. La combinaison du langage des formes concaves et convexes, et de !'arrangement des couleurs bleues et rouges que !'on trouve dans l'art de Rhee est sans aucun doute enracinee psychologiquement dans son besoin de rappeler constamment son identite culturelle et raciale, comme cosmopolite derivant a travers le monde. L'attachement de Rhee asa terre natale se reflete dans ses formes symboliques, suggerant que la source de sa creativite est enracinee dans le pays ou elle est nee et ou elle a ete elevee. Apres une serie de natures mortes et de paysages crees dans les annees cinquante quand elle est allee en France pour la premiere fois, Rhee a consacre son energie a la peinture abstraite dans les annees soixante. Ses oeuvres se caracterisent par des tons jaunes chauds, differents de la lumiere solaire forte du Sud de la France et par des coups de pinceau courts et rectilignes avec la sensation de la texture d'une dent de peigne ou de paille de chaume. Le style de Rhee est sans aucun doute le resultat d'un dur travail physique, dans lequel une devotion fidele, dont son style de vie et ses relations temoignent, nee d'une vie rude, a ete tissee. Les details meticuleux et exacts de ses gravures sur bois revelent le caractere ereintant de son travail dans son traitement du bois, comme le demontre aussi l'organisa-
tion precise de ses toiles. Une telle oeuvre serait impossible sans une complete devotion. nn'est pas possible de diviser les travaux de Rhee de fat;:on stricte entre gravures sur bois et peintures. Rhee a brievement experi· mente Ia gravure a l'eau-forte sur bronze dans ses premieres annees en France, mais a juge que le metal etait trop froid. Le bois est le materiau de predilection pour Ia plus grande intimite, le bois lui offrant Ia de et !'intuition de l'univers. "Travailler le bois est comme lier un dia· Iogue secret, c'est ce que j'aime le plus au sujet du bois", a-t-elle dit une fois. "Parce que le bois est bien loin de Ia souffrance des humains, il devient un confident de confi· ance auquel nous racontons nos histoires. L'intensite d'expression, Ia force et Ia resonance du bois sont les manifestations de sa vitalite. Le grain du bois est sa volition que vous pouvez suivre ou auquel vous pouvez vous opposer. Et chaque variete de bois a ses propres demandes particulieres". La sagesse et Ia perspicacite, demontrees par tant de sensibilite pour le bois, sont un element de l'esthetique de Rhee qui ne fait qu'un avec le cosmos. En un mot, c'est une esth~iqu de Ia ligne. C'est une philosophie qui voit Ia nature sans lui nuire, qui adhere a l'etat nature! autant que possible, sans procedes, qui suit les courbes naturelles sansles redresser. Ces principes sont encore plus strictement observes dans !'architecture coreenne traditionnelle. Rhee peut relater de nombreuses anecdotes au sujet de sa relation avec le bois. Elle se souvient encore avoir ete impressionnee par les gravures sur bois d'un temple qu'elle avait visite dans sa jeunesse et qui l'ont poussee a travailler Ia gravure. Ses expe· riences avec les anneaux de croissance des arbres ont commence avec une visite chez Alberto Manelli dans le Sud de Ia France. II lui avait donne Ia permission d'utiliser pour son travail un noyer qui avait ete abattu par un orage. L'image du bois est manifeste dans les tapisseries. de Rhee comme ses installations de tissu qui ressemblent a des bannieres funeraires coreennes et ases pieces tridimen· sionnelles en bois. Elle grave des motifs tisses, verticaux et horizontaux, sur Ia surface plate d'une section transversale de bois. Sur
Yin et Yang No.1 mai 1975, 250x200 em, 1975
d'autres pieces, elle sculpte des dessins estampes, chacun etant unique, dans les anneaux de croissance du bois. Ou bien elle vaporise de Ia peinture sur du bois au-dessus d'une toile; ce qui subsiste devient Ia base de !'oeuvre. Rhee a invente d'innombrables applications et methodes pour le bois. Les codes et les symboles evoquent les motifs careens traditionnels : le signe du t'aeguk, une representation pittoresque du yin et du yang le motif en or estampe que l'on trouve sur le bord des robes hanbok coreennes, des tuiles et des briques, le motif de rayures de l'arc-en-ciel du hanbok, et d'autres parmi des symboles significatifs. Mais les motifs de Rhee ne sont pas des copies; ils sont le resultat d'une reinter-
pretation soigneuse, d'une metamorphose de Ia tradition. Ils sont, pour emprunter une expression banale, Ia "modernisation de Ia tradition" par un artiste qui q_ vecu a l'etranger. Cette reinterpretation est rendue possible par l'objectivite offerte par Ia distance spatiale. L'art de Seund Ja Rhee est le resultat d'un esprit nature! elabore a partir de son errance dans un monde de beaute semblable a une etoile filante. Bien que sa vie en tant que per· sonne cosmopolite n'ait jamais ete calme, elle n'a jamais oublie son lieu de naissance. Son dernier chef d'oeuvre, le Chemin des antipodes est l'essence-meme du voyage rude de sa propre vie et de celui de l'histoire tumultueuse de son peuple. + 33
TABLE RONDE
L'art coreen face au A la recherche d'une Mile Kim : Le gouvemement a decide que l'annee 1995 serait celle des arts. Une variete d'evenements ont ete ¡programmes, aIa fois en Coree et al'etranger. Un pavilion coreen ouvrira ses portes pour Ia premiere fois aIa Biermale de Venise. l.a Coree tiendra sa propre biermale cet au-
tomne, a Kwangju, et on attend Ia pa.tticipation d'attistes coreens lors des pri.ncipales expositions intemationales dans le monde entier. nsemble que Ia communaute artistique soit subsumee dans Ia vague de globalisation, ou "segyehuxi', qui deferle en ce moment dans Ia societe coreenne. Nous en venons aujourd'hui a discuter du role joue pru¡ l'att coreen contemporain dans le contexte de Ia globalisation Que! point de vue Ia communaute attistique intemationale a-t-elle sur !'art coreen ? Y a-t-il une identite artistique coreenne ? Dans queUe direction les artistes coreens devraient-ils s'01ienter ? Peuvent-ils etre competitifs au sein de Ia communaute attistique internationale ? Ce ne sont Ia que quelques-unes des questions que je souhaite aborder aujourd'hui. Commenc;:ons avoir que! est le statut actuel de l'att coreen M. Yu: Puisque, actuelmn~ Ia culture se diversifie et se commercialise de plus en plus, je crois qu'un etat moderne est oblige d'etudier les moyens amettre en oeuvre pom fomnir un appui al'att et aIa culture. ll n'y a pas de tendances internationales distinctes aujourd'hui. Nous assistons plut6t a un mouvement vers l'universalisation, vers une generalisation cettaine. Beaucoup pru¡Jent alors de post-modernisme, ou de post-nationalisme. On poutTait meme dire que c'est une fotme d'individualisation extreme. ratt mondial est exceptionnellement diversifie de nos ~JUrs. Quelle est Ia signification du mot "culture'' en cette epoque dite multiculturelle pluraliste, multinationaliste et post-moderniste ? I.:un des 34
monde identite problemes les plus urgents a resoudre est d'accommoder les besoins de Ia communaute mondiale et ceux du nationalisme ou de !'affiliation ethnique Nous devons alors savoir ce que c'est que d'etre coreen nnous faut identifier l'aJt contemporain coreen Mettre ajour notre propre identite est un moyen de faire un diagnostic sur l'aJt coreen Si l'on compare Ia Coree avec des pays plus avances tels que le Japon ou les Etats-Unis, on constate qu'elle n'a pratiquement aucune banque de donnees ni de materiaux de reference concernant les arts. je pense que nous devons donner Ia priorite a Ia creation d'un institut de recherche qui puisse fournir des informations exactes sur les arts de maniere ace que nous puissions avancer plus efficacement dans ce domaine. M. Rhee : A mon avis, !'art contemporain coreen a sans cesse ete tourmente pa~¡ Ia question de savoir ce qui doit etre choisi en priorite entre Ia m?C~ernit et les traditions regionales. Ces dernieres annees, Ia communaute a~tisque coreenne, tout comme Ia communaute aJtistique internationale dans son ensemble, a ete temoin
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de l'effondrement de Ia distinction qui existait ¡ entre le terme "beaux-arts" et une redefinition plus large de !'art qui comprenait plusieurs ¡genres differents. ny a une tendance mondiale qui tend a explorer les relations englobant !'art et Ia realite sociale. Je crois que les artistes coreens sont bien places dans ce courant international Naturellement, les liens que !'art contemporain coreen entretient avec le monde exterieur sont aussi Ia proie de rivalites. Les artistes coreens sont to\lpurs a Ia recherche de leur propre et unique identite, s'efforc;:ant de repondre aux tendances a Ia globalisation tout en conservant un sens a leurs traditions regionales. Mlle Kim : Professeur Lee, bien que vous soyez actuellement le president de !'Association des beaux-arts coreens, il ne faut pas oublier que vous avez plus d'experience en tant qu'artiste a travers votre participation active a des expositions en Coree et a l'etranger. QueUe est votre opinion, en tant que peintre, sur l'etat actuel de !'art coreen, en particulier si on le compare a l'epoque de vos debuts dans les annees 1970 ? M. Lee :Je suis peintre professionnel depuis environ trente ans, c'est-a-dire depuis que fai ete diplome de l'universite a Ia fin des annees 1960. En ce temps-la, mes contemporains et moimeme, nous avions re\=Uun enseignement de Ia part d'une generation d'artistes qui avaient opte pour les principes du modernisme, un genre qui fut introduit en Coree presque exclusivement par le biais du Japon l:art abstrait qui a fleuri dans le pays a partir de Ia fin des annees 1950 jusque dans les annees 1970 s'est montre extremement radical et experimental en meme temps. Cetait quelque chose de completement 36
nouveau pour les artistes coreens. Quand je regarde le passe, maintenant, je ne peux pas m'emp&:her de penser que !'art contemporain coreen est un mouvement qui a ete trop dependant des concepts occidentaux et trop uniforme dans son approche. D'un autre cote, !'art moderne coreen a seulement 70 ans si bien que nous devrions etre heureux de voir ce qui a ete accompli ¡ En realite, les changements observes ces soixante-dix dernieres annees ne sont rien si !'on compare a ce que nous voyons aupurd'hui Jai presque 50 ails, je suis en train de repindre les rangs de Ia vieille generation .. Tout change si rapidement que, franchement, j'eprouve quelques difficultes a comprendre exactement ce qui est en train de se produire aupurd'hui dans le domaine des arts en Coree. Mile Kim : Les annees quatre-vingt-dix voient une croissance phenomenale a Ia fois quantitative et qualitative En tant que conservateur, Monsieur Bhak, vous etes responsable de !'organisation et de Ia mise en place de programmes artistiques et d'expositions. Comment voyez-vous l'avenir de !'art coreen? M. Bhak : Je suis tres encourage par Ia vigueur et Ia diversite dont temoigne Ia communaute artistique coreenne d'aujourd'hui. Notre environnement change au fur et a mesure que Ia societe se modernise et s'occidentalise. I.:art mondial est naturellement concerne par ce changement Dans le processus d'un developpement economique rapide et d'une modernisation, !'art semble s'etre oriente en direction de l'occidentalisation La nouveaute et Ia difference ont remplace les valeurs traditionnelles dans de
nombreux cas. Les artistes coreens se sont rues sur les courants et les concepts artistiques occidentaux, tout comme sur les techniques. lls ont tente de les incorporer dans leurs propres oeuvres. Ce qui fait qu'ils ont eu un temps de retard par rapport a ces tendances occidentales. Les artistes coreens n'ont pmais pue un role "premier", ils n'ont pmais contribue a creer de nouvelles tendances. Par consequent, ils tendent a avoir un complexe vis-a-vis de !'art occidentaL lequel a conduit au debat sur !'affiliation ethnique et l'universalite. Ce debat a ete particulierement important dans les annees quatre-vingts, et il continue du reste a alimenter les recherches dans notre quete d'une culture nationale propre, voire unique, et de sujets en matiere de representation artistique ou d'iconographie La communaute artistique contemporaine est extremement variee. D'un cote, nous trouvons les pratiques demodees d'une ere revolue repetees avec un nouveau vocabulaire symbolique D'un autre cote, on se dirige _yers un rejet des usages et des criteres traditionnels, vers une redefinition de l'iconographie artistique existante Quelques artistes cherchent a se lier a Ia culture traditionnelle; d'autres integrent les tendances occidentales dans leurs oeuvres, les utilisant pour elargir le champ de leurs perspectives artistiques. Tout cela semble tres chaotique quelque fois, mais je crois que c'est une etape essentielle dans le developpement de !'art en Coree, une periode de transition importante La communaute artistique coreenne est en train de creer aupurd'hui toute une gamme d'art vraiment "nouveau". Mlle Kim : En ce debut des annees SXJ, de
jeunes artistes ont innove clans leur choix des medias. La technologie avancee qui est de plus en plus ut:ilisee dans les arts plastiques, est un des signes du developpement progressif que connait Ia Coree qui devient peu apeu une societe industrielle avancee. Monsieur Yu, comment voyez-vous !'art contemporain coreen si on le compare avec les courants de !'art mondial ? M. Yu : Avant de considerer les courants internationaux de !'art, il nous faut avoir un point de vue sur !'art contemporain en Coree I.:art contemporain, tel que nous le connaissons al'heure actuelle, a pris forme entre 1910 et 1920 lorsque les artistes coreens ont commence aadopter !'art ocddental A cette epoque, !'idee meme de !'art ocddental modeme representait quelque chose de nouveau, de passionnant, voire d'etrange. Dans un certain sens, les artistes coreens desiraient ardemment quelque chose de nouveau Cet etat receptif aux theories et aux techniques occidentales a dure pendant environ trente ans Puis il y a eu Ia guerre de Coree au debut des annees 1950, laquelle a ete suivie par une periode relativement vague. On a par Ia suite assiste au rapide developpement economique des annees 1960. I.:art contemporain a serieusement demarre en Coree clans Ia deuxieme moitie des annees 1960. 'Depuis, les artistes coreens ont activement pris parti pour les tendances artistiques d'avantgardes populaires en Occident. Ce fut une periode de changements sociaux intenses, de chaos politique ainsi que de reprise et de developpement economiques rapides en Coree. Mais !'art coreen ne s'est pas developpe en dehors des tendances mondiales que sont Ia peinture "active", !'art populaire ou encore !'art minimal en vogue aux Etats-Unis. Depuis les annees 1980, on assiste aun elargissement du champ d'activites artistiques aux Etats-Unis, une tendance qui s'eloigne du concept simple des ''beaux-arts'' pour se diriger vers une notion culturelle plus vaste qui touche d'importantes questions sociales a travers les medias de !'art Par exemple, l'epidemie du SIDA est decrite d'une maniere frappante dans !'art americain depuis le debut de ces annees 1990. De plus, les images complexes creees par les mass medias ont une grande signification clans Ia societe industrielle modeme, socialement parlant Le cas de !'artiste Paik Nam-june, qui travaille dans le domaine de !'art audiovse~ n'est qu'un exemple de cette tendance.
]e crois qu'il nous faut comprendre !'art con-
temporain en Coree clans ce contexte culturel Ces 30 dernieres annees, il a ete diffidle de trouver un artiste coreen ayant une vue critique ou introspective. Les artistes coreens ont ete extremement expressifs. nne fait nul doute que ceci est lie aux penchants naturels du peuple coreen Par consequ~ lorsque nous avons a decrire ce qu'est !'art contemporain en Coree d'un point de vue interao~ nous devons definir ce que signifie "etre coreen". Quelles sont nos habitudes culturelles ? ll y a toutes sortes d'habitudes acquises dans Ia fa~on de penser ou de ressentir mais aussi par rapport au travaR car . !'art est une sorte de travail Les habitudes existent dans l'inconsdent si bien que nous devons decouvrir les elements artistiques qui s'y cahen~ creer un modele et analyser les donnees. Considerant ce point de vue, il est regrettable de voir que Ia Coree n'a pas d'institut de recherche specialise dans les arts. La Coree manque serieusement de donnees sur !'art, particuliermn~ comparee au Japon ou aux Etats-Unis Nous avons besoin d'une banque de donnees consacree .aux arts. Mlle Kini : Une plus forte competitivite nationale et Ia "globalisation" de l'economie coreenne sont les prindpaux problemes qui concement Ia societe coreenne aujourd'hui. Mais nous donnons toujours !'impression de manquer cruellement de concepts en matiere d'internationalisation pour ce qui touche aIa sphere culturelle dont !'art fait partie. Cest en ce sens que votre suggestion de creer une banque de donnees concernant les arts semble etre un bon moyen pour accroitre notre competitivite clans ce domaine sur Ia scene internationale. M. Rhee : Les frontieres ideologiques clairement definies de Ia periode de l'apres-guerre ont evolue de fa~on floue ces dernieres annees avec l'effondrement du bloc sovietique et du socialisme. Nous assistons a !'emergence d'une epoque sans ideologie precise, une nouvelle periode que les Americains aiment qualifier de "multiculturelle". Ces annees 1990 ne presentent pas de mouvements artistiques majeurs, d'esprit ni de psychologie partages. Les artistes sont livres a leurs propres questionnements individuels. Les artistes careens s'avancent progressivement sur Ia scene mondiale. Les echanges internationaux se banalisent et avec le developpement de Ia technologie de Ia communication, !'information est plus largement et rapidement
YuJune-sang
Si nous avons a statuer.sur /'art contemporain careen
d'un point de vue internationa4 nous devons alors definir ce que signifie ''etre careen': Quelles sont nos habitudes culturelles ? Quels sont les elements restes caches dans l'inconscient de !'artiste careen ?
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disponible Les artistes n'imitent plus simplement ce qu'ils ont vu a l'etranger. Us depassent maintenant un simple remaniement des idees et des tendances occidentales et commencent a utiliser leurs propres mots, lesquels se montrent originaux et entierement capables de resister aux courants de !'art international Je vois dans les annees 90 une periode de vitalite sans precedents.
Bhak Young-taik
Depuis le debut des annees
1990, une plus large approche de !a peinture est en train de se produire. Les artistes careens ne se con-
tentent plus de suivre systematiquement leurs lx>mologues occidentaux. Ils expriment sur !a toile leur propre tradition culturelle, leur propre sens de l'ethnicite, elargissant leur conception de !a peinture.
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les manifestations artistiques al'etranger Mile Kim : Nous semblons etre tous cl'accord sur le fait que ces annees 1990 apparaissent comme une periode pleine d'espoir pour !'art coreen Alors, comment !'art contemporain coreen est-il pen;:u a l'etranger ? Aujourd'hui, ~ nous nous interessons a !'art contemporain en ~ Coree dans le contexte de Ia ''globalisation". Ces a; dernieres annees, les artistes coreens ont participe plus frequemment a des expositions internationales et semblent obtenir peu a peu une reconnaissance internationale. Mais je me demande ce que ]'on pense d'eux a l'etranger. Peut.etre pourriez-vous nous le dire, Professeur Lee, vo~ qui avez participe a plusieurs expositions intemiltionales ? M. Lee : Les artistes coreens ont participe pour Ia premiere fois a une exposition a l'etranger en 1%~ pour Ia seconde Biennale de Paris. lis on~ depuis, continue a prendre part a des evenements similaires. D'un point de vue quantitatif, les arts en Coree ont pris un grand esror a partir des annees 1%0. nsuffit de penser a toutes ces ecoles d'~ aux musees, aux galeries, aux artistes, aux critiques et aux conservateurs ! Nos ressources sont illimitees en ce qui conceme les artistes, mais malheureusement le soutien financier et administratif reste au niveau de celui que !'on avait au debut des annees 1960. Aux Etats-Unis, en Allemagne et dans les autres pays industrialises, le soutien apporte aux activites artistiques est spontane La Coree fait pale figure comparee aces pays. Nous ne pouvons pas seulement dependre des politiques culturelles du gouvernement. Les entreprises coreennes doivent aussi accroltre leur soutien en ce qui conceme les arts Malgre le manque de soutien local en faveur des arts, les artistes coreens ont continue a accroltre leurs activites hors de leur pays. Comme Monsieur Yu !'a fait observer tout a l'heure, !'art est une habitude du coeur et c'est dans ce sens que je pense que les Coreens sont doues d'un
vaste potentiel artistique Jai beaucoup voyage et montre mon oeuvre a plusieurs expositions internationales. A mon avis, il n'y a que peu de nations qui soient dotees d'un potentiel artistique aussi riche que celui des Coreens. Ceux qui ne sont pas Coreens jugent !'art coreen de plusieurs fa<;:ons, mais le voient generalement d'un oeil pos;tif. Nombreux sont ceux qui trouvent !'art coreen riche en termes d'ambition creative et de potentieL mais d'autres signalent une tendance a une occidentalisation aveugle et a un manque de creativite En generaL les etrangers sont impressionnes par Ia technique et Ia sensibilite des artistes coreens. M. Yu : En utilisant une metaphore, nous pourrions comparer Ia societe a un grand navire La culture est ce qui permet au navire de ne pas etre desequilibre, elle represente le lest de Ia societe La culture joue dans Ia societe le role de "quille", tout comme le fait de lester un navire l'empeche de chavirer. Nous devons accroltre notre soutien financier a Ia culture car c'est de cette maniere seulement que nous serons competitifs sur Ia scene internationale Nous devons surmonter cette conception premoderne que nous pouvons vivre sans !'art. La culture est une ressource nationale importante Mlle Kim : Ces dernieres annees, il y a eu un mouvement allant en direction d'une philanthropie sociale ou, plus specifiquement, allant en direction d'un soutien social concernant les arts. Le monde des affaires coreen doit s'engager a soutenir les activites culturelles. Que! est !'obstade majeur a l'internationalisation de !'art coreen ? Ou avons-nous besoin de nous ameliorer? M. Bhak :]e crois qu'il y a beaucoup a faire pour ameliorer le processus de selection des artistes participant aux expositions internationales telles que les diverses biennales ou triennales organisees de par le monde. Ces expositions sont dans uncertain sens des-Olympiades de I'~ elles refletent Ia competitivite artistique de chaque pays. Des artistes coreens participent aux Biennales de Venise et de Sao Paulo depuis des annees. Mais ils ont souvent ete selectionnes sur Ia base d'interets attribues a l'interieur de Ia communaute artistique coreenne ou selon des criteres scolaires ou de loyaute, plut6t que sur leur reelle representativite de !'art coreen en generaL nest aussi necessaire d'ameliorer le profil des expositions tenues en individuel ou en groupe a l'etranger. De nombreux artistes coreens ex-
posent hors de Coree rnais, franchement, il est difficile de comprendre pourquoi ils sont Ia et ce qu'ils accomplissent Le probleme, c'est que les artistes careens ont tendance a se lancer dans une activite sans preparation suffisante ou sans comprehension minimale de l'environnement local En ces annees 19<:Xl se fa~one une plus large approche en matiere de peinture. Les artistes ~orens ne suivent plus systernatiquement leurs homologues occidentaux lls expriment sur Ia toile leur propre tradition culturelle, leurs propres perceptions de !'affiliation ethnique, elargissant leur conception sur Ia peinture Cest, ames yeux, le developpement le plus positif qui puisse etre, mais il nous reste tciupurs afaire des efforts, par exemple dans le domaine de !'education artistique, afin de renforcer cette tendance M. Rhee : Comme le professeur Lee l'a note il y a quelques instants, nous avons vu une grande expansion quantitative du monde de !'art tout comme des progres qualitatifs visibles. I.:histoire de !'art contemporain en Coree est relativement courte, comparee a celle de !'Occident. Mais Ia vitesse avec laquelle les artistes careens ont progresse est vraiment remarquable. Comme le professeur Lee l'a suggere, tout ceci est peut-etre attribuable a quelque chose d'inlierent au metabolisme careen, a une partie de notre "protoplasme"pour ainsi dire )e crois personnellement que nous devrions considerer serieusement les entreprises artistiques a l'etranger. Nous ne devrions pas etre de ~ us par le manque de resultats immediats ou rnanifestes. Nous devons nous rappeler que nous n'avons fait que commencer. Nous devons penser au probleme de Ia competitivite a long terme Comme cela a ete dit, un ensemble de moyens en vue d'un soutien systematique doit etre mis en place le plus vite possible La Coree est pitoyablement arrieree acet egard Par exemple, Ia Coree et le Japon ont envoye chacun trois artistes a Ia Biennale de Sao Paulo en 1994. Les artistes pponais ont re ~ u 40 millions de yens de Ia part de Ia Fondation du Japon, alars que leurs homologues careens n'ont re~u que 8 millions de wons de !'Association des beaux-arts careens, soit moins d'un quart de ce que ces artistes pponais avaient r~u au taux de change d'alors. Quand l'economie est au ralenti, les arts et Ia culture sont les premiers touches. D'un autre cote, quand les resultats economiques sont au
beau fixe, c'est ce meme domaine des arts et de Ia culture qui est le dernier a en tirer des benefices. Tout ne va pas si bien en ce moment pour !'art aux Etats-Unis. I.:annee derniere, le budget pour Ia promotion des arts aurait ete dirninue de moitie. Pour ce qui est de Ia Coree, Ia situation continue as'ameliorer. Ce qui est entrepris semblent aller en faveur des arts plutot que d'aller a leur encontre ll y a eu beaucoup de discussions sur Ia Biennale de Kwangju qui se tiendra cet autornne, mais une chose est sOre : peu de pays sont capables de mettre sur pied une exposition d'art avec un budget de 10 milliards de wons (soit 13 millions de dollars US environ). La Biennale de Kwangju a aussi des problemes pour s'organiser mais je crois que nous pourrons les resoudre peu apeu Tout bien considere, Ia Biennale de Kwangju est pour moi une etape encourageante dans le domaine des arts. M. Lee: Le nombre des galeries a rapidement augmente ces dernieres annees. II est temps pour elles de regarder au.<fe!a du marche national et de mettre en valeur activement !'art coreen ~ . l ' etrang. Le marche actuel de !'art s'etend aux quatre coins du monde I.:art contemporain coreen ne pourra pas survivre dans ce marche global s'il reste inconnu hors de Coree Les galeries du pays doivent s'efforcer de decouvrir les jeunes artistes talentueux et de les eduquer afin qu'ils puissent rivaliser avec les artistes du monde entier. M. Rhee : Le facteur le plus important dans Ia distribution de !'objet d'art concerne Ia relation entre !'artiste, Ia galerie et le collectionneur. Je crois que le role du oitique est secondaire Les marchands de tableaux ont pue un role important depuis le debut de l'histoire de !'art. Ces marchancls, les proprietaires de galeries, ont toupurs ete al'origine de Ia decouveite des artistes et sont ceux qui les ont soutenus. ll est temps pour les galeries coreennes d'aiTeter de dependre des artistes avec des objectifs commerciaux a court terme et de commencer a elargir les recherches en vue de trouver des talents avec un potentiel along teime M. Lee : Les critiques d'a1t et les conservateurs de musee ont aussi un role important a puer pour faire connaitre les artistes careens a l'etranger. Dans un certain sens, il y a les prograrnmeurs qui con ~ oivent les logiciels en vue d'aider ceux.Q dans leurs activites. Presque tous les artistes nationaux dependent de gale1ies com-
RheeJong-soong
Pour ces annees 1990, i.es artistes careens sont livres a leurs propres questionnements individuels. Ils ant transcerzde le simple remaniement des idees occidentales qui avait cours jusque-la et ant commence
a dRvelopper une argumentation puissante, originate et capable de resister aux courants de !'art international
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merciales. Cest un serieux defaut structure! dans
!'accent ? Nous pouvons tenter d'exprimer l'identite coreenne dans le travail de I'~ mais cela ne signifie pas que nous reussirons. Une expression Problemes d'identite superficielle du "caractere'' coreen peut stimuler Mile Kim : En cette ere de Ia globalisation, une certaine curiosite chez les non-Careens En Ia question de "l'identite artistique" en Coree apparence, "etre oriental" c'est difern~ mais en attire beaucoup !'attention. Tandis que beau- fin de compte cela n'a pas de veritable coup se referent a Ia pertinence de l'identite consequence pour !'art en lui-meme nationale, le sort de l'identite personnelle de Prenons le cas de Paik Nam-june, par exem!'artiste pris individuellement parait aussi im- ple Cest un artiste qui s'exprime par le biais de portant En d'autres termes, !'art en lui-meme l'audiovisuel et qui est monclialement reconnu, represente une recherche d'identite. Comment mais franchement, nous les Coreens, nous ne vous representez-vous l'identite artistique de Ia pouvons guere nous enorgueillir de ce qu'il fait Coree au sein de Ia communaute artistique in- nest ne en Coree mais il a ete eduque au Japon, il a trouve son inspiration artistique en Alleternationale ? M. Bhak : Je pense que les artistes coreens magne et il est devenu celebre aux Etats-Unis. doivent se soucier de deux problemes Neanmoins, les critiques etrangers clisent que son specifiques. D'abord, ils doivent avoir une vue art est ne d'un esprit oriental speculatif. Un cer¡large de cette idee meme du "media du visuel", tain sentiment coreen est naturellement incarne appele ''peinture". Tis doivent transcender l'infirne dans son oeuvre Udentite coreenne n'est pas quelque chose signification sensorielle, conceptuelle et formelle de Ia peinture pour decouvrir son caractere fon- que !'on peut creer intentionnellement Si nous damental. Ensuite, ils doivent constamment nous obsedons arechercher cette identite, nous reexaminer leur propre societe, leur propre cul- ne Ia trouverons certainement pas. Pour un ture, pour que, finalem~ leur peinture soit en- artiste, c,e qui irnporte n'est pas une nation mais racinee dans leur propre sensibilite culturelle na- l'inclividUalite Tous les artistes ont leurs propres racines. tionale Cest bien plus que de chercher asavoir Ces racines sont exprimees dans leurs oeuvres. comment deaire notre identite coreenne M. Lee : Jai une fois entendu un professeur La question de l'identite ethnique est naturellemais une fixation specialise dans les sciences de !'alimentation par- ment un probleme irnpota~ ler du regime alimentaire des deuxieme et hors de proportion sur cela ou sur toute exprestroisieme generations de Coreens vivant aux sion artificielle de ce que nous crayons etre Etats-Unis. ll avait clit que ceux qui etaient nes et notre identite nationale ne fera que miner notre vivaient dans Ia societe americaine et n'avaient ambition d'etre reconnus dans Ia communaute jamais goute a Ia cuisine coreenne commen- artistique internationale M. Bhak : I:art de Coree ne recevra une c;:aient aIa desirer intensement vers !'age de quarante ans La nourriture coreenne est "dans leur evaluation juste de Ia part de cette communaute sang" ou, comme M Rhee !'a suggere, dans leur artistique internationale que lorsque nous aurons "protoplasme". Je pense qu'il en va de meme cree un systeme objectif et equitable pour pour !'art. Nous avons eu beau accepter une evaluer nos artistes. De nombreux problemes grande partie de !'art occidental, mais au plus apparaissent toujours dans le processus de selecprofond de nous-memes sommeille un tempe- tion des artistes devant participer a des exposirament ou une sensibilite artistique qui emerge tions internationales. De temps a autre, des de fa\:On naturelle au fil du temps. Les artistes artistes coreens n'ayant aucune affinite pour les coreens ont beau suivre une approche occiden- tendances de !'art monclial ont ete choisis pour tale, al'inteiieur d'eux-memes se trouve toujours participer a des expositions et ont fini par¡ emun fond coreen. Exprirner !'affiliation ethnique banasser leurs compatriotes. Nous avons besoin ne peut pas se realiser d'une maniere consciente d'un systeme sain par lequel nous pourrons M. Rhee : Preciser quelle est "l'identite evaluer chaque aitiste avec precision et equite. M. Lee : La division internationale de !'Associacoreenne" n'est pas une chose facile. Devrionsnous suivre le courant mondial qui tend a tion des beaux-arts coreens a pris Ia responl'universalite ou converger vers nos propres tra- sabilite de Ia selection des aitistes participant a ditions regionales ? Ou devrions-nous mettre des evenements internationaux. En tant que Ia communaute artistique coreenne
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president de !'Association, ce probleme me concerne de tres pres. Nous avons beaucoup d'artistes en Coree mais seule une toute petite minorite a, parfois, Ia chance de prendre part a une exposition internationale majeure. C'est pourquoi il y a toujours une certaine effervescence lors de Ia selection des canclidats. En fai~ de nombreux jeunes artistes sont tres interesses par !'idee de se joindre a des evenements internationaux. Je ferai de mon rnieux al'avenir pour rendre Ia selection des juges plus equitable M. Rhee : Tandis que Ia question de savoir qui est selectionne constitue un probleme irnportan~ nous devons aussi reconnaitre !'importance du nombre d'artistes aenvoyer. Par exemple, les Coreens ont ete discredites l'annee demiere aIa Biennale de Sao Paulo quand nous avons essaye d'envoyer neuf artistes, ignorant les lirnites irnposees par les organisateurs atrois participants. Finalem~ il nous a fallu reduire notre delegation atrois artistes apres que les organisateurs se soient plaints, ce qui a cause l!fl grand embarras. Comme je l'ai deja eli~ ces expositions internationales ressemblent beaucoup ades Olympiades. La competition est rude Des artistes des quatre coins du globe y participent Tout le monde ne peut pas etre un artiste de classe moncliale Tous les artistes ne sont pas amenes adevenir celebres. Nous devons trouver un moyen d'identifier les vrais artistes talentueux et de concentrer notre soutien aleur egard ll faut aussi nous rappeler que ces expositions et festivals internationaux portent habituellement sur des themes specifiques et nous devons etre surs de pouvoir selectionner les artistes sur cette base. Par exemple, le theme pour Ia Biennale de Sydney en 1990 fut Readymade Boomerang (Le boomerang tout fait). Les organisateurs avaient alors essaye de montrer comment !'art-objet avait evoiue depuis Duchamp. La Biennale de Sao Paolo en 1994 a eu pour theme celui de !'ait du milieu, explorant les changements dans le concept de !'art d'installation depuis Ia peinture combinee de Raushenberg. nest vrai que les aitistes incapables d'assirniler !'objet et le geme des installations vont connaitre des temps difficiles pour s'adapter aux festivals d'art internationaux dans les annees a venir. La plupart de ces festivals explorent de nouvelles o1ientations en matiere d'art moderne Tis sont !'occasion de competitions et d'echanges
entre les jeunes artistes. Le processus national de elle de nos ressources humaines. Dy a naturelleselection des artistes doit refleter cette tenclance ment eu et il continuera a y avoir de nomM. Bhak : En Ocddent, de nombreux jeunes breuses critiques negatives. Mais nous ne deartistes font leurs debuts sans avoir a broyer du vrions pas les considerer comme des critiques noir. On leur donne carte blanche et beaucoup formulees pour le plaisir meme de critiquer. d'opportunites pour faire valoir leurs talents. Les Nous devrions plut6t comprendre ce que cela gouvemements ocddentaux prennent soin de nous apporte pour savoir ce que sera le futur. leurs jeunes artistes par le biais de politiques cul- En tout cas, je pressens pour !'art coreen un turelles. Ce n'est pas le cas en Coree Nous pou- avenir brillant, riche en possibilites. v~ns tenir nos propres expositions internaM. Lee : 'Tinternationalisation'' de !'art coreen tionales mais quand on doit en selectionner les ne va pas se faire en une nuit Ce n'est pas le partidpants, les artistes a!nes deja reconnus sont genre de problemes qui peuvent se resoudre toupurs choisis. nn'y a pas d'innovation, pas de facilement, neanmoins cela peut etre possible si nouveaux visages. les gens travaillent ensemble La communaute nest temps que nous commendons anous artistique ne peut pas le faire d'elle-meme. occuper activement de nos jeunes artistes dy- rinternationalisation de Ia communaute artisnamiques atravers des politiques culturelles. Nous tique est etroitement liee a Ia culture en general, devons former nous-memes des artistes a l'economie et a notre force en tant que nation c6mpetitifs sur Ia scene mondiale Nous ne pou- Toutefois, compare ail y a seulement quelques vons pas attendre que des etrangers les decou- annees de cela, Ia communaute artistique vrent coreenne attire considerablement plus !'attention M. Yu : Nous devons avoir une attitude plus aupurd'hui sur Ia scene mondiale active Nous n'envoyons pas de simples objets Mile Kim : Une vision a long terme avec d'art a ces expositions internationales, nous en- pour interet Ia comprehension des courants invoyons des produits artistiques. Cest trop facile ternationa)JX est essentielle Nous avons atteint de croire que nous pouvons tout simplement at- un point oil chaque artiste doit y mettre du sien terrir !a-bas parce que !'art est "pur" et "non-com- pour mettre en valeur son propre potentiel. merdal". Les temps ont change. Le monde de !'art Nous pourrions peut-etre terminer avec une international est un champ de bataille culturel breve discussion sur les artistes coreens se trouNous devons disposer d'un organe professionnel vant a l'etranger et estimes par Ia communaute qui soit capable de fournir un soutien aux acti- - artistique internationale vites des artistes coreens al'etranger par le biais M. Yu : On se doit de choisir Kim Whan-ki de relations publiques et d'une planification ou Paik Nam~une puisqu'ils sont connus en tant qu'artistes cosmopolites ayant eu du succes a systematique M. Rhee : En un mot, Ia communaute artis- l'etranger. Kim entre dans le moule modemiste tique coreenne souffre de problemes de fond tandis que Paik pourrait etre qualifie d'artiste tels que le manque d'informations sur les ten- contemporain roeuvre de Kim intitulee ''Nous dances de !'art mondial, des difficultes certaines nous retrouverons quelque part d'une maniere quant a!'organisation, des ressources finanderes ou d'une autre", qui a remporte le Grand Prix de insuffisantes ainsi qu'une confusion administra- l'epreuve artistique organisee par le quotidien tive Cependant nous ne devons pas oublier que 'Hankuk Dbo" en 1970, reflete !'imagination fer!'art contemporain coreen est encore jeune Dest tile de !'artiste Paik, naturellement, est le pere de pour ainsi dire dans sa periode d'adolescence. Ia communaute mondiale des arts audiovisuels Personne ne peut dire comment il evoluera mais Dest connu pour son intuition remarquable, sa il nous faut supposer qu'il est potentiellement connaissance et son humour. Kim et Paik sont riche. Nous gagnerons en experiences et for- tous les deux des artistes coreens internationaux merons des talents qualifies a travers des Mais Paik Nam-june est indeniablement celui qui evenements cotnrne Ia Biennale de Kwangju a le plus contribue a moderniser et a internatioNous pouvons aussi esperer dans le retour at- naliser !'art coreen Mile Kim : I;internationalisation de !'art tendu de nombreux etudiants apprenant maintenant l'histoire de !'art ainsi que Ia gestion des bi- coreen a certainement besoin d'artistes ens attistiques a New-York eta Paris. Nous assis- courageux et determines comme Kim et Paik et tons de fac;:on tres claire a une expansion gradu- aussi d'une communaute artistique eclairee +
~ ~ Lee Doo-shik
Nos ressources sont illimitee.s en ce qui concerne les artistes, mais malheursn~
le soutien financier et
administratif stagne et est comparable a celui du debut des anru!!es 60. Les entreprises coreennes
devraientfaire plus de
mecenat pour les arts.
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rart contemrnrain careen Suh Sung-rok Critique d'art, Professeur d'histoire de !'art
al'Universite nationale d'Andong
a premiere partie des annees 1990 semble avoir ete une epoque tournee vers Ia creativite individuelle en meme temps' que vers le pluralisme stylistique. Certains critiques ont decrit ces dernieres annees comme une "periode sans ideologie, ou seule comptait Ia mode", mais c'est en fait le resultat de l'epoque sombre des annees 1970 et 1980. II y a toutefois un revers a Ia medaille de cette nouvelle liberte : ces dernieres annees ont vu une rapide augmentation du nombre des galeries d'art, mettant en danger le marche de !'art. Des peintures "jolies", "agreables", "charmantes" sont produites en m~se comme s'il s'agissait de produits destines a etre exposes en grand magasin, et de nombreux artistes sont tombes dans le piege de Ia mode de !'art de consommation. Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres de faillite de Ia communaute artistique coreenne devant Ia logique mercantile moderne. Ce qui est encore plus grave c'est que nous semblons incapables de nous adapter ace phenomene. C'est peut-etre pourquoi le monde de !'art attend tellement des jeunes artistes qui font leurs debuts aujourd'hui. Les gens ont fini par se Iasser de !'art ancien. lis attendent quelque chose de nouveau, et semblent prets a accepter toute tentative pour secouer Ia lethargie qui caracterise les artistes etablis. Les jeunes vont et viennent, mais les attentes sont toujours les memes, car les jeunes sont habiles a reconnaltre les problemes et a y apporter des solutions.
L
De nombreux facteurs entrent en ligne de compte chez Ia nouvelle generation : individualisme vivace, expression personnelle tres forte, amelioration du niveau de vie, etc... Generalement, les jeunes preferent les 42
valeurs anti-materialistes a celles du materialisme et veulent exprimer librement leur identite et leurs desirs. C'est pourquoi !'emergence d'une nouvelle generation represente un bol d'air frais pour le marche de !'art coreen. De !'oppression d'autrefois aIa liberte durement acquise d'aujourd'hui, les artistes stimulent le monde de !'art. Alors que dans certaines oeuvres, le style est confus, le theme et le contenu encore bancals, Ia fracture avec !'art du passe semble bien etablie. Nous allons maintenant examiner les activ~s. de groupe ou individuelles, de Ia nouvefle generation apparue au debut des annees 1990, quelles en sont les caracteristiques principales, quels problemes ils soulevent dans le monde de Ia peinture, ce qui les differencie des peintres etablis et ce qui relie le sens artistique des ces generations. Le fil conducteur des annees 1990 est, plus que Ia surface, l'espace, ce qu'on appelle "!'installation". C'est Ia forme d'art qui se developpe le plus rapidement aujourd'hui. Depuis 1990, Ia plupart des expositions de groupe ont eu pour theme les installations ou toute autre forme tridimensionnelle. C'est tout particulierement vrai pour les expositions et autres evenements organises par les groupes de jeunes artistes ayant anime le debat sur !'art. Les artistes d'installation refusent de se confiner aux limites de !'art a deux dimensions. C'est Ia nature de leur expression artistique, "!'art media". Non seulement Ia source de leur inspiration differe de celle des autres artistes, mais leur panel d'expressions est plus diversifie, plus varie, plus emotionnel. Le defi des jeunes artistes Une caracteristique propre aux artistes des annees 1990 a ete !'emergence de groupes de
jeunes artistes faisant des "declarations personnelles" sur !'art. Ces declarations concernent generalement !'expression personnelle, l'individualite et une variete etourdissante de methodes de presentation. Un certain nombre de facteurs distinguent cette generation de ses predecesseurs. Ceux-ci rompent avec les normes artistiques pour creer de nouveaux genres comme le melange de moyens d'expression, le style "retro", "!'assemblage" ou le "kitsch". lis ont egalement commence a utiliser des marques commerciales et le multimedia dans leurs travaux. Ayant grandi dans !'ere de Ia television et du cinema, ces artistes ont une experience de Ia vie differente de leurs alnes qui n'avaient connu essentiellement que Ia presse ecrite. La ou Ia generation de Ia presse ecrite est rationnelle, logique, contr6lee, et poursuit un meme but avec les memes valeurs, les artistes de Ia generation de !'image des annees 1990, ages d'une trentaine d'annees, sont emotionnels, instinctifs, et s'expriment en fonction de ce qu'ils ressentent. lis ont une vision ouverte de Ia vie et de !'art, et rejettent !'heritage culture! des annees 1970 et 1980. Parmi les nombreux groupes artistiques formes par Ia jeune generation, le groupe Museum, fonde en 1987, est un pionnier. Dans le manifeste commemorant Ia premiere exposition du groupe, les membres annoncerent leur refus "d'etre classes sous aucun genre ou groupe artistique". lis rejettent Ia categorisation car elle limite Ia liberte individuelle esthetique. Leur determination a rester libres est evidente dans leurs experimentations. lis utilisent tous les moyens et tous les materiaux pour s'exprimer, que ce soit le collage, le dessin, !'assemblage, le papier, l'acrylique, le tissu, etc..
'en est-il aujourd'hui? Le mouvement experimental de Museum a ete repris par un certain nombre d'autres groupes. Sub Club, fonde en 1990, insiste sur le fait que le realisme ¡et le modernisme ne representent a leurs yeux "rien de plus qu'une tele noir et blanc". La pomme doree (1990), Off and On (1991), Bio Installation, H6nhwaga partagent tous la meme indifference, vis-a-vis des questions socio-politiques et de la logique rigide de l'ancienne gene-ration. D'autres groupes comme Green Heart, Azalee, Structure Bleue, Time Capsule, Team Spirit partagent egalement cet esprit d'avant-garde. Ces groupes sont generalement concernes par l'environnement, l'ethique tra-
ditionnelle et par les problemes lies au processus de modernisation, mais comme pour les autres jeunes artistes, en ce qui concerne les valeurs et le style, le pluralisme est de rigueur. En matiere de contenu, il existe un reel fosse esthetique entre la jeune generation et les artistes etablis. Les jeunes artistes ne souffrent pas des complexes ideologiques des annees 1980. De plus, ils ne se limitent pas au media qui prevaut chez leurs alnes, c'est-adire a !'art a deux dimensions. Ils essaient de construire leur propre monde artistique, base sur la litJerte; se livrant a des experiences sur des methodes et des materiaux nouveaux,
comme la television, !'animation, la publicite et les autres medias visuels. Ils utilisent des equipements high-tech, comme la video, le graphisme informatique, les hologrammes, le laser, la realite virtuelle. Bravant les tabous traditionnels, et explorant le "moi de !'artiste", ils construisent des vagues labyrinthiques de sujets conscients, erotiques ou sans significations. L'utilisation des medias electroniques est devenu populaire recemment, signe' de la creation d'un mouvement nouveau. Les deux dernieres annees ont vu !'apparition de toute une serie d'expositions d'art electronique comme "Art et Technologie', "Le Jardin
./
Hong Sing
- i~
Sans titre, 1993
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Tbeoriqw!', "Science et Art', "Art Teci:J', "Diet', "Art et Photographie', "TV Art Seoul 93', "Expo 93 Techno-Art', "Telecommande'. Bien sur, tout ce qui concerne cette jeune generation n'est pas "nouveau". Certaines methodes et certains materiaux etaient deja utilises par les artistes reconnus jusque-la Ce qui distingue Ia jeune generation, c'est sa conscience creative. lis transcendent !'approche "contemplative", observee dans les travaux a deux et trois dimensions de leurs predecesseurs, par une experimentation technologique, elargissant Ia vision esthetique du spectateur et creant une experience "complexe" pour "tous les sens". Pour ces artistes, !'experience artisqu~ implique plus que Ia simple vision. Elle est etendue a !'audition, au toucher et meme a Ia participation au proces.sus de creation. Le lien avec Ia technologie devient de plus en plus important avec !'apport de Ia television et de Ia video, qui renforce Ia realite d'une oeuvre d'art, en vitesse et en synchronisation. Le processus de creation artistique se trou-
ve transforme a travers cette technologie et le multimedia. Par exemple, !'introduction de !'art dans le commerce, comme a Ia television et dans Ia publicite, sert parfois d'avertissement contre les fantaisies sensuelles de Ia consommation et de Ia commercialisation du sexe, meme dans sa representation de Ia disparition entre !'art noble et !'art commercial dans notre culture. D'autre part, cela peut contribuer egalement a Ia creation d'une autre forme de fantaisie et de desirs dans notre societe de consommation. II faut se souvenir que les membres de ces nombreux groupes "travaillent ensemble". lis ne partagent pas toujours Ia meme ideologie artistique. La plupart des jeunes artistes trouvent Ia poursuite d'un but commun etouffant. Ils se reunissent a l'interieur d'un groupe par necessite et le quittent quand ils n'en ont plus besoin. Le resultat en est que ces groupes encouragent les actions exagerees, les idees brillantes et les techniques innovatrices. Alors que !'experimentation de nouveaux medias est encourageante, elle devrait
etre un moyen pour reagir contre le courant general, non pour le detruire. Une critique culturelle Certains jeunes artistes ont une approche critique en examinant les processus d'industrialisation et de commercialisation et leurs relations avec le monde de !'art. Cela se produit generalement dans le cadre de groupes temporaires, crees pour une exposition, comme "Ah, Coree !" (Gallerie Chahamun, 1992), "Rejlexions sur !'Art" (Musee de !'Art Kumho, 1993) ou "Cette Nostalgie de !'Art " (Musee de !'Art Kumho, 1994). Ces artistes mettent !'accent sur le probleme du rendu de Ia realite derivee d'images. Pour eux, le travail artistique sert de code menant vers un monde subjectif. Ces travaux, intelligemment presentes pour plaire a notre societe de consommation, servent de critiques culturelles. Dans les annees 1990, les jeunes artistes commencerent a avoir une approche plus critique et a examiner Ia cohesion superficielle, l'harmonie et l'ordre simplistes de Ia societe
traditionnelle coreenne. Un groupe, connu sous le nom de Pulmo (sterilite) traite des problemes lies a Ia modernisation, comme le materialisme, tandis que le groupe Shinch'on examine l'esthetique de !'emotion, en opposition a l'esthetique de Ia logique. Un groupe de femmes artistes, Trente Carats, s'occupe des problemes des femmes et cherche a rivaliser avec les concepts esthetiques de Ia domination masculine. Ces trois groupes ont brillamment mis en lumiere les problemes actuels de Ia societe, tout en respectant les criteres de !'experimentation artistique. Pulmo, cree en 1993, a organise trois expositions de groupe a Seoul. Ses membres se sont rencontres au c01.irs de leurs participations a une serie d'expositions organisees par !'Association des "Post-Artistes". A travers ces representations, ils en vinrent a mettre !'accent sur Ia civilisation moderne et en 1993 fonderent leur propre groupe. A cette epoque, les membres "condamnerent Ia sterilite de Ia civilisation moderne". Leur vision de Ia societe moderne est critique, et parfois tragique. An Won-ch'an utilise des surplus militaires pour depeindre une realite ou le materialisme est omnipresent. Yi Hilisop I_IlOntre Ia confrontation entre Ia nature et Ia civilisation urbaine a travers Ia superposition de diapositives de S(:enes urbaines et de nature. Yi Chun-mok decrit Ia tension psychologique a travers des morceaux de viande accroches a des crochets de boucher. To Pyong-hun raconte l'histoire du desespoir humain a travers des scenes de dissection. Meme si le contenu des travaux de ces artistes est important, ce qui est unique chez ce groupe, c'est leur tendance a examiner les problemes de Ia vie courante a travers des moyens artistiques abstraits. Pour ces artistes, "!'abstraction" n'est plus une valeur esthetique fixe ou une technique decorative. Pour les modernistes traditionnels, elle signifiait Ia separation du moi interieur et de nos ¡desirs du monde exterieur. Mais les artistes de Pulmo utilisent !'art abstrait pour montrer une realite externe. Ils reduisent Ia richesse des qualites artistiques et articulent Ia forme et Ia structure de !'art abstrait de fa ~on a creer un sentiment totalement nouveau de durete, de tension et de nudite. Ce sentiment se manifeste differemment selon les artistes.
Installation de Yi Hy6ng-u, 1993
Les travaux d'An Won-ch'an refletent une solitude froide et sombre. Yi Hili-sop nous montre un spectacle gla~nt d'inharmonie. Yi Chun-mok nous presente des images cruelles et terrifiantes, pendant que To Pyong-hun utilise des lettres et des codes sans significations. Dans les travaux de To et de Yi Hilisop, l'histoire familiale et personnelle jouent un grand role dans Ia representation de themes plus vastes comme Ia douleur de Ia division du pays ou Ia perte des traditions. An Won-ch'an utilise le vert pour symboliser Ia vie qtl'il met en contraste avec des scenes montrant Ia dechirure de Ia civilisation. Yi Hili-sop essaie de donner un nouveau sens aux concepts traditionnels de totem, de chamanisme, ou de geomancie, pour faire revivre "l'histoire perdue" de Ia Coree. Les methodes peuvent changer selon les individus, mais en tant que groupe, ils partagent l'objectif de travailler en commun a l'avancement de !'art contemporain et au developpement de nouveaux sens dans !'art abstrait. La jeune generation se distingue aussi par sa preference esthetique pour le sensuel plutot que pour le logique. Le groupe Shinch'on, fonde en 1993, en est un bon exemple. Depuis son exposition inaugurate au Kongp'yong Art Center, le groupe en a organise deux autres dans Ia region de Seoul, sous le theme de "L'ecologie dans Ia vie quo-
tidienne". La vie quotidienne qu'ils depeignent dans leurs oeuvres a un caractere fugitif et quelque chose d'inevitable, prenant Ia forme d'images suspendues au-dessus d'une scene. L'aura est incertaine et ambigue. Un instant les images sont Ia, !'instant d'apres on ne les voit nulle part. Cela semble peut-etre nature! a une generation familiarisee avec des phenomenes temporaires comme les images de Ia television. Pour eux, les experiences sensorielles passent avant toutes les autres. Quand Ia sensation passe avant le contenu, l'esthetique est momentanee et sensuelle et une esthetique d'un en~agmt detache. L'art ne represente pas les sens humains dans ce cas, mais plutot ce sont les sens qui produisent l'esthetique de chaque oeuvre. Les travaux du groupe Shi1ich'on se detachent du concept traditionnel de !'art, qui a pour but essentiel de delivrer un message. Leurs images parlent pour eux. Un fil de fer tordu, un moteur rampant au sol comme un insecte, une piece remplie de boltes en carton et de plastique a en rendre claustrophobe, une horrible chaise-roulante en piteux etat, un livre qui ne peut etre lu : le sens est perdu, mais un nouveau sens de couleurs et de formes apparalt a Ia place. Conscience de soi et dependance, pertes et peurs, toutes ces petites pensees sont portees au-dela de leurs 45
limites. Les signes et les reactions entre !'artiste et le spectateur sont extremement intenses et le resultat en est une sorte de nar¡ cissisme. Les artistes utilisent toutes sortes de methodes pour realiser ce narcissisme. Des morceaux d'objets sont juxtaposes de maniere etrange, chaotique. Rien ne semble fini. Rien ne semble etre asa place. Ce groupe met !'accent sur "l'efficience" d'un media quant a ses caracteristiques uniques. Pour ces artistes, "l'efficience" fait reference a l'effet visuel qu'inspire le media, et non le message qu'il vehicule. lis mettent !'accent sur "l'efficience" car ils essaient de rendre atmosphere, sentiment, emotion, image et style de vie. Dans cette forme d'expression complexe et momentanee, i1 expriment des reves, des desirs, de Ia nostalgie, un desir physique et une psychologie qui ne peuvent etre captures dans une structure linguistique.
Yom Chu-gyOng, Tissu, 1994
La plus grande contribution des j@tnes artistes a ete lbuverture
qu'ils ont realisee vers le pluralisme et l'individualisme. lis ont ouvert Ia voif? a de nouvelles idees, en marg:; du courant etroit qui domi-
nait}usque-/a et defini une nouvelle relation entre l'art, Ia culture et Ia societe. 46
Toutefois, !'interet de ces jeunes artistes ne se limitent pas a cela. lis s'occupent d'un grand nombre de sujets, comme cela apparait dans les travaux du groupe Trente Carats. Le nom du groupe est une metaphore des artistes : ils sont tous dans Ia trentaine et pensent que les femmes ont beaucoup de valeur. Le groupe a ete forme pour "prouver que Ia vie des femmes peut etre sujet artis¡ tique et peut aider chacun aatteindre ce but". Pour le moment, ils ont mis !'accent sur Ia decouverte de l'identite et du potentiel femin~. Dans leur exposition inaugurale de 1993, ils s'etaient penches sur Ia decouverte de Ia femme par elle-meme. Leur seconde exposition avait pour titre "La realite masculine : le classicisme secoue ", et leur troisieme "Trouvons nos racines ". Ce grour_e a fait une tentative serieuse de regard sur les traditions et l'identite coreennes a travers les yeux de femmes vivant dans une culture dominee par l'homme. Ha Min-su et Yi Sung-yon utilisent des reliques de Ia societe traditionneUe chauviniste, comme des genealogies et des cordes, pour parler de Ia discrimination sexuelle. Yom Chu-gyong met en parallele les rituels chamaniques executes par les femmes et les rites confucianistes, executes par des hommes. Les installations de Ha Sang¡ nim et les peintures a l'huile de Im Mi-ryong representent les femmes en tant que
Pak Chi-suk, Une tranche de jour, 1994
minorite privee d'identite. An Mi-yong juxtapose des scenes de nature avec le corps humain pour mettre !'accent sur le role du corps de Ia femme comme source de vie. Pak Chi-suk a une approche similaire de Ia feminite, utilisant le symbole du t'aegilk Kim Mi-gyong exprime !'importance de Ia maternite au travers d'images folkloriques de femmes brisant des oeufs. Yi Hyon-mi cherche une identite dans Ia relation perefille. Ch'oe On-gyong lie le passe au present a travers differents medias, utilisant des ecrans de television et des objets traditionnels de cuisine. Perspectives d'avenir L'une des grandes preoccupations de Ia jeune genet:ation est de se liberer des valeurs traditionnelles et d'exprimer librement les desirs de l'humanite opprimee. Toutefois, tous n'y sont pas arrives. Certains sont tombes dans le piege de Ia consommation et
des mass-medias, ne comprenant pas ce qui se trouve sous Ia surface d'un tel phenomene. Le travail de Ia jeune generation est toujours ouvert au debat et a !'analyse, car c'est un phenomene culture! actuel. Mais egalement parce que les travaux de certains artistes sont encore a l'etat brut et manquent de raffinement. Leur talent n'est pas toujours a Ia hauteur de leurs ambitions. II y a ici un danger : ces jeunes artistes peuvent voir leur liberte d'expression emotionnelle se transformer en auto-indulgence. L'individualite peut facilement devenir une repetition fastidieuse et les caracteristiques qui definissent Ia jeune generation pourraient bien designer bient6t "Ia vieille generation". Plus importante encore est Ia question du futur. Qu'est-ce qui attend cette generation ? Leur plus grande contribution jusqu'a present fut Ia creation d'un espace d'individualisme et de pluralisme. lis ont ouvert le chemin pour
de nouvelles idees, se liberant de l'etroit courant dominant et definissant une nouvelle relation pour !'art, Ia culture et Ia societe. En resume, ils essaient de se liberer de !'approche realiste a Ia realite. lis ont prouve que Ia vie ne peut pas etre comprise a travers un concept unique aussi ferme. lis ont pris le parti d'une approche ouverte, experimentant et exprimant Ia realite comme une entite flexible et multidimensionnelle. Dans notre monde moderne, Ia conscience n'est plus dominee par une seule tradition ou ideologie. Ces jeunes artistes, en essayant de s'attacher a tous les aspects de Ia vie d'un point de vue individuel, ont reussi quelque chose qui a de Ia valeur en cette epoque de fluidite. Sous les vies individuelles, les identites et les experiences decrites par ces artistes, il y a bien d'autres elements de verite qui seront redefinis et nous seront devoiles dans le futur. + 47
L'art coreen d'aujourd'hui
Etat des lieux KimDal-jin Archiviste du Musee national d'Art contemporain
L'
annee derniere, ont ete organisees plus de 5000 expositions. De plus, environ 7000 etudiants en beaux-arts a travers le pays ont termine leurs etudes universitaires. Rien qu'a seoul, 27 galeries ont ete nouvellement ouvertes. Ce rythme de croissance ne semble pas vouloir s'arreter : cette annee fete le cinquantenaire de Ia liberation du colonia-lisme japonais. En plus, 1995 a ete decretee par le gouvernement "annee des beaux-arts". Bien sur, !'art coreen n'est pas encore au niveau de celui de !'Occident mais malgre son histoire courte, il a connu un progres remarquable et s'est transforme profon-dement. Bien que !'art coreen n'ait pas connu
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l'etape de l'epoque moderne depuis Ia liberation jusqu'a nos jours, les plus grandes realisations en sont Ia creation et !'expansion des institutions d'enseignement artistique. Ce qui suit est un aperc;:u sur !'evolution des musees, des galeries et des etablissements artistiques publics ainsi que sur l'histoire des artistes, conservateurs, critiques et specialistes. Bases sur des faits, j'examinerai ici l'etat actuel de l'art coreen, son evolution et son histoire ainsi que !'art coreen a l'etranger.
Les musees A part le Musee national qui se trouve a Seoul, il existait en 1994, 22 musees d'Etat
dans les grandes villes comme Ky6ngju, Kwangju, Ch6nju, Ch'6ngju, Chinju, Puy6, Taegu et Kongju. Si on comptabilise les musees inscrits en vertu de Ia loi pour Ia promotion des musees, le chiffre s'eleve jusqu'a 68, y compris les 21 qui sont dans Ia capitate. II existe egalement 77 musees universitaires a travers le pays. Le musee le plus representatif de Ia Coree est le Musee national d'Art contemporain. Fonde en 1969, il a demnag ~ en 1986 dans ses locaux actuels a Kwach'6n et dispose d'une superficie d'exposition de 22.000 p'yongs (soient 72.600 metres carres) dont 9 galeries et un pare d'exposition de sculptures. Le musee organise en plus de son
exposition permanente des expositions speciales. Le musee gere une ecole culturelle qui offre au grand public des cours d'art le samedi, des cours sur' le musee, des cours pour enfants et des stages pour les enseignants. Le musee dispose egalement cle salles pour divers spectacles comme des concerts, de Ia danse et des projections de films. L'Academie contemporaine d'art, personne juridique associee avec le musee, vise afaire progresser le niveau des amateurs en matiere d'arts en offrant des programmes rigoureux de theorie et de pratique. Parmi les musees prives, on compte avant tout le Musee d'art Ho-am qui a ete fonde et est subventionne par Ia Fondation
d'art de Samsung. Situe a Yong-in dans Ia province de Kyonggi, il a ete ouvert au public en 1982. C'est le plus grand musee prive de Coree; il dispose de 400 p'yongs (soient 1.320 metres can¡es) comme espace d'exposition et de plus de 15.000 p'yongs (soient 49.500 metres carres) pour ['exposition de sculptures. Sa collection varie des objets prehistoriques aux peintures contemporaines des artistes careens et etrangers. Le musee organise des expositions temporaires et change son exposition permanente deux fois par ~ n . Fonde etil. 1984, le Musee de Walker Hill, qui se trouve au sein .de !'Hotel de Walker Hill de Seoul, dispose d'une superficie totale
de 135 p'yongs (soient 445 metres carres) ainsi que d'un pare d'exposition exterieur de 343 p'yongs (soient 1.132 metres can¡es). La majeure partie de sa collection concerne !'art moderne et !'art folklorique careens. Le musee organise des expositions regulieres pendant toute l'annee. Le Musee Sonje qui se trouve a Kyongju, ancienne capitate du royaume "Silla" qui dura plus de 1000 ans, a ete ouvert ~ n 1991 sur un terrain etendu de 700 p'yongs (soient 2.310 metres carres). II organise souvent des expositions d'artistes invites de renommee internationale. Le Musee Whanki a ete fonde en 1992 pour celebrer le grand maitre Kim Hwanki
Le Musee mttiomtl d'Art contemporain de Kwach'On.
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· (de hauten bas) leMuseed'artHo-am a Yong-in;leMuseeSonjeaKy6ngju;le Musee Hankaram du centre des beauxarts de Si!oul; ( ci.tfessous) le pare de sculptures de l'ile de Cheju, Ia plus au sud de 1a Coree
(Kim Hwan-ki). II se trouve a Puam-dong, dans !'arrondissement de Chongno de Seoul et dispose d'une superficie d'exposition de 300 p'yongs (soient 990 metres carres). Le musee expose des oeuvres de Kim Whanki ainsi que celles d'artistes contemporains careens. Ont lieu dans ce musee des seminaires, des cours d'appreciation artistique et des concerts. Depuis son ouverture en 1992 a Seoul, le Musee Total (200 p'yongs, soient 660 metres carres) a fait beaucoup d'efforts pour vulgariser !'art contemporain en mettant en oeuvre diverses activites. II a cree le Prix d'Art Total mais il a aussi ouvert, en 1994, une galerie en exterieur a Changhung dans Ia province de Kyonggi-do. Depuis son ouverture en 1983, le Musee Hankook a organise activement des cours et des manifestations artistiques pour les membres inscrits de son organisme. II a demenage en 1993 dans de nouveaux locaux dont Ia superficie est de 100 p'yongs (soient 330 metres can·es). ~e Musee Unhyang, gere par le Village culture! d'Unbo a Ch'ongwon, dans Ia province du Ch'ungch'ong du Nord, a ete fonde en 1994 pour commemorer les realisations de deux peintres de style coreen authentique : Unbo (Kim Ki-ch'ang) et son epouse Unhyang (Pak Rae-hyun). Le musee est connu pour son exposition permanente extraordinaire de sus6k, pierres polies et taillees par Ia nature ainsi que pour le pare exterieur ou sont exposees des oeuvres en
ceramique. Le Musee metropolitain de Seoul a ete ouvert en 1988 dans !'enceinte du palais Kyonghuigung, un ancien palais royal. Sur Ia superficie totale de 300 p'yongs (soient 990 metres carres), le musee offre au public des cours d'art tous les premiers et troisiemes vendredis de chaque mois. Le Musee Hankaram qui se trouve au Centre des Arts de Seoul, a ete ouvert en 1990. II dispose de cinq galeries sur une superficie totale de 1.057 p'yongs (soient 3.488 metres carres). II tient des expositions d'art contemporain avec des oeuvres appartenant aux musees careens et etrangers. II comporte egalement une galerie de calligraphie (308 p'yongs, soient 1.016 metres can·es) qui fut ouverte au meme endroit en 1988. Le Musee municipal de Kwangju (847 p'yongs, soient 2.795 metres can·es) fut fonde en 1922 et organise des expositions avec sa propre collection ou des oeuvres pre tees. C'est dans ce musee que sont exposees en permanence des collections speciales de 0 Chi-ho, Ha Chong-ung, H6 Paek-nyon. Dans le Pare de sculpture de Cheju se trouve le Musee Sinch'onji qui a ete fonde en 1987 par Chong Kwan-mo. On peut y apprecier non seulement les 300 sculptures exposees sur le site nature! de 30.000 p'yongs (soient 99.000 metres carres) mais egalement visiter les galeries couvertes pour peintures et dessins (150 p'yongs, soient 495 metres carres).
Les galeries Les galeries commerciales ne cessent de s'ouvrir et ce phenomene C0£1Stitue un defi a Ia stagnation du marche d'art coreen. Ceci reflete non seulement !'interet porte par Ia classe moyenne a !'art et a Ia culture mais egalement le nombre qui ne cesse de croi'tre des expositions tenues par les jeunes artistes. Le nombre des galeries qui se sont inscrites a !'Association coreenne des galeries s'eleve actuellement a 88 dont 20 en provinces, mais le chiffre reel doit etre plus eleve. La Galerie Hyundai est surement Ia premiere galerie commerciale de Coree avec 200 expositions organisees par an sous son nom dans deux batiments qu'elle possede. 50
Ouverte en 1970, Ia galerie est specialisee dans les artistes deja reconnus. La Galerie Gana est connue pour sa gestion dynamique et son "loo!t. Fondee en 1983, elle a lance une revue d'art bimensuelle en 1988, a cree le Prix d'art Gana en 1990 et a ouvert le studio d'estampes de Gana. Elle s'apprete maintenant a penetrer le marche etranger. Ouverte en 1977, Ia Galerie Sun organisait souvent des expositions d'oeuvres d'artistes de renom. Elle a cree le Prix Sun en 1990. La Galerie Kukje, ouverte en 1982, est specialisee dans le marche de !'art americain. Par contre, Ia Galerie Dong-san-bang, ouverte en 1975, a exploite de nouveaux marches pour Ia peinture coreenne traditionnelle. ¡Ouverte en 1993, Ia Galerie Bhak traite avant tout des oeuvres d'artistes qui ont entre trente et quarante ans. La Galerie Hak go-jae, ouverte en 1988, s'est specialisee dans Ia calligraphie mais tres recemment, elle a commence a exposer des oeuvres d'autres genres. La Galerie Inkong, ouverte en 1988, se differentie par son gout moderne et par Ia decoration en sculptures de Ia fa<;: ade de son batiment. Elle est specialisee dans !'art moderne. Ouverte egalement en 1988, Ia Galerie Seomi a reussi a penetrer le marche coreen de !'art contemporain et de !'art experimental. La Galerie d'art Park Ryu-sook, fondee en 1983, est connue pour ses expositions bien organisees et pour son soutien pour les oeuvres d'art fa<;: onnees. La Galerie d'art jean, ouverte en 1972, est l'une des premieres galeries coreennes a avoir participe aux foires internationales d'art. Elle est devenu e le premier fournisseur de !'art fran<;: ais. D'autres galeries de renom sont Ia Galerie Chosun qui a ete ouverte en 1971, Ia Galerie Yeh fondee en 1978 et Ia Galerie Pyo qui date de 1981. Les gakries de Seoul peuvent etre classees en .deux categories selon leur situation geographique par rapport au fleuve Han, celles du Nord et celles du Sud. Au Nord, les galeries se sont rassemblees dans les quartiers de Insa-dong, Sagan-dong et
La galerie Kukjede seoul specialisl!edans l'art aml!ricain
Dongsung-dong, et au Sud, elles se trouvent en general a Shinsa-dong, Ch'ongdam-dong et Soch'o-dong. II existe des galeries qui orga-nise~ des expositions avec leur propre collection' ei d'autres qui "invitent" des artistes tandis que certaines galeries ne font que louer leurs salles aux artistes. Toutes les galeries membres de !'Association des Galeries de Coree participent a Ia Foire de !'art de Seoul, evenement annuel cree en 1991, ou un artiste est invite pour une exposition extraordinaire. Les Foires de !'art Ch'ongdam et de Shinsa organisent des evenements similaires.
Lesgroupes et associations La plupart des groupes ou associations d'artistes de Coree gardent le meme principe : leurs membres doivent tous etre d'anciens e!eves de Ia meme ecole ou originaires du meme lieu. Les groupes ou associations dont le nombre des membres varie entre moins de 10 a 100, organisent des expositions en groupes une ou deux fois par an. Ils patronnent en general des concours en vue d'encourager les debutants ou les nouveaux venus. Quelques-uns des groupes les plus importants sont cites cidessous par genre. La tradition de Ia peinture a l'encre est
preservee par plusieurs groupes. Le gmupe Shin-mook a ete cree en 1984 par des anciens eleves de l'Universite de Hongik dans le but de creer une nouvelle valeur basee sur Ia contemplation de Ia nature et exprimee a travers le paysage. Le groupe Shin-soo compose egalement d'anciens eleves de Hongik est renomme depuis sa creation en 1963. Consacree aux travaux artistiques de peinture en couleurs, I' Association des beaux-arts Choonchoo a ete organisee en 1975. Le groupe patronne un concours. Le Groupe de Ia peinture de Coree cree en 1967 par d'anciens e!eves de Ia Faculte des beaux-arts de l'Universite nationale de Seoul embrasse diverses sortes de genres du style traditionnel au style abstrait. L'Association de Ia peinture co0temporaine coreenne fondee en 1971 a pris !'initiative de changer !'appellation de "peinture orientale" en "peinture de style coreen". Les peintres de style occidental ont egalement leurs propres assoCtatwns. Conformement a son nom, !'Exposition figurative de Gusangjeon a cherche a innover !'expression figurative depuis sa creation en 1967 mais, au bout du compte, elle a fini par accepter les travaux artistiques se situant entre !'abstraction et le realisme. Elle patronne un concours. Bien qu'elle ait ete organisee en 1958 par 51
des peintres naturalistes et realistes, !'Association des beaux-arts de Mokwoohoe a reussi a elargir le nombre de ses membres en acceptant les sculpteurs et peintres de style coreen ainsi qu'a preserver Ia tradition de Ia peinture a l'encre. Elle patronne egalement un concours. Depuis sa premiere exposition en 1975, !'Ecole de Seoul fait partie d'un des groupes artistiques "particuliers" car ses membresartistes sont ')nvites" annuellement par des commissionnaires. Son systeme unique de societariat non-permanent dirige le courant artistique contemporain de Ia Coree depuis Ia fin des annees 1970. Le groupe le plus grand est !'Association des peintres "Origine", forme en 1963 par d'anciens eleves de Hongik de tendance ¡ non-conceptuelle. L'Association des beaux-arts Changjak cree en 1957 patronne un concours annuel dans le domaine de !'art abstrait. L'Association coreenne des estampes contemporaines a initie divers genres de gravures depuis sa creation en 1968. L'Association coreenne des peintures a l'eau creee
en 1975 se consacre surtout a Ia recherche et aux activites dans le domaine de Ia peinture a l'eau. Les deux groupes patronnent des concours. Les sculpteurs sont egalement groupes en quelques associations, dont l'une est !'Association de Seoul des sculpteurs, composee d'anciens de l'Universite nationale de Seoul. Elle a ete creee en 1981. L'Association coreenne de Ia sculpture figurative fondee en 1977 patronne le Concours coreen de sculpture figurative conjointement avec Ia chaine de radiodiffusion et de television Munhwa (MBC). L'Association coreenne de sculpteurs s'est fondee en 1985 avec deux buts : proteger le droit et les inte~s des sculpteurs et stimuler !'interet du public pour Ia sculpture. L'Association coreenne de Ia sculpture contemporaine organisee en 1969 essaie de promouvoir Ia sculpture abstraite. Le Conseil coreen de l'artisanat fonde en 1974 represente les artistes des travaux manuels comme le travail des metaux, Ia ceramjque, le travail sur bois, Ia teinture et le textile. :
La place du complexe Korea World Trade Center dans le sud de Seoul 52
Les artistes II est ditticile de connaitre le nombre exact des artistes actifs; on ne possede qu'un chiffre approximatif a partir du nombre d'inscrits a !'Association coreenne des beauxarts. Pour en etre membre, le candidat doit remplir une des conditions suivantes : etre ancien eleve du departement des beaux-arts d'une faculte pendant 4 ans, avoir expose pendant plus de 3 aris; dans le cas d'ancien eleve du departement des beaux-arts d'une ecole d'un cursus de 2 ans, avoir expose pendant plus de 6 ans; avoir etudie !'art pendant plus de 12 ans et avoir presente ses oeuvres aux expositions reconnues par !'Association. En fevrier 1995, les membres de !'Association sont au nombre de 9.184 dont 5.027 vivent a Seoul. En repartissant par genre, le nombre des peintres de style coreen est de 1.718, celui des peintres de style o~cidental 3.878, celui des artistes estampistes 117, celui des sculpteurs 776, celui des artistes de travaux manuels 1.262, celui des calligraphes 1.017, celui des stylistes 394 et
celui des critiques 22. Bien sur, le nombre reel des artistes est beaucoup plus eleve quand on tient compte des professeurs d'universite, des lecteurs, des professeurs de 1ycees, des gestionnaires ou des enseignants travaillant dans diverses institutions ou studios. En plus, l'Institut coreen des architectes compte 1.100 membres et !a Societe coreenne des artistes photographes compte 3.000 niembres. Dans une enquete menee par une revue d'art coreenne pour son numero special intitule "Retrospective de !'Art coreen moderne", 39 historiens d'art et critiques specialises en art modetne ou contemporain ont ete pries de citer le nom des artistes les plus influents de !a Coree parmi lesquels 7 ont ete retenus ci-dessous. Lee Sang-boom (Yi Sang-hOm, 1897-1971)
Ne a Kongju, dans !a province de Ch'ungch'ong du Sud, il a frequente !'ecole d'art de Sohwa. ¡Apres avoir fait un debut remarquable a !'Exposition Son en 1922, il a ete reconnu pour avoir essaye de rehausser le niveau de !a peinture traditionnelle a l'encre. Annees apres annees, il a gagne des prix 'et des citations speciales. Apres !a liberation du pays, il fut membre du jury de !'Exposition nationale et professeur a l'Universite de Hongik. II aimait peindre les pentes douces des montagnes coreennes et !a joie de !a vie rurale dans !a simplicite. Ses dessins sont tres apprecies grace a son expression unique et son organisation tres elaboree. Le quotidien Dong-a a presente une exposition retrospective de ses travaux en 1972, ainsi que le Musee national d'Art contemporain en 1982.
Park Soo-keun, Pere et fils, 120x90 em, 1962
fesseur a !a faculte feminine de Sudo. Son esprit vif et provocant a trouve une expression libre et rude : brosser selon les techniques de points et de coups. Son sujet favori etait le Mont Kumgang et les villages des paysans. En 1974, il fut celebre avec une exposition retrospective organisee par !a Galerie Hyundai et l'annee suivante, par ['exposition organisee par le quotidien Dong-a.
Byeon Kwan-sik (Pyon Kwan-sik, 1899- Park Soo-keun (Pak Su-giin, 1914-1965) 1976) Pak Soo-keun est ne a Yanggu, dans !a Originaire d'Ongjin, dans !a province de province de Kangwon. II a appris apeindre Hwanghae (Coree du Nord), il fut eleve par a l'eau tout seul. II a expose a !'Exposition son grand-pere maternel Cho Sok-jin jusqu' a Son et a gagne des prix entre 1936 et 1940. son depart pour le Japon ou il continua a Apres s'etre enfui en Coree du Sud pendant faire des ewdes d'art. II a participe a !'Expo- !a guerre de Coree, il souffrit beaucoup. sition Son. des son inauguration en 1921. Juste avant sa mort, il fut atteint de Bien qu'il ait fait partie de ['exposition cataracte et perdit un oeil. II aimait nationale apres !a liberation, il !'a quittee representer ['essence des gens ordinaires a definitivement apres l'avoir denoncee au travers sa perspective unique et ses techpublic pour ses absurdites. II devint alors pro- niques innovatrices propres. Ses sujets
favoris varient, des marches aux rues et aux a11ees, en passant par les meres qui portent leurs enfants sur le dos. Ses formes solides et simples, incorporees dans des matieres comme le granite ou le sol greseux sont presque uniques au monde. Dix ans apres sa mort, !a Galerie Munhon a organise une exposition comme-morative, !a Galerie Hyundai a fait de meme 20 ans apres sa mort. Pak est considere comme le peintre le plus apprecie en Coree. Kim Whanki(Kim Hwan-ki, 1913-1974)
Originaire de Shin-an de !a province de Cho11a du Sud, ce peintre a etudie les beauxarts dans une universite japonaise ou il participa aux expositions pour !a science naturelle. Apres son retour de Paris ou il sejourna pendant 3 ans, il enseigna a l'Universite Hongik. Apres avoir re~u en 1963, le prix honoraire de !a Biennale de Sao Paolo, Kim s'installa aux Etats-Unis ou il 53
vecut jusqu'a sa mort. Quand il commenr;:a sa carriere dans les annees 1930, Kim fit des travaux abstraits de tendance structuraliste, mais, dans les annees 1950, il essaya le style poetique en employant des couleurs vibrantes et en representant des sujets simples comme Ia June, les montagnes, les oiseaux et les objets en celadon blanc. Vers Ia fin des annees 1960, il retourna vers le simple, !'abstraction geometrique. C'est dans les annees 1970 que son style atteignit sa perfection sous une nouvelle forme dans laquelle il divisa Ia surface peinte en blocs consecutifs marques de points verts et bleus comme le faisaient les artistes pointillistes. Le Musee national d'Art contemporain a organise une exposition retrospective des oeuvres de Kim en 1975 et une nouvelle fois en 1984 a !'occasion du dixieme anniversaire de sa mort. Aucun autre artiste careen n'a ete aussi reconnu que lui sur Ia scene internationale. Oh Chi-ho(OChi-ho, 1905-1982)
Ne .a Hwasun dans Ia province du Cholla du Sud; Oh Chi-ho fit ses etudes a !'Ecole des beaux-arts de Tokyo. En 1938, avec Kim Chu-kyong, il a publie un livre de peintures en couleurs pour Ia premiere fois en Coree. Installe dans Ia ville de Kwangju en 1948, il enseigna a l'Universite de Chason jusqu'en 1960 alors qu'il etait aussi membre du jury de !'Exposition nationale. II dirigea le mouvement des artistes de Ia region. Intellectuel nationaliste, il etait a Ia fois peintre convaincu et theoricien de Ia conceptualisation. Comme les impressionnistes, il fit des experimentations sur l'effet de Ia lumiere du jour sur diverses surfaces et poursuivit dans ce sens jusqu'a sa mort. En 1985, le Musee national d'Art contemporain a organise une exposition retrospective de ses travaux. Yi 1n-song(1912-1950)
Kim Whanki, Echo du matin,
178x127 em, 1965 (en haut); Oh Chi-ho, Paysages neigeux, 93x157 em, 1971 ( centre); Lee]oong-seop, Combat de C<>q'i, 50x33 em, 1955 (en bas) 54
Originaire de Taegu, Yi a fait ses etudes a !'Ecole des beaux-arts Pacifique de Tokyo. II devint ensuite celebre et fut couvert de prix grace a !'Exposition Son a laquelle il participa regulierement entre 1931 et 1936. Reconnu comme un peintre de genie, il fut consacre peintre recommande apres avoir re<;: u consecutivement des prix speciaux a !'Exposition Son. Apres Ia liberation du pays, Yi
enseigna a l'Universite feminine d'Ewha. II tint sa premiere exposition a Ia Galerie Donghwa et ouvrit l'Institut de recherches sur Ia peinture nationale. II fut egalement membre du jury lors de Ia premiere Exposition nationale de 1949, mais il s'est eteint l'annee suivante, a !'age de 39 ans, pendant Ia guerre de Coree. La Galerie de Seoul organisa une exposition retrospective en son honneur en 1972 et Ia Galerie Munhwa avec ses oeuvres non-exposees precedemment en 1977. Son style est libre, non-reprime et plein d'une emotion profonde proche de l'impressionnisme. Les couleurs claires et les touches aigues rendent ses oeuvres sensibles et lyriques. II choisit ses sujets au hasard dans son entourage. Lee}oong-seop(Yi Chung-sOp, 1916-1956) Ne a P'yongwon dans Ia province de P'yong-an du Sud (Coree du Nord ), Yi a fait ses etudes a l'Academie culturelle du Japon. II a participe a !'Association creative des artistes japonais et etait membre fondateur de Ia Nouvelle association des artistes. Au moment ou eclata Ia guerre de Coree, Yi s'enfuit en Coree du Sud et refugie, il changea de domiciles a plusieurs reprises de Pusan a Sogwipo en passant par T'ongyong. II a tenu sa premiere exposition Seoul en 1955. L'esprit nationaliste impregne sa maniere fauviste de traiter les objets comme les vaches, coqs, peches, enfants et paysages qui sentimentalement lui rappellent son pays natal. Sa personnalite naive presque deta-chee de ce monde a rendu celebres beaucoup d'anecdotes sur son compte. L'histoire de sa vie fut adaptee au theatre. Les oeuvres qu 'il ~ - realisees quelques annees avant sa mort furent autobiographiques: elles representent Ia vie de sa famille et Ia peine de Ia separation. La Galerie Hyundai a patronne une exposition sur Yi en 1972 et Ia Galerie d'art Ho-am, une exposition de grande envergure avec ses oeuvres en 1986.
En dehors de ces 7 artistes, Kim Pok-jin (1901-1940) est reconnu pour ses portraits geants et dynamiques des gens pris dans les vicissitudes de l'histoire. Ko Ui-dong (18861965) est le premier peintre de style occiden-
tal et est done apprecie comme personne centrale de !'art moderne tandis que Kim Dn-ho (1892-1979), maitre de Ia peinture en couleurs traditionnelles, est recemment reapprecie grace a ses nombreux eleves qui l'ont suivi de son vivant. Les oeuvres de Lee Sang-beom, Byeon Kwan-sik, Park Soo-keun, Lee Joong-seop, et Kim Whanki valent le plus cher sur le marche coreen : ce sont aussi les premieres oeuvres d'art coreennes a avoir ete vendues par Sotheby's ou Christie's a New York . Depuis 1960, !'art contemporain coreen commence a se faire connaltre a l'etranger grace aux diverses expositions internationales comme !a Biennale de Paris, Ia Biennale de Sao Paolo, le Festival international de Ia peinture de Cannes, Ia Triennale de l'Inde, Ia Biennale du Bangladesh et tres recemment Ia Biennale de Venise. Les artistes les plus actifs a l'etranger sontPark Seo-bo (Pak So-bo), Kim Tschan'ang-yeul (Kim Ch'ang-yol), Shim Moon-seup (Sim Mun-sop), Ha Chong-hyun (Ha Chong-hyon), Lee Ufan
Suh Seung-won, Simultaneite 82-62, 162x130 em, 1982; Baik Kum-nam,
Lettre .88629, 51x100 em, 1988 (ei-
dessous) ;
(Yi U-hwan), Suh Seung-won (So Sungwon), Yun Hyong-keun (Yun Hyong-kun), et Yoon Myeung-ro (Yun Myong-no). Le jeune artiste Yuk Kun-byong qui sejourne a l'etranger fut invite au Kassel Dokumenta en septembre 1992. Bien qu'il n'existe aucun dossier officiel qui montre exactement le nombre des expositions qu'ont tenues les artistes coreens a l'etranger, Baik Kum-nam (Paek Kum-nam), artiste d'estampes et styliste de !'art visuel semble etre le plus actif avec 120 expositions depuis 1971. La plupart des artistes les pi us actifs ont entre trente et cinquante ans et tiennent des expositions trois ou quatre fois par an, individuellement ou en groupes, en Coree ou a l'etranger. De plus en plus d'artistes commencent a participer aux expositions etrangeres. Le nombre des artistes coreens participant aux expositions etrangeres s'eleve a 229 en 1993, a 269 en 1994, tandis que celui des etrflngers en Coree s'eleve a 177 en 1993, et a 214 en 1994. La perspective de !'augmentation des echanges internationaux semble done prometteuse. +
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GROS PLAN
Artiste de l'annee
]heon SongMisook Critique d'art, Professeur d'histoire de !'art -al'Universite Feminine Sungshin
orsqu'en 1989, Jheon Soo-cheon (Chon Such'6n) a, pour Ia premiere fois, expose ses oeuvres en individuel en Coree, son nom etait peu familier a Ia communaute artistique locale car i1 vivait depuis de nombreuses annees a ¡retranger. Cependant, depuis, il a execute !'installation Drawing on the Han River (Dessiner sur Ia riviere Han), cree Ia sculpture Space A/light (Volant dans l'espace) pour !'Exposition de Taej6n de 1993, et fait deux expositions en individuel en 1992 et en 1994 a Ia Galerie Gana a Seoul. En outre, il a ete choisi avec trois autres artistes pour representer Ia Coree a Ia Biennale de Venise cette annee. jheon a quitte Ia Coree dans sa jeunesse pour etudier !'art au Musashino Art College de Tokyo. De Ia, ses ambitions l'ont conduit a New York. Apres avoir obtenu un dipl6me du Pratt Institute, il a cree un atelier a Soho. Actuellement, i1 partage son temps entre les Etats-Unis, le Japon et Ia Coree. Jheon est un homme de sensibilite multiculturelle et un veritable artiste, citoyen du monde entier. L'inclination que Jheon a pour sa terre natale, non pas a travers les confins de sa topographie et de son histoire mais, comme un etranger de passage, est le fruit d'une reflexion sur son experience et les perspectives qui s'offrent a lui. Depuis Ia fin des annees 80, il a experimente des materiaux et des motifs varies tels que le bernard-l'ermite, les planetes et plus recemment les "t'o-u" (figurines d'argile utilisees comme objets funeraires pendant Ia periode de Silla, 57 avant J.-C, - 935 apres J.-C.). Cependant, il s'est toujours penche sur les questions fondamentales de Ia condition de !'existence humaine. Quoique ce theme soit reste uniforme, les materiaux, les motifs, les methodes, les sup-
L
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heon
Au printemps 1995,]heon Soo-cheon a ete elu "Artiste de l'annee" et propose une exposition speciale au Musee national d'Art contemporain. A gauche, "T'o-u", une de ses installations.
ports et meme l'echelle de ses travaux ont subi des changements constants. La plupart des travaux de Jheoll a partir des annees 80 sont des peintures tres expressionnistes, decrivant le cote tragique de Ia condition humaine. Les figures humaines sont representees comme etant a Ia merci de forces mysterieuses et incontr6lables, soit subordonnees, soit alienees et contraintes a avancer. Ses coups de pinceau ressemblent a des flammes ou semblent avoir ete crees par les flots d'un tourbillon; les couleurs reprennent des bleus et des rouges intenses. Les gens qu'il represente dans ses peintures sont difficiles a definir. Ce sont des silhouettes sombres, encapuchonnees et le dos tourne. En 57
contraste avec leurs formes indefinies, leurs mouvements sont clairs et montrent que leurs actions sont contr6lees par une force irresistible. Jheon utilise le bernard-l'ermite qui court en se precipitant entre les demeures des autres ou leurs dechets (les coquilles abandonneesJ comme une metaphore pour le r-efugie continue!, !'exile. Par certains cotes, cette metaphore exprime les propres experiences de !'artiste. Mais, aun niveau plus universe!, il aborde la question de !a condition de tous les etres humains. 58
A la fin des annees 80, cette forte tendance expressionniste fait place a une sensibilite plus tranquille. Les etres humains sont encore son sujet principal. lis sont encore de configuration vague et verticale, de forme metaphorique. Mais, quelquefois, les silhouettes sont reduites a de seules mains, visages ou pieds et apparaissent en conjonction avec d'autres motifs tels des oeufs, des moutons, des tOI¡tues, des fleches, des spirales et des croix. Ces emblemes sont soit directement peints sur !a surface, soit montes sur de petites plaques de metal qui sont attachees
aux peintures. Plut6t qu'objets de delimitation, ce sont des formes metaphoriques estampees, au travers de !a toile, comme des pochoirs. Dans ces oeuvres, connues sous le nom de !a serie de "planetes", des tiges de fer recourbees sont aussi attachees aux peintures. Ces tiges definissent l'orbite des planetes, qui sont a leur tour symbolisees par les motifs independants apparaissant a l'interieur de l'orbite. ¡ Dans ces series, le theme omnipresent de !'oeuvre de Jheon qu'est !a condition existentielle de l'homme, est vu a travers une per-
spective spatio-temporelle plus large, plus enveloppante, permettant a!'artiste d'etre plus objectif. La composition y est devenue plus stable. Neanmoins, les themes qui ont un rapport avec l'anxiete, le plaisir, le chaos ou Ia condition humaine, presents dans ses peintures anterieures, continuent d'apparaltre. Ils sont visibles dans les pas vagabonds, les mains ouvertes et les silhouettes verticales sombres. Pendant les ann ees 90 , Jh eo n es t revenu a des methodes de peinture conventionnelles mais est reste fidele a ses
propres techniques des panneaux brillants en acier inoxy-dable. structurelles de composition et a so n Pour son exposition en individuel a Ia utilisation d'elements emblematiques. Un Galerie Gana, l'annee grand nombre de ses Dessiner sur Ia riviere Han, execute derniere, Jheon a travaux est execute sur en 1989 ( au-dessus) etT'o-u I. presente presente une installade larges panneaux en it /'exposition de 1995 re.{letent Ia ~ tion composee de boltes lumineuses contre-plaque. La pein- gressiondu travaildeJheon. ture est en general fine, contenant des diaposipermettant au grain du contre-plaque de tives photographiques d'oeuvres d'art orientransparaltre et de devenir partie integrante tales et occidentales, intitulee Faces of Gods, de !'image. II a aussi execute des travaux sur Faces of Men (Visages de dieux, visages 59
d'hommes). Les boltes lumineuses etaient Ia seule source d'eclairage de Ia galerie. Quelques boltes etaient a Ia verticale, d'autres etaient dispersees en travers du sol comme pour entraver le chemin du visiteur. Les dieux montres dans les images photographiques sont des dieux crees a !'image humaine mais ils sont incomplets ou brises. Pour rassembler ces images, !'artiste a¡visite de nombreuses .galeries et musees. II pense que cette installation exprime !'imperfection et les limites des dieux que les humains ont fabriques d'apres leur propre image. Non seulement Jheon a l'honneur d'etre l'un des trois artistes choisis pour ouvrir le pavilion coreen a Ia Biennale de Venise, mais il expose aussi au Musee National d'Art Contemporain, dans !'exposition presentant "!'Artiste de l'annee", recemment inauguree. Pour Ia premiere fois depuis sa creation, le musee fournit des fonds a !'artiste elu afin de !'aider a creer l'espace adequat ases travaux. L'exposition comprend les 'peintures et les installations recentes de Jheon qui sont toutes reliees les unes aux autres mais placees dans six salles separees, restructurees par !'artiste selon son propre dessein. Les salles ont une atmosphere mysterieuse, leur seul eclairage etant les tubes de neon bleu pale qui sont les elements symboliques de ses oeuvres d'art Dans Ia premiere salle, une rayure de neon bleu coupe Ia salle verticalement. Tout le sol, excepte les bords, est recouvert de petits personnages d'argile t'o-u. Les mains de ces t'o-u sont soit tendues vers !'avant, soit jointes. Au centre, des douzaines de t'o-u sont entasses les uns sur les autres. Ce motif est repete sur des panneaux munis d'ecrans de soie qui garnissent les murs. Le sol sur lequel les t'o-u sont disposes est en verre. Sous ce sol de verre sont repandus des dechets industriels de .toutes sortes. Places a intervalles (en hauta droite)Lwnieredesagesse, centre)Masques de planetes, I~ (en bas) L'e!CpositronauMusee natiant;ll d'Art rontemporain I~(au
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...
â&#x20AC;˘
Moyens de planetes evoluant, 1200 x700x 135 em, 1995
reguliers parmi les detritus, il y a de petites lumieres qui, avec les tubes de neon bleus, constituent le seul eclairage de Ia salle. En suivant les lumieres, le visiteur peut marcher parmi les t'o-u et examiner les detritus. L'artiste entend faire mediter le spectateur sur les degats qui ont ete infliges au monde par notre civilisation industrielle et materialiste. Les t'o-u symbolisent !'arne interieure et l'identite du peuple coreen. Le rayon de neon bleu eclaire un chemin reliant le passe, le present et le futur. Ceci peut aussi symboliser Ia roue apparemment impalpable et invisible de l'histoire 'et de !'arne humaine Un message semblable est clairement lisible dans Ia seconde salle qui contient une oeuvre intitulee Planets : Tools of Wisdom (Les planetes : outils de sagesse). Des cailloux sont 62
entasses sur le sol dans le but de representer un etat nature! de chaos. S'elevant parmi eux, il y a des tubes de neon bleu auxquelles sont attachees des bannieres en plastique portant des mots tels que "civilisation", "socialisme", "armes" et "sagesse". Les tubes symbolisent !'evolution et le vagabondage des planetes et toute chose qui s'oppose a Ia nature. Dans Ia troisieme salle, des pieds en platre blanc spectraux sont eparpilles de part et d'autre sur le sol comme s'ils etaient en train de vagabonder de-ci de-Ja, sans but. Jusqu'ici ils semblent aller quelque part, car ils sont rassembles autour d'un tube de neon bleu, formant un grand cercle, cqmme sous le contr6le de quelque pouvoir invisible. Intitulee Light of Wisdom (Lumiere de Ia sagesse), Ia lumiere de neon eclaire un ecran
dans uil coin de Ia salle, ou des messages dactylographies sont projetes. La lumiere symbolise l'ordre inherent au chaos de Ia condition humaine qui est, elle, exprimee par les pieds vagabonds. Dans Ia quatrieme salle est presentee une installation de casques d'acier, un element que Jheon utilise dans ses travaux depuis Ia fin des annees 80. Dans ses travaux plus anciens, les casques sont des caricatures de masques traditionnels. Dans cette installation, ils ont subi une transformation differente. Soixante dix-sept casques sont alignes sur le sol de fa\:on militai.re en onze rangs de sept. Sur Ia surface des casques du quatrieme rang, qui sont chacun sur une plate-forme surelevee, sont soudes des symboles tels qu'une croix, des ongles, des mains, des yeux, des organes genitaux mas-
Visages de dieux, visages d'hommes, LOOO x 500 x 121 em, 1994
culins, une tete de chien et un masque traditionnet A travers les references aIa guerre, !'artiste denonce Ia cruaute de Ia civilisation hurnaine et ses pratiques sexuelles et religieuses. La cinquieme salle contient des t'o-u de terre cuite se tenant sur deux rangs. Un long tetraedre en fer, ferme avec du verre, est pose sur le sol. A l'interieur, des t'o-u sont en procession, procession qui se prolonge a l'an¡iere. Au-dessus, une rangee de t'o-u est enterree jusqu'aux genoux, des rayons de lumiere de neon bleu pale tombant entre eux. Les t'o-u ?e trouvent dans les tombes de Ia classe supet:ieure et de Ia noblesse du royaume de Silla. Ces petites figurines d'argile sont l'un des symboles les plus modestes et paisibles du caractere spirituel du peuple '::oreen. La terre, materiau avec lequelles t'o-u
sont fabriques, est un theme familier a Ia fois a Ia creation et a !'extermination et aussi un element qui lie Ia mort, le temps et l'histoire. L'installation de Ia sixieme salle qui est celle qui a ete presentee a Ia Galerie Gana l'annee derniere, Faces of Gods, Faces of Men (Visages de dieux, visages d'hommes) a ete mentionnee plus haut. Le clou de !'exposition '1'Artiste de l'annee" est sans aucun doute Ia premiere installation intitulee To-u-Spirit of the Korean Prople (To-u-ame du peuple coreen). Avee quelques modifications, elle sera presentee aIa Biennale de Venise. La force de Jheon en tant qu'artiste est le mode de vie qu'il s'est choisi, Sq fa ~ on de refuser de s'attacher a quelque 'lieu, quelque groupe, quelque forme ou style que ce soit. II ne reste jamais au meme endroit mais par-
court Ia terre experimentant differentes cultures et differentes idees. II fait de ces experiences Ia base de son art et poursuit avec tenacite le probleme fondamental de Ia condition humaine sans user d'egotisme sentimental ou de nationalisme auto-gratifiant. D'ailleurs, Jheon realise de ses propres mains chaque chose relative ason oeuvre, de Ia conception aIa composition et de Ia realisation a !'installation finale. Son originalite vient de sa devotion profonde a son art, de sa capacite aassimiler des experiences disparates et aproduire une vision convergente. +
II est anoter qu'un prix special a ete
decerne a]heon Soocheon aIa Biennale de Venise de 1995.
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CHEMIN FAISANT
Ch6ngs6n e Deux villages de montagne jaloux Kimjoo-young Romancier
Y6ngwol 'une vie rurale traditionnelle
En quittant l'autoroute, ils peuvent decouvrir un panorama vierge et magnifique qui les guidera aIa ville de Chongson.
Rochers en pain de sucre proches des chutes d'eaudeCh'ongny6ng aYongwoL
La neige tombe, II pleut averse, La mousson s'abat comme un torrent Des nuages noirs recouvrent leMont Mansu. Pourquoi les doux eglantiers fleuris~nt-?
Nous ne sommes pourtant pas sur Ia plage de Myongsa, Si celebre pour cette fleur... Pourquoi les coucous chantent-ils? Nous ne sommes pas encore au prin-temps. Arirang, arirang, arari-o Col Arirang, je te franchirai bien tot. On dit de ces paroles qu'elles sont les plus anciennes parmi les 500 versions au moins de Ia celebre chanson folklorique "Ch6ngs6n Arirang'. Le Mont Mansu, evoque dans les paroles, se situe a Kaesong, capitale du royaume de Koryo (918-1392), et nous indique done l'origine de cette chanson populaire. En 1392, lorsque le royaume de Koryo fut renverse et remplace par le royaume de Choson (1392-1910), sept ministres de Ia cour, fideles au roi de Koryo, refuserent de servir le roi de Choson, et se refugierent dans les montagnes reculees de Chongson pour y passer le reste de leur vie. On dit que Ia chanson "Ch6ngs6n Arirang' est inspiree de cet evenement. A l'origine elle fut ecrite dans de complexes caracteres chinois pour mieux correspondre aux hommes de lettres dont elle evoquait le destin, mais n'a jamais ete particulierement gracieuse, ni dans sa tonalite, ni dans son rythme. A travers les siecles, "Ch6ngs6n Arirang' illustre les joies et les peines de
Tandis que les problemes crees par un developpement
a outr.ance sont de plus en plus man ifestes, les habitants de cette province commencent a considerer leur retard en Ia matiere comme un cadeau du ciel 66
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l'histoire de Ia Coree et de Ia vie dans cette region de montagnes.
Les maisons couvertes de
bardeaux tailles dans les pins Des toits de bardeaux La province de Kangw6n-do est un labyrinthe de montagnes si dense que les gens de Ia region pretendent qu'ils font secher leur linge sur des cordes tendues d'une crete a !'autre. Chaque matin, le chant des coqs resonne pendant des heures dans les ravins etroits. C'est ici, dans ces vallees retranchees, que !'on peut encore trouver des maisons traditionnelles aux toits couverts d'epais bardeaux de pin ou de pierre. Les bardeaux de bois, ou nowa, sont tailles dans des pins 'de plus de 200 ans, puis disposes horizontalement sur le toit comme des poutres, s'etendant depuis l'avant-toit jusqu'au sommet de Ia maison. Des blocs de pierre tres lourds sont disposes c;:a et Ia pour eviter que les bardeaux ne s'envolent lors des tempetes hivernales. Ces bardeaux ont une duree de vie d'environ cinq ans. Parfois, les habitants de Ia maison montent sur le toit pour remplacer les bardeaux pourris. Souvent, Ia fumee de Ia cuisine s'echappe entre deux bardeaux au lieu de sortir par Ia cheminee, donnant l'irnpression que le toit est en feu. On trouve facilement dans les montagnes toutes proches les materiaux necessaires a Ia construction de ces maisons. Certaines de-
de Ia region, que l'on trouve toujours dans les villages de montagne de Ch6ngs6n et de Y6ngwo~
expriment !'amour
de leurs habitants pour Ia nature.
meures ressemblent aux maisons a nowa mais sont en fait recouvertes d'ecorce de chene. Ces chenes que !'on trouve a proximite des maisons ont au moins 20 ans. Mais retirer l'ecorce des arbres n'est pas une tache facile ¡¡et :les maisons donnent sou vent !'impression d'etre recouvertes d'un edredon man¡on en lambeaux. L'ecorce de chene travaille lorsque le temps est sec. Ainsi, pendant les mois arides, le jour passe a travers les fentes du toit. Mais quand vient Ia saison des pluies, les
Des maisons traditionnelles, comme celle-ci qui est recouverte de bardeaux de pierre, peuvent encore etre vues dans les val lees des montagnes du Kangw6n-do. 68
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bardeaux d'ecorce retrouvent leur forme initiale et recouvrent ces interstices. Comme les bardeaux de n6wa, les bardeaux d'ecorce de chene durent a peu pres cinq ans et sont souvent recouverts de pierres. rautoroute qui mene de Ch6ngs6n vers le sud traverse le departement de Yongwol ou Tanjong, le sixieme monarque du royaume de Chason, fut envoye en exil apres avoir ete detr6ne. Tanjong acceda au tr6ne en 1452 a !'age de onze ans et fut evince trois ans plus tard par l'ambitieux prince Suyang, son oncle et deuxieme fils du defunt roi Sejong. II fut emmene a Yongwol sous escorte militaire et detenu a Ch'6ngny6ngp'o, un¡morceau de terre sur le bras ouest de Ia riviere Han, entoure d'eau sur trois cotes et de falaises abruptes au sud. ouest. II vecut Ia pendant deux ans, completement isole, avant d'etre assassine sur l'ordre de son oncle, a l'epoque le roi Sejo, qui realisa que sa place sur le tr6ne n'etait pas assuree tant que son neveu etait vivant. Ce poeme, ecrit par Tanjong durant sa captivite a Ch'ongnyongp'o, exprime Ia tristesse et l'amertume du jeune roi.
'j'ai quitte le palais comme un oiseau humilie, une ombre solitaire dans les montagnes. Chaque nuit je me bats pour dormir en vain. Combien de temps devrai-je attendre avant d'en terminer avec cette amertume? Le chant du coucou s'est arrete, le croissant de lune brille, Les flew¡s du printemps rouges sont empties de larmes ameres. Les cieux n'entendent pas l'air que les coucous chantent avec leur coew; alors pow¡quoi resonne-t-il si clairement a mes oreilles remplies de chagrin ? Le corps de Tanjong fut jete dans le bras est de Ia riviere Han. Personne n'eut le courage, de lui offrir de vraies funerailles par crail).te des represailles de Ia cour. Finalement, un homme nomme 6m Hong-do repecha le cadavre de Ia riviere et l'enterra avant de disparaltre et de ne plus jamais faire parler de Iui. 70
Tanjong, 1e roi enfant, chasse du trone par un oncle ambitieux, passa ses dernieres annees en exil a Ch'6ngny6ngp'o, un morceau de terre iso!e sur 1ejleuve Han, entoure d'eau de trois cOtes et de falaises abruptes au sud-ouest (au-dessus). La pietre-repere, agauche, indique ['entree des chutes d'eau de Ch'6ngny6ng. Apres son meurtre, Tanjong a ere enterre a H~nig, pres de Ia ville de Yongwol (a droite)
Les traditions perdurent Pendant Ia periode Choson, Ia population de Yongwol etait tellement reduite que les fonctionnaires envoyes par le gouvernement central n'avaient absolument rien a faire. Les coutumes locales ont toujours ete simples, et l'isolement de ce departement fait que de nombreuses traditions, abandonnees depuis longtemps dans d'autres endroits, subsistent encore a Yongwol. On voit souvent les villageois utiliser des mortiers de pierre ou des moulins pour piler le grain. Beaucoup de superstitions perdurent egalement. Par exemple, lorsqu'une femme a un accouchement difficile, son mari trace une croix dans le jardin et plante un couteau de cuisine au centre pour que le bebe naisse en bonne sante. Les gens dessinent aussi un visage sur les portes de leurs appentis et plantent une aiguille ou un clou a ]'emplacement des yeux pour soigner les maladies. Les habitants des montagnes de Yongwol sont des gens loyaux et forts attaches a leurs racines. Ils ont une vie difficile. Par endroits, les champs sont cultives sur des pentes si raides qu'il est dur de s'y tenir debout, et encore moins facile d'y labourer. Pourtant, ils restent Ia, partageant les joies et les peines de Ia vie avec leurs voisins. Cette tradition de convivialite et de loyaute envers ses voisins vient de Ia nature splendide et de l'eau genereuse de cette region. D'ailleurs, c'est a Y6ngwol que !'affluent sud du fleuve Han 5 Âą qui alimente en eau les 11 millions d'habi~ tants de Seoul prend sa source. ~ Ch6ngs6n et Yongwol sont les plus faciles d'acces par l'autoroute du sud de Hajinbu. Le Mont Solaksan au nord de Ia province de Kangwon-do est connu pour ses magnifiques feuillages d'autorrine, mais Ia route de Hajinbu de Y6ngwol qui traverse Ch6ngs6n offre une vue d'une beaute a vous Couper le souffle. A tel point que vous ne pourrez vous empecher d'arreter votre voiture pour prendre des photos si jamais vous passez par Ia. Les bords de route meticuleusement entretenus, les ruisseaux cristallins coulant sur les ravins tortueux, les fermes pittoresques aux toits de bardeaux5 tout concourt a offrir un splendide apen;:u Âą ~ de Ia vie traditionnelle dans un village de ~ montagne. + 71
A LA DECOUVERTE DE LA COREE
Lavacbe
PILlER DE LA VIE DE FERME Lee Keun-bae
_Poete
Avant les annees soixante, lorsque Ia Coree etait encore une societe agraire, avec 7\flfo de Ia population consacree a !'agriculture, Ia vache representait pour Ia plupart des Coreens une source de force de travail plutot qu'une source pour !'alimentation Elle etait rarement ut:ilisee pour son lait ou pour sa viande comme en Occident. Une vache remplissait largement le role d'un agriculteur. A Ia difference des animaux domestiques tels que le pore ou Ia poule, li vache etait un membre de Ia famille agricole apart entiere et on s'occupait d'elle avec soin ''Reparer l'etable apres avoir perdu ¡1a vache" est un ancien proverbe souvent employe lorsqu'une personne a pris des dispositions trop tard et regrette de ne pas avoir pu eviter sa mesaventure. Pourquoi Ia vache est-elle ut:ilisee pour symboliser Ia perte de quelque chose de precieux ? Cette question merite d'etre posee. Comme ce proverbe le montre, Ia vache a pour les Coreens une valeur importante aussi bien en termes de bien de propriete que d'affaire marchande. "Le ferrnier est Ia base de toute existence sous le ciel" ont souvent repete les ancetres du temps ou !'agriculture etait consideree comme une occupation sacree et ou Ia vache, dotee d'une force impressionnante, accomplissait le travail de l'homme. De ce fait, les fermiers etaient infiniment reconnaissants du travail rendu par Ia vache et Ia consideraient comme un membre de leur famille tout en louant son caractere docile. Le romancier, Yi Kwang-su, considere comme le pere de Ia litterature moderne coreenne, a decnt Ia vache dans un essai intitule '1'eloge aIa vache'' comme dans le passage suivant : ''Comme tu es humaine !Tu es le Bouddha, le
Le jour vient-il eclairer la jenetre de l'est? Ecoutez chanter l'alouette, Le vacher ne s'est-il pas encore reveille ? Quand va-t-illabourer la terre, Tracer les longs sillons sur la colline ? e poeme traditionnel (ou sijo en coreen) a ete ecrit par Nam Ku-man (1629.-1711), letr~ â&#x20AC;˘. poete et h~me pohtique du m1heu de Ia penode Chos6n (1392-1910). ''Le vacher ne s'estil pas encore reveille ?' demande le poete. Cette question laisse entendre que, dans le milieu rural coreen, Ia vache se !eve et se couche en meme temps que le soleil Au printemps, les fermiers attachaient leur vache a Ia charrue pour labourer Ia terre d~ champs avant les semailles. Mais le role de Ia vache ne se limitait pas au labourage seulement S'il est de coutume de monter a cheval en Ociden~ en O!ien~ c'est Ia vache qui represente un moyen de transport. En plus, elle etait employee pour faire les moissons d'automne ou encore, etait attachee a une charrette pour tirer les chargements lourds. Bien que le role de Ia vache se soit considerablement reduit dans les annees soixante au moment du "mouvement des nouveaux villages" (SaemaUI undong) qui a preapite Ia modernisation de Ia campagne en encourageant !'utilisation de machines agricoles, il faut admettre que Ia vache a ete pendant longtemps une aide indispensable pour Ia main-d'oeuvre coreenne dans les regions rurales pendant des milliers d'annees avant Ia mecanisation de !'agriculture. n est probable que Ia vache ou le boeuf continuent aservir l'homme aupurd'hui encore comme de par le passe seton Ia tradition dans certaines regions montagneuses reculees en Coree.
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Leejoong-sup, Vache, 28,3x40,8cm, 1953
saint de tous les animaux Seton Aristote, Ia vache n'est apparue dans ce monde qu'au moment ou celui-ci avait atteint un niveau de developpement avance. Toujours selon lui, comme il n'etait pas sur que l'homme soit superieur a Ia vache dans l'ordre nature! des choses, il recommandait a l'homme de considerer Ia vache comme son "maitre" s'il desirait perdre sa nature animale et atteindre Ia saintete. Lee Joong-sup (1916-1956), un artiste representatif de l'a1t moderne et surnomme le ''Picasso coreen", a aime peindre Ia vache avec un style propre a lu~ et representer dans ses oeuvres a Ia fois sa conscience interne en l'associant avec !'image de Ia vache na meme ecrit un poeme a ce sujet par Ia suite parce qu'il a senti que ses oeuvres seules ne pouvaient pas exprimer son sentiment totalement Ainsi a-t-il intitule son poeme, ''Les Paroles de Ia vache'' :
Noble, franc, Au souffle authentique Vient main!Rnant ici DotÂĽemn~ vient Ton souffle s'entasse Etdeborde lÂŁl vie est une chose solitaire
Tris!R et ci:Rre Quel!e beaute Voila deux yeux limpides ouwrts Viennent eclairer Man coeur en profondeur. Ce poeme emt par un peintre plut6t que pa!' un poete revele le sentiment qu'ont des Coreens
Avant les annees 60, alors que la Coree etait encore un pays agraire, la vache etait el~v
non pas pour son lait au sa viande com me en Occident, mais
pour sa force de travail: la vache etait !'alter ego du fermier. Elie eta it traitee com me un membre apart entiere de la fa mille agricole. 74
pour Ia vache mele d'un catain amour partage, de compassion et de purete. Les yeux de Ia vache demts dans ce poeme sont !'expression de !'amour pur. La vache a ete un des sujets favoris de Ia peinture coreenne et a inspire de nombreux artistes. Une des images typiques de Ia campagne coreenne representee en peinture ne serait pas un tableau champetre avec un troupeau de moutons, mais serait plut6t une scene ou l'on verrait un jeune gar~on entra!nant une vache, ou un boeuf, au bord d'un ruisseau ou !'animal brouterait l'herbe nonchalamment sous les branches d'un saule Un jeune gar~on assis sur le dos d'une vache, ou d'un boeuf, puant de Ia flute (ou pili en coreen) est une autre scene qui a souvent inspire les peintres. Dans le passe, les Coreens montaient "a vache" plut6t qu'a cheval L'histoire nous raconte que lorsque Maeng Sa-sang (]360. 1438), figure politique celebre du debut de Ia dynastie Chos6n, reconnu pour son caractere integre, fut .de retour dans son pays natal, a Asan, venant de seoul, il fit ce long voyage monte sur le dos d'une vache, habille de fa~on si sobre que meme les officiels du village ne reussirent pas a le reconnait:re II y a aussi une autre histoire tres connue d'une aventure avec une vache Celleci raconte que deux poetes, 0 Sang-sun (1894-196.3) et Py6n Y6ng-ro (189&1%1) et un romancier Yom Sangsap (1897-196.3) apres avoir bu un coup dans une fete donnee dans une montagne pres de seouL avaient enleve leurs vetements sous le coup de l'ivresse et etaient montes nus sur le dos d'une vache pour rentrer en ville Lorsque les Coreens veulent regler une dispute en detenninant qui a eu raison ou tort, ils disent: "Demande a quelqu'un qui monte "a vache" a l'envers f'. Cest une expression ironique qui veut dire que meme une personne aussi stupide pour pouvoir monter "a vacne" a l'envers est capable de dire qui a raison et qui a to1t II existe de nombreux proverbes utilisant !'image de Ia vache proche de l'homme. "Agir comme une vache rega~¡dnt une poule" est une expression utilisee pour montrer une indifference totale envers quelqu'un ou quelque chose. Ou encore "Lire une insaiption a travers l'oreille du boeuf' est utilise pour designer une personne qui perd son temps a expliquer quelque chose inutilement. "Gagner de !'argent comme un boeuf et depenser comme un ministre d'Etat" est une expression qui met en
valeur le travail, signifiant que !'argent est une recompense gagnee apres avoir durement travaille et par consequent doit etre utilise a bon escient '1e boeuf a besoin d'une colline pour se gratter'' sous-entend que, pour reussir, l'habilete ne suffit pas mais qu'il faut aussi avoir un environnement propice et etre dans de bonnes conditions pour agir. "Un boeuf marche a petits pas" signifie qu'une grande personne peut sembler travailler lentement mais devance firialement les autres en etant minutieuse "la vache est l'ancetre de Ia vie de ferme'' est un proverbe tres ancien d'origine rurale. II montre Ia place particuliere accordee a Ia vache dans les campagnes. A chaque pur du calendrier lunaire est attribue le noni. d'un animal selon les signes de zodiaque asiatique Le premier pur du boeuf du premier mois selon le calendrier lunaire, il etait coutume de faire reposer Ia vache, de l'alirnenter de grains cuits, de Ia faire grossir, et de l'e!oigner des outils agricoles. Cependant, depuis que Ia mecanisation agricole a commence a reduire le role de Ia vache dans les feimes, les hommes ont peu a peu perdu leur affection envers elle "Comme si Ia vache rega~¡d Ia poule'' par Ch'oe Sun-u (19161984), specialiste de l'histoire de !'art ancien, exdirecteur du Musee National, compa~ ¡e Ia vache cherie d'autrefois avec celle qui est delaissee aupurd'hui
la devalorisation de Ia vache coreenne a Ia campagne aupurd'hui est due non seulement a Ia disparition de Ia race pure et forte des vaches des regions du nord, mais egalement a Ia diminution de l'attachement montre par les fermiers pour leur vache. Dans le passe, les fermiers ei~vant leur vache comme l'une des leurs en remerciement de ses bons et loyaux services. nest evident que le sentiment vis-a-vis de Ia vache a completement change de nos purs, a Ia difference d'autrefois ou Ia famille entiere
accordait une attention parti-culiere a Ia vache tout au long de l'annee en s'inquietant de savoir si elle avait chaud ou froid Ainsi, Ia vache, fidele, diligente et silendeuse, qui ne menageait pas sa peine, etait consideree comme "a Ia base de Ia vie de Ia ferme''. Celie qui fut en toutes saisons au centre du paysage paisible pastoral coreen, se voit de plus en plus repoussee par !'industrialisation et par Ia mecanisation des campagnes, n'etant plus !'objet de toutes les attentions comme autrefois. â&#x20AC;˘
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ACTUALITES
Le pavilion careen de 1a Biennale de Venise Lee Yil Critique d'art
a Coree fete cette annee le cinquantenaire de sa Liberation. A cette occasion, elle a choisi de celebrer une "Annee de !'art". Dans cette perspective, sans pretendre rehabiliter !'art, son ambition est d'elever le statut de l'art et de le promouvoir. Un autre evenement, !'inauguration
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du pavillon coreen a la Biennale de Venise qui fete pour sa part son centenaire, marque cette annee 1995 placee sous le signe de l'art. Cet anniversaire rend encore plus significative la presence de la Coree. A ce festival d'envergure internationale renomme pour son histoire et sa , tradition, il n'y a que 25 pays qui aient
Yun Hyung-keun, UMBER-BLUE, 130x162 em, 1991
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des pavillons independants (la Coree comprise), alors qu'il y a entre 70 et 80 participants. La Coree est le deuxieme pays asiatique represente avec le Japon. Le privilege de pouvoir ouvrir un pavilIon independant represente une consecration remarquable d'autant plus que la Coree n'y a participe que 5 fois depuis 1986. La Coree est ainsi elevee au rang
des plus grands dans le domaine de !'art contemporain. Les annees precedentes, Ia Coree ne pouvait presenter que des peintures (a !'exception faite d'une oeuvre tridimensionnelle pour Ia Biennale de 1990), a cause de l'exigu¡ite de l'espace qui lui etait imparti car elle dependait d'un pavilion etranger. Desormais, avec Ia construction de son propre espace, !'art contemporain careen va pouvoir reveler au grand jour son identite. La pose de Ia premiere pierre a deja eu lieu en novembre dernier. rinauguration du pavilion ainsi que Ia conference de presse se derouleront le 7 juin, suivies le 11 du meme mois, par Ia ceremonie officielle d'ouverture de Ia Biennale. Ces dates devront etre imperativement respect ees pour que Ia construction du batiment soit achevee et que l'on ¡puisse installer les oeuvres des quatre artistes dont trois sont tridimensionnelles. En tenant compte des deux semaines de trava il necessa ires pour ['installation, tout devra etre termine au
Extraitde la serieT'o-u deJheon Soo-cheon, 1995
Avec !a construction du pavillon careen de cette an nee,
les artistes careens vont enfin avoir !a chance de pouvoir communiquer a l'etranw !a vraie identite de leur art contemporain.
plus tard le 20 mai. En tant qu e co mmissio nnaire de !'exposition, rna tache premiere a ete de setectionner les bans artistes. II a fallu tout d'abord prendre en consideration !'adequation des oeuvres avec l'amenagement de l'espace. Mais, naturellement, Ia qualite artistique de chaque oeuvre est restee .sans aucun doute le premier critere de selection. De plus, dans une exposition internationale de ce tte importance, ce qui doit emaner des oeuvres, c'est a Ia fois un esprit universe! et une originalite nationale: De ce fait, !'idee de privilegier deliberement, un style, une tendance ou une tranche d'age a ete eca rtee d'emblee, vu les courants artistiques co ntemporains careens. Quatre artistes ont ete elus en consequence : Yun Hyong-keun (Yun Hyo nggun) pour Ia peinture, Kim Inkyum (Kim In-g yo m) pour Ia sculpt ure , Jhe on Soo-cheon (Cho n Such'on) et Kwak Hoon (Kwak Hun) pour les installations dont une en 77
ACTUALITES
Kwak Hoonfait revivre le passe en utilisant desjarres traditionnelles dans ses installations.
exterieur. Examinons de plus pres !'oeuvre de Yun Hyong-keun (65 ans). Ses tableaux refletent un "pan-naturalisme" dans le sens ou ils expriment sa conception de Ia nature et sa maltrise de celle-ci : il s'agit de Ia plus orientale des philosophies de Ia nature. Son travail represente Ia simplification et Ia concentration du reel en un monde contemplatif qui met en jeu les correspondances existant entre le ciel et Ia terre ou entre le "yin" et le "yang". Le travail tridimensionnel de Kim Inkeun, presente une structure qui enferme un environnement transparent. En tant que sculpteur, il possede un sens de Ia composition qui embrasse un espace a Ia fois ouvert et ferme. Cette dualite lui permet de creer un nouvel environnement spatial. Les "installations" des deux autres artistes temoignent de leur grand interet
pour Ia creation d'un univers "antici vilisateur". D'!Jne part, realisee par ]eon Soocheon, !'oeuvre intitulee T'o-u rehabilite un motif indge~ traditionnel, simultanement mis en contraste ou integre a des dechets de Ia civilisation et a des elements artificiels et culturels. Cette oeuvre revele un microcosme independant qu'on pourrait qualifier de transcivilisation. D'autre part, Kwak Hoon rehabilite les vestiges de Ia vie traditionneUe de nos ancetres a travers une composition de jarres brunes luisantes appelee Onggi. Celles-ci sont appelees "objets" pour emprunter un terme a Ia terminologie esthetique. Mais ces objets possedent leur propre histoire et ils sont les traces memes de Ia vie quotidienne. Cales sur du bois nature!, ses objets presentes tels quels, nous rememorent Ia vie des ancetres coreens et nous offrent une
poesie epique emouvante. Pour !'instant, on ne peut pas emettre de jugement definitif sur ces "installations" dans Ia mesure ou elles ne prendront leur forme finale et ne passeront Ia rampe qu'une fois montees sur place. Comme je l'ai mentionne precedemment, Ia Coree participe a cette Biennale pour Ia cinquieme fois. Et sa participation est d'autant plus significative cette fois-ci que !'inauguration du pavilion coreen, evenement unique en son genre, aura lieu. II est chir que, finalement, grace a Ia Biennale de cette annee, Ia Coree entrera par Ia grande porte sur Ia scene artistique internationale. En tant que responsabl_e de Ia Commission, je souhaite que cette participation ne se limite pas a un passage eclair mais qu'elle puisse servir de tremplin pour defendre Ia richesse potentielle de !'art contemporain coreen â&#x20AC;˘
La participation des Careens aux derniRres Biennales amit ete
limitee aux peintures, mais cette anrzee voit une innomtion courag:mse dans k domaine de '1'installation"d'art 78
ACTUALITES
La destruction du batiment de l'ancien gouvernement colonial
R8tablir l'esprit national Lee Man-hoon Journaliste au quotidien Joong-ang
a demblition du batiment de !'ancien gouvernement colonial japonais, qui abrita les bureaux du gouvernement careen avant d'heberger jusqu'a ~ujord'hi le Musee national, fait !'objet depuis des annees de debats animes. Le 15 aout prochain, pour le cinquantieme anniversaire de Ia Liberation de Ia Coree du joug colonial japonais, cet edifice sera detruit une fois pour toute. La premiere etape de ce demantelement s'est deroulee lors du soixante-seizieme anniversaire du Mouvement d'independance du premier mars. Sous les yeux de 4.000 invites, membres des associations de patriotes et d'anciens combattarits et du grand public, s'est tenue une ceremonie extraordinaire devant le batiment pour proclamer sa destruction. La veritable demolition devrait debuter le 15 aout par le retrait du symbole de !'edifice : son dome. revenement doit colncider avec l'achevement du Musee royal d'histoire de Chos6n, actuellement en construction a proximite, et avec le transfert des reliques. Les officiels esperent que !'operation sera accomplie pour le cinquante-etunieme anniversaire de Ia Liberation le 15 aout de l'annee prochaine ou a Ia fin 1996 au plus tard. Ce demantelement s'inscrit dans le cadre d'un plus vaste projet : celui de Ia restauration du Palais Ky6ngbok, le palais principal du royaume de Chos6n (1392-1910), et Ia reconstruction de 48 edifices detruits par les Japonais lorsqu'ils erigerent le siege de leur gouvernement general. J.:operation devrait s'achever en 2009 et coOter au total 178,9 milliards de wons. Les instigateurs de ce projet souhaitent ainsi donner un nouveau depart au peuple careen dans son avancee vers le vingt-et-unieme siecle, en retablissant
L
La destruction, p:;trfois
crit'iq!AA?, de !'ancien batiment du fPUVernement colonial japonais a pour but d'o.ffrir au peuple careen un nouveau depart et de raviver !'esprit
national ebrante p:;tr une experience coloniale amere !'esprit national ebranle par cette experience coloniale amere. Le debat sur Ia demolition du siege de !'ancien gouvernement colonial s'est ouvert sous le premier president de Coree du Sud, Syngman Rhee. Depuis, Ia question s'est posee a plusieurs occasions et, en 1986, une mesure etait prise pour y installer le Musee national. Bien que les debats aient ete toujours animes, le cout exorbitant du projet faisait a chaque fois taire ses instigateurs.
Une serieuse question ideologique se posait egalement : ses partisans estimaient qu'il fallait eliminer toutes les traces de Ia domination coloniale japonaise, tandis que ses opposants affirmaient que cet edifice avait !'important role de rappeler aux Careens qu'ils ne devaient plus jamais devenir Ia proie de Ia tyrannie. La decision du gouvernement fut prise en 1990 apres que le president Roh Tae-woo apporta son soutien au deplacement du batiment de !'ancien gouvernement general et a Ia restauration. du Palais Ky6ngbok. Compte tenu du remarquable developpement economique de Ia Coree et de !'amelioration de son statut sur Ia scene internationale apres les Jeux Olympiques de seoul en 1988, Roh estima qu'il etait temps de raviver !'esprit national du peuple careen et leur estime d'eux-memes. !:initiative fut ensuite encouragee par le president Kim Young-sam lors de son investiture en 1993. Les projets de demolition du batiment et de transfert du Musee national sur un nouveau site a Yongsan allaient bientot se concretiser.
Le symbole de !'oppression coloniale. Cet edifice fut inaugure le 1 octobre 1926 apres dix ans de construction selon les plans decides par le premier gouverneurgeneral japonais, Masatake Terauchi, qui administra Ia Coree de 1910 a 1926. Ce batiment etait le plus grand du genre en Extreme-Orient, depassant meme celui du gouvernement colonial britannique en Inde et celui du gouvernement colonial neerlandais en Indonesie. Les Japonais voulaient ainsi afficher leur puissance economique et militaire aupres des Careens et de Ia communaute internationale. En effet, le Japon envahit par Ia suite Ia Chine et tenta de creer Ia plus grande zone de coprosperite 79
economique qui se soit jamais vue en Extreme-Orient. Ses plans furent faits par George de Lalande, un architecte allemand qui dessina egalement !'ancien Hotel Chosun au centre de seoul. Apres le deces soudain de l'architecte en aout 1914, ses croquis detailles furent acheves par Ichiro Nomura, architecte du batiment du gouvernement general japonais de Taiwan, dont l'equipe d'assistants incluait un architecte coreen, Pak Kilyong. L'edifice fut bati dans le style populaire neo - renais~c de l'epoque, sur un terrain de 97.000 metres carres devant le Kunj6ngj6n, Ia principale salle d'audience du Ky6ngbokkung. La structure de cinq etages offrait un espace habitable de 31300 metres carres, qui fut plus tard etendu. Selon une theorie, en construisant leur batiment colonial en face du Ky6ngbokkung, les Japonais auraient voulu annihiler !'esprit national du peuple coreen, car ils destabilisaient ainsi l'equilibre du trace geomantique de Ia capitale de Chos6n, centre autour du palais. En faisant obstacle aux forces naturelles puissantes qui emanent du palais situe entre le Mont Pugak (Pugak-san) et le Mont Nam (Namsan), les Japonais esperaient faire de Ia Coree leur serviteur eternel. La forme du batiment du gouvernement general ressemble au caractere chinois B en largeur. Si !'on combine a ce caractere le caractere reprenant Ia forme des deux flancs du Mont Pugak qui se trouve derriere le palais, avec le caractere suggere par Ia structure de !'Hotel de Ville egalement construit par les Japonais, le caractere chinois designant le Grand Japon B semble structurer le centre ville de seoul. Une fois les plans du batiment termines en 1916, pas moins de 48 edifices dans !'enceinte du palais furent demolis. Parmi les structures detruites figurait Ia Porte de Kwanghwamun, celle de Hungnyemun et Ia residence de Ia reine consort. Dans un article intitule "Versons une larme pour le peuple coreen", le Japonais Muneyoshi Yanagi, un celebre historien de !'art, sympathisant a Ia cause coreenne, critiqua amere-
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ment l'acte du gouvernement colonial : "Imaginez notre sentiment si Ia Coree annexait notre pays, detruisait le palais imperial et construisait a Ia place le bureau du gouverneur-general". Malheureusement, ses protestations ne furent jamais prises en compte. Sa construction couta 6,79 millions de wons, le prix de 560.000 sacs de riz a l'epoque ou !'equivalent aujourd'hui de 60 milliards de wons. Les Japonais n'utiliserent que des materiaux trouves sur place, mais refuserent d'employer Ia main d'oeuvre coreenne pour quoi que ce soit, a !'exception des taches les plus simples, estimant que les Coreens n'etaient pas competents dans Ia construction de type occidental. En janvier 1926, neuf mois avant !'inauguration officielle, le gouvernement colonial fut transfere de son ancien site de Namsan au nouveau batiment. De l'epoque du troisieme gouverneur-general Makoto Saito jusqu'a.la Liberation en 1945, !'edifice servit de quartier general a !'administration japonaise qui dirigea Ia Coree d'une main de fer. La nation recouvre sa souverainete En septembre 1945, peu apres Ia reddition sans conditions du Japon, \e General john R. Hodge, commandant des Forces armees americaines en Coree, requisitionna le batiment pour y installer le gouvernement militaire des Etats-Unis. C'est Ia que le General Hodge enregistra Ia reddition officielle du dernier gouverneur general japonais, Nobuyuki Abe, et du commandant des Forces armees japonaises en Coree. Ce jourla, des milliers de Coreens en liesse se rassemblerent dans les rues menant a !'edifice. Pour Ia premiere fois, le batiment revetait une image positive. Tandis qu'il abritait le gouvernement militaire americain, ses occupants l'appelaient le "Capitole" pour son style architectural. Le hall principal etait reserve a l'assemblee legislative du gouvernement militaire composee de representants coreens. Ce lieu servit plus tard a l'assemblee constituante de Coree du Sud. Lors de Ia fondation de Ia Republique de
Coree le 15 aout 1948, le gouvernement coreen independant prit possession de !'edifice. L'investiture du premier president de Ia Republique, Syngman Rhee, se deroula en face du batiment, et cet evenement contribua grandement a debarrasser !'edifice de son image coloniale. Le president Rhee reunit pour Ia premiere fois son cabinet dans Ia principale salle de conferences, Ia ou les Japonais preparerent leur complot de colonialisation. Temoin des vicissitudes politiques et sociales de l'histoire contemporaine de Ia Coree, ce batiment abrita un grand nombre de bureaux du gouvernement central jusqu'en 1983, date a laquelle un nouveau complexe fut ouvert a leur intention L'incident le plus tragique qu'ait connu le batiment apres Ia Liberation se deroula pendant Ia Guerre de Coree. II fut incendie par les communistes qui battaient en retraite lorsque les forces des Nations Unies reprirent Seoul, occupee depuis septembre 1950 par les Nord-Coreens. Dix ans plus tarcl, pendant Ia revolution estudiantine du 19 avril 1960, !'edifice fut a nouveau serieusement endommage quand les manifestants jeterent des pierres sur les bureaux du gouvernement. Le batiment fut reinvesti par le gouvernement central en novembre 1962, apres de vastes renovations qui couterent quelques 270 millions de wons. Avec !'expansion progressive du gouvernement, les ministeres charges de l'economie furent deplaces. Et au debut des annees quatre-vingts, seuls quelques bureaux administratifs parmi les plus importants y demeuraient.¡ En 1983, quand le bureau du Premier ministre fut a son tour transfere, on ferma le batiment. Apres des travaux d'amenagement se montant a environ 20 milliards de wons, le Musee national de Coree y ouvrit ses portes en aout 1986. Le musee s'y trouve toujours aujourd'hui, mais plus pour longtemps. Avec sa demolition, ce batiment tristement celebre et temoin d'une grande partie de l'histoire contemporaine tumultueuse de Ia Coree disparaitra a jamais de Ia carte. +
APERCUS DE LA LITTERATURE COREENNE
KANG SHIN- AE
L'interet litteraire de Kang Shinjae pour le destin des femmes et pour l'ethique du romantisme moderne, son style spirituel et ce qui le caracterise se revelent le mieux a travers ses nouvelles.
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Kang Shin-jae L'univers des nouvelles Kim Chong-uk Critique litteraire
n considere generalement Kang Shin-jae (Kang Sin-jae) comme un auteur de nouvelles qui traite avec sensibilite de !'amour et des liens d'affectiorr, plut6t que comme une romanciere. Elle a pourtant ecrit une trentaine de romans depuis que son premier livre, Les Vagues (P'ado) a ete publie en plusieurs episodes dans le magazine litteraire "Litterature contemporaine" (Hyondai Munhak), en 1%3. Mais !'image qu'on a d'elle en tant qu'auteur de nouvelles domine largement parce que son monde litteraire y est mieux represente. Ses centres d'interets litteraires uniques qui toument autour du destin de Ia femme et de l'ethique du romanesque de ses contemporains, ainsi que son style empreint de spiritualite, tout comme Ia sophistication des descriptions de ses personnages et de leurs sentiments, sont parfaitement adaptes au genre de Ia nouvelle. Elle !'a elle-meme confi.nne un jour en affirmant que '1a perfection artistique peut etre atteinte dans les nouvelles car celles-ci representent Ia forme Ia plus parfaite du genre litteraire". Cest vers Ia fin de l'annee 1949, juste avant que Ia guerre de Oxee n'eclate, que notre auteur a fait ses debuts litteraires. Sa carriere d'eaivain a serieusement demarre avec Ia publication de deux de ses nouvelles Le Visage (Olgul) et Cli5ngsuni dans Ia revue litteraire ''Belles-lettres'' (Mun-Ye) en novembre 1949, avec le soutien du maitre Kim Tong-ni, romancier et auteur de nouvelles lui-meme. Elle a depuis publie de nombreuses autres nouvelles et oeuvres, dont Lejeune anne (Cholmun nut'inamu) et Tal-o part pour Ia montagne (Talonun sanulo), qui ont ete tr~duies en fran<;:ais dans cette edition de KORE:'-NA. Assassinat (Sihae), son dernier roman, est soiti en feuilletons vers Ia fin des annees 1980. Kang Shin-jae a rec;:u de nombreux prix au cours de sa caniere de quarante annees : celui
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de !'Association des Ecrivains careens en 1959 pour sa nouvelle La falaise (Cholbyok), celui de Ia troisieme edition du Prix des femmes.ecrivains en 1967 pour son roman Le chagrin splendide (I ch'allanhan sulp'uml), le Grand prix culture! Chung-ang pour La femme du prince bo/itier(Sedosejabin) en 1984 et enfin, le Prix de l'Acadernie nationale pour son oeuvre litteraire, en 1988. Le style employe par Kang Shin-jae pour ecrire est unique en raison de sa technique descriptive. Elle cree des personnages en utilisant des expressions extremement specifi_gues et sensuelles. Les personnages revelent rarement leurs personnalites d'euxmemes, ils se devoilent atravers des appatitions et des actions fragmentees Voici un extrait tire de sa nouvelle Lejeune
anne: "II emane toujours de lui une odeur de savon Non, fai tort, ce n'est pas entierement vrai. je ne peux pas vraiment dire ''toujours". Cest, quand il revient de !'ecole, aIa maison, qu'il court dans Ia salle de bain et qu'il en ressort apres s'etre battu et rebattu avec l'eau qu'il degage une odeur de savon. Meme si je suis assise, immobile, a mon bureau et que je lui toume le dos, je puis le sentir venant vers moi. Je peux connait:re al'avance son humeur et meme dire que! type d'expression se laisse lire sur son visage". Kang Shin-jae n'utilise pas le langage de Ia logique et des concepts pour faire !'analyse de ses personnages. Elle dea¡it simplement les traits de leurs caracteres en phrases concises. Quelques eoivains examinent de fac;:on systematique leurs personnages paragraphe par paragraphe. Kang Shin-jae, quant aelle, revele les siens par le biais de stimuli sensoriels comme "l'odeur du savon". Elle a elle-meme une fois confesse que dans Ia plupalt des cas, elle se laisse seulement
conduire par des images vagues. Le lecteur assemble les pieces qui constituent un personnage, !'aura et les antecedents cemant le tout, de Ia meme maniere qu'on ferait un puzzle en le reconstituant avec soi.n pour en obtenir une seule fonne uni.fiee Kang Shin-jae cree aussi une atmosphere exotique avec des mots d'emprunt composes peu familiers comme une "robe bleu de Turquie", une atmosphere qui met en scene des personnages occidentalises, une ambiance pas purement coreenne ainsi que des styles de vie presque etrangers et auxquels on est peu accoutume: en temoigne le district residentiel prospere deait dans Lejeune anne Elle a attire !'attention du public par sa fac;:on d'ecrire qui tient d'une communion d'idees ressemblant a de Ia poesie. Mais il y a autre chose aussi. Le lecteur doit garder a!'esprit que c'est une "femme-eaivain" dans tous les sens du terme et que ses histoires sont "des recits de femmes". Ses personnages principaux sont generalement des femmes. Et si ce ne sont pas des personnages femi.nins, les evenements se devoilent toujours a travers les yeux d'une femme. Kang Shin-jae perc;:oit le monde et les objets qui l'entourent en tant que femme. nest bon de regarder avec attention les personnages feminins qu'elle cree, car les fe~ms sont incontournablement au centre de ses histoires. Elle s'interesse en particulier aux divers processus par lesquels les femmes font !'experience de Ia douleur, mais aussi a !'alienation et aIa solitude qui sont des elements fondamentaux dans notre existence. Son interet pour les femmes a ete clair des le debut de sa carriere avec des nouvelles comme Le visage et ChOngsuni. Le visage nous raconte l'histoire d'une femme qui a decide de vivre al'ecart de Ia societe apres Ia molt de son mari qu'elle airnait Cli5ngsu~ est le root d'une femme passive qui a peur de reveler son amour a un homme et
qui finalement le perd au profit de sa jeune soeur. Kang Shin-jae a continue a ecrire sur !'existence des femmes dans ses oeuvres bien apres Ia guerre de Coree. A noter particulierement l'etat de transformation psychologique apporte par les erreurs des personnages feminins en matiere d'amour. Leurs relations avec les hol11)1les "pataugent'', en partie acause de Ia lutte fqndamentale que mene l'homme pour survivre mais aussi en raison de circonstances inevitables comme Ia guerre Cest Ia douleur provoquee par Ia peite de !'amour qui amene le personnage feminin ase mefier de
Les kcteurs de Kang Shin-j;le
assemblent les pikes de clxique person11ÂŁ1fJJ azxx leur aura et leurs antkiXients,
comme un puzzle qubn reconstitue avoc soin pour
obtenir une seuleforme unifiee.
toute l'humanite et en consequence, on assiste a son rejet de tout amour sincere que petfvent lui temoigner les autres. Les cercles vicieux des problemes de coeur, de Ia mefiance et du refus d'accepter !'amour conduisent finalement les personnages au desespoir et aIa solitude Les protagonistes de notre auteur font !'experience de Ia solitude et de !'alienation en raison de lems relations avec les membres de leurs families et de leurs amants, genre de frequentations sociales que l'on retrouve frequemment chez Ia plupait des auteurs. Les personnages de Kang Shin-jae sont toutefois submerges par ces relations. Tis pens~ vivent 83
et meurent dans le contexte de leurs liens familiaux ou de leurs passions. En d'autres termes, ces relations sont pour eux le monde luimeme et non pas une ouverture sur le monde. C'est pour cette raison que l'effondrement de telles relations entralne la perte de tout lien humain et mene finalement a !'alienation et a Ia solitude spirituelles Lejeune anne, publie au debut des annees 1960, met en lumiere la sensibilite delicate et candide de Ia.jeunesse dans une representation de !'amour innocent entre un jeune homme et une jeune fille qui ne sont pas lies par le sang mais qui sont frere et soeur par Ia loi. Le personnage principal Sukh~ demenage a seoul chez son beau-pere lbrsque sa mere se remarie. Le nouveau pere de Sukhui est un professeur dont le fils, Hy6ngyu, est un etudiant specialise en sciences physiques. Au fur eta mesure que le temps passe, Sukhui realise qu'elle considere Hy6ngyu non pas comme un frere mais comme un jeune homme. I.:histoire traite de !'amour incestueux, un tabou social, et de !'amour des jeunes en general. Les sentiments amoureux rnais interdits d'une jeune fille de 18 ans rendent Ia lecture fascinante. Ses emotions lui permettent d'effectuer une prise de conscience au moment ou elle entre dans l'age adulte. Le reat nous montre aussi comment une innocente jeune fille surmonte le traumatisme mental ne de son amour interdit. Le passage suivant en est tres evocateur. ')e ne me sens pas coupable d'etre amoureuse de Hy6ngyu, mais prenant en consideration Ia nature de l'affinite qu'il y a entre Monsieur Yi et rna mere, cette so1te de trahison pourrait certainement entralner la destruction totale de nous quatre. Le son deplaisant et dangereux du mot destruction me fait tremble!". Les tabous moraux fa(onnant !'existence des personnages emergent a travers une serie de coincidences. Si la mere de Sukhui et Monsieur Yi s'etaient maries "des le debut'', un amour n'aurait pas pu naltre entre Sukhui et Hy6ngyu. Quand Sukhui enfreint la convenance sociale et le tabou concernant !'amour entre un frere et .une soeur, elle fait un pas en direction d'une qestruction physique et mentale. La destruction de sa famille l'amenerait a se sentir seule et a s'aliener les autres En fin de compte, elle n'a pas d'autre choix que de se plier aux conventions, face a la menace de destruction et 84
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de solitude, parce que sa famille represente tout pour elle, c'est-ii-dire son monde. Cette histoire a comme point de depatt le fait que Hyongyu et Sukhui n'ont pas choisi volontairement de vivre dans la societe qui s'interpose dans !'amour qu'ils eprouvent l'un pour !'autre. Cet etat de fait dont decoule la conclusion est rendu possible par !'unique nature du genre de la nouvelle. Mais nous devons garder a !'esprit que les per?CJnnages de Kang Shin-jae ne passent jamais par un processus de creation et de developpement lis sont plut6t la premisse du recit Les conditions sociales qui determinent !'existence des personnages p1incipaux representent un destin inevitable. Elles existent avant meme que l'histoire ne commence. De temps a autre, ces conditions apparaissent sous la forme de circonstances collline Ia guerre, mais, du point de vue des personnages, elles sont aussi ineluctables que le destin lui-meme. Kang Shin-jae laisse neanmoins la porte ouverte a l'espoi.r, n'abordant pas le destin a un niveau fondamental. Le destin est simplement la premisse de l'histoire, il ne confine ni ne reprime !'existence des personnages. Un monde offrant la possibilite de fuir le destin est en realite !'incarnation de !'amour. Les oeuvres de Kang Shin-jae sont basees sur le desaccord et le conflit entre les hommes et les femmes, mais ces oeuvres vont au-dela car elles
aspirent a l'harmonie. Pour les personnages de notre auteur, !'amour est un sentiment spirituel, romantique, raffine et non pas une vive passion Ceci est clair des le debut avec Lejeune anne lorsque Sukhui dit "qu'il emane toujours de lui une odeur de sa von". Dans cette histoire, Kang Shin-jae ne s'interesse pas a la convoitise et a l'egolsme masculins, lesquels rendent si souvent !'amour romantique impossible dans le monde reel Elle met !'accent sur les aspects de !'existence des femmes qui sont deformees par la structure denaturee de Ia convoitise. C'est vers Ia fin des annees 1960 que Kang Shin-jae a commence a montrer un interet pour la structure denaturee de cette convoitise masculine ainsi que pour la structure sociale irrationnelle, structure qui forme la trame d'oeuvres comme Tal-a part pour Ia montagne. Ses personnages ne sont plus simplement depeints en tant que victirnes des hommes. La litterature de Kang Shin-jae s'est constituee en majeure pattie dans le format de Ia nouvelle. Dans les annees 1960, lorsqu'elle a decide de devenir ecrivain, la communaute litteraire coreenne etait dominee par ce que les aitiques litteraires appelaient "Ia conscience de brulis''. S'eloignant radicalement des traditions liees au realisme litteraire, courant methodologique dominant jusque-la, les ecrivains de l'apresguerre se sont mis a experin1enter des styles litteraires divers pour inventer une nouvelle methode de creation. Ils ont choisi en consequence l'outil de petite taille mais bien affUte, qu'est la nouvelle, plut6t que le roman qui est un instrument de plus grande dimension mais qui s'est emousse. Aiguisant et polissant continuellement cet outil, ils ont tente de faire une description des terres en friche spiiituelle de la periode de l'apres-guerre. C'esr pour cela que le meilleur du travail qui a ete presente depuis cette periode jusqu'aux annees 1970, a ete redige dans le genre de Ia nouvelle. Kang Shin-jae utilise Ia nouvelle pour deai.re des fragments de Ia societe coreenne de l'apresguerre d'une maniere large et complete. Elle affronte la realite sociale a travers ses poltraits, eXatninant !'existence des femmes ainsi que les conflits personnels ou familiaux, les amenant a une forme anterieure liees au monde inte1ieur de l'individu, et ce, par le biais d'un style de prose unique eat·acteiistique. •
NOUVELLES DE LA KOREA FOUNDATION
Subventions wur les etudes Les programmes de l5ourses de sur la Coree a retranger la Korea Foundation a
lA Kora::t fuundation offre illle aide fmandere aux universitt§s, aux instituts de ro:herche et aux bibliotheques l'etran~ JX)ill les efforts qu'ils mffilaent en vue de promouvoir 1es etudes sur Ia Coree dans lewpays. Les projets soumis a !'approbation de Ia Korea Foundation cloivent relever des Sdences-Humaines, des Sdencs-~ ou d'illl domaine artistique, et dans le cadre des ob1=ctifs defmis d-apres: 1) Creation ou developpement de departements d'etudes sur Ia Coree ( cow-s et enseignants ) 2) Mise adisposition de bourses pow- etudiants de zeme ou 3eme cycles et d'allocations de recherche pour les enseignants 3) Partidpation aux acqt.!isitions des bibliotheques et des catalogues.
Les dossiers d'inscription devront etre rernis a Ia Korea Foundation avant le 31 mai Les resultats de Ia selection finale seront annonces le 15 octobre de l'annee en cours.
Pour obtenir l~s dossiers d'inscription, des conseils;ou toute autre illformation, s'adresser a:
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Les candidats devront remettre en double exemplaire les dossiers d'inscription a Ia section-bourses de Ia Korea Foundation et soumettre leur projet de recherche academique a Ia Korea Foundation avant le 31 mai. Les resultats de Ia selection finale seront annonces le 15 aout de l'annee en cours.
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