Le commerce équitable Sud-Sud

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Rédaction Olivier Bailly et Samuel Poos. Coordination EcoRes sprl — Samuel Poos (CTB) Editeur responsable : Carl Michiels, 147 rue Haute 1000 Bruxelles Photo de couverture :

© CTB, Julien Lesceux

Les opinions exprimées dans cette publication sont celles de son auteur et ne reflètent pas nécessairement celles de la CTB ou de la Coopération belge au Développement. Des extraits de cette publication peuvent être utilisés dans un but non commercial à condition d’en citer l’origine et l’auteur. © CTB, Agence belge de développement, Bruxelles, 2ème édition, Décembre 2011

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> Bref rappel historique

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> Valeurs du commerce équitable et avantages

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> Volume vs valeurs ?

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> Main mise du Nord sur le Sud ?

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> Biodiversité

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> Trois Sud-Sud : local, régional, international

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> Avantage d’un commerce équitable Sud-Sud local et régional

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Trouver de nouveaux débouchés commerciaux Augmentation de la résilience face aux crises extérieures Dynamiser les énergies locales du changement Valorisation économique des marchés locaux, et diversité culturelle Sensibilisation au concept du « fair trade » au Sud Un impact écologique réduit Adaptation du concept « équitable »

> Les certifications, labels a l’initiative du Sud

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Au Sénégal, ENDA lance un système local de certification Mexique : le label Comercio Justo “Profit” et “Shop for Change” en Inde Des “Max Havelaar” dans les pays en développement Le label des petits producteurs Le projet de magasins du monde par la plateforme régionale de COFTA > Quand l’Etat s’implique

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Brésil : le commerce équitable comme politique sociale Le commerce équitable s’organise au Maroc Madagascar se dote d’un comité interministériel d’appui au commerce équitable > Autres initiatives

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Afrique Kenya Federation for Alternative Trade (KEFAT) Amérique latine

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La table de coordination latino-américaine de commerce équitable Pérou : Le groupe-Réseau d’économie solidaire du Pérou (CRESP) Equateur : Maquita Cushunchic Asie

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L’Avocat du commerce equitable aux Philippines Inde : le premier label de commerce équitable pour les magasins « Betterday » se vend très bien au Vietnam et ailleurs

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> Dangers du Sud Sud local et régional

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Une perte de lien ? Des critères équitables à deux vitesses ? > La fin d’un certain paternalisme

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© CTB

En 1964, lors de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED), des représentants des pays du Sud affirment avec force la volonté et fierté des pays du tiers monde : ils ne veulent pas s’apitoyer sur leur sort. Ils ne se contenteront pas d’être les passagers de leur développement, ils veulent le piloter en brandissant l’étendard « Trade not aid », « du commerce, pas de l’aide ». Refusant l’aumône ponctuelle des pays du Nord, les représentants des pays du Sud mettent l’accent sur l’échange et demandent de réelles politiques commerciales leur ouvrant les marchés des pays du Nord. Le commerce devient ainsi ‘outil de développement’, d’émancipation. Des ‘Magasins du monde’ commencent à fleurir en Belgique rapidement, dès 1971. Ils seront 120 deux ans plus tard. Le mouvement est généralisé au niveau européen. Max Havelaar ouvre l’ère du label équitable en 1988. Son logo certifie au consommateur les principes équitables lors de la production du produit. Dans la foulée, le fair trade s’installe dans les rayons des supermarchés. Les ventes décollent. La fin du millénaire est accompagnée par la structuration au niveau international du commerce équitable et l’émergence d’organisations faîtières. Parmi les plus importantes, FLO (Fairtrade Labelling Organizations International) voit le jour en 1997. Le secteur de la grande distribution, trouvant une niche commerciale et/ou se découvrant une éthique, s’engouffre dans le concept et crée ses propres marques de qualité. A un niveau plus modeste, de nombreuses PME dans des activités commerciales variées (mode, épicerie, voyages, artisanats, etc.) adoptent la philosophie équitable sans pour autant faire appel aux labels ou l’afficher. [1] En 2010, le commerce équitable labellisé enregistre une hausse de 18% pour un chiffre d’affaires de 4.3 milliards d’euros au niveau mondial. Ces produits émanent de 905 organisations certifiées représentant plus d’un million de travailleurs. En évaluant les impacts indirects, 6 millions de personnes bénéficient de ce type de commerce [2]. Tant sur le plan des valeurs que sur le marché, le commerce équitable est une réussite.

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Les acteurs du commerce équitable se sont accordés sur une définition de leur solidarité :

ne semble pas tenu, lui, d’appartenir à l’un des hémisphères de la planète.

« Le commerce équitable est un partenariat commer-

Pourtant, l’existence de cette relation entre peuples d’autres continents présente plusieurs avantages.

cial fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, dont l’objectif est de parvenir à une plus grande équité dans le commerce mondial. Il contribue au développement durable en offrant de meilleures conditions commerciales et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs marginalisés, tout particulièrement au Sud de la planète. Les organisations du commerce équitable (soutenues par les consommateurs) s’engagent activement à soutenir les producteurs, à sensibiliser l’opinion et à mener campagne en faveur de changements dans les règles et pratiques du commerce international conventionnel »*

D’abord, elle atteint son but d’une redistribution volontaire des richesses du monde. Les consommateurs « aisés » du Nord acceptent de payer un produit au prix juste afin de rétribuer correctement les producteurs marginalisés du Sud. Même si le mouvement est minime à l’échelle du commerce planétaire, il y a bien transfert de richesses. Le commerce équitable aiguise également la conscience du consommateur. En lui signifiant que l’achat de produits permet de payer un salaire décent aux travailleurs, il indique implicitement que d’autres sont le fruit de l’exploitation d’une main-d’oeuvre bon marché. Cette conscience peut naître de la rencontre d’un pays via ses produits. Le commerce équitable peut aussi affirmer un soutien à des causes (Palestine, Tibet). Ces gestes quotidiens concrétisent la solidarité des peuples.

Ce commerce est jalonné de critères sociaux, économiques et environnementaux. La rémunération du producteur doit être équitable, couvrant ses besoins et ceux de sa famille et assurant leurs droits à un toit, à l’éducation, à la santé. Les organisations de producteurs indépendants doivent être ou devenir démocratiques, participatives, transparentes et ouvertes à de nouveaux membres. Les plantations et les usines doivent respecter la législation nationale du travail et les Conventions de base de l’Organisation internationale du travail (OIT) avec entre autres la liberté syndicale et la sécurité sociale.

Au Sud, le commerce équitable développe un aspect formateur sur un plan social, environnemental, mais également en termes de production et productivité. Les exigences européennes et équitables amènent les producteurs à développer des pratiques de production irréprochables. Le marché local bénéficie également de ce savoir, et les producteurs peuvent s’ouvrir vers d’autres marchés exigeants, en dehors du commerce équitable.

Mais au-delà de ces paramètres, le commerce équitable développe des valeurs qui sont à l’opposé de la concurrence commerciale à tout crin. Il met au contraire l’accent sur la redistribution des richesses, des organisations collectives, la réinvention de la société sur des bases démocratiques, participatives et transparentes. Pour certains, il est prétexte à une mise en autonomie des groupes locaux de producteurs, autonomie en production d’abord mais ensuite en tant que collectif de citoyens.

Enfin, les organisations du Nord et les producteurs du Sud ne se rencontrent pas que pour discuter business… Portés par les mêmes valeurs, ils militent ensemble et leur union offre une stature internationale à leurs positions politiques. Elles s’inscrivent dans le même registre « mondialisant » revendiqué par les structures supranationales comme l’OMC.

Ces organisations de commerce équitable se vivent aussi comme un engagement. Elles possèdent une dimension politique car « d’une part, elles portent une

visée de changement, et que, d’autre part, elles s’appuient sur des formes d’organisation militante et elles impliquent des jugements sur les rapports instaurés par le marché conventionnel ». [3] Le lien Nord-Sud n’est pas intégré dans la définition. Si les producteurs et travailleurs sont localisés « tout particulièrement au Sud de la planète », le consommateur *

Cette définition du commerce équitable a été élaborée par FINE, regroupant quatre structures internationales de commerce équitable (FLO, WFTO, NEWS ! et EFTA)

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Un des inconvénients majeurs du commerce équitable et dont découlent d’autres désavantages, c’est sa réussite. Depuis les années 1990, par le biais d’une

« stratégie d’extension consistant à accroître le volume et la vente des produits équitables en les intégrant dans le circuit économique traditionnel par le biais d’organismes labellisateurs » [4], le commerce équitable s’est glissé dans le commerce mondial. Jusqu’à s’y fondre ? Les valeurs fondatrices du commerce équitable comme la solidarité et les dynamiques de changements pourraient être mises à mal, ses critères revus à la baisse, écornés par les exigences commerciales. Les partenaires du Sud changent également lorsque la demande explose. Comme le reconnaît Christophe Maldidier de l’association française Solidar’monde [5], « Pénétrer

le marché, tout en le maîtrisant, n’a pas été facile non plus pour le réseau Artisan du Monde qui a quadruplé la valeur de ses achats au Sud en dix ans. Pour satisfaire une clientèle nouvelle, Solidar’Monde a été conduit à réduire, voire rompre, ses relations commerciales avec certaines organisations d’artisans fragiles, tandis qu’ont été plutôt privilégiées de plus grosses structures faîtières, qui s’approvisionnent elles-mêmes auprès de dizaines de groupements. De nouveaux fournisseurs ont également été introduits de façon à élargir les gammes de produits. Ces évolutions ne sont pas sans conséquences sur la qualité et l’équité des relations commerciales. Par exemple, la pression du marché a parfois été transférée sur les producteurs du Sud : pression sur les délais, introduction d’une certaine délibération sur les prix, etc. » [6]. Emblématique, l’octroi à la multinationale Nestlé d’un label équitable à une de ses gammes de café, Partner’s Blend, illustre les tensions entre la poursuite d’intérêts financiers et la responsabilité sociale des acteurs [7]. Une certification a été donnée à ce café par la branche britannique de Fair Trade Labelling Organisation (FLO). Pour Oxfam, c’est un premier pas dans la bonne direction. Même si ce "Partner's Blend" n'a, à ce jour, pas réellement eu de suite. Qu'importe. Nestlé engage un deuxième pas avec sa célèbre barre chocolatée Kit Kat. Depuis janvier 2010, en Irlande et au

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Royaume-Uni, le snack à quatre doigts qui contient du sucre et du cacao équitable arbore le logo de FLO. La société Nestlé ne compte pas se limiter à ces en-cas, envisageant de faire passer d'autres produits sous l'égide du commerce « équitable ». Cette perspective ne remplit pas d'allégresse tous les acteurs du secteur. Notamment à cause du parcours amoral de la multinationale et un engagement proportionnellement ridicule en regard de son volume de chiffres d'affaires. Ce chiffre d'affaires est paradoxalement un des arguments des pro-Nestlé équitables. Des Kit Kats équitables toucheraient plus de 8000 producteurs de cacao en Côte d’Ivoire [8]. Les perspectives d’ouverture vers un nouveau public sont à la taille du partenaire : énormes. Le géant suisse, en février 2008 a annoncé avoir dépassé pour la première fois de son histoire, le cap des 100 milliards de francs suisses pour 2007 [9]. Mais pour une partie de la société civile, ce premier produit équitable sur les 8000 de la société est l’arbre éthique qui cache une forêt sans morale*. En observant l’alliance du Fairtrade avec le système de la grande distribution et des industriels capables de fournir des produits standardisés de haute qualité, « il est certain que ceux qui pensent que le commerce équitable a fait « pacte avec le Diable» n’ont pas tout à fait tort » estime François Lerin, directeur de la publication Courrier de la Planète.

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Société parmi les plus boycottée au monde, Nestlé est accusée, entre autres, d’avoir mené dans les années nonante des campagnes marketing en Afrique pour son lait en poudre avec des pratiques commerciales abusives, détournant les mères de l’allaitement. A cette époque et selon l’Unicef, l’utilisation du lait en poudre (avec notamment de l’eau impure), causait un million et demi de décès parmi les nourrissons « Ces biberons qui tuent », Claire Brisset, Monde Diplomatique, Décembre 1997 9


Le reproche revient systématiquement. Les règles du commerce équitable sont essentiellement bâties au Nord, en fonction des marchés du Nord, selon les consommateurs du Nord. La voix des producteurs du Sud était jusqu’il y a peu inaudible dans les grandes certifications internationales. Les ‘inconvénients’ du commerce équitable qui suivent sont plus liés au principe d’exportation de masse qu’aux principes du commerce équitable ou à ses seules dimensions géographiques. Même si celui-ci doit rester vigilant, ses valeurs et la nature de ses partenaires au Sud atténuent fortement les effets négatifs mentionnés ci-dessous. L’importance des volumes rend les partenaires du Sud dépendants des organisations du Nord et du marché mondial. L’accès au marché et la capacité d’exportation passent par eux. Face à une demande conséquente, les agriculteurs vont être enclins à consacrer la majeure partie de leurs terres au commerce d’exportation. Sans agriculture vivrière, leur survie tient à la vente de leur production au Nord.

Alléchés par les perspectives de revenus des exportations, les paysans sont incités à pratiquer la monoculture intensive, et cette dernière épuise les sols. La rotation ou la mise en jachère, des pratiques permettant le resourcement des terres, n’ont plus droit de cité face aux rentabilités demandées au Nord. Toujours en termes de biodiversité, la grande distribution alimentaire lisse également les goûts et qui veut avoir sa place dans les rayons évitera de multiplier ses variétés de tomates, de carottes ou d’espèces locales.

© Philippe Collier

Avant d’ajouter : « Mais il faut garder en mémoire que sans ce compromis, le commerce équitable serait resté un phénomène sympathique mais tout à fait marginal.» [10] Quelle garantie donne cependant cette ouverture en termes de détermination des prix et le pourcentage du prix de vente retournant aux producteurs locaux par exemple ? Plus fondamentalement, la vision de société qu’impliquent les multinationales est-elle compatible avec la finalité du commerce équitable ? Au-delà de perspectives alléchantes de vente, quelles sont les exigences éthiques à réclamer des entreprises partenaires ? Où s’arrête le compromis pour une société durable et quand commence la complicité d’un monde injuste ? Comme le souligne le chercheur Murat Yilmaz, une tension existe donc entre la logique et la finalité des acteurs qui se revendiquent toujours de l’héritage du mouvement tiers-mondiste prônant la nécessité de trouver une alternative au système capitaliste, et celles des autres qui défendent de plus en plus l’idée d’une intégration au système passant nécessairement par l’adoption de la rationalité économique dominante. [11]

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Résumer le commerce équitable à des rapports Nord-Sud serait faux, même si cette relation domine toujours les échanges. Comme le précisent Tristan Lecomte et Céline Girard [12], « les organisations de commerce équitable (…) organisent et encouragent

aussi les cultures vivrières et les ventes sur le marché local. Le développement des ventes locales est très complémentaire à l’export pour une organisation de producteurs. Elle permet la vente des sous-produits, des qualités de produits pour le marché local, et plus globalement la diversification des ventes de l’organisation. Un grand nombre de coopératives transforment et vendent sur le marché local des produits de terroir très ciblés issus de leurs membres, qui consomment aussi ces produits, et encouragent le redéploiement d’espèces natives et variées ». Relocalisation de l’économie et commerce équitable seraient donc alliés naturels ? « Tout à fait, répond Tristan Lecomte, par ailleurs fondateur d’Alter Eco , ces deux

concepts suivent une même ligne de développement et encouragent la souveraineté alimentaire ».

De quels Sud-Sud s’agit-il ? Géographiquement, trois types d’échanges pourraient être définis. D’abord, le commerce entre deux pays du Sud très éloignés, comme la vente d’un produit équitable sénégalais au Vietnam. Lorsque le Sud-Sud est évoqué dans cette brochure, elle ne fait pas référence à ce commerce international de longue distance qui s’approcherait plus du commerce équitable Nord-Sud. Ensuite, un commerce Sud-Sud entre deux régions ou pays relativement proches, autrement dit des circuits (semi-)courts équitables dans les pays en développement. De nombreuses organisations de producteurs du Sud joignent leurs efforts pour créer des structures capables de coordonner les initiatives nationales et devenir un acteur politique et commercial sur un espace continental. Enfin, le « Sud-Sud » peut également signifier un commerce développé à une petite ou moyenne échelle géographique. Il vise à valoriser des initiatives locales ou régionales dans un même pays, à développer l’autonomie (alimentaire, énergétique, produits de base, etc.) de la région. Développer un commerce équitable Sud-Sud de courte distance revient à encourager une relocalisation de l’économie.

© CTB—Dieter Telemans

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Pour les partisans d’un fair trade Nord-Nord, c’est clair : le commerce équitable est moins un rapport Nord-Sud qu’une lutte entre petits producteurs et méga structures industrielles. Dans un communiqué commun, des organisations du Sud et du Nord [13] l’affirment : « Permettre aux cultivateurs du Burkina-

Faso ou du Pérou de vivre correctement est très important mais ne doit pas occulter la nécessité d’assurer le paiement des heures supplémentaires de ceux qui cueillent les fruits et légumes dans les Bouches-du-Rhône (…) ». Dans la foulée, le Mouvement d’Action Paysanne (MAP), regroupant une soixantaine de petits producteurs wallons, acquiesce : « L’OMC, la Banque Mon-

diale et le FMI promeuvent un commerce inéquitable. Les effets en sont dévastateurs dans les pays du Nord aussi : disparition d’un paysan chaque minute dans l’Europe des 25, menaces sur la multifonctionnalité de l’agriculture, etc.

Pour le MAP, il s’agit donc d’intégrer au plus vite les filières agricoles locales (« courtes ») du Nord dans le concept de commerce équitable. Deux principes devraient guider ce travail notamment législatif : souveraineté alimentaire et économie solidaire » [13]. La Commission européenne a déjà livré son avis sur la question : pour elle, la notion de commerce équitable n’est pas directement pertinente pour les marchandises produites dans l'Union Européenne, où les normes sociales et environnementales font déjà partie intégrante de la législation. [14] Les acteurs du commerce équitable sont de toute façon sceptiques par rapport au Nord-Nord. Sans minimiser les conditions difficiles de travail des artisans et agriculteurs des pays industrialisés, elles sont moins dramatiques qu’au Sud et les possibilités d’action via des structures existantes (syndicats, associations de consommateur, partis politiques, demandes d’aides,…) sont plus conséquentes. [15]

CC by Dan Brady 12


Malgré la demande croissante des consommateurs, toute production équitable ne trouve pas forcément de débouchés commerciaux. Les coopératives se tournent dès lors vers le marché local. Certaines investissent le commerce conventionnel, bradant leurs produits. D’autres tentent de développer un marché local de l’équitable. Dans des régions ou pays où la population est financièrement démunie, les perspectives de vente peuvent paraître moins évidentes, surtout pour un commerce qui exige un prix « juste », et donc à priori plus élevé que la moyenne. Ces marchés locaux au Sud pourraient émerger « surtout dans les pays où le développement de la classe moyenne est gage d’une capacité accrue d’achat. » Ils vont également identifier les « opportunités commerciales ouvertes par le marché touristique » et cibler des points de vente spécifiques, « de luxe, dans les hôtels, les institutions ou des foires commerciales nationales ». [16]. Un peu mince comme débouchés ? « Si un seul pour cent de

la population indienne (1,080 milliard de personnes !) soutenait le commerce équitable, le potentiel de développement serait largement supérieur à ce qu’offre l’Europe, répond Arun Raste, ancien responsable de l’ONG indienne International Ressources for Fairer Trade (IRFT).

Printemps 2008. Une crise alimentaire mondiale s’annonce. En cause : la hausse du prix des aliments sur le marché international, en particulier du blé, du riz, du soja et du maïs. Conséquence directe : pour les 40 pays les plus touchés, tous dépendants des importations pour au moins 40% de leurs besoins alimentaires, la facture alimentaire a augmenté de 37% entre 2006 et 2007 et de 56% entre 2007 et 2008. Pour l’Afrique, elle a augmenté de 74% entre 2007 et 2008. [17]

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Une hausse impossible à suivre pour les plus pauvres. Leur budget, déjà exsangue, ne leur permet même plus d’acheter les aliments de base. Les émeutes des « ventres creux » éclatent dans une trentaine de pays, tous au Sud.

produits laitiers et de viande et elles ont doublé entre 1994 et 2004. [19] Fruit d’une ouverture trop grande des économies, l’importation massive de denrées alimentaires rend la population très vulnérable à toute tension extérieure.

D’où provient cette crise ? Les facteurs sont multiples. Selon Christophe Golay, Conseiller du Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l’alimentation d’octobre 2001 à avril 2008, « si les pays les plus tou-

Des circuits courts équitables entre pays en développement permettent aux régions de devenir plus autonome face aux divers chocs extérieurs : choc pétrolier, choc alimentaire, chute d’un prix mondial d’une denrée, etc.

chés n’étaient pas dépendants des importations alimentaires pour garantir la réalisation des besoins alimentaires de leurs populations, ils auraient pu remplacer les importations alimentaires par des produits locaux, qui auraient pu être vendus dans les villes à des prix abordables. Mais cette substitution a été rendue impossible par l’imposition de programmes d’ajustements structurels, depuis les années 1970, par le Fond monétaire internationale (FMI) et la Banque mondiale, qui ont forcé les pays du Sud à libéraliser leur agriculture, à éliminer les aides aux petits paysans et à favoriser les cultures d’exportation, sources de devises étrangères utilisées pour rembourser la dette. Le désengagement des Etats dans le développement rural, sous l’influence des institutions financières internationales, a donc été l’une des causes profondes de la crise alimentaire ». [18]

Emmanuel Bailly, ingénieur en environnement, appelle ces zones de commerce des « éco-régions », « dont le

principe est de produire l’alimentation et l’énergie au plus près du lieu de consommation » [20]. A condition cependant que cette relocalisation s’accompagne de diversification de production.

Le développement local d’un commerce n’est pas appréciable que d’un point de vue économique ou alimentaire. Il valorise aussi les processus de concertation, il soutient un processus décisionnel afin qu’il corresponde aux besoins et préoccupations des populations locales. [21]. Cet aspect serait d’autant plus renforcé avec la dimension « équitable », insistant sur la démocratie participative de ses producteurs. La vision politique peut même être le premier moteur des organisations du Sud qui investissent leur marché. Au Pérou et en Bolivie, de nombreuses organisations de commerce équitable font d’un commerce de proximité une priorité afin d’acquérir un poids et une légitimité politique. [22]

De fait, en fonction des régions, certains amortissent mieux le coup que d’autres. Ainsi, le Mali a mieux encaissé la crise que le Sénégal. Pourquoi ? Le Sénégal importe plus de 60% de ses besoins céréaliers, alors que le Mali produit plus de 90% de sa consommation céréalière. 48% des importations de produits alimentaires du Sénégal sont constituées de céréales, de

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Parmi les recommandations d’une étude sur le commerce équitable au Sud, celleci : « les initiatives nationales de commerce équitable dans les pays producteurs

peuvent constituer des outils pour favoriser non seulement l’accès au marché des petits producteurs, mais aussi la souveraineté alimentaire et la diversification de la production ». [23] De fait, un commerce équitable Sud-Sud alimenterait les marchés locaux. Ce circuit plus court permettrait de valoriser d’autres acteurs locaux soit dans la transformation des produits, soit dans leur vente. Au Sénégal, le dynamisme du secteur équitable a encouragé les acteurs nationaux à créer un environnement favorable au marché local. [24] Par ailleurs, elle permettrait de remettre au goût du jour les productions locales. En Haïti par exemple, des changements alimentaires se sont opérés progressivement et aujourd’hui les habitants qui peuvent se le permettre mangent du pain de blé américain et du sucre brésilien. L’aide structurelle alimentaire modifie la base de l’alimentation dans les écoles primaires avec des produits provenant des pays du Nord ou du Programme alimentaire des Nations Unies. Les enfants s’habituent à manger autrement et rejettent progressivement leur propre culture alimentaire à base de tubercules, de pois ou de manioc. [25] En alimentant les marchés de vêtements, aliments et autres produits locaux, les commerçants du cru s’affranchissent des repères culturels (au sens large) du Nord. Ils participent à la diversité culinaire, vestimentaire, bref culturelle de la planète. D’ailleurs, les identités communautaires et ethniques viennent également appuyer le développement de certains marchés locaux équitables. C’est le cas en Bolivie où l’engouement de l’équitable est à mettre en lien avec un changement des mentalités vis-à-vis de la culture andine. Depuis quelques années, les produits ethniques sont devenus un signe identitaire pour l’ensemble de la population bolivienne, pour les indiens évidemment, mais également pour les classes moyennes et aisées. [26]

Commerce équitable ? Jamais entendu parler… Voilà, de manière caricaturale et abrupte, une des conclusions d’une étude indienne sur le commerce équitable de collégiens entres 18 et 22 ans et de couples entre 25 et 50 ans. Ce public cible faisait partie des personnes les plus socio-économiquement et culturellement avantagées en Inde. Soit des acheteurs potentiels de produits équitables. Ils entendent par « fair trade » un commerce qui serait « juste » vis-à-vis d’eux en termes monétaires. Un commerce équitable proposerait le prix qu’ils veulent mettre pour acheter le produit ! Par rapport aux producteurs, ils supposent que la plupart des entreprises se montrent correctes. Eduqués à la « méritocratie », ils identifient une augmentation de salaire à une augmentation d’efficacité, ils ne se sentent nullement connectés aux ouvriers et paysans derrière le produit. Et, enfin, leur vision du monde sépare nettement la sphère « business » de la sphère « charité ». En conclusion, l’étude soutient qu’ « il ne leur traverse pas l’esprit que les compa-

gnies puissent exploiter les personnes ou l’environnement. Ils pensent que les compagnies aident à éradiquer la pauvreté en créant de l’emploi. » Ils ne feront aucun compromis sur la qualité et ne paieront pas une roupie de plus par solidarité.

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Décourageant ? Pas pour Arun Raste, de l’International Ressources for Fairer Trade (IRFT), l’ONG indienne qui a commandé l’étude. Il en tire les conclusions : « nombreux sont les citadins indiens prêts à soutenir

Favoriser les trajets courts doit se coupler avec des modes de déplacement les plus propres possibles, avec une production la moins polluante possible. [30]

une cause sociale … à condition de ne pas en payer le prix. IRFT privilégie donc le marché national et cherche à y réduire la chaîne d’approvisionnement pour assurer un prix de vente attractif. L’ONG ambitionne de contribuer à créer des normes nationales propres qui influenceront les normes internationales. »

Un commerce équitable Sud-Sud se réapproprierait le terme « équitable », lui donnerait une dimension locale, moins sévère sur les critères sans doute, plus proche du terrain. Cette relocalisation du concept éviterait de loger tous les producteurs, du Pérou jusqu’au Vietnam, à la même enseigne. « Comment arrivez-vous à fixer un prix minimum ? s’interroge Joseph Nkandu, représentant ougandais de la National Union of Coffee Agribusiness and Farm (NUCAFE). Connaissez-vous mes coûts

Selon l’étude [28] réalisée par l’UCL sur les défis commerce équitable, l’Inde pourra s’appuyer sur la culture pour le développement des marchés locaux. Les couleurs des broderies et les formes des produits sont d’emblée acceptées par les consommateurs.

de production pour fixer ce prix ? Savez-vous comment je désire me développer ou vous voulez m’imposer votre vision de développement ? Si les prix minimums sont fixes, vous arrive-t-il de les réviser ? Peut-on participer à la négociation à ce sujet ? Nous voulons clairement être des membres actifs dans le processus décisionnel. » [31]

L’argument est fréquemment avancé pour encourager un commerce de proximité. Il est pertinent mais il ne faut pas le surévaluer. L’impact principal du commerce équitable Nord-Sud ne se marque pas par le trajet entre les deux hémisphères, mais dans la logistique de distribution au Nord. [29]

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Les organisations du Sud s’organisent, sur les trois continents, pour prospecter leurs marchés nationaux respectifs. Les réalités sociales sont différentes. L’Afrique en est au balbutiement du commerce équitable régional, les produits payés à un juste prix y restent des produits de luxe. Face à, par exemple, 74% de la population en Afrique sub-saharienne privées d'accès à l'électricité, on peut imaginer que les défis les plus urgents sur le continent noir ne passent pas nécessairement par le commerce équitable local. Le processus est par contre très avancé en Amérique latine où les acteurs associatifs deviennent incontournables. Ainsi au Brésil, le gouvernement a instauré une politique pour promouvoir le fair trade au sein de ses frontières. Enfin, l’Asie s’éveille au concept. Certes, une part de la population de ce continent reste exploitée par des fabricants de toutes sortes, heureux de produire « made in Asia » afin de profiter des bas salaires. Cependant, la résistance s’organise sur les marchés. Et pas n’importe lesquels. L’Inde, véritable pays-continent, ouvre la voie d’un commerce asiatique local plus juste. En attendant la Chine ? Lors d’une table ronde [32] organisée par le FTIS en 2008, Abdourhamane Gueye d’ENDA Sénégal (Environnement et Développement du Tiers Monde) interrogeait lui aussi le modèle « équitable » fourni par les certificateurs traditionnels. « Aujourd’hui, le

commerce équitable tel que pratiqué au Nord et au Sud a un système de certification extrêmement cher. Et le fait d’être certifié Fairtrade ne donne pas forcément accès au marché. Chez nous, on a eu des produits bios équitables qui ont attendu huit mois avant de trouver des débouchés. La question du prix juste et même des valeurs ont posé problème ». Face à ces constats et demandes, deux voies complémentaires existent : ouvrir plus largement les organismes internationaux de certifications aux producteurs du Sud, et… créer un label pour des marchés locaux ou régionaux. Cette dernière solution est plébiscitée aux quatre coins du Sud, de l’Equateur à l’Inde en passant par le Sénégal. Des dynamiques en ce sens sont d’ailleurs déjà lancées.

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En 2005, était lancé le projet "Développer des pratiques du commerce équitable au Sénégal" (rebaptisé Aldiawano en 2011 qui signifie "paradis" en wolof), porté par Enda Tiers Monde. L’idée : mettre en place un système local qui permettrait aux producteurs sénégalais de s’approprier les valeurs du commerce équitable. Comme le précise Dominique Ben Abdallah : "Au Sud, et notamment en Afrique, le commerce équitable reste mal connu, non seulement des producteurs, mais aussi des pouvoirs publics, alors qu’il est sensé offrir 'de meilleures conditions commerciales en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs marginalisés '. Tel est le paradoxe relevé par une

grande variété d’acteurs nationaux (associations, fédérations, Groupements d’Intérêts Economiques, ONG, pouvoirs publics) impliqués -en compagnie d’Enda et de la coopérative conseil Tukki-, dans la démarche visant à ‘développer des pratiques de commerce équitable au Sénégal’. Les échanges qui ont eu lieu au cours des deux dernières années entre la quarantaine d’acteurs réunis au sein de cette dynamique nationale permettent de penser que les systèmes actuels de certification excluent de fait les petits producteurs les plus démunis. En effet, les producteurs impliqués dans des démarches de commerce équitable, qui s’inscrivent principalement dans des démarches Sud/ Nord, doivent faire face à des coûts de certification élevés, et avoir la capacité de répondre aux exigences liées au respect des procédures de certification".*

« Pour l’Afrique et particulièrement pour le Sénégal, la voie offerte par le commerce équitable est la réponse adéquate à la réussite des projets visant à developer l’artisanat local mais aussi l’agriculture et par conséquent le commerce intérieur». Alioune Diouf, Directeur du Commerce intérieur du Sénégal**

© CTB—Dieter Telemans

Après un an et demi, le projet accouchait d’une Plateforme des Valeurs et d’une Charte d’Engagement au commerce équitable, officiellement présentées lors du Forum Social Mondial de Nairobi au Kenya en janvier 2007 et du Forum Social Mondial de Dakar en 2011. Les acteurs d’Aldianawo élaborent à présent un système local de certification, dont le cahier des charges est établi par le biais de projets pilotes dans quatre grappes d’activités (coton/textile ; agroalimentaire ; métiers du feu/recyclage ; plantes médicinales). Interrogé sur la question de la mise en cohérence de l'initiative sénégalaise avec les projets des organisations internationales du commerce équitable, Abdourhamane Gueye, l'un des responsables d'Enda estime qu' "il faut aller plus loin. On repense les

bases, on amène les forces et bases qui nous sont propres. Cependant, nous sommes allés voir Fairtrade. International (FLO). Non pas avec des attentes mais avec des propositions". A terme, ENDA souhaite développer une plate-forme similaire au Burkina Faso, Mali, Togo et Bénin. L’initiative véhiculerait la vision africaine du commerce équitable. 18

* Dominique Ben Abdallah /Enda Tiers monde, «Une vision africaine du commerce équitable», AGRIDAPE, volume 24, Issue 1- Vers un commerce plus juste, Avril 2008, cité par Dan Azria, dans « Le commerce équitable au Sénégal », Trade for Development Centre ** Sidy Dieng, «Plaidoyer pour le commerce équitable : Les acteurs sénégalais mettent au point un programme commun», Jeudi 19 novembre 2009, Walfadjri l’Aurore www.walf.sn


prime de développement. Cependant, les conditions de crédit et de préfinancement ne sont pas envisagées par le règlement de Comercio Justo México.

De l’autre côté du monde mais toujours dans l’hémisphère sud, les latino-américains ont longtemps eu une longueur d’avance. Et en particulier le Mexique. Le fait n’est pas étonnant lorsque l’on sait que les organisations mexicaines de petits producteurs ont participé en 1988 à la création du premier label de commerce équitable, Max Havelaar Hollande. [36]

Le label mexicain a aussi développé une initiative originale en la « Norme pour l’Entreprise Mexicaine de Commerce Equitable ». Cette référence à la commercialisation collective entre différents groupes de petits producteurs épouse une vision plus complète du commerce équitable en intégrant l’aspect de la commercialisation. Dans le même esprit, une « Norme pour les Points de Vente Certifiés de Commerce Equitable » concerne les distributeurs qui établissent un contact direct avec le consommateur dans le système de certification du Commerce Equitable.

L'association Comercio Justo Mexico débuta le processus de conception d’un label mexicain de commerce équitable en novembre 1998 ! Les normes furent fixées en novembre 2000 et le label fit son entrée sur les marchés locaux en juillet 2001. Un des avantages de la mise au point d’un label de commerce équitable local est la possibilité d’élaborer des normes valorisant des produits demandés uniquement sur le marché interne. Si Comercio Justo Mexico a organisé l’élaboration des normes, l’association ne prend cependant pas en charge les inspections et certifications d’organisation de producteurs. Ces dernières sont assurées par une agence de certification reconnue au niveau international : Certimex. Un système de commercialisation des produits du commerce équitable a également été prévu, permettant aux petits producteurs d’entrer sur le marché collectivement. [37]

A l’aune de l’expérience mexicaine, la norme « équitable » ne se trouve en rien bradée par la certification nationale. Tristan Lecomte, l’ancien directeur d’Alter Eco, n’est d’ailleurs pas inquiet de la montée de ces labels venus du Sud : « Développer des labels de com-

merce équitable au niveau national, ce sera toujours mieux que ce que fait FLO en termes de certification. Ce label se tourne de plus en plus vers les gros acteurs de production, ils ont une politique au rabais tirant le commerce équitable vers le bas. Les contrôles, le prix minimum et la qualité des produits sont de plus en plus discutables. C’est un système qui s’apparente de plus en plus à du business. »

Autre différence : « la définition de Comercio Justo

México mentionne la notion de qualité intégrale des produits, et évoque le rôle du consommateur, tandis que celle de FLO semble considérer ’ l’accès équitable aux marchés’ comme le seul objectif du commerce équitable ».[37] Pour les prix minimum en ce qui concerne le café, le label mexicain s’est aligné sur FLO, en ce compris la

Au Mexique, la création d’un label national est à mettre en relation avec un fait international de la région : l’intégration de l’économie mexicaine à l’espace nord-américain par l’ALENA (Accord de Libre Echange Nord Américain) en 1994. Cet accord prévoit l’intégration totale des économies du Canada, des USA et du Mexique avec libre circulation de l’ensemble des biens. Bilan pour le Mexique : de 1994 à 2002, le PIB agricole décroît de 3% tandis alors que le PIB national croît de 0,94%. Le nombre d’emploi perdus entre 1993 et 2000 dans le secteur rural est de 1,7 millions, dont 600 000 liés à la production de grains de base. De productrice de cultures vivrières, l’agriculture mexicaine devient exportatrice de cultures de rente. Sa composition est significative : aujourd’hui, le café, les fruits et les légumes frais constituent la majeure partie des exportations, tandis que la plus grande partie des importations est formée de produits de base et de céréales pour la consommation animale. Par ailleurs, l’exode rural bat son plein : 600 paysans abandonnent chaque jour leurs terres pour émigrer vers les villes ou les Etats-Unis. [38] La création du label équitable mexicain doit être compris comme une réaction politique, la proposition d’un autre modèle de développement face au virage libéral des années nonante. C’est pour cela que même si l’option stratégique prise par Comercio Justo México est de cibler en priorité les marchés de consommation de masse, les producteurs de commerce équitables ne peuvent être que de petites organisations locales. 19


Cette force d’aller de l’avant fait écho à l’initiative de l’International Resources for Fairer Trade (IRFT) en Inde. Cette organisation veut la création de labels et de normes équitables propres au marché indien. Lancé en 2006, son projet « Promoting Fair Trade in India » (PROFIT)* promeut le concept de commerce équitable auprès des consommateurs et des décideurs du pays. Il vise à « développer des règles et des cri-

tères pour le commerce équitable adaptés au contexte local, ainsi qu’un système de certification et de suivi. » L’objectif final de PROFIT est de permettre aux petits producteurs marginalisés d’accéder au marché, et ce dans une perspective de production plus équitable. Quarante mille producteurs profiteraient de ce nouveau débouché. [33]. Le Trade for Development Centre de la CTB (l’Agence belge de développement) a financé en partie (25.820 €) le lancement et la mise en oeuvre de ce projet pendant 2 ans et demi.

Un label pensé en fonction des spécificité des producteurs et marchés locaux. Les standards pour artisans et compagnies suivront. Les standards de "Shop for change" se déclinent autour de plusieurs critères : des conditions de travail saines et sûres, des salaires légaux, des pratiques de production durable, une transparence comptable, des relations équitables et durables entre producteurs et acheteurs, et enfin le renforcement des capacités des producteurs.

Dans ce marché énorme que représente l’Inde, tout était à faire : créer les standards, la certification et le monitoring du label, construire une campagne de communication, développer la capacité de petits producteurs, développer un réseau de distribution. "Shop for a change", le nouveau label indien, insiste sur le fait de penser en termes de business plutôt que d’ONG. S’ils demandent des critères non négociables pour la transparence et la comptabilité, le renforcement des capacités des producteurs et les conditions de travail, les producteurs proposent aussi la possibilité d’indicateurs progressifs du respect des normes, leur donnant du temps pour s’organiser et adhérer aux standards. Enfin, s’ils envisagent d’intégrer directement les producteurs qui seraient certifiés WFTO ou FLO, les propos tenus lors de la session finale de leur première réunion ne laissent pas de doute sur la distance qu’ils prennent avec ces labels : « nous avons besoin d’ap-

prendre des erreurs des organisations des labels du fair trade – avoir de l’expertise, garder de faibles coûts. Nous ne devrions pas suivre FLO ou le modèle européen. Nous devrions ambitionner d’être une tierce partie de certification pour FLO. »**. C'était en mars 2008. Trois ans plus tard, "Shop for change" a établi des standards sociaux et environnementaux pour pouvoir fournir une certification aux fermiers (Generic Standards for Agricultural Supply Chains). * Ce projet est cofinancé par l’Union Européenne, Traidcraft, le Fair Trade Centre de la CTB et IRFT. http://www.profit.org.in/mainpage.htm ** Shop for Change, First Meeting of the Producer Group, Hyderabad, 8 mars 2008 et http://shopforchange.in/

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« Shop for Change » entend développer un système qui abaisse les barrières entre le producteur et le commerce équitable, tout en réduisant la dépendance entre les organisations de commerce équitable déjà en place sur le marché international.

Autre entorse, le travailleur a le droit de négocier "collectivement ou individuellement" son salaire. Cette dernière "liberté" risquerait de se retourner contre les syndicats et les travailleurs eux-mêmes, mis individuellement en concurrence pour de plus bas salaires.

Les standards émis comportent cependant quelques points inquiétants. Au niveau des salaires, le label indien demande au moins..."le salaire minimum légal", ce qui en Inde n'est pas un salaire permettant de mener une vie décente, mais à peine de survivre. Aussi, si ce critère n'est pas revu dans les deux prochaines années (période d'observation prévue pour développer SFC), des ouvriers indiens pourraient vivre dans une misère continuelle. Cette mesure signifierait un recul considérable dans les standards du commerce équitable.

Enfin, SFC prévoit une évaluation par une tierce partie mais également un système de contrôle par le producteur lui-même (le "Participatory Assessment System" PAS). L'avantage serait la sensibilisation et prise de conscience plus importante de la part du producteur.

Jusqu’en 2009, aucune des organisations octroyant le label « Fairtrade » (comme Max Havelaar) ne se trouvait dans un pays en développement. Cette carence est depuis lors comblée avec la création du « Fairtrade Label South Africa ». Sa raison d’être : construire un marché national pour les produits sud-africains labellisés « Fairtrade » ; à savoir du thé, de la sauce chili, du café, et beaucoup de vin, le tout produit par une soixantaine de coopératives locales. Et le succès est au rendez-vous. En 2010, les Sud-Africains ont acheté pour 18,4 millions de rands (1,7 million d’euros) de produits équitables, ce qui représente une hausse de 323% par rapport à 2009. Ce premier « Max Havelaar » dans un pays en développement augure-t-il d’un raz de marée ? L’organisation internationale de certification y croit dur comme fer. « Il y a déjà beaucoup d’intérêt de groupes en Amérique latine, Asie et Europe de l’Est qui veulent développer les ventes équitables dans leurs pays. » [34]

Le Kenya est le second pays à proposer le label Fairtrade à ses consommateurs. L’entreprise Dormans Coffee a pris les devants en introduisant, au troisième trimestre 2010, sa marque de CAFE SAFARI Kenya certifiée Fairtrade. Le Kenya Tea Development Authority (KTDA) ­ l’Office du développement de l’industrie théière du Kenya -, un acteur majeur dans le secteur du thé, a également exprimé son soutien envers l’initiative. La question fondamentale était de savoir si les Kenyans étaient prêts à consommer des produits équitables. Fairtrade Africa, (le réseau régional de producteurs africains inscrits dans les registres de Fairtrade International, a demandé à l’Université de Cambridge d’étudier la question, … et les résultats ont mis en lumière un énorme potentiel de croissance. Non seulement le Kenya compte de nombreux expatriés, déjà conscientisés au commerce équitable dans leurs pays d’origine, mais le pays dispose également d’une classe moyenne de plus en plus importante, sensible au développement de l’Afrique.[35]

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Depuis 2006, la CLAC (Coordinadora Latinoamericana de Pequeños Productores de Café) travaille en collaboration avec d’autres organisations solidaires en Amérique latine pour concevoir un nouveau label, réservé exclusivement aux petits producteurs. Ce « Symbole des Petits Producteurs »* a été lancé officiellement en novembre 2010 au Honduras, lors de la 4ème Assemblée Générale de la CLAC. Comme le précise la Coordination nationale du commerce équitable au Pérou (CNCJ), cette initiative est née en réaction à Fairtrade International (FLO) : « FLO, l'or-

ganisation internationale qui certifie le commerce équitable dans le monde, a permis l'entrée de grands opérateurs commerciaux, au détriment des petits producteurs ». Ce nouveau label, tout d’abord ouvert aux organisations de producteurs dans tous les pays d'Amérique latine et des Caraïbes, a été récemment étendu aux producteurs d'Afrique et d'Asie. Il dispose d’une grille complète de critères concernant la production, l’aspect organisationnel, le management, le respect de l’environnement, la gestion des relations entre producteurs et acheteurs,… Pour Arnaud Deharte, du programme de volontariat Uniterra, « Il est intéressant de

souligner que ces critères ont été établis par les représentants d'organisations de petits producteurs eux-mêmes. Ceux-ci ont créé l'organisation FUNDEPPO (la Fondation des Petits Producteurs Organisés), basée aujourd'hui dans la ville de Mexico, afin de s'assurer que le Symbole bénéficie réellement aux petits producteurs, à leurs communautés et aux consommateurs. »

* www.tusimbolo.org

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Né en 2004, la Cooperation for Fair Trade in Africa [39] (COFTA) est un réseau international d’organisations de producteurs de commerce équitable sur le continent africain. Membre de la WFTO, l’Organisation mondiale du commerce équitable, ce réseau africain veut renforcer la capacité de ses membres à développer leurs marchés en développant des produits de qualité et en leur donnant les moyens nécessaires à travers le partage d’information, structures et principes du commerce équitable. COFTA est aussi la voix des producteurs sur la scène régionale et internationale. Actuellement, le réseau est composé de 70 organisations membres issues de 20 pays. Il s’agit surtout de producteurs d’artisanat, mais aussi de cultivateurs de thé, café, vanille, miel, fruits sec, jus et textiles. Encore très anglophone, COFTA, dont le siège se trouve à Nairobi (Kenya), travaille également à l’échelle des pays, développant et renforçant des réseaux nationaux de commerce équitable au Kenya, mais aussi en Tanzanie, au Rwanda et au Swaziland. D’autres au Sénégal et au Zimbabwe sont en préparation. COFTA décline quatre axes stratégiques :

 les services rendus aux membres (avec entre autres un programme de renforcement des compétences)

 la recherche de membres et le renforcement du réseau  les campagnes et lobbies en faveur du commerce équitable (via ateliers, séminaires, actions de plaidoyer, médias,…)

 l’accès au marché Parmi les projets de COFTA : une certification pour les organisations africaines de commerce équitable.

© CTB

Si les ventes du commerce équitable ont connu une croissance remarquable ces dernières années, beaucoup de petites structures, faute de certification et donc de reconnaissance de leurs conditions de travail, sont restées en marge de cette progression financière. Pour pallier cette situation et en lien avec l’environnement, la WFTO a lancé en mai 2007 une nouvelle certification appelée le « Sustainable Fair Trade Management System » (SFTMS).[40] Ce système de gestion durable du commerce équitable sera attribué non pas à des produits mais à des organisations travaillant dans des conditions environnementales durables et respectant les principes du commerce équitable. Selon la WFTO, le SFTMS fonctionnerait comme un standard générique servant de plateforme pour intégrer toutes les dimensions du développement durable. Le tout à 23


destination des producteurs marginalisés. Pour la WFTO, «les Standards Internationaux sont typiquement faits pour les ‘big businesses’ ». Ce standard est taillé pour les besoins et la réalité des petites organisations, et spécifiquement pour améliorer les conditions de vie des petits producteurs en leur fournissant un accès aux principaux marchés. Les coûts de certification notamment seront faibles.

Mais, constate COFTA, le marché de la solidarité change et ces carences ne sont plus acceptables. Il est temps pour eux de saisir l’opportunité d’une gestion environnementale efficace pour grandir rapidement. Cette opportunité, c’est le SFTMS. COFTA développe un projet « certification et SFTMS » pour aider les organisations de commerce équitable à saisir rapidement la logique du système et à participer à sa finalisation. Ensuite, une fois ce standard prêt, COFTA va développer des structures d’appui pour les petites structures qui souhaiteront répondre aux exigences de la certification.

Cette certification intéresse forcément COFTA. Les artisans africains évoluent dans de petites structures rurales, ils sont peu organisés et peinent, faute d’infrastructures suffisantes, à rencontrer les demandes d’une économie globalisée. Jadis, leurs produits étaient majoritairement écoulés dans des marchés solidaires, moins exigeants sur la qualité, la gestion des volumes ou les délais de livraison.

Ibrahim Keita, cotton farmer, Batimakana, Kita, Mali 2007 ©Simon Rawles

Le programme de COFTA cible cinq pays africains (Tanzanie, Ouganda, Rwanda, Afrique du Sud et Sénégal). Il est soutenu par le Trade for Development Centre de la CTB.

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coulés dans la Loi du Système Fair Trade Brésilien (2007). Ce cadre législatif permet de stimuler les canaux de production basés sur ces principes. En si peu de temps, difficile de faire mieux.

Le Brésil a réussi en matière de commerce équitable ce que tout pays rêve de réussir : l’union sacrée. La plateforme nationale « Faces do Brasil » [42] coordonne les acteurs et actions du commerce solidaire*. Tout le monde est là : les ONG**, les organisations de producteurs*** et diverses entités du gouvernement brésilien****.

Faces do Brasil s’est ainsi réapproprié le concept de l’équitable lors d’une procédure transparente et participative conduite par le Fórum de Articulação do Comércio Ético e Solidário do Brasil [44]. Le commerce équitable et solidaire est alors défini comme « un flux com-

mercial différencié qui établit des relations éthiques et solidaires entre tous les maillons de la chaine de production, avec pour résultats une forme de renforcement des travailleurs, des paysans et de leur famille, des peuples indigènes, des quilombola*****, des mineurs et paysans qui sont désavantagés ou marginalisés par le système conventionnel des relations commerciales »******. Cette initiative nationale a construit un

Ce rassemblement d’acteurs disparates pourrait faire penser à une usine à gaz équitable engoncée dans les contradictions de ses acteurs. Il n’en est rien. « Faces do Brasil », née en 2001, s’affirme comme un projet politique, visant à des transformations sociales. La plateforme se concentre sur le marché national, le développement local et la sécurité alimentaire des communautés brésiliennes. [43]

commerce solidaire sur base des mouvements existants au Brésil. La différence avec le commerce équitable “officiel” se marque notamment au niveau des intentions et des objectifs.

Le gouvernement a reconnu le commerce équitable en tant que politique sociale. Le concept, les principes et les critères ont été uniformisés au niveau national et

* “Faces do Brasil” fait appel à deux concepts : commerce équitable et commerce éthique solidaire. ** FASE Nacional, Kairós, FundaçãoFriedrich Ebert, VisãoMundial, OndaSolidária, IMAFLORA, ÉticaDESER, Cáritasdo Brasil. *** UNISOL, RBSES, ADS-CUT, UNICAFES, ACS-Amazônia, RedeCerradoe FETRAF. **** SENAES –MTE,SAF-MDA, SDT-MDA and SEBRAE Nacional. ***** Des habitants d’anciens villages d’esclaves. ****** Faces do Brasil 2006 cité par l’étude de Fitipaldi.

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Comme le fait remarquer Rosemary Gomes, membre de FACES do Brasil, il ne s’agit pas ici de responsabilité sociale de grandes entreprises ou de demandes de consommateurs du Nord qui ont l’impression, en achetant les produits de pays pauvres, de contribuer a un meilleur monde. Selon l’étude de José Fitipaldi, un consensus croissant émergeait autour du fait que le commerce équitable, vu essentiellement comme une relation Nord-Sud, était un vecteur insuffisant et exogène pour rencontrer les objectifs sociaux et environnementaux brésiliens. Or, Faces do Brasil insiste sur les principes de proximité et de transparence entre producteurs et consommateurs. Il fallait donc développer une certification spécifique au contexte national. Ce qui devint un peu plus concret en novembre 2010, lorsque, juste avant la fin de son mandat, le président Lula da Silva signait une loi organisant la mise en place à la fois de normes d’encadrement, mais aussi d’un système d'accréditation pour la certification du commerce équitable et solidaire, ou encore un dialogue permanent pour promouvoir la justice sociale à travers le commerce.

Une convention de partenariat entre les grandes et moyennes surfaces (GMS) et le ministère des affaires économiques a été signée lors du Salon international de l’économie sociale et solidaire qui s’était tenu en juin 2008 à Casablanca. L’objectif était d’accompagner une cinquantaine de producteurs locaux, constitués en Groupement d’intérêt économique (GIE), et de les préparer à la mise en vente de produits «Economie sociale et solidaire» (ECOSS) dans les GMS marocaines. [41]

L’huile d’argan, l’or du Maroc

Le gouvernement marocain prend également les choses en main. En novembre 2011, le ministère chargé des affaires économiques et générales a déposé un projet de loi fixant les modalités de reconnaissance du commerce équitable. Seuls les organismes reconnus administrativement par la Plateforme nationale du commerce équitable seraient habilités à publier la mention «Reconnu par I’Etat marocain comme organisation de commerce équitable», ainsi qu’à apposer leur propre label, ou le Label national du commerce équitable (LNCE).

Depuis 2007, le commerce équitable s’est structuré sur l’île dans le cadre de l'Association nationale du commerce équitable et solidaire de Madagascar (ANCESM)*. Regroupant des producteurs, organismes d'appui et exportateurs, les activités de l'association se focalisent surtout sur l'appui (technique et conseils) et l’accompagnement des membres en matière de production et de commercialisation. L’ANCESM compte actuellement 50 membres répartis dans 9 régions du pays. Elle espère agrandir son réseau par une sensibilisation d’autres acteurs et tisser des relations de partenariat avec les réseaux étrangers du commerce équitable. Depuis peu, l’ANCESM a créé le label CES, en fait une marque collective réservée à ses membres et garantissant aux consommateurs que les produits achetés sont issus d'une structure respectant les principes du commerce équitable. L’Etat malgache a, de son côté, créé en Octobre 2011 le Comité interministériel d'appui au commerce équitable et solidaire. Pour Joséphine Razanaseta, la présidente di CIACESM : « Le commerce institutionnel est caractérisé par

la rude concurrence. C'est un cercle vicieux, car parfois, les plus faibles sont défavorisés. La rectification de cette situation est la raison d'être du CIACESM. Le commerce équitable et solidaire est la solution. Jusqu'ici, il est constitué, en général, par le secteur de l'artisanat, les broderies, les sculptures, la vanille, etc. mais il se propagera certainement dans d'autres domaines ».** La ministre du commerce, Eva Razafimandimby, précise quant à elle « que le commerce équitable et solidaire aide aussi à bannir le travail des enfants et à rapatrier des devises ». En 2010, il a permis de faire rentrer 200.000 Euros au pays. *www.commerce-equitable-madagascar.org ** Source : Midi Madagasikara du lundi 10 octobre 2011, n°8563

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Fondé en 2003 et basé à Nairobi, KEFAT (Kenya Federation for Alternative Trade) est le réseau kenyan des organisations de commerce équitable. Ce membre de COFTA et de l’Organisation mondiale du commerce équitable (WFTO) compte 34 affiliés, dont la plupart sont des groupes de producteurs ou des associations de régions et de cultures différentes. Des associations de la société civile ou de développement impliquées dans la promotion du commerce équitable les ont également rejoints. KEFAT multiples les actions de soutien aux producteurs via l’organisation de rencontres (forums sociaux), de formations et de mise en réseau régional et international., avec notamment pour objectif développer les ventes de produits kenyans sur le marché local.

Cette Table a été mise sur ses quatre pieds en octobre 2004, dans le cadre du Forum National de Commerce Équitable au Pérou. Elle réunit les organisations et les réseaux du commerce équitable, communautaire et éthique solidaire d’Amérique latine. La Mesa de Coordinación Latinoamericana de Comercio Justo (MCLACJ) coordonne le développement du commerce équitable local et Sud-Sud à l’échelle du sous-continent. Parmi ses membres, la Table peut compter sur les réseaux Commerce Équitable du Chili, de l’Uruguay, du Mexique, de l’Argentine, sur le Groupe Réseau Économie Solidaire du Pérou, ou encore sur « Faces do Brasil ». [45] Mais ce réseau, comme la CLAC (Coordinadora Latinoamericana de Pequeños Productores de Café)** [46] ou RIPESS ne se contente pas de jouer les ‘secrétaires’ des instances nationales. Il témoigne de la volonté de l’Amérique latine de prendre en

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main ‘son’ commerce équitable. Elle entend participer à la définition d’un commerce juste adapté à sa réalité sociologique. [47] La Table a notamment proposé une réflexion sur l'émergence de la proposition du commerce équitable dans le Sud lors du 5ème Forum Social Mondial à Porto Alegre. [48]

Le Groupe-Réseau d´économie solidaire du Pérou [49] (GRESP), une association créée en 1998, entend renforcer les relations et les échanges entre les acteurs péruviens d´économie solidaire. Sa mise sur pied correspondait à la volonté de divers réseaux d’agir en marge de la Rencontre Internationale sur l’Économie Solidaire de Lima en 1997. Le GRESP entendait alors ouvrir un « courant de l’économie solidaire ». [50] Le GRESP insiste beaucoup sur le partage de savoir, de compétences et d’expériences. Il se concentre surtout sur le territoire péruvien. Ainsi, révélateur de cette double priorité, l’organisation péruvienne est venue en France en mars 2009 [51] pour chercher, non pas des débouchés commerciaux, mais des informations et conseils sur le développement d’un réseau de magasins à économie solidaire. Au Pérou, le GRESP appuie aussi les formations de Groupes d´Initiatives d´économie solidaire (GIES), il forme et informe le réseau, forts de 33 organisations et de 17 groupes d´initiative d´Economie Solidaire (Grupos de Iniciativa de economía solidaria GIES) dans les différentes régions du Pérou.

En guise d’introduction au website de « Maquita Cushunchic Comercializando como Hermanos » (MCCH) [54], un vieux sage à la barbe blanche s’enthousiasme de l’autonomie des communautés équatoriennes indigènes. Couvert par le sourire d’une femme quichua, il parle « réconciliation » et « dignité », une croix en bois autour du cou. Ce monsieur s’appelle Graziano Mason, un prêtre italien présent en Amérique latine depuis des décennies, et fondateur avec les populations du Sud de Quito du MCCH. Vivre dans une foi libératrice est le premier principe adopté par MCCH, et rapidement, l’amélioration des conditions de vie des communautés indigènes suit. Ce mouvement, au début cantonné dans les quartiers sud de Quito, s’est étendu à tout l’Equateur. Les organisations populaires, communautaires, artisanales, paysannes, et de producteurs sont la raison d’être de MCCH. L’association appuie la formation de leurs dirigeants afin de les renforcer tant dans la production que dans la négociation de leurs droits. Pour commercialiser les produits, MCCH a créé la « Maquita solidaria », une entreprise qui distribue des aliments agroindustriels, de l’artisanat et divers produits andins. MCCH se tourne aussi vers l’étranger avec une entreprise de cacao fin dont les exportations sont à 80% à destination de l’Europe. « Maquita Cushunchic Comercializando como Hermanos », enfin, a mis sur pied de nombreuses activités au profit de ses communautés : un réseau de magasins communautaires, du tourisme alternatif, un fonds de solidarité, la promotion de l'artisanat. Des services également sont disponibles comme une coopérative bancaire, des formations techniques, des campagnes d'alphabétisation et de sensibilisation au développement durable. [55] L’association est partenaire en Belgique d’Oxfam-Magasins du monde. 28

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Le commerce équitable a débarqué relativement tard dans les multiples îles des Philippines. Dans les années quatre-vingts et suite à la « crise du sucre », les conditions de travail des ouvriers et leur salaire ont commencé à poser question. En 1995, Oxfam a fait office de pionnier dans le pays en développant un programme de commerce équitable. [56] Deux ans plus tard et parallèlement à ce programme, l’Association of Partners for Fairer Trade (APFTI) voyait le jour. En 2001, les initiales ont été maintenues mais elles signifient dorénavant « Advocate of Philippine Fair Trade Inc ». L’APFTI a une approche du commerce équitable qui s’inspire fortement du concept de la responsabilité sociale des entreprises. Elle cible les micros et petites structures et les soutient dans un développement durable de leurs activités. L’aspect « business » reste très présent (un exemple parmi d’autres, APFTI pense qu’une politique du genre est « bon pour le business ». C’est pourquoi ils adhèrent aux standards Fair trade de l’équité du genre…). Certifiée par WFTO, cette association a déjà appuyé plus de 1000 entreprises à travers son « développement entrepreneurial intégré », un service de 6-9 mois qui fournit une assistance technique et des conseils très appréciés. Ces dernières années, l’Advocate of Philippine Fair Trade Inc. s’est attelé à la fois à sensibiliser les producteurs au commerce équitable, à ouvrir le marché local aux produits équitables philippins, et à informer l’opinion publique de l’existence de ce commerce plus juste. L’APFTI a notamment réfléchi à des indicateurs et standards de certifications spécifiques au commerce équitable des Philippines, avec une marque propre au marché local. Avec le soutien de la Commission européenne, l’APFTI a lancé l’initiative « MaDe for Fair Trade » (MArketing DEvelopment for Fair Trade) dont l’objectif est d’ancrer durablement le commerce équitable tant chez les producteurs que dans les habitudes de consommation des Philippins. Ce projet comprend des études de marchés, la création d’un label et son lancement, le soutien de producteurs pour l’application des principes du commerce équitable ou encore l’ouverture de sept magasins dans des points clés de la vie commerciale du pays. Ainsi, le premier Fair Trade Shop a ouvert le 8 août 2009 à Cebu et fut suivi le 7 octobre par un deuxième à Cagayan de Oro. Les passants lèche-vitrines du coin y découvrent les créations de 32 producteurs locaux, dont certaines spécifiquement dédiées au marché domestique. Sont annoncés des pâtisseries, du thé, du café, de la confiture, des accessoires de mode, de la décoration d’intérieur, du papier ou encore des produits de beauté. A l’occasion de l’ouverture de ces magasins, le Directeur exécutif d’APFTI, Vincente Roaring, affirma : « nous croyons que les petites entre-

prises sont les combattants du développement et en dépit des nombreux challenges auxquels elles doivent faire face, elles continuent résolument à fournir de l’emploi et de la sécurité sociale aux familles et communautés ». [57]

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À l'occasion de la Journée mondiale du commerce équitable, le 7 mai 2011, Fair Trade Forum India a lancé le premier label destiné aux magasins indiens sous le nom de « FAIR TRADE INDIA ». « Le label

‘Fair Trade India’ nous offre une belle opportunité d'atteindre les consommateurs conscients, d'autant plus qu'il s'agit d'une initiative panindienne », nous confie Indraani Singh, le fondateur du magasin Indha et de Literacy India, l'organisation de commerce équitable propriétaire du magasin. Et Iytha Mallikarjuna, le Directeur général du Fair Trade Forum India* de poursuivre : « Le label « Fair Trade India » sera octroyé aux maga-

sins vendant des produits assurant aux artisans et agriculteurs producteurs locaux un revenu équitable et une vie digne. Il garantit aussi la mise en oeuvre de pratiques respectueuses de l'environnement tout au long du processus de production. » En définitive, le label « Fair Trade India » identifie les magasins où le consommateur responsable trouvera des produits équitables. Ce label est une garantie que le contenu et le rapport prix/qualité offerts aux consommateurs contribuent au développement des petits producteurs locaux, à tous les maillons de la chaîne d'approvisionnement. Les magasins dotés du label « Fair Trade India » ont rejoint la famille des réseaux de magasins équitables tels que les Magasins du Monde en Europe. Plus de 100.000 artisans et agriculteurs producteurs indiens ont ainsi déjà opté pour l'équitable et visent à séduire les consommateurs responsables avec leurs produits.**

“Betterday”, lancée par MDI, est la toute première marque certifiée équitable dans un pays en développement. Elle se vend au Vietnam et dans d’autres pays d’Asie. MDI est née de l’esprit de deux coopérants chevronnés. Après avoir mené de nombreux projets de développement, Minh Tuyet Nguyen et Dominic Smith voulaient briser à tout prix le cercle vicieux de la pauvreté qu’ils avaient tenté de combattre toutes ces années. En 2007, ils décident de fonder une entreprise sociale pour commercialiser du thé selon les principes du commerce équitable. Ils partent en montagne et commencent à travailler avec des communautés locales isolées vivant dans des conditions très rudes. Ils gagnent leur confiance, les aident à s’organiser, leur apprennent à récolter les meilleures feuilles de thé et à les transformer en thé de qualité. MDI emploie aujourd’hui 20 personnes enthousiastes et collabore avec quelque 1000 familles d’agriculteurs dont les produits s’exportent au Danemark, en Allemagne, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, à Hong Kong et au Japon.

*Fair Trade Forum India (FTF-I) est le réseau national du commerce équitable indien. Il compte, à ce jour, 85 organisations de commerce équitable membres et offre à travers elles des opportunités d'autonomisation sociale et économique à plus de 100.000 artisans et agriculteurs producteurs locaux. ** Source : Organisation mondiale du commerce équitable (WFTO).

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Ils mettent aussi un point d’honneur à ce que leur gamme de produits, qui compte à présent du café et des noix de cajou, soit également vendue au Vietnam et dans d’autres pays en développement : “Tout le monde mérite d’avoir accès à des produits de qualité et socialement responsables”, affirme Dominic Smith. Avec la commercialisation de leur marque “Betterday” sur le marché asiatique (“better quality, better health – tous ces produits sont de culture biologique - and better for society”), ils contestent l’idée largement répandue que le commerce équitable ne s’adresserait qu’au milliard d’habitants des pays plus aisés du Nord.

nus comme étant de qualité supérieure, même si les gens qui les produisent sont issus d’un pays moins développé, » [58]

Dominic Smith résume en ces termes l’objectif final de MDI : « Nous voulons que les produits que nous fabri-

quons avec nos partenaires agriculteurs soient recon-

© The Fairtrade Foundation

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A la lecture de la présentation, non exhaustive, de ces quelques initiatives de commerce équitable à travers le Sud, la perception même du terme « équitable », ainsi que les finalités du commerce varient. L’Afrique, notamment l’Afrique de l’Ouest, entend développer son label régional. Le développement du commerce équitable local en est à la phase « pilote ». Les énergies se fédèrent et bientôt devrait émerger un commerce équitable africain fort. En Amérique latine, où la ‘tradition’ du commerce équitable est ancrée depuis très longtemps, ce commerce comporte une puissante dimension politique. Le commerce équitable est non seulement une source de revenus, mais aussi (surtout ?) une manière de jouer un rôle politique sur la scène nationale, plus particulièrement pour défendre les droits des peuples indigènes. Ce commerce équitable local devient un étendard des populations marginalisées. Il se présente comme une force de résistance face aux exportations qui mettent à mal les conditions de vie des producteurs locaux ; comme une alternative également à un commerce équitable qui s’ouvre de plus en plus aux plantations pour satisfaire la demande des grands groupes mondiaux, en oubliant peut-être un peu trop les organisations de petits producteurs. Avec un fair trade devenu politique sociale étatique, comme au Brésil, cette dimension ‘contestataire’ risque-t-elle cependant de disparaître ? Le commerce équitable deviendrait alors un ‘simple’ outil gouvernemental de politique sociale. En fonction des sensibilités, une telle intégration sera perçue soit comme l’ultime étape d’une réussite, l’exception devenant la norme, soit comme un échec cuisant, le moteur de changement étant récupéré par les décideurs. Le commerce équitable local version indienne et philippine apparaît moins sensible à cette tension entre affaires et combat politique. Il s’inscrit surtout dans une vision d’un marché pouvant, par ses pratiques et ses débouchés, améliorer le sort des producteurs. L’acte d’achat n’est pas appelé par une forme de solidarité, une conviction idéologique. Le commerce équitable accepte les logiques de concurrence tout en soutenant des entreprises qui développent une réelle attention sociale. 32


Par des pratiques équitables tout au long du processus de fabrication d’un produit, le marché vient ainsi en aide en octroyant plus de ressources à des producteurs qui n’ont que peu de place dans le commerce local et/ou national. L’absence de revendications plus politiques peut aussi s’expliquer par la nature de certains régimes forts. Ainsi, le commerce équitable vietnamien est dynamique, mais son action ne peut s’inscrire que dans la sphère économique.

Dans le commerce équitable, les bananes sont plus que des bananes. Les citoyens marquent par leur consommation un lien avec des valeurs, des idées et des producteurs à des milliers de kilomètres d’eux. Ils affirment leur conscience de la mondialisation, et la réclament plus équitable. L’acte d’achat et de vente mobilise également. Des organisations du commerce équitable comme Oxfam rassemblent des milliers de bénévoles, dont certains sont moins sensibles aux discours de Chomsky ou Bové qu’au sort concret du paysan colombien qui est sur le paquet de café et a l’objectif de le vendre (le paquet, pas le paysan). Avec une relocalisation du commerce équitable, où les commerces locaux auraient la priorité sur les exportations, les militants pour un monde plus juste perdront-ils dans leur mission de sensibilisation un allié précieux, installé chaque jour dans leur cuisine ? Il n’est toutefois pas nécessaire d’opposer commerce équitable local (au Sud) et commerce équitable Nord-Sud. S’ils sont menés dans le respect des producteurs, les deux participent à l’amélioration des conditions de vie d’une population marginalisée. N’oublions pas que le commerce équitable représente moins d’un pourcent du commerce mondial. Toute forme d’un commerce juste doit être encouragée.

L’inquiétude la plus marquée sur le développement de commerce équitable au Sud et des labels l’accompagnant concerne la ‘partie négociable’ des valeurs du commerce équitable. Lorsque Abdourhamane Gueye d’ENDA Sénégal parle de « valeurs universelles » et d’autres « spécifiques à notre marché », quelles sont-elles ? Lors de son étude sur l’émergence d’un label mexicain de commerce équitable, Pierre Johnson [59] concluait qu’à la lumière des entretiens avec divers acteurs mexicains du fair trade, il existait « une appréciation différente de ce qu’est le commerce équitable » entre FLO et la vision mexicaine*. Là où « les normes de FLO se centrent

sur les conditions commerciales d’accès des producteurs aux marchés internationaux, celles de Comercio Justo México mettent l’accent sur le développement des organisations de petits producteurs ». Pour le label mexicain et le label des petits producteurs, d’ailleurs, et à la différence de FLO, les organisations indépendantes de petits producteurs sont le seul type de producteur légitime pour le commerce équitable. Exit donc les plantations privées employant de la main-d’oeuvre.

* Les deux labels sont cependant proches. Comercio Justo Mexique est membre de FLO et reconnaît le label international sur son marché. FLO cependant refuse de reconnaître le label mexicain pour l’exportation. Lire : http:// economiesocialequebec.ca/userImgs/documents/root/documents_gen/commerceequitablemexique2008.pdf

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Ces diverses déclinaisons d’un commerce plus soucieux de l’homme doivent être encouragées. En se réappropriant un mode de commerce pensé pour leurs populations les plus marginalisées, les pays et acteurs du Sud entendent prendre leurs responsabilités. Ils signifient un certain affranchissement par rapport aux acheteurs du Nord. Loin de toute aide venue des pays industrialisés, les initiatives d’un commerce équitable Sud-Sud s’appuient sur les forces locales. Elles peuvent, par effet d’entrainement, non seulement créer ou renforcer des filières économiques nationales, mais également vivifier le tissu social, valoriser des droits (du travail, de l’Homme) souvent bafoués. Le choix d’une consommation juste ne reviendra plus uniquement au consommateur du Nord, mais également aux revenus moyens des pays du Sud. A eux de manifester leur solidarité avec leurs producteurs, leurs citoyens moins bien lotis. Le débat d’une répartition équitable des ressources et revenus se posera avec d’autant plus de pertinence sur la scène locale. Le commerce équitable peut non seulement améliorer la vie du travailleur, mais également éveiller la conscience du citoyen. A observer les tendances différentes dans l’approche continentale du commerce équitable, y aura-t-il autant de Sud que de commerce équitable ? Sans doute dans les nuances. Pas dans les fondements. Le commerce équitable devra veiller toujours à octroyer une rémunération juste des producteurs et travailleurs, organisés en coopératives, ou en organisations similaires, transparentes, contribuant au développement économique et social de leurs membres, et contrôlées démocratiquement par ceux-ci. Sur ce socle d’exigences minimales seulement, les sensibilités locales, nationales et continentales pourront s’exprimer.

© CTB — Dieter Telemans

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Biodiversité / CTB (Coopération Technique Belge) / Circuit court / CNUCED / Commerce équitable / Economie sociale et solidaire / FLO-Max Havelaar / Résilience / Responsabilité sociale / WFTO

Diversité des êtres vivants qui peuplent la planète. Lors de la Conférence de Rio en 1992, la Convention sur la Diversité biologique fut signée. Elle vise à protéger la faune et la flore sauvages ainsi que leurs habitats naturels, mais aussi le monde vivant, à l'exclusion de l'humain. Source : Groupe One - InfoDurable

La CTB est l’agence belge de développement. Elle soutient, pour le gouvernement belge, les pays en développement dans leur lutte contre la pauvreté. Outre cette mission de service public, la CTB exécute également des prestations pour le compte d’autres organisations nationales et internationales contribuant à un développement humain durable. Pour soutenir le commerce équitable, la CTB lançait, en 2005, un programme de promotion générique du commerce équitable, dénommé « Fair Trade Centre ». Ce centre a depuis lors changé de dénomination pour s’appeler le « Trade for Development Centre » et s’occuper également de commerce durable et d’aide au commerce dans les pays en développement.

Se dit d’un commerce dont la filière de production et de commercialisation comporte peu d’intermédiaires entre le producteur et l’acheteur, et se déroule sur une aire géographique limitée.

Conférence des Nations unies sur le Commerce et le Développement. Créée en 1963, la CNUCED tente d’organiser des échanges commerciaux rééquilibrés entre le Sud et le Nord. C’est lors d’une de ses premières réunions que le Sud affirma son « Trade not aid », « du commerce, pas de l’aide ».

Partenariat commercial, fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, dont l’objectif est de parvenir à une plus grande équité dans le commerce mondial. Le commerce équitable contribue au développement durable en offrant de meilleures conditions commerciales et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs marginalisés, tout particulièrement au Sud. Les organisations du commerce équitable (soutenues par les consommateurs) s’engagent activement à soutenir les producteurs, à sensibiliser l’opinion et à mener campagne en faveur de changements dans les règles et pratiques du commerce international conventionnel. Source : FINE et Trade for Development Centre – Samuel Poos 2009

L’économie sociale et solidaire regroupe un ensemble de structures fonctionnant sur des principes d'égalité des personnes (1 homme 1 voix), de solidarité entre membres et d'indépendance économique. Elle affiche ces critères : libre adhésion, lucrativité limitée (pas individuelle), gestion démocratique et participative, utilité collective ou utilité sociale du projet, et mixité des financements entre ressources privées et publiques. Source : Alternatives Economiques

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Fairtrade Labelling Organizations International. Créé en 1997, FLO est une association de 21 initiatives de labellisation équitables (comme Max Havelaar en Belgique) situées dans plus de 21 pays. En janvier 2004, pour assurer l’indépendance du processus de certification, Fairtrade Labelling Organizations International a été divisée en deux organisations distinctes : FLO International e.V. et FLO-CERT GmbH. FLO International e.V. établit des critères, standards du commerce équitable. Elle assiste les producteurs à travers le processus de certification et dans la recherche de marchés pour leurs produits. FLO-CERT GmbH inspecte et certifie les producteurs et les importateurs sur base des standards développés par FLO International. Source : IMO et Trade for Development Centre – Samuel Poos 2009

En écologie, la résilience est la capacité d'un écosystème ou d'une espèce à récupérer un fonctionnement et/ ou un développement normal après avoir subi un traumatisme. Appliqué aux villes, c’est la capacité de ces dernières à absorber les chocs extérieurs.

La responsabilité sociale (ou sociétale) des entreprises (RSE) est un concept dans lequel les entreprises intègrent les préoccupations sociales, environnementales, et économiques dans leurs activités et dans leurs interactions avec leurs parties prenantes sur une base volontaire. La RSE est un dérivé pour entreprises qui s’inspirent de la finance éthique, du commerce équitable, et du développement durable Source : Livre vert de la Commission européenne sur la Corporate Social Responsability 2001

World Fair Trade Organisation, Organisation mondiale du commerce équitable. Elle a été créée en 1989 sous le nom d’IFAT (International Federation for Alternative Trade). Elle rassemble 220 organisations dans 59 pays : des groupes de producteurs, des organisations de commerce alternatif et d'autres opérateurs du commerce équitable d'Afrique, d'Asie, d'Australie, d'Europe, du Japon, d'Amérique du Nord et du Sud. En 2004, la WFTO lançait son label d’organisation (Fair Trade Organisation Mark – FTO-Mark) applicable non pas aux produits mais bien aux organisations de commerce équitable. Source : Trade for Development Centre – Samuel Poos 2009

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[1] POOS S., « Le commerce équitable en 2009 », Trade for Development Centre, octobre 2009. [2] « Global Fairtrade sales increase by 22% », communiqué de presse, FLO, 4 juin 2009. [3] CHARLIER S., HAYNES I., BACH A., MAYET A., YEPEZ I., MORMONT M., « Le commerce équitable face aux défis commerciaux : évolutions des dynamiques d’acteurs / Partie 1: Modes de production et de consommation durables », UCL, Février 2006. [4] YILMAZ M., « Le commerce équitable », Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social, Suisse, décembre 2005. [5] http://www.solidarmonde.fr/ [6] « Le commerce équitable, crise de croissance », dossier, Courrier de la Planète, avril 2009. http://www.courrierdelaplanete.org/87/index.php [7] PATUELLI A., « Un café équitable difficile à avaler », ITECO, 19 septembre 2006. [8] http://www.guardian.co.uk/commentisfree/cif-green/2009/dec/12/fair-trade-fairtrade-kitkat-farmers et http://www.fairtradelondon.org.uk/2009/12/08/fairtrade-kit-kats-and-mainstreaming-fairtrade-pros-and-cons/ [9] http://fr.wikinews.org/wiki/Nestl%C3%A9_annonce_un_chiffre_d'affaires_d%C3% A9passant_les_100_milliards_de_francs_suisses [10] http://www.courrierdelaplanete.org/87/index.php [11] http://www.courrierdelaplanete.org/87/index.php [12] LECOMTE T., GIRARD C., « Souveraineté alimentaire et commerce équitable », Rapport annuel du labo du commerce équitable, 8 Avril 2009. [13] « Le commerce équitable à la croisée des chemins ? », rapport du colloque organisé par le Fair Trade Centre, 5 octobre 2006. [14] « Le commerce équitable à la croisée des chemins ? », rapport du colloque organisé par le Fair Trade Centre le 5 octobre 2006, page 18. [15] Pour un argumentaire complet sur la question : lire « Un commerce équitable Nord-Nord », une note d’information du Trade for Development Centre : http://www.befair.be/fr/content/un-commerce-%C3%A9quitable-nord-nord# [16] CHARLIER S., HAYNES I., BACH A., MAYET A., YEPEZ I., MORMONT M., « Le commerce équitable face aux défis commerciaux : évolutions des dynamiques d’acteurs / Partie 1: Modes de production et de consommation durables », UCL, Février 2006. [17] GOLAY C., « La crise alimentaire mondiale et le droit à l’alimentation », Cahier critique n° 3, CETIM, Genève, décembre 2008. [18] id. [19] Compte-rendu de l’atelier international sur la « crise alimentaire : les voix paysannes vers le voies de la souveraineté alimentaire », Conseil National de Concertation et Coopération des Ruraux (CNCR), Dakar, 21/23 janvier 2009. [20] « Les régions, une échelle pertinente pour la souveraineté alimentaire », A.S., Transrural Initiatives – 4 juillet 2006. [21] « Une approche pour le développement local : l’animation territoriale », Dynamiques paysannes, SOS Faim, numéro 15, juillet 2007. [22] CHARLIER S., HAYNES I., BACH A., MAYET A., YEPEZ I., MORMONT M., « Le commerce équitable face aux défis commerciaux : évolutions des dynamiques d’acteurs / Partie 1: Modes de production et de consommation durables », UCL, Février 2006. [23] JOHNSON P. W., « Le commerce équitable au Mexique - Labels et stratégies », rapport remis à la Délégation Interministérielle à l'Innovation Sociale et à l’Economie Sociale (France), 2004. [24] id. [25] DE LA FUENTE A., « Les émeutes de la faim font réfléchir », 4 septembre 2008.

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[26] CHARLIER S., HAYNES I., BACH A., MAYET A., YEPEZ I., MORMONT M., « Le commerce équitable face aux défis commerciaux : évolutions des dynamiques d’acteurs / Partie 1: Modes de production et de consommation durables », UCL, Février 2006. [27] Executive Summary, “The Flow”, IRFT, http://www.profit.org.in/indian-research-summary.pdf [28] CHARLIER S., HAYNES I., BACH A., MAYET A., YEPEZ I., MORMONT M., « Le commerce équitable face aux défis commerciaux : évolutions des dynamiques d’acteurs / Partie 1: Modes de production et de consommation durables », UCL, Février 2006. [29] Pour plus d’information sur ce sujet, voir la publication du Trade for Development Centre : « Le commerce équitable, un commerce durable ? » : www.befair.be [30] « Environnement et commerce équitable », Trade for Development Centre, Bruxelles, 2009. [31] « Le commerce équitable à la croisée des chemins ? », rapport du colloque organisé par le Fair Trade Centre, 5 octobre 2006. [32] Voir la vidéo ici : http://www.ftis2008.org/FichiersComplementaires/video5/video5.html [33] http://www.befair.be/fr/articles/www-befair-be/1-accueil/le-commerce-equitable/enjeux-du-commerce-equitable/le-projetprofit-de-irft-en-inde.cfm [34] « FLO welcomes Fairtrade Label South Africa“, Fair Trade Advocacy Office, 3 août 2009. [35] « Fairtrade mijote au Kenya », article de Fairtrade Africa, 21 décembre 2010. [36] JOHNSON P. W., « Le commerce équitable au Mexique - Labels et stratégies », rapport remis à la Délégation Interministérielle à l'Innovation Sociale et à l’Economie Sociale (France), 2004. [37] Informations tirées du diaporama « Stratégie de commerce équitable au Mexique », par Pierre Johnson, consultant associé WFTO, http://www.slideshare.net/pierrejohnson01/commerce-equitable-au-mexique [38] JOHNSON P. W., Id. [39] www.cofta.org [40] http://www.wfto.com/index.php?option=com_content&task=view&id=915&Itemid=285 [41] MARTIN A.-S. « Commerce équitable : le Maroc produit mais ne consomme pas encore » : La Vie éco, 7 décembre 2009 [42] www.facesdobrasil.org.br (site désactivé le mardi 13 octobre 2009). [43] « Brazilian Fair and Solidary Trade System », diaporama de présentation, Fabiola Zerbini, Secretary Executive, FACES do Brasil, Workshop Copolco, Salvador, 2007. [44] FITIPALDI J. P., PASCOWITCH J., PERRET-GENTIL N., “Ethical and Solidary Trade and Fair Trade in Brazil – Complementary Practices of Non-conventional Trade”, 2e colloque International sur le commerce équitable et le développement durable, Montréal, Québec, Canada, 19-21 juin 2006. [45] http://www.clac-pequenosproductores.org/docs/Information_Symbole_Petits_Producteurs_CLAC_110406.pdf [46] http://www.clac-pequenosproductores.org/ [47] JONGEJANS L., « L’Amérique latine prend en main sa participation au commerce équitable », Ex aequo, journal des Magasins du Monde, n° 15, Suisse, septembre 2006. [48] http://fairtrade.socioeco.org/fr/ [49] www.gresp.org.pe [50] LEMAY J.-F., « Cartographie d’un projet de commerce équitable au « sud » : La central interregional de Los Artesanos del Peru », 2e colloque International sur le commerce équitable et le développement durable, Montréal, Québec, Canada, 19-21 juin 2006. [51] http://www.wat.tv/video/rencontre-gresp-adm-lyon-1gmkx_1fjqj_.html [54] http://www.fundmcch.com.ec/intro/htmlintro/intro.html

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[55] http://www.omdm.be/equateur/maquita-cushunchic-comercializando-como-hermanos-mcch.html# [56] “Fair trade in the Philippines: Challenges and Opportunities”, a Paper Prepared by ICLEI-Local Governments for Sustainability, Southeast Asia Secretariat, Octobre 2006. [57] “4.000 Households Benefit from the Opening of The Fair Trade Shop”, communiqué de presse, APFTI, 7 octobre 2009. [58] Présentation de MDI et interview de Dominic Smith réalisés par Steven De Craen du Trade for Development Centre [59] JOHNSON P. W., « Le commerce équitable au Mexique - Labels et stratégies », rapport remis à la Délégation Interministérielle à l'Innovation Sociale et à l’Economie Sociale (France), 2004.

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Pour le Trade for Development Centre (TDC), programme de la CTB (l’Agence belge de développement), les commerces équitable et durable peuvent être des outils de réduction de la pauvreté, et des leviers de développement. Le centre a pour objectif l’émancipation économique et sociale des petits producteurs du Sud, à travers leur professionnalisation et l’accès aux marchés, que ces derniers soient locaux, régionaux ou internationaux . Le TDC couvre 3 types d’activités, présentés brièvement ci-dessous. Vous trouverez plus d’information sur notre tout nouveau site Web www.befair.be.

Programme d’appui financier Le Trade for Development Centre soutient les producteurs marginalisés, les micro et petites entreprises ainsi que les projets d’économie sociale actifs dans le commerce équitable ou durable. Il finance différentes activités permettant d’augmenter leurs capacités et leur accès au marché : création de nouveaux produits, introduction de systèmes de contrôle de la qualité, obtention d’une certification, formations (en gestion, marketing…), participation à des foires commerciales,...

Activités d’appui à la commercialisation Le TDC est un centre d’expertise en « marketing & ventes » et un organe d’appui concret aux projets de la CTB liés directement ou indirectement à la commercialisation de produits et/ou services :

 Conseil stratégique en business et marketing  Information et analyse de marchés  Coaching en marketing & ventes

Le TDC met en place des campagnes de sensibilisation à destination des consommateurs (Semaine du commerce équitable), des acteurs économiques et des pouvoirs publics belges. La Semaine du commerce équitable est la campagne la plus connue.

Via son site Internet, sa newsletter et différentes publications (dépliant, brochures, fiches), le Trade for Development Centre veut apporter aux consommateurs, pouvoirs publics, producteurs et autres acteurs économiques, une information la plus objective possible sur les thématiques du commerce équitable et durable ; entre autres sur les différents labels et systèmes de garantie existants. Il contribue aussi aux débats pour une gestion des ressources naturelles et un commerce plus respectueux de l’Etre humain et de son environnement. Le Centre participe activement à différentes platesformes d'échange entre acteurs concernés, notamment la plate-forme belge d’appui au secteur privé « Entreprendre pour le développement ».

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