Pourquoi faire de la politique à Chamonix?

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Pourquoi faire de la politique à Chamonix ?

Le mot politique, vient du grec «polis» qui signifie «la ville, la cité». La politique c’est la recherche du bien de la cité, donc de l’intérêt public. A Chamonix, cet intérêt public est menacé. Et nous entendons le défendre. Pourquoi ?

1) Parce que cette commune n’est plus administrée de manière démocratique. La première condition pour qu’on puisse en effet qualifier une gouvernance de démocratique, c’est l’alternance. Des femmes, des hommes, avec des idées différentes, doivent pouvoir se succéder à la tête du pouvoir. L’efficacité d’une action publique exige certes la durée, mais une durée raisonnable. 10 ans, par exemple, au niveau national pour les présidents de la République sont jugés suffisants. Et au niveau local, pour les maires ou les présidents d’autres collectivités, une durée de 12 ans devrait être considérée comme maximale. En France, cette loi démocratique est respectée à l’échelon national: les présidents de la République changent régulièrement (ils effectuent parfois un seul mandat de 5 ans !) et les majorités parlementaires aussi. Elle l’est beaucoup moins au niveau local. Des maires ou des présidents de conseil général effectuent parfois 4...5 mandats d’affilée, demeurant près de trente ans au pouvoir ! Ce qui est exagéré et néfaste pour la collectivité dont ils ont la charge. Mais la loi qui interdira à un maire ou à un président d’une autre collectivité de prolonger ses fonctions au-delà de 12 ans tarde hélas à être votée ! Il existe donc en France des professionnels éternels de la politique. C’est à dire des gens qui exercent ce métier – souvent lucratif ! - jusqu’à la fin de leurs jours. Mais c’est là un détournement, car la politique devrait rester une mission et ne jamais devenir une profession ! Lorsque la réélection est devenue la priorité, lorsqu’on se bat, non plus pour l’intérêt public, mais pour ne pas perdre sa position, son autorité, son emploi... le ver est dans le fruit. Ainsi se recréent dans notre pays, au niveau des communes, départements ou régions, des formes de féodalités. Des chefs, des « leaders » se perpétuent, comme autrefois les hobereaux (comtes ou marquis) dans les bourgs et provinces. Et ils contractent progressivement tous les travers des ex-aristocrates : arrogance, sentiment que tout vous est permis... Chamonix n’échappe pas à la règle. L’ancien maire, Michel Charlet, a fondé une sorte de dynastie. Reconnaissons, qu’à son époque, celle-ci n’avait pas trop mal fonctionné - la performance des princes variant, suivant leur personnalité, comme celle de nos présidents de la république -. Mais Michel Charlet a commis l’erreur de désigner son successeur, Eric Fournier... Pratique au demeurant ancienne : à partir de Nerva, par exemple, les empereurs romains, avant de passer de vie à trépas, choisissaient celui qui prendrait leur place sur le trône ! Le nouvel «homme fort chamoniard», le jeune Fournier qui, lui, n’a que 54 ans, ne désignera pas son successeur avant longtemps. Car il vient déjà d’annoncer qu’il postulera en mars prochain pour un troisième mandat de maire ! Rappelons qu’avant de devenir maire, Mr Fournier avait effectué deux mandats en qualité d’adjoint, soit déjà 24 ans de pouvoir communal, dont douze sans partage ! Autant dire que l’alternance, cette règle fondamentale pour la démocratie, n’est pas respectée dans la capitale du ski et de l’alpinisme. Et l’équipe entourant Mr Fournier ( sa garde rapprochée), ne se renouvelle pas beaucoup non plus. Certains, membres du conseil municipal à l’époque de Michel Charlet, en sont aussi à leur cinquième mandat ! Une longévité pathétique. A force de se voir reconduits par le suffrage


universel, ces hiérarques finissent à leur tour par se croire très au-dessus du commun des mortels. Et leur personne, à l’instar des « caciques » ( c’est à dire les vieux chefs indiens sud-américains), ils accréditent, avec le temps, l’idée qu’elle est devenue intouchable. Gare au malappris se hasardant à formuler la moindre critique ! Il est immédiatement traité d’incompétent, d’ignare, d’illettré ! La deuxième condition pour qu’on puisse vivre en démocratie, c’est l’existence d’une assemblée disposant de réels pouvoirs. Au niveau national, cette instance est qualifiée de parlement, au niveau local son appellation varie : conseil municipal, général ou régional. Dans un régime républicain, quel que soit l’échelon où l’on se situe, un exécutif doit en effet partager le pouvoir avec un conseil de personnes élues. Cette séparation est fondamentale. Elle évite qu’un seul individu, entouré d’un cercle réduit de fidèles, s’accapare la décision...Alors, bien sûr, c’est surtout au niveau national que cette dérive est dangereuse car elle peut conduire au « césarisme ». Mais elle l’est maintenant aussi au niveau local, car les lois de décentralisation se sont multipliées depuis 40 ans : en 1982 ; en 2003 ; en 2015. Et elles ont confié aux collectivités locales des pouvoirs de plus en plus étendus : dans le domaine social, de l’urbanisme, des routes, de l’environnement, de la culture, du sport...voire aujourd’hui de la police. Et désormais, même au niveau d’une commune, il importe d’empêcher que le maire devienne un petit satrape. Et cette fonction salutaire, c’est le conseil municipal qui doit la remplir. On doit pouvoir en son sein converser librement, contrôler, critiquer, formuler des propositions... Mais à Chamonix, on ne peut pas dire que le conseil municipal soit ce lieu privilégié où la vie démocratique s’épanouit. Car on n’y discute de rien, on n’y débat de rien. L’ordre du jour est strictement fixé par l’exécutif et les délibérations sont toutes élaborées à l’avance, dans le secret. C’est le maire (avec l’adjoint compétent, mais c’est rare !) qui prend la décision. Il dispose seul des informations techniques transmises par les services de la commune. Et le conseil municipal est transformé en chambre d’enregistrement, pour ne pas dire en « carpette ». Ceux qui y siègent n’ouvrent quasiment jamais la bouche... surtout pas pour s’opposer à la politique mise en œuvre par le « patron ». Cette situation s’aggravera si la liste Fournier est reconduite lors des élections de mars prochain. On imagine mal en effet un maire aussi ombrageux se comporter autrement qu’en mini despote. Un vote en sa faveur renforcera la propension qui est la sienne à se considérer comme un chef irremplaçable ! La capitale du ski et de l’alpinisme risque donc de subir des années encore le pouvoir d’un seul. D’où l’intérêt de s’impliquer pour essayer qu’il n’en soit plus ainsi. Mais d’autres motifs justifient notre engagement.

2) La vallée de Chamonix se porte mal. Sans chercher à justifier les régimes autoritaires, il faut parfois admettre certaines de leurs réussites. Ainsi une dictature communiste a hissé la Chine (misérable il y a 70 ans !) au deuxième rang des pays les plus riches de la planète ! Et Paris, c’est sous Napoléon III, sous le second empire, que le baron Haussman a réussi à en faire la plus belle ville du monde ! Donc, si la vallée de Chamonix se portait bien, si sa population permanente croissait, si la qualité de son air s’améliorait, si son trafic automobile se fluidifiait, si son urbanisme donnait l’impression d’être maîtrisé, si ses poubelles n’étaient pas brûlées dans un incinérateur rejetant des effluents toxiques, si ses remontées mécaniques n’étaient pas ravagées par des incendies, ne tombaient pas trop souvent en panne, ou ne déraillaient pas, et bien on pardonnerait volontiers à Mr Fournier ses allures hautaines, sa conception « jupitérienne » du pouvoir .


Las, l’état de Chamonix, de son air, de son environnement, ne permet pas d’accorder ce type d’excuses à notre fier marquis. Qu’en est-il exactement ? Citons d’abord la démographie, signe révélateur de la santé d’une ville, d’une région, d’une nation. Eh bien, à Chamonix, elle baisse... et sérieusement ! Le nombre des habitants permanents est en effet passé de 9701 en 1990 à 8733 en 2019, soit une perte de près de 1000 personnes en 30 ans ! Le fait que notre vallée soit devenue une terre rêvée pour la spéculation immobilière explique cette diminution. 70 % , sinon 80 % , des chalets gardent en effet leurs volets clos 10 mois de l’année sur douze. Ils servent de placement financier à leurs propriétaires. La plupart ne cherchent d’ailleurs pas à les louer. Il en résulte un niveau exagéré des loyers, particulièrement dissuasif pour les jeunes. Il y a d’autres raisons à ce déclin de population. Le petit commerce déserte aussi. Les magasins du centre-ville sont rachetés les uns après les autres par de grandes marques de sports, vêtements ou produits de luxe. A Chamonix, on vient désormais faire du business (ce n’est pas interdit, bien sûr), mais on ne souhaite plus y vivre. C’est normal puisque on n’y trouve plus ni garage, ni magasin d’électricité, ni pressing, ni boutique Orange...et les médecins spécialistes se raréfient (il reste aujourd’hui un gynécologue, un cardiologue, un ophtalmologue et un psychiatre !). Pour les examens radiologiques ou les urgences, il faut se rendre à Sallanches. Il est loin le temps où Chamonix possédait encore un hôpital ! Bref, non seulement tout cela n’incite pas les nouveaux venus à s’installer, mais pousse aussi certains résidents ne disposant que de modestes revenus - des guides, des moniteurs de ski, des pisteurs secouristes - à déménager. Ils descendent à Servoz, Passy, Sallanches...là où le coût de la vie est plus supportable. Il y a ensuite la pollution. La capitale mondiale du ski et de l’alpinisme détient un très glorieux record : celui de la station de montagne dont l’atmosphère est devenue la plus polluée, la plus viciée des Alpes ! Et l’on ne parle pas des nuisances sonores, ni des dépôts d’huile générés par un trafic automobile toujours plus dense, toujours plus insupportable (en particulier au cours des périodes touristiques d’hiver et d’été). Le réchauffement climatique, le recul alarmant des glaciers, d’énormes éboulements rocheux rendent par ailleurs très dangereuse la pratique de l’alpinisme. Ce n’est évidemment pas la faute de Monsieur Fournier. En revanche, de la disparition de l’air pur de nos montagnes, les élus qui se sont succédé à la tête de la commune depuis 50 ans, portent une part de responsabilité. Car on ne peut pas rejeter la faute de l’augmentation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère sur les seuls feux de bois et autres modes de chauffage utilisant des énergies fossiles (sinon, la question pourrait être réglée sans trop de difficultés). Non, une large part de la pollution de l’air provient du nombre trop élevé de véhicules circulant dans cette vallée – poids lourds bien sûr, mais aussi autres engins à moteur -. Et personne n’a jusqu’ici essayé de s’attaquer de front à ce problème...vu que cela exigerait des décisions contraignantes, forcément impopulaires. Il faut dire que l’incinérateur situé sur la commune de Passy, et où Chamonix descend brûler ses ordures (ainsi que 19 autres communes situées sur le pourtour du Mont-Blanc !), aggrave encore l’insalubrité. Et cette usine qui rejette des fumées toxiques (et utilise un procédé désormais dépassé de traitement des déchets ! ), il faudrait avoir le courage de s’en débarrasser ! Il y a également l’urbanisme. La valeur des terrains constructibles à Chamonix n’a cessé de croître. Il est donc logique que les demandes d’autorisation de construire se soient multipliées. Ce qui est moins acceptable, c’est que trop de permis aient été accordés pour des maisons individuelles ou des chalets, seulement destinés à servir de résidences secondaires, voire de placements comme il a été dit plus haut. Il en résulte une disparition progressive des espaces verts (des forêts de sapins surtout) et une déplorable prédominance du bâti sur l’ensemble de la vallée ( du village du Tour jusqu’aux Houches). Cette « bétonisation » est hélas très observable dès que l’on prend un peu de hauteur. Si le PLU - autrefois le POS- n’était pas assez rigoureux, il fallait le réviser; exiger plus de sévérité. Mais telle n’a pas été, semble-t-il, la volonté des princes nous ayant


gouverné. Et puis on pourrait mentionner les permis dont l’esthétique prête sérieusement à discussion. Le dernier en date, celui accordé au groupe Décathlon (qui a racheté les piolets Simond) enlaidit un peu plus l’arrivée à Chamonix - déjà hérissée d’immeubles en tout genre - . D’autres solutions susceptibles de maintenir la vieille marque Simond au pied du toit de l’Europe auraient certainement pu être trouvées… Bon, on ne va pas dresser l’inventaire de tout ce qui dysfonctionne dans cette vallée. Pour clore ce chapitre, nous évoquerons cependant deux points : celui du train électrique nous reliant à la gare du Fayet et celui des remontées mécaniques. La modernisation du train a coûté fort cher : aux alentours de 100 millions d’€, dit-on. Ce n’est pas Chamonix qui a payé, mais la SNCF, la Région...etc. Certes, mais c’est une somme importante investie sur notre territoire. Et en évaluer la pertinence, s’avère nécessaire. Or que constate-t-on ? Une désaffection pour ce mode de transport... des wagons la plupart du temps aux trois quart vides. Si ce train représente 2% des déplacements effectués chaque année dans cette vallée, c’est le maximum, alors que le but de cette rénovation, c’était de diminuer le trafic automobile. Difficile, dans ces conditions, de vanter les vertus du rail ! C’est la fréquence trop limitée des rames qui pêche, la lenteur des machines, la non desserte de secteurs sensibles, l’absence de moyen pour convoyer les voyageurs jusqu’à leur résidence (une fois qu’ils sont descendus des wagons). Lorsque ce train a été construit en 1901, il incarnait le progrès et la modernité. Ce n’est probablement plus vrai aujourd’hui. D’autres moyens de transport collectif propre auraient pu être étudiés…ou bien il faudrait réinvestir très notablement dans cette ligne afin d’en corriger les défauts. Quant aux remontées mécaniques de Chamonix, en 2013, elles ont toutes été concédées pour une durée de 40 ans à la Compagnie du Mont-Blanc. C’est Eric Fournier qui a signé ce contrat. Mais peut-être n’a-t-il pas bien réfléchi, notre premier magistrat, aux conséquences de son acte. Car ce n’est pas un hasard si, en 1985, la loi montagne a qualifié de services publics les remontées mécaniques dans les stations de ski. Toute l’économie des villages et sites où s’est développée la pratique du ski alpin dépend en effet de ces télésièges, télécabines et autres engins. Quand ceux-ci cessent de fonctionner, la station n’a plus de raison d’être. L’activité s’arrête. Commerçants, pisteurs et moniteurs de ski s’en vont. A Chamonix, capitale mondiale du ski et de l’alpinisme, le problème se pose en des termes sans doute moins aigus qu’ailleurs..qu’à Valmeinier, qu’à la Toussuire, qu’aux Sept-Laux par exemple. Car notre vallée, placée au pied du toit de l’Europe, possède heureusement d’autres atouts. Mais, quand même…Le traumatisme économique et social que provoquerait la fermeture simultanée du Montenvers, de l’Aiguille du Midi et des Grands Montets serait colossal ! Donc, même dans la capitale du ski et de l’alpinisme, il importe que la collectivité publique conserve un minimum de regard sur la manière dont sont gérées les remontées mécaniques : leur sécurité, leur entretien, leur renouvellement. Tel n’est plus vraiment le cas aujourd’hui. L’ensemble du parc a été délégué à la CMB, laquelle se trouve en situation de monopole sur tout le secteur du Mont-Blanc : de Vallorcine jusqu’à Megève...en passant par les Houches et Saint-Gervais-les-Bains ! Un véritable Etat dans l’État ! Un monstre qui décide ce qu’il veut...quand il le veut... et sur lequel la commune croit qu’elle exerce un contrôle, mais n’en exerce en réalité aucun. La CMB en vient d’ailleurs jusqu’à déployer sa propre politique touristique pour la vallée (en contradiction parfois avec celle de notre bon vieil « office »). Quant aux remontées mécaniques, victimes depuis quelques années de multiples et graves incidents, on ne peut pas dire que leur gestion soit exemplaire ! Certaines sont déstabilisées par le permafrost, d’autres brûlent, d’autres déraillent...d’autres sont mal réparées (les poulies, câbles, pylônes nécessitent de trop fréquentes interventions). -----------------------------


Alors, objectera-t-on, il est facile de critiquer, mais que proposez-vous en échange...de possible, de réaliste, de finançable ? Contrairement à ce que vous affirmez, la vallée ne se porte pas si mal. Le chiffre d’affaire des commerçants à Chamonix continue d’une manière générale à croître. L’été, le déclin de l’alpinisme est compensé par des produits nouveaux attirant des milliers de personnes (comme Cosmo Jazz ou l’UTMB). Pourquoi vouloir changer les choses ? Il faut continuer dans cette voie. La pollution n’atteint pas un niveau tel qu’elle dissuade les touristes, les skieurs, les randonneurs, et d’innombrables traileurs de se rendre à Chamonix. Quant aux guides, ils trouveront toujours du travail. L’ascension du Mont-Blanc n’a jamais été aussi demandée! Et de la circulation automobile, vous pouvez en parler tant que vous voudrez, mais vous ne pourrez pas la limiter. Depuis l’ouverture du tunnel du Mont-Blanc, la vallée de Chamonix est condamnée à subir le passage des camions. Que ça vous plaise ou non ! Tel n’est pas notre avis.

3) Car une autre politique pour s’attaquer aux vrais problèmes et préparer l’avenir est possible. La première erreur de Monsieur Fournier fut, en 2013, de se recroqueviller, de se calfeutrer dans le périmètre restreint des quatre communes composant aujourd’hui notre communauté :Vallorcine, Chamonix, les Houches, Servoz. On comprend facilement pourquoi ce stratège a préféré agir ainsi. Chamonix écrasant les trois autres communes, il pouvait sans difficulté prendre la présidence de ce regroupement... en devenir, durant de longues années, le chef. Décision cependant funeste pour l’intérêt général. Car avant 2013 existait un syndicat intercommunal, dénommé SIVOM du pays du Mont-Blanc. Et celui-ci réunissait 14 communes, c’est à dire celles des hautes et basses vallées de l’Arve, et puis les Contamines, Megève, Combloux, Praz-sur- Arly... C’est ce SIVOM large, cohérent, qu’il aurait fallu transformer en communauté de communes. Des moyens importants auraient pu ainsi être mis en commun pour développer de vraies politiques (et des économies d’échelle!) dans quelques domaines essentiels : économie et tourisme, environnement, transports, urbanisme...Alors que cette communauté rikiki de quatre communes (qui n’atteint pas 13000 habitants au total !) se trouve dans l’incapacité de dégager des ressources à la dimension des problèmes posés : pollution atmosphérique, circulation automobile, déchets, logements, soins médicaux...etc. Comment, par exemple, parler à l’État, à l’Europe, à nos voisins Italiens et Suisses du passage des camions sous le tunnel, en l’absence d’une structure réunissant toutes les communes impactées par ce fléau autour du Mont-Blanc ? Comment supprimer l’incinérateur de Passy autrement qu’en harmonisant tri, collecte, traitement, recyclage et valorisation des déchets au sein de cette vaste intercommunalité (le SITOM ne disposant que de la compétence traitement) ? Comment réduire la circulation automobile entre Chamonix et le bas de la vallée, relancer un moyen collectif (et efficace) de transport propre, sans discuter avec Passy, Sallanches, Domancy, Saint Gervais, et décider de mesures et projets susceptibles de convenir aux gens du haut et à ceux du bas? Ce repliement inepte de Mr Fournier sur son bout de gras chamoniard est merveilleusement illustré par le feuilleton ayant abouti, l’an dernier, à confier aux gendarmes une mission de contrôle sur la voie normale du Mont-Blanc. Celle-ci s’est probablement avérée utile - elle a peut-être sauvé des vies-, mais elle a remis en cause le principe de la liberté dans la pratique l’alpinisme et reste, malgré tout, lourde de conséquences. Et il semble inconcevable que le premier magistrat de la capitale du ski et de l’alpinisme n’ait pas participé aux discussions intervenues sur ce sujet entre le maire de Saint Gervais et le préfet de la Haute-Savoie ! Il conviendra donc de retrouver les frontières de l’ancien SIVOM en vue de le transformer en communauté de communes. Ce ne sera pas simple. Il faudra du temps et bien des palabres.


C’est néanmoins capital si l’on veut réussir à traiter les problèmes de fond qui minent aujourd’hui les hautes et basses vallée de l’Arve, leurs destins se trouvant étroitement liés. D’autant qu’il serait possible de mettre en place dans cette nouvelle intercommunalité un service d’urbanisme (composé d’agents d’un haut niveau technique et juridique), indépendant, impartial, car plus éloigné des habitants et élus de Chamonix. La deuxième erreur de Monsieur Fournier fut la signature (toujours en 2013), de la délégation de service public accordée à la Compagnie du Mont-Blanc. Nous en avons déjà parlé... et nous pensons qu’il ne faut pas avoir peur de dénoncer cette délégation. D’autres solutions pour gérer les remontées mécaniques existent. A Courmayeur par exemple, les Valdotains n’ont pas hésité à congédier la Compagnie des Alpes. Et grâce à l’aide de la Région d’Aoste, ils ont pu construire un téléphérique panoramique - sans doute l’un des plus ingénieux au monde - reliant Entrèves à la pointe Helbroner. En France, les Trois vallées Courchevel, Méribel, Val Thorens - après avoir longtemps été administrées en régie directe par le conseil général de la Savoie le sont désormais par une société d’économie mixte...et c’est dans ces trois stations que l’on trouve les remontées mécaniques les plus modernes et les mieux entretenues d’Europe. Donc le directeur de la CMB, Mr de Chavanne, aura beau nous jurer, sur la tête de Charles Bozon ou de James Couttet, que la compagnie du Mont-Blanc réinvestit tous ses bénéfices dans les remontées mécaniques de Chamonix, qu’elle ne distribue pratiquement aucun dividende à ses actionnaires, qu’elle se comporte presque comme une entreprise à but non lucratif (une quasi société de bienfaisance!), et bien, nous, compte tenu de l’état peu reluisant où se trouvent aujourd’hui les téléphériques et autres télécabines de cette vallée, nous rechercherons d’autres gestionnaires. Nous avons la faiblesse de penser que les Grands Montets, l’Aiguille du Midi, le Brévent ou le Montenvers sont suffisamment attractifs pour intéresser des investisseurs autres, privés ou publics, français ou étrangers. D’autant que le réchauffement du climat, la hausse des limites du permafrost, les éboulements de rocher exigent une réflexion approfondie sur ces remontées mécaniques de Chamonix, notamment celles situées sur le versant nord...Il faut se poser de très sérieuses questions sur la sécurité, les technologies et équipements utilisés, l’emplacement des pylônes, et peut-être aussi celui des gares. Quant aux personnels employés par la CMB, il est évident que nous introduirons des clauses dans les nouveaux contrats visant à en imposer la réembauche. Il y a une troisième erreur du maire: il n’a jamais conçu de plan pour essayer d’anticiper l’avenir ! C’est pourtant là le fondement de toute politique. Gouverner, c’est prévoir ! Un truisme, certes, mais qui mérite d’être rappelé. Car le timonier de notre vallée de Chamonix, Mr Fournier, navigue à vue. En fonction du vent, il donne des coups de barre à droite ou à gauche. Par exemple, après avoir favorisé à tout crin l’accession à la propriété, le voilà, au bout de 11 ans de pouvoir, découvrant les vertus du locatif ! Un autre jour, il tempête contre les résidents secondaires et contre la loi ALUR (qui ouvre le droit d’accroître encore les dimensions de demeures souvent inoccupées )...mais quelques jours plus tard, se rendant compte qu’il s’aliène ainsi une influente catégorie de propriétaires (dont une partie vote à Chamonix !), il assiste à leur assemblée générale et s’empresse de dissiper leurs craintes. Sa position vis à vis de la défense de l’environnement, non plus, ne manque pas de sel. Lorsqu’ Eric Fournier s’empare en 2008 des rênes du pouvoir communal, l’atmosphère de la vallée est déjà plus que viciée. Si la capitale du ski et de l’alpinisme est désormais citée par les médias, c’est pour l’exécrable qualité de son air ! Depuis la réouverture du tunnel (après la catastrophe) les flux de camions ont repris en effet de plus belle. Et des encombrements automobiles - d’horripilants bouchons ! -, en période touristique, obstruent durant la journée l’entrée du centre-ville. Quant au vent d’ouest dominant, il ramène régulièrement au pied du Mont-Blanc les gaz - non seulement à effet de serre, mais toxiques - de l’incinérateur de Passy. Eric Fournier aurait pu s’émouvoir de cette triste évolution et consacrer son énergie à la combattre. Mais telle ne fut pas sa priorité. Le commerce continuant à prospérer dans la vallée de Chamonix,


pourquoi diantre se serait-il inquiété de ces insolubles problèmes de circulation automobile et de pollution ! Un tel aveuglement, par les temps de suffocation qui sont aujourd’hui les nôtres, pouvait cependant vite s’avérer dommageable...en termes politiques...électoraux s’entend. Et Eric Fournier l’a bien compris. Il a changé de couleur. Il est passé du bleu au vert...histoire de montrer que lui aussi, premier magistrat de la capitale du ski et de l’alpinisme, avait su prendre la mesure de la catastrophe, de l’étendue du désastre... de la fonte des glaciers, de l’inexorable remontée du permafrost, de la pollution de l’air, de la réduction des espaces boisés, du bruit, des huiles, du mazout...etc ! Et donc, à la Région, il s’est arrangé pour acquérir quelques responsabilités dans la verdure : Laurent Wauquiez l’a propulsé adjoint chargé de l’environnement ! Et notre maire, qui s’était jusque-là soigneusement bouché les narines, privilégiant plutôt le béton, fut soudain touché par la grâce (un peu comme Saint-Paul sur le chemin de Damas) : il s’est transformé en jardinier, en candide défenseur de la nature, en spécialiste du compostage, de la méthanisation, du tri, du moteur propre, du chauffage solaire... et en adepte inconditionnel du train électrique. Une aussi rapide conversion ne trompe personne. C’est une posture, sûrement pas une politique ! Car elle aboutit à quelques éparses mesures (piste cyclable, bus hybrides...), en elles-même louables, mais sur le fond dérisoires. D’autant qu’au moment où Mr Fournier prend enfin conscience de la pollution de l’air, il multiplie en période touristique les manifestations attirant des milliers de véhicules à moteur ( Musilac, UTMB...etc) . Non, l’ampleur et l’urgence des problèmes posés par la circulation automobile et la pollution de l’air dans cette vallée de Chamonix exigent un plan d’envergure (et mûrement réfléchi !). Michel Charlet, l’ancien maire, lui, s’était fixé un but : la piétonisation du centre-ville. Et ce but, il l’a atteint (du moins pour la rive droite de notre ville...). Seulement, c’était il y a vingt-cinq ans. Maintenant il faut aller plus loin...élargir notablement la réflexion...penser ce que deviendra la vallée de l’Arve dans 20 ans...proposer des investissements audacieux (creusement, par exemple, d’un parking sous le Grépon), se fixer des délais (par exemple 2035) pour imposer des voitures électriques - ou propres- à Chamonix, aux Praz, Argentières et au Tour, se demander si l’on peut enfin mettre en place un moyen de transport collectif non polluant (et efficace !) entre le Fayet et le haut de la vallée. Car la mission essentielle de toute politique à Chamonix, c’est de prémunir la population contre l’accroissement du trafic automobile et cette inexorable dégradation de la qualité de l’air. Mais pour ce faire, une démarche rigoureuse (osons même écrire « scientifique » !) s’avère indispensable. Elle nous permettra d’éviter bien des erreurs : par exemple ne pas aménager des parkings n’importe où, comme ce fut naguère le cas ! A cette fin, une équipe d’ingénieurs de haut niveau, de spécialistes dans le domaine de l’environnement, des transports, des infrastructures, des remontées mécaniques, des technologies modernes et non polluantes devra être réunie….elle sera chargée d’élaborer ce plan - à moyen et long terme - avec une vision moderne (futuriste si nécessaire!). Ce document, une fois conçu, sera soumis par référendum au vote des habitants de la vallée. S’il est approuvé, il permettra de donner un fil conducteur, une cohérence, à nos actions pour les années qui à venir. …….. Pour conclure, il s’agit de prévoir, d’anticiper, non de casser l’activité et le commerce à Chamonix. Par exemple, nous n’envisageons pas de supprimer l’UTBM, mais, en accord avec nos partenaires italiens et suisses, nous chercherons à en réduire un peu le nombre de participants... afin d’en améliorer le bilan carbone. Et puis ce type de manifestation, drainant d’un coup dans la vallée des milliers de véhicules à moteur, il faudrait plutôt le programmer sur des périodes creuses, ou à moitié creuses... histoire de ne pas provoquer la fuite de clientèles traditionnelles en quête, elles, de promenades tranquilles...et de montagnes silencieuses.


Il s’avère indispensable aussi de reprendre la lutte pour diminuer le passage incessant des poids lourds sous le tunnel (ou éviter, à tout le moins, qu’il n’augmente encore!). Cela suppose notamment de porter au niveau européen la question de la traversée des Alpes. L’avènement du LYON/ TURIN en offre l’occasion. Nous, ce n’est pas le pouvoir pour le pouvoir qui nous intéresse. C’est l’usage qui en est fait. Nous ne voulons plus qu’au moment où notre planète brûle, la capitale du ski et de l’alpinisme donne le mauvais exemple...et que l’on parle d’elle seulement pour son air pollué, ses encombrements automobiles, ses camions ! Cette vallée de Chamonix, il est urgent d’en modifier l’image... et surtout de la rendre vivable pour les générations futures.


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