SLAB fanzine issue#4

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Liam Tomkins / Crackneck / Central Coast / pic: Sam Powyer


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DE

Photo: Nick Bannehr


Edito.

France, douce France, le pays de mon enfance... Terrain de toutes les premières fois où l’on reconnaît toutes les odeurs durant toutes les saisons, où chaque ombre de chaque heure de la journée semble être gravée dans notre mémoire. D’abord une vague de souvenirs, marée nostalgique qui reflue les bons et les moins bons moments, en somme celle qui nous a construit. Puis un sentiment nouveau nous envahit au fur et à mesure que le spot se remplit. Une rage, aussi cristalline que cette lèvre qui se dresse devant nous un matin d’été, grandit en nous. Celle envers notre semblable, lui qui dérange. Pourquoi ? Parce qu’il est là, tout simplement, et pas ailleurs. Soudain, la poitrine se gonfle, paraît plus lourde qu’une seconde auparavant et se charge d’un sentiment troublant, entre joie et tristesse, celle de la nostalgie du pays. Ce pays qu’on a connu, sans cris ni fureur. Alors on s’arrête et on se dit : il est passé où le respect ? La voilà la question fatidique, celle dont on ne cesse d’éluder la réponse, celle que les grands hommes affrontent le regard perdu vers l’horizon. La question, cette brèche qui s’ouvre devant nous, abyssale, et dont la réponse était là, évidente, bête de simplicité. Alors on plie les gaules, on va un peu plus loin ou à des milliers de kilomètres, juste histoire d’être peinard. Sauf que répondre à l’invitation du voyage c’est bien, savoir chez qui on s’invite c’est mieux. Savoir se laisser envahir par l’atmosphère, écouter et ressentir les choses. Quoi de plus banal, mais qui conditionne notre survie. Alors on se rend compte que partir c’est aussi se retrouver chez l’autre, parfois quelques mètres suffisent à faire du chasseur un chassé. Être l’hôte le temps d’une session est désormais devenu un art et pour goûter aux joies de l’hospitalité, il est bon de ne pas transiger avec certaines règles. Car après tout, dans un camp comme dans l’autre, on peut toujours se poser la question : il est passé où le respect ?


Texte: S.Da silva Série de clichés aqua / Kevin Row


Eric Gamez / pic: Iraultza

Lucky- Unlucky / Article / page. 60


Shooting Gallery / Galerie / page. 64

Annaelle / Galerie / page. 52

Pierre-Louis / Interview / page. 14

Ala moana / Article / page. 26

*SOMMAIRE

Sam Powyer / Portfolio / page. 32

A day trip / Article / page. 46



MAELL’HELGOUALCH NICOMARIANELLI HUGOLAGARDE JULIENLE SEHAN

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/ Caldo

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Interview & Texte: S. Da silva

A L’HEURE DE L’HÉGÉMONIE FRANÇAISE DANS LES EAUX INTERNATIONALES, L’ENCRE COULE À FLOTS SUR NOS TÊTES D’AFFICHES NATIONALES. LOIN DE NOUS L’ENVIE D’ÊTRE DANS LA TENDANCE, LES ONDES ET LES MURMURES DU PUBLIC ONT QUAND MÊME SU ATTEINDRE NOTRE QUARTIER GÉNÉRAL. L’ÉQUIPE S’EST SENTIE PRISE PAR LA FERVEUR GÉNÉRALE, ET POUR TOUT DIRE ÇA FAIT UN BIEN FOU POUR NOTRE EGO DE PATRIOTE D’ENTENDRE LE CHANT DU COQ AU-DESSUS DES ÉCUMES HAWAIIENNES ET PAR-DELÀ LES MONTS ET VALLÉES PÉRUVIENNES. UNE FÊTE RAPIDEMENT ÉCOURTÉE, LE DIRECTEUR DE PUBLICATION ME RAPPELANT À SON BON SOUVENIR AU TRAVERS DE MA MESSAGERIE ET ME PROMETTANT LA VISITE DE VIEUX COUSINS UKRAINIENS, QUI SONT TOUT AUSSI FANS DE BOOGIE QUE JE SUIS FAN DE BORSHCH. IL FALLAIT TAPER FORT, VITE ET AOC. BREF, C’EST LE NOM DU PTIT GARS D’À CÔTÉ QUI M’EST VENU À L’ESPRIT. DERRIÈRE LE SÉRIEUX ET LA RIGUEUR DE PLC, DES MOTS QUI COLLENT PLUS À UN ECCLÉSIASTE QU’À UNE ROCKSTAR, SE CACHE LA FOLLE PASSION DE PIERRE-LOUIS, LUI QUI A ACCEPTÉ DE SE CONFIER À NOUS EN DÉPIT D’UN AGENDA SERRÉ ET DE LA DISTANCE. //////////////////////////////////////////////////////////////////


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Tout le monde a un rêve. Le fossé est abyssal entre ceux qui rêvent d’une autre vie et ceux qui font de leur rêve une réalité. Lui, il en est. Les grands hommes sont de grands rêveurs. On les dit obsessionnels, n’est-ce pas là un doux euphémisme pour un passionné. La vie offre à certains des chances, que très peu saisissent. Il a su très jeune prendre son destin en main en vivant son obsession à fond. A 20 ans, il en a déjà passé plus de 10 sur un boogie, et son palmarès est aussi long que ... mon leash. L’enfant prodige du bodyboard français se confie à nous au travers d’une série de question, d’interrogations et de vilaine curiosité assumée. Du Maroc à Hossegor, retour avec Pierre- Louis sur son parcours et sa vision du boogie. D’où vient Pierre-Louis ? J’ai grandi en Méditerranée puis au Maroc ou j’ai commencé le bodyboard.

Débarquées en France, ta famille a posé ses valises au Pays Basque puis dans les Landes. Comment s’est organisée ta vie sur ces 2 régions ? A 11 ans, je suis venu habiter à Bayonne. J’étais au collège et je surfais après l’école ou les week-ends. Par contre lorsque l’hiver est arrivé, beaucoup plus rude qu’au Maroc, j’ai quasiment perdu toute motivation pour aller à l’eau et j’ai commencé à fréquenter le skate park de Bayonne. J’ai pris vraiment goût à ce sport et j’ai passé quasiment tout l’hiver làbas. J’ai même failli laisser tomber le bodyboard à cause du froid en France. Heureusement grâce à ma mère et mes amis, qui m’ont poussé à passer plus de temps dans l’océan, à me forcer à aller à l’eau et vraiment me motiver dans la voie du bodyboard, j’ai finalement choisi l’océan.

Quel est ta relation avec l’océan ? J’adore l’océan, j’en ai besoin pour mon équilibre. Pratiquer un sport en rapport avec lui me force à le respecter énormément, c’est lui qui nous contrôle dans l’eau. Le boogie est tout simplement un moyen de rester le plus possible dans l’eau tout en s’amusant.

Quel est ton lieu de résidence principal ou bien l’endroit que tu appelles «maison» ? A l’âge de 14 ans j’arrive dans les Landes. C’est l’endroit que j’appelle «maison». J’adore revenir voir ma famille et mes amis, je trouve que les vagues ici sont parfaites pour progresser, les beach breaks sont pour moi un terrain de jeu parfait.

Tu as appris à nager avant d’apprendre à marcher. Parle-nous de ta famille, comment t’ont-ils mis en contact très tôt avec la mer et ses vagues ? Mes parents sont des passionnés de l’océan et tout ce qui touche à l’eau. Ma mère était une windsurfeuse confirmée et mon père a gagné les championnats de natation du Maroc dans sa jeunesse. J’ai donc passé toute mon enfance au plus près de l’océan. J’ai également une petite soeur qui aujourd’hui est sur la voie pour devenir surfeuse professionnelle.

As-tu senti une différence entre ta pratique du surf en terres basques et celui des Landes ? Non pas vraiment, il y avait juste plus de bodyboarders sur Anglet que dans les Landes.

Tu as fait tes premières armes sur les côtes marocaines. Qu’as-tu gardé comme souvenirs marquants lors de tes premières expériences aquatiques là-bas ? J’ai gardé d’excellents souvenirs, normal, c’est là-bas où tout a débuté pour moi. Là où j’ai réalisé mes premiers pas en bodyboard, réalisé mes premières manoeuvres, participé aux premières compétitions.

Parle-moi un peu de ton jeune apprentissage, décris-moi un peu cette période de ta vie. J’ai commencé avec une bande d’amis, ils étaient tous là pour me donner des conseils, me donner confiance dans les conditions solides, me pousser à participer aux compétitions. Je n’avais pas vraiment de mentor, par contre j’avais comme héros Adnane Benslimane : je me rappelle que quand il surfait, je sortais de l’eau pour le regarder et je n’avais qu’une envie, être capable de faire la même chose.


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Passage du loisir à l’addiction. Rappelle-nous rapidement ton palmarès. 8 fois champion de France, 2 fois champion d’Europe, 4ème mondial en 2008, 6ème en 2009, actuellement 2ème au classement IBA.

nuer ma carrière et arriver ou j’en suis aujourd’hui, fût d’arrêter les études en première même si aujourd’hui je ne regrette rien.

Pourquoi la compétition ? Parce qu’à la base, j’ai l’esprit de compétition. J’ai toujours adoré affronter des adversaires, gagner des événements sportifs, remporter des coupes. Je pense juste être un compétiteur dans l’âme. J’aime la compétition, il faut se dire que c’est le moment de montrer au public, en temps réel, ce que l’on sait faire. J’adore gagner, je déteste perdre. J’ai participé à ma première compét’ à l’âge de 10 ans au Maroc dans la catégorie Open, j’étais super heureux de pouvoir y participer. A partir de ce résultat, j’ai toujours su que je pouvais encore gagner d’autres compét’, je n’imaginais pas à ce moment que je battrai un jour mes idoles en série.

Entraînement /Travail sur soi

A quel moment tu t’es dit que tu voulais faire du bodyboard plus qu’un simple loisir ? Ou bien est-ce que tout ça est arrivé naturellement ? Je pense que tout est arrivé naturellement. Je n’ai jamais forcé le destin en brûlant les étapes. Tout s’est passé très vite finalement : commencé à 10 ans, gagné ma première compétition la même année, je suis venu habiter en France, j’ai gagné les championnats de France l’année d’après en 2002, en 2004 je gagnais les championnats d’Europe, en 2005 la première étape internationale IBA et en 2006 je suis passé pro. En 2007, j’atteins ma première finale IBA au Chili et en 2008, j’ai ma première occasion de gagner le titre mondial IBA aux Canaries.

Quelle fût ta plus grosse frustration lors d’une compét’ ? Rester bloqué pendant certaines compétitions, quelle que soit l’importance de l’événement, ça reste frustrant.

Tout les parents n’écoutent pas forcement les envies d’un gamin de 14 ans, comment ça c’est passé avec ta famille ? Mes parents m’ont toujours soutenu dans tous mes choix et j’ai eu beaucoup de chance, je ne serais pas là aujourd’hui sans eux. Ce n’est pas évident de laisser son enfant partir seul à 14 ans à Hawaii ou en Australie, de le laisser abandonner les études pour un sport. Je ne les remercierai jamais assez. As-tu dû faire certains sacrifices ? Un des plus grand sacrifice que j’ai dû faire pour conti-

Comment te prépares-tu avant une compétition ? J’essaie de surfer le spot de la compét’ ou des vagues similaires, d’avoir un bon rythme de vie et de me concentrer tout en restant détendu. En plus de la préparation physique, comment développes-tu ton approche mentale du sport et du microcosme de la haute compétition ? Pour l’instant, je n’ai pas encore de tactique particulière au niveau du travail mental mais j’essaie de travailler dessus car le mental représente une part énorme de la réussite.

Et ta plus grosse déception ? Perdre contre Dave Hubbard cette année au Sintra Pro ou ma seconde place à Pipe juste derrière Hardy. Qu’est-ce qui t’a déjà fait perdre ton sang froid lors d’une compét ? Le fait de ne pas pouvoir m’exprimer soit par l’habitude des riders sur le spot soit par le manque de vague. A l’inverse, raconte nous un peu tes plus belles victoires et pourquoi ? Ma première victoire au Maroc quand j’avais 11 ans car tout simplement c’était ma première victoire en compétition. Les championnats de France en Guadeloupe car ma famille avait fait le déplacement et c’était mon premier titre en Open. Ma première victoire sur le tour IBA restera forcément gravé à jamais et bien sûr le Pérou qui était tout simplement la compétition dont j’avais toujours rêvé. Ce n’est qu’avec du recul que l’on réalise qu’on a réalisé son rêve.


Back Ă la maison / pic: Caldo

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Sortie de Barrel, Pipeline / pic: Tungsten


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Qu’est ce qui te permet de souffler, respirer, reprendre pied ? Quand la pression devient trop forte, le seul truc qui peut changer mon état, c’est de scorer une bonne vague. D’ailleurs as-tu déjà eu ce sentiment de perdre pied par rapport à tes échecs mais aussi à tes réussites ? Non jamais. A t-on avis quels sont tes axes de progression ? Perfectionner mes manoeuvres, avoir plus de contrôle dans les barrels, travailler mes lignes. Depuis ta victoire au Pérou, tu enchaînes les bons résultats. Qu’est-ce qui a changé selon toi là-bas ? Est-ce que tu penses que ce changement te permettra d’accéder au titre en2011 ? Je ne sais pas, rien n’a changé au Pérou par rapport aux autres compétitions. J’ai juste été bien placé pour les bombes à chaque série cette fois. On verra comment se passera 2011, déjà j’aimerais savoir quelles étapes seront confirmées, je suis en tout cas super motivé surtout après le titre d’Amaury. Les formats de compétition varient souvent selon les spots et les pays. Qu’est-ce qui selon toi fonctionne actuellement et qu’est-ce qui pourrait être amélioré ? Ce qui fonctionne actuellement : les séries man on man. En ce qui concerne l’amélioration du Tour, il y a beaucoup de choses à changer. Un nouveau format a été proposé pour l’année prochaine et j’attends de voir ce qui va se passer. Penses-tu que l’on pourrait recréer un Super Tour comme il y a quelques années ? J’ai un format de compét’ en tête mais j’attendrai avant de pouvoir le proposer. Le Super Tour était effectivement un bon format mais ça n’est pas encore le format idéal pour moi. Boogie Business Tu as été remarqué très tôt par les marques. Comment se sont passées tes premières relations avec les marques ? Mes premiers sponsors ont été RIP, Sen no Sen et Rip Curl. J’étais très jeune à l’époque et super heureux d’avoir du matos gratuit et des autocollants sur ma board.

Comment gères-tu les relations avec les différentes marques que tu représentes désormais ? J’ai à ce jour un agent qui s’occupe de mes contrats de sponsoring. Y a-t-il une pression particulière de leur part ? Il y a forcément une pression. Quand une marque vous supporte ou a confiance en vous, la volonté de réussir et valoriser la marque est source de pression mais j’ai la chanced’avoir une très bonne relation avec tous mes sponsors qui me supportent autant dans lesbons moment que dans les moments difficiles. Ne penses-tu pas qu’il y a parfois une surenchère à la prise de risque ? Bien sûr, comme dans tous les autre sports. T’es-tu déjà fait une très grosse frayeur ? A Hawaii le plus souvent. Quelle est la dernière mésaventure qui te soit arrivée ? Quand j’ai cassé mon leash à Arica le lendemain de la compétition. Les vagues faisaient 3 mètres voire plus et j’ai dû faire du bodysurf dans les rochers pour pouvoir sortir. Médias / Exposition / Public Comment s’est fait ton apprentissage de la machine médiatique ? Naturellement. On devient forcément meilleur avec l’expérience et en suivant les conseils des professionnels. Tu viens de créer ton propre site Internet : qu’est-ce qui t’as poussé à le faire ? Un site Internet était tout simplement obligatoire médiatiquement parlant. Le Net est devenu tellement puissant aujourd’hui, que pour rider il est plus qu’indispensable. J’ai toujours voulu avoir un site, partager mes idées, mes opinions, mes sessions... Je prends beaucoup de plaisir à travailler dessus et je n’en suis qu’au début.


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As-tu vécu des expériences douloureuses avec certains médias/ mags/ journalistes/ photographes ? Non, en tout cas pas encore. Comment penses-tu que les autres te perçoivent ? Je ne sais pas comment les autres me perçoivent, j’essaie de donner une bonne image dans toute situation. Comment gères-tu cette approche de la célébrité «entre guillemet» ? Je garde toujours le tête sur les épaules. Comme dit Mike Stewart, le fait que le bodyboard soit si peu médiatisé force les professionnels à rester humble. Pour ma part, je suis resté la même personne. Tout ce que je veux, c’est réussir dans mes projets et surfer le plus possible. CLAP DE FIN Si Pierre-Louis devait arrêter le boogie, dans quoi te lancerais-tu ? Maintenant je ne sais pas, peut être un business en rapport avec le bodyboard. Le Pierre-Louis à 40 ans : toujours rider comme Mike Stewart ou entrepreneur comme Eppo ? Je ne sais pas. Rider comme Mike Stewart. Comment souhaiterais-tu finir cette interview ? Tout simplement en remerciant toutes les personnes qui m’ont soutenu jusqu’à maintenant, ma famille, mes amis et mes sponsors (Vs, Stealth, Rip Curl, Pull In, Ocean Roots, Ogm). ///////


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Photos: Miguel Nunes


PIERRE-LOUIS COSTES

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Ala manoa/

Nous sommes à la fin du mois de mars à Hawaii. Ca y est, Pipeline est ensablé. Désormais les houles ont tendance à toucher la côte Sud d’Oahu. Les célèbres spots comme Waikiki ou encore Sandy Beach fonctionnent davantage laissant peu à peu la frénésie du North Shore s’évaporer dans les esprits de chacun. C’est un peu comme si ce dernier avait assez donné cette saison et qu’il était enfin temps pour lui de passer le relais. Ce jour là, sur les conseils de mon ami hawaiien Keith Sasaki et du photographe Gareth Sheehan, je me suis aventuré sur un spot qui m’était jusqu’alors inconnu : Ala Moana.

Texte: N. Marianelli & Photos : Lequeré

Ala Moana, session et réflexions.

Ala Moana qui signifie «way to the ocean» en hawaiien (dixit Keith Sasaki) se situe en plein cœur du centre ville d’Honolulu. C’est une vague de reef qui déferle à l’embouchure d’une rivière et d’un charmant port de plaisance. L’endroit est très joli, bordé de vastes espaces verts où comme il sembleêtre la coutume ici le samedi, les hawaiiens s’adonnent aux joies du barbecue familial. Néanmoins, l’urbanisation autour de cette vague me rappelle quelque peu ma France natale. C’est vraisemblablement à cause de ses digues artificielles et de la couleur de l’eau qui demeure d’un brunâtre opaque familier. Après plusieurs quarts d’heures de va-et-vient pour trouver une place de parking, Gareth et moi parvenons enfin à stationner la voiture. Il est temps de checker. Le peak est bien outside. Une vague d’environ 2 mètres s’enroule parfaitement en gauche à bien 400 mètres de là. Au loin, on distingue une vingtaine de surfeurs. Pour gagner le line up, il faut toutefois être vigilant. Il faut se jeter depuis la rivière mais surtout veiller au fort trafic fluvial car les bateaux naviguent à vive allure. Pourquoi tant de précipitation de leur part ? Parce que tout comme nous, les marins ont une barre à franchir. Depuis le rivage, je les vois attendre la fin des séries pour entrer ou sortir du port : impressionnant ! Sans plus attendre, je me jette des rochers où bon nombre de photographes commencent às’installer. Après dix longues minutes de rame attentive, j’arrive à destination. Durant ma traversée, j’ai pu observer que la vague était tout simplement parfaite pour le boogie. Le take off commence par une mousse, puis la vague jette en foam bowl et ne ferme jamais. Les surfeurs n’ont de cesse de se freiner pour se caler et sortent des barrels propres avec souffles. Les sets quant à eux, sont peu fréquents et amènent seulement 3 ou 4 vagues, pas plus. Au line up, je constate que l’estimation du nombre de gars à l’eau que je venais de calculer quelques minutes auparavant est complètement erronée. Il y a facilement le double de riders qui attendent assis sur leurs boards, sur leurs shortboards pour être plus précis… A mon tour je me place, ni à l’intérieur ni à l’extérieur. J’attends là, au milieu de la foule. Je commence à observer les mecs autour de moi. Je réalise que ce reef semble n’accueillir que très peu de touristes voire aucun. A cet instant, je suis le seul blanc et l’unique bodyboarder...


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Ici les gars sont solides, puissants et tatoués. Ils s’inscrivent tous dans le stéréotype du gaillard hawaiien. Sans caricaturer, c’est tout simplement l’image des «polynesian guys» qu’on aborde au travers des mags et vidéos. Aie… Soudain je me remémore les «ont dits» sur Hawaii et son fort localisme. Bien sur, j’avais entendu ici et là que certains spots étaient fermés aux étrangers. Ayant surfé Pipeline, Off the Wall et Sandys antérieurement sans ressentir cette impression, je me questionne dès lors sur ma place au pic parmi les vrais. Pourtant, personne ne m’a dévisagé ou n’a eu un comportement incivil à mon égard. Non, j’ai simplement le sentiment de ne pas exister à leurs yeux. Rapidement, j’entends un type qui parle plus fort que les autres et qui gesticule plus à l’outside à une dizaine de mètre de moi. Ce gars en question est assis sur un shortboard, encerclé par une horde de colosses hawaiiens. Les mecs semblent se marrer autour de lui. Par curiosité et sans réfléchir une seconde, je me dirige vers eux et rejoins le groupe. Là, je reconnais la légende du Pipe : Kainoa Mc Gee. C’était donc lui qui amusait la galerie. Je ne saurais dire pourquoi, mais toujours dans un élan d’insouciance, je m’avance vers lui et lui lance d’un ton spontané : «Hi Kainoa, I’m happy to meet you, I come from France» . Mc Gee me regarde dans les yeux puis se repositionne sur sa planche. Il s’approche lentement de moi, tous ses potes s’écartent pour lui laisser place. Arrivé à ma hauteur, le célèbre cogneur hawaiien esquisse un sourire, m’offre une franche poignée de main en me disant : «Hey my friend, how are you ? I’m happy to meet you too». Aussitôt les visages des gars sedétendent. D’ailleurs, l’un d’entre eux en évoquant Kainoa me rétorque d’une vanne : «Hey, is this fucking asshole known in France ?» Et toute la bande de rigoler. Sans faire mon lourd, je reprends ma place de départ, en contre-bas donc. Tout à coup, la série rentre. Loin de moi l’idée de prendre une vague, j’essaie juste de ne pas gêner les locaux en me décalant, en tentant de m’effacer pour dire vrai. Et là, c’est le clou du spectacle ! Kainoa donne les directives. Il régule le peak en désignant un des ses potes qui aura donc le privilège d’entamer le take of : «Go, go, bra’» s’exclame-til. Puis vient la bombe de la série. Kainoa rame posément pendant que tout le monde s’écarte, comme par évidence.


Ala manoa/


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Cette attitude est à la fois étonnante mais ne me surprend pas. Au contraire, je suis ravi d’assister à cette scène. Ce qui n’était qu’anecdotes depuis ma lointaine France vis-à-vis du localisme hawaiien se vérifie sous mes yeux, ici, à Ala Moana !

Série de clichés sur Hawaii / Seb Lequéré

L’accalmie revenue, tout le monde se replace en respectant le principe de hiérarchie. Le line up quand à lui va craquer tellement nous sommes nombreux à présent. Assis sur mon boogie, j’ai conscience qu’il me sera compliqué de rider une vague dans ces conditions : il n’y a pas un gars à l’intérieur, il y en a cinquante ! De plus, le niveau est tel, que personne ne tombe, tous exploitent la vague de façon optimale. Cependant, je n’éprouve aucune frustration, d’autant plus qu’en me recentrant sur ma planche je m’aperçois que Jeff Hubbard en personne se place à côté de moi. Décidément, il semblerait que je sois sur le bon spot aujourd’hui ! Puis de m’écrier : «Jeff Hubbard, hawaiien, champion du monde en titre qui se positionne ici ?». C’est définitivement à ce moment précis que je comprends la situation : surfer le magnifique bowl d’Ala Moana me sera impossible cet après midi. Bien entendu, en éternel minot que je suis, je saute sur l’occasion pour aborder mon idole, celle qui m’a donné goût au bodyboard. Je me souviens lui avoir dit : «It will be complicated to catch one wave today Jeff !». Il me répondit : «Ho, it’s ok, I don’t complain». C’était la dernière fois que je le voyais. Il prit une intermédiaire et quitta le spot précipitamment. En ce qui me concerne, j’ai toutefois essayé de batailler, mais au bout d’une bonne heure infructueuse, j’ai abdiqué. Pour lapremière fois de ma vie je sors de l’eau à la rame, sans avoir surfé la moindre ondulation. A voir Jeff Hubbard faire, c’était probablement la seule solution ce jour là. L’expérience Ala Moana aurait pu s’inscrire n’importe où ailleurs dans le monde. Elle prouve qu’il est important de considérer les personnalités qui surfent habituellement un spot et ce, depuis peut être plusieurs générations. Parfois, il faut savoir se résigner en s’effaçant subtilement. En France, nous sommes également confrontés à une expansion massive du surf et du boogie le long de nos cotes. Le nombre de pratiquants à l’année s’accroît et se développe constamment. La problématique vient aussi des spots qui ne peuvent plus contenir cette forte affluence. Du coup, certaines règles implicites se fondent et se construisent au fil du temps. Naturellement, le débat est plus que légitime : comment pouvons-nous accepter des règles, nous qui recherchions la liberté absolue au travers de notre discipline ? C’est selon moi, le paradoxe de l’ouverture d’esprit du surf contemporain. //////////////////////////////////////////




Sam Powyer - Porfolio/


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On parle souvent des minots australiens qui calent des révos partout. Par contre lorsqu’il s’agit des jeunes talents de la photographie, c’est le silence radio. On nous balance les oeuvres des mêmes vieux briscards, qui connaissent les combines par coeur et qui sont toujours dans les bons trips. Si toi aussi tu as envie de voir autre chose, laisse-moi te présenter Sam Powyer, 21 ans, photographe pas si amateur que ça. Le bougre n’aurait pu trouver meilleur patronyme tant son travail dégage une impression de force tranquille et la maturité d’un vieux renard du circuit. Dans un milieu encore plus sélectif que celui des bodyboarders pros, ce jeune diplômé en design et arts graphiques, shoote depuis maintenant 4 ans et à désormais trouvé un juste milieu entre la photo de composition et l’action. Aussi bien armé qu’un paparazzi italien sur une plage tropézienne, il passe la majeure partie de son temps sur la route avec ses potes à la recherche de ce qu’il appelle les bonnes vibes (du surf, de l’action, de la pêche...) avec son matos sur le dos : 7D, 20D, 50 mm 1.8, 75-300 mm, Fisheye 10-17 mm.


Sam Powyer - Porfolio/


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CE QU’IL Y A DE GÉNIAL DANS LA PHOTO FLOUE, C’EST QUE TOUT LE MONDE PEUT SE RÉAPPROPRIER L’IMAGE.


Sam Powyer - Porfolio/

BOMBIE, MON MONSTRE PRÉFÉRÉ. PLEIN DE SUPER ANGLES POUR SHOOTER ET ENCORE PLUS DINGUE AVEC UN GONZE DESSUS. (Photo à droite>)


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Sam Powyer - Porfolio/

J’AI CHERCHÉ PENDANT PAS MAL DE TEMPS POUR SAVOIR CE QUE CET INCONNU AVAIT LANCÉ COMME MANOEUVRE. JE CHERCHE TOUJOURS. LUI AUSSI. (Photo à droite>)


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«SUPERS» EST L’UNE DES VAGUES LES PLUS DINGUES À PHOTOGRAPHIER. À QUELQUES MÈTRES DE LA DALLE À SEC, TU TE SENS ASPIRÉ ET COMME BALANCÉ DESSUS DÈS QU’ELLE S’APPROCHE. CE MATIN LÀ, UN KID A PERDU CONNAISSANCE ET S’EST PRESQUE BRISÉ LE DOS. (Photo au milieu>)






Texte: F. Habasque

A day trip/


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MAELL’HELGOUALCH NICOMARIANELLI JULIENLE SEHAN HUGOLAGARDE

Photos by Seb Durand & Kana Seki


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Annaelle Challenge/

ANNAELLE C


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CHALLENGE

L’oeil de la bête / pic: Laurent Bourdier


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Aerial take off/ Alan l’helgouach/ pic: Laurent Bourdier


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Germain Romigou / pic: Laurent Bourdier


Nicolas Marinelli/ pic: Laurent Bourdier

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CHALLENGE


Le mur breton/ pic: Ronan Gladu

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Lucky - Unlucky/

«on fait une pause là, faut que j’aille aux chiottes!» «Ok, un truc n’a pas dû bien passer hier soir, j’ai l’estomac délicat, ça expliquerait l’élimination un peu rapide.»

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Lucky - Unlucky/

CAS #3 Texte: X. Du Tertre C’est mon dernier jour à Bali. Deux mois sur l’île aux mille temples, un début de saison assez clément, plutôt sec et off-shore sur le Bukit mais j’espère toujours un gros swell inoubliable sur Padang-Padang. Et a priori, ce que les cartes de houles prévoyaient depuis une semaine a l’air de se réaliser vraiment : on va avoir un bon Padang avant que je reparte ! Paxcou a pris sa journée, Pierre est «malade» et ne peut vraiment pas aller travailler, bref, tout est parfait !! Trop parfait, quelque chose cloche… Pendant les vingt minutes de trajet en scooter, je me ronge les ongles en essayant de trouver le détail auquel je n’ai pas pensé. Le coeur bat fort quand on arrive au point de check : la marée est encore un peu trop haute mais en contrebas la baie de Padang est pleine de l’écume blanche caractéristique des gros jours et à coté de nous, sous la cabane, les gars de Baliwaves.com installent leur matos vidéo. Dix minutes plus tard et c’est un sentiment d’excitation très familier qui m’envahit lorsque le courant me porte le long de la falaise, puis quelques canards (assez inhabituels, eux) pour sortir de la passe. La marée descend assez bas et pas mal de surfeurs sortent de l’eau alors qu’on rejoint le line up, maintenant principalement constitué de bodyboarders et surfeurs locaux. Une vingtaine de personne se partageant tubes sur tubes, une «chambre verte» plus ronde et parfaite que jamais ! Il me suffira de deux vagues pour tout faire foirer. Trois quarts d’heure que j’attends d’être seul à l’intérieur ! Quarante-cinq minutes de patience et de respect du local qui peut décider de te dropper s’il trouve sympa la vague sur laquelle tu pars. Presque une heure à jouer à ce jeu de cons, et enfin ma petite bombe rien qu’à moi arrive ! J’ai la prio, take-off. Sauf que voila, LE petit Made de 16 ans, local à la mode, se l’est jouée à la David Copperfield en mode snake invisible, et si les copains ont les bras en l’air et crient à tue-tête, ce n’est pas parce que je suis en train de me caler un gros barreau, c’est parce que je suis en train d’envoyer un local sur le reef à sec. Je suis mort. Quelques minutes plus tard, pas manqué, il remonte au peak avec la main qui saigne, et un paquet d’insultes indonésiennes. Impossible de lui expliquer, de m’excuser… Pendant l’heure qui suit, l’ambiance est super tendue et Paxcou vient en rajouter une couche :«Xav panique pas, mais il va falloir que tu sortes par Uluwatu ou Bingin, il y a une bande d’indos qui t’attendent sur la plage de Padang». Il se fout sûrement de ma gueule mais j’en mène vraiment pas large et je vois déjà les lasers des snipers sur ma tronche inquiète… Au point de me dire que quitte à prendre une branlée, autant que ce soit le corail qui me la mette. Une bombe arrive et vu que je suis relégué à la seconde section, et qu’un surfeur se plante dans le premier barreau, je pars dessus. Mais un peu trop late. La boite est venue si rapidement que je me souviens à peine du bottom ! Résultat : le reef a déchiré le shorty et la fesse droite avec, et râpé toute la jambe jusqu’au pied. Pas la peine d’insister, cette session n’était pas pour moi. Un dernier regard vers Padang et direction la plage pour une Bintang, du jus de citron et pas de gangsters bien entendu. Meilleure journée du mois pour les potes et grosse déception de l’année pour moi, le genre de session qui donne un goût bien amer à l’embarquement…


Errance / Kevin Row

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Shooting Gallery/

/ Shooting Gallery / Place_everywhere *code_pleasure.

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>01. Champion du monde en prone et pas loin en Dk! Amaury en Snap to reverse, relax à la maison après sa folle saison / Shoot :Merrien >02. Invert de Robert George, meme place, meme jour, meme photographe / Shoot: Merrien >03. Énorme reverse air de Dubb en visite sur l’ile de la Réunion / Shoot: Merrien >04. Quelques tricks en DK pour Dubb, histoire de montrer qu’il est le boss incontesté dans cette discipline actuellement / Shoot: Jamet >05. Just BAM! Invert de julien Gigovic / Shoot: Jamet >06. Ce backflip de Pierre Barthelier représente à lui seul le niveau des riders réunionnais : fou. / Shoot: Jamet


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08. >01. Ausina / Shoot :Hemon >02. Yoan Florantin sur les beachbreaks de la côte landaise / Shoot: Caldo >03. Invert de Yohann Cannevet / Shoot: Hemon >04. Invert breton de Fredéric Quénemer / Shoot: Keravec >05. Bodysurf hawaiien / Shoot: Léqueré >06. Reverse air by Eric Gamez / Shoot: Iraultza >07. Séquence d’Yvon Martinez à l’entrainement / Shoot: Hemon >08. Antonin Papon en belly / Shoot: Allano

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South oz Bombie/ pic: Ben Sowry


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Line up/ pic: James Raper


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Slab breton / pic: Seb Léquéré


Bam! / Mns du Boucan / Mick Merrien

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SLAB Magazine Contact: contact@slabmagazine.net Site: www.slabmagazine.net Pub: pub@slabmagazine.net Photos: submit@slabmagazine.net Imprimé en France / Cocoon Paper -------------------------------Jérémie Barlog / jeremie@slabmagazine.net - Responsable de publication: - Rédacteur en chef: Sérgio Da silva / sergio@slabmagazine.net --------------------------------

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