Tvb 5 lyon - septembre 2016

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Journal indépendant à prix libre à retrouver sur le site toutvabienlejournal.org ou par abonnement. Edition Lyon - N°5 - septembre 2016

JOURNAL INDEPENDANT ET LOCAL POUR DES INFORMATIONS SOLUTIONS SPECIAL LYON

ÉDITO C’est la rentrée ! Et Tout va bien fait la sienne avec une grande résolution : garder le format de seize pages testé cet été, et le dossier du mois, qui permet d’enquêter un peu plus sur un sujet d’actualité, porteur de solutions. Nous laissons également des espaces ouverts à tous et avons validé la rubrique « Vous avez la parole » pour nos lecteurs. Dans cette démarche d’ouverture, une abonnée a participé à cette édition, en nous livrant des conseils dans la rubrique « Trucs & astuces ». On avance ensemble...

NE PAS JETER SUR LA VOIE PUBLIQUE - NUMERO ISSN : 2495 - 9847

Mathieu Dardaillon et Adèle Galey, deux des co-fondateurs de « Ticket for change », à Lyon, lors de la cérémonie d’ouverture du Tour de France réalisé avec les apprentis-entrepreneurs du changement. Retrouvez notre dossier du mois sur l’entrepreneuriat social en pages 5 à 9 p. 4

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La sortie préférée des Lyonnais Si l’on en croit Trip advisor, la sortie nocturne préférée des Lyonnais est le théâtre de l’Improvidence, récemment installé dans le 3ème arrondissement. Lieu d’innovation permanente, de bonne humeur et d’improvisations surprenantes, le théâtre est aussi un partenaire de notre journal. Passez de l’autre côté du rideau en page 4.

Il part faire le tour du monde des initiatives Il étudie à Lyon mais vient de s’accorder une année sabbatique pour partir à la recherche des initiatives intéressantes qui voient le jour un peu partout sur le globe. Appareil photo à l’épaule, carnet de notes dans la poche, Martin va s’inspirer et nous inspire.

Dans ce nouveau numéro, nous nous sommes penchés sur un sujet à la mode et qui semble inspirer l’économie : l’entrepreneuriat social. Retrouvez un dossier complet avec des avis d’acteurs locaux ou nationaux de passage à Lyon, qui dressent le bilan de ce nouvel outil d’impact social. Et bien sûr, nous n’avons pas oublié nos initiatives lyonnaises, avec un reportage gourmand sur « Les petites cantines », la nouvelle association pour créer du lien dans un quartier grâce à la cuisine participative, et des portraits de jeunes qui partent voyager pour découvrir et s’inspirer de nouvelles initiatives : Martin et L’épicurieuse. Nous tomberons le masque de l’Improvidence, ce théâtre d’improvisation lyonnais qui joue dans la scène des grands. Et nous espérons vous offrir encore une belle lecture, pleine de sens et de découverte de solutions locales et accessibles, pour tenter de réinventer demain... Tout va bien, association loi 1901 d’intérêt général Siège social : 56 route de Genas 69003 Lyon Achevé d’imprimé le 30 août 2016 par Medcom - 39 rue Père Chevrier, 69007 Lyon Rédactrice en chef : Laurianne Ploix Relecture : Valérie Lavigne Illustrations : Emma Barry et Freepic Photographies : Laurianne Ploix Pictos : Freepic for Flaticon Pour toute remarque : toutvabienlejournal@gmail.com Site web : toutvabienlejournal.org


L’équipe de rédaction

VALENTINE Etudiante en voyage, elle nous transmet avec optimisme et gaieté ses points de vue sur le monde.

Le Tout va bien

ANNA Formée dans le social, bénévole investie et plume poétique, Anna nous fait partager la beauté de ses mots.

Tout va bien est une association loi 1901 reconnue d’intérêt général. Son objet social est de diffuser des informations qui redonnent confiance en demain, de relayer tout ce qui se passe de bien aujourd’hui et qui nous aidera à mieux vivre demain. Elle a pour but de proposer d’autres exemples de « héros médiatiques » au grand public, de mettre en lumière tous ceux qui agissent dès maintenant pour répondre aux problématiques actuelles et à celles du futur, afin de le construire de la manière la plus pacifique et responsable possible. Inspiré du journalisme de solutions, Tout va bien, c’est avant tout le parti pris de regarder l’actualité non pas à travers le prisme de nos peurs et de nos horreurs mais à travers le prisme de nos espoirs et des solutions existantes. Si nous devenons ce que nous pensons, autant nous entraîner à mieux penser.

FABIEN Investi dans le monde associatif lyonnais, il est un relais entre nous et tout ce qui existe de bien.

LAURIANNE Rédactrice en chef et fondatrice du Tout va bien, Laurianne croit en la nécessité de montrer de nouveaux exemples dans l’espace public.

JOHANNA Johanna a rejoint l’équipe de rédaction par intérêt pour les thématiques environnementales.

ET VOUS ? Vous avez envie de participer à la diffusion d’une information libre et porteuse de sens ? Rejoignez-nous dans l’aventure.

Tout va bien, c’est aussi un journal impliqué dans la vie locale. Nous avons créé le principe de l’initiative au kilomètre et nous souhaitons être un pont entre tout acteur local (associatif, chercheur, innovateur, entrepreneur social, soignant, particulier ou privé) porteur d’une idée ou d’un projet qui participe au bien-être individuel, collectif ou environnemental, et ses voisins, nos lecteurs, qui vivent juste à côté. On ne parlera que de projets concrets, essentiellement à Lyon, et nous vous permettrons de bénéficier de réductions chez ces acteurs de la porte d’à côté, pour vous informer mais aussi vous faciliter l’envie d’essayer autrement. Vous pouvez nous aider en vous abonnant et en adhérant à l’association, en écrivant avec nous des articles de journalisme constructif, en faisant connaître le journal autour de vous, en nous suivant sur les réseaux sociaux, en organisant des événements ensemble et en apportant vos compétences, vos idées et vos envies. Vous pouvez également faire un don à Tout va bien (reçu fiscal sur demande). N’hésitez pas, contactez-nous : toutvabienlejournal@gmail.com ou sur toutvabienlejournal.org.

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Brèves du monde Luxembourg, la Suisse et la Belgique, avec en perspective un élargissement à l’Union Européenne puis à l’International.

TËNK, LA PLATEFORME QUI VOUS VEUT DU BIEN Non, il ne s’agit pas d’un site militaire, mais de la première plateforme de vidéo à la demande sur abonnement (SVOD) entièrement dédiée au documentaire d’auteur. La plateforme est née loin de la capitale et des grands médias. C’est en Ardèche que l’initiative a vu le jour en juillet 2016, à Lussas, village connu pour accueillir chaque année un master de documentariste ainsi que les Etats Généraux du Film Documentaire. L’internaute abonné au mois ou à l’année a accès en permanence à une sélection de soixantedix films documentaires. Sélectionnée par une équipe éditoriale professionnelle, chaque vidéo est mise en ligne pour deux mois, et répartie sur une douzaine de plages thématiques (histoire et politique, écoute, écologie, cité, fragment d’une œuvre, brouillon d’un rêve, docmonde, etc.). A terme, l’objectif de Tënk est de défendre le documentaire d’auteur et de le rendre « accessible à tous en s’adressant non seulement aux connaisseurs mais aussi à toute personne désirant découvrir d’autres façon de voir et de raconter le monde ». Tënk rend ainsi visible de petits bijoux d’information et de créativité. La plateforme est déjà accessible depuis la France, le

Envie de jeter un œil ou deux ? Rendez-vous sur la plateforme : www. tenk.fr. par Anna Pueyo

un produit peut être consommé une fois passée sa date limite de consommation optimale en vous donnant des conseils sur les meilleures façons de le conserver (Gaspifinder) ou vous permettent de partager vos restes avec d’autres utilisateurs (Partage ton frigo). Ces applications ne se sont pas encore toutes étendues dans l’ensemble des grandes villes de France, mais des collectes de fonds sont organisées en ligne pour se déployer davantage, et Lyon est bien souvent parmi les têtes de liste. par Valentine

L’APPLI CONTRE LE GASPILLAGE ALIMENTAIRE Chaque année, un tiers de la production alimentaire globale dédiée à la consommation est jeté. En France, cela représente dix millions de tonnes par an, dont plus de la moitié au sein des ménages. Pour lutter contre ce gâchis, de plus en plus d’applications mobiles voient le jour. L’appli Too Good To Go met par exemple en contact ses utilisateurs avec des commerçants qui leur bradent leurs invendus. Allier idéaux et capitalisme est ainsi la nouvelle maxime de ces start-up qui mettent en avant les gestes écologiques tant des distributeurs que des consommateurs, les économies que ces deux acteurs réalisent ainsi que la découverte d’une nouvelle clientèle ou de nouvelles enseignes. D’autres applications comme Zéro-Gâchis ou encore Optimiam recensent les prix cassés des produits proches de leur date de péremption. Avec Mummyz, le cuistot, c’est vous ! L’application permet de vendre vos surplus cuisinés à d’autres utilisateurs. D’autres applis anti-gaspillage pour smartphones sont uniquement axées sur l’accès collaboratif. Elles vous indiquent pendant combien de temps

UNE NOUVELLE RESERVE MARITIME Après avoir déclaré l’agrandissement d’une aire maritime protégée au Nord-Ouest d’Hawaï, dans le Pacifique, le président des EtatsUnis, Barack Obama, a annoncé la création d’une nouvelle réserve naturelle de près de 12 700 km² dans l’Atlantique, au large des côtes de la Nouvelle-Angleterre. Cette décision, prise peu après la ratification des accords de Paris pour la Cop 21, permettra de protéger la faune et la flore marine, notamment les baleines, les tortues de mer et les coraux de profondeur. La bonne nouvelle fut annoncée lors du sommet international des océans qui s’est tenu à Washington, et rassemblait quelque quatre-vingt dix pays. Le Royaume-Uni s’est engagé le même jour à doubler la superficie de ses aires maritimes dans ses territoires d’Outre-mer. par Laurianne

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Brèves du monde

LA MEDECINE EN MODE FUTURISTE Il y a quelques semaines, un Américain ayant vaincu le cancer s’est fait greffer une mâchoire imprimée en trois dimensions. Si les chirurgiens orthopédistes ont été les premiers à bénéficier d’implants imprimés en 3D dès les années 1990, l’impression 3D biologique est actuellement en plein essor. Une fois scannée la zone du patient que le médecin va opérer, une forme dans laquelle l’imprimante insère des cellules est créée. Le titane est le matériau principalement utilisé pour cette forme, car il est biocompatible, et les cellules osseuses parviennent à le coloniser facilement grâce à sa porosité naturelle. D’autres matériaux peuvent également être employés, comme le polyéther, qui a permis de remplacer les trois quarts du crâne d’un patient américain. Les gels semblables au plastique se bio-dégradent ensuite naturellement dans le corps du patient, tandis que les cellules prennent progressivement une forme solide et n’ont ainsi plus besoin de structure pour tenir. L’imprimante 3D permet une meilleure précision car elle réalise des organes sur mesure, mais également un gain de temps, aussi bien pour le chirurgien que pour le patient, qui récupère plus rapidement, avec moins de complications et pour un résultat plus satisfaisant. En outre, cela évite de prélever un fragment d’os sur une autre partie du squelette du patient, qu’il faut adapter ultérieurement de façon plus ou moins satisfaisante. Les étudiants peuvent également s’entraîner de façon plus concrète, avec une expérience grandeur nature. Cette nouvelle manière de soigner va permettre de réduire considérablement le nombre de personnes en attente de greffe qui n’obtiendront pas l’organe dont ils ont besoin, représentant aujourd’hui 75 % de ces patients. par Valentine

EPICURIENNE, CURIEUSE, RIEUSE : L’ÉPICURIEUSE « Sois le changement que tu veux voir dans le monde » (Gandhi) Initiée en avril 2016, l’Epicurieuse est une aventure humaine aux multiples facettes solidaires, portée par Charlotte Hoefmann, Lilloise d’origine vivant à Lyon depuis cinq ans, une personnalité haute en couleurs, aimant se définir comme « épicurienne, utopiste, curieuse compulsive ». Des circonstances de vie ont amené cette humaniste « hyperactive » à entreprendre des démarches visant aussi à mieux comprendre qui elle est au plus profond d’elle-même. Créative et « technophile » convaincue du pouvoir du numérique, elle a l’envie et le projet de construire un blog 3.0 qui conduise à l’émergence d’une nouvelle génération de blogueurs de voyages « éthiques » qui puissent avoir de l’influence en partageant leurs démarches initiatiques et sociétales. Relatée de manière exceptionnellement interactive, sur le blog, la page Facebook, la page KissKissBankBank, etc, l’aventure de l’Epicurieuse se fonde sur un voyage et se nourrit des expériences vécues par cette jeune femme de 23 ans partie seule, qui mettent en avant les capacités naturelles de l’être humain à aller vers autrui, à échanger et à grandir. Cette démarche vise notamment à « révéler, mesurer et promouvoir, par l’expérience d’un voyage engagé et initiatique, le potentiel d’action sur la société ». Coordinatrice Rhône-Alpes du Mouves, le Mouvement des Entrepreneurs Sociaux, durant l’année 2015, Charlotte cherche toujours de nouveaux défis à relever, notamment pour « contribuer à la promotion d’un modèle économique plus respectueux des valeurs humaines ». Inspirée par la lecture de l’ouvrage Vers un nouveau capitalisme de Muhammad Yunus (prix Nobel de la Paix 2006), elle décide de consacrer sa vie à

ce qui la passionne, notamment les valeurs de l’entrepreneuriat social, avec cette joie de vivre naturelle et communicative. « Je ne pensais pas en être capable » C’est une collecte solidaire effectuée sur le site KissKissBankBank qui a permis de récolter cinq mille euros pour le projet. L’ensemble des actions inhérentes à l’Épicurieuse seront mises en œuvre d’avril à décembre 2016, à travers le Népal, l’Inde, la Mongolie et le Tibet. En avril dernier, ce fut l’heure du « défi sportif » afin de révéler le potentiel d’actions et d’impacts qu’un individu peut avoir sur la société. Il a eu lieu au Népal (pays touché en avril 2015 par un séisme aux conséquences écologiques gigantesques), où Charlotte a escaladé cinq sommets de plus de cinq mille mètres en seize jours au cœur de l’Himalaya. L’argent récolté sera reversé à des programmes dont les impacts seront positifs pour l’économie locale : programmes pilotes innovants (formation à la gestion des déchets dans la région de Katmandou très affectée par la pollution, microcrédits permettant à deux cents femmes de débuter des activités entrepreneuriales). Les fonds permettront également de payer l’agence éthique et responsable proposant le « trek », et d’offrir des contreparties écologiques et artisanales « Made in Nepal » de qualité unique, pour faire découvrir le savoir-faire local... Une manière de mettre son énergie au service de ceux qui participent à ce monde durable et solidaire. « Mon grand coup de cœur reste ce trek for Social Change que j’ai entrepris au Népal, une expérience qui m’a donné une énergie que je sous-estimais totalement. Je vis également des moments très forts en Mongolie, notamment avec les Tsatannes, cette ethnie nomade et chamanique vivant dans le Nord de la Mongolie que j’ai eu la chance de rencontrer. Et il y a aussi l’expérience du désert de Gobi, un moment très spirituel de rencontre avec moi-même ». par Fabien

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Dossier du mois

L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL Notre dossier du mois sera consacré à l’entrepreneuriat social, l’un des outils de la grande famille de l’économie sociale et solidaire (ESS), qui apporte des solutions aux problématiques existantes. Pour mieux comprendre l’entrepreneuriat social et l’ESS, un premier article les abordera ensemble, en interrogeant l’avenir que l’on souhaite donner à notre économie. Puis nous poserons des questions sur le sujet à des experts : Julien Loïs, directeur de la Chambre Régionale Rhône-Alpes, Quieterie Zeller de Ronalpia, et Florence Lécluse du CentSept. Des témoignages plus personnels seront ensuite apportés par une intrapreneuse et une entrepreneuse sociale, avant de terminer par quelques chiffres.

A QUOI RESSEMBLERA L’ECONOMIE DE DEMAIN ? On se souvient du discours très médiatisé et commenté d’Emmanuel Faber de Danone, à la remise des diplômes à HEC en juillet dernier, qui affirmait que l’avenir de l’économie devra nécessairement trouver son équilibre avec la justice sociale. En dépassant les questions de cohérence qui peuvent naître à l’issue d’un tel exposé, on peut tout de même se demander si ce discours-là, énoncé à ce moment-là, ne reflète pas une nouvelle mouvance au sein d’une partie du monde économique, qui se voit face à de nouveaux enjeux vitaux, définitionnels, financiers et peut-être aussi marketing. Sans aucune expertise économique, il reste cependant possible d’avancer que le modèle économique actuel est né avec l’ère industrielle, il y a environ deux siècles. Cette nouvelle façon de percevoir l’économie et le travail a entraîné la création d’un mouvement aujourd’hui qualifié d’économie sociale et solidaire, ou ESS, initialement appelé économie sociale, et qui avait pour but de rendre accessible aux nouveaux ouvriers un certain nombre d’éléments essentiels comme la santé, le logement ou l’alimentation. La révolution industrielle a donc progressivement donné

naissance aux quatre acteurs historiques de l’ESS : les coopératives, les fondations, les mutuelles et les associations. Depuis la loi du 31 juillet 2014, les entreprises qui ont un statut commercial (de type SA, SARL, etc.) peuvent intégrer l’économie sociale et solidaire. Il leur suffit d’acquérir un agrément « ESUS », pour Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale, décernée par la Direccte* et qui certifie le respect de quatre critères : avoir une finalité sociétale, une gouvernance participative, un modèle économique viable et une lucrativité limitée, ce qui signifie qu’une partie significative des bénéfices accumulés par l’entreprise doivent être redistribués pour maximiser l’impact social. Cette nouvelle loi arrive peu après la crise de 2008, dans un contexte où le budget de l’Etat pour répondre à certaines problématiques sociales et solidaires se voit réduit. Elle fait également suite à la création de nouveaux acteurs comme le Mouves, Mouvement des Entrepreneurs Sociaux fondé en 2010, ou des premiers cours et diplômes d’ESS et d’entrepreneuriat social dispensés dans les universités. Elle semble s’inscrire dans une époque en pleine mutation, qui cherche des alternatives à un système dominant en difficulté, et nécessitant de perpétuelles innovations. A l’image des acteurs historiques de l’ESS, l’entrepreneuriat social semble naître des conséquences et des limites du système économique en place, et se sert des armes de son époque. A l’heure où le mal-être au travail touche des millions de français, où le taux de chômage en France dépasse régulièrement les

10%, où certaines organisations peinent à atteindre leurs objectifs et rentrer dans leurs frais, où les techniques évoluent et où la contestation citoyenne gronde, la donne qui fonde la viabilité de notre système économique et social mériterait peut-être d’être repensée. L’entrepreneuriat social, qui satisfait à la fois des intérêts économiques, en permettant la création de valeur, et des enjeux sociaux, sociétaux ou environnementaux, pourrait être l’un des outils qui permettront de réinventer demain. Et à travers son discours, le Directeur Général de Danone touchait peut-être du doigt la question paradoxale que nous devrons tous nous poser, que nous soyons consommateurs ou entrepreneurs : à quoi voulons-nous que ressemble l’économie de demain ? par Laurianne Ploix

* Dirrecte : Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi Sources et pour aller plus loin : Observatoire national de l’ESS, Conseil national des Cress et le réseau France Active. Rhônesolidaire.org Panorama de l’Ess en France par le CNCRESS L’efficacité économique au service de l’intérêt général, le livre blanc des entrepreneurs sociaux édité par le Mouves –Les éditions Rue de l’échiquier Entrepreneuriat social, innover au service de l’intérêt général de Romain Slitine et AmandineBarthélémy L’entreprise du XXIe siècle sera sociale (ou ne sera pas) de Jean Marc Borello, François Bottolier-Despois et Nicolas Hazard Principes de l’économie solidaire de Daniel Goujon et Eric Dacheux aux éditions Ellipse L’économie sociale et solidaire : de l’utopie aux pratiques de Pascale Moulévrier et Matthieu Hély chez La dispute

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Dossier du mois

ADELE GALEY : « ON PEUT RÉCONCILIER LE BUSINESS ET LE SENS »

Ticket for Change est une aventure initiée en 2014 par quatre jeunes qui voulaient changer le monde grâce à l’entrepreneuriat social. Cette association, aujourd’hui portée par une vingtaine de personnes, accompagne les personnes qui ont un projet d’entrepreneuriat social et souhaitent se former pour le mettre en œuvre. Les neuf mois de suivi de ces porteurs de projet sont notamment marqués par un tour de France à la rencontre de personnes inspirantes. Nous avons rencontré Adèle Galey, co-fondatrice de l’association et en charge de la communication. LP : Pourquoi avoir créé Ticket for Change ? AG : Nous sommes tous les quatre, les cofondateurs (ndlr : avec Matthieu Dardaillon, Joséphine Bouchez et Jonas Guyot) issus d’écoles de commerce où nous avons vécu des crises existentielles. Des choses nous parlaient, comme créer de la valeur, mais on se demandait pour quelles finalités et on n’a pas trouvé la réponse tout de suite. Pour nous, l’argent c’est un moyen pour arriver à une fin, et c’est important d’avoir un business model pour la pérennité de ce que l’on entreprend, mais pour quelle fin ? Puis, dans nos écoles, on a découvert l’entrepreneuriat social qui répondait à ce questionnement et on s’est dit qu’on ne devait pas être les seuls à être tiraillés entre l’envie d’entreprendre pour créer de la valeur et en même temps l’envie de répondre aux problématiques sociales. On a donc créé Ticket, et c’est ce qui nous motive à nous lever chaque matin.

etc.), nous le savons, et la manière de faire évoluer les choses aujourd’hui ce n’est plus de se dire que d’autres personnes vont résoudre les problèmes à notre place mais de le faire nous-mêmes. Donc on entreprend, dans tous les sens du terme, on est proactif et on se demande comment par nos entreprises, on peut améliorer la société dans laquelle on vit. L’entrepreneuriat social, c’est donc notre solution de changement, en mêlant rentabilité financière et impact positif. Pour nous, l’entrepreneuriat social c’est plus une posture qu’un statut, et c’est à la portée de chacun. LP : D’ailleurs, quel est le profil d’un entrepreneur Ticket for change ? AG : C’est notre fierté chez Ticket, il n’y a pas de profil type de l’entrepreneur social chez nous. On regroupe des jeunes, des moins jeunes, autodidactes ou bourrés de diplômes, de diverses formations, et qui viennent de la France entière. Pour nous, un entrepreneur social c’est avant tout quelqu’un qui se demande comment il pourra aider la société. LP : L’entrepreneuriat social, qui s’inscrit dans notre société aujourd’hui dite « en transition », est-il un outil de réinvention ? AG : Oui, l’entrepreneuriat social est un levier parmi tant d’autres pour faire évoluer la société. Tout ce que l’on connaît aujourd’hui va évoluer, notamment au niveau de l’emploi : à l’avenir une personne aura en moyenne sept emplois différents au cours de sa carrière, et la posture entrepreneuriale est une clé pour appréhender le monde de demain. Il va falloir s’adapter, être proactif et donc pour nous l’entrepreneuriat social aide à cela, c’est un outil très

puissant permettant d’accompagner la transition, tant dans la vie professionnelle que personnelle. Et il le prouve déjà. LP : Après trois ans d’accompagnement des entrepreneurs sociaux, par le MOOC (cours gratuit en ligne) ou par le programme Ticket for Change, des projets ont dû voir le jour ? AG : Oui, des projets ont vu le jour, d’autres sont en train de grandir, c’est une aventure permanente. Et on a de jolies histoires aussi, comme celle de Kylia et Coline qui ont toutes deux suivies notre MOOC. Elles se sont rencontrées lors d’une soirée autour de ce MOOC, où les participants se regroupaient pour suivre ensemble les cours. Kylia travaillait alors dans une banque et suite à sa rencontre avec Coline, elle a décidé de tout laisser pour monter avec elle « Mamie régale », à Toulouse. C’est une entreprise qui propose à des retraités de cuisiner de bons petits plats qui seront livrés dans les entreprises pour les salariés qui ont peu de temps mais l’envie de bien manger. Et « Mamie régale » cartonne, elles sont en train de se déployer sur toute la France. C’est un projet génial et une jolie histoire Ticket car elles n’ont pas fait le Tour mais ont été intégrées dans le programme d’accompagnement post-Tour. Ça c’était l’année dernière en 2015. En 2014, Chris a créé Trezorium, des Fablabs pour enfants, et sa petite entreprise tourne bien. Nous avons plein de beaux projets et pas seulement des projets « sexy » dans l’esprit un peu « tech » de la Silicon Valley, on va aussi là où c’est difficile, avec des projets à rentabilité plus longue, avec des problématiques sociétales plus complexes. Bref, on ne cesse d’évoluer, et ce avec nos entrepreneurs sociaux. Propos recueillis par Laurianne Ploix

LP : Et selon toi, qu’est-ce-que l’entrepreneuriat social ? AG : Pour nous, l’entrepreneuriat social, c’est réconcilier le business et le sens. Deux choses que l’on sépare un peu trop souvent dans les mots et/ou dans les faits. Notre monde change et nous n’avons plus vraiment le choix, les problèmes s’accroissent, (l’épuisement des ressources,

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LES LYONNAIS DE TICKET FOR CHANGE

De gauche à droite, Matthieu Dardaillon, co-fondateur de Ticket for change et initiateur des formations en voyage, Violaine Rodriguez, coordinatrice pour la ville de Lyon et Adèle Galey, co-fondatrice de Ticket for change. Photo prise le 25 août 2016 à l’Hôtel de ville de Lyon lors du lancement du Tour de France Ticket for change. Pour l’occasion, une soirée autour des liens entre le numérique et la résolution des problèmes de société se tenait en présence de madame Karine Daugnin Sauze, vice-présidente de la métropole de Lyon en charge de l’Innovation, de la Métropole Intelligente et du Développement Numérique ainsi que des entrepreneurs du tour, de Ronalpia, de Cegid, de Dowino, et de la French Tech de Lyon. Waoup était chargé de l’animation de la soirée.

LES RECRUES 2016 Ils sont de la région lyonnaise et ont été séléctionnés pour suivre le programme Ticket for Change. Après quelques mois d’hésitation, finalement, seul Dung poursuit la formation.

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JULIEN LOÏS : « L’ESS DU XXIe SIÈCLE SE FERA AVEC LES ENTREPRENEURS SOCIAUX» Il nous semblait important d’avoir dans ce dossier sur l’entrepreneuriat social un éclairage plus large sur l’économie sociale et solidaire. Nous avons, pour ce faire, rencontré Julien Loïs, directeur de la Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire (Cress) Rhône-Alpes. LP : Dans un premier temps, pourriez-vous redéfinir l’économie sociale et solidaire puis le rôle de la Cress ? JL : Simplement, l’économie sociale et solidaire, c’est la façon dont les gens s’organisent pour répondre collectivement à des besoins individuels. La Cress est la structure qui va fédérer et représenter l’ESS sur son territoire. Ce sont des structures privées, des associations régionales, qui sont nées de la volonté des entreprises et fédérations de l’économie sociale de se doter d’une représentation politique. Les Cress travaillent sur un territoire donné et ont vu leurs missions cadrées par la loi ESS de 2014. Ces missions sont aujourd’hui au nombre de trois : la représentation des intérêts des organisations de l’ESS, l’appui à la création et au développement de ces mêmes organisations, puis la promotion de l’ESS. Il y a une chambre par région, elles sont toutes regroupées nationalement sous le conseil national des Cress et agissent chacune en fonction des problématiques de leur territoire. La Cress Rhône-Alpes, plus particulièrement, axe beaucoup ses travaux sur l’intégration de l’ESS dans l’ensemble des politiques publiques et dans le développement économique, pour appréhender collectivement la biodiversité de nos entreprises sur notre territoire. On part d’un principe fort, qui est que l’acteur public ne peut pas résoudre seul les problématiques économiques et sociales, ce qui rend nécessaire la coopération entre les différentes personnes, des habitants aux entrepreneurs, en passant par les associations et les élus, pour construire des réponses, qui puissent être innovantes, aux besoins de notre société.

LP : La Cress Rhône-Alpes, embauchant des salariés, existe depuis 2010 ; la loi ESS date de 2014, pourquoi cet intérêt croissant au cours des dernières années ? JL : On en parle plus dans la mesure où l’on prend de plus en plus conscience des impacts négatifs d’un modèle économique dominant, qu’ils soient facteurs de fracture sociale, d’exclusions, de chômage, de conséquences environnementales, de mal-être au travail, ou autres. Donc, on commence à se demander comment créer de la valeur tout en ayant un impact positif, et non plus négatif. Le contexte conjoncturel dans lequel nous sommes nous oblige à nous poser des questions et à trouver des solutions. On n’y pensait pas jusque dans les années 1980 où tout allait globalement bien au niveau économique durant les Trente Glorieuses, mais depuis quelques années, les crises se succèdent, et on n’arrive plus à faire tourner la machine. LP : L’ESS pourrait donc être une solution pour répondre aux problématiques économiques et sociales actuelles ? JL : J’ai au fond de moi quelques doutes sur la véritable acceptation, par certains décideurs, de la nécessité de faire évoluer le modèle économique et social actuel. On pense plus à mettre certains pansements plutôt qu’à transformer le modèle en profondeur. Et l’ESS est, pour beaucoup encore, perçue seulement comme ce pansement qui permet de réparer un peu ce qui va mal, alors que nous avons de réelles propositions et solutions pour réformer le système. LP : L’entrepreneuriat social a rejoint le mouvement de l’ESS avec la loi de juillet 2014, que pensez-vous de cela ? JL : Je trouve cela formidable, et il faut se replacer dans un contexte historique pour comprendre. L’ESS existe depuis environ deux siècles, et a toujours répondu depuis aux enjeux d’une époque avec les moyens de cette époque. On a travaillé sur des questions de santé, de logement, d’exclusion, etc. Puis, il y a une génération d’entrepreneurs ayant décidé de faire fonctionner leurs entreprises

différemment, en mêlant leur volonté de créer de la valeur avec une volonté d’impact social, qui a rejoint le mouvement. Les principes fondamentaux sont toujours là, et en plus on a de nouveaux acteurs, qui arrivent en ce début de XXIe siècle et qui feront l’ESS de demain. On a eu de nombreux acteurs dans la première moitié du XXe siècle, d’autres dans une seconde moitié, et maintenant, dans la première moitié du XXIe siècle nous intégrons les entrepreneurs sociaux et espérons qu’ils seront de plus en plus nombreux. LP : Quand on parle d’entrepreneuriat social, on parle aussi souvent d’innovation ? JL : Oui, c’est souvent lié. Pour nous, dans l’innovation économique et sociale, on cherche à travailler sur l’impact d’une action, à se demander comment on répond à une problématique et non pas quelle est la problématique à laquelle on répond. Et les idées nouvelles viennent de là. Il faut partir des besoins pour essayer de construire une réponse, et non partir uniquement des opportunités existantes sur un marché. L’entrepreneur social innove déjà dans le modèle de l’entreprise en se positionnant dans une démarche d’utilité sociale. Et un entrepreneur social se doit d’innover en permanence, ce qui lui permet de casser les modèles et de travailler avec différents acteurs transversaux. LP : Aujourd’hui, l’entrepreneuriat social semble toucher particulièrement les jeunes. JL : Oui, on sent un intérêt de cette population assez jeune qui souhaite donner du sens et cherche à créer un impact positif, tout en gagnant de l’argent. Moi je suis très fier de cette jeune génération qui est prête à faire évoluer notre société et n’attend plus qu’on lui donne la possibilité de le faire. Propos recueillis le 21/09/2016 par Laurianne Ploix

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Dossier du mois

QUITERIE ZELLER : « L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL SE CONSTRUIT AVEC SON TERRITOIRE» Nous avons échangé avec Quiterie Zeller, responsable de l’appui à l’implantation de l’incubateur Ronalpia. Avec pour slogan, « le meilleur moyen de prévenir l’avenir, c’est de le créer », Ronalpia impulse le changement, en accompagnant les entrepreneurs sociaux en Auvergne Rhône-Alpes. Ils fêtaient leurs trois ans il y a quelques jours. Rencontre. LP : Quelle est la mission d’un incubateur, et plus spécifiquement de Ronalpia ? QZ : Ronalpia est un incubateur très particulier par le profil de personnes que l’on accompagne. Un incubateur a pour mission d’accompagner un entrepreneur de l’idée au lancement de son activité. La spécificité de Ronalpia, c’est de n’accompagner que des entrepreneurs sociaux, ces personnes qui développent des solutions en réponse à des besoins sociaux, sociétaux et environnementaux. Nous sélectionnons avant tout des personnes, plus que des projets. On passe beaucoup de temps ensemble au long du processus de sélection, pour nous assurer que ce sont les « bonnes » raisons qui animent la personne et pour évaluer sa motivation personnelle à porter le projet jusqu’à son terme. Notre métier, c’est de détecter, sélectionner et accompagner des entrepreneurs sociaux à fort potentiel d’impact. Aussi et surtout, on veut se choisir dans les deux sens : Ronalpia détecte et sélectionne des porteurs de projets, mais l’entrepreneur social doit aussi choisir Ronalpia, car rejoindre la communauté Ronalpia, c’est jouer le jeu de la réciprocité et de l’apprentissage par les pairs. Concrètement, on apporte à nos entrepreneurs un lieu de travail (hébergement et co-working), la mise en réseau avec l’écosystème local, des formations collectives, des lunchs inspirants avec d’autres entrepreneurs, et un accompagnement individuel stratégique, construit sur mesure avec des experts. LP : Quels sont les enjeux, pour toi, de l’entrepreneuriat social de demain ? QZ : Pour moi, on aura réussi le jour où l’on

n’aura plus besoin de parler d’entrepreneuriat social puisque ce sera devenu la manière normale d’entreprendre. L’un de nos plus gros enjeux, c’est d’amener nos entrepreneurs sociaux à venir composer avec l’existant de manière intelligente, plutôt que de vouloir réinventer la roue. Il y a déjà beaucoup d’acteurs (publics et privés) qui réfléchissent aux mêmes questions sociétales et c’est fondamental d’envisager la collaboration et la coopération avec ces autres parties prenantes. Nous sommes un incubateur, mais nous n’avons qu’un souhait : que les idées sortent des quatre murs de l’incubateur où nos entrepreneurs sociaux travaillent, pour aller coopérer avec les collectivités, les entreprises, etc. Enfin, l’un des enjeux clef, c’est que les solutions développées et déployées par les entrepreneurs sociaux soient reprises par d’autres et répliquées. Un entrepreneur social aura réussi lorsque son idée aura été reprise et son projet répliqué à grande échelle, pour maximiser son impact social. LP : Un incubateur est souvent implanté localement, quel est le lien entre un territoire et l’entrepreneuriat social ? QZ : Le lien est indispensable. Nous avons la conviction chez Ronalpia, qu’un entrepreneur social doit bien connaître les besoins de son territoire pour y apporter une réponse adaptée. Il doit comprendre de façon systémique les racines du problème auquel il souhaite répondre, connaître les particularités liées au territoire en question. L’entrepreneur social se construit avec son territoire. C’est pour cela que nous travaillons la mise en réseau. Bien connaître son territoire, ses besoins, ses enjeux et ses acteurs est un facteur clef du succès. Comprendre le maillage local et identifier les bonnes personnes prend du temps, et nous voulons faciliter ce travail à nos entrepreneurs sociaux : nous jouons pour eux un rôle de connecteur, de facilitateur d’opportunités, de tiers de confiance sur le territoire.

LE CENT SEPT, NOUVEAU TIERSLIEU LYONNAIS Les portes du CentSept s’ouvriront, le 1er décembre prochain, au 107 rue de Marseille, dans le quartier de la Guillotière. L’objectif de ce nouveau lieu est de mettre en place un pôle d’innovation sociale. Le CentSept regroupera en effet les différents acteurs territoriaux, les collectivités et les grandes entreprises, pour co-construire ensemble des solutions, puisées dans l’entrepreneuriat social, et adaptées aux besoins et ressources du territoire. Nous avons rencontré Florence Lécluse, déléguée générale du CentSept. LP : Lyon aura dans quelques semaines, une plate-forme réelle, et non virtuelle, de rencontre autour de l’entrepreneuriat social. A quoi ressemblera ce nouvel espace ? FL : Nous aurons un espace d’environ 107 m² dans l’Hévéa, un immeuble rénové par Etic, la foncière immobilière responsable. Dans cet espace, qui se veut innovant et moderne, se trouveront un espace de co-working et un espace de créativité, pour travailler librement et ensemble à l’innovation sociale, pour stimuler les interconnexions. Ce sera un lieu très ouvert, un lieu de passage, de réflexion où chacun pourra s’informer, se former voire participer à un projet. Nous voulions casser « l’entre-soi ». LP : A quelles problématiques pourra répondre un tel lieu ? FL : Nous avons défini trois champs d’action, qui englobent des thématiques bien plus vastes : l’emploi, le cadre de vie et la solidarité. Et nous avons développé cinq axes d’action : la sensibilisation, l’étude des besoins du territoire, la détection de projets en lien avec le territoire, la création d’un CentSept lab et l’accélération des projets d’entrepreneurs sociaux existants, notamment grâce à l’expertise de nos partenaires. Nous espérons développer ainsi de nombreuses solutions entrepreneuriales innovantes et répondre aux besoins des habitants.

Propos recueillis le 22/09/2016 par Laurianne Ploix

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RENCONTRE AVEC UNE INTRAPRENEUSE SOCIALE Beaucoup quittent tout et se lancent dans l’aventure de l’entrepreneuriat social, d’autres essaient de changer les choses de l’intérieur : ce sont les intrapreneurs sociaux, ceux qui entreprennent dans une entreprise déjà existante ou sans quitter l’entreprise qui les emploie. Nous avons rencontré Solinne Moretti, chargée de communication environnementale chez Volvo Group-Renault Trucks, qui a lancé des initiatives au sein de son entreprise et suit actuellement une formation philosophique pour accompagner la création de son association. LP : Peux-tu nous confier ton parcours ? SM : Il y a deux ans, j’ai créé un poste de chargée de communication environnementale qui n’existait pas, pour insuffler des idées en lien avec l’environnement et accompagner leur développement. C’est une mission stratégique en entreprise, car l’environnement, comme le cadre de vie, fait partie du quotidien des salariés. Sous cette impulsion, j’ai alors œuvré à la création d’une commission dédiée, au sein du Comité d’Entreprise, la Commission « Environnement et Solidarité », qui a tout juste un an. En identifiant les besoins de l’entreprise, les envies et les attentes des salariés, j’ai eu envie de créer et on m’a écoutée. Aujourd’hui, au vu des engagements de chacun et de la fabuleuse dynamique en route dans l’entreprise, cela me fait dire qu’il y a de la place pour tout le monde pour agir là où on se trouve. Pour enrichir ma vision des choses, j’ai eu besoin de me construire une légitimité, de mieux comprendre les enjeux auxquels nous sommes confrontés. Je suis donc inscrite cette année en Master en Ethique et Ecologie à l’Université Lumière Lyon II, tout en continuant de suivre la Commission Environnement et Solidarité qui grandit et s’ancre durablement dans le paysage de l’entreprise. J’ai également créé l’association RESEAU FEVE (For Environnemental Value Empowerment) pour accompagner les salariés dans leurs en-

vies d’agir dans l’entreprise et au-delà... J’ai cette force de l’exemple qui fait dire « ah tu l’as fait, mais c’est possible alors ? » et nous sommes nombreux à la partager aujourd’hui. L’association crée l’espace-temps pour permettre aux salariés d’agir et de ré-enchanter leurs entreprises de l’intérieur. LP : Justement, est-ce si simple de convaincre sa Direction de s’engager dans une aventure sociale ? SM : De mon côté, j’ai été totalement transparente et je les remercie car tout ce que l’on a fait, tout ce que l’on continue à faire, c’est ensemble. Alors évidemment, ce sont de longs échanges entre accords et désaccords, mais nous restons ouverts, capables chacun de parler un même langage, et de trouver des points de convergence. Souvent, on ne se donne pas « la possibilité de », mais il faut oser, tout en respectant le cadre de l’entreprise. Je vois l’entreprise comme une cité, où chaque membre a une place, où chaque individu, salarié-citoyen, a sa place, vivante et mouvante. Les dialogues de Platon nourrissent ma vision, autant que celle d’Aristote rejoint ce que nous bâtissons aujourd’hui. Moi, je crois en la co-construction, qui se vit et qui transforme.

TEMOIGNAGE D’UNE JEUNE ENREPRENEUSE SOCIALE Engagement. Voilà un mot qui peut faire peur. Ce n’est pourtant qu’un mot qui cherche à atténuer les maux. Petite, déjà, même si je n’employais pas ce mot contre-maux, j’étais engagée. Au fil du temps, certains se sont même amusés à me surnommer « L’indignée ». J’avais à peine dix ans quand j’ai connu ma toute première (et bien pérenne) indignation, aussitôt accompagnée d’un engagement (durable, lui aussi) envers l’enfant que j’étais et l’adulte que je deviendrais : à l’école primaire, j’avais eu l’occasion d’aller visiter une station d’épuration, puis une déchetterie. Et c’est face à l’amoncellement de déchets que je découvrais vertigineux devant mes yeux que je me promettais de changer mes habitudes pour un mode de vie plus sain et modeste. Je ne le savais pas encore, mais du haut de mes trois pommes, je venais de m’engager dans un mode de pensée et de vie minimaliste, que certains ne manqueront pas de traiter d’utopiste, digne des hippies du Larzac. J’ai aujourd’hui 23 ans et j’ai bien fait de m’être engagée si tôt, plutôt que de gager sur une mi-

raculeuse conversion du monde dans lequel j’évolue. La société minimaliste et humaniste que je fantasme existe. Mais elle est encore bien timide. Elle marche comme sur des œufs, bras dessus, bras dessous, avec l’Économie Sociale et Solidaire. Elle ose à tout petits pas s’éloigner de glorieuses habitudes. Et nombreux sont ceux qui voudraient l’écraser. En vain. C’est pourquoi, chaque jour, essuyant au passage quelques claques fatalistes, je marche avec elle et tente de la consolider. Aussi, quelle que soit sa taille, j’apporte ma pierre à l’édifice. Ces trois fois rien multipliés par le nombre d’humains (r) égalent le monde de demain. Projet The Bleen Pill – Johanna Samiotakis

ET LES CHIFFRES ? Si appréciés dans le monde entrepreneurial, les chiffres apportent parfois des éclairages significatifs. Exemples L’économie sociale et solidaire représente aujourd’hui environ 10,5% de l’emploi en France (et 13,9% de l’emploi privé) et compte environ 222 000 établissements employeurs. Les entreprises sociales créent en moyenne 50 000 emplois par an, non délocaliseable et d’utilité sociale. Le secteur d’activité créant le plus d’emploi est l’action sociale avec une part de 60,9%. En Auvergne Rhône-Alpes, ce sont environ 30 000 établissements et 300 000 salariés, soit 11% de l’emploi salarié dans la région. Une entreprise sur quatre créée en Europe serait une entreprise sociale d’après la Commission Européenne. 75% des jeunes Français choisiraient de postuler prioritairement dans une entreprise sociale. 88% des personnes travaillant dans l’ESS souhaitent continuer à travailler dans ce secteur. Seulement 22% des Français ont déjà entendu parler de l’entrepreneuriat social et ils sont seulement 7% à savoir le définir, l’enjeu à venir est donc de promouvoir ce type d’entrepreneuriat pour développer son impact.

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A TABLE AVEC LES PETITES CANTINES Nous sommes allés déjeuner à la première petite cantine lyonnaise installée à Vaise, attablés à la grande table en bois, entre Alice, jeune Québecoise nouvellement arrivée dans le quartier et Fouadi, commerçant voisin, qui vient souvent donner un coup de main.

Nous sommes mercredi, c’est le jour des enfants, et ce sont les premiers à arriver avec fougue et enthousiasme pour se mettre au bout de la grande table en bois. Au menu aujourd’hui, salade de concombres, tartes salées, salade de choux rave et des gâteaux faits avec les gens du quartier. Le maraîcher, un producteur lyonnais, est passé dans la matinée et les tiges vertes du céleri trônent encore sur l’évier. A 10h, les premiers habitués de la petite cantine sont venus pour cuisiner le repas du midi. Gérard, ancien militaire et aujourd’hui bénévole, notamment aux Petits Frères des pauvres, est le MacGyver du lieu : il répare la plaque de cuisson collective, échange une recette sur un flan aux aubergines et prépare un savoureux gâteau au chocolat. Emmanuella habite juste au-dessus ; retraitée, elle vient voir du monde et la jeunesse ici en bas, elle préparera les tartes chèvre-tomates, délicieuses et bien garnies.

Habitués des lieux, les enfants vont se servir directement dans le frigo, en demandant ce qu’ils sont donc en train de mettre dans leurs assiettes. Juliette, l’employée du lieu, les renseigne avec un sourire contagieux et ne cesse de répéter à toute personne passant la porte de la petite cantine « ici, c’est comme à la maison ». Les adultes arrivent au compte-goutte, nous nous installons sur la grande table et nous commençons à échanger avec nos voisins de couverts. Première surprise, personne ne se connaît mais tout le monde parle. Alice, à notre droite, est passée devant la devanture, elle habite à quelques mètres et trouvait le principe « sympa ». Fraîchement arrivée du Québec dans le quartier, elle découvre ses voisins qui lui conseillent les marchés du coin. Face à nous, le fameux Gérard, qui est venu avec un ami d’une trentaine d’années pour s’essayer à la cuisine participative et rencontrer du monde, à notre

gauche, Fouad, un commerçant du quartier dynamique qui remarque notre coup de fourchette plutôt gourmand... Alors que nous passions aux tartes salées, deux salariés en pause-déjeuner viennent s’installer aux places encore vacantes du bout de la table. De nouvelles conversations naissent et on reste, encore un peu, attablés avec ces inconnus accessibles. Le repas coûte environ 8€, mais pour l’instant, chacun donne ce qu’il souhaite, il suffit de payer l’adhésion aux petites cantines. La volonté première des co-fondateurs, Diane Dupré la Tour et Etienne Thouvenot, est de faire vivre un quartier en cuisinant et déjeunant ensemble, pour découvrir « le potentiel de solidarité de ses voisins », expérience vécue par Diane suite à un accident de la vie. Pour tester leur idée, les deux amis investissent le restaurant du Foyer protestant de la Duchère, c’est un succès ; ils décident alors de se lancer à Vaise, pour la mixité du quartier. Début septembre, c’est l’ouverture, et les curieux sont au rendez-vous. « Lorsqu’on est à table avec quelqu’un, tous les a priori tombent, et on discute, on est simplement ensemble en train de partager un bon repas et de créer du lien, pour s’apporter un peu de bienveillance et d’échange », précise Diane. Et les convives semblent d’accord. Si tout se passe bien, de nouvelles petites cantines devraient voir le jour en 2017, dans d’autres quartiers de Lyon. A suivre...

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Ils font Lyon autrement

L’IMPROVIDENCE, A VOUS DE JOUER ! Imaginez, l’espace de quelques minutes, un monde où l’humilité, la générosité, le partage, le respect, la créativité..., bref, la solidarité et le positivisme, seraient au service de nos différences, voyant en celles-ci, d’infinies chances pour toujours mieux avancer ensemble dans nos sociétés, sans jugement ni a priori.

« Un jour je suis né, depuis j’improvise » Ce slogan qui sonne comme une réalité universelle nous rappelle que les valeurs véhiculées par l’improvisation sont celles que les êtres humains ont naturellement en eux depuis des millénaires. Elles sont notamment essentielles lors des échanges citoyens dans nos sociétés. Le théâtre d’improvisation est aussi devenu depuis quelques décennies un art théâtral à part entière, reconnu dans de nombreux pays, notamment sous l’influence de plusieurs courants venus des États-Unis et du Canada dans les années 1960-1970, initiés par Del Close, Keith Johnstone, Robert Gravel, Yvon Leduc... pour ne citer qu’eux. Apparu officiellement depuis 1981 en France, il s’est progressivement développé dans plusieurs villes, proposant des concepts de spectacles toujours plus variés. On ne compte plus le nombre de « troupes d’impro » qu’il y aurait à Lyon et

dans ses environs : plus d’une centaine, et des milliers de pratiquants.

n’avait pas pour habitude de drainer les amateurs de cafés-théâtres.

Et l’Improvidence est apparue !

Après plus de huit cent cinquante spectacles, l’Improvidence a vu passer des centaines de comédien.ne.s professionnel.le.s et amateur.e.s (par l’intermédiaire de plusieurs dizaines de troupes de Lyon et d’ailleurs), ainsi que des artistes internationaux, participant à développer un état d’esprit d’ouverture et d’interculturalité.

L’Improvidence est née d’une envie géniale et délirante émanant de vrai.e.s passionné.e.s de l’impro, persuadé.e.s de son utilité publique dans nos sociétés. Ils ont dit oui à leurs instincts et à leurs convictions, ouvrant cet espace merveilleusement convivial en octobre 2014 ; c’est le premier café-théâtre (et toujours le seul) entièrement dédié à l’improvisation dans notre pays. Ce lieu atypique propose dorénavant un ou deux spectacles par soir, du lundi au dimanche, et est devenu, en moins de deux ans, une référence incontestable du théâtre d’impro en France et au-delà de nos frontières. Situé non loin des berges du Rhône, entre la Préfecture et Guillotière, il ne cesse d’évoluer jour après jour, représentant en quelque sorte l’Olympia de l’improvisation, dans un quartier qui

Ils ont fait de leurs rêves altruistes des réalités. C’est une équipe chaleureuse qui vous accueille au 6 rue Chaponnay, dans cet univers aux décors infinis, où les murs en pierres apparentes respirent le partage, témoins d’une histoire collective improvisée en cours. Les clichés photos « collectors » se multiplient, les « selfies » en solos ou en groupes, devant le mythique « logo aux quatorze étoiles », font le bonheur de plusieurs milliers d’internautes sur les réseaux sociaux, ainsi que de cette communauté illimitée de « spect’acteurs » souhaitée par le trio de choc fondateur. Thomas Debray, le président, l’homme au chapeau, globe-trotter de l’impro, a notamment voulu surfer sur ses expériences dans la capitale mondiale de l’improvisation, Chicago, pour faire naître un endroit où chacun.e pourrait ressentir à sa manière (via l’éclectisme incomparable de cette discipline), des raisons de grandir avec les autres. Dans ces démarches humanistes et positives, il est accompagné de deux comédiennes exceptionnelles. Péroline Drevon,

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réunissant des comédiennes « généreuses, inventives et sincères », à l’origine de différents concepts « 100 % filles » tout au long de l’année . Élodie Crolle, une des bluffantes comédiennes de la troupe, proposera avec d’autres artistes, en marge des Z’elles, « Un Air de Famille » ; Mélinda Nouette, quant à elle, aura carte blanche pour inviter certains week-ends, un à deux artistes atypiques, des pointures de l’improvisation de la région et d’ailleurs.

directrice associée, a un parcours d’improvisatrice marqué par l’envie d’offrir au public de nouvelles opportunités d’être interpellé par d’autres émotions que le « tout-humour », nous rappelant ainsi les richesses intérieures existantes en chacun.e. d’entre nous. Mélinda Nouette, directrice artistique et pédagogique, véritable personnalité, d’une sensibilité et expressivité remarquables, championne du monde d’impro en 2011, est toujours prête à s’engager à l’idée de véhiculer les valeurs solidaires et de créativité portées par cette activité scénique riche d’enseignements. Renforcée par deux administratrices ultra dynamiques, Kathleen et Élodie, ainsi que par une équipe de bénévoles, symbole de la vitalité, de l’interactivité et de la bonne humeur du café-théâtre, l’Improvidence lance cette invitation à « vivre autrement l’instant présent ».

Le spectacle Coup de cœur de l’Improvidence depuis près de deux ans, « Live », reviendra chaque mois avec le chanteur vedette de la troupe iséroise « Les Bandits Manchots », accompagné de ses musiciens exceptionnels, pour un concert 100 % improvisé hors normes. Tibo Astry, un des piliers de l’improvisation lyonnaise, pensionnaire d’une troupe professionnelle, la LILY (Ligue Improvisation Lyonnaise), sera seul en scène dans « IL(S) », accompagné d’un musicien. Il propose également des spectacles « IL(S) KIDS », pour les enfants à partir de 5 ans . D’autres représentations de la LILY et d’OBIWAM s’adapteront aux plus jeunes. Une troupe professionnelle lyonnaise, Amadeus Rocket, revisitera l’actualité de la presse quotidienne, dans « Gazette », de manière décalée. Les comédies musicales seront aussi à l’honneur, notamment avec les troupes « Et Compagnie » (« Broadway ») et « Arnold Schmürz ». Cédric Martinez, fondateur des Space Gônes, et ses élèves, vous surprendront peut-être par d’autres approches artistiques, tout comme Christelle Delbrouck, quatre fois championne du monde d’impro, Odile Cantero et Nicolas Moitron dans « Les Exs », Charles Perrut et son « Politishow »... Des programmes de formation toujours plus alléchants s’adresseront aux personnes curieuses ainsi qu’aux plus expérimentées, le temps de week-ends interactifs et convi-

viaux, adaptés à tous niveaux. Poupak Sepehri, improvisatrice internationalement reconnue, dispensera des stages « comédies musicales ». Matthieu Loos, autre grande personnalité de cet art, vous entraînera en immersion dans l’instant présent, lors de stages SLOW IMPRO, approche artistique atypique, incroyablement accessible à toutes et tous. Patrick Spadrille vous initiera à la création de pièces de théâtre improvisées, rien que ça... Il est impossible d’être exhaustif, et heureusement ! Nous voudrions presque nous excuser d’oublier d’innombrables troupes et comédien.ne.s plus ou moins connu.e.s. Une grande famille qui nous fait retomber amoureux de la vie et des autres. Nous appartenons toutes et tous à ce monde de l’improvisation car nous sommes des êtres humains qui ne connaissons pas l’avenir et faisons avec ensemble. Sans volonté de compétition, nous sommes amenés à rire, pleurer, douter, chanter, vibrer, nous détester, nous réconcilier avec les autres... En cela, l’Improvidence est un lieu comme il y en a heureusement beaucoup d’autres dans nos quartiers, où se développent notre liberté d’expression dans le respect des autres. Peut-être qu’un jour vous goûterez aux plaisirs et joies simples et réelles, via l’improvisation. Vous partagerez sans complexes ces émotions avec ces comédiennes et comédiens, quels qu’ils soient, pour une « Toute Première Fois » avec Hugh Teby et Olivier Boulkroune, ou à l’occasion d’autres spectacles pour lesquels vous pouvez bénéficier de réductions via un abonnement au journal, qui est un partenaire naturel de l’Improvidence, de par les valeurs qu’elle transmet aux citoyen.ne.s. par Fabien L’improvidence est l’un des partenaires du Tout va bien, bénéficiez de 25% de réduction sur tous les spectacles en vous abonnant au journal avec l’option engagée. Plus d’infos sur toutvabienlejournal.org.

La richesse du « théâtre d’impro » se retrouve dans sa programmation. Vous pourrez assister à des spectacles de formats variés, que ce soient les incontournables tournois de « catchs d’impros » lors desquels s’affrontent neuf équipes de deux joueurs par semestre, les dimanches soirs, ou les « long form », en passant par les concepts expérimentaux, les solos, les ateliers élèves de certaines troupes ... sans oublier les festivals comme celui des « Z’elles », troupe

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Rencontre inspirante

et de venir les appliquer en bas de chez moi, à commencer par Lyon.

IL PART FAIRE LE TOUR DU MONDE DES INITIATIVES RENCONTRE AVEC MARTIN GUIGNARD Johanna - Bonjour Martin, peux-tu te présenter à nos lecteurs ? Martin - Bonjour, merci de me donner la parole ! J’ai 22 ans et je suis sur le point de terminer un cursus en management interculturel, communication et événementiel à l’ESTRI, Ecole Supérieure de Traduction et Relations Internationales de Lyon. Si je devais trouver un mot pour me définir, ce serait “ouverture”. Sur le monde. Sur les autres. J’ai un penchant naturel et une vraie passion pour l’interculturel. D’ailleurs, grâce à mes études, j’ai pu pleinement étancher ma soif de voyages et de rencontres. J’ai notamment pu vivre en Nouvelle-Zélande, en Allemagne, et plus récemment, au Mexique. J’aime écrire sur mes aventures à l’étranger ou en France. Je tiens d’ailleurs un blog de voyages (Raranga, pour les intéressés). On pourrait dire que je suis un vrai… blog-trotter ! (Marque déposée - Martin Guignard 2016). J - Cette fois, tu t’apprêtes donc à repartir pour un tour… du monde ! Comment ce projet s’est-il construit ? M - Le projet est le résultat d’un excellent timing. Il y a quelques mois, alors que je préparais mon retour en France pour faire mes premiers pas dans le monde du travail, j’ai eu vent d’un appel à projet à peine croyable : une fondation cherchait à financer des tours du monde pour quelques heureux sélectionnés. Je ne pouvais pas rater une telle opportunité ! J’ai construit un projet qui allie interculturel et développement durable, et qui a été retenu ! J - Les candidats ont dû être nombreux, tout repose donc sur l’intérêt de ton projet. Tu peux nous en dire plus ? M - Avec plaisir : j’ai présenté un projet qui me permettra d’aller à la rencontre de peuples qui, à leur échelle et avec leurs propres moyens, amorcent une transition vers une vie plus saine et durable. J’ai envie d’échan-

ger et d’apprendre de ces personnes qui changent leur mode de vie sur le terrain ! Une autre envie : celle de voir comment les différents pays s’adaptent après les accords passés à la COP21. Les gouvernements du monde veulent initier un changement, j’ai envie de voir comment les nations s’imprègnent de ces idées. Voir et comprendre comment l’ordre mondial se meut. J - Programme ambitieux. Pourquoi te lances-tu dans cette aventure ? M - C’est au Mexique que m’est vraiment venu le déclic. J’y étais six mois cette année pour un stage qui clôturait mon master. Ces deux dernières années, j’ai passé plus de temps à l’étranger que sur le sol français. Or, cette fois, voyant aussi le bout de mes années étudiantes pointer, j’ai réalisé que c’est ici, en France, que je voudrais évoluer professionnellement. Je pense m’épanouir en travaillant en France et pour la France. J’ai envie d’utiliser mes diverses expériences internationales pour aider à mon niveau, localement. Ce tour du monde, c’est l’occasion d’aller chiner les bonnes idées aux quatre coins du monde

J - La fondation va donc financer l’intégralité de ton voyage, pourvu qu’il passe par au moins cinq continents. Comment as-tu fait pour choisir ton itinéraire et quelles en sont les étapes clés ? M - Pour le tracer, j’ai tout simplement pris un planisphère et me suis demandé où j’avais envie d’aller, où j’avais des contacts, quelles régions du monde m’intéressaient particulièrement et quels pays étaient pertinents pour mon étude sur le terrain. De là s’est faite une sélection tout à fait naturelle. Mon parcours me fera notamment passer par les steppes de Mongolie pour y observer les techniques de permaculture ; par les îles Tuvalu, en proie à la montée des eaux ; par la Tanzanie, à la rencontre des tribus Maasaï qui sont en conflit permanent contre les propriétaires étrangers qui rachètent leurs terres ; en Amazonie, pour des raisons évidentes, mais aussi à Rio et Sao Paulo, découvrir les initiatives de potagers partagés dans les favelas ; ou encore par le Costa Rica, premier pays à couvrir ses besoins énergétiques à 100% par des énergies renouvelables. J - Je ne peux m’empêcher de voir quelques similitudes entre ton projet et le film Demain, de Cyril Dion et Mélanie Laurent. A-t-il été fondateur dans cette décision ? M - Indéniablement. Il a apporté à mon projet sa dimension développement durable. Je souhaite revenir avec une myriade de bonnes idées à partager, et insuffler un changement, à mon échelle. “Le changement vient toujours par le bas”, rappelle Robert Reed, porte-parole de l’initiative Zero Waste. Pour autant, je n’oublie pas l’aspect interculturel de ce tour du monde, qui est tout aussi fondateur. Je souhaite en apprendre plus sur les peuples que je vais rencontrer, leur mode de vie, leurs croyances et leur vie cultuelle m’intéressent particulièrement. J - Aurais-tu quelques conseils à donner à ceux qui nous lisent ? M - Ecoutez-vous : osez faire ce que vous voulez, il faut se connaître soi-même pour aller là où la vie vous appelle ! J - Merci, Martin. Je clôturerai cette interview en citant Saint Augustin : “Avance sur ta route, car elle n’existe que par ta marche”.

Propos recueillis par Johanna Samiatokis

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Idées

VOUS AVEZ LA PAROLE

APPELS A SOUTIEN

Nous nous voulons citoyens, participatifs et collaboratifs, il vous fallait donc un espace. Le voici. Ce mois-ci, Shoki Alisaid a souhaité partager avec nous son enthousiasme à la sortie d’une conférence d’Alain Mabanckou, autour de son livre Le monde est mon langage publié aux éditions Grasset. « Vibrant plaidoyer encourageant la diaspora africaine à s’engager dans le débat démocratique en Afrique, ce livre cherche à montrer que « La parole est plus forte que les armes ». Merci, Alain Mabanckou : outre vos œuvres, ce sont votre altruisme, votre humanisme et votre engagement qui feront de vous un immortel (et vous l’êtes déjà), ou plutôt un héros du XIXe siècle. Votre bravoure inspire et continuera d’inspirer la jeunesse africaine et du monde entier. Vous n’êtes pas obligé de vociférer sur la situation politique africaine, en générale, et congolaise, en particulier. Vous êtes sous d’autres cieux. Mais l’humanisme et le devoir vous interpellent. Bravo Alain car vous incarnez l’espoir de toute une génération. Réinventons la littérature francophone avec Alain Mabanckou. Quelle subtilité de la pensée de ce grand écrivain qui éveille ma conscience. L’homme du moment. L’homme à la pensée normative et aiguë comme une épée. Que Dieu continue à vous inspirer pour que l’Afrique soit libérée par vos dires véridiques et solides. Vous êtes mon coup de cœur ! »

TRUCS & ASTUCES

Vous nous l’avez demandé cet été quand on est partis à votre rencontre lors de festivals, voici donc une nouvelle rubrique d’appel à soutiens, non exhaustifs. * Le théâtre l’Improvidence recherche des bénévoles pour l’accueil des artistes et des spectateurs. * L’épicerie solidaire Epicentre recherche des bénévoles pour tenir la boutique. * La commission éducation d’Artisans du monde recherche des bénévoles à Lyon. * Toits en transition lance sa campagne de financement participatif sur Hello Asso. * Tous unis, Tous solidaires se tiendra tout au long du mois d’octobre. * Tout va bien a besoin de vous pour financer des distributeurs à journaux éthiques, dans les contreparties, des invitations à nos événements et des abonnements Pour plus d’infos contactez-nous à contact@toutvabienlejournal.org

L’ortie, une amie qui vous veut du bien Savez-vous que vous avez une amie, verte et urticante, qui colonise les terrains naturellement brassés et enrichis par les activités humaines ? C’est l’Ortie ! Cette plante est étonnante de par sa composition, justement parfaitement adaptée à l’Homme. D’ailleurs, est-ce un hasard si elle les suit depuis la nuit des temps, ses graines s’accrochant aux peaux de bêtes et autres vêtements, pour lui permettre de coloniser les campements humains ? L’ortie contient tous les acides aminés que les Hommes ne peuvent pas produire, ceux dits « essentiels ». C’est aussi une des plantes qui contiennent le plus de vitamine C (six fois plus que dans les oranges), de calcium (deux à trois fois plus que dans les amandes, trois fois plus que dans les noisettes), de fer (autant que dans les lentilles et deux à trois fois plus que dans les épinards) et de protéines (40% sur matière sèche, autant que dans le soja). On y trouve aussi dix fois plus de vitamine A que dans la laitue et un peu plus de potassium que dans la banane. La concentration de tous ces minéraux et protéines dans une même plante est unique. C’est une des plantes les plus nutritives de notre environnement. Sa saveur est étonnamment douce pour une plante qui de prime abord n’est guère engageante à cause de ses poils urticants. Qui n’a pas le souvenir d’avoir chuté dans un massif d’ortie, exposant sa peau fraîche d’enfant à la brûlure cuisante de la belle épineuse ? Oublions cela, armons-nous de ciseaux et cherchons un massif de spécimens fraîchement repoussés. Coupons les six ou huit premières feuilles de chaque plante, et remplissons notre sac. Allons-y, elle nous est offerte, et n’en repoussera que de plus belle ! Du gagnant-gagnant. Si cela nous brûle un peu, rassurons-nous en pensant que la substance urticante, à faible dose, prend soin des articulations de nos doigts. Eh oui, Il a été d’usage dans des temps anciens de se frotter avec des orties pour activer la circulation du sang et soigner ses rhumatismes et son arthrose. C’est le moment de cuisiner votre cueillette. Tout le monde connaît la traditionnelle soupe d’orties, délicieuse, mais je vous encourage à tester d’autres recettes. L’ortie est excellente crue, ses poils urticants deviennent inactifs lorsqu’elle est finement ciselée. La consommer crue vous permet de profiter de toutes ses vitamines. Vous pouvez la hacher et l’ajouter dans les salades, en faire une tartinade en la mélangeant avec de la purée de sésame et du citron, l’utiliser pour faire du pesto, ou l’incorporer à du houmous. Ainsi dégustée crue, elle vous fera profiter de toutes ses vertus. L’ortie a aussi d’autres qualités pour l’Homme, par exemple on peut utiliser ses fibres pour en faire des tissus... Si ce n’est pas de l’amour tout ça ! Dernière information étonnante : savez-vous qu’elle a des cousines, la même famille (les urticacées) en version gigantesque, des arbres avec des poils potentiellement mortels qui poussent en Australie ?

POESIE Aube d’été Un filet fin sur le visage Un croissant chaud recouvre ma page A crayonner Au loin les ombres ciselées Discutent le monde. Comment va-t-il s’éveiller? La nature presque féconde Les ombres, prêtes à jouer. Lumière ambrée, douceur des âmes Lentement effleure le cœur des dames Et leurs rondeurs, à dessiner. Au petit matin la terre est ronde Après une nuit éparpillée Ombre et lumière viennent s’enlacer Et forment une onde à diffuser. Il est temps, Le cercle blond lance une fronde Sur notre monde à éclairer. Anna Pueyo - 08/2016

Astuce rédigée par Ann Perez, abonnée Tout va bien et pharmacienne

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Détente et contacts

AGENDA Le 1er octobre : Lyon CleanUp Day Une journée complète pour en apprendre le plus possible sur la thématique des déchets. L’ensemble des intervenants lyonnais sur le sujet (ou presque) seront présents. Au programme, des balades-collectes, de l’alimentation végane et anti-gaspi, un pique-nique zéro-déchet puis des animations et ateliers. Le 4 octobre : Formation « Toutes les clés pour créer une entreprise sociale et solidaire » Organisée par la Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire de Rhône-Alpes (CRESS), cette formation payante vous donne les clés pour monter un projet ESS.

Le 5 octobre : Sous le caillou, La cocotte à Lyon Un nouveau festival autour de la question de l’égalité hommes/femmes organisé par « La cocotte prod » et le théâte « Sous le caillou ».

MOTS CACHÉS Retrouvez dans la grille ci-dessous les mots suivants : Ajuster Bonheur Chemin Comprendre Considérer

Envie Epanouissement Générer Message Opportunités

Patience Personnel Plaire Satisfaction Social

Ils sont de gauche à droite à l’horizontale ou à la verticale. Retrouvez les solutions le 14 octobre sur la page Facebook.

Le 6 octobre : Et si vous réinventiez votre organisation ? Une soirée d’expériences autour de l’intelligence colective avec pour trame de fond le livre de Frédéric Laloux qui propose de nouveaux modèles d’organisation mêlant sens et efficience. Du 7 au 9 octobre : Start Up Weekend Lyon Science Un week-end pour découvrir et travailler autour des dernières innovations issues des laboratoires de recherche, toutes thématiques confondues (chimie, archéologie, informatique, sciences humaines, etc.) Les 15 & 16 octobre : Week-end à la Ferme des Amanins L’association Tout va bien vous emmène deux jours en Drôme provençale dans le hameau de Pierre Rabhi pour un week-end découverte des alternatives éducatives, de la permaculture, de l’agro-écologie, de l’éco-construction. Co-voiturage, pension complète avec les bons produits de la ferme, nuitée à la ferme, diffusion de film, jeux coopératifs, un week-end ressourçant et éducatif à réserver sur toutvabienlejournal.org dans la rubrique « Nos événements ».

HOROS’CAP ?

CONTACTS

Bélier Cap de nous envoyer une jolie photo de coucher de soleil ?

Balance Cap d’oser prendre cette décision que vous savez bonne ?

TOUT VA BIEN LE JOURNAL QUI RÉINVENTE DEMAIN

Taureau Cap de se mettre au vélo au moins une fois par semaine ?

Scorpion Cap d’essayer une recette de cuisine inconnue ?

Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et donnez votre avis, partagez vos initiatives positives.

Gémeaux Cap de ne faire que ce qu’il vous plaît pendant une heure ?

Sagittaire Cap d’essayer une discipline sportive de développement personnel ?

A LYON

Cancer Cap de surprendre vos enfants agréablement ?

Capricorne Cap de se renseigner sur la médecine douce?

Lion Cap de tester la bienveillance envers soi-même et oser le pardon ?

Verseau Cap de venir à l’un de nos événements ?

Vierge Cap de partager ses émotions avec une personne proche ?

Poisson Cap de rédiger le prochain horos’cap ?

Illustration : Carole Perret pour A/R magazine (Paris)

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