Rapport d'analyse

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Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo


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Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo

Consultation de Sabrina Munaó Brazzaville, Août 2009



Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

Table des matières Liste des acronymes

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Résumé

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1. Contexte et justification

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2. Terminologie

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3. Approche conceptuelle et méthodologique

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4. Normes et pratiques sociales existantes vis-à-vis des PA

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a) Le travail dans les champs des Bantous : une nouvelle forme d’esclavage et de servitude b) Un accès extrêmement limité à la justice c) Le non-enregistrement à l’état civil et l’impossibilité de jouir des droits de citoyenneté à plein titre d) L’accès extrêmement limité aux structures sanitaires publiques e) L’accès extrêmement limité au système éducatif public

21 23 24 25 27

5. Résumé des normes et pratiques sociales existantes

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6. Axes d’intervention stratégique

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a ) Contribuer à l’amélioration de la condition économique et sociale des PA b) Promouvoir les droits de l’homme, afin de réduire les violations des droits et les abus envers les PA c) Encourager la participation des PA à la vie publique d) Augmenter le pourcentage d’enfants PA scolarisés, faciliter l’apprentissage et améliorer les relations avec les compagnons de classe et les enseignants Bantous e) Améliorer l’accès des PA aux structures sanitaires publiques f ) Diffuser et mettre en valeur la culture et les traditions des PA

33 34 36 36 38 38

7. Principes clés

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8. Recommandations générales

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Bibliographie

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Liste des acronymes AGR

:

Activités Génératrices de Revenus

AREC

:

Association pour la Réinsertion Economique des Congolais

BM

:

Banque Mondiale

CAP

:

Enquête sur les Connaissances, Attitudes et Pratiques

COOPI

:

Cooperazione Internazionale

DSRP

:

Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté

EDSC

:

Enquête Démographique et de Santé du Congo

FIPAC

:

Forum International des Peuples Autochtones d’Afrique Centrale

HELP

:

Hôpital Evangélique Le Pionnier

IEC

:

Information, Education et Communication

INADES

:

Institut Africain pour le Développement Economique et Social

IST

:

Infections Sexuellement Transmissibles

MEPSA

:

Ministère de l’Enseignement Primaire et Secondaire chargé de l’Alphabétisation

OIT

:

Organisation Internationale du Travail

ORA

:

Observer, Réfléchir, Agir

PA

:

Populations Autochtones

PNUD

:

Programme des Nations Unies pour le Développement

PRAEBASE :

Projet d’Appui à l’Education de Base

RCA

:

République Centrafricaine

RENAPAC

:

Réseau National des Peuples Autochtones du Congo

UNESCO

:

Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture

UNICEF

:

Fonds des Nations Unies pour l'Enfance

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Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

Résumé

L

es populations autochtones (PA) en République du Congo regroupent trois spécificités. Elles ne sont pas seulement une minorité ethnique, mais aussi autochtone et extrêmement vulnérable, à cause de la discrimination sociale, économique et politique à laquelle elles doivent faire face.

Elles ne jouissent pas pleinement des droits liés à la citoyenneté, reconnus par le préambule et les articles 7 et 8 de la Constitution (2002). En effet, il y est proscrit toute forme de discrimination, tout en affirmant l’égalité absolue de tous les citoyens devant la loi. Malheureusement, dans la réalité, ces principes d’universalité des droits, de non-discrimination et d’égalité ne sont pas appliqués aux PA. La mission de terrain effectuée par l’équipe de consultation pour l’élaboration de la stratégie nationale pour le changement des normes et pratiques sociales vis-à-vis des PA a permis de requalifier les dénis de droits fondamentaux. Les leaders PA ont souligné qu’en dépit des traitements cruels, inhumains et dégradants auxquels elles sont soumises, elles reçoivent une très faible protection de la part des autorités locales et des forces de l’ordre. La population dominante (les Bantous) les exploite comme main d’œuvre pratiquement non-payée dans les champs et les considère comme des êtres inférieurs. Cette situation est aggravée par le fait que les PA ne disposent que très rarement de documents personnels ; en l’occurrence les nouveau-nés ne sont pas enregistrés à l’état civil. Enfin, la discrimination se reflète aussi dans les rapports économiques et commerciaux: sur les marchés, les produits des PA ne sont pas évalués au même prix que ceux pourtant équivalents vendus par les Bantous. L’ensemble de ces facteurs a causé la chute des revenus des PA. La fragile condition économique qui en dérive et les préjugés culturels auxquels les PA sont exposées ne leur permettent pas d’accéder aux services sanitaires publics, ainsi qu’à l’éducation formelle. Les réunions communautaires ont permis également d’identifier les possibles solutions pour améliorer les conditions de vie des PA, autour des principaux axes stratégiques suivants : 1. 2. 3. 4.

Contribuer à l’amélioration de la condition économique et sociale des PA. Diffuser la culture des droits de l’homme, afin de réduire les violations des droits et les abus envers les PA. Encourager la participation des PA à la vie publique. Augmenter le pourcentage d’enfants PA scolarisés, faciliter l’apprentissage et améliorer les relations avec les compagnons de classe et les enseignants Bantous. 5. Améliorer l’accès des PA aux structures sanitaires publiques. 6. Diffuser et mettre en valeur la culture et les traditions des PA.

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1 - Contexte & justification

L

es « Pygmées(1) » ou « Peuple de la forêt » sont l’une des premières populations d’Afrique Noire. Ces populations sont encore présentes en République du Congo, en République Démocratique du Congo, en République Centrafricaine, au Cameroun, au Burundi et au Gabon. Elles vivent en profondeur dans la forêt et partagent un mode de vie semi-nomade et un système socioéconomique traditionnel basé sur la chasse et la cueillette des produits de la forêt. Leur société est traditionnellement organisée en campements qui rarement excèdent 60 personnes. Leurs maisons sont construites par les femmes avec des feuilles de différents arbres de la forêt ; elles ont la forme d’un igloo et s’appellent « huttes ». Ces peuples ont une organisation sociale, basée sur le respect réciproque et la parité entre les hommes et les femmes. Les familles sont monogames et chaque campement possède un système traditionnel de contrôle de naissance, pour garantir la « durabilité » et la survie du campement. Les principaux représentants de chaque communauté sont le chef de campement ; le chef-chasseur et le guérisseur traditionnel, qui utilise la pharmacopée traditionnelle pour soigner les malades. La pharmacopée est d’ailleurs très développée et a permis aux populations autochtones (PA) de survivre dans la forêt pendant des siècles. Normalement, dans chaque campement il est possible de trouver une ou plusieurs matrones accoucheuses, qui utilisent aussi la médecine traditionnelle en cas de complications pendant les accouchements. Le mode d’apprentissage et de transmission du savoir-être et savoir-faire traditionnel se fait principalement par imitation, excepté pour des transmissions de connaissances particulières comme la pharmacopée, par exemple, où il est possible de parler de relation entre maître et disciple(2). Les PA en République du Congo regroupent trois spécificités. Ils ne sont pas seulement une minorité ethnique mais aussi un peuple autochtone et un groupe extrêmement vulnérable, à cause de la discrimination sociale, économique et politique à laquelle ils doivent faire face. Ils ne jouissent pas de fait pleinement des droits liés à la citoyenneté, reconnus par le Préambule et les articles 7 et 8 de la Constitution de la République du Congo (2002), interdisant toute forme de discrimination et prônant l’égalité de tout citoyen devant la loi. L’égalité de tous est aussi affirmée dans plusieurs instru-

ments juridiques internationaux, notamment la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, qui promeut l’universalité des droits, la parité et l’égalité dans l’application et la jouissance de ces droits, et qui souligne dans son préambule que tous les individus naissent libres et égaux en dignité et droits. La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (1981), ratifiée par le Congo en 1982, à travers le préambule, ainsi que les articles 2 et 3, énonce la volonté des Etats africains d’éliminer toute forme de discrimination. Enfin, l’art. 28 de la Charte Africaine souligne le devoir de tout individu de respecter les autres, sans aucune discrimination. Malheureusement, dans la réalité, ces principes d’universalité, non-discrimination et égalité ne sont pas appliqués à tous. Tel est le cas des Populations Autochtones (PA) au Congo. La situation de vulnérabilité des PA au Congo est quotidiennement manifeste. En dépit des traitements cruels, inhumains et dégradants auxquels ils sont soumis, ils ne reçoivent qu’une très faible protection de la part des autorités locales et des forces de l’ordre. La population dominante, les Bantous, les exploite comme main d’œuvre pratiquement non-payée dans les champs et les considère comme des êtres inférieurs. En outre, les PA ne disposent que très rarement de documents personnels, puisque les nouveau-nés ne sont pas enregistrés à l’état civil. Ceci les empêche de participer à la vie publique et de jouir de la protection juridique. Il faut également souligner que leur fragile condition économique et les préjugés culturels auxquels ils sont exposés ne leur permettent pas d’accéder facilement aux centres de santé et hôpitaux publiques, ainsi qu’à l’éducation formelle. Par conséquent, le taux de mortalité infantile ainsi que le taux analphabétisme s’avèrent extrêmement élevés. La discrimination se reflète aussi dans les rapports économiques et commerciaux. Les produits des PA sur les marchés ne sont pas évalués au même prix que ceux équivalents vendus par les Bantous. Enfin, leur culture est rarement considérée comme une richesse extraordinaire du pays. Pourtant, leur tradition orale constitue une source d’expression populaire et traditionnelle à valeur exceptionnelle. Aujourd’hui le risque de voir disparaître cette tradition existe. Le mode de vie de ces populations a été profondément bouleversé par les changements qui se produisent actuellement dans la région. La raréfaction du gibier, causée par la déforestation et l’exode rural comptent parmi les principaux facteurs contri-

(1) - Voir Paragraphe 2 sur la Terminologie. (2) - Paulin PASCALE, Analyse de situation sous-régionale sur la problématique des « peuples autochtones » en Afrique Centrale, 2008.

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buant à augmenter le risque d’une disparition progressive de leurs traditions. En outre, l’exploitation minière, le déboisement et le défrichage intensif en vue de terrains agricoles, le braconnage visant notamment l’acquisition de pointes d’ivoire et l’implantation de villages éco-touristiques sont aussi parmi les causes de la disparition de l’habitat et l’augmentation de leur vulnérabilité(1). Par conséquent, elles sont extrêmement défavorisées par rapport à la majorité de la population congolaise (Bantous). Ce qui les expose à toute une série de contraintes et difficultés paraissant parfois insurmontables dans leur vécu quotidien. Cela implique aussi que toute intervention en faveur de cette population doit tenir compte de cette fragilité et de tous les enjeux liés. Quant à leur poids démographique en République du Congo, il est difficile d’avoir des données précises et fiables. Le Recensement Général de la Population et de l’Habitat de 1984 dénombrait plus de 20.000 individus, soit à l’époque 1,14% de la population congolaise(2). Or aujourd’hui, la majorité des rapports et documents examinés par la mission de consultation reporte l’estimation de 300.000 individus, environ 10% des habitants du Congo(3). Ces données ne veulent pas forcement dire que le nombre des PA a augmenté au cours des vingt dernières années. Très probablement cette différence dans les données est due à la méthode utilisée en 1984 pour le recensement. En ce qui concerne la répartition et l’appellation de cette population au Congo, certaines études dénombrent distinctement les « Baaka » ou « Mbendjele » au Nord, les « Twa » au Centre, et les « Babongo » au Sud .(4) Les régions de forte concentration de cette population sont les départements de la Lékoumou, du Niari au Sud, de la Likouala ainsi que de la Sangha au Nord et des Plateaux. Certains groupes ont choisi un mode de vie sédentaire, installés dans des campements situés en lisière des villages bantous. D’autres vivent toujours éloignés dans des forêts et en mode semi-nomade(5). Pour autant, même les groupes sédentarisés ne restent jamais stables dans le village pendant toute l’année, puisqu’ils se rendent en forêt pendant les différentes saisons de cueillette (saisons des champignons, des chenilles ou pour recueillir le miel).

de consultation (par exemple le village de Bene, à Gamboma dans les Plateaux ou le village de Ngombé Carrefour, dans la Sangha) ont déclaré avoir désormais perdu une bonne partie de leurs traditions et coutumes traditionnels. A titre d’exemple, la capacité de fabriquer les outils pour la chasse au filet. Par conséquent ils ne chassent plus, alors que la chasse était leur activité traditionnelle par excellence. Elle les caractérisait non seulement du point de vue culturel et anthropologique, mais aussi leur permettait d’avoir une alimentation assez équilibrée et riche en protéines. De nos jours, ils s’orientent plutôt vers des activités de tradition Bantoue, comme l’agriculture et l’élevage, pour lesquelles ils n’ont pas de compétences techniques. Par conséquent, le rendement et les profits restent très limités. En outre, ils abandonnent peu à peu leurs coutumes liées au mariage. Traditionnellement, les PA se mariaient et restaient fidèles à leur partenaire tout au long de leur vie et la société était monogame. Aujourd’hui, les hommes autochtones sont en train d’adopter la pratique de polygamie, qui est un trait assez caractéristique et fréquent de la société Bantou. Naturellement, ce changement engendre tout un ensemble de problèmes, notamment liés à la santé en général et à la santé sexuelle et reproductive en particulier. En revanche, tous les habitants des villages visités ont conservé, au cours du temps, leur identité et spécificité culturelles, qui s’expriment à travers une tradition orale riche de chants, contes, et danses, qui a permis aussi de préserver la langue autochtone. Cette tradition orale est transmise de parents à enfants et constitue une richesse inestimable, dont la sauvegarde s’avère indispensable pas seulement pour le bien-être et la solidité de l’identité culturelle et sociale des PA, mais aussi pour la préservation du patrimoine culturel de l’ensemble du peuple congolais et au final de toute l’humanité. A ce titre, en 2004, en République Centrafricaine, cette même culture appartenant au groupe autochtone Aka a été reconnue patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO.

Du point de vue de la culture traditionnelle, beaucoup de villages sédentaires parmi ceux visités au cours de la mission

(1) - Ibid. (2) - UNICEF, Analyse de la Situation des Enfants et des Femmes Autochtones au Congo, 2007. (3) - Voir, par exemple, Emmanuel BAYENI, Rapport de la Consultation sur le Développement d’une Politique Nationale en vue de l’Amélioration de la Situation de Protection des Droits des Enfants et des Femmes Autochtones, 2007. (4) - UNICEF, (n 4). (5) - RENAPAC (Réseau National des Peuples Autochtones du Congo), Rapport d’évaluation diagnostique, 2009.

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2 - Terminologie

I

l est important de commencer ce rapport avec une clarification sur la terminologie qui sera utilisée dans ce document. Le terme « Pygmée » dérive du grec « pygmaios » et signifie littéralement « haut comme une coudée ». A ce titre, le terme « pygmée » indique toute population de petite taille habitant la forêt de l’Afrique Centrale. On est enclin à penser que, à l’origine, le terme « Pygmée » ne portait ni une connotation péjorative ni méliorative ; sinon et simplement pour indiquer les habitants de la forêt, originairement de petite taille. Aujourd’hui, le terme « Pygmée » possède des connotations diverses selon les contextes. Dans certains pays, comme par exemple la République Centrafricaine, l’appellation « Pygmée » n’est pas perçue comme péjorative, mais au contraire elle est utilisée en contraste avec le mot «bambinga» qui dans le contexte centrafricain est considéré comme un insulte puisqu’ il signifie « sous-homme ». En revanche, au Congo, le terme « Pygmée » est considéré comme péjoratif et le projet de loi portant sur la promotion et la protection des droits des populations autochtones interdit formellement son utilisation. Toutefois, il faut signaler que les peuples autochtones du Congo utilisent sans réserve le mot « pygmée » et se définissent comme tels.

D’autres courants de recherche emploient l’expression « chasseurs et cueilleurs » ; mais, encore une fois, cela n’identifie pas un peuple en tant que tel mais plutôt ses principales activités économiques. La terminologie la plus correcte serait le nom du groupe d’appartenance de la population de référence : par exemple, dans la région de la Lobaye, en République Centrafricaine, les « Pygmées » appartiennent tous au groupe Aka. L’appellation la plus correcte est donc Aka ou Pygmées Aka. Au Congo, les « pygmées » présents sur le territoire national n’appartiennent pas tous au même groupe. Il faudrait ainsi distinguer systématiquement entre Baaka, Twa, etc… ; ce qui est impossible à faire dans un document général comme celui-ci, prenant en compte la situation de toute la République du Congo dans sa complexité. Par conséquent, ce rapport utilisera le terme « populations autochtones » (PA), pour s’aligner avec la culture et la sensibilité du pays.

Cette perception a poussé certainement les habitants du Congo à utiliser de préférence le mot « bambinga », ou le concept « peuples autochtones ». Le concept « peuples autochtones » qualifie « tous descendants de ceux qui habitaient dans un pays ou une région géographique à l'époque où des groupes de population de cultures ou d'origines ethniques différentes y sont arrivés et sont devenus par la suite prédominants, par la conquête, l'occupation, la colonisation ou d'autres moyens »(1). Cette expression n’indique donc aucun peuple de manière spécifique, ce qui peut créer une certaine confusion et incertitude surtout dans le contexte africain où tous les peuples se considèrent comme des autochtones, en opposition au « blanc colonisateur ».

(1) - Haut Commissariat aux Droits de l'Homme, Les droits des peuples autochtones, Fiche d'information No.9 (Rev.1).

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3. Approche conceptuelle et méthodologique

L

a consultation s’est déroulée en République du Congo (Brazzaville et mission de terrain) du 5 août au 11 septembre 2009 et a prévu plusieurs différentes étapes, à savoir :

1) Revue documentaire (5-10 août). 2) Mission de terrain dans les départements de la Likouala ; la Sangha et Les Plateaux (11-19 août). 3) Rencontres avec les Ministères concernés et les personnes ressources à Brazzaville (20-27 août). 4) Elaboration du rapport d’analyse diagnostique et planification stratégique (20-25 août). 5) Elaboration du plan d’action et du plan de suivi et évaluation (25-30 août). 6) Préparation de l’atelier de restitution et validation (25 août-8 septembre). 7) Atelier de restitution et validation (9-10 septembre). 8 ) Elaboration du rapport final de la consultation (111 septembre). Analyse de la documentation spécifique : au cours de la première semaine de mission, la consultante a analysé la documentation relative aux PA et à leurs problématiques, mise à disposition par le bureau de l’UNICEF à Brazzaville. Il s’agit notamment de rapports de consultation ou rapports de mission et de l’Analyse de situation sous-régionale sur la problématique des « peuples autochtones » en Afrique Centrale, produite sous la supervision de Mme. PASCALE. En outre, la consultante a pu révisiter certains documents concernant les PA en Afrique Centrale, collectés au cours de ses précédentes missions en Afrique (cf. bibliographie). L’analyse et l’étude de cette documentation ont permis à la consultante d’élaborer le cadre générale dans lequel les interventions futures seront mises en place et de tracer les causes et conséquences principales des problématiques auxquelles les PA doivent faire face dans l’ensemble du pays.

3) La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (1981). 4) Les Deux Pactes Internationaux relatifs aux Droits civils et Politiques et aux Droits Sociaux, Economiques et Culturels (1966). 5) La Convention relative aux Droits de l’Enfant- CDE (1989). 6) La Convention pour l’Elimination de Toute Forme de Discrimination Raciale-CEDR (1965). 7) La Convention Contre la Torture-CCT (1984). 8) La Convention 182 de l’OIT, portant sur l’interdiction des pires formes de travail des enfants (1999). 9) La Convention 105 de l’OIT, portant sur l’abolition du travail forcé (1957). La connaissance du cadre légal de référence a permis d’identifier les besoins en matière de plaidoyer auprès du gouvernement congolais pour compléter et améliorer ce cadre. En plus, les instruments légaux internationaux peuvent devenir dans l’ensemble de la stratégie un moyen puissant de lobbying sur le gouvernement pour qu’il respecte les engagements pris dans le domaine des droits humains et des libertés fondamentales. Ensuite, ces informations ont pu être complétées et approfondies au cours de la mission de terrain, qui a été réalisée pendant la deuxième semaine de mission. Missions de terrain dans les départements de la Likouala ; la Sangha et Les Plateaux (11-19 août). Mission de terrain à Impfondo, Département de la Likoulala (11-13 août 2009). La mission de consultation a visité les campements/villages PA de Tosangana, (quartier de Impfondo) ; Dongou ; Mabelo et Ngangania Brousse. Rencontres et entretiens avec :

En outre, la consultante a pu vérifier le cadre légal de référence, c’est-à-dire tous les instruments juridiques relatifs aux droits humains en général et aux droits des PA en particulier, adoptés au niveau national ou ratifiés au niveau régional et/ou international par la République du Congo. Il s’agit notamment de : 1) La Constitution de la République du Congo (2002). 2) La Déclaration Universelle des Droits de l’HommeDUDH (1948).

1) Les chefs et les leaders des campements/villages PA. 2) Les chefs de village Bantous. 3) Le Père Lucien Favre, Congrégation des Pères Spiritains. 4) Le responsable de l’organisation AREC. 5) Les leaders du RENAPAC (antenne d’Impfondo). 6) Les médecins de l’hôpital HELP (Hôpital Evangélique Le Pionnier) à Mongungui. 7) Le Président du Conseil Départemental de la Likouala.

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Mission de terrain à Ouesso, Département de La Sangha (14-17 août 2009). La mission de consultation a visité les villages/campements de Mbalouma, Ngoumbe Carrefour, Mokeko et Paris Village. Rencontres et entretiens avec : 1) Les chefs et les leaders des campements/villages PA. 2) Les PA accueillies à la léproserie. 3) Les femmes PA employées par les Sœurs de la Charité. 4) Les chefs de village Bantous. 5) Les Sœurs de la Charité. Mission de terrain à Gamboma, Département des Plateaux (18-19 août 2009). La mission de consultation a visité le village de Bené. Rencontres et entretiens avec : 1) Les chefs et les leaders du village PA. La Stratégie et la méthodologie employées tout au long de la mission de terrain ont été basées sur des rencontres communautaires avec les leaders et les chefs de village ou campements PA et des entretiens avec les personnes ressources dans la région. Les réunions communautaires ont respecté l’approche participative et ont été un forum de discussion et échange intéressant et enrichissant. La mission de consultation a sollicité la participation active de tous les participants et a surtout encouragé les PA à proposer leurs solutions pour changer les conditions de vie de leur population. L’objectif de toutes les réunions et entretiens sur le terrain n’était pas de recueillir des données statistiques ou de recenser les problèmes, puisque la consultante avait déjà examiné la documentation pertinente, mais plutôt de recenser les solutions proposées par les PA pour changer les normes et pratiques sociales existantes au Congo et finalement améliorer leurs conditions de vie. Cette méthode n’est pas statistique, ni exhaustive, il ne s’agit pas d’une analyse quantitative et structurée, mais plutôt d’une analyse qualitative.

Une fois les missions de terrain terminées, la consultante a eu l’opportunité de rencontrer et de s’entretenir avec les personnes ressources à Brazzaville, notamment : 1) M. BOUKA, Observatoire Congolais des Droits Humains (OCDH). 2) Mme. DE COUNE et M. BAYENI, Projet d’Appui à l’Etat de Droit (PAED). 3) M. MAVOUNGOU, Directeur Général des Droits Humains. 4) M. NDOUNDA-NDZOUMBA, Comité Local de Développement. 5) M. TOMBY, Directeur Général des Affaires Sociales. 6) M. TOTO, Coordonateur RENAPAC. 7) M. WASTELAIN, Union Européenne. Ces entretiens ont permis de compléter le cadre général du pays et le contexte spécifique des PA. En particulier, il est ressorti que les conditions de vie de la population du Congo en général, spécialement dans les zones rurales, sont difficiles, puisque la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté de 1 dollar US par jour(1). L'enlisement dans la mauvaise gouvernance et le manque de stratégie conséquent pour le développement économique et social ont fait inscrire le Congo, malgré la richesse et la diversité de ses ressources, à l'initiative de Pays Pauvre Très Endetté (PPTE). Par conséquent, il est vrai que ce ne sont pas que les PA qui vivent dans une situation de pauvreté, mais il est aussi incontestable que les PA vivent dans une condition de pauvreté extrême, qui empêche l’accès à toutes les structures étatiques et les expose à toute une série de difficultés qui seront analysées au cours de ce rapport. Néanmoins, la stratégie nationale pour le changement des normes et pratiques sociales vis-à-vis des PA doit prévoir, dans certains domaines, l’intervention conjointe et simultanée en faveur des PA et des Bantous (par exemple dans le domaine de l’enregistrement à l’état civil ; la scolarisation ; la prévention du VIH/SIDA, etc.). Le but final de la stratégie doit être la cohabitation sociale harmonieuse entre les deux populations et doit donc éviter de discriminer négativement les Bantous au bénéfice exclusif des PA, puisque cette attitude ne ferait que renforcer la ségrégation et la méfiance entre les deux groupes. En outre, la stratégie doit viser le développement d’une politique volontariste en faveur des PA (discrimination positive, obligation d’employer des PA dans les sociétés forestières,

(1) - Enquête démographique et de santé 2005, citée dans UNICEF, Consolidation des acquis d’accès aux services de base au sein des communautés Pygmées du département de la Sangha, 2006.

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Approche conceptuelle et méthodologique

accès privilégiés à la santé, etc.) pour en améliorer les conditions de vie, afin qu’ils puissent se rapporter aux Bantous de manière paritaire. Etant donné que la stratégie vise à changer les normes et pratiques sociales existantes vis-à-vis des PA, il est ici important de définir ce qu’on entend par « pratique » et « norme » sociale. Une « pratique » sociale désigne une façon de faire, une action (individuelle ou collective) socialement transmise ou envisagée dans un contexte social. Le terme fait l'objet de conceptualisations différentes, en fonction des diverses approches théoriques qui analysent ce phénomène. Dans le contexte des pratiques sociales vis-à-vis des PA au Congo, il s’agit d’une attitude discriminatoire de la part des Bantous envers les PA, qui se traduit en de comportements visant à dégrader et humilier la personne ciblée. Cette attitude repose sur la conviction des Bantous que les PA sont des êtres inférieurs et cette «mentalité» se transmet de génération en génération.

Une « norme » sociale est une règle de conduite dans une société ou un groupe social, notamment des manières d’agir. Les normes sociales définissent le domaine de l’action sociale en précisant ce que l’individu peut ou ne peut pas faire. Elles traduisent les valeurs et les idéaux dominants de la société ou du groupe. Une norme se crée quand il existe une pratique sociale qui se répète dans le temps. La pratique devient alors comme une «loi» coutumière (loi non écrite mais sur laquelle il y a un ample consensus social), qui s’enracine dans la société. Dans le contexte spécifique relatif aux Bantous et PA au Congo, par exemple, la pratique d’assujettir les PA au travail forcé dans les champs des Bantous est devenu une norme et les Bantous réclament ce qu’ils estiment être leurs droits légitimes sur leurs PA. Ils sont convaincus d’agir dans un cadre tout à fait légal.

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4. Normes et pratiques sociales existantes vis-à-vis des PA

L

es PA étant les habitants de la forêt, leur mode et rythme de vie, ainsi que toutes leurs activités traditionnelles, sont basés et centrés sur et dans la forêt. L’exploitation forestière abusive de la part des sociétés forestières et de l’Etat a causé la diminution des ressources issues de la forêt, tant animales que végétales. Ce qui a fait que les PA ne trouvent plus dans la forêt tous les moyens pour leur subsistance. Par conséquent, ils se sont déplacés pour s’approcher des villages des Bantous et rechercher sur leur marché les biens et les aliments nécessaires à leur survie. Aujourd’hui, certains campements PA suivent encore le mode de vie traditionnel et se rendent en forêt en respectant les saisons de chasse, pêche ou cueillette et en ayant une vie semi-nomade. Tandis que d’autres groupes sont devenus sédentaires et restent toujours dans le même campement, proche des villages Bantous. Ce changement d’habitat et de coutumes a amené les PA à devoir faire face à toute une série de problèmes socio-économiques, liés d’une part à la différence culturelle entre les PA et les Bantous et d’autre part à la perception que la majorité des Bantous a à l’égard des PA. Ils sont considérés comme des « sous-hommes » ou bien des animaux sauvages sortis de forêt, avec des capacités limitées par rapport aux Bantous. Les PA sont donc devenus proie facile, victimes de vexations de la part de la population majoritaire. Il n’est pas évident de présenter des données officielles sur les PA, dans tous les domaines. Il n’y a que très peu de statistiques officielles, au niveau national, comme au niveau international. Ce problème est encore aggravé par le fait que les enfants PA ne sont pas enregistrés à l’état civil au moment de la naissance. Néanmoins, d’après les observations sur le terrain, même si l’estimation est difficile à faire, on peut avancer que la majorité des PA vivent dans des conditions misérables et sont assujettis aux Bantous des villages voisins. Les problèmes les plus significatifs relevés au cours de la mission de consultation, et sans cesse soulignés par les leaders des PA, sont :

a) Le travail dans les champs des Bantous : une nouvelle forme d’esclavage et de servitude Auparavant, la forêt riche en animaux et en produits de cueillette, offrait aux PA tout pour subvenir à leurs besoins et rester indépendants. Les éventuels rapports de commerce avec les villageois étaient fondés sur une relation paritaire PA-Bantous et sur le besoin réciproque et complémentaire. Ils entretenaient des échanges commerciaux au bénéfice de chacune des parties. Les PA fournissaient les produits de la forêt issus de leurs activités traditionnelles, comme la cueillette (chenilles, miel, plantes médicinales, etc.) et de chasse (gibier). Les Bantous mettaient à disposition les produits champêtres, étant donné leurs compétences dans le domaine de l’agriculture, ainsi que des ustensiles, des objets forgés et de la poterie. En outre, les PA jouaient également un rôle fondamental comme guide pour que les populations Bantous aient un accès direct à la forêt. Les Bantous leur garantissaient « protection » contre les abus et mauvais traitements. Au fil du temps, cette relation de parité s’est malheureusement détériorée au détriment des PA, qui se sont retrouvés dans une situation de subordination et soumission à leur « maître » Bantou. La détérioration de la relation entre les deux populations est le résultat d’un long processus qui a commencé au moment où les PA sont sorties de la forêt pour se sédentariser en proximité des villages Bantous. Aujourd’hui les «maîtres» Bantous obligent les PA à travailler dans leurs champs toute la journée pour un maigre salaire, constitué de boissons alcoolisées, de cigarettes et parfois de quelques centaines de Francs CFA. Les mauvais traitements et le recours à la violence verbale et physique de la part des Bantous sont également récurrents. Cette attitude dominatrice trouve sa justification dans la supériorité numérique et la vision tronquée de la modernité des populations Bantous, qui, suite à la décolonisation(1), ont pu facilement prédominer sur le mode de vie traditionnelle des PA, basée sur la simplicité, les traditions, les ancêtres et la forêt. Cette dégradation dans la relation entre les deux populations reflète une attitude fortement discriminatoire envers les PA, due

(1) - Patrizio WARREN, Promoting The Rights Of Indigenous Children And Women: a stocktaking of UNICEF strategy and practice, 2008.

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à l’incompréhension de la part des Bantous de la culture des PA. Enfin, les Bantous n’ont aucun intérêt à perdre leur « position de supériorité », puisque les PA représentent une très bonne source de main d’œuvre pratiquement gratuite. Selon les données fournies par l’enquête CAP, les modes de rémunération sont très hybrides ou inexistants : 15% des garçons et 26% des filles interrogés ne reçoivent aucune rémunération pour le travail qu’ils font(1). C’est dans le Niari (23% chez garçons et 29% chez les filles) que cette proportion est la plus élevée(2). Dans la Likouala, au cours de la mission de consultation, les rencontres avec les leaders et les membres des campements ou villages des PA ont permis de vérifier qu’une journée de travail dans les champs des Bantous est payée environ 500 FCFA, ou avec des cigarettes ou du vin de palme ou de maïs, et que les menaces à l’intégrité physique des travailleurs sont constantes. Les PA n’ont pas non plus le droit de garder une partie des produits cultivés en tant que paiement «en nature». Leur manque d’autonomie, expose les PA, et en particulier les jeunes filles, à toutes sortes de trafic et d’exploitation possibles, y compris sexuelle. Enfin, beaucoup de PA témoignent que très souvent, les femmes PA sont enlevées et violées par les « maîtres » Bantous. Une autre grave conséquence directe de cette situation de servitude dans laquelle les PA travaillent est d’une part le renforcement de la relation « maître-esclave » et d’autre part la chute des revenus des PA. Les PA qui travaillent toute la journée dans le champ d’un Bantou rentrent à leur campement le soir sans argent (puisqu’ils n’ont pas été payés à la fin de la journée pour le travail au champ et ils ne reçoivent aucun salaire à la fin du mois) et aussi sans aucun produit de la forêt, étant donné qu’ils n’ont pas pu se rendre à la cueillette parce qu’ils étaient occupés avec le travail dans les champs des Bantous. Le résultat est que la famille n’a rien à manger ni aucun moyen financier pour s’approvisionner en d’autres biens essentiels sur les marchés locaux ou pour payer les frais médicaux ou scolaires. De nos jours les PA vivent dans une pauvreté croissante, qui se transmet de parent à enfant ; cycle de la pauvreté de laquelle les PA n’arrivent pas à sortir. En outre, les PA

sont souvent obligés par leur « maître » de se rendre en forêt pour des missions de chasse, au terme desquelles ils doivent ramener au « maître » le nombre de bêtes équivalent au nombre de cartouches fournies, sinon sous peine d’être contraints à rembourser le coût du manque à gagner(3). Les bantous se plaignent aussi du comportement des PA face au travail : ils évoquent des problèmes d’irrégularité et d’inconstance et ils n’attribuent pas cette attitude à la rémunération ou aux conditions de travail mais plutôt à un « problème de mentalité »(4). Enfin, dans certains villages, les PA sont employés au sein des compagnies forestières, mais une recherche conduite en janvier 1990 révèle que sur plus de 2.000 employés, seuls 31% étaient PA, dont les trois quarts ne jouissent que de contrats temporaires (de 3 à 6 mois), renouvelables(5). En 2009, dans le village Ngombé Carrefour, visité par la mission de consultation et utilisé en tant qu’exemple pour analyser cette problématique, sur environ 900 personnes employées dans la zone par la compagnie forestière IFO, seulement 12 sont des PA. Cela n’est pas dû à la politique générale de l’IFO mais plutôt au fait que les gens en charge de l’embauche des travailleurs et employés sont des Bantous qui préfèrent employer des membres de leur communauté et non des PA, qu’ils ne considèrent pas comme leurs pairs. Les PA demandent à travailler puisque cela les aiderait en partie à sortir de leur condition de pauvreté. Toutefois, la compagnie IFO mène des actions de soutien en faveur des PA, notamment la prise en charge sanitaire au niveau de l’hôpital de Ngombé, la construction de l’école pour les PA et la fourniture gratuite de bois pour construire leurs maisons. En revanche, en général, concernant la rémunération, les salaires offerts par les sociétés forestières sont plutôt modestes et caractérisés par des retards récurrents de paiement. En outre, très souvent, les « maîtres » Bantous s’accaparent une partie du salaire de « leurs Pygmées » et cette « contribution forcée » peut arriver jusqu’à 50% du salaire. Parfois les Bantous justifient cette pratique de travail forcé et d’appropriation de tous leurs revenus, en affirmant que le travail fourni par « leurs Pygmées » n’est que la contrepartie de la protection qu’ils leur garantissent, ou bien c’est la seule forme possible de paiement d’une dette que

(1) - Projet de Prévention du VIH/SIDA chez les Peuples Autochtones du Congo, Enquête sur les Connaissances, Attitudes et Pratiques (CAP) des Peuples Autochtones en Matière de Prévention du VIH/SIDA et leur Accès aux Services Sociaux de Base, Rapport d’Analyse des Résultats, 2007. (2) - Ibid. (3) - UNICEF, (n 3). (4) - Paulin PASCALE, (n 2). (5) - UNICEF, (n 3).

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Normes et pratiques sociales existantes vis-à-vis des PA

les PA ont contractée auprès de leur « maitre »(1). Les Bantous se montrent fiers de cette avantageuse situation et ils n’hésitent pas à présenter les PA qui travaillent pour eux comme « leurs Pygmées ». Ces déplorables conditions de travail laissent les PA chaque jour plus démunis et incapables de garantir à leurs familles et à leurs communautés des conditions de vie qui respectent la dignité humaine. Ces conditions de travail peuvent être classées, selon l’art. 16 de la Convention Contre la Torture et d’Autres Traitement Cruels, Inhumains et Dégradants, ratifiée par la République du Congo le 29/8/2003, justement comme des traitements inhumains et dégradants, contraires à la dignité humaine, principe fondamental de la communauté internationale. En outre, ce genre de traitements est strictement interdit par la loi suprême de la République du Congo (art. 9 de la Constitution). Au niveau régional, la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples interdit tout traitement inhumain et dégradant ainsi que toute forme d’esclavage (art.5). En outre, l’art. 15 de la même Charte énonce que « toute personne a droit de travailler dans des conditions équitables et satisfaisantes et de recevoir un salaire égal pour un travail égal ». Enfin, la République du Congo a ratifié de nombreux instruments internationaux interdisant ce genre de traitements et toute autre forme de travail forcé ou d’esclavage, à savoir : la Convention 182 de l’OIT concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (ratifiée par la République du Congo en 2002) ; la Convention 105 de l’OIT concernant l’abolition du travail forcé (ratifiée en 1999) ; le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (arts. 7 et 8) et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (art. 7), ratifiés par le Congo en 1984. Un autre problème pressant soulevé par tous les PA rencontrés au cours de la mission de consultation, est la question foncière. Les PA réclament leur terre et le droit de l’exploiter, notamment de la cultiver pour pouvoir atteindre un niveau de vie aussi élevé que celui des Bantous. Actuellement, les PA sont dans l’impossibilité d’acheter une parcelle, étant donné qu’un terrain coûte environ entre 50.000 et 300.000 FCFA. Le Conseil Départemental, chargé du développement économique et social lié à la gestion du territoire de la Likouala veut prendre

une délibération (nouvelle loi foncière) en septembre 2009 ou au plus tard en février 2010 pour régler par la loi cette question. Le Président du Conseil souhaite la légalisation des titres fonciers pour les Bantous et les PA au même titre et la reconnaissance légale du droit des deux groupes à acquérir un titre foncier. En outre, par cette délibération, le Conseil veut interdire le travail forcé des PA, et imposer l’introduction de contrats réguliers, avec des salaires réguliers. Enfin, le Conseil souhaite donner une protection légale aux PA et Bantous pour accéder aux terres qui n’ont pas de propriétaire, pour qu’ils puissent les cultiver. Le Conseil envisage également la possibilité de faire une discrimination positive dans l’achat des titres fonciers par les PA, mais dans un cadre légal. Si les PA ne peuvent pas payer avec l’argent, vue leur condition, alors ils peuvent payer en nature, avec les produits qu’ils récoltent dans la forêt. S’ils n’ont aucune possibilité d’acheter un titre foncier, alors ils doivent avoir le droit d’utiliser et d’exploiter la terre sur laquelle ils vivent et travaillent, comme prévu aussi par les arts. 33 et 34 de l’avant-projet de loi portant protection et promotion des droits des populations autochtones, présentement à l’étude auprès de la Cour Suprême pour vérification de la constitutionalité. Le manque de ressources économiques et financières est une des préoccupations majeures des PA : au cours de la mission de consultation, un chef de village PA à Ngombé, dans la Sangha, a souligné que « la force de toute personne c’est l’argent ». Ce qui veut dire que ce manque de ressources est à la base de la majorité d’autres problèmes auxquels les PA sont confrontés. b) Un accès extrêmement limité à la justice : La condition d’indigence des PA leur empêche l’accès aux tribunaux et annule toute velléité d’être assisté par un avocat quand ils veulent dénoncer les abus subis. Cela est une flagrante violation du droit au procès équitable et au principe d’égalité devant la loi, qui interdisent toute discrimination dans l’accès à la justice. La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples garantit le droit d’accès à la justice et au procès équitable à l’art. 7, qui reflète partiellement l’art. 14 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques. En outre, le Pacte reconnait l’égalité de tout individu devant la loi sans aucune discrimination et une égale protection devant la loi et impose aux Etats parties de créer un cadre légal qui interdise toute discrimination et garantisse à toutes les personnes

(1) - Il et important de souligner que quand un PP contracte un prêt auprès d’un Bantou c’est systématiquement à un taux d’intérêt énorme de l’ordre de 30 à 50%, alors que celui imposé aux Bantous ne dépasse 30% (Source : UNICEF, Analyse de la Situation des Enfants et des Femmes Autochtones au Congo, 2007).

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une protection égale et efficace contre la discrimination (art. 26). La Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, ratifiée par la République du Congo le 10/8/1988, impose l’élimination de toute forme de discrimination raciale et demande aux Etats parties de garantir le droit de chacun à l'égalité devant la loi (art. 5). Enfin, les Etats doivent assurer à tout individu des recours effectifs devant les tribunaux nationaux, sans aucune distinction (art. 6). L’impossibilité pour les PA de faire valoir leurs droits devant les instances juridiques nationales comme internationales fait ainsi que les violences dont ils sont victimes demeurent impunies. En outre, les PA ne connaissent ni leurs droits, ni les principaux instruments nationaux et internationaux qui les protègent, ni les mécanismes de protection existants, auprès desquels ils pourraient faire valoir leurs droits et libertés. Enfin, l’accès à la justice est ultérieurement limité par le fait que la quasi-totalité des PA est dépourvue de pièce d’identité, conditio sine qua non pour la pleine jouissance des droits de citoyenneté. c) Le non-enregistrement à l’état civil et l’impossibilité de jouir des droits de citoyenneté à plein titre : Le droit au nom et à la nationalité est reconnu depuis longtemps dans la communauté internationale en général et au Congo en particulier, en référence au cadre légal existant (cf art. 13 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et art. 24 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques). L’enregistrement dès la naissance d’un enfant revêt une importance cruciale dans sa vie, puisque cette première étape est le point de départ de la relation entre l’individu et l’Etat. C’est la reconnaissance de l’existence de l’enfant et l’acceptation de la responsabilité de l’Etat d’assurer que l’enfant jouira de ses droits pendant toute sa vie. La Convention relative aux Droits de l'Enfant, que la République du Congo a ratifiée le 13/11/1993, énonce l’égalité de tout enfant sans discrimination aucune (art.2) et affirme que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale pour toute action et toutes institutions étatiques (art.3). Enfin, la Convention impose l’enregistrement de tout enfant dès sa naissance, ainsi que le droit au nom et le droit d'acquérir une nationalité (art. 7). Le même droit est réaffirmé par l’art. 24 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Néanmoins, en dépit de ce cadre légal, très rarement les

PA enregistrent leurs enfants à l’état civil. Ce qui les empêche par la suite d’avoir un acte de naissance, une carte d’identité et une carte d’électeur. Le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation, organe national chargé de l’enregistrement à l’état civil, souligne que les causes de cette délétère pratique sont à rechercher d’abord dans la non-application de la loi N° 073/84 du 17/10/1984 et du décret 2001-529 du 31/10/2001 sur la gratuité de l’inscription à l’état civil, dans le manque du budget de l’Etat, dans les faibles capacités et les dysfonctionnements structurels des services d’état civil et dans la pénurie des registres(1). En outre, les parents PA ignorent l’importance de l’enregistrement à l’état civil et les procédures à suivre pour obtenir l’octroi de l’acte de naissance. L’attitude hostile des autorités publiques face aux PA, qui leur demandent, entre autre, de payer pour l’octroi de l’acte de naissance, alors que ce service en principe serait gratuit, est aussi un facteur extrêmement décourageant. Enfin, les femmes PA accouchent rarement à l’hôpital, d’une part puisqu’elles sont mal accueillies ou pas du tout acceptées et d’autre part parce que souvent elles préfèrent accoucher dans leur milieu, à l’aide de la matrone accoucheuse traditionnelle. Quand elles accouchent dans les structures publiques, souvent elles paient les frais pour l’octroi du bulletin de naissance (qui coûte 1000 FCFA), pour pouvoir obtenir ensuite l’acte de naissance gratuitement, si l’enfant est enregistré dans un délai légal d’un (1) mois. Néanmoins, très rarement le bulletin de naissance se traduit effectivement en acte de naissance, à cause de la négligence des parents PA. Si l’enfant n’est pas enregistré dans un délai d’un (1) mois, l’octroi de l’acte de naissance n’est plus automatique. Le processus d’enregistrement tardif devient beaucoup plus long et complexe. Les différentes étapes sont articulées comme suit : 1) pré-enregistrement : identification, des enfants qui ne sont pas enregistrés et remplissage de la fiche de renseignements. 2) transcription des fiches dans les registres de réquisition et envoi au tribunal. 3) le tribunal signe la réquisition. 4) la réquisition est envoyée au sous-préfet pour signature. 5) la réquisition est transcrite dans les registres d’actes de naissance. 6) l’acte de naissance est signé et remis au bénéficiaire.

Ce processus peut s’avérer très long et dispendieux. Ce qui

(1) - Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation, Talking Points on meeting between the Minister and UNICEF, 2007.

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Normes et pratiques sociales existantes vis-à-vis des PA

frustre et décourage les rares parents PA qui se décident à l’entamer. En outre, l’incapacité des PA de parler français, de se rapporter aux autorités publiques et de remplir tous les formulaires nécessaires, sont autant de conditions qui les rendent incapables d’achever ce processus s’ils ne sont pas accompagnés jusqu’à l’aboutissement de toute la procédure. Enfin, l’éloignement des structures d’état civil joue aussi un rôle important dans le non-enregistrement des enfants PA à l’état civil. L’ensemble de ces conditions défavorables a pour conséquence que le nombre d’enfants et d’adultes PA ayant un acte de naissance reste très limité. La difficulté de recueillir des données précises et fiables se fait ressentir aussi dans ce domaine. La mission de consultation a retrouvé des estimations statistiques parfois discordantes : l’UNICEF estime que seuls 14,3% des adolescents PA sont inscrits à l’état civil(1), alors que RENAPAC rapporte que plus de 50% d’enfants autochtones n’ont pas d’acte de naissance, contre 19 % sur la population totale(2). L’enquête CAP montre que seulement 13% d’adolescents et 16% d’adolescentes interrogés ont déclaré avoir un acte de naissance(3). L’UNICEF rapporte en outre que, suite à ses interventions en collaboration avec ses partenaires, en juin 2009, certains progrès ont été enregistrés, à savoir la sensibilisation des communautés PA sur l’importance de l’enregistrement, la formation de 81 auxiliaires d’état civil, l’identification de 4.676 enfants, l’établissement de 3.517 réquisitions, la signature de 2.160 réquisitions et la signature de 400 actes de naissance dans le Département de la Likouala(4). Néanmoins, l’UNICEF remarque aussi une différence entre le nombre de réquisitions signées et le nombre d’actes de naissance, soit respectivement 61% (2160/3517) et 15% (400/2620)(5). De toute manière, ces données révèlent une vérité incontestable: la participation à la vie publique, tant au niveau local que national, demeure un privilège inaccessible pour les PA. Cela signifie que les chefs de villages et de campements PA ne participent pas à la prise de décisions qui concernent les affaires économiques, sociales et politiques de leur vie quotidienne. Les rares occasions pendant lesquelles les PA participent à la vie publique (vote pour les élections présidentielles) ne constituent aucunement une participation informée et consciente de leurs droits et de-

voirs et de l’importance de ce qu’ils sont en train de faire. Au cours de la mission de consultation, presque tous les PA en âge de voter interviewés ont déclaré avoir voté mais ils se sont plaints de n’avoir rien reçu pour ce « service », à démonstration de leur méconnaissance des droits civils et politiques. Alors que le droit/devoir de vote est un des principaux et plus importants acquis de tout Etat démocratique et Etat de droit. L’art. 13 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples ainsi que l’art. 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques reconnaissent et protègent le droit de tout citoyen de participer librement à la direction des affaires publiques dans son pays. Néanmoins, la participation des PA à la vie publique sera une réalité seulement quand ils pourront effectivement jouir des droits de citoyenneté, obtenir l’octroi des documents personnels et pourront entamer des procédures judiciaires sans être assujettis aux inéquitables traitements de justice des villageois et encore quand l’accès à l’éducation ne constituera plus un moyen de ségrégation. d) L’accès extrêmement limité aux structures sanitaires publiques Ici, comme dans tous les domaines, il est très difficile d’avoir des statistiques complètes et fiables. La première Enquête Démographique et de Santé du Congo (EDSC, 2005), n’a pas collecté ni analysé les données relatives aux PA. En attendant que la deuxième EDSC, prévue pour 2010 remplisse ce vide, la mission de consultation a essayé de vérifier le niveau d’accès des PA aux structures sanitaires publiques et d’en identifier les causes et conséquences. L’accès des PA aux structures sanitaires publiques, comme pour toute autre structure étatique, demeure extrêmement difficile. Cela est dû encore une fois à l’incapacité des PA de payer les prestations médicales et les médicaments ainsi qu’à la discrimination à laquelle ils sont soumis par les agents de santé ou autre personnel sanitaire. Les PA témoignent que si elles ne sont pas repoussées à l’entrée du centre de santé, elles doivent attendre pendant de longues heures car les Bantous sont soignés avant eux. Par conséquent, l’enquête CAP a enregistré qu’en cas de maladie, seuls 9,7% d’hommes, 19,4% de femmes et 13,4 d’adolescents ont recours à un centre de santé(6). Il est en outre important d’ajouter que les PA n’ont pas

(1) - UNICEF, (n 3). (2) - RENAPAC (n 7). (3) - Projet de Prévention du VIH/SIDA, (n 10). (4) - Jean Bruno MALANDA (Consultant UNICEF), Rapport Campagne d’Enregistrement Tardif des Naissances en Milieu Autochtone, 2009. (5) - Ibid. (6) - Projet de Prévention du VIH/SIDA (n 10).

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Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

confiance dans la médecine moderne. Ils préfèrent plutôt s’appuyer sur leur pharmacopée traditionnelle. Dans chaque campement un guérisseur et une ou plusieurs femmes accoucheuses, détenteurs du savoir de la pharmacopée, sont présents. Le grave problème est que ces connaissances sur la pharmacopée traditionnelle sont en train de disparaitre puisqu’elles sont de moins en moins transmises de génération en génération. Les PA ne sont pas en mesure d’en expliquer les raisons. Enfin, une autre cause du faible accès des PA aux centres de santé ou hôpitaux publiques est l’éloignement des villages ou campements PA, qui parfois sont reculés dans la forêt. Par conséquent, quand les PA ne peuvent pas soigner leurs malades avec la pharmacopée traditionnelle, le plus souvent ils se rendent aux centres sanitaires gérés par les Missions Catholiques ou parfois aux hôpitaux évangéliques comme c’est le cas à Mongungui (village proche d’Impfondo, dans la Likouala). L’Hôpital Evangélique Le Pionnier (HELP) les accueille sans discrimination et les soins peuvent être payés en nature (produits de la forêt). L’hôpital reçoit en moyenne 15 PA (Baaka). Le grave problème est que très souvent ils se rendent dans ce genre de structure quand la maladie ou l’infection est déjà à un état très avancé. Il devient donc très difficile de les soigner à ce stade, ce qui cause la mort de la majorité des patients à quelques heures de leur arrivée dans la structure. Les données statistiques occasionnelles montrent que ces populations enregistrent un taux d’infection de pian égal à 30%, un taux de mortalité d’environ 27%(1), un taux de mortalité infanto-juvénile supérieur à la moyenne nationale (alors qu’il est de 117 pour mille au Congo, il est probable qu’il soit supérieur à 250 pour mille pour les enfants PA)(2) et elles souffrent en outre de diarrhées récurrentes, de lèpre, de paludisme(3) (seuls 22% de chefs de ménage et 19% de femmes en âge de procréer, 15% d’adolescents et 19% d’adolescentes ont déclaré avoir une moustiquaire pour prévenir le paludisme ). Le taux de malnutrition chez les enfants PA est supérieur à 40% alors que le taux moyen national des enfants congolais de moins de 5 ans qui souffrent de malnutrition chronique est établi autour de 26%(4) . Cette situation est contraire aux engagements pris par le gouvernement au moment de la ratification de la

Convention relative aux Droits de l’Enfant (art. 6), ainsi que le droit au meilleur état de santé possible et de bénéficier de services médicaux nécessaire à son bien-être (art. 24). A Ouesso, dans le Département de la Sangha, les PA affectées par la lèpre sont majoritairement assistées par les Sœurs de la Charité. Elles soulignent la difficulté de s’occuper des PA malades, puisqu’ils n’adoptent pas facilement les bonnes pratiques « modernes » (différentes de leur culture traditionnelle) et donc tout le processus d’accompagnement dans la maladie devient plus compliqué. Par exemple, les PA n’utilisent pas le savon : si les sœurs leur en donnent, ils le vendent. La diffusion de certaines autres maladies, comme les vers intestinaux, est facilitée par le très faible accès à l’eau potable et par l’impossibilité d’acheter les médicaments adéquats. Les PA consomment en majorité l’eau de rivière (qui très souvent est stagnante) et de source (99% des populations concernées par l’enquête CAP )(5). En ce qui concerne les campagnes de vaccination (PEV), les PA y participent de manière volontaire. Mais, souvent les agents de santé ne les informent pas sur l’importance de la vaccination, la procédure et les possibles effets collatéraux. En effet, les parents PA refusent de faire vacciner leurs enfants parce qu’ils ont peur des effets secondaires (par exemple, la fièvre). Les données disponibles montrent que la couverture vaccinale en milieu PA est largement au dessous de celle du reste de la population(6). En outre, les PA ne jouissent pas de soins pré et post natals, qui revêtent d’ailleurs une importance capitale pour le bien-être de la mère et de l’enfant. A peine 16% des femmes en âge de procréer et 21% des adolescentes ont profité de la consultation prénatale durant leur dernière grossesse. En outre, seulement 25,8% et 22,2% des femmes PA accouchent à la maternité, tandis que la grande majorité reste en forêt et accouche avec l’aide des accoucheuses du campement ou du village (70% des femmes et 72,2% d’adolescents) .

En ce qui concerne le VIH/SIDA, cette maladie n’est pas très

(1) - UNICEF, (n 3). (2) - RENAPAC (n 7). (3) - Projet de Prévention du VIH/SIDA, (n 10). (4) - RENAPAC (n 7) et voir aussi Directeur Général de l’Action Sociale et de la Famille, Rapport de l’Atelier de Validation du Plan d’Action National, Brazzaville 15-17 juillet 2008. (5) - Projet de Prévention du VIH/SIDA (n 10). (6) - Directeur Général de l’Action Sociale et de la Famille, Rapport de l’Atelier de Validation du Plan d’Action National, Brazzaville 15-17 juillet 2008.

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Normes et pratiques sociales existantes vis-à-vis des PA

connue en milieu PA, mais encore, les données sont partiellement discordantes : l’UNICEF met en évidence que 44% des adolescents autochtones déclarent n’avoir jamais entendu parler du VIH/SIDA et seuls 12,6% des adolescentes PA croient réellement en l’existence du SIDA(1). L’enquête CAP, par contre, rapporte que 56% des adolescents interrogés ont entendu parler de la maladie (60% garçons et 52% filles) ; que seulement 27% ont une connaissance de la transmission du VIH/SIDA de la mère à l’enfant et que ce niveau de connaissance est davantage faible chez les adolescents (5% parmi les garçons et 17% parmi les filles)(2). Quant au préservatif, son existence est fort peu connue, puisque 69,4% des adolescentes autochtones et 51,7% de leurs congénères masculins déclarent n’avoir jamais vu de préservatif de leur vie(3). Au niveau des pratiques, la fidélité n’est désormais plus la norme chez les communautés autochtones et la perception des comportements à risque tels que la multiplicité des partenaires, le lévirat, le sororat et la sexualité précoce sont assez répandus(4). Pourtant, cette maladie ne représente pas une priorité en milieu PA (taux de prévalence estimé à environ 4,2% )(5), comparée à d’autres maladies endémiques dans le milieu PA (cas de la lèpre ou du pian). La mission de consultation a recommandé davantage de prévention pour éviter la diffusion de cette maladie d’autant que les femmes PA subissent des violences sexuelles par les Bantous et que la famille nucléaire et la monogamie disparaissent peu à peu pour donner place à la polygamie, plus répandue chez les Bantous. En milieu PA le manque de connaissances relatives au VIH/SIDA est dû au fait que toutes les questions liées à la sexualité restent un tabou ; ce qui rend aussi plus difficile la dénonciation et le traitement sanitaire et psychologique des violences sexuelles. Enfin, ce tabou associé à la sexualité empêche la transmission des connaissances et des bonnes pratiques de parent à enfant. En fait, 73,4% des adolescents recensés lors de l’enquête CAP ont déclaré ne pas entretenir de dialogue avec leurs parents autour du thème de la vie sexuelle(6). Le VIH/SIDA n’est pas le seul danger associé à la sexualité : il y a toute une série d’infections sexuellement transmissible (IST) qui ne sont pas très connues ni soignées en milieu PA, en raison du caractère « honteux » de la maladie et la difficulté d’en parler. Par ailleurs, l’enquête CAP montre que seulement 33% d’adolescents (39% garçons, 28% filles) ont entendu parler des IST(7).

L’incapacité de parler des IST, y compris le VIH/SIDA, peut devenir une des causes de diffusion des maladies, d’autant qu’elles ne sont pas « traditionnellement » connues et donc leur pharmacopée ne suffit pas pour les soigner. La Constitution souligne à l’art. 30 que « l’Etat est garant de la santé publique » ; reste que certaines couches de la population comme les PA en sont exclues. Enfin, l’alcoolisme est désormais une plaie en milieu PA. L’état d’ivresse les empêche de travailler et les rares PA qui réussissent à obtenir un travail au sein des compagnies forestières sont renvoyés à cause des retards ou d’autres fautes lourdes sur le lieu de travail. En outre, l’alcool les rend plus agressifs et inaptes au travail de groupe. En particulier, dans le village de Bené, à Gamboma, les femmes rencontrées au cours de la mission de consultation ont exprimé leur besoin de constituer un groupement composé exclusivement de femmes pour cultiver la terre. Leurs maris ne sont plus en mesure de travailler de manière efficace pendant de longues journées, du fait qu’ils sont souvent ivres. e) L’accès extrêmement limité au système éducatif public Le droit à l’éducation et la gratuité de l’enseignement publique sont garantis par l’art. 23 de la Constitution. Mais, dans la pratique, l’accès à l’éducation n’est pas garanti de manière équitable. Ceux qui souffrent le plus du non-respect de cette importante disposition de la Constitution sont les PA. Les données concernant la scolarisation des enfants PA sont discordantes, incomplètes et pas suffisamment fiables. Alors que le taux de scolarisation net primaire en 2006 était de 54%, seuls 26,8% des jeunes PA était scolarisés au niveau primaire(8). D’autres données montrent que 65 % des adolescents PA de 12 à 15 ans ne sont pas scolarisés, comparés à 39 % de la population juvénile congolaise. Le Projet d’Appui à l’Education de Base (PRAEBASE) mis en place par le Ministère de l’Enseignement Primaire et Secondaire chargé de l’Alphabétisation (MEPSA) avec l’aide de la Banque Mondiale (BM) a effectué une collecte d’informations multisectorielles de novembre 2005 à avril

(1) - Ibid. (2) - Ibid. (3) - UNICEF, (n 3). (4) - Projet de Prévention du VIH/SIDA, (n 10). (5) - Ibid. (6) - UNICEF, (n 3). (7) - Projet de Prévention du VIH/SIDA, (n 10). (8) - UNICEF, (n 3).

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2006, dans 45 circonscriptions scolaires sur l’ensemble des 111 circonscriptions présentes dans le pays. En décembre 2006, ce travail a permis d’identifier plus de 3.500 enfants PA en cours de scolarisation, soit 69% des données recueillies(1). Dans certaines écoles, les effectifs d’enfants PA atteignent jusqu’à 20%(2). Dans le département de la Likouala, 340 enfants PA ont été identifiés parmi 1.597 élèves. Le département de la Sangha comptait alors 435 enfants PA en situation de scolarisation parmi 1.016 élèves bantous et 7 enseignants PA bénévoles. Dans le département des Plateaux on dénombrait 477 enfants PA à l’école publique parmi 3.091 élèves bantous. 292 enfants en cours de scolarisation dans le département du Niari. Dans le département de la Lékoumou plus de 9.000 enfants Bantous et PA fréquentant les mêmes écoles ont bénéficié du programme d’assistance de l’IPHD(3). Cette collecte d’information met aussi en évidence le fait que les enfants PA sont plus nombreux au cycle d’éveil. Au cycle de fixation, les redoublements découragent les enfants PA qui par la suite abandonnent l’école. La majorité des enfants scolarisés sont donc dans les classes du CP1 au CE2, contre un fort taux d’abandon au niveau des classes de cours moyens. En 2007, l’enquête CAP rapporte que 35% des adolescents (40% garçons et 29% les filles) ont déclaré aller à l’école, mais seulement 3% de garçons et 1% de filles parmi les adolescents avaient achevé le cycle primaire au moment de l’enquête(4) . Les proportions varient selon les régions : les plus importantes sont observées dans la Cuvette-ouest (84% pour les garçons et 76% chez les filles) et dans la Sangha (52% pour les garçons et 39% chez les filles). La scolarisation des enfants autochtones dans le Niari présente un taux égal à 11%(5). En 2008, l’UNICEF, avec ses partenaires, a pu garantir l’accès à l’éducation de base à 2.461 élèves PA, dont 1.600 dans les écoles ORA de la Likouala (14 écoles) et de la Sangha (4 écoles), 120 à l’école de Béné (Gamboma) et 741 dans la Lékoumou(6). Les données recueillies, au 15 octobre 2008 par Père Lucien Favre, de la congrégation des Pères Spiritains, qui travaille à l’amélioration des conditions de vie des PA dans la Likouala, montrent qu’il y a 14 écoles de préscolarisation fonctionnelles (écoles préparatoires à la scolarisation), pour un effectif total de 1.026 élèves PA, dont 427 filles et 599 garçons. Les écoles de préscolarisation sont

des structures scolaires soutenues par l’Eglise Catholique et l’UNICEF, où les enfants PA suivent des cours durant deux ans pour se préparer à rentrer dans le système scolaire formel. Très souvent, les enseignants sont des PA, formés à la méthode ORA (Observer, Réfléchir, Agir). La méthode ORA a été conçue au Cameroun expressément pour les enfants PA, pour les aider depuis la petite enfance dans l’apprentissage scolaire. Cette méthode se base sur des images du vécu quotidien des enfants PA (par exemple, des images liées à la forêt ou aux activités traditionnelles de leurs parents) qui sont après traduites en mots par les enfants, en passant d’abord par leur langue autochtone et ensuite en français. Dans le département de la Likouala, on compte déjà 19 enseignants formés, dont 9 PA (la majorité d’entre eux a été formée à Belemboké, en République Centrafricaine, puisque le village a une expérience de trente ans dans l’éducation des enfants PA). Le problème est que ces enseignants ne sont pas titulaires et donc non compris dans les effectifs de l’Etat. Leur statut est celui d’« animateur », pris en charge par les parents des élèves. La prise en charge de l’animateur reste une des difficultés majeures, vue la pauvreté du milieu PA. L’UNICEF se propose de prendre en charge deux semestres pour l’année scolaire 2009-2010, mais cette intervention ne peut pas suffire et ne garantit pas la durabilité de l’éducation des enfants PA. Les principales causes de faible scolarisation des PA dans les structures scolaires publiques sont à rechercher dans l’absence ou éloignement des écoles des campements ou villages PA, dans le coût élevé des frais d’écolage, dans la discrimination et l’hostilité que les enfants PA subissent à l’école. Ils sont souvent victimes de mauvais traitements et de violences, discriminés et tabassés par les compagnons de classe ou des enseignants Bantous. Par conséquent, les parents PA ont des difficultés à accepter que leurs enfants aillent à l’école avec des enfants Bantous ou/et avec un enseignant Bantou. Ils craignent la discrimination, les mauvais traitements et l’humiliation. Au cours de la mission de consultation, les PA ont déclaré pouvoir accepter des enseignants Bantous, mais ils proposent de former davantage des enseignants PA.

Enfin, le taux élevé d’abandon est aussi dû à une partielle

(1) - Ibid. (2) - Ministère de l’Enseignement Primaire Et Secondaire Charge de l’alphabétisation, Projet d’appui à l’Education de Base (PRAEBASE), Compte Rendu de l’Atelier National de Validation des Données et Expériences Départementales de Scolarisation des Enfants Pygmées, 2006. (3) - Ibid. (4) - Projet de Prévention du VIH/SIDA, (n 10). (5) - Ibid. (6) - UNICEF, (n 3).

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Normes et pratiques sociales existantes vis-à-vis des PA

incompatibilité entre le calendrier scolaire et la vie seminomade des PA. Ainsi, la majorité des enfants, jeunes et adultes PA n’est pas alphabétisée et ne peut pas s’exprimer en français, langue officielle de l’état qui leur permettrait d’accéder aux structures administratives étatiques et de communiquer avec l’extérieur en général sans avoir besoin de s’appuyer sur un Bantou pour la traduction. La Convention relative aux Droits de l’Enfant (art. 28) protège le droit à l’éducation et surtout l’égalité des chances. Le même droit est protégé par l’art. 13 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et par l’art. 17 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, qui élargit le droit à l’éducation à « toute personne ». Certains efforts ont déjà été entrepris, notamment avec l’appui de l’UNICEF, pour réduire le coût de l’écolage et faciliter l’accès aux enfants PA, en fournissant le matériel scolaire de base pour les apprentissages (distribution de kits scolaires) à 1.720 élèves PA et en formant 25 animateurs à la méthode ORA. Mais cela ne suffit pas pour couvrir l’ensemble des besoins et il reste beaucoup à faire.

catholiques qui les acceptent sans discrimination et souvent acceptent des paiements en nature pour couvrir les frais d’écolage et d’assurance. Pour ceux qui réussissent à passer en classe de 6ème, il n’y a pas de possibilité de continuer les études, faute de collèges proches de leurs campements ou villages. En outre, le coût des études supérieures, la discrimination et la nécessité de travailler pour contribuer au soutien de la famille les empêchent également de poursuivre leur scolarité. En ce qui concerne les adultes, au cours de la mission de consultation, les leaders PA, surtout les femmes, dans tous les départements visités, ont exprimé le regret de ne pas avoir les connaissances suffisantes pour réussir à transmettre à leurs enfants la confiance nécessaire pour affronter chaque jour le quotidien à côté des Bantous et ne pas se sentir inférieurs. Enfin, les mamans regrettent de ne pas avoir eu pendant leur jeunesse la possibilité d’apprendre à lire et écrire et souhaitent pouvoir le faire maintenant : elles proposent donc l’organisation de cours d’alphabétisation pour les adultes.

Les rares élèves PA suivent les cours auprès des écoles

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5. Résumé des normes et pratiques sociales existantes vis-à-vis des PA au Congo - Soumission des PA au travail forcé dans les champs des Bantous, sans aucune rétribution à la fin de la journée de travail ; - Sous-estimation des produits PA sur les marchés ; - Négation des droits fondamentaux des PA ; - Exclusion des PA de la vie publique ; - Limitation d’accès pour les PA aux structures sanitaires publiques ; - Limitation d’accès pour les PA aux structures scolaires publiques ; - Négation de la valeur de la culture traditionnelle des PA.

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6. Axes d’intervention stratégique

S

ur la base des normes et pratiques sociales et des problèmes spécifiques identifiés au cours de la mission et des réunions avec les partenaires locaux œuvrant dans le domaine de la promotion et de la protection des droits des PA, il est possible d’explorer une stratégie nationale de changement des normes sociales, articulée autour de certains axes d’intervention, à savoir : a) Contribuer à l’amélioration de la condition économique et sociale des PA ; b) Promouvoir les droits de l’homme, afin de réduire les violations des droits et les abus envers les PA ; c) Encourager la participation des PA à la vie publique d) Augmenter le pourcentage d’enfants PA scolarisés, faciliter l’apprentissage et améliorer les relations avec les compagnons de classe et les enseignants Bantous ; e) Améliorer l’accès des PA aux structures sanitaires publiques ; f ) Diffuser et mettre en valeur la culture et les traditions des PA. a) Contribuer à l’amélioration de la condition économique et sociale des PA La majorité des contraintes et difficultés auxquelles les PA sont confrontées sont la conséquence de leur faible ou inexistant pouvoir économique. Le manque de ressources économiques et financières les plonge dans une condition d’indigence permanente qui se transmet de génération en génération. La pauvreté nourrit le lien de vassalité maître-esclave entre bantous et PA. A son tour, cette situation d’indigence mène à la marginalisation sociale des PA en leur empêchant tout accès à la justice, au système sanitaire et au système scolaire public. Par conséquent, tout changement de normes et pratiques sociales vis-à-vis des PA devrait se baser sur un changement de condition économique, conditio sine qua non pour produire aussi un changement de leur condition sociale. Si les futures interventions sont en mesure d’accroître le pouvoir économique des PA, il sera alors possible de faciliter leur accès à toutes les autres structures sociales publiques (marchés, écoles, centres de santé, hôpitaux, tribunaux, gendarmerie, police, etc.). Pour ce faire, il est important d’écouter les leaders PA, hommes et femmes, pour vérifier non seulement leurs besoins mais aussi leurs désirs concernant le type d’activités

économiques souhaitées et leur mode de réalisation. La mission de consultation sur le terrain a pu prendre contact avec environ 9 campements et villages PA, dans la Likouala, la Sangha et les Plateaux et rencontrer environ 90 leaders. Ils ont exprimé leur vision sur la création d’activités génératrices de revenus (AGR). Cela varie de village à village ; mais aussi de groupe à groupe à l’intérieur d’un même village ou campement. Certains leaders proposent la création de groupements agricoles et d’élevage ; d’autres suggèrent l’organisation de groupements de vente sur les marchés locaux des produits issus de la cueillette traditionnelle, sans devoir passer par leur « maître », tout en ayant le pouvoir de négociation pour un prix équitable et non sous-estimé. Il existe déjà dans les villages PA visités des initiatives communautaires autonomes dans les deux sens. Dans le village de Bené, à Gamboma, les PA ont constitué un groupement pour l’élevage, la production et vente de l’huile de palme. Les femmes sont en train de s’organiser pour réunir l’argent nécessaire à l’achat d’un petit terrain, qu’elles veulent cultiver (igname et manioc), tout en organisant le travail au sein d’un groupement composé exclusivement de femmes. Les habitants PA et Bantous de Paris Village, dans la Souspréfecture de Mokeko, ont constitué un groupement (composé de 160 personnes, dont 100 PA) de production agricole, de cueillette et de chasse. Ils vendent leurs produits sur les marchés. Ainsi, avec la première vente, ils ont acheté des médicaments pour le centre de santé situé dans leur village. Les parents PA du village de Dongou, dans le Département de la Likouala, utilisent les produits de cueillette (surtout le miel) pour payer les frais d’écolage de leurs enfants. Il est donc indispensable d’appuyer et de soutenir le développement de ces initiatives existantes, pour avoir des expériences pilotes similaires dans d’autres villages. Il est aussi important de différencier les projets sur la base des besoins et souhaits exprimés par les PA dans chaque village ou campement. Selon les leaders Baaka de la Likouala, l’idéal serait d’associer les activités traditionnelles et les activités « Bantous » comme l’agriculture. Dans un même groupement ou dans une même famille, certains membres pourraient se dédier aux activités traditionnelles (chasse, pêche et cueillette) et d’autres aux activités champêtres.

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Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

Par conséquent, - La mise en place des groupements agricoles, d’élevage, de chasse, de pêche et de cueillette permettrait d’une part de mettre en valeur les AGR qui relèvent de la culture traditionnelle, et d’autre part de leur ouvrir une fenêtre sur la modernité dont ils se sentent exclus et à laquelle ils veulent participer. Les groupements ne devraient pas être excessivement nombreux, mais surtout encadrés et suivis par un leader reconnu et estimé. - Les PA demandent et nécessitent d’être formés aux techniques de production moderne (techniques agricoles et d’élevage, apiculture), pour qu’ils puissent pérenniser leurs activités traditionnelles tout en améliorant la rente de production, la récolte du miel ou la cueillette. Le lien entre tradition et modernité permettra aux PA de sauvegarder leur culture traditionnelle, tout en ne pas restant à l’écart du développement. Ce genre d’interventions est en ligne avec le Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP 20082010), qui prévoit dans son axe stratégique 2 la valorisation, transformation, commercialisation et promotion des produits forestiers. Une autre question à prendre absolument en compte est la question foncière. Les PA réclament le droit à une terre sur laquelle ils puissent s’installer. Mais très souvent, le coût élevé des parcelles (entre 50.000 et 300.000 FCFA) ne leur permet pas d’acheter un titre foncier. Par conséquent, - Il est important de former les groupements sur l’épargne de l’argent en vue d’accumuler une somme suffisante et de soutenir et encourager les initiatives des autorités locales sur la question autochtone. Par exemple, le Président du Conseil Départemental de la Likouala voudrait faire adopter en septembre ou février une délibération légalisant l’acquisition de la terre de la part des PA et des Bantous et permettant aux PA de payer leur parcelle en nature s’ils ne disposent pas de moyens financiers ou encore de leur permettre d’occuper et travailler les lots de terre qui n’ont pas de propriétaire. - il sera aussi nécessaire de former les leaders à la gestion d’un groupement, du point de vue organisationnel, administratif, comptable et financier ainsi que sur la nécessité de faire un suivi et une évaluation régulière des résultats. Ils ont aussi besoin d’une for-

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mation en techniques de vente et commercialisation des produits. Le rôle des leaders sera ensuite de partager et de diffuser les connaissances acquises aux autres membres des groupements. Enfin, les PA ont de bonnes connaissances de production artisanale traditionnelle. Les femmes produisent des nattes, des paniers, des colliers, des bracelets, etc. Mais il n’y a quasiment plus de transmission du savoir traditionnel de génération en génération. Bon nombre de leaders femmes se disent disponibles, au cours des entretiens avec la mission de consultation, à former les jeunes sur les techniques artisanales traditionnelles, sous forme de groupement. Les produits artisanaux pourraient par la suite être vendus sur les marchés locaux. Cet axe d’interventions doit être mis en œuvre en collaboration avec le Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage et le Ministère de la Culture et des Arts. b) Promouvoir les droits de l’homme, afin de réduire les violations des droits et les abus envers les PA Très souvent les violations des DH sont dues d’une part à la non-connaissance de ces droits, ainsi qu’à une méconnaissance des instruments juridiques aptes à protéger ces mêmes droits et de l’autre à une mentalité enracinée, basée sur le non-respect et parfois la peur des autres, surtout si ces autres sont différents ou suivent un mode de vie différent. Au cours des visites de terrain, la mission de consultation a pu constater que les PA ne connaissent absolument pas les textes juridiques nationaux, comme la Constitution, ni régionaux, comme la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, encore moins internationaux, comme la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ou la Convention relative aux Droits de l’Enfant, qui les protègent et promeuvent leurs droits et libertés fondamentaux. Il s’avère donc indispensable de : - Former les leaders PA sur les droits de l’homme, les instruments juridiques mentionnés et les mécanismes nationaux, régionaux et internationaux auprès desquels ils peuvent faire valoir leurs droits. - Former les deux groupes, PA et Bantous, sur l’importance de l’égalité des droits et la non-discrimination dans tous les domaines socio-économiques de la société, en ligne avec l’axe 4 du DSRP.


Axes d’intervention stratégique

Les deux groupes ont besoin de comprendre l’importance de s’unir comme un seul peuple, étant donné qu’ils sont tous des citoyens congolais. La réunification et l’apaisement social constituent un atout pour la population du pays dans son ensemble. Chacun des deux groupes pourrait bénéficier des connaissances, savoir-être et savoirfaire spécifique de l’autre. Par exemple, les échanges commerciaux pourraient s’intensifier et devenir équitables, ce qui développerait le système commercial de l’ensemble du pays. En outre, les PA pourraient partager leurs connaissances relatives à la forêt, la pharmacopée et l’artisanat, alors que les Bantous pourraient diffuser leurs connaissances sur la médecine moderne et les activités professionalisantes, telles que la forgerie, la plomberie, la menuiserie etc. Ces échanges amèneraient à une connaissance et mise en valeur réciproque des cultures, dans une vision de collaboration et soutien réciproque. Ces résultats ne sont pas impossibles à atteindre. La mission de consultation a pu vérifier que dans certains villages, les communautés se sont déjà réunies et organisées. Par exemple, à Paris Village, les deux communautés cohabitent, ont élu deux chefs de village (Bantou et PA) et ont constitué un groupement mixte, pour cultiver la terre et faire la chasse et la cueillette. Chaque groupe apporte sa spécificité culturelle et ses connaissances techniques pour améliorer la rente de production. La même cohabitation se retrouve dans le village de Ngangania Brousse, dans la Sous-préfecture d’Impfondo, sauf qu’il y a un seul chef de village, Bantou. Ce genre d’initiatives et expériences sont à mettre en valeur. Le but de toutes interventions ne doit pas être le renforcement de la ségrégation entre les deux peuples mais plutôt leur intégration, à condition que les deux groupes connaissent leurs droits et libertés mais aussi leurs devoirs réciproques et établissent leurs relations sur la base du principe de non-discrimination. Par conséquent, les interventions doivent viser, à travers des séances ponctuelles de formation et sensibilisation dans les villages PA et Bantous, à diffuser une culture des droits de l’homme, avec une attention particulière à la condition spécifique des PA, minorité ethnique et groupe vulnérable, souvent victimes de discrimination et de violence physique et psychologique. Cet effort pourrait être complété par la formation ou le recyclage des relais communautaires, PA et Bantous, qui peuvent jouer un rôle de « pont » entre les deux communautés, en facilitant les échanges et en accompagnant les PA chez les instances publiques pour dénoncer les cas de violation et les résoudre. En outre, les villages PA et Bantous ne doivent pas être les seuls bénéficiaires des formations et sensibilisations. Les interventions devraient intégrer les autorités locales, les

autorités nationales, les forces de l’ordre, les agents de santé et les autorités scolaires ; bref, toutes les couches sociales et acteurs confondus. De même, des tribunes télévisées et/ou émissions radio nationale et rurales pourraient être diffusées sur différents thèmes liés aux droits de l’homme en général, aux droits des peuples autochtones en particulier, aux droits de l’enfant et tout autre problématique d’intérêt commun. Il conviendrait également de réaliser des interviews des leaders PA, des chefs de village Bantou, des autorités locales et nationales et de toute partie prenante. En outre, les sensibilisations peuvent aussi se faire à travers des carnavals ou des pièces de théâtre, qui suscitent l’intérêt de la population. Ces activités de formation et sensibilisation doivent être menées sous supervision du Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, pour que le gouvernement puisse de jure et de facto s’en approprier et donner sur le long terme continuité et durabilité à l’action. A titre d’illustration, en République Centrafricaine, entre 2004 et 2006, le Projet amélioration des conditions de vie de la population Aka dans la Lobaye et promotion de son identité culturelle, financé par l’Union Européenne et mis en œuvre par l’ONG italienne COOPI (Cooperazione Internazionale) a développé des groupements des droits de l’homme formés par des Aka et gérés par les chefs de campements et villages Aka. Cette expérience s’est poursuivie grâce à l’appui financier et logistique de l’UNICEF RCA jusqu’en 2008 puis celui de la Délégation de l’Union Européenne. Ce projet a montré que les groupements PA des droits de l’homme peuvent apporter une importante contribution à la diffusion de la culture des droits de l’homme dans leur milieu. Après trois ans, les PA ont commencé à refuser de travailler gratuitement dans les champs des Bantous et à parler des violations et abus subis. La mission de consultation estime qu’il serait possible de répéter cette expérience au Congo et que les groupements des droits de l’homme pourraient être mixtes (PA et Bantous). La constitution de groupements non seulement renforce les capacités des PA, puisqu’ils reçoivent des formations ponctuelles, sur plusieurs années; mais aussi parce qu’ils se sentent plus «protégés» et légitimés dans des actions de sensibilisation ou de dénonciation. Les leaders formés doivent ensuite devenir eux-mêmes formateurs pour leurs communautés, en donnant ainsi continuité et durabilité à l’action. Il est aussi indispensable de poursuivre le plaidoyer pour l’adoption de la loi portant protection et promotion des droits des populations autochtones, ainsi que pour la ratification de la Convention 169 de l’OIT relative aux droits

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Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

des peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants et l’approbation de la Déclaration des Droits des Peuples Autochtones. Enfin, il importe de produire une étude de cas de discrimination, abus et violations des droits de l’homme envers les PA au Congo, comme base pour tout plaidoyer et matériel de sensibilisation radio et télévisée en faveur des PA. c) Encourager la participation des PA à la vie publique La majorité des PA ne dispose pas de documents personnels qui leur permettent d’être reconnus en tant que citoyens à part entière et de participer à la vie publique au niveau local et national. Cela est dû d’une part au manque d’habitude d’enregistrer les enfants à l’état civil (cette action ne rentre pas dans leurs coutumes et mentalité), et d’autre part à l’impossibilité pour les PA de payer les frais annexes liés à l’acte de naissance ou à l’enregistrement tardif. En outre, les chefs PA de campement et de village ne sont pas reconnus officiellement. Cela les empêche en tant qu’autochtone d’être chef du village couvert par la circonscription administrative et judiciaire. Cette question bloque la participation des PA non seulement à la vie publique, mais aussi au processus de développement et de gestion participative des ressources naturelles.

officielle des chefs de village PA, pour qu’ils puissent de jure remplir leur rôle et pas seulement de facto et être actifs dans la prise de décision au niveau local. Dans les villages où on retrouve déjà un chef PA et un chef Bantou, il serait nécessaire d’entamer les procédures administratives pour que tous les deux soient reconnus. d) Augmenter le pourcentage d’enfants PA scolarisés, faciliter l’apprentissage et améliorer les relations avec les compagnons de classe et les enseignants Bantous L’analphabétisme est un problème majeur en milieu PA. Le manque d’instruction est une des causes principales qui ne permettent pas aux PA de participer à la vie publique et de dénoncer les cas de violations auprès des instances compétentes. Ils ne sont pas en mesure de lire et compléter les formulaires obligatoires de dépôt de plainte, ni de voter lors des grandes consultations populaires. La difficulté d’accéder au système éducatif public est liée à plusieurs facteurs : la distance entre les écoles et les campements pygmées ; la discrimination en milieu scolaire, de la part de leurs compagnons de classe et des enseignants ; la difficulté de fréquenter l’école en français ; les fréquents déplacements en forêt, avec un rythme saisonnier, pour des activités traditionnelles (pêche, chasse et cueillette) ou les fréquents changements de site des campements (les PA sont un peuple traditionnellement semi-nomade et les campements se déplacent tous les 5/6 mois).

Les interventions devraient - Cibler les Chefs PA de campements et villages, les mairies, les hôpitaux et les tribunaux sur l’importance pour les PA comme pour les Bantous, d’enregistrer leurs enfants à la naissance et donc de faciliter les procédures. - Sensibiliser les autorités aussi sur l’importance d’appliquer les lois relatives à la gratuité et le principe de non-discrimination et égalité de tout citoyen devant la loi. Il est aussi important de travailler pour arriver à une simplification des procédures administratives d’enregistrement des naissances, au bénéfice de toute la population, en particulier des PA, en lien avec l’axe 4 du DSRP.

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Cette problématique est complexe, dans la mesure où il faut combiner la nécessité d’éducation dans un monde qui se « modernise » et évolue très rapidement et le respect de la culture autochtone. Les interventions doivent sensibiliser les enfants, parents et enseignants Bantous à la non-discrimination en milieu scolaire et au droit universel à l’éducation primaire (droit social fondamental). A ce titre, il est fondamental de :

Outre la problématique du non-enregistrement à l’état civil, il est aussi utile de former les PA sur les droits et devoirs du citoyen, par exemple le droit/devoir au vote, pour les encourager à une participation libre et éclairée.

- Sensibiliser les parents et les enseignants Bantous sur l’importance de la non-discrimination en milieu scolaire. C’est dans ce milieu que les enfants peuvent apprendre à vivre ensemble dans la diversité depuis l’enfance. Plus tard, à l’âge adulte, ils auront une attitude différente envers les autochtones. Les changements de mentalité peuvent se produire seulement en investissant sur les générations futures. Le but ultime doit être l’intégration et la cohabitation pacifique entre les deux peuples (PA et bantous).

Enfin, il serait important, en collaboration avec le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation, de travailler dans le sens de la reconnaissance

- Continuer à utiliser la méthode ORA et donc de former ou recycler les enseignants PA et Bantous et sur l’importance d’étudier les différentes possibilités


Axes d’intervention stratégique

d’adaptation du calendrier scolaire au calendrier saisonnier des PA. Dans le département de la Likouala, l’expérience des Pères Spiritains dans les écoles de préscolarisation montre par ailleurs que la solution est de garder le calendrier scolaire régulier parce que les enfants Baaka ne partent pas tous en forêt pour les activités de chasse et cueillette. Le rythme n’est pas communautaire mais familial. Ceux qui restent peuvent ainsi continuer à fréquenter l’école. Les élèves qui partent en forêt peuvent rattraper le temps perdu s’ils ont la bonne volonté et s’appliquent. - Continuer les formations ou recyclages des enseignants PA et Bantous à la méthode ORA ; - Étudier les différentes possibilités pour adapter le calendrier scolaire au calendrier saisonnier des PA. Ces interventions pourraient améliorer l’apprentissage des enfants PA et faciliter leur intégration dans le cursus de l’éducation formelle, tout en réduisant le taux d’abandon très élevé. - Mettre en contact les enseignants formés à la méthode ORA au Congo avec d’autres expériences similaires réussies ailleurs (par exemple INADES au Cameroun, Bessembelé et les écoles d’intégration ORA en RCA). - Valoriser et préserver la culture autochtone, dont une des principales expressions est la langue, en ouvrant la possibilité de rester en communication avec le monde extérieur sans passer exclusivement par la langue du « maître ». - Former les Comités des Parents d’Elèves Bantous et PA des écoles publiques et des écoles de préscolarisation sur le droit à l’éducation et la gestion des écoles (cotisation en argent et en nature pour le paiement de l’animateur, des frais d’écolage et des fournitures scolaires; entretien de l’école ; relations avec le l’enseignant ou l’animateur). - Mener un plaidoyer auprès du gouvernement congolais pour l’intégration des écoles de préscolarisation dans le système formel d’éducation étatique pour que : • la méthode ORA soit reconnue comme une méthode officielle d’enseignement au Congo ; • l’Etat prenne en charge les animateurs des écoles de préscolarisation comme des enseignants titulaires ou comme « des auxiliaires » et les intègre dans ses effectifs ;

• l’Etat reconnaisse dans la pratique l’importance de la scolarisation de toute la population du Congo, en y intégrant des groupes les plus vulnérables ; - Organiser des formations continues et diversifiées pour améliorer le niveau d’enseignement et mettre à jour les capacités pédagogiques et didactiques. - Accompagner le processus et les initiatives d’intégration scolaire des élèves au sein des écoles ORA. Ces écoles devraient devenir des « écoles d’intégration », pour lesquelles le profil spécifique, le profil de l’enseignant, le mode de recrutement des élèves, les curricula, la gestion pédagogique et administrative doivent être définis au cours de la mise en œuvre sur le terrain. Si on veut créer une société paritaire, fondée sur le principe de la non-discrimination, il est alors indispensable de commencer à éduquer les deux populations à la tolérance et au respect réciproque depuis la petite enfance. En effet, les premières années de vie forment la personnalité des enfants qui seront un jour adulte et qui auront la possibilité, voir le pouvoir, de changer les normes et pratiques sociales existantes. - Impliquer les parents PA dans la construction et la gestion participative des écoles, pour qu’ils ressentent l’école comme leur école et en prennent soin. Dans la Likouala, certaines écoles de brousse sont construites en matériel périssable, avec la contribution communautaire (bois donné par les sociétés forestières, tôles par les parents). - Concernant les cantines scolaires, en brousse, l’idéal serait d’avoir des mères d’enfants qui cuisinent des produits locaux. Il n’est pas nécessaire de fournir un repas complet, mais une contribution alimentaire avec des plats très nourrissants. - Les PA demandent aussi, étant donné la condition indigente de la majorité autochtone, d’associer aux cours scolaires classiques (mathématique, français, histoire et géographie) la formation professionnelle (couture, broderie, artisanat, menuiserie, mécanique). L’école doit devenir un moyen pour acquérir des connaissances pratiques qui permettent aux jeunes de pouvoir pratiquer un métier autonome et d’avoir un salaire, pour assumer une vie citoyenne pleine à tous égards. - Organiser des cours d’alphabétisation pour les adultes, Bantous et PA confondus, leaders et chefs de village PA, pour renforcer leurs capacités et leur rôle, en ligne avec l’objectif de l’axe 3 du DSRP (extension des programmes d’alphabétisation).

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Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

- Axer les interventions aussi sur la petite enfance, en organisant des jardins d’enfants, pour faciliter l’éveil de l’enfant. - Créer des outils pour les enseignants des écoles ORA de préscolarisation (guide pour les animateurs), pour faciliter l’uniformité de l’enseignement. e) Améliorer l’accès des PA aux structures sanitaires publiques Le DSRP prévoit l’amélioration de l’accès des PA aux services sociaux de base (axe 5), en particulier aux services sanitaires. Mais leur accès demeure extrêmement limité du fait de l’éloignement des structures ; du coût des prestations médicales ; de la méfiance des PA envers la médecine moderne et de la discrimination de la part des agents de santé. Pour adresser cette problématique, il s’agirait de : - Former les agents de santé sur la méthode IEC (Information, Education et Communication) et sur la non-discrimination ainsi que sur l’éthique professionnelle, en vue d’améliorer les conditions d'accueil. - Conscientiser les PA sur l’importance d’utiliser les services de santé, d’avoir confiance en la médecine moderne et sur l’importance d’adopter les bonnes pratiques d’hygiène. Il est nécessaire de s’appuyer sur les guérisseurs traditionnels et les relais communautaires qui doivent pour jouer un rôle de « pont » entre les deux communautés. - Améliorer l’accès des PA à l’eau potable, par exemple à travers la construction de puits et/ou forages, et en suivre la gestion. - Former les mères PA, qui habitent dans les villages sédentarisés, à la production du savon, l’utilisation des moustiquaires. La distribution équitable de ces fournitures essentielles est d’importance capitale là ni les les campements et les villages PA sont situés à côté des villages Bantous. Les distributions en faveur des PA exclusivement pourraient entrainer des violences et vols des biens distribués. - Informer les PA sur l’importance de vacciner les enfants et sur les possibles effets collatéraux, comme la fièvre, pour que les parents acquièrent confiance.

- Promouvoir la sensibilisation et la prévention du VIH/SIDA, au bénéfice des deux populations. - Promouvoir la culture médicale traditionnelle des PA et la pharmacopée, et au mieux l’utilisation complémentaire des deux médecines traditionnelle et moderne selon leurs avantages comparatifs, y compris en relation aux accouchements. - Appuyer les groupements/coopératives des chercheurs/praticiens de méthodes traditionnelles. Une étude propédeutique s’avère nécessaire pour recueillir les informations sur les plantes médicinales employées dans la pharmacopée et leur méthode d’utilisation. Cette initiative aura une double importance : d’une part « sécuriser » les connaissances traditionnelles qui restent jusqu’à présent seulement orales, en les mettant par écrit ; de l’autre, distinguer la médecine traditionnelle de la sorcellerie. - Créer une banque de données mise à disposition du Ministère de la Santé, pour que tout le monde puisse avoir recours aux soins traditionnels en cas de besoin. - Créer un réseau de communication et échange d’informations entre les guérisseurs traditionnels. - Réaliser une enquête démographique sanitaire ciblant les améliorations ou les faiblesses dans la condition sanitaire des PA. Les données précises, fiables et comparées sont un outil important pour renforcer le plaidoyer auprès des Ministères concernés. f) Diffuser et mettre en valeur la culture et les traditions des PA La culture PA n’est pas considérée comme une richesse pour tout le pays. Pourtant, leurs traditions orales constituent un moyen d’expression populaire et traditionnelle à valeur exceptionnelle du point de vue anthropologique, artistique et linguistique. Il s’agit d’un témoignage unique d’une tradition culturelle ancienne et encore bien vivante. La musique et la danse chez les PA sont intimement liées à l’exécution des rituels qui régissent leurs activités économiques et sociales. Leurs « productions » ne constituent pas une activité artistique en soi, mais une facette des phénomènes sociaux dont la survie dépend de celle des activités qui les impliquent. Le mode de vie des PA a été

(1) - Le tourisme peut aussi contribuer à améliorer les conditions de vie des PA, à condition de développer un tourisme responsable (écotourisme).

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Axes d’intervention stratégique

profondément bouleversé par les changements en cours. La raréfaction du gibier, consécutive à la déforestation, l’exode rural et la « folklorisation » de leur patrimoine pour le tourisme(1), comptent parmi les principaux facteurs contribuant à la disparition progressive de nombre de leurs coutumes, rituels, savoirs et savoir-faire traditionnels.

taires, reportages, théâtre, spectacles de musique et de danse, semaine culturelle en correspondance du 9 août, journée internationale des peuples autochtones, célébrations pour le 16 juin, lors de la journée de l’enfant Africain, et valorisation culturelle au sein des écoles). - Former des médiateurs culturels PA et Bantou.

- Afin de sauvegarder cette culture riche et unique, menacée de disparition, un plan d’action pourrait être soumis à l’UNESCO pour la reconnaissance de la culture orale PA comme patrimoine de l’humanité, à l’exemple des traditions orales PA Aka en RCA. - Organiser des campagnes de communication et de valorisation de la culture PA à travers divers canaux de diffusion (conférences, émissions, films documen-

- Créer un Centre Culturel pour la Promotion de la Culture et des Traditions PA pour les évènements culturels (par exemple à Ngangania, dans la Likouala, qui a déjà hébergé le Forum International des Peuples Autochtones de l’Afrique Centrale, FIPAC 2007). Le Centre pourrait accueillir tous les événements culturels sur-mentionnés.

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Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

7. Principes clés • Approche participative : toute intervention doit être basée sur la participation active, la contribution et l’implication des PA, pour qu’elles soient le moteur de leur empowerment et de leur renforcement des capacités. En outre, la participation active permet de sortir de la mentalité d’assistanat et de paternalisme et d’assurer la durabilité et la consolidation des résultats atteints. • Bien que la stratégie cible en particulier les PA, là où il s’avère possible, il est indispensable d’orienter les interventions au bénéfice des deux populations, PA et Bantous, pour éviter de renforcer la mentalité de marginalisation et exclusion entre les deux groupes et pour promouvoir l’intégration et la cohabitation pacifique. • Tous les acteurs concernés doivent constituer un Organe Institutionnel de Coordination pour éviter de dédoubler les interventions et pour assurer la participation et la contribution active de toutes les parties prenantes, au niveau du gouvernement, comme des agences onusiennes et de la société civile.

• Il est important d’identifier des expériences pilotes, ou de valoriser et soutenir les initiatives spontanées des PA sur le terrain, pour qu’elles deviennent des modèles à suivre et à multiplier dans d’autres campements ou villages. Il est aussi important de multiplier les bonnes pratiques qu’on rencontre sur le terrain. • Pour surpasser les difficultés de méfiance et les préjugés et amener les PA et les Bantous à travailler ensemble dans les groupements, il faut chercher le consensus partagé et préalable pour éviter les clivages. A cet effet, il est souhaitable d’organiser des réunions communautaires avec les leaders des deux groupes. L’harmonie entre les leaders va se traduire dans une harmonie plus généralisée entre tous les membres des deux communautés. • Il ne faut pas absolument obliger les PA à sortir de la forêt, si ce n’est pas-eux-mêmes qui sortent spontanément. • Toute intervention doit obligatoirement respecter la culture traditionnelle des PA.

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Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

8. Recommandations générales • Mettre en œuvre des interventions multisectorielles et holistiques, puisque chaque problématique est liée à une autre. Si on se concentre seulement sur un domaine, les résultats atteints ne seront pas durables. • Un problème majeur est l’absence d’ONG de mise en œuvre, internationales ou nationales, suffisamment structurées, multisectorielles, compétentes et fiables. Par conséquent, toute intervention doit d’abord former les possibles partenaires identifiés, en particulier sur la culture traditionnelle des PA et sur la nécessité de la respecter, et mettre un place un mécanisme de suivi et évaluation. • Diversifier les partenariats en capitalisant les expériences réussies notamment en matière de scolarisation, de santé, AGR et selon les compétences des acteurs connus (Pères Spiritains, Sœurs de la Charité, Hôpital HELP, AREEC, INICEF, le Conseil Départemental de la Likouala etc.). • Créer un réseau de partage et échange d’information et de formation avec les écoles ORA d’intégration en Afrique Centrale. • Contribuer à changer aussi les normes sociales des PA elles-mêmes (par exemple la tendance à l’ivresse comme problème de santé et de développement). • Encourager les PA à trouver elles-mêmes des solutions de sortie de leur condition, être les principaux acteurs et moteurs du changement, tout en abandonnant progressivement l’attitude résignée et la mentalité d’assistanat. • S’approprier au niveau national et décentralisé la stratégie pour changer les normes et pratiques sociales vis-à-vis des PA.

documentaires, qui représentent les articles des instruments juridiques nationaux ou régionaux ou internationaux des droits de l’homme ou les bonnes pratiques à transmettre. La présentation des images sert à stimuler la formulation des concepts de la part des bénéficiaires (une sorte de méthode ORA élargie à toute la population), pour leur permettre de comprendre de manière autonome les messages que l’intervention se propose de transmettre. Ces séances avec les boîtes à images doivent être suivies par des discussions et échanges entre les animateurs des futures interventions et les leaders et chefs de village PA et Bantous. • La formation dans tous les domaines doit faire partie d’un plan de communication. Il faut élaborer une stratégie de communication et mettre en place un plan de communication pour le changement des normes et pratiques sociales, en ciblant les deux groupes, PA et Bantous (peut-être il serait important de préparer plusieurs plans d’action décentralisés, pour prendre en compte les spécificités et les différents partenaires de mise en œuvre de chaque milieu). Cet exercice doit être mené avec la participation communautaire, pour impliquer tous les acteurs concernés, PA et Bantous. • En ce qui concerne la communication, les interventions futures pourraient s’appuyer sur l’organisation américaine INICEF, qui œuvre dans la Likouala avec des espèces de « cinéma mobiles », aussi bien que sur l’organisation locale Tchicaya U tamsi, qui organise des spectacles de théâtre et des carnavals ambulants. En outre, d’autres partenaires potentiels pourraient être les églises, les relais communautaires et d’autres représentations de la société civile. • Poursuivre le plaidoyer et l’advocacy pour l’adoption du projet de loi portant protection et promotion des Droits des PA et de la Déclaration Universelle des Droits des Peuples Autochtones et la ratification de la Convention 169 de l’OIT.

• Les AGR doivent être le point d’entrée pour toute intervention visant à changer la perception sociale visà-vis des PA et peuvent être élargies aux écoles et aux centres de santé, pour contribuer aux frais de fonctionnement des structures.

• Prendre en compte le savoir local pour un développement durable et équitable.

• En ce qui concerne les formations dans tous les domaines d’interventions, la méthode proposée implique l’utilisation de boîtes à images et des

• Procéder au recensement des PA pour apprécier leur importance démographique et disposer des statistiques plus précises (ex : taux de mortalité infantile

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et maternelle, taux de croissance démographique, taux de scolarisation, etc.) • La stratégie mise en place de toute intervention doit se baser sur le renforcement des capacités des PA, pour garantir la prise de conscience et de pouvoir (empowerment) des bénéficiaires, l’approche genre, la lutte contre la pauvreté, le respect de l’environnement et de l’état de droit. • Il serait intéressant de mesurer/évaluer l'effort national en cours depuis quelques années pour corriger le déni des droits fondamentaux des PA, notamment le droit à l'éducation, pour en comprendre la portée et les limites. • Il serait également intéressant de faire une analyse du partenariat entre l’UNICEF et ses partenaires locaux sur le terrain, pour en comprendre la gestion et l’efficacité.

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• La stratégie nationale doit être un complément du plan d’action national, pour en accélérer le processus de mise en œuvre. • Les pouvoirs publics doivent s’approprier la stratégie nationale pour garantir l’efficacité et la durabilité de toute intervention future. La volonté politique est à la base de tout changement des normes et pratiques sociales. • L’Etat devrait traduire dans le budget national, toutes les préoccupations relatives à la cause autochtone et les promesses faites en ratifiant les conventions internationales relatives aux droits de l’homme.


Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

Bibliographie Helen APPLETON, Maria E. FERNANDEZ, Catherine L.M. HILL et Consuelo QUIROZ, Reconnaître le savoir indigène et le mettre à profit, 2007.

Emmanuel LALA YAPELLE, Prospective pour une école spécialisée pour les Pygmées en Centrafrique : la problématique de l’intégration du programme d’alphabétisation des Pygmées en langue Aka au système éducatif moderne, 1999.

Simha ARON, Serge BAHUCHET, Alain EPELBOIN, Susanne FURNISS, Henry GUILLAUME et Jacqueline M.C. THOMAS, Les Pygmées Aka : peuple et musique, Coprod. Montparnasse, Multimédia, CNRS Audiovisuel, IRD-ORSTOM, 2004.

Alain LENGUENDAYEN, L’organisation de la production et l’intégration au marché des sociétés Pygmées Aka en Centrafrique. Cas de la commune de Bale-Loko dans la Lobaye, 1998.

Serge BAHUCHET, Les pygmées Aka et la Forêt centrafricaine, 1985.

Jean Bruno MALANDA, Rapport campagne d’enregistrement tardif des naissances en milieu autochtone, 2009.

Serge BAHUCHET, Dans la Foret d’Afrique Centrale. Les Pygmées Aka et Baka, 1992.

Ministère de l’Enseignement Primaire Et Secondaire en Charge de l’alphabétisation, Projet d’appui à l’Education de Base (PRAEBASE), Compte Rendu de l’Atelier National de Validation des Données et Expériences Départementales de Scolarisation des Enfants Pygmées, 2006.

Emmanuel BAYENI, Rapport de la Consultation sur le Développement d’une Politique Nationale en vue de l’Amélioration de la Situation de Protection des Droits des Enfants et des Femmes Autochtones, 2007 R.P. DHELLEMMES, Le père des Pygmées, 1985. Direction Générale de l’Action Sociale et de la Famille, Rapport de l’Atelier de Validation du Plan d’Action National, Brazzaville 15-17 juillet 2008. Fiche d’information N°1, Tour d’horizon sur les peuples autochtones et le système des Nations Unies, UN Publications, 1998. Fiche d’information N°9, Les enfants et les jeunes autochtones, Programme d’action mondial pour la jeunesse à l’horizon 2000 et au delà, UN Publications, 1998. Fiche d’Information N° 12, L’Organizzazione Mondiale della Proprietà Intellettuale ed i popoli indigeni, UN Publications, 2000. Haut Commissariat aux Droits de l'Homme, Les droits des peuples autochtones, Fiche d'information No.9 (Rev.1).

Paulin PASCALE, Analyse de situation sous-régionale sur la problématique des « peuples autochtones » en Afrique Centrale, 2008. Projet de Prévention du VIH/SIDA chez les Peuples Autochtones du Congo, Enquête sur les Connaissances, Attitudes et Pratiques (CAP) des Peuples Autochtones en Matière de Prévention du VIH/SIDA et leur Accès aux Services Sociaux de Base, Rapport d’Analyse des Résultats, 2007. RENAPAC (Réseau National des Peuples Autochtones du Congo), Rapport d’évaluation diagnostique, 2009. N. ROULAND, S. PIERRE-CAPS, J. POUMAREDE, Droits des minorités et des peuples autochtones, 1996. UNICEF, Analyse de la Situation des Enfants et des Femmes Autochtones au Congo, 2007. Patrizio WARREN, Promoting the Rights Of Indigenous Children And Women : a stocktaking of UNICEF strategy and practice, 2008.

INADES-Cameroun, Rapport de l’atelier de formation MAPAPPY à Belemboké et Monasao, 2004.

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Plan d’action à court terme pour le changement des normes et pratiques sociales vis-a-vis des peuples autochtones en République du Congo 2010-2013

Plan d’action à court terme pour le changement des normes et pratiques sociales vis-a-vis des peuples autochtones en République du Congo 2010-2013 Introduction

I

l s’agit de contribuer au changement des normes et pratiques sociales vis-à-vis des peuples autochtones (PA) en République du Congo, de 2010 à 2013, en développant des actions efficaces ciblant l’amélioration et le respect des droits humains et libertés fondamentales des PA, ainsi que l’accès équitable aux services sociaux essentiels (santé, éducation, citoyenneté etc.). L’approche participative vise à réduire la discrimination envers les PA et leur marginalisation, et à promouvoir la cohabitation sociale harmonieuse entre les différentes communautés. Tenant ainsi compte de la complexité des problématiques à adresser, le plan d’action est multisectoriel et holistique et a été élaboré sur la base des missions d’information menées sur le terrain et des réflexions et discussions approfondies des parties prenantes au cours de l’atelier de validation du rapport diagnostique et de planification stratégique sur le changement des normes sociales organisé à Brazzaville du 9 au 10 août 2009. Le plan d’action s’articule autour de six axes stratégiques majeurs : (i) amélioration de la condition économique et sociale des PA ; (ii) promotion des droits de l’homme et réduction des violations des droits et abus envers les PA ; (iii) participation des PA à la vie publique ; (iv) scolarisation des enfants autochtones ; (v) accès aux soins de santé ; (vi) valorisation de la culture et des traditions des PA.

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• Réduire la vulnérabilité sociale et économique des PA

Objectifs spécifiques

• Mettre en place des systèmes efficaces des finances rurales. • Négocier avec les intermédiaires commerciaux pour accéder aux débouchés économiques, aux services et aux administrations.

• Soutien aux groupements AGR autochtones pour la production, la récolte et la commercialisation.

• Renforcement des capacités des femmes dans le domaine de l’artisanat traditionnel.

• Reconnaissance du droit de propriété des terres aux PA et amélioration de leur accès à la terre et aux titres fonciers.

• Organiser des activités d’accompagnement familial, de formation à la gestion du budget et de promotion de l'épargne.

• Elargissement et consolidation des partenariats (pouvoirs publics, société civile, secteur privé et organismes internationaux).

• Plaidoyer auprès des autorités locales pour l’adoption de délibérations et réglementations facilitant l’accès des PA à la terre.

• Mettre en place un cadre de concertation des politiques, de partage d’expériences, de compétences et des ressources.

• Mettre en place des systèmes efficaces de financement rural.

• Favoriser le recrutement des PA dans les structures économiques tant publiques que privées.

• Former les PA en compétences de gestion, de suivi de performance et l’instauration de la culture de responsabilité et du résultat.

• Organiser les PA en groupements d’AGR.

• Consulter les PA pour un consentement préalable, libre et éclairé sur les choix des actions pertinentes.

Actions à mener

• Renforcement des capacités de participation, de gestion et de suivi de performance des groupements AGR.

• Amélioration et diversification des revenus des familles autochtones.

• Renforcement des droits des populations autochtones à contrôler leurs propres modèles de développement et à prendre les décisions relatives à leur propre situation économique, sociale, politique et culturelle.

Stratégies Résultats attendus

• Les autorités locales sont sensibilisées. Au moins une déli- bération règlementant l’accès à la terre est adoptée et appliquée.

• Les PA, hommes et femmes, ont plus facilement accès aux ressources et ont acquis les compétences nécessaires pour les gérer de façon viable et efficace.

Axe 1 : AMÉLIORATION DE LA CONDITION ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DES PA

• Conseils Départementaux

• Agences de développement

• Ministère de la Culture et des Arts

• Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage

• Les institutions de la micro finance

• Conseils Départementaux

• Comité Local de Développement

• ONG de développement

Partenaires clés proposés

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• Renforcement des capacités des institutions et ONGs actives dans le domaine des droits de l’homme en général, et des droits des PA en particulier.

• Promouvoir la culture des droits humains.

• Promotion de l’assistance juridique et judiciaire envers les PA.

• Sensibilisation de l’ensemble de la population à la culture des droits humains et à la non-discrimination envers les PA.

• Renforcement et application du cadre légal de promotion et protection des droits de l’homme en général, et des droits des PA en particulier.

• Promouvoir les droits humains et les principes de non-discrimination.

• Réduire les violations des droits et les abus envers les PA.

Stratégies

Objectifs spécifiques

• Mettre en place et en œuvre des mécanismes d’assistance juridique et judiciaire à l’égard des PA.

• Documenter la problématique des droits des PA notamment recenser les cas de violations de ces droits.

• Organiser des campagnes de sensibilisation à l’égard de la population (Bantous et PA) sur les droits de l’homme en général, les droits des PA en particulier, et la non-discrimination.

• Former les autorités nationales et locales, la force publique, les membres des organisations de la société civile aux droits de l’homme et aux principes de non-discrimination.

• Assurer le suivi de l’adoption, ratification et application des instruments juridiques nationaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme en général, et droits des PA en particulier.

Actions à mener

• Des mécanismes d’assistance juridique et judiciaire à l’égard des PA sont fonctionnels.

• Des données d’information fiables et précises sont disponibles, notamment sur les cas de violation des PA.

• Les communautés PA connaissent leurs droits et peuvent les exercer et/ou les revendiquer, les cas de violation des droits sont dénoncés et sanctionnés.

• La population (Bantous et PA) est sensibilisée sur les droits de l’homme en général, les droits des PA en particulier, et la nondiscrimination.

• Les autorités nationales et locales, la force publique, les membres des organisations de la société civile sont formés aux droits de l’homme en général, et aux droits des PA en particulier.

• Les instruments adéquats sont adoptés, ratifiés, connus et appliqués.

Résultats attendus

Axe 2 : PROMOTION DES DROITS DE L’HOMME ET REDUCTION DES VIOLATIONS DES DROITS ET ABUS ENVERS LES PA

• Commission Européenne

• Cliniques juridiques et Barreaux (Consortium)

• Universités et Ecoles de formation

• Ministère de la Communication

• Ministère de la Justice et des Droits Humains

• ONG de défense des droits de l’Homme

• RENAPAC

Partenaires clés proposés

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• Promouvoir la citoyenneté et la participation des PA à la vie publique.

Objectifs spécifiques

• X personnes PA sont sensibilisées et connaissent leurs droits et devoirs

• X leaders PA sont formés

• Former les leaders PA sur les droits et devoirs politiques, en vue de la vulgarisation au sein des communautés.

• Participation informée des PA à la vie publique.

• Tous les chefs de village ou campements PA sont officiellement reconnus dans chaque région d’intervention

• Au moins 80% des enfants autochtones sont enregistrés à l’état civil

• X relais communautaires sont formés.

• Toutes les autorités concernées sont formées

• X parents PA des zones d’intervention sont sensibilisés

• La loi sur l’état civil est élaborée, promulguée et vulgarisée, y compris les textes d’application

Résultats attendus

• L’arrêté préfectoral est promulgué et appliqué

• Mener un plaidoyer pour la reconnaissance officielle des chefs PA de campement ou village.

• Appuyer les initiatives et mécanismes de proximité pour l’accès des EA à l’état civil.

• Accompagner les communautés PA et les autorités concernées dans le processus d’obtention de l’acte de naissance.

• Améliorer le cadre juridique et institutionnel, ainsi que les pratiques professionnelles de l’état civil.

Actions à mener

• Reconnaissance officielle des villages et des chefs de village PA.

• Participation des chefs PA au processus de prise de décision au niveau local.

• Promotion de l’enregistrement des enfants PA à l’état civil.

Stratégies

Axe 3 : PARTICIPATION DES PA A LA VIE PUBLIQUE

• RENAPAC et ONGs • Ministère de la Justice et des Droits Humains • Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation

• Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation

• RENAPAC

• Ministère Affaires Sociales

• Tribunaux

• Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation

• RENAPAC

Partenaires clés proposés

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• Faire accéder les EA à leur droit à l’éducation, en réduisant les attitudes discriminatoires envers les PA au sein des écoles.

Objectifs spécifiques

• Mettre en œuvre un programme de sensibilisation et d'appui aux écoles publiques. • Intégration des EA dans les écoles publiques sans discrimination. • Adaptation des conditions d’enseignement -apprentissage aux réalités des EA. • Former les enseignants aux méthodes pédagogiques spécifiques.

• Amélioration des conditions d’enseignement d’apprentissage et d’intégration. et d’éveil.

• Création d’espaces et d’échange entre parents autochtones et Bantous.

• Formation professionnelle des jeunes autochtones alphabétisés.

• Alphabétisation des adultes autochtones et Bantous.

• Identifier et former les alphabétiseurs locaux.

• Valoriser les compétences traditionnelles (apiculture, chasse, pêche, pharmacopée, cueillette et artisanat).

• Faciliter l’accès des jeunes autochtones aux centres des métiers et à l’apprentissage en entreprise.

• Intégrer dans les curricula les compétences de vie courante.

• Faire participer les parents autochtones aux Comités des Parents d’Elèves (CPA).

• Améliorer les conditions d’enseignement dans les écoles de préparation et d’intégration.

• Intégrer les écoles ORA dans la carte scolaire nationale.

• Favoriser l’accompagnement familial à la scolarisation des EA.

Actions à mener

• Education et prévention de l'échec scolaire des EA.

Stratégies

Axe 4 : SCOLARISATION DES ENFANTS PA

• Au moins 20 centres d’alphabétisation pour les adultes sont fonctionnels dans chaque région d’intervention.

• Au moins 150 jeunes autochtones sont formés à un métier dans chaque région d’intervention.

• Toutes les écoles de préparation et d’intégration sont dotées en matériel didactique et pédagogique et les enseignants sont pris en charge par l’Etat.

• Toutes les écoles préparatoires ORA sont officiellement reconnues.

• La participation des PA à la gestion des écoles est effective.

• Les enseignants disposent de méthodes pédagogiques spécifiques et les utilisent.

• 20 écoles publiques intègrent sans discrimination les EA dans chaque région d’intervention.

• Les EA sont scolarisés et terminent leurs études de premier cycle.

Résultats attendus

• CLD

• GREF

• Conseils Départementaux

• Ministère de l’Enseignement Primaire

• ASPC Filles de la Charité et Sœurs de la Sainte Famille

• RENAPAC

Partenaires clés proposés

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• Encourager et valoriser les échanges entre médecine moderne et pharmacopée PA.

• Développement de la recherche sur la pharmacopée.

• Renforcement des capacités des tradipraticiens des PA et des bantous.

• Amélioration des services de santé en y intégrant les systèmes de savoir traditionnels. • Organiser des ateliers d’échanges/formations sur la pharmacopée, ouverts aux villages et campements PA qui n’ont pas de guérisseurs et à tous les agents de santé Bantous.

• Documenter la tradition médicale PA.

• Formation des agents de santé à la non-discrimination et à l’éthique professionnelle.

• X agents de santé et guérisseurs sont formés.

• Au moins 3 ateliers sont organisés chaque année dans chaque région d’intervention.

• La documentation sur la tradition médicale PA est disponible.

• Au moins un agent de santé par hôpital ou poste de santé est formé dans chaque village touché par l’intervention.

• X enfants PA sont vaccinés.

• Amélioration de l'hygiène, l'assainissement et l'accès à l'eau potable en milieu autochtone.

• Sensibilisation des deux populations, PA et Bantous, sur l’importance de l’accès aux soins et de l’application des normes d’hygiène.

• • •

• • • • • •

RENAPAC Pères Spiritains Sœurs de la Charité ONUSIDA Ministère de la Santé Comités locaux de développement Ministère de la recherche scientifique Universités OMS UNESCO

RENAPAC Pères Spiritains Sœurs de la Charité Ministère de la Santé Conseils Départementaux Comités locaux de développement • ASNU

• • • • • •

• X leaders, surtout les femmes, des villages et campements touchés par l’intervention sont formés.

• Lutte contre les principales maladies infantiles en vue de réduire la mortalité infanto juvénile.

• Ministère de la Santé • ASNU • CNSE

• Le rapport d’enquête démographique sanitaire est disponible.

• Renforcement des activités de prévention et formation en santé, VIH/sida et hygiène.

Partenaires clés proposés

Résultats attendus

• Promouvoir l’accès des PA aux services de santé et promouvoir l’hygiène et l’habitat.

• Réaliser une enquête démographique sanitaire du milieu PA.

Actions à mener

• Documentation de la situation sanitaire des PA.

Stratégies

• Tracer le profil de la situation sanitaire en milieu PA.

Objectifs spécifiques

Axe 5 : AMÉLIORATION DE L’ACCÈS DES PA AUX SOINS DE SANTÉ

Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique


Stratégies

• Revitalisation du patrimoine culturel et des savoirs traditionnels des populations autochtones.

Objectifs spécifiques

• Promouvoir et sauvegarder l’identité culturelle des PA au Congo.

• Mener un plaidoyer auprès de l’UNESCO pour que l’organisation reconnaisse la culture PA comme patrimoine de l’humanité.

• Mener un plaidoyer auprès du gouvernement sur l’intérêt de ratifier certaines conventions de l’UNESCO (2003 et 2005).

• Produire des outils de communication à diffuser.

• Diffuser la culture PA à travers les médias.

• Sensibiliser les leaders PA et les chefs de village Bantous sur l’importance de préserver la culture traditionnelle PA.

• Organiser, suivre les évènements culturels et créer des radios et TV communautaires PA (conférences, émissions, films documentaires, reportages, théâtre, spectacles de musique et de danse etc.).

• Former les médiateurs culturels PA et Bantous.

• Sensibiliser les communautés nationales et internationales à la sauvegarde du patrimoine culturel autochtone.

• Créer un Centre de Promotion Culturelle.

Actions à mener

Axe 6 : VALORISATION DE LA CULTURE ET DES TRADITIONS DES PA

• La culture PA est reconnue comme patrimoine de l’humanité.

• Les conventions de l’UNESCO sont ratifiées.

• Les outils de communication sont diffusés.

• La culture traditionnelle PA est reconnue comme patrimoine de l’humanité par UNESCO.

• X supports de communication sont produits et diffusés.

• X émissions radio et télévisées sont diffusées au niveau local et national chaque année.

• La culture PA est mieux connue.

• X leaders PA et chefs de village Bantous sont sensibilisés.

• X événements culturels sont organisés chaque année.

• X médiateurs culturels sont formés dans chaque région d’intervention.

• Un Centre de Promotion Culturelle est créé et opérationnel.

Résultats attendus

• Associations et ONGs

• Universités et écoles

• Médias

• Ministère de la Communication

• Ministère des Affaires Sociales

• Ministère de la Culture et des Arts

• RENAPAC

Partenaires clés proposés

Plan d’action à court terme pour le changement des normes et pratiques sociales vis-a-vis des peuples autochtones en République du Congo 2010-2013

53



Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique

Plan de suivi et évaluation

L

a mise en œuvre de la stratégie nationale pour le changement des normes et pratiques sociales vis-à-vis des peuples autochtones est un processus long et complexe. Il est ainsi nécessaire d’établir et de respecter un plan de suivi et évaluation, avec des responsabilités précises, sur la base de compétences spécifiques diverses.

C’est un plan général qui peut être adapté en fonction des exigences de terrain et des parties prenantes. Il doit être établi et partagé entre les acteurs de mise en œuvre de la stratégie nationale au début de chaque année, selon l’approche participative et consensuelle. Un état des lieux initial permettra de collecter les données de base. Les outils pour la collecte de données et les modalités d’analyse, ensemble avec les indicateurs quantitatifs et qualitatifs, seront révisés, sur la base des cadres logiques que chaque acteur de mise en œuvre devra préparer. Le suivi des résultats et la cohérence entre le chronogramme des activités et leur réalisation effective, seront régulièrement vérifiés par le coordinateur de chaque intervention, en accord avec les responsables de l’UNICEF et le Gouvernement (experts des Ministères compétents). L’évaluation finale externe devra enfin s’assurer de l’effective contribution au changement des normes et pratiques sociales vis-à-vis des PA et l’impact sur l’amélioration des conditions de vie. A cet égard, le plan s’articule autour des principaux axes suivants : (i) définition des indicateurs de suivi lors des ateliers de planification annuelle ; (ii) organisation des missions de suivi et de supervision ; (iii) documentation d’appui, y compris les rapports de missions de terrain ; (iv) réunions semestrielles et rapports d’exécution/avancement des activités ; (v) revue annuelle ; évaluation finale en 2013.

55


56

• Plaidoyer auprès des autorités locales pour l’adoption de délibérations et réglementations facilitant l’accès des PA à la terre.

• Mettre en place un cadre de concertation des politiques, de partage d’expériences, de compétences et des ressources.

• Mettre en place des systèmes efficaces de financement rural.

• Négocier avec les intermédiaires commerciaux pour accéder aux débouchés économiques, aux services et aux administrations.

• Mettre en place des systèmes efficaces des finances rurales.

• Organiser des activités d’accompagnement familial, de formation à la gestion du budget et de promotion de l'épargne.

• Favoriser le recrutement des PA dans les structures économiques tant publiques que privées.

• Former les PA en compétences de gestion, de suivi de performance et l’instauration de la culture de responsabilité et du résultat.

• Les autorités locales sont sensibilisées. Au moins une délibération règlementant l’accès à la terre est adoptée et appliquée.

• Les PA, hommes et femmes, ont plus facilement accès aux ressources et ont acquis les compétences nécessaires pour les gérer de façon viable et efficace.

• Consulter les PA pour un consentement préalable, libre et éclairé sur les choix des actions pertinentes.

• Organiser les PA en groupements d’AGR.

Indicateur de procédure/produit (résultats attendus)

Indicateur de procédure/produit (résultats attendus)

Objectifs spécifiques

2010

Données de départ T1

T2

T3

Résultats T4

• Textes juridiques adoptés

• Analyse sur le terrain

• Rapports des Assemblées/Réunions/Atelier s des groupements

• Fiche de présence et rapport de formation

• Rapports d’analyse diagnostique des besoins de formation

• Liste des leaders identifiés

Sources des données

Réduire la vulnérabilité sociale et économique des PA

PLAN DE SUIVI ET ÉVALUATION ANNUEL

• Trimestrielle

• Trimestrielle

Fréquence de recueil des données

• Conseils Départementaux

• Agences de développement

• Ministère de la Culture et des Arts

• Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage

• Les institutions de la micro finance

• Conseils Départementaux

• Comité Local de Développement

• ONG de développement

Responsables

Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique


• Documenter la problématique des droits des PA notamment recenser les cas de violations de ces droits.

• Des mécanismes d’assistance juridique et judiciaire à l’égard des PA sont fonctionnels.

• Des données d’information fiables et précises sont disponibles, notamment sur les cas de violation des PA.

• Les communautés PA connaissent leurs droits et peuvent les exercer et/ou les revendiquer, les cas de violation des droits sont dénoncés et sanctionnés.

• Organiser des campagnes de sensibilisation à l’égard de la population (Bantous et PA) sur les droits de l’homme en général, les droits des PA en particulier, et la non-discrimination.

• Mettre en place et en œuvre des mécanismes d’assistance juridique et judiciaire à l’égard des PA.

• La population (Bantous et PA) est sensibilisée sur les droits de l’homme en général, les droits des PA en particulier, et la non-discrimination.

• Former les autorités nationales et locales, la force publique, les membres des organisations de la société civile aux droits de l’homme et aux principes de non-discrimination.

• Les instruments adéquats sont adoptés, ratifiés, connus et appliqués.

Indicateur de procédure/produit (résultats attendus) 2010

Données de départ T1

T2

T3

Résultats T4

• Analyse sur le terrain

• Etude sur les violations des droits en milieu PA

• Programmes des médias

• Plans d’action des institutions locales

• Registres des tribunaux

• Rapports des Assemblées/Réunions.

• Fiche de présence et rapport de formation

Sources des données

• Trimestrielle

Fréquence de recueil des données

Promouvoir les droits humains et les principes de non-discrimination Promouvoir la culture des droits humains Réduire les violations des droits et les abus envers les PA

• Les autorités nationales et locales, la force publique, les membres des organisations de la société civile sont formés aux droits de l’homme en général, et aux droits des PA en particulier.

• Assurer le suivi de l’adoption, ratification et application des instruments juridiques nationaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme en général, et droits des PA en particulier.

Actions à mener

Objectifs spécifiques

• Commission Européenne

• Cliniques juridiques et Barreaux (Consortium)

• Universités et Ecoles de formation

• Ministère de la Communication

• Ministère de la Justice et des Droits Humains

• ONG de défense des droits de l’Homme

• RENAPAC

Responsables

Plan de suivi et évaluation

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• Former les leaders PA sur les droits et devoirs politiques, en vue de la vulgarisation au sein des communautés.

• Mener un plaidoyer pour la reconnaissance officielle des chefs PA de campement ou village.

• Toutes les autorités concernées sont formées.

• Appuyer les initiatives et mécanismes de proximité pour l’accès des EA à l’état civil.

• X personnes PA sont sensibilisées et connaissent leurs droits et devoirs

• X leaders PA sont formés

• L’arrêté préfectoral est promulgué et appliqué.

• Tous les chefs de village ou campements PA sont officiellement reconnus dans chaque région d’intervention.

• Au moins 80% des enfants autochtones sont enregistrés à l’état civil.

• X relais communautaires sont formés.

• X parents PA des zones d’intervention sont sensibilisés.

• La loi sur l’état civil est élaborée, promulguée et vulgarisée, y compris les textes d’application.

Indicateur de procédure/produit (résultats attendus)

• Accompagner les communautés PA et les autorités concernées dans le processus d’obtention de l’acte de naissance.

• Améliorer le cadre juridique et institutionnel, ainsi que les pratiques professionnelles de l’état civil.

Actions à mener

Objectifs spécifiques

2010

Données de départ T1

T2

T3

Résultats T4

• Analyse sur le terrain

• TDR des formations

• Fiches de présence aux formations

• Rapports des formations

• Rapports des réunions • Textes officiels

• Analyse sur le terrain

• Registres des Tribunaux • Registres des actes de naissance • Rapports des formations • Fiches de présence aux formations • TDR des formations

Sources des données

Promouvoir la citoyenneté et la participation des PA à la vie publique

• Trimestrielle

• Trimestrielle

• Trimestrielle

Fréquence de recueil des données

• MATD

• Ministère de la Justice et des Droits Humains

• RENAPAC et ONGs

• RENAPAC • Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation

• Ministère Affaires Sociales

• Tribunaux

• Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation

• RENAPAC

Responsables

Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique


• 20 écoles publiques intègrent sans discrimination les EA dans chaque région d’intervention .

• Favoriser l’accompagnement familial à la scolarisation des EA.

• Mettre en œuvre un programme de sensibilisation et d'appui aux écoles publiques.

• Identifier et former les alphabétiseurs locaux.

• Valoriser les compétences traditionnelles (apiculture, chasse, pêche, pharmacopée, cueillette et artisanat).

• Faciliter l’accès des jeunes autochtones aux centres des métiers et à l’apprentissage en entreprise.

• Intégrer dans les curricula les compétences de vie courante.

• Faire participer les parents autochtones aux Comités des Parents d’Elèves (CPA).

• Améliorer les conditions d’enseignement dans les écoles de préparation et d’intégration.

• Intégrer les écoles ORA dans la carte scolaire nationale.

• Former les enseignants aux méthodes pédagogiques spécifiques.

• Adaptation des conditions d’enseignement -apprentissage aux réalités des EA.

• Au moins 20 centres d’alphabétisation pour les adultes sont fonctionnels dans chaque région d’intervention.

• Au moins 150 jeunes autochtones sont formés à un métier dans chaque région d’intervention.

• Toutes les écoles de préparation et d’intégration sont dotées en matériel didactique et pédagogique et les enseignants sont pris en charge par l’Etat.

• Toutes les écoles préparatoires ORA sont officiellement reconnues.

• La participation des PA à la gestion des écoles est effective.

• Les enseignants disposent de méthodes pédagogiques spécifiques et les utilisent.

• Les EA sont scolarisés et terminent leurs études de premier cycle.

Actions à mener

• Intégration des EA dans les écoles publiques sans discrimination.

Indicateur de procédure/produit (résultats attendus)

Objectifs spécifiques

2010

Données de départ T1

T2

T3

Résultats T4

• Textes officiels

• Analyse sur le terrain

• Curricula scolaires

• TDR des formations

• Fiches de présence aux formations

• Rapports des formations

Sources des données

Faire accéder les enfants PA à leur droit à l’éducation, en réduisant les attitudes discriminatoires entre le PA au sein des écoles

• Trimestrielle

Fréquence de recueil des données

• CLD

• GREF

• Conseils Départementaux

• Ministère de l’Enseignement Primaire

• ASPC Filles de la Charité et Sœurs de la Sainte Famille

• RENAPAC

Responsables

Plan de suivi et évaluation

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• Lutte contre les principales maladies infantiles en vue de réduire la mortalité infanto juvénile.

• X agents de santé et guérisseurs sont formés.

• Au moins 3 ateliers sont organisés chaque année dans chaque région d’intervention.

• La documentation sur la tradition médicale PA est disponible.

• Organiser des ateliers d’échanges/formations sur la pharmacopée, ouverts aux villages et campements PA qui n’ont pas de guérisseurs et à tous les agents de santé Bantous.

• Documenter la tradition médicale PA.

• Au moins un agent de santé par hôpital ou poste de santé est formé dans chaque village touché par l’intervention.

• Formation des agents de santé à la non-discrimination et à l’éthique professionnelle.

• X enfants PA sont vaccinés.

• X leaders, surtout les femmes, des villages et campements touchés par l’intervention sont formés.

• Réaliser une enquête démographique sanitaire du milieu PA.

• Amélioration de l'hygiène, l'assainissement et l'accès à l'eau potable en milieu autochtone.

• Le rapport d’enquête démographique sanitaire est disponible.

Actions à mener 2010

Données de départ T1

T2

T3

Résultats T4

• Rapport d’analyse des résultats

• Analyse sur le terrain

• Rapport d’étude et le compendium sur la pharmacopée

• TDR des formations

• Fiches de présence aux formations

• Rapports des formations

• Rapports PEV

• TDR des formations

• Fiches de présence aux formations

• Rapports des formations

Sources des données

• Trimestrielle

Fréquence de recueil des données

Tracer le profil de la situation sanitaire en milieu PA Promouvoir l’accès des PA aux services de santé et promouvoir l’hygiène et l’habitat Encourager et valoriser les échanges entre médecine moderne et pharmacopée PA

Indicateur de procédure/produit (résultats attendus)

Objectifs spécifiques

• UNESCO

• OMS

• Universités

• Ministère de la recherche scientifique

• Comités locaux de développement

• Ministère de la Santé

• ONUSida

• Sœurs de la Charité

• Pères Spiritains

• RENAPAC

• CNSE

• ASNU

• Ministère de la Santé

Responsables

Rapport d’analyse diagnostique sur les normes et pratiques sociales vis-à-vis des populations autochtones en République du Congo et de planification stratégique


• Mener un plaidoyer auprès de l’UNESCO pour que l’organisation reconnaisse la culture PA comme patrimoine de l’humanité.

• Mener un plaidoyer auprès du gouvernement sur l’intérêt de ratifier certaines conventions de l’UNESCO (2003 et 2005).

• Produire des outils de communication à diffuser.

• Sensibiliser les leaders PA et les chefs de village Bantous sur l’importance de préserver la culture traditionnelle PA Diffuser la culture PA à travers les médias.

• Organiser, suivre les évènements culturels et créer des radios et TV communautaires PA (conférences, émissions, films documentaires, reportages, théâtre, spectacles de musique et de danse etc.).

• Former les médiateurs culturels PA et Bantous.

• Sensibiliser les communautés nationales et internationales à la sauvegarde du patrimoine culturel autochtone.

• Créer un Centre de Promotion Culturelle.

Actions à mener

Objectifs spécifiques

• La culture PA est reconnue comme patrimoine de l’humanité.

• Les conventions de l’UNESCO sont ratifiées.

• Les outils de communication sont diffusés.

• La culture traditionnelle PA est reconnue comme patrimoine de l’humanité par UNESCO.

• X supports de communication sont produits et diffusés.

• X émissions radio et télévisées sont diffusées au niveau local et national chaque année.

• La culture PA est mieux connue.

• X leaders PA et les chefs de village Bantous sont sensibilisés.

• X événements culturels sont organisés chaque année.

• X médiateurs culturels sont formés dans chaque région d’intervention.

• Un Centre de Promotion Culturelle est créé et opérationnel.

Indicateur de procédure/produit (résultats attendus) 2010

Données de départ T1

T2

T3

Résultats T4

• Analyse sur le terrain

• Rapports des événements culturels

• TDR des formations

• Fiches de présence aux formations

• Rapports des formations

• Rapport de construction ou aménagement de la structure du Centre Culturel

Sources des données

Promouvoir et sauvegarder l’identité culturelle des PA

• Semestrielle

Fréquence de recueil des données

• Associations et ONGs

• Universités et écoles

• Médias

• Ministère de la Communication

• Ministère des Affaires Sociales

• Ministère de la Culture et des Arts

• RENAPAC

Responsables

Plan de suivi et évaluation

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Fonds des Nations Unies pour l’Enfance

Contact : D-34, Rue Lucien Fourneau Boîte postale 2110 - Brazzaville République du Congo Tél. : (242) 281 50 24 / 652 52 22 - Fax : (242) 281 42 40 E-mail : brazzaville@unicef.org www.unicef.org/congo/french Crédits : Production / Graphisme : Patrick Carta (242) 675 13 37 Coordination : Hector Calderon Photographies : © UNICEF 2008 / Shravan Vidyarthi


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