MakingIt 4e trimestre 2011
L’industrie pour le développement
n La fin de la
croissance ? n Michelle Bachelet de l’ONU-Femmes n Afrique du Sud n L’énergie hydrogène à la rescousse ?
Nous pouvons le faire !
NUMÉRO 1, DÉCEMBRE 2009 lWe must let nature inspire us – Gunter Pauli presents an alternative business model that is environmentally friendly and sustainable lHot Topic: Is it possible to have prosperity without growth? Is ‘green growth’ really possible?
NUMÉRO 2, AVRIL 2010 l Nobuo Tanaka de l’Agence internationale de l’énergie cherche à lancer la transition énergétique de l’industrie l L’énergie pour tous : Kandeh Yumkella et Leena Srivastava nous parlent des mesures à prendre pour améliorer l’accès à l’énergie
NUMÉRO 3, JUILLET 2010 l L’impressionnant essor économique de la Chine : Entretien avec le ministre du commerce, Chen Deming l Vers un débat plus productif – Ha-Joon Chang demande d’accepter l’idée que la politique industrielle peut fonctionner
NUMÉRO 5, FÉVRIER 2011 l Une fenêtre d’opportunité pour le commerce mondial ? – Peter Sutherland évalue les possibilités de la conclusion d’un accord commercial multilatéral l En route vers une prospérité mutuelle – Xiao Ye se penche sur les échanges entre l’Afrique subsaharienne et la Chine
NUMÉRO 6, AVRIL 2011 l Alimenter un monde surpeuplé – Kanayo Nwanze, du FIDA, soutient qu’il faut donner aux petits exploitants agricoles l’occasion de devenir des entrepreneurs l Paul Bulcke, PDG de Nestlé, à propos de « créer de la valeur partagée » l Sujet brûlant : L’efficacité énergétique conduit-elle à l’augmentation de la consommation d’énergie ?
NUMÉRO 7, JUILLET 2011 l Le paradoxe de la mondialisation – Dani Rodrik l Le partage non équitable – Thomas Pogge s’exprime sur la responsabilité des pays riches dans l’augmentation de la pauvreté l Sujet brûlant : L’énergie nucléaire est-elle nécessaire pour un avenir sans carbone ?
NÚMERO 4, NOVEMBRE 2010 l Renforcer la capacité productive – Cheick Sidi Diarra soutient que les PMA doivent, et peuvent, produire davantage de biens et de services de meilleure qualité l Patricia Francis nous parle du changement climatique et du commerce l Sujet brûlant : la pertinence de l’entrepreneuriat pour le développement économique
Un magazine trimestriel. Stimulant, critique et constructif. Forum de discussion et d’échange au carrefour de l’industrie et du développement.
Editorial
« Les femmes supportent la moitié du ciel », dit un proverbe chinois qui soutient que les femmes contribuent autant que les hommes à l’expérience humaine. Néanmoins, cette affirmation relève plus dune aspiration que d’une constatation factuelle. Dans les pays développés comme dans les pays en développement, des écarts persistent entre les sexes en matière d’éducation, de santé, de travail, de salaires et de participation politique. Le présent numéro de Making It s’intéresse à l’égalité entre les sexes et à l’autonomisation économique des femmes. Comme l’a souligné Kofi Annan, ancien Secrétaire général de l’ONU, « aucun outil de développement n’est plus efficace que l’autonomisation des femmes ». Au niveau mondial, les femmes effectuent deux-tiers du total des heures de travail, mais elles ne gagnent que 10 % des revenus et ne possèdent que 1 % des propriétés. Les femmes se situent loin derrière les hommes pour ce qui est de l’accès à la terre, aux crédits et aux emplois décents, bien que de plus en plus d’études montrent que l’amélioration des options économiques des femmes stimule les économies nationales. Comme l’a indiqué Ban Ki-moon, l’actuel Secrétaire général de l’ONU : « Lorsque l’on autonomise les femmes, ce sont des communautés, des nations et la famille humaine tout entière que l’on autonomise ». Selon le premier rapport annuel 2010-11 d’ONUFemmes : « Dans les régions où les femmes bénéficient d’un accès égal aux ressources économiques, à des moyens d’existence décents et à des occasions d’exercer des fonctions de leadership – les éléments de base de l’autonomisation économique – le bien-être économique augmente ». Nous sommes ravis que l’article principal porte sur le défi de l’autonomisation des femmes selon Michelle Bachelet, la directrice exécutive de l’ONUFemmes. Making It remercie ses collègues à l’ONU-Femmes pour leur aide dans la conception de ce numéro.
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MakingIt L’industrie pour le développement
Éditeur : Charles Arthur editor@makingitmagazine.net Comité éditorial : Ralf Bredel, Tillmann Günther, Sarwar Hobohm, Kazuki Kitaoka, Wilfried Lütkenhorst (président), Cormac O’Reilly et Jo Roetzer-Sweetland Site Web et assistance : Lauren Brassaw outreach@makingitmagazine.net Illustration de la couverture : Maya Zankoul Design : Smith+Bell, UK – www.smithplusbell.com Merci à Donna Coleman pour son aide Imprimé par Gutenberg Press Ltd, Malte – www.gutenberg.com.mt sur un papier certifié FSC Pour consulter cette publication en ligne et pour participer aux discussions portant sur l’industrie pour le développement, rendez-vous sur www.makingitmagazine.net Pour vous abonner et recevoir les prochains numéros de Making It, veuillez envoyer un e-mail contenant votre nom et votre adresse à subscriptions@makingitmagazine.net Making It: L’industrie pour le développement est publié par l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), Vienna International Centre, P.O. Box 300, 1400 Vienne, Autriche Téléphone : (+43-1) 26026-0, Fax : (+43-1) 26926-69 E-mail : unido@unido.org Copyright © 2011 The United Nations Industrial Development Organization Aucun extrait de cette publication ne pourra être utilisé ou reproduit sans l’accord préalable de l’éditeur ISSN 2076-8508 Les appellations employées et la présentation réalisée des contenus de ce magazine n’impliquent en aucun cas l’expression d’opinions de la part du Secrétariat de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI) concernant le statut légal de quelconque pays, territoire, ville, région ou de ses autorités, ni concernant la délimitation de ses frontières ou limites, ni concernant son système économique ou son degré de développement. Les termes « développé », « industrialisé » et « en développement » sont utilisés pour des raisons de commodité statistique et n’exprime pas nécessairement de jugement sur le niveau de développement atteint par un pays ou une région en particulier. L’évocation de noms d’entreprises ou de produits commerciaux ne constitue en aucun cas un soutien de la part de l’ONUDI. Les opinions, données statistiques et estimations contenues dans les articles signés relèvent de la seule responsabilité de l’auteur ou des auteurs, y compris ceux qui sont membres ou employés de l’ONUDI. Vous ne devez donc pas considérer qu’elles reflètent les opinions ou qu’elles bénéficient du soutien de l’ONUDI. Ce document a été produit sans avoir été officiellement révisé par les Nations Unies.
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Sommaire FORUM MONDIAL 6 Lettres 8 L’avenir des sociétés – Paul Polak nous explique comment créer de nouveaux marchés dynamiques pour des clients vivant avec moins de deux dollars américains par jour 10 Sujet brûlant : Croissance : la fin du monde tel que nous le connaissons ? Débat entre Richard Heinberg et Matthew Lockwood sur la « fin de la croissance » ou le « début de la croissance verte » 14 Affaires des affaires – actualités et tendances ARTICLES 16 Autonomiser des femmes entrepreneurs, dans notre pays et à l’étranger – Jan O’Sullivan considère que l’égalité des sexes est fondamentale dans le cadre du programme d’aide au développement de l’Irlande 18 Concevoir des solutions respectueuses de l’environnement – Carolina Guerra transforme des déchets dangereux en produits utiles et a été lauréate du Women’s Initiative Award de Cartier pour l’Amérique latine en 2011 20 Promouvoir des vies et des moyens d’existence durables – article d’Omar Traboulsi sur les défis auxquels sont confrontées les coopératives de femmes rurales dans la République du Liban et leur rôle crucial
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ARTICLE PRINCIPAL 22 Combler les écarts entre les sexes – Michelle Bachelet, directrice exécutive de l’ONUFemmes, décrit comment l’élaboration de politiques peut faire avancer l’objectif de l’égalité des sexes, et comment les obstacles qui empêchent les femmes de saisir des opportunités économiques peuvent être surmontés
Numéro 8, 4ème trimestre 2011
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30Voir plus grand – Gayle Tzemach Lemmon affirme que les femmes dans les pays pauvres ont besoin de ressources pour exploiter leur potentiel entrepreneurial 32 Faire face à la crise – Zoe Elena Horn examine l’impact de la crise économique internationale sur les femmes dans l’économie informelle 34 Zoom sur un pays – Entretien en Afrique du Sud avec la ministre des Relations internationales et de la Coopération, Maite Nkoana-Mashabane 38 Repartir avec une nouvelle feuille de route – Janez Poto nik, le commissaire européen à l’environnement, explique pourquoi les écologistes et l’industrie doivent travailler ensemble POLITIQUE EN BREF 40 Développement industriel tenant compte des disparités entre les sexes 42 Mesurer l’autonomisation économique des femmes 44 Solutions contre les écarts de salaire entre les sexes 46 Le mot de la fin – Entretien avec le Dr. Mustafa Hatipo lu, directeur général d’un projet de l’ONUDI visant à entrer dans une économie reposant sur l’hydrogène L’illustratrice pour couverture Maya Zankoul est une illustratrice/conceptrice graphique originaire du Liban et auteure d’Amalgam, le blog-bande dessinée transformé en livre. Elle travaille actuellement depuis son bureau à Beyrouth où elle effectue la conception graphique d’applications pour téléphones mobiles et tablettes ainsi que des illustrations pour des projets personnels et pour des magazines. Parmi ses derniers travaux en date figurent une application en ligne pour la création d’avatars (The Zankoulizer) et une exposition d’affiches illustrées sur le thème de la cuisine et des traditions culinaires libanaises. Son prochain projet est de créer une série de dessins animés inspirés de ses travaux. http://pro.mayazankoul.com
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FORUM MONDIAL La section « Forum Mondial » de Making It est un espace d’interaction et de discussions, dans lequel nous invitons les lecteurs à proposer leurs réactions et leurs réponses à propos de tous les problèmes soulevés dans ce magazine. Les lettres destinées à la publication dans les pages de Making It doivent comporter porter la mention « Pour publication » et doivent être envoyées par courrier électronique à l’adresse : editor@makingitmagazine.net ou par courrier à : The Editor,Making It, Room D2142, UNIDO, PO Box 300, 1400 Vienne, Autriche. (Les lettres ou les courriers électroniques peuvent faire l’objet de modifications pour des raisons d’espace).
LETTRES Économistes aux pieds nus Merci beaucoup pour l’entretien avec Manfred Max-Neef (Making It, numéro 7). Il est tout à fait vrai que la plupart des gens qui discutent, mesurent ou luttent contre la pauvreté ne savent pas ce qu’est la pauvreté. Au-delà des privations physiques que l’on observe dans la pauvreté existent l’espoir, la créativité et le courage requis pour y faire face. Les pauvres doivent être eux-mêmes impliqués dans la conception de stratégies d’intervention et de projets efficaces. De même, de nombreuses personnes vulnérables pourraient réussir à sortir de la pauvreté à condition qu’on leur en donne les moyens, notamment par le biais d’un renforcement de leurs capacités et de la disponibilité d’institutions, de cadres et de politiques propices ainsi que de productivités et de marchés rémunérateurs. Après des années de travail avec des groupes vulnérables dans l’agriculture et le secteur rural, j’ai compris que ce sont les contraintes de production et de commercialisation qui empêchent les foyers agricoles de sortir de la pauvreté. Pour lutter contre cette dernière il est nécessaire d’avoir d’une compréhension approfondie des problèmes et des perspectives dans des cadres particuliers et sur beaucoup d’idées apportées par les pauvres eux-mêmes. l Taiwo Osun, Kiel, Allemagne, commentaire sur le site Internet Il est drôle que Dani Rodrik et Manfred Max-Neef figurent dans le même numéro (Making It, numéro 7). Le professeur Rodrik
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enseigne à Harvard et est surement un homme très intelligent, mais je pense que l’ « économiste aux pieds nus » l’est encore davantage. Le professeur Rodrik affirme que les pays qui subventionnent la production agricole en paient le coût et que les pays qui reçoivent ces exportations agricoles subventionnées en tirent profit, car les aliments sont moins chers. Il est évident qu’il n’a pas compris que l’effondrement de l’agriculture haïtienne s’est produit à la suite d’un surplus de nourriture importée des ÉtatsUnis. Comme l’affirme l’économiste haïtien Camille Chalmers, un autre « économiste aux pieds nus » qui travaille en étroite collaboration avec des organisations de paysans : « Les conséquences sont désastreuses... chaque année, cent mille personnes perdent leurs moyens d’existence ». Et pour ce qui est du prix soi-disant moins élevé de la nourriture à Haïti, eh bien, nous savons tous ce qui arrive en ce moment aux prix internationaux des aliments ! l M. Fleurimond, commentaire sur le site Internet
Favorable aux travailleurs ? À ce qu’il paraît, le ministre de l’Industrie du Bangladesh prétend que son gouvernement est « favorable aux travailleurs » (Making It, numéro 7). Nous parlons bien du Bangladesh, un pays qui a été dénoncé par la Confédération syndicale internationale (ITUC) ? En 2010, dans son rapport sur le Bangladesh, l’ITUC écrit : « Les travailleurs du secteur textile ont initié des manifestations en avril pour demander un salaire minimum de 5 000 BDT par
Une révolution dans l’électricité – Husk Power Systems utilise l’enveloppe des grains de riz pour créer un gaz qui alimente des moteurs produisant de l’électricité.
mois (46 €). Ces manifestations se sont poursuivies tout au long de l’année et ont souvent fait l’objet d’une violente répression : six travailleurs ont été tués et de nombreux autres blessés. Des responsables syndicaux ont été arrêtés, des dizaines de milliers de travailleurs du secteur textile ont été poursuivis pour avoir participé aux manifestations et le gouvernement a fermé des centaines d’ONG ». Dans la suite du rapport on peut lire que : « Un responsable syndical a estimé que 5 000 travailleurs du secteur textile ont été licenciés, accusés d’avoir pris part aux protestations. Bien qu’elle compatît publiquement à la détresse des travailleurs du
secteur textile, la première ministre Sheikh Hasina était convaincue qu’une “force malfaisante” se cachait derrière une conspiration pour fomenter l’agitation dans le secteur. Une force de police spéciale a été créée pour faire face aux troubles dans le secteur textile ». l Farooq Javed, commentaire sur le site Internet
Au-delà du réseau électrique « Une révolution dans l’électricité » (Making It, numéro 6) est un excellent article. Il me plait parce qu’il montre que même ceux qui vivent au-delà des limites du réseau électrique peuvent avoir accès à de l’énergie, et qu’il s’agit même d’une bonne affaire ! Qui pourrait le contester ? Je me
Pour toute discussion complémentaire relative aux sujets évoqués dans Making It, veuillez accéder au site Web du magazine, à l’adresse www.makingitmagazine.net et à la page Facebook du magazine. Les lecteurs sont invités à parcourir ces sites et à participer aux discussions et aux débats en ligne à propos du secteur pour le développement.
demande pourquoi les gouvernements ne font pas plus d’efforts pour utiliser la biomasse comme source d’énergie. Le statu quo va finir par dévaster notre planète. Il n’y a donc personne qui s’inquiète de l’avenir de nos enfants ? l Chris Mann, commentaire sur le site Internet
Délabrement rural J’ai été fasciné par l’entretien avec Vandana Shiva (Making It, numéro 6). Elle a raison lorsqu’elle dit que les entreprises « se sont appropriées et ont colonisé » les semences. Elle a parlé du double danger que représentent les modifications génétiques et le brevetage des semences. Mme Vandana montre à quel point l’attitude des principales sociétés et
organisations du monde, comme la Banque mondiale, est foncièrement mauvaise à l’égard de l’exploitation agricole dans les pays en développement. La production agricole dans le monde a augmenté, mais elle n’a pas apporté de prospérité à la plupart de la population rurale (qui représente plus de trois milliards de personnes). C’est à la campagne que les gens courent le plus de risques de souffrir la faim, car les marchés agricoles internationaux figurent parmi les plus déséquilibrés au monde. À peine 22 % des exportations sont effectuées des pays en développent vers les pays développés. Une poignée d’entreprises monopolisent les apports commerciaux dans l’agriculture. Mme Vandana le montre clairement avec l’exemple des semences, et cela vaut également pour les
fertilisants et l’achat de produits alimentaires échangés à l’international. Dans de nombreuses régions du monde, les paysans les plus pauvres produisent la plupart de la nourriture dont ils ont besoin pour survivre. Ils sont néanmoins aussi devenus de plus en plus dépendants du travail non agricole ainsi que de l’argent envoyé par ceux qui ont migré vers les villes dans leur propre pays ou à l’étranger. Un nombre croissant de personnes seront encouragées à quitter la terre pour des travaux non agricoles ou pour migrer vers les villes. l James Greaves, ville de New York, par courrier électronique
Compliments Je vous félicite, car vous publiez un journal pourvu, intéressant et agréable à lire ! Je viens d’en recevoir une copie dans mon
courrier et j’ai été très impressionné. J’aimerais ajouter qu’avant d’entrer à l’université de Yale en 2001, j’étais éditeur de Far Eastern Economic Review à Hong Kong, et j’ai une idée du niveau d’effort qu’il faut fournir pour sortir un magazine comme le vôtre. l Nayan Chanda, directeur des Publications, Yale Center for the Study of Globalization, New Haven, États-Unis J’aimerais vous remercier de m’avoir envoyé Making It, numéro 6, « Agro-industrie : de la ferme à la table ». Je l’ai trouvé très utile et j’ai appris des choses sur certaines initiatives intéressantes dans le domaine agricole à travers le monde. J’ai fait circuler le rapport parmi des membres du comité de l’agriculture de la FICCI. l Dr S. Baskar Reddy, service de l’agriculture, Federation of Indian Chambers of Commerce and
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FORUM MONDIAL
Paul Polak pense qu’à l’avenir, les entreprises ne pourront rester compétitives sur le marché international qu’à condition de créer de nouveaux marchés dynamiques, adaptés aux besoins de clients vivant avec moins de deux dollars américains par jour.
L’avenir des sociétés Il y a trois ans, General Motors, la plus grande et la plus puissante des entreprises au monde, a dû courber l’échine pour ne pas avoir réagi rapidement et efficacement face à la concurrence des véhicules importés japonais plus petits, moins voraces en carburant et moins chers. Des sociétés comme Wal-Mart, Coca-Cola et Microsoft seront bientôt confrontées au même tournant que General Motors, devant « agir ou mourir », si elles ne relèvent pas rapidement et efficacement le défi de générer des profits élevés, à échelle, sur les marchés émergents. Chaque jour, trente millions de personnes font leurs courses à Wal-Mart, mais il existe trois milliards de personnes dans le monde qui n’y mettront jamais les pieds. Cela inclut 2,6 milliards de clients potentiels qui ont moins de deux dollars par jour pour vivre. Ils vivent majoritairement dans des zones rurales des pays en développement et tirent leurs moyens d’existence d’exploitations mesurant entre un demi-hectare et un hectare. De nombreux autres habitent dans des bidonvilles et vivent de ce que leur rapportent des entreprises informelles, comme de petits magasins de vente d’articles de consommation ou des entreprises de confection. Coca-Cola vend un produit qui se résume à de l’eau sucrée pétillante, portant une marque désirable, au prix de 25 centimes la bouteille dans des villages partout en Inde. Dans ces mêmes villages, 50 % des enfants souffrent de malnutrition. Qu’arriverait-il à Coca-Cola si une entreprise chinoise solidement financée commençait à vendre
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une boisson non alcoolisée nourrissante à cinq centimes de dollar américain la bouteille à des millions de villages à travers le monde ? Je pense que Coca-Cola se retrouverait rapidement dans la même situation que celle à laquelle a été confrontée General Motors il y a trois ans. La fondation Gates a aidé des millions de personnes à sortir de la pauvreté et a amélioré la santé et l’éducation de millions d’autres personnes. Pourtant, autant que je sache, aucun produit de la société mère Microsoft n’est vendu aux 2,6 milliards de personnes dans le monde dont les revenus s’élèvent à moins de deux dollars par jour. Les opportunités de créer des entreprises rentables adaptées aux besoins de ces trois millions de clients jusqu’à présent ignorés sont pourtant illimitées. Par exemple, un milliard de personnes ne seront jamais connectées à l’électricité. Cela correspond à peu près à la population totale des États-Unis et de l’Europe. Un milliard d’autres personnes n’ont pas accès à de l’eau potable. Bon nombre d’entre elles tombent malades et certaines en meurent. Pourquoi n’existe-t-il pas d’entreprises qui se soient investies avec succès sur les marchés émergents ? Il existe plusieurs explications à cela : l Elles n’y voient pas de profit potentiel. l Elles ne savent absolument pas comment s’y prendre pour concevoir des produits et des services extrêmement abordables et répondant aux besoins des pauvres. l Elles ne savent pas comment concevoir et faire fonctionner des chaînes d’approvisionnement du dernier kilomètre.
Trois stratégies pratiques clé doivent être incorporées par les entreprises souhaitant vendre à des clients vivant avec « deux dollars par jour » : l De petites marges associées à de grands volumes permettent de générer des profits finaux intéressants. Les supermarchés ont appliqué cette formule pour remplacer les épiceries traditionnelles, et Wal-Mart l’a améliorée. Pour les marchés émergents, il s’agit véritablement d’adopter la stratégie de Wal-Mart multipliée par cent. l Concevoir des propositions extrêmement abordables. Un mouvement appelé « Design for the other 90% » (concevoir pour les 90 % restants) est en train de monter en puissance. Il s’agit d’apprendre à concevoir des choses qui soient abordables pour des personnes vivant avec moins de deux dollars par jour, et qui permettent également de générer des revenus. l Mettre en œuvre des chaînes d’approvisionnement locales rentables. Spring Health, la société que j’ai constituée avec mes associés en Inde, créera, si elle fonctionne, une plateforme modèle pour des chaînes d’approvisionnement du dernier kilomètre dans de petits villages ruraux en Inde. La mission de Spring Health est de vendre de l’eau potable sûre, à l’échelle, à des gens qui n’y ont pas accès actuellement. En Inde orientale seulement, près de 300 millions de personnes n’ont pas accès à l’eau potable. La plupart d’entre-elles vivent dans de petits villages constitués de 100 à 300 familles et qui n’ont pas grand-chose en termes de marchés. Mais ils comptent chacun au moins trois magasins familiaux. Ils vendent de tout, des cigarettes au savon, en passant par des bonbons, des biscuits et toutes sortes d’articles ménagers de consommation. Spring Health a construit une citerne d’eau en ciment de 3 000 litres, pour un coût d’environ 100 dollars, à côté de chaque magasin. Ensuite, elle a purifié l’eau dans les citernes en utilisant un purificateur d’eau liquide extrêmement abordable. Le commerçant vend l’eau purifiée aux habitants du village pour moins d’un demi-centime le litre. Nos clients – dont la plupart vivent avec moins de deux dollars par jour – signalent une baisse radicale des maladies et des dépenses médicales. Chaque famille estime qu’elle paie entre 25 et 250 dollars par an en traitements contre la diarrhée, en visites
PAUL POLAK –fondateur de International Development Enterprises (IDE), une ONG basée dans le Colorado – se consacre au développement de solutions pratiques pour attaquer la pauvreté à ses racines. Au cours des 25 dernières années, M. Polak a travaillé avec des milliers d’exploitants agricoles dans des pays à travers le monde – notamment au Bangladesh, en Birmanie, au Cambodge, en Éthiopie, en Inde, au Népal, au Vietnam, en Zambie et au Zimbabwe – pour aider à concevoir et à produire des produits peu coûteux et rémunérateurs qui ont déjà sorti 17 millions de personnes de la pauvreté.
La pompe à pédales est un dispositif fonctionnant à propulsion humaine et que l’on installe au-dessus d’un puits. Le pompage est activé en appuyant alternativement sur les pédales qui actionnent des pistons, créant une succion dans le cylindre qui ramène l’eau souterraine à la surface. L’organisation International Development Enterprises (IDE) de Paul Polak a joué un rôle fondamental en popularisant la technologie des pompes à pédales au Bangladesh au début des années 1980, par le biais d’opérations ciblées dans le domaine des chaînes de valeur et du marketing social. Quatre-vingt-quatre fabricants produisent ainsi des pompes à pédales et 1,4 millions ont été vendues à des exploitants de petites parcelles au Bangladesh depuis 1985. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et d’autres organisations ont depuis lancé leurs propres initiatives de pompes à pédales dans d’autres pays.
Photo : Kris Krüg
médicales, en remplacements d’électrolytes, en infusions intraveineuses et en séjours à l’hôpital, tout cela pour traiter des maladies contractées en buvant de l’eau de mauvaise qualité. La mission de Spring Health est de fournir de l’eau potable sûre à cinq millions de personnes par l’intermédiaire de 10 000 magasins de village dans les trois années à venir, et à plus de 100 millions de personnes dans 400 000 villages à travers le monde dans les dix prochaines années. Je suis convaincu qu’il existe des milliers d’opportunités pour la création de nouveaux marchés et de nouvelles entreprises adaptées aux besoins de milliards de clients dans le monde qui sont actuellement ignorés par les marchés. Pour y parvenir, il ne faudra rien de moins qu’une révolution dans la façon de concevoir les entreprises, les prix, les marchés et la fourniture des produits et des services. Mais cette révolution permettra de créer des millions de nouveaux emplois, d’aider plus d’un milliard de personnes à sortir de la pauvreté et de faire un pas gigantesque vers la fin du déséquilibre environnemental de la planète.
Photo : Mukul Soni
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À droite : Paul Polak dirige un débat sur la conception de technologies abordables pour les pays en développement à PopTech 2008.
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Image : Adrian Teal/cartoonstock
SUJET BRÛLANT
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Croissance : la fin du monde tel que nous le connaissons ?
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La fin de la croissance RICHARD HEINBERG est un chercheur résident principal au Post Carbon Institute. Auteur de dix ouvrages, il est considéré par beaucoup comme un des porte-parole les plus efficaces du besoin urgent de cesser d’utiliser les combustibles fossiles.
Image : © Anastasia Sukhonosova / Dreamstime.com
Vous les avez entendus. Les politiciens, les économistes et les dirigeants d’entreprises disent tous la même chose : « L’économie se redresse ». Se redresse jusqu’où ? – son état normal de croissance constante. Ils ont tort. La croissance économique est bel et bien terminée. Elle a commencé il y a deux siècles. Des expansions économiques s’étaient produites auparavant, mais elles avaient été lentes et cycliques. Des empires étaient montés en puissance puis s’étaient effondrés. Mais avec la Révolution industrielle, la croissance rapide était devenue normale. Les
économistes nous disent que cela est dû à l’innovation, à la division du travail et à l’augmentation des échanges commerciaux, mais en réalité elle a principalement été le résultat de l’énergie bon marché. Il faut de l’énergie pour faire des choses, et avec du charbon et du pétrole bon marché, les gens ont pu faire plus de choses que jamais. D’abord le charbon, puis le pétrole ont accéléré le commerce en alimentant en énergie nos précieuses inventions – chemins de fer, automobiles et avions. Les économistes ont assumé que la croissance pourrait se poursuive indéfiniment. Il s’agissait d’une notion absurde. Personne ne s’est détenu à penser que cette croissance industrielle se déroulait sur une petite planète, ne comptant que sur des ressources pétrolières, foncières, forestières et halieutiques limitées. Notre croissance était en sursis. Nous sommes tous devenus dépendants de la croissance. L’augmentation du PIB s’est transformée en notre principale mesure du succès. Qui plus est, « plus gros et plus rapide » étaient synonymes de « meilleur ». Le premier signal d’avertissement s’est déclenché en 1970. Une équipe de ‰ scientifiques ont programmé un
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SUJET BRÛLANT ‰ ordinateur avec des données sur la croissance de la population, l’augmentation de la consommation et l’épuisement des ressources. Ils en ont conclu que la croissance avait des limites. Les économistes traditionnels ont attaqué ces résultats en utilisant des astuces rhétoriques déplorables. Pourtant, 40 ans plus tard, elles restent encore valables. En réalité, les économies des pays les plus riches du monde ont commencé à stagner depuis plusieurs années. Au fur et à mesure que les ressources ont commencé à s’épuiser, les gouvernements, les entreprises et les ménages se sont endettés jusqu’à la moelle, ayant abondamment recours au crédit facile. Le système financier a créé des titres et des montages de produits dérivés de plus en plus complexes afin d’éponger toute la dette et de réaliser des profits imaginaires en perpétuelle augmentation sur des actifs inexistants. Mais l’argent et la dette dépendent des ressources naturelles. Accumuler de la dette, année après année, la doubler, puis la doubler encore, signifiait que l’on accumulait des exigences relatives aux ressources qui étaient en train de diminuer de plus en plus à mesure que nous les épuisions. Il s’agissait d’un système pyramidal – la pire bulle imaginable. Finalement, en 2008, elle a explosé. Les gouvernements et les banques centrales ont essayé de regonfler la bulle en appliquant des mesures d’urgence et de stimulation, financées par la dette publique, mais il existe des limites pratiques en matière de dette, et nous sommes en train de les atteindre. Les ressources énergétiques aussi ont des limites, et nous sommes également en train de les atteindre. La capacité de la planète à absorber nos déchets et nos accidents industriels a clairement des limites, et nous les avons également atteintes. On nous dit que l’économie se redresse, mais hormis la nouvelle dette que les gouvernements ont contractée depuis 2008 pour stimuler l’économie, aucune véritable croissance économique ne s’est produite. Il n’y a pas de redressement. Tout a été fait en augmentant la dette. Nous avons déjà hypothéqué l’avenir de nos petits-enfants, mais pour empêcher
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« Personne ne s’est détenu à penser que cette croissance industrielle se déroulait sur une petite planète, ne comptant que sur des ressources pétrolières, foncières, forestières et halieutiques limitées. Notre croissance était en sursis. » l’économie de retomber, nous devons emprunter encore davantage. C’est la fin de la partie. Nous avons atteint la limite de la croissance économique telle que nous l’avons connue. Ils vous mentent. Mais ils ne peuvent pas faire autrement. Nous sommes tous accros à la croissance. Nous voulons tous de meilleurs emplois et des retours sur investissement plus élevés. Mais nous vivons sur une planète limitée. La fin de la croissance n’est pas la faute d’un politicien ou d’un parti politique particulier, mais certaines personnes ont plus bénéficié de la croissance que d’autres. Nous pouvons vivre sans croissance économique, mais nous allons devoir commencer par changer certaines de nos façons de faire. Nous devons mesurer et choisir des voies d’amélioration de notre vie pour lesquelles il n’est nécessaire ni d’augmenter notre consommation de combustibles fossiles, ou d’autres ressources en diminution, ni d’accumuler encore davantage de dettes : la liberté, passer du temps avec ceux que l’on aime, être en bonne santé et avoir du temps pour en profiter, vivre dans une communauté sûre et heureuse. Nous devons travailler ensemble pour bâtir des économies locales dans lesquelles il soit possible de vivre et de prospérer mais – et ce « mais » est important – sans combustibles fossiles et sans emprunter aux générations futures. Plus nous attendrons pour le faire et plus il sera difficile d’y parvenir. La croissance économique est terminée. Il faut aller de l’avant. l Extrait de l’ouvrage de Richard Heinberg intitulé The End of Growth: Adapting to Our New Economic Reality (La fin de la croissance et l’adaptation à notre nouvelle réalité économique).
Le début de la croissance verte MATTHEW LOCKWOOD est responsable du changement climatique à l’Institute of Development Studies du Royaume-Uni et a précédemment occupé le poste de directeur associé en charge du climat, du transport et de l’énergie à l’Institute for Public Policy Research. Il existe de nombreuses raisons pour défendre la croissance économique. Elle a favorisé la prospérité massive en GrandeBretagne au XXe siècle. Elle a fourni les ressources nécessaires pour construire les systèmes de santé, d’éducation et de sécurité sociale auxquels nous tenons tellement et qui ont été si souvent reproduits à travers le monde. En même temps, nous avons besoin de l’intervention du gouvernement pour traiter les externalités à l’origine du changement climatique. Les marchés ne réaliseront pas eux-mêmes la diminution des émissions de gaz carbonique dont nous avons besoin tant que les technologies à faible émission de carbone ne seront pas aussi compétitives que celles qui consomment des combustibles fossiles. Alors, si l’on pouvait avoir tous les avantages de la croissance sans endommager l’environnement, ne serait-ce pas l’idéal ? Et n’est-il pas évident que l’intervention des gouvernements est nécessaire pour accomplir les deux aspects de la croissance verte ? Le débat sur la croissance verte montre que les choses ne sont pas aussi simples. Selon la critique la plus fondamentale, la croissance verte est tout simplement impossible : il est utopique de développer et d’investir dans des technologies à faible émission de carbone suffisamment vite pour éviter un changement climatique dangereux et un réchauffement de la planète de 3 °C ou plus. Cet argument part du principe qu’il sera
impossible de dissocier la croissance et les émissions de carbone avant que l’impératif climatique ne devienne évident, et avant que bon nombre de politiques climatiques ne produisent des effets. Néanmoins, bien qu’il s’agisse d’une inquiétude très grave, tout ceci n’est pas couru d’avance. Cette analyse met surtout en évidence la difficulté à obtenir une croissance qui soit suffisamment verte. Pour parvenir à une croissance qui évite un changement climatique dangereux il faut transformer l’économie, notamment investir à un niveau et à une vitesse sans précédent dans des infrastructures énergétiques à faible émission de gaz carbonique. Cela s’applique, évidemment, à l’économie mondiale dans son ensemble, mais les pays développés, comme de Royaume-Uni, devraient être les premiers à le faire.
« Pour parvenir à une croissance qui évite un changement climatique dangereux il faut transformer l’économie, notamment investir à un niveau et à une vitesse sans précédent dans des infrastructures énergétiques à faible émission de gaz carbonique. »
Nous en arrivons ainsi à l’aspect qui est probablement le plus délicat du programme de la croissance verte : la politique. Il existe des problèmes à trois niveaux. Premièrement, pour donner forme à la croissance verte, il sera nécessaire de mener une intervention plus active sur l’économie, et cette intervention devra être intelligente et ferme. Il s’agit d’un défi énorme en matière de culture politique, car elle repose depuis longtemps sur le principe du laissez-faire. Il faudra ensuite relever le second défi politique : parvenir à une croissance verte implique de restructurer l’économie, et comme lors de toute restructuration, cela signifie qu’il y aura des gagnants et des perdants. Des coûts additionnels seront encourus à court terme. Cela pose un important problème pour tout gouvernement, surtout dans un contexte où le public est profondément hostile à l’égard des taxes environnementales, notamment dans des domaines touchant à l’utilisation de la voiture et des transports aériens. Le troisième problème est lié à la dette. Il semble tout à fait logique d’emprunter aux générations futures pour financer les investissements nécessaires aujourd’hui afin de décarboniser l’économie. Bien entendu, cela augmentera le montant de la dette dont hériteront les générations futures, mais si nous ne le faisons pas, nous leur laisseront un héritage bien plus dévastateur : celui d’un environnement endommagé. Dans ce cas et en raison du caractère irréversible des effets du changement climatique, l’argent ne suffira plus pour résoudre les problèmes environnementaux. En même temps, il semble de plus en plus probable que nous ayons besoin d’une forme de relance budgétaire pour rétablir la croissance à court terme, et la meilleure façon d’y parvenir serait d’investir dans les infrastructures. Néanmoins, de nombreux gouvernements, notamment le britannique, ont tissé autour de leurs options politiques un puissant discours dépeignant une dette écrasante, ce qui rend encore plus difficile pour eux de prendre rapidement et facilement des mesures pour le faire. La croissance verte est donc loin d’être inévitable ou simple. Pour y parvenir, il faudra relever des défis technologiques et politiques sans précédent. Nous avons tout intérêt à nous y mettre dès maintenant. n
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FORUM MONDIAL
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tendances n La croissance économique est en perte de vitesse dans la plupart des marchés émergents, et peu de pays seront en mesure de croître à des taux tendanciels si l’activité économique ralentit brutalement dans les pays occidentaux. Au niveau régional c’est l’Asie qui est en meilleure posture. Les données récentes indiquent un vaste ralentissement lié en partie à la politique anti-inflationniste, mais le rebond du Japon de l’aprèstsunami aide à amortir l’impact de cette faiblesse au niveau mondial. Bien qu’il existe maintenant un réel danger que les économies asiatiques enregistrent un
ralentissement grave, un retour à la récession reste néanmoins peu probable. Contrairement à l’Occident, la plupart des pays pourraient répondre à un tel scénario en introduisant de nouvelles mesures de relance budgétaire et monétaire. La croissance du PIB de la Chine ralentira en 2012, tout en restant à un niveau encore impressionnant de 8,2 %, en supposant que les autorités évitent les spirales inflationnistes ou un crash immobilier. L’Amérique latine a connu une forte reprise en 2010, mais la croissance va ralentir à 3,7 % en 2011 en partie en raison des efforts mis
en œuvre pour maîtriser les niveaux élevés d’inflation. La croissance sera encore plus modérée l’an prochain, descendant au niveau de 3,5 %, bien que certains pays parviendront à diminuer l’impact de la faible demande extérieure par un certain relâchement des politiques monétaires. L’expansion économique devrait s’accélérer sur la période 2013-2016, grâce à une consommation intérieure en hausse, à des politiques macroéconomiques saines et à la demande asiatique de matières premières. Cependant, les prix élevés des matières premières vont
continuer de renforcer le modèle traditionnel de croissance à deux vitesses qui caractérise la région, les économies d’Amérique du Sud enregistrant de meilleures performances que celles d’autres régions du monde. La reprise en Europe de l’est perd de son dynamisme. Bien que les exportations et la production industrielle continuent de progresser, les monnaies régionales et les marchés boursiers ont connu de fortes baisses. Le spectre de la contagion de la crise de la dette souveraine dans la zone euro, le marché clé de l’Europe de l’est à l’exportation, continue de peser sur la reprise. La croissance régionale baissera à 3,3 % en 2012. Les perspectives de croissance de la Russie continueront de dépendre des prix mondiaux des matières premières.
AFFAIRES DES AFFAIRES Le Forum économique mondial et le Boston Consulting Group ont publié un nouveau rapport mettant en évidence les pratiques commerciales novatrices de 16 « champions de la durabilité » sur les marchés émergents. Ces entreprises ont été choisies pour avoir créé des solutions non conventionnelles et rentables ayant un impact positif sur la croissance économique et améliorant la durabilité globale de leurs régions. Les chercheurs ont délibérément refusé de se tourner vers des gouvernements, des organisations environnementales ou des sociétés multinationales d’économies développées, car s’ils offrent tous des réponses bien pratiquées, celles-ci restent néanmoins insuffisantes. Au lieu de cela, ils se sont tournés vers des agents qui sont confrontés à un vaste éventail de contraintes dans leurs activités quotidiennes : des entreprises à croissance rapide, originaires et exerçant leurs activités sur les marchés émergents, où la prospérité économique et les populations sont en croissance rapide, et où les contraintes environnementales sont souvent plus élevées. Grâce à un processus de recherche rigoureux, le rapport a
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identifié et évalué 16 nouvelles entreprises basées dans des marchés émergents et qui partagent un état d’esprit et un ensemble de meilleures pratiques communs. Ces « nouveaux champions de la durabilité », situés dans des pays comme le Brésil, le Costa Rica, l’Égypte ou le Kenya, sont des exemples pouvant inspirer toute société à travers le monde souhaitant relever les défis de la performance, de l’innovation, de la croissance et de la durabilité. Plus précisément, ces entreprises : l transforment de manière proactive les contraintes en opportunités grâce à l’innovation ; l intègrent la durabilité dans leur culture d’entreprise ; l façonnent activement leur environnement commercial.
Selon le Forum économique mondial et le Boston Consulting Group, l’esprit, les pratiques et les modèles d’affaires de ces « champions de la durabilité » offrent des informations fondamentales dont peuvent se servir les entreprises basées dans les marchés émergents, les multinationales établies et les gouvernements. Ils peuvent provoquer des effets multiplicateurs et favoriser des comportements similaires et une expansion parmi les entreprises opérant sur les marchés émergents. Ils servent aussi de point de départ pour redéfinir l’avenir de la croissance, qui doit être solide et lier efficacement l’ensemble des éléments de la durabilité : l’économie, l’environnement et le social.
Les « nouveaux champions de la durabilité » sont : l Broad Group – République populaire de Chine l Equity Bank – Kenya l Florida Ice & Farm – Costa Rica l Grupo Balbo – Brésil Jain Irrigation Systems – Inde l Manila Water Company – Philippines l Masisa – Chili l TR Corporation – Chine, Hong Kong SAR l Natura – Brésil l New Britain Palm Oil – PapouasieNouvelle-Guinée l Sekem – Égypte l Shree Cement – Inde l Suntech – République populaire de Chine l Suzlon – Inde l Woolworths – Afrique du Sud l Zhangzidao Fishery Group – République populaire de Chine
Photo : Global Green Growth Institute
Nouveaux champions de la durabilité
Des bouleversements politiques et des troubles civils ont sapé la croissance économique dans de vastes régions du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. Cependant, la région devrait enregistrer une reprise l’année prochaine. En dépit des perspectives inquiétantes pour le monde développé et des cours mondiaux du pétrole en légère baisse, la croissance régionale s’accélèrera, tirée par l’investissement public massif en Arabie Saoudite, par la forte croissance en Irak et, en supposant que les fortes turbulences politiques cessent, par un rebond dans les pays touchés par le Printemps arabe. La croissance économique en Afrique subsaharienne s’accélèrera pour atteindre 5 % en 2012. Les contraintes structurelles demeurent importantes, mais les
économies régionales tireront leur vitalité des prix élevés des matières premières, de la hausse des investissements étrangers, des dépenses budgétaires et des réformes économiques sporadiques. (Economist Intelligence Unit) n Un nouveau rapport de PricewaterhouseCoopers (PWC) se penche sur les menaces et les opportunités liées à l’atteinte de l’excellence dans la production et l’approvisionnement manufacturiers. « Des événements tels que le tremblement de terre au Japon ont mis en évidence la grande faculté de reprise de la chaîne d’approvisionnement. Nous vivons dans un monde où les liens en aval et en amont de la chaîne d’approvisionnement, ainsi qu’à
l’intérieur des entreprises et avec me monde extérieur qui les entoure, sont de plus en plus importants ». Dans ce contexte, le rapport, Achieving excellence in production and supply, met en évidence cinq questions qui, d’après PWC, joueront un rôle important dans la détermination du niveau d’excellence, d’acceptabilité ou de médiocrité de la production : l Identifier et prévenir les risques au niveau de la chaîne d’approvisionnement. l Lier la planification de la demande à l’ensemble de la chaîne de valeur. l Matérialiser la collaboration entre les clients et les fournisseurs. l Étudier les perspectives du cycle de vie et faire preuve d’une valeur durable. l Attirer les personnes et les
compétences nécessaires pour l’avenir. Le rapport conclut en indiquant que « le fait que les entreprises communiquent et établissent de meilleurs rapports avec les clients, les fournisseurs et le monde qui les entoure, est un facteur important, commun aux cinq points précédents. Les entreprises qui sont déconnectées des clients ou ne parviennent pas à dialoguer convenablement avec eux, manqueront la possibilité d’atteindre l’excellence ou, pire encore, pourraient déclencher des bombes à retardement interrompant définitivement la production et l’approvisionnement. Celles qui parviendront à nouer ces liens pourront progresser et devancer clairement leurs pairs ». (pwc.com/industrialmanufacturing
Global Green Growth Forum
Le Premier ministre du Danemark, Helle Thorning-Schmidt lors de l’ouverture de la 3GF : « Nous avons déjà entendu des discours sur l’environnement. Il s’agit maintenant de les traduire en actions. Nous devons travailler aux côtés de nos industries et nos entreprises afin de trouver des solutions intelligentes, de développer des cadres réglementaires pertinents, et de fixer des priorités en matière de recherche et de développement ».
Le Global Green Growth Forum (3GF) qui s’est tenu en octobre à Copenhague, au Danemark, a fait progresser des partenariats ambitieux entre le public et le privé, axés sur les secteurs de l’énergie, des transports, du commerce et des finances, éléments clé d’une révolution industrielle verte. Le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-Moon, le Secrétaire général de l’OCDE, M. Angel Gurría, le Premier ministre d’Éthiopie, Meles Zenawi, le Premier ministre du Kenya, Raila Odinga, et 12 ministres et ministres adjoints, cinq dirigeants d’organisations des Nations Unies, 50 responsables d’entreprises d’envergure mondiale, des représentants des principales organisations de la société civile et des experts de la croissance verte, ont participé à 3GF. Les 200 participants étaient issus de 27 pays répartis sur les cinq continents. Dans son discours d’ouverture, le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-moon, a souligné l’importance de la collaboration entre le public et le privé : « Le fait que la croissance verte soit à l’ordre du jour peut constituer un moteur de progression du développement
durable au XXIe siècle. Elle est favorable aux affaires, à la politique et à la société ». Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), M. Kandeh K. Yumkella, qui a également participé à la 3GF, a déclaré : « Pour que notre avenir soit durable et économiquement viable, nous devons nous assurer que notre industrie ne nuise pas à l’environnement et ne favorise pas le changement climatique mondial. C’est le but fondamental de l’industrie verte. L’ONUDI aide les pays en développement à assurer une croissance basée sur une utilisation efficace des ressources et à faible émission de carbone, et à créer de nouveaux emplois verts tout en protégeant l’environnement. Nous aidons également les pays en développement à passer aux technologies propres et à mettre en œuvre des accords environnementaux, y compris le Protocole de Montréal ».
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Jan O’Sullivan TD, ministre d’État irlandais pour le Commerce et le Développement, considère l’égalité des sexes comme fondamentale dans le cadre du programme d’aide au développement de l’Irlande
Autonomiser
les femmes
entrepreneurs, dans notre pays
et à l’étranger
Nous estimons que l’égalité des sexes fait partie des droits de l’Homme. Nous estimons également que des sociétés égalitaires sont plus à même de créer des économies plus solides et durables, et mieux placées pour participer au commerce international. L’accroissement des échanges, au niveau régional et mondial, est au cœur de la croissance économique soutenue des pays les moins avancés du monde. Cependant il doit prendre en compte l’égalité des sexes. La capacité d’un pays à tirer profit d’une plus forte libéralisation du commerce dépend de la solidité et de la productivité de son économie nationale, qui doit inclure l’autonomisation économique des femmes. Ainsi, en tant que ministre pour le Commerce et le Développement de l’Irlande, une partie essentielle de mon travail consiste à soutenir une activité économique axée sur l’autonomisation des entrepreneurs (hommes et femmes) comme moyen de diminuer la pauvreté en Afrique. Dans les pays en développement, un certain nombre de facteurs importants limitent souvent la capacité des femmes à tirer parti des possibilités économiques, y compris lorsqu’elles proviennent de l’augmentation du commerce. L’accès limité et le contrôle des actifs productifs, tels que la terre et le crédit, représentent des contraintes majeures pour de nombreuses femmes qui tentent de créer ou de développer leurs propres entreprises. Il est difficile pour une femme qui ne possède pas son propre terrain d’obtenir un crédit. La participation des femmes à l’économie du monde en développement est souvent limitée au secteur informel. Les femmes sont nettement surreprésentées dans les emplois les plus vulnérables, tels que le travail familial non rémunéré, les emplois agricoles occasionnels et les emplois en tant que gens de maison. Le poids des soins non rémunérés à la maison est un autre facteur qui limite la capacité des femmes à se lancer dans une activité commerciale à l’extérieur de leur domicile. Cependant, il est également important de réfléchir sur des questions plus larges relatives aux droits et à l’autonomisation. Par exemple, l’éducation des filles est sans doute l’un des outils les plus puissants pour l’autonomisation des femmes. L’éducation fournit aux femmes les connaissances, les compétences et la confiance en soi dont elles ont besoin pour profiter d’opportunités économiques. Le rôle des femmes dans la prise de décision est également une question cruciale. Cela va de la participation des femmes au niveau communautaire et local, à la représentation accrue au sein des associations commerciales et d’agriculteurs, en passant par l’accroissement du nombre de femmes au parlement. L’accès à une santé maternelle et reproductive de qualité, permettant aux femmes de maîtriser leur fécondité, constitue un autre aspect clé de l’autonomisation.
L’expérience irlandaise JAN O’SULLIVAN a été élu membre du parlement irlandais en 1998, et en mars 2011 il a été nommé ministre d’État au ministère des Affaires étrangères, chargé du commerce et du développement.
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L’Irlande a de l’expérience dans ce domaine et peut partager des leçons sur l’égalité des sexes et l’autonomisation économique des femmes. De nombreuses choses ont changé pour les femmes en Irlande au cours des 50 dernières
années. Le mouvement des droits des femmes est devenu de plus en plus actif au cours des années 1960, lorsque les femmes ont commencé à exiger une plus grande égalité. La gratuité de l’enseignement secondaire a ouvert de vastes possibilités nouvelles. Dès les années 1970, un grand nombre de femmes ont commencé à fréquenter les universités et autres établissements d’enseignement supérieur. Le milieu professionnel a entamé une évolution. Les femmes n’étaient plus contraintes de renoncer à leur emploi dans la fonction publique après leur mariage. La réforme législative sur l’égalité salariale, de l’emploi et de la protection sociale a été introduite. En 1985, après une longue campagne menée par le mouvement des femmes, la loi sur la santé (planification familiale) (amendement) a été adoptée, légalisant la vente de contraceptifs à toute personne de plus de 18 ans. Pourtant, malgré près d’un demi-siècle de changements et une augmentation importante du nombre de femmes dans la population active, l’Irlande, comme de nombreux autres pays développés, compte toujours trop peu de femmes entrepreneurs. Seuls 15 à 18 % des entrepreneurs sont des femmes. Les femmes sont beaucoup plus enclines à lancer leur activité dans les secteurs liés à la consommation. Elles sont beaucoup moins nombreuses à le faire dans les secteurs des services aux entreprises et manufacturiers. Les enquêtes mettent en évidence de profondes différentes entre les hommes et les femmes quant à leur façon d’envisager le fait de devenir des entrepreneurs et de développer leurs propres entreprises. Les hommes sont plus nombreux que les femmes à être certains qu’ils disposent des compétences et des connaissances nécessaires pour démarrer une entreprise (57 % des hommes contre 42 % des femmes), et ce malgré que les femmes démarrant leur société ont un niveau d’éducation plus élevé que les hommes. La peur de l’échec parmi les entrepreneurs en phase de démarrage est plus élevée chez les femmes que chez les hommes (43 % contre 34 %).
Les femmes entrepreneurs Quels sont donc les principaux défis auxquels sont confrontées les femmes entrepreneurs en Irlande, et pourquoi sont-elles moins présentes sur les marchés d’exportation ? De toute évidence, le choix du secteur est l’un des problèmes, mais il existe toujours des questions culturelles et relatives au sexisme qui limitent les opportunités des femmes. Les trois causes les plus fréquentes de l’échec des entreprises menées par des femmes sont l’absence de financement adéquat, le manque d’expérience approprié, et la formation insuffisante. Ces facteurs contribuent également à l’échec des entreprises appartenant à des hommes. Mais si l’on creuse un peu plus, il existe d’autres questions plus enracinées liées à la problématique hommesfemmes qui ont un impact sur le succès d’une entreprise. Des études ont montré que les femmes sont moins susceptibles de se voir comme des créatrices d’entreprises et évitent les formations et les cours qui ciblent les « entrepreneurs ». L’impact de la vie familiale, la garde des enfants
ainsi que l’absence de modèles identificatoires de haut niveau sont d’autres facteurs qui limitent le développement d’entreprises par les femmes. Le soutien des femmes entrepreneurs est l’un des objectifs clé de la Stratégie nationale pour les femmes (National Women’s Strategy) (2007-2016) de l’Irlande. Il s’agit d’un programme d’action positive sur l’entrepreneuriat féminin qui favorise les occasions de réseautage et de formation. Une des initiatives cible les femmes entrepreneurs qui ont la capacité de développer leurs entreprises. Quarante femmes qui ont ce profil sont sélectionnées chaque année pour prendre part à un programme gratuit de mentorat fournit par certaines des femmes entrepreneurs les plus couronnées de succès d’Irlande. La stratégie vise également à améliorer l’accès des solutions de garde d’enfants, à rendre plus flexible l’organisation du travail et à augmenter les congés parentaux. En 2010, le gouvernement a adopté le Programme d’éducation et de prise en charge de la petite enfance (Early Childhood Care and Education Programme) qui fournit un accès accru à l’éducation préscolaire gratuite pour les enfants âgés de trois à cinq ans.
Aide irlandaise au développement Ces expériences et ces leçons apprises sont en grand partie reflétées dans les programmes d’aide au développement de l’Irlande. Comme l’ont démontré les propres avancées de l’Irlande en matière d’égalité des sexes, l’accès équitable à une santé et à une éducation de qualité est le fondement sur lequel repose l’autonomisation économique et politique des femmes. Par exemple, en 2010, l’aide irlandaise au développement a fourni 25,5 millions d’euros aux secteurs de l’éducation en Zambie, au Lesotho, au Mozambique et en Ouganda. La parité entre les sexes dans tous ces pays, y compris au niveau secondaire, s’est considérablement améliorée au cours des dernières années. Au Lesotho et en Éthiopie, l’Irlande a travaillé avec des associations de planification familiale afin de fournir un meilleur accès aux programmes de santé reproductive. Nous avons soutenu les réformes politiques et législatives nationales, telles que l’introduction d’une nouvelle législation sur les droits de succession et sur la réforme agraire, dans des pays tels que l’Ouganda et la Sierra Leone. Les organisations de la société civile travaillant sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes sont des partenaires clé dans notre travail. Un partenaire de la société civile fournissant des microcrédits à des femmes dans le Timor-Leste a constaté que l’augmentation des revenus des
« L'accès équitable à une santé et à une éducation de qualité est le fondement sur lequel repose l'autonomisation économique et politique des femmes. »
ménages grâce à la participation aux activités commerciales a permis aux femmes d’améliorer leur statut au sein de la famille et des communautés, et d’influencer les décisions clé en matière, par exemple, d’éducation des enfants.
Le commerce équitable Le réseautage, la création de partenariats et le renforcement des capacités sont d’autres composantes de notre travail dans ce domaine. L’aide au développement de l’Irlande soutient les organisations de commerce équitable en Amérique centrale et en Afrique de l’Est depuis déjà un certain nombre d’années. En 2010, elle a soutenu la mise en place d’une section locale de « Women in Coffee Alliance » au Kenya, l’un des rares organismes voué à l’amélioration des conditions des femmes dans le secteur du café par le biais de la formation et du renforcement des capacités. Les expériences des programmes sur le commerce équitable dans le monde en développement indiquent que ce type de soutien est essentiel, comme l’accent du commerce équitable sur la croissance et le commerce des cultures d’exportation pouvant souvent entraîner la mise à l’écart des femmes. Le soutien au programme de l’ Organisation internationale du travail pour l’égalité des sexes et le développement de l’entreprenariat des femmes (Women’s Entrepreneurship Development and Gender Equality programme) a permis le renforcement des capacités de plus de 230 femmes en Tanzanie et l’accroissement de leur accès au marché, notamment par la participation à des expositions et à des foires commerciales à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Il est donc clair que, bien que la dynamique, le rythme et l’orientation du changement diffèrent selon les pays et les cultures, les expériences de l’Irlande nous ont appris un certain nombre de choses que nous pouvons partager avec nos partenaires. Tout d’abord, un accès équitable à l’éducation et une santé maternelle et reproductive de qualité sont les fondements de l’égalité et de l’autonomisation. Les réformes législative et politique sont essentielles. Il ne fait aucun doute que les influences extérieures, telles que l’adhésion de l’Irlande à l’Union européenne, ont constitué des moments clé pour le processus de réforme législative et politique qui a commencé dans les années 1970. Le mouvement des femmes a favorisé un changement ascendant en Irlande, tout comme le mouvement des femmes dans de nombreux pays en développement, et continuera de recevoir le soutien de l’aide au développement de l’Irlande. Les femmes ont besoin de modèles identificatoires et de réseaux de soutien qui leur démontrent ce qui est possible. Enfin, les rôles traditionnels des femmes en matière de « garde des enfants », l’inégalité dans le partage de ces rôles entre hommes et femmes, ainsi que nos perceptions de ce que sont les rôles appropriés pour les femmes et les hommes à la fois à la maison et dans l’économie, continuent d’être les principaux obstacles à l’autonomisation économique des femmes. Les progrès sur ces questions peuvent véritablement faire avancer les choses en matière d’égalité et d’autonomisation des femmes dans tous les pays et, en fin de compte, permettre de créer des économies durables. n
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Les Women’s Initiative Awards de Cartier récompensent les meilleurs plans d’affaires au niveau international ; ce prix a été créé en 2006 par Cartier, le Women’s Forum, McKinsey & Company et l’INSEAD. Les prix visent à encourager la catégorie la plus vulnérable des entrepreneurs, au cours de la phase la plus précaire de leur activité : les femmes entrepreneurs qui démarrent une entreprise. Chaque année, un jury sélectionne 18 finalistes parmi plus de 1 000 projets présentés – les trois meilleurs projets issus de six régions (Amérique latine, Amérique du Nord, Europe, Afrique sub-saharienne, Moyen-Orient et Afrique du Nord, et Asie-Pacifique) – sur la base de leurs plans d’affaires. Les finalistes sont ensuite invitées en France pour la finale, qui inclut la présentation d’un plan d’affaires détaillé devant le jury. En fonction de la qualité du plan et de leur capacité à prouver leur créativité exceptionnelle, la viabilité financière du projet et son impact social, une lauréate est sélectionnée dans chacune des six régions. Chacune reçoit le prix Women’s Initiative Awards de Cartier, un an de coaching personnalisé, et 20 000 dollars américains de financement.
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Carolina Guerra est une pionnière de l’éco-entreprenariat originaire de Colombie qui transforme les déchets dangereux en produits utiles. En octobre 2011, elle a remporté le Women’s Initiative Award de Cartier pour l’Amérique latine.
Concevoir des solutions respectueuses de l’environnement Carolina Guerra a créé son entreprise, Ingerecuperar, dans la ville de Cali, à l’ouest de la Colombie, en 2007. Comme son nom l’indique – « inge » pour ingénierie, « recuperar » pour récupération – la société crée des solutions de récupération des déchets ; il ne s’agit toutefois pas de n’importe quel type de déchets, mais de résidus dangereux. « Tout d’abord, nous avons étudié la meilleure façon de lutter contre les déchets en question. Nous avons par la suite appliqué un procédé pour les réutiliser à l’échelle industrielle », dit Guerra. L’idée d’Ingerecuperar lui est venue alors qu’elle travaillait dans une entreprise qui générait des scories d’aluminium, un déchet résiduel produit lors de tout processus de fonte d’aluminium. « En dépit de tentatives pour nous débarrasser de ce type de déchet en respectant l’environnement, il n’existait en Colombie aucune entreprise pouvant nous aider en ce sens ! D’autres entreprises ont mis au point des solutions pour recycler les pièces métalliques de ces déchets, mais pas ce qui restait de ce processus ».
Une bonne occasion Guerra a ainsi décidé d’unir ses forces à celles de deux collègues et de rechercher des moyens d’utiliser les scories dans leur totalité. « Les résultats ont été excellents ! Compte tenu du volume de scories d’aluminium produites dans notre région, nous avons identifié une bonne occasion de créer une entreprise qui soit utile ». La société de Guerra a réussi à décrocher la seule licence environnementale dans le pays pour recycler les scories d’aluminium. L’initiative est une étape importante dans la lutte pour traiter de manière appropriée les déchets dangereux en Colombie. Comme l’explique Guerra : « Il existe une vaste législation en Colombie contre les déchets dangereux, et, peu à peu, les industries qui produisent ces déchets prennent conscience de l’importance de s’y conformer et commencent à les traiter de façon appropriée. Néanmoins, un pourcentage élevé d’entreprises industrielles n’ont toujours pas pris conscience des dégâts qu’elles peuvent causer aux rivières et à l’environnement au sens large. D’autres entreprises ne respectent pas la législation environnementale en matière de déchets, car elles manquent de ressources ».
Alternative gagnant-gagnant La société de Guerra offre une alternative gagnant-gagnant. « Dans notre pays, une des solutions pour le traitement de ce type de déchets consiste à les remettre à des décharges de déchets dangereux, pour un coût allant jusqu’à 700 dollars américains par tonne. Certaines entreprises se tournent vers des solutions moins éthiques, d’autres vont même jusqu’à se défaire de ces produits. Quant à notre entreprise, elle paie pour obtenir ce produit précieux ! » Nous avons eu beaucoup de mal à obtenir une licence environnementale pour recycler les scories d’aluminium. « Il a fallu beaucoup de patience pour convaincre les autorités », indique Guerra, « il s’agissait en effet d’une solution totalement nouvelle dans le pays ». Ingerecuperar compte aujourd’hui 10 employés à temps plein, et en 2010 la société a recyclé 195 tonnes de scories d’aluminium, un chiffre qui a doublé au cours du premier semestre 2011 seulement. La société transforme une partie des scories d’aluminium pour produire une forme de ciment qu’elle utilise pour fabriquer des blocs de construction, des bancs et des poteaux de clôture. La Colombie produit environ 500 000 tonnes de déchets dangereux chaque année, et, pour en tirer parti, Guerra analyse d’autres voies de recherche et solutions techniques. Parmi ces nouvelles perspectives figurent des projets visant à recycler les cendres d’incinérateurs, que l’on trouve par exemple dans les incinérateurs de déchets hospitaliers, et la « poussière de conduite » qui est extraite des conduites industrielles et recueillies dans des filtres. « Elle est très dangereuse », affirme Guerra, « car elle est pleine de métaux lourds ».
Le rôle des autorités Le contrôle des déchets dangereux en Colombie est la responsabilité de deux autorités environnementales. Comme l’explique Guerra : « D’une côté, on a le ministère de l’Environnement qui se charge habituellement de produire la législation pertinente, et de l’autre, les Sociétés régionales autonomes (Corporaciones Autónomas Regionales) qui sont censées la faire respecter. Toutefois, les Sociétés régionales se plaignent de ne disposer ni des ressources ni du personnel nécessaires pour surveiller toutes les
entreprises. En conséquence, de nombreuses entreprises ne respectent pas la législation, sans pour autant être sanctionnées ». Lorsqu’on lui demande ce qu’elle aimerait changer pour améliorer l’environnement commercial, Guerra est claire. « Je voudrais un plus grand soutien du gouvernement aux petites entreprises comme la nôtre – qui sont en phase de lancement et dont l’activité est favorable à l’environnement – en abaissant les impôts et en leur offrant davantage d’assistance. J’aimerais enfin que les Sociétés régionales autonomes soient plus performantes et qu’elles obligent réellement les secteurs générateurs de déchets dangereux à livrer leurs déchets à des entreprises comme la nôtre ». En ce qui concerne la sensibilisation plus large des entreprises à la notion d’industrie verte, Guerra considère qu’il reste encore beaucoup à faire. « Le concept d’éco-industrie est à peine entré dans l’esprit de la plupart des entrepreneurs. Il est très difficile pour les petits entrepreneurs, qui doivent quotidiennement se battre pour survivre, de prendre des mesures favorables à l’environnement dans leurs entreprises. Les grandes entreprises sont les seules qui prennent en compte ces questions ».
Être une femme d’affaires Guerra affirme qu’elle ne fait pas l’objet d’une discrimination fondée sur le sexe, mais elle se souvient tout de même d’un incident en particulier. Un fournisseur dont le contrat n’avait pas été renouvelé a appelé Ingerecuperar pour convaincre la société de le réintégrer, mais il n’exprimait pas clairement l’objet de son appel. « Quand je lui ai demandé de s’expliquer, il a perdu son sang-froid et a demandé à parler au patron, en disant qu’il refusait de se justifier auprès d’une secrétaire. Il a ensuite menacé de me faire licencier pour avoir été impolie et a raccroché ! » En ce qui concerne la situation des femmes entrepreneurs en Colombie, Guerra considère qu’en général « elle n’est pas très différente de la situation des hommes. Faire des affaires est très difficile dans notre pays, aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Il m’est arrivé qu’un homme refuse de négocier avec moi parce que j’étais une femme, mais ce comportement n’est pas courant ». n
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Au Liban, les producteurs agricoles locaux se sont organisés dans le cadre de coopératives. La clé de ce type d’organisations est de se réunir des ressources et de les mettre en commun : des équipements de production agricole et d’autres intrants, mais également des connaissances et des compétences en négociation, afin que ses membres tirent un meilleur parti de leurs activités. Il existe environ 1 350 coopératives enregistrées dans le pays. En général, les coopératives d’agriculteurs sont principalement composées d’hommes, mais les coopératives agro-industrielles comptent également des femmes. Il existe environ 125 coopératives de femmes rurales impliquées dans l’agroalimentaire, la plupart d’entre elles étant situées dans les régions administratives du Bekaa, du Nord et du Sud. Leur activité requiert la transformation de produits agricoles bruts en produits désirables sur le marché, y compris de nombreux aliments renommés. La coopérative permet aux membres de s’assurer une place pour la production de leurs produits, d’obtenir des équipements et des matières premières, et les aide à pénétrer sur les marchés locaux ou autres.
Les défis Toutes les coopératives rurales, aussi bien celles dominées par les hommes que celles composées de femmes, doivent surmonter d’importantes difficultés pour accéder aux marchés locaux et internationaux. Les principaux problèmes sont liés aux décennies de négligence du secteur agricole, notamment un manque de politiques en matière d’investissement, en particulier dans le secteur coopératif. La part du budget national allouée au secteur agricole dépasse rarement les 2 %. Une autre difficulté qui se présente est celle du mauvais état des infrastructures, surtout les
routes et les canaux d’irrigation. Cela réduit les chances d’obtenir une bonne récolte et d’assurer la fraicheur des produits à leur arrivée sur les marchés. La mauvaise protection contre les risques est également problématique. Les travailleurs et les exploitants agricoles n’ont généralement pas accès aux filets de sécurité, comme l’assurance contre les mauvaises récoltes ou la sécurité sociale. Comme tout autre habitant du Liban, les agriculteurs et les producteurs agricoles travaillent dans un contexte d’instabilité à la fois politique et économique. Les ralentissements économiques et les conflits rendent très difficiles de faire face aux dégâts des bâtiments, des biens fonciers et des ressources, aux interruptions de la production, à l’effondrement des marchés locaux, et ainsi de suite. Jusqu’à très récemment, le soutien ou l’accompagnement offert par le ministère de l’Agriculture aux coopératives rurales n’était que très limité. À un niveau plus général, une volonté politique est nécessaire pour contrecarrer les méfaits des politiques nationales, régionales et mondiales qui permettent aux marchandises étrangères d’accéder au marché sans imposer de réglementation, créant ainsi une concurrence déloyale qui sape les produits locaux. Au niveau plus local, de nombreuses coopératives rurales ont du mal à répondre à diverses exigences juridiques et administratives et à suivre les processus internes de gouvernance participative et inclusive. Bien qu’à première vue les obstacles mentionnés ci-dessus semblent affecter aussi bien les hommes que les femmes, ils ont un impact plus grave sur ces dernières qui, en outre, pâtissent d’autres contraintes sexospécifiques. Tous ces défis s’accumulent et rendent l’activité agricole précaire, angoissante et peut rentable. Il en résulte une tendance croissante
des membres de coopératives de sexe masculin à abandonner l’agriculture, du moins en tant que principale source de revenus et à exercer des activités et des professions non agricoles. Les femmes ont en règle générale moins d’options, mais lorsqu’elles peuvent trouver des activités plus rentables, elles quittent aussi le monde agricole. De quoi les coopératives ont-elles besoin pour arrêter cette tendance ? Il leur faut, de toute urgence, un soutien et des investissements. Les agriculteurs et les agro-transformateurs du Liban ont besoin d’un leadership du gouvernement favorisant l’optimisme et le dynamisme du secteur, d’une reconnaissance du rôle crucial qu’ils jouent dans la vie économique du pays et d’un soutien pour aider le secteur agricole à croître et à prospérer. En outre, si ce leadership vise à permettre aux femmes membres de coopératives au Liban de jouer pleinement le rôle dont elles sont capables, il doit comprendre les enjeux spécifiques qui caractérisent la vie des femmes dans l’agriculture.
Les différences sexospécifiques Au Liban, dans un contexte de forte migration des hommes vers les zones urbaines et d’augmentation des veuvages liés à la guerre, les femmes rurales ont dû se transformer en principaux contributeurs à la production agricole, de la plantation à la commercialisation. Le développement des coopératives de femmes rurales a commencé, semble-t-il, au milieu des années 1990, peu après la fin du conflit armé de 15 ans dont a souffert le Liban. Après la guerre, le pays a reçu une aide financière internationale considérable destinée à la reconstruction, dont une partie a été investie pour créer des structures génératrices de
Promouvoir des vies et des moyens d’existence durables Omar Traboulsi décrit les défis rencontrés par les coopératives de femmes rurales dans la République du Liban et présente une initiative qui soutient le rôle crucial qu’elles jouent dans la vie économique du pays. 20 MakingIt
Sur la photo : Coopérative de femmes rurales pour la transformation d’aliments, Rashayya, Gouvernorat du Bekaa.
OMAR TRABOULSI est le gestionnaire de programme du Collective for Research and Training on Development-Action (CRTD-A), une organisation non gouvernementale basée à Beyrouth (République du Liban). Le CRTD-A a pour objectif de contribuer au développement social des communautés et des organisations locales par le renforcement des capacités, notamment en matière d’analyse de la problématique hommefemme, la problématique hommefemme et le développement, la pauvreté et l’exclusion.
dans le domaine commercial. Les femmes rurales ont bénéficié de moins d’opportunités de formations et d’enseignement formel, limitant ainsi l’acquisition des connaissances et des compétences techniques dont elles ont besoin pour concurrencer les intérêts commerciaux sur un pied d’égalité. Bien que certaines femmes rurales aient des capacités et des compétences innées hors du commun, elles manquent toutefois en général d’expérience pour organiser et gérer seules les activités commerciales, administrer d’importantes sommes d’argent, effectuer des opérations financières et établir des relations directes avec les institutions publiques. La plupart des « intermédiaires » sont des hommes, ce qui complique encore davantage l’accès des femmes au marché, permet aux hommes de s’octroyer les profits du travail des femmes et renforce la domination masculine sur les marchés existants. L’énorme charge de travail quotidienne des femmes, en dehors de leurs activités agricoles, est également source de problèmes. Le fardeau du travail domestique, qui est non rémunéré, non comptabilisé et invisible, et qui doit, quoi qu’il advienne, être réalisé, provoque l’épuisement et le manque de sommeil et de loisirs des femmes rurales.
Favoriser l’accès au marché En 2002, le Collective for Research and Training on Development-Action a lancé une initiative nationale auprès des coopératives de femmes rurales portant sur quelques 40 coopératives actives situées principalement dans la région de Bekaa. Plus de 600 femmes figurent parmi les membres de ces coopératives, dont la plupart sont des chefs de ménage ou contribuent de manière significative aux revenus du foyer. L’initiative combine la recherche qualitative,
le soutien direct aux femmes s’organisant en coopératives de femmes rurales et le dialogue politique avec les décideurs. En s’appuyant sur l’expérience concernant les lacunes des précédentes initiatives, l’accent a été mis sur la promotion des connaissances et du leadership des femmes, ainsi que sur leur accès à la sphère publique et politique. Le projet part du principe qu’une transformation des relations entre les sexes au sein des ménages est nécessaire pour que les femmes puissent se livrer à des activités économiques rentables et être actives dans la sphère publique. Les recherches actuelles sur ce sujet visent à identifier l’impact des coopératives de femmes rurales en matière d’émergence d’un leadership des femmes rurales ainsi que les nouvelles possibilités créées pour une commercialisation solidaire durable. Un autre axe de recherche essentiel est celui de l’impact et de l’importance de la valeur ajoutée du travail des coopératives de femmes rurales, à savoir l’utilisation intelligente et rationnelle des ressources naturelles pour favoriser des vies et des moyens d’existence durables. Le dialogue politique a été renforcé grâce à la récente création par le ministère de l’Agriculture d’un comité national, dans l’optique d’élaborer une stratégie nationale en faveur des coopératives. L’un des principaux aspects de cette stratégie est l’accès durable au marché, surtout pour les coopératives de femmes rurales, en mettant particulièrement l’accent sur leur utilisation rationnelle des ressources naturelles. Le feu prix Nobel, Mme Wangari Maathai, a déclaré : « Il ne faut pas traiter uniquement les symptômes. Il faut parvenir aux causes profondes en favorisant la réhabilitation de l’environnement et l’autonomisation des individus. Les initiatives mise en œuvre sans impliquer les personnes visées sont vouées à l’échec ». n Photo : CRTD-A
revenus pour les femmes. Quelques 50 coopératives de femmes rurales ont été mises en place et ont bénéficié d’interventions comprenant la fourniture de matériel informatique, ainsi que de formations portant principalement sur la production technique et la comptabilité. Toutefois, ces initiatives avaient beau impliquer des investissements élevés, elles ne tenaient néanmoins pas compte de certains facteurs critiques qui allaient déterminer leur succès ou leur échec. Au début des années 2000, il devint évident que l’accent mis sur les coopératives de femmes avait été mal planifié et allait être de courte durée. Malgré le savoir-faire traditionnel des femmes rurales et l’importance de leurs revenus pour garantir des moyens de subsistance durables, les coopératives de femmes rurales sont confrontées à plusieurs problèmes. Tout d’abord et surtout, l’énorme problème de l’accès au marché pour les coopératives de femmes rurales subsiste, malgré qu’elles produisent des produits de bonne qualité grâce à leurs compétences et à leurs connaissances. La mobilité limitée des femmes est une explication possible de cette situation. Les femmes membres de coopératives rurales signalent que même si ce sont elles qui produisent les produits et réalisent tout le travail dans leurs petites agro-entreprises, les normes sociales sont si restrictives qu’elles ne sont pas en mesure de voyager toutes seules et d’utiliser les transports en commun. En conséquence, elles ne peuvent pas explorer de nouveaux marchés, rencontrer les clients et les fournisseurs et négocier avec eux, ou livrer et/ou acheter des marchandises. En outre, les femmes ont besoin de soutien pour développer et acquérir des compétences
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Photo : John Roberts
COMBLERLESÉCARTS Femmes participant à un meeting politique, Bangalore (Inde), mars 2007.
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Photo: Iva Zimova/Panos
ENTRE LES SEXES Michelle Bachelet, Directrice exécutive d’ONU Femmes, explique pourquoi l’organisation met l’accent sur l’autonomisation économique des femmes, comment les politiques macroéconomiques et l’élaboration de politiques peuvent faire avancer l’objectif d’égalité entre les sexes et de quelle manière les obstacles du marché du travail et sociaux qui empêchent les femmes d’accéder à de plus vastes possibilités économiques peuvent être surmontés. MakingIt 23
ÂŤ Seulement 13 des 500 plus grandes entreprises au niveau mondial avaient un PDG femme en 2009 Âť
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Photo : ONU/Paulo Filgueiras
MICHELLE BACHELET est la première Sous-Secrétaire générale et Directrice exécutive d’ONU Femmes, l’entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes créée le 2 juillet 2010. Elle a été la présidente du Chili de 2006 à 2010. Pendant sa présidence, elle a été à l’origine de la réforme du système de retraite de 2008, comprenant la création d’une retraite de base pour les femmes de foyers pauvres n’ayant jamais perçu de salaire en dehors du ménage et d’une allocation par enfant pour toutes les mères. Chile Crece Contigo (le Chili progresse avec toi) est un autre programme phare de son administration, reproduit dans d’autres pays d’Amérique latine, fournissant un soutien aux parents et aux enfants depuis leur naissance jusqu’à l’âge de quatre ans. La création d’un grand nombre de garderies et d’écoles maternelles gratuites, donnant aux femmes une plus grande liberté pour entrer sur le marché du travail et une loi visant à combler l’écart salarial entre les sexes, sont d’autres progrès majeurs pour les femmes mis en œuvre au cours de son gouvernement. Michelle Bachelet est de longue date un défenseur des droits des femmes, et elle a plaidé en faveur de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes tout au long de sa carrière.
L’indicateur le plus immédiat et important de l’autonomisation et du bien-être est obtenu en calculant les moyens d’existence, généralement issus d’un emploi rémunéré ou d’activités entrepreneuriales. Comme d’autres partenaires de développement, l’ONU Femmes reconnaît que les efforts pour réduire la pauvreté doivent principalement viser l’autonomisation économique des personnes et leur permettre ainsi d’augmenter leurs moyens d’existence et de passer au-dessus du seuil de pauvreté. Les femmes vivent différemment la pauvreté que les hommes, en raison d’inégalités structurelles dans les sociétés et les ménages qui limitent leur capacité à gagner et à contrôler les revenus. Lorsqu’elles deviennent autonomes au plan économique, les femmes exercent un plus grand contrôle sur leur vie et peuvent remettre en cause les relations de pouvoir personnelles et sociales qui limitent leurs options et perpétuent leur dépendance. (Le concept d’autonomisation implique ainsi de la puissance d’agir, des atouts, des opportunités et des capacités et il est à la fois une question de droits de l’Homme et un problème de développement). Pour que l’autonomisation économique des femmes devienne une réalité, il faut combler plusieurs écarts entre les sexes. Globalement, la part des femmes occupant un emploi rémunéré en dehors du secteur agricole a continué d’être à la traîne par rapport à celle des hommes. En Afrique australe, en Asie occidentale et en Afrique du Nord, 20 % seulement des personnes employées en dehors du secteur agricole sont des femmes. L’inégalité des sexes sur le marché du travail est aussi un sujet de préoccupation en Afrique sub-saharienne où seulement un emploi rémunéré sur trois en dehors du secteur agricole est occupé par des femmes. Cependant, même lorsque les femmes représentent une part importante des travailleurs salariés, leurs emplois ne sont pas forcément de qualité ni stables. Les femmes sont en effet généralement moins bien payées et ont un emploi moins sûr que les hommes. Par exemple : l l’Organisation internationale du Travail (OIT) estime que l’écart salarial moyen entre hommes et femmes est de 10 à 30 %. En Europe, l’écart salarial, dans les 30 pays analysés, varie de 15 à 25 %, et augmente en fonction des niveaux d’instruction et d’expérience. l Au niveau mondial, plus de la moitié des travailleuses (53 %)
occupent des emplois vulnérables, pour leur propre compte ou en tant que travailleuses familiales, peu ou non rémunérées, et n’ont aucune sécurité ni avantages ; dans certaines parties d’Asie et d’Afrique, plus de 80 % des travailleuses appartiennent à cette catégorie. l À l’autre extrémité de l’échelle, en 2009 seules 13 (3 %) des 500 plus grandes entreprises mondiales avaient un PDG femme. En Europe, région pour laquelle il existe plus de données comparables, la part moyenne des femmes présidant des conseils d’administration de sociétés importantes est également de 3 % seulement. l En 2009, il existait plus de 200 millions de petites et moyennes entreprises dans le monde appartenant à des femmes, soit près de 30 % du total. Les États-Unis comptaient en 2010 plus de huit millions d’entreprises appartenant à des femmes, employant plus de 23 millions de travailleurs et générant 2 860 milliards de dollars US. Dans la région Asie-Pacifique, environ 35 % de l’ensemble des petites et moyennes entreprises sont dirigées par des femmes. Pourtant, les grandes institutions financières ont été lentes à répondre aux besoins de ces entrepreneurs. l De nombreuses femmes, en particulier dans les zones rurales, n’ont pas de terres ou d’autres formes de garanties nécessaires à l’accès au capital. Pourtant, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) indique que des disparités flagrantes entre les sexes persistent dans toutes les régions concernant les exploitations agricoles, au niveau de la propriété mais aussi en termes de taille et de qualité des parcelles. l Des études sur l’utilisation du temps dans 44 pays montrent que les femmes passent au moins deux fois plus de temps que les hommes au travail domestique non rémunéré, et travaillent davantage, jonglant entre travaux rémunérés et non rémunérés. Combler ces écarts entre les sexes est essentiel, non seulement pour les femmes mais aussi pour les économies, pour les sociétés et pour les entreprises. Il est de plus en plus reconnu que les pays ne peuvent pas se développer et prospérer sans l’égalité des droits et l’autonomisation des femmes qui représentent la moitié de leur population. Ainsi, s’il existe déjà des arguments moraux et fondés sur les droits justifiant que l’on lutte contre les inégalités ‰
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« En 2009, il y avait plus de 200 millions de petites et moyennes entreprises appartenant à des femmes dans le monde, près d'un tiers du total ... »
‰ entre les sexes, je suis également déterminée, depuis ma position à l’ONU Femmes, à continuer de présenter des preuves convaincantes du fait que l’égalité des sexes est favorable à la prospérité économique et au bien-être social. Cette argumentation existe déjà en grande partie. Le rapport du Forum économique mondial sur l’écart entre les sexes montre que, dans les 134 pays étudiés, il existe une corrélation positive entre l’égalité des sexes et le PNB par habitant. Ce résultat semble pertinent : la Banque mondiale et d’autres organisations ont montré que l’augmentation de la part des femmes dans la population active et la création de revenus favorisent la croissance économique et ont un effet multiplicateur sur la société dans son ensemble, notamment en termes d’éducation et de santé. La FAO estime que démocratiser l’accès des femmes à la terre et à d’autres intrants agricoles stimulerait la productivité agricole et réduirait de 100 à 150 millions le nombre de personnes souffrant de la faim. Dans le secteur privé, une étude réalisée par la société de conseil en gestion McKinsey & Co. montre que les entreprises qui comprennent au minimum trois femmes dans leur conseil d’administration ou parmi les cadres supérieurs, ont surperformé de 53 % celles qui n’en comptaient aucune.
Comment les politiques macroéconomiques peuvent faire progresser l’égalité des sexes Les gouvernements ont un rôle clé dans la redéfinition des objectifs nationaux et l’élaboration de cadres macroéconomiques pour atteindre ces objectifs en facilitant une stratégie de développement caractérisée par une croissance plus équitable et inclusive, et une plus grande stabilité économique. Les gouvernements doivent se concentrer sur la régulation des marchés – du travail, du crédit et des biens et des services – de manière à préserver la qualité du travail, à favoriser l’égalité des chances et à garantir que la politique et les institutions macroéconomiques, y compris l’architecture financière internationale, visent à assurer une croissance stable et durable des marchés. Pour ce faire, les gouvernements doivent disposer d’une parte d’une marge de manœuvre suffisante dans leur politique budgétaire, permettant de détendre les exigences
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d’équilibre budgétaire et les plafonds de la dette et d’autre part d’investissements publics ciblés, de façon à éviter la récession, à conserver les emplois, à soutenir la croissance à moyen et long terme, et à générer ainsi des revenus accrus pour rembourser la dette future. Et, tout aussi important, ils doivent pouvoir utiliser activement cette marge afin qu’elle profite à toutes les personnes, notamment les plus vulnérables. L’impact de la crise économique et financière de 2008-2009 ainsi que les réponses des gouvernements à travers le monde, illustrent ce que j’ai souvent dit dans le passé, « l’État ne peut être neutre ».
Surmonter les obstacles à l’autonomisation économique des femmes Les stratégies de l’ONU Femmes pour faire progresser l’autonomisation économique des femmes reposent sur trois piliers : un environnement juridique et d’élaboration de politiques favorable ; l’élargissement de l’accès aux opportunités économiques, y compris l’éducation et la formation, l’emploi et l’entrepreneuriat ; et le développement du leadership et de la participation dans les décisions politiques qui les concernent. Bon nombre d’économies ne sont plus en mesure de générer suffisamment d’emplois et de moyens d’existence pour le nombre croissant de nouvelles personnes entrant annuellement sur le marché du travail, ce qui rend la recherche d’emplois difficile pour les femmes et les hommes, et en particulier pour les jeunes. De plus en plus de personnes ayant perdu leur emploi ou de nouveaux membres de la population active doivent trouver un travail dans l’économie informelle. L’ONU Femmes plaide pour une politique macroéconomique plus cohérente et plus équitable entre les sexes, axée sur la croissance interne avec un niveau d’emploi élevé plutôt qu’une politique privilégiant une inflation faible. Elle doit également être ciblée sur les investissements publics et non sur les réductions de services publics et des infrastructures. Notre objectif est de mobiliser un soutien coordonné à l’échelle du système des Nations Unies en faveur des pays qui accordent la priorité à l’autonomisation économique des femmes, de les aider à mettre l’égalité des sexes au cœur de leur programme de travail, notamment en matière de protection sociale, et ‰
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« L’augmentation de la part des femmes dans la population active et la création de revenus favorisent la croissance économique et ont un effet multiplicateur sur la société dans son ensemble »
‰ d’adopter des mesures visant à accroître l’accès des femmes aux actifs productifs et leur contrôle sur ces derniers. Cela exige de reconnaître et de soutenir le potentiel économique des femmes. Les décideurs doivent revoir le modèle classique selon lequel l’homme est le principal soutien de la famille et les femmes sont des soutiens « accessoires ». Avec le déclin du secteur manufacturier dans de nombreux pays développés, en particulier depuis la crise économique mondiale, de nombreux hommes ont perdu des emplois bien rémunérés qui soutenaient ce modèle. Aux États-Unis, par exemple, les femmes étaient les soutiens de famille principaux ou à égalité avec les hommes dans deuxtiers des foyers en 2010. Ailleurs, les femmes dans les ménages pauvres jouent de plus en plus ce rôle en émigrant pour travailler ; en 2009 elles représentaient au moins 50 % des flux de travailleurs migrants en provenance d’Afrique et d’Amérique latine et jusqu’à 75 et 80 % dans certaines parties d’Asie du Sud et du Sud-Est. Même lorsque les revenus des hommes sont encore plus élevés que ceux des femmes, comme c’est toujours le cas dans la grande majorité des pays, les revenus des femmes sont souvent la clé pour que le niveau de vie des ménages soit supérieur au seuil de pauvreté.
L’impact de la crise sur l’emploi des femmes Cependant, alors que, en particulier dans les pays industrialisés, l’impact de la crise sur l’emploi des femmes a été généralement moins fort que sur l’emploi des hommes, en raison notamment de la concentration des femmes dans les emplois du secteur public, la croissance de l’emploi qui s’est produite au cours de la reprise partielle de 2010 a été moins favorable à l’emploi des femmes qu’à celui des hommes, en particulier dans les pays en développement. Cette tendance se poursuit en raison des réductions de postes dans le secteur public dans le cadre des politiques d’austérité qu’adoptent actuellement les gouvernements, soit pour satisfaire les conditions des prêts du FMI, soit pour pacifier les marchés obligataires. Que la perte d’un emploi rémunéré concerne un homme ou une femme, quel que soit le pays, ce sont toujours les femmes qui se chargent des soins non rémunérés (les soins de santé, d’un enfant ou d’une personne âgée), pour compenser la perte des services publics ainsi que la baisse des revenus du ménage.
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Un environnement politique équitable entre les sexes appelle également à la fourniture accrue d’une protection sociale minimale, comme l’a demandé le Groupe consultatif sur le socle de protection sociale de l’OIT. Cela permettrait d’assurer un revenu de base par le biais de transferts sociaux en espèces ou en nature, comme des pensions, des allocations familiales, des garanties et des services à l’emploi pour les chômeurs et les travailleurs pauvres, tout en offrant un accès universel à un prix abordable aux services sociaux essentiels, tels que la santé, l’éducation, les transports et les autres services, y compris la garde d’enfants. Les femmes bénéficient tout particulièrement de ces mesures qui diminuent considérablement leur charge de travail liée aux soins non rémunérés. La protection sociale doit être considérée comme un investissement et non comme un coût. Elle favorise d’importantes retombées futures en termes d’amélioration des résultats de développement humain et en tant qu’instrument clé pour déverrouiller la capacité productive des femmes. Ces mesures permettraient aux femmes de participer plus activement à la vie économique en tant que travailleurs, employeurs, consommateurs et citoyens. Parmi les autres types d’investissements publics susceptibles de promouvoir l’égalité entre les sexes figurent : les technologies économes en main-d’œuvre et les sources d’énergies alternatives pour la préparation et la cuisson de la nourriture ; l’amélioration des installations d’eau et d’assainissement afin de réduire le temps de collecte de l’eau par les femmes ; l’amélioration du transport afin de diminuer le temps passé pour se rendre sur les marchés et l’accès aux services publics. Ces investissement réduiraient grandement le nombre d’heures de travail des femmes et leur permettre ainsi de chercher un emploi rémunéré ou de lancer une activité, y compris de travailler sur les marchés et de créer une petite entreprise. Le suivi de l’impact sur l’égalité entre les sexes des investissements et des dépenses publics de toutes sortes, à travers une analyse sexospécifique des budgets nationaux et locaux, a permis à des femmes de divers pays et régions d’analyser l’utilisation de ces fonds et d’utiliser les résultats de ces recherches pour plaider en faveur de budgets prenant en compte la problématique hommes-femmes dans tous les secteurs de l’économie, et pas exclusivement dans
Photo : ONU/Rick Bajornas
Des membres de la conférence de l’ONU Femmes en train de plaisanter : « La participation politique des femmes – transformer l’égalité des sexes dans la politique en réalité, New York, septembre 2011. »
l’éducation et la santé. L’ONU Femmes développe actuellement ses activités dans ce domaine, favorisant l’autonomisation des femmes afin qu’elles exigent de leurs gouvernements que leurs engagements en faveur de l’égalité des sexes portent également sur d’autres secteurs, comme l’agriculture ou le commerce. Dans la perspective de Rio +20, l’ONU Femmes met la priorité sur l’autonomisation économique des femmes par la promotion de stratégies en matière d’économie verte et de cadres institutionnels et de gouvernance prenant en compte la problématique hommes-femmes, ainsi que de stratégies nationales de sécurité alimentaire soutenant les travailleuses agricoles à petite échelle et autres catégories de femmes rurales. Nous plaiderons pour le renforcement des liens entre le développement économique et social et la protection de l’environnement en faveur de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes.
Collaboration avec le secteur privé L’ONU Femmes collabore avec les entreprises du secteur privé pour renforcer leurs capacités à soutenir l’autonomisation économique des femmes tout au long de leur chaîne de valeur. Cela comprend le soutien des femmes en leur qualité d’exploitants agricoles, producteurs, travailleurs, fournisseurs et recycleurs, entre autres. Ce soutien revêt de nombreuses formes : le renforcement des capacités, au moyen de formations professionnelles, par exemple ; le soutien aux entreprises ; l’information et le partage des connaissances ; la facilitation de l’accès des femmes au financement et aux réseaux et la mise en place de marchés favorables aux femmes. Étant donné le nombre croissant de femmes travaillant en tant qu’indépendants il devient nécessaire de renforcer les compétences économiques des femmes, d’augmenter leurs connaissances relatives aux exigences du marché (concernant, par exemple, de qualité et de normes), d’améliorer leur accès aux marchés et de faire en sorte qu’elles bénéficient du soutien des autorités locales et des organisations d’appui au commerce. Il faut développer et reproduire les pratiques existantes qui ont fait leurs preuves. L’une d’elle est la création d’installations multiservices pour les femmes entrepreneurs et propriétaires d’entreprises afin de les aider à surmonter les
obstacles auxquels elles sont confrontées. Dans cette optique, nous renforçons également notre partenariat avec le Pacte mondial des Nations Unies pour faire progresser l’engagement du secteur privé aux principes d’autonomisation des femmes, encourageant les entreprises à revoir leurs politiques de recrutement et de promotion afin d’assurer l’égalité des chances, à nommer de façon proactive des femmes aux conseils d’administration et aux postes de direction, et à élargir les appels d’offres afin d’inclure les femmes entrepreneurs et les entreprises appartenant à des femmes. Dans son rôle de convocateur sur l’égalité des sexes, et dans le cadre de son mandat de coordination du travail sur l’égalité des sexes du système des Nations Unies dans son ensemble, l’ONU Femmes met l’accent sur le renforcement des réseaux de praticiens pour l’autonomisation économique des femmes, en réunissant des experts, des dirigeants et des groupes de femmes, en partageant les connaissances et les bonnes pratiques et en promouvant la collaboration Sud-Sud. Nous conseillons également aux gouvernements et au secteur privé de soutenir la participation et le leadership des femmes dans l’élaboration des politiques économiques, en faisant la démonstration, dans tous les pays, que cela est favorable à l’économie, aux entreprises et aux communautés au sens large. À travers chacune de ces actions, nous devons éviter qu’au lieu de voir leur autonomisation renforcée, les femmes soient exploitées. Nous y parviendrons en mettant en rapport l’autonomisation économique des femmes et leurs droits économiques et sociaux et en faisant le lien entre la politique économique et l’obligation des gouvernements de faire progressivement avancer les droits économiques et sociaux. Cela rend plus probable le renforcement réel de l’autonomisation des femmes, en particulier des plus pauvres, par leur participation aux marchés. D’ici à 2015, date limite pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement, l’ONU Femmes est déterminée à travailler avec les Nations Unies et les partenaires nationaux pour mettre l’égalité des sexes au cœur des efforts nationaux et mondiaux visant à atteindre les OMD ; notre travail pour améliorer les moyens de subsistance et le bien-être des femmes dans le monde constitue un des éléments clé de ces efforts. n
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La microfinance peut constituer un point de départ important vers l’entreprenariat, mais bien trop souvent les conversations concernant les femmes commencent et finissent au niveau du microprojet. Aujourd’hui, on a tendance à associer « entrepreneurs » avec les hommes et « microfinance » avec les femmes. Il est temps de faire évoluer les mentalités. La micro-entreprise n'est pas l'apanage des femmes. Quand j’ai commencé les reportages sur les femmes entrepreneurs dans les zones de conflit ou d’après-conflit en 2005, presque tout le monde, depuis les fonctionnaires du Fonds monétaire international dans leurs bureaux jusqu’aux travailleurs humanitaires sur le terrain, m’a dit que les seules femmes que je rencontrerais « vendraient du fromage sur le bord de la route ». On ne cessait de me répéter que les entreprises des femmes n’étaient pas de celles qui se développement et qui créent de l’emploi et de la croissance économique. Cela était, semblait-il, strictement réservé aux entreprises des hommes. Bien que le pourcentage des femmes engagées dans l’entrepreneuriat soit généralement plus faible que celui des hommes, il existe cependant des exceptions. Le Ghana, par exemple, compte 120 femmes entrepreneurs pour 100 hommes.
Au-delà de la micro-entreprise Même dans les pays les plus pauvres et traditionnels, les femmes sont propriétaires de commerces qui prospèrent au-delà du niveau de micro-entreprise. Au Rwanda, j’ai rencontré une propriétaire de station-service avec plusieurs employés et une femme vendant des fruits et des légumes, non pas « sur le bord de la route », mais sous la forme d’exportations vers la Belgique deux fois par semaine. Son entreprise donnait du travail à huit personnes simultanément, y compris son mari, et lui permettait de subvenir aux besoins de ses enfants et de plusieurs autres enfants adoptés. À Sarajevo, en BosnieHerzégovine, j’ai rencontré la chef d’entreprise d’une nouvelle usine textile implantée près des anciennes lignes de front dont la société, qui vend du linge de maison, emploie 20 personnes, majoritairement des femmes, qui peuvent aujourd’hui se permettre d’envoyer leurs enfants à l’école. En Afghanistan, un pays réputé présenter un des plus durs contextes pour le développement des femmes, j’ai rencontré une jeune femme qui avait osé rejeter l’offre de travail d’une organisation d’aide internationale, bien rémunéré et avec de nombreux avantages, afin de monter un cabinet de conseil aux entreprises qui,
Gayle Tzemach Lemmon affirme que les femmes dans les pays pauvres ont besoin de ressources pour exploiter leur potentiel entrepreneurial et faciliter l’expansion de leurs petites entreprises.
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grand selon elle, créerait des emplois pour elle-même et beaucoup d’autres personnes. « Si je décide de travailler pour une agence internationale, je vais recevoir un salaire important, mais ce ne sera que pour moi et ma famille, cela n’aidera personne d’autre », m’expliquait Kamila Sidiqi à cette époque, en 2005. « Si je travaille au lancement de ma propre société, je pourrai former et aider beaucoup de gens ». J’ai raconté son histoire dans mon livre intitulé The Dressmaker of Khair Khana, publié en 2011. D’après des études menées par Ernst & Young, les femmes possèdent entre 40 et 50 % des entreprises des pays développés. Une autre donnée issue du Centre for Women’s Business Research (Centre de recherche sur les femmes chefs d’entreprises) révèle qu’aux États-Unis les femmes propriétaires d’entreprises ont un impact économique annuel de 2 800 milliards de dollars. Ces tendances mettent en évidence un potentiel important, étant donné que les femmes, au-delà des frontières et des continents, partagent une même conviction : que l’expansion GAYLE TZEMACH LEMMON est membre du Conseil des affaires étrangères et auteure de The Dressmaker of Khair Khana. Depuis 2005, elle a écrit sur les femmes entrepreneurs dans les zones de conflit ou d’après-conflit telles que l’Afghanistan, le Rwanda ou la Bosnie-Herzégovine et elle rédige aujourd’hui des articles pour Newsweek/Daily Beast. Pour en savoir plus sur son travail, consultez le site : http://www.gaylelemmon.com/journalism
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des entreprises peut aider une communauté à sortir de la pauvreté. Les femmes du monde entier contribuent activement à l’amélioration de leurs communautés et bien que les contextes soient différents, les défis auxquels elles sont confrontées se ressemblent étrangement :
Des défis analogues Tout d’abord, il est difficile pour les femmes d’accéder au capital. À l’échelle mondiale, les femmes entrepreneurs rapportent que l’obtention de fonds est le principal obstacle qu’elles doivent affronter lors du démarrage et de l’expansion d’une entreprise. Des lois et des traditions discriminatoires en matière de droit de propriété et de succession exacerbent les difficultés rencontrées par les femmes dans l’obtention de garanties pour les prêts. L’héritage échappe très souvent aux femmes et les terres – et les noms – demeurent aux mains des hommes, laissant les femmes sans garanties acceptables par les banques. De nombreuses femmes actuellement propriétaires d’entreprises ont dû utiliser leurs
Photo : Miguel Samper pour Mercy Corps
Couturière afghane, Kaboul.
propres liquidités pour soutenir leurs sociétés, une limitation qui entrave leur capacité à investir et à obtenir des contrats plus importants. Ensuite, les femmes n’ont qu’un accès limité aux différents marchés. Des contraintes sociales et culturelles contribuent à la réduction de la mobilité des femmes, entravant le développement de leur réseau au-delà de leurs communautés locales. Les réseaux professionnels et les associations, lorsqu’ils sont bien gérés, peuvent aider à surmonter ces obstacles, mais leur financement est souvent incomplet. En outre, atteindre des acheteurs internationaux coûte cher en termes d’argent comme de temps. Les femmes peinent à trouver de nouveaux débouchés, car leurs réseaux concurrencent difficilement ceux des entrepreneurs masculins, beaucoup plus développés. Enfin, les femmes manquent souvent de connaissances en gestion d’entreprise et de compétences techniques, un désavantage qui résulte des inégalités plus générales entre les hommes et les femmes dans l’accès à une éducation de qualité. Par exemple, deux tiers des 793 millions d’adultes illettrés sont des femmes et, en dépit d’une augmentation du nombre de filles inscrites en école primaire et secondaire, la hausse des taux de scolarisation ne s’est pas traduite par des gains identiques au niveau de la participation ou de l’indépendance économique des femmes. Les programmes d’enseignement des affaires pour les femmes sont importants, car,
selon les conclusions du Centre international de recherche sur les femmes, « ils vont bien au-delà du simple renforcement des compétences techniques ». En effet, ces formations donnent aux femmes la possibilité de développer leurs sociétés, ce qui est également favorable à l’ensemble de la productivité économique et de l’investissement social, puisque les femmes sont plus susceptibles d’investir dans l’éducation et la santé pour elles-mêmes et pour leurs familles.
Potentiel entrepreneurial En dépit de ces nombreux obstacles, les femmes entrepreuneurs que j’ai rencontrées n’ont jamais baissé les bras. Aujourd’hui, leur ténacité devrait être soutenue par un investissement dans les ressources pour exploiter leur potentiel entrepreneurial et faciliter la naissance de petites entreprises et leur expansion. Accompagner les femmes qui montent leurs entreprises et créer des produits financiers répondant à leurs besoins serait bénéfique non seulement pour leurs familles, mais aussi pour l’économie locale. Dans un article publié dans Bloomberg en mars 2011, Hillary Clinton, alors Secrétaire d'État des États-Unis, expliquait que les femmes représentent un marché émergent et que quand elles « ont la liberté de monter leurs entreprises, les bénéfices économiques, politiques et sociaux s’étendent bien au-delà de leur propre foyer ». En ignorant la moitié de leurs ressources en entrepreneurs de talent, les pays du monde entier brident leur potentiel économique.
Les organisations telles que Mercy Corps, Goldman Sachs 10 000 Women, Bpeace et Peace Dividend Trust, entre autres, ont concentré leur attention sur ces femmes d’affaires dans des pays telles que Le Salvador, le Libéria et l’Afghanistan, afin de les aider à saisir les opportunités de marché et à acquérir les connaissances indispensables à la croissance de leurs nouvelles entreprises. Leur travail ne devrait plus constituer l’exception, mais plutôt devenir la règle pour que le monde aille au-delà du microprojet et voie plus grand pour les femmes. Au cours des dix dernières années, de plus en plus de personnes dans le monde considèrent la microfinance comme le meilleur moyen de sortir les femmes de la pauvreté. Les histoires de femmes propriétaires de vaches, vendant des fleurs ou fabriquant des objets artisanaux se sont répandues, et la reconnaissance de l’importance des femmes en tant que partenaires dans la lutte contre la pauvreté et la création d’un monde plus stable a progressé. Pourtant, si la microfinance fait sans aucun doute partie de la solution, il faut veiller à ne pas tomber dans le travers consistant à penser qu’elle représente la totalité de la solution dans le cas des femmes. À trop nous concentrer sur les vertus du petit, nous avons largement ignoré le moyen, de même que les contributions des femmes et les luttes qu’elles mènent dans le monde entier pour transformer leurs start-ups en grandes entreprises florissantes. n
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L’héritage le plus persistant de la crise économique mondiale est probablement celui de l’irréductible crise de l’emploi qui pèse sur la main d’œuvre du monde entier. Le chômage atteint des niveaux record dans bon nombre des pays les plus riches du monde, mais c’est le sousemploi qui menace les travailleurs les plus pauvres et les plus vulnérables de la planète. Ne comptant que sur un accès limité aux opportunités d’emploi formel – avant comme après la crise – la plupart des sources potentielles de revenus des habitants des pays en développement se trouve dans l’économie informelle. Ce type d’emplois se caractérise principalement par des salaires bas et des risques élevés, ainsi qu’une protection juridique et sociale limitée. L’augmentation du sous-emploi indique que de plus en plus de personnes travaillent mais ne gagnent pas suffisamment d’argent pour échapper à la pauvreté. Et tandis qu’une nouvelle série de sauvetages financiers des économies les plus riches du monde semble imminente, la pression s’accroît à la base de la pyramide mondiale. Les femmes sont en général grandement surreprésentées au sein de la main d’œuvre informelle. En Inde, par exemple, neuf femmes sur dix travaillant en dehors du secteur agricole sont en situation d’emploi informel. Qui plus est, il existe une forte corrélation entre le fait d’être une femme, le fait de travailler dans l’économie informelle et celui d’être pauvre. Par rapport à leurs homologues masculins, les femmes sont plus susceptibles d’être des travailleuses indépendantes et sous-traitantes, et moins susceptibles d’être des employeuses ou des employées rémunérées d’entreprises informelles. Elles sont aussi très souvent les soutiens de famille ou contribuent largement au budget du ménage. Ainsi, les femmes employées dans le secteur informel se retrouvent-elles à la tête de bon nombre des ménages les plus vulnérables du monde au plan aussi bien économique que social.
Bonnes et mauvaises époques Bien qu’il soit difficile de nier qu’elle augmente de jour en jour, la main d’œuvre informelle est pourtant rarement prise en compte dans le cadre des discussions sur la crise économique, que ce soit comme point d’intérêt, ou comme sujet d’étude ou d’intervention. On part généralement du principe que l’économie informelle est suffisamment flexible pour s’adapter aux chocs économiques tout en offrant un refuge aux travailleurs formels retranchés. La réalité est autre. Dans une économie mondiale où les économies formelles et informelles sont liées de façon dynamique, les travailleurs informels ne peuvent être immunisés contre les effets de la crise. L’économie informelle se caractérise par une sensibilité à la demande, une fluctuation des prix et le jeu des dynamiques de la concurrence pendant les périodes de vaches grasses et de vaches maigres. Fin 2008, les partenaires du projet Villes inclusives, avec l’orientation et la coordination globale du réseau international « Women in
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Zoe Elena Horn examine l’impact de la crise économique internationale sur les femmes dans l’économie informelle. Informal Employment: Globalizing and Organizing (WIEGO) », ont commencé à pallier le manque d’information concernant l’impact de la crise sur les travailleurs informels, en particulier les femmes. Les chercheurs ont procédé à l’organisation d’entretiens individuels et de groupes de discussion dans 14 localités urbaines à travers l’Afrique, l’Asie et l’Amérique latine, et dans trois segments de l’économie informelle : le travail effectué à domicile, le commerce dans la rue et la collecte de déchets. Les premières conclusions, tirées début 2009, suggéraient que les participants avaient été tout autant atteints par la crise que leurs homologues formels. Les travailleurs indépendants avaient souffert directement ou indirectement de la diminution de la consommation et de la baisse de la demande sur les marchés locaux. Les clients étant à court d’argent, les vendeurs dans la rue et les producteurs travaillant à domicile avaient dû baisser leurs prix, malgré l’augmentation des prix des intrants. Les ramasseurs de déchets s’étaient retrouvés confrontés à l’effondrement des prix des matériaux collectés en raison d’une diminution de la demande mondiale en matière de recyclage. Les travailleurs salariés avaient pâti de la chute des commandes de travail pour des produits destinés à l’exportation. Pour couronner le tout, les travailleurs informels avaient vu la concurrence augmenter avec l’arrivée de nouveaux entrants sur leur marché, alors qu’ils ne comptaient pas sur aucun filet de sécurité social ou économique pouvant les soutenir.
FAIRE FACE À LA CRISE ZOE ELENA HORN a coordonné l’étude des Villes inclusives relative aux effets de la crise économique sur les travailleurs informels. Elle est également l’auteure de No Cushion to Fall Back On: The Global Economic Crisis and Informal Workers et de Coping with Crisis: Lingering Recession, Rising Inflation, and the Informal Workforce. Villes inclusives est une collaboration entre des organisations fondées sur l’adhésion de travailleurs pauvres, des alliances internationales d’organisations fondées sur l’adhésion et des organisations de soutien engagées dans l’amélioration de la situation des travailleurs pauvres.
Un tableau morose Un an plus tard, les répondants ont dépeint un tableau tout aussi morose : quelques évolutions positives, mais un retard général de la reprise des salaires et de l’amélioration des conditions de travail. Le chômage et le sous-emploi persistants avaient poussé de plus en plus de travailleurs vers le secteur informel et de nombreux répondants avaient continué à travailler plus d’heures pour un salaire réduit. Tandis qu’en 2009, 77 % des répondants avaient indiqué que leurs revenus avaient chuté au cours du premier semestre 2009, 55 % d’entre eux signalaient une diminution supplémentaire entre juin 2009 et juin 2010. Certains répondants ont annoncé une augmentation, mais aucun n’a vu ses revenus remonter au même niveau qu’avant la crise, et dans la plupart des cas, la hausse des revenus n’avait pas suffi à compenser l’augmentation du coût de la vie. La vulnérabilité – la probabilité qu’un choc ne se traduise par une diminution du bien-être – avait augmenté pour les ménages dépendant des revenus issus du travail informel, les femmes et les enfants étant particulièrement exposés. Fortement motivées à continuer de travailler pour le bien-être de leurs familles, les femmes s’étaient battues davantage encore pour les alimenter, tout en fournissant des niveaux similaires, voire supérieurs, de soins et de tâches domestiques non rémunérés. Ces femmes qui travaillent, affectent souvent l’intégralité de leurs revenus aux dépenses du ménage – un fardeau de plus en plus lourd à porter en raison du chômage chronique et du sous-emploi qui touchent d’autres supports financiers du foyer. Bien que consacrant de plus en plus en temps au travail rémunéré, les femmes avaient de moins en moins les moyens de payer les quelques facilités qui auraient pu alléger leur fardeau non rémunéré, comme des repas préparés ou des services de garde d’enfants. De nombreux répondants étaient confrontés à une diminution des ressources qui se poursuit encore, étant donné que les prix des aliments et des combustibles sont restés élevés depuis début 2008. Forcées de limiter à la fois la quantité et la qualité de la nourriture, les femmes servaient moins de repas, tandis que les articles de « luxe » comme le lait et la viande avaient été éliminés dans de nombreux foyers. Les coûts liés à l’école étaient également difficiles à couvrir. Tandis que peu d’enfants avaient quitté l’école en 2009, les abandons ont augmenté en 2010 en raison des contraintes montantes. Les femmes étaient inquiètes des conséquences de ces mesures sur leurs enfants, soulignant le fait que la crise avait accentué le rôle des femmes en tant que gardiennes du transfert de la pauvreté d’une génération à l’autre.
Réponse Il est essentiel que les décideurs politiques reconnaissent que l’économie informelle est une source fondamentale d’emploi pendant les périodes de vaches maigres et de vaches grasses. Dans un contexte où les prévisions d’instabilité
Photo : Self Employed Women’s Association (SEWA)
économique se prolongent et où une quantité toujours croissante de main d’œuvre opte pour les moyens d’existence informels, l’extension de la protection sociale et économique pour ces travailleurs est devenue plus vitale que jamais. L’emploi informel reste une énigme pour de nombreux décideurs politiques. La consultation avec les travailleurs informels est donc plus essentielle que jamais dans le cadre du développement d’une stratégie de réponse à la crise. En 2009 et 2010, on a demandé aux répondants à l’étude sur les Villes inclusives de proposer différentes interventions possibles pour affronter la crise et de les classer. Sans surprise, les travailleurs ont alors dénoncé les mesures bouche-trou et classé comme prioritaire la reconnaissance des activités qui leur procurent des moyens d’existence. Il faut, par-dessus tout, permettre aux travailleurs de gagner leur vie. La diminution des obstacles au travail informel – harcèlement, rafles, interdiction d’accéder aux déchets – permet aux travailleurs de continuer d’alimenter leurs familles pendant les époques difficiles. La protection des salaires et l’inclusion d’un régime de salaire minimal sont également fondamentales pour protéger les revenus des travailleurs. De plus, de petits investissements sur les lieux de travail – l’accès à l’eau et aux toilettes dans les marchés, des équipements pour la manipulation des déchets, la subvention de l’électricité pour les personnes travaillant à leur domicile – auraient pu avoir des effets considérables en termes d’augmentation des revenus et du bien-être. Les travailleurs pourraient aussi grandement profiter de programmes visant à améliorer l’éducation financière et l’accès aux services financiers. Préoccupés par leur avenir, les répondants étaient très demandeurs de formations et de renforcement de leurs compétences, ainsi que d’améliorations dans l’accès et la connaissance des marchés, par exemple grâce à leur inclusion dans des programmes municipaux de ramassage des déchets. Enfin, le principal investissement doit être effectué dans la création de mesures de protection sociale ciblées pour les travailleurs informels – comme des services de santé et de garde d’enfants spécialisés – pour faire face aux insécurités chroniques auxquelles sont confrontés ces travailleurs dans les domaines de l’alimentation, de la santé et de l’éducation . Les femmes employées de façon informelle joueront un rôle particulièrement important en tant qu’agents du changement. Les femmes sont souvent les moins visibles et les plus vulnérables au sein de l’économie informelle, alors qu’elles sont souvent les agents économiques et sociaux les plus puissants de leur ménage et de leur communauté. Leur mobilisation et leur rôle de leadership seront fondamentaux pour l’amélioration des vies de nombreux travailleurs et de leurs familles à travers le monde en développement. C’est pour cette raison qu’il est essentiel qu’à l’avenir les gouvernements, comme les institutions économiques et internationales, surveillent de plus près les aspects sexospécifiques de l’économie informelle. n
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ZOOM SUR UN PAYS
Afrique du Sud L’Afrique du Sud, la superpuissance incontestée de l’Afrique, a la plus grande économie du continent. Depuis la fin de l’apartheid et les premières élections multiraciales en 1994, le pays a connu une forte croissance économique. Si la crise économique mondiale de 2009 a déclenché la première récession du pays en 17 ans, dès la fin de l’année 2010 se dessinait déjà une reprise générale, principalement due au renouvellement de la demande mondiale de marchandises, aux dépenses liées à la Coupe du monde 2010, à la reprise de l’industrie automobile et à la demande croissante de produits chimiques. Principalement réputée pour ses métaux précieux, ses fruits et son vin, l’Afrique du Sud est passée, ces dernières années, d’une économie dominée par les exploitations minières et agricoles à une économie où les produits manufacturés et les services financiers sont à l’origine de la majorité du produit intérieur brut (PIB). L’Afrique du Sud fournit un large éventail de produits de grande consommation, notamment des denrées alimentaires, des textiles et des vêtements, des chaussures et des produits issus de la métallurgie, de la chimie et du papier. Néanmoins, ce secteur s’est affaibli lorsque, à la fin du régime de protection des échanges établi du temps de l’apartheid,
Johannesburg est la capitale de la province de Gauteng – la plus riche d’Afrique du Sud – et elle est aussi la capitale économique et financière de l’Afrique subsaharienne.
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La super-
quelques industries de grande consommation se sont avérées peu compétitives sur le marché mondial. En parallèle, depuis 1994, le volume des moyens de production – c’est-à-dire des objets qui sont utilisés pour produire d’autres biens et services – a augmenté. Les métaux et l’ingénierie, en particulier les produits associés à l’acier et l’industrie automobile, sont les éléments clés de ce secteur. Au cours des dix premières années du XXIe siècle, un boom des projets de construction axés sur les infrastructures a été à l’origine d’une forte demande en biens associés tels que les machines électriques, le fer et l’acier, les produits en métal non ferreux, les produits métallurgiques et les machines. Aujourd’hui, l’industrie manufacturière contribue à 15 % du PIB et joue un rôle essentiel en tant qu’employeur et source d’exportations. Certains sous-secteurs comme le textile continuent de souffrir de la concurrence des fournisseurs asiatiques moins chers, mais le segment vital de l’automobile, qui est la plus importante industrie manufacturière, voit sa croissance future assurée grâce au récent investissement de la part de multinationales clés. La croissance de l’économie au cours des dernières années a permis une baisse sensible de la pauvreté de revenu. Parmi les réussites
notables en matière de développement figurent : une nette hausse des inscriptions à l’école secondaire, passant de 45 à 72 % entre 1991 et 2008 ; la construction de 1,6 million d’unités de logements gratuits pour les familles à faible revenu depuis 1994 ; une hausse de l’accès à l’électricité, passant de 34 % en 1993 à 81 % en 2007 – des améliorations analogues ont été rapportées pour l’eau et l’hygiène publique – et une plus grande couverture du système de protection sociale qui subvient avant tout aux besoins des enfants, et qui est passé de 2,5 millions de bénéficiaires en 1999 à plus de 13 millions en 2009. En dépit de ces progrès, l’Afrique du Sud est toujours aux prises avec des différences extrêmes en matière de revenus et de richesse. Les inégalités augmentent et les pauvres continuent d’avoir un accès limité aux débouchés économiques et aux services de base. Les défis du développement humain pèsent lourd. L’espérance de vie n’est que de 51 ans et l’Afrique du Sud compte aussi le plus grand nombre de personnes porteuses du VIH/SIDA dans le monde (plus de 5,5 millions). Les problèmes de santé actuels sont hérités de l’apartheid et du système du travail migrant responsable de transformations sociales qui ont mené à la destruction de la vie de famille, à des abus d’alcool et à des violences (notamment à
puissance africaine des Finances, estimait récemment qu’il faudrait atteindre une croissance économique de 6 % par an durant les 20 ou 30 prochaines années pour pouvoir constater une avancée significative dans le domaine de l’emploi. Comme les critiques l’ont souligné, un tel niveau de croissance soutenue n’a pas été atteint depuis le milieu des années 1960 et il semble peu probable qu’il soit retrouvé à l’heure actuelle. Le président Jacob Zuma a placé l’aide aux économies émergentes et les alliances parmi les priorités de sa présidence. En avril 2011, l’Afrique du Sud a officiellement intégré le groupe BRIC (désormais BRICS), aux côtés des géants économiques que sont le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine. L’Afrique du Sud prend également beaucoup plus au sérieux son appartenance au forum de dialogue IBSA, un regroupement international visant à promouvoir la coopération mondiale entre l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud. L’IBSA renforce la collaboration Sud-Sud entre ces trois grands pôles et leur offre une plate-forme de discussion en vue d’une coopération dans les domaines, entre autres, de l’agriculture, du commerce, de la culture et de la défense. Le changement climatique et les émissions de carbone s’annoncent comme un autre défi considérable, d’autant plus que l’économie du pays génère énormément d’émissions de CO2.
L’Afrique du Sud couvre 77 % de ses besoins d’énergie grâce au charbon et ses émissions de carbone par tête sont plus élevées que dans n’importe quel pays développé, et ce, bien que de nombreuses personnes n’aient pas accès à l’électricité. Le travail se poursuit pour mettre en œuvre une politique officielle sur le changement climatique, basée sur les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique et les industries vertes à faible émission de carbone. Lors de son discours à l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) lors du Forum de l’énergie de Vienne en juin 2011, Dipuo Peters, ministre de l’Énergie, a déclaré que le soleil et le vent étaient d’excellentes sources d’énergie permettant de satisfaire des besoins limités, tels que l’éclairage du foyer, mais pas la demande de base de l’industrie lourde. Elle a ajouté que l’Afrique du Sud avait d’importants besoins énergétiques et d’abondantes réserves de charbon et que par conséquent deux grandes centrales électriques au charbon de 4 500 MW allaient être construites. En réponse aux critiques portées au sujet des émissions de carbone, Peters a précisé que ces nouvelles centrales à charbon utiliseraient les technologies de captage et de stockage du carbone. n Photo : Allan Baxter/Getty Images
l’égard des femmes). Le système de santé favorise encore grandement les élites. Le niveau de chômage élevé constitue un des défis clés de l’économie. L’Afrique du Sud possède l’un des plus bas taux de participation au marché du travail au monde et l’un des plus hauts taux de chômage. Selon un récent rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), sur les 32 millions de personnes en âge de travailler, seules 13 millions (soit 40 %) ont un travail, contre environ 60 à 75 % sur d’autres marchés émergents à revenu intermédiaire. Un SudAfricain sur trois en âge de travailler, dont la moitié des jeunes noirs âgés d’entre 15 et 24 ans, est au chômage. Les autorités, reconnaissant la gravité de la situation, ont mis la création d’emplois en tête de liste de leurs priorités pour les budgets des années 2010 et 2011. La Nouvelle voie de croissance (New Growth Path ou NGP en anglais) détermine un objectif ambitieux : créer cinq millions d’emplois supplémentaires dans les dix prochaines années, afin de réduire de 10 % le taux de chômage. La stratégie de la NGP repose sur l’augmentation des investissements dans cinq secteurs clé, le développement des compétences, l’amélioration de la qualité des services publics et une intégration économique régionale accrue. Pravin Gordhan, le ministre
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Afrique du Sud Photo : Department of International Relations and Cooperation, the Republic of South Africa
ZOOM SUR UN PAYS
Les agents du
changement Anticipant la Conférence de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) qui a eu lieu à Durban du 28 novembre au 9 décembre 2011, le magazine Making It s’est adressé à Maite Nkoana-Mashabane, la ministre sud-africaine des Relations internationales et de la Coopération. 36 MakingIt
Vous avez récemment déclaré que les défis climatiques ne pouvaient être relevés sans la présence de femmes indépendantes et instruites. Pouvez-vous expliquer pourquoi ? Les femmes des pays en voie de développement dépendent grandement des ressources naturelles locales pour leur subsistance, parce qu’elles sont responsables de l’approvisionnement de leur famille en eau, en nourriture et en énergie pour cuisiner et se chauffer. Les effets du changement climatiques, notamment la sécheresse, une pluviosité incertaine et la déforestation compliquent l’obtention de ces ressources. Par conséquent, tous les efforts consacrés à la lutte contre la menace du changement climatique seront insuffisants s’ils ne sont pas accompagnés de l’autonomisation et de l’éducation des femmes. À l’échelle internationale, les femmes sont bien positionnées pour œuvrer comme agents du changement par le biais d’activités d’atténuation et d’adaptation au sein de leur foyer, sur leur lieu de travail et au sein de leur communauté et de leur gouvernement. Elles ne peuvent être ignorées dans le cadre de l’effort mondial visant à relever les défis posés par le changement climatique. Des femmes autonomes et instruites peuvent faire des choix environnementaux plus sages, en particulier
lorsqu’il s’agit de se procurer les ressources naturelles indispensables à leur subsistance. Elles peuvent aussi opter pour des solutions plus « vertes » pour le chauffage, la cuisine et l’énergie. Dans les pays en voie de développement, les femmes produisent jusqu’à 80 % de la nourriture, comme c’est le cas ici, en Afrique du Sud. L’acquisition de connaissances permettra aux femmes de cultiver de manière plus intelligente, en utilisant des semences et des produits mieux adaptés à l’environnement mondial actuel en mutation. Ce n’est que si les femmes reçoivent le même accès à la formation, à l’information, au crédit et aux programmes de développement des compétences qu’elles seront capables de participer pleinement aux initiatives sur le changement climatique.
Quelles sont les mesures et les actions d’adaptation au changement climatique qui aideront à faire progresser l’émancipation des femmes d’Afrique ? Un effort mondial est nécessaire pour garantir non seulement le soutien aux femmes qui sont confrontées à des catastrophes, mais aussi pour procéder à des interventions significatives pour résoudre le problème du changement climatique. Je pense les politiques d’atténuation et d’adaptation qui ne tiennent pas compte de l’égalité entre les sexes seront inefficaces et augmenteront la pauvreté et l’insécurité alimentaire. Une approche cohérence est indispensable pour aborder les défis particuliers auxquels les femmes se trouvent confrontées et leur rôle en faveur du développement durable. Une telle approche se doit d’inclure une adaptation au changement climatique qui permette de lutter le changement climatique et de réduire la vulnérabilité des systèmes naturels et humains face à ses effets. Pour que l’Afrique s’adapte de façon à créer un climat propice à la poursuite de l’émancipation des femmes, les accords internationaux conclus sur le changement climatique doivent, avant tout, bénéficier d’un soutien à l’adaptation sous toutes ses formes, qu’il s’agisse de la technologie, des compétences ou de la finance. L’Afrique est l’un des continents les plus vulnérables en raison de l’étendue des répercussions attendues et de la faible capacité d’adaptation de la région. L’adaptation doit par conséquent tenir une place centrale dans les conclusions de la Conférence de Durban sur le changement climatique (COP17/CMP7) et prendre en compte le besoin urgent d’une aide immédiate et adéquate en termes de mesures et d’actions, notamment la mise à disposition de ressources financières publiques supplémentaires et conséquentes, de technologies protectrices de l’environnement et
le renforcement des compétences de manière sûre et rapide. Les priorités de l’Afrique résident dans la mise en place de programmes de lutte contre le changement climatique et de projets pour atteindre ses objectifs de développement, notamment les Objectifs du Millénaire pour le développement. À cet égard, il est important que les pays développés et les partenaires apportent un soutien total à l’application des stratégies en Afrique, et plus particulièrement à la mise en œuvre des programmes nationaux d’action et d’adaptation pensés pour les pays les moins développés d’Afrique. En tant que nouvelle présidente du COP17/ CMP7, l’un de mes principaux objectifs est de garantir que l’ensemble des accords adoptés à Durban se basera sur ces principes. C’est ainsi que j’ai obtenu le soutien de l’Union africaine au sein de laquelle les chefs d’État ont déjà rendu prioritaire l’adaptation au changement climatique.
Comment peut-on garantir que les mécanismes de financement pour l’adaptation seront suffisamment flexibles pour prendre en compte les besoins et les priorités des femmes ? Nous savons que les répercussions du changement climatique et les mesures d’atténuation et d’adaptation affectent différemment les femmes et les hommes. Les femmes sont non seulement davantage dépendantes des ressources naturelles les plus menacées par le changement climatique, mais elles n’ont en outre qu’un accès limité au crédit, aux technologies et à l’information. Un Comité transitoire constitué de représentants de 25 pays en voie de développement et de 15 pays développés a été chargé de créer le Fonds vert pour le climat. Il lui a été demandé de soumettre ses recommandations pour approbation au COP17/CMP7 à Durban en novembre 2011. Les femmes dirigeantes présentes à Durban devraient par conséquent examiner lesdites recommandations pour garantir qu’elles reflètent bien les priorités et les besoins des femmes.
Vous avez déclaré qu’il faut garantir la participation des femmes aux initiatives sur le changement climatique. Sachant que les femmes sont fréquemment sousreprésentées lors du processus de prise de décisions en matière de gouvernance environnementale, comment le rôle des groupes et des réseaux de femmes peut-il être renforcé ? Le fait que les femmes soient sousreprésentées lors du processus de prise de décisions en matière de gouvernance environnementale constitue une inquiétude majeure pour moi et pour d’autres femmes
dirigeantes. À l’instar de bon nombre de dirigeants au niveau mondial, je pense que les femmes devraient être représentées à égalité dans les structures de prise de décisions afin de leur permettre de partager leur expertise et leur point de vue à la fois uniques et précieux dans le domaine du changement climatique. En tant que nouvelle présidente du COP17/CMP7, je fais appel à toutes les parties concernées pour faciliter et accroître la participation des femmes, et tout particulièrement au niveau local, dans les prises de décisions. Il est vital que, avant même de mettre en œuvre des politiques de changement climatique, les gouvernements, les programmes des Nations Unies, les fonds, les agences et autres organismes compétents prennent les mesures nécessaires pour permettre aux femmes de participer pleinement à tous les niveaux de la prise de décisions en rapport avec le changement climatique. Dans le cadre du travail que nous effectuons en préparation du COP17/CMP7, le gouvernement sud-africain entamera un profond dialogue avec les différentes communautés d’Afrique du Sud et les femmes participeront à ces échanges. Nous souhaitons encourager les femmes de toute l’Afrique du Sud à prendre part au dialogue et à partager leurs idées et leurs préoccupations avec nous. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour garantir aux femmes une voix forte à Durban.
Les pays du groupe BASIC (Brésil, l’Afrique du Sud, Inde et Chine) figurent parmi ceux dont l’industrialisation est la plus rapide au monde et, en tant que tels, ils devraient jouer un rôle central pour relever les défis du changement climatique. Comment le groupe BASIC peut-il demander aux autres pays de limiter leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) alors qu’il en produit lui-même de plus en plus ? Le groupe BASIC souhaite un accord commun, juste et équitable sur le changement climatique qui soit favorable aussi bien aux pays développés qu’aux pays en voie de développement. Ce groupe d’économies en voie de développement préconise un accord qui reconnaisse que tous les pays, y compris les leurs, aient une responsabilité commune envers la réduction des émissions, mais sans que cela n’entrave le développement des pays en voie de développement. L’Afrique du Sud met actuellement en place des actions d’atténuation nationales qui aboutiront à la réduction de 34 % des émissions d’ici à 2020 et de 42 % d’ici à 2025. Nous sommes également en train de terminer notre livre blanc sur la politique nationale de réponse au changement climatique qui mettra en valeur notre leadership dans ce domaine. n
<< Les politiques d’atténuation et d’adaptation qui ne tiennent pas compte de l’égalité entre les sexes seront inefficaces. >> MakingIt 37
Repartir – avec une nouvelle feuille de route Janez Potočnik, le commissaire européen à l’environnement, explique pourquoi les écologistes et l’industrie en Europe doivent travailler ensemble pour dissocier la croissance de l’épuisement des ressources.
Au cours du XXe siècle, la population mondiale a été multipliée par 4, la production économique par 40, l’utilisation de combustibles fossiles par 16, les captures de poissons par 35 et la consommation d’eau par neuf. Ce phénomène a été appelé la « grande accélération », expression qui colle bien avec la métaphore inspirée de l’automobile du titre de cet article. Il y a cent ans, quand la population était de 1,5 milliard de personnes, cette croissance soutenue convenait parfaitement. Elle nous procurait santé, bien-être et richesse. Ce n’est plus le cas avec une population de 7 milliards d’individus. Chaque jour, 140 000 personnes supplémentaires voient le jour et partagent une planète qui, elle, conserve la même taille. Nous n’avons pas d’autre planète : nous n’avons donc pas d’autre choix que d’utiliser de manière plus rationnelle les ressources qu’elle nous offre. L’utilisation rationnelle des ressources n’est pas un choix : c’est une nécessité. Le seul choix qui s’offre à nous consiste à décider d’agir dès maintenant ou à attendre d’y être forcés et que les ressources naturelles essentielles soient épuisées et deviennent hors de prix. Pour revenir à la métaphore inspirée de l’automobile, si nous voulons continuer à accélérer, nous devons changer de route, car sinon, nous filons droit dans le mur.
Prix et coûts À quoi devrait alors ressembler cette nouvelle feuille de route ? Examinons ce qui nous a rendus jusqu’à présent si compétitifs pour voir ce qui est en train de changer. L’Europe a peu de ressources minérales. Nous importons 48 % du minerai de cuivre, 64 % du zinc et de la bauxite et 78 % du nickel. Nous importons tout le cobalt, le platine, le titane et le vanadium que nous utilisons. Notre continent étant hautement dépendant des importations, on pourrait s’attendre à ce que nous gérions efficacement nos ressources. Pourtant, en raison de la baisse des prix en termes réels au cours des 150 dernières années, ce n’est pas le cas, sauf pendant les guerres et les crises pétrolières ponctuelles. Pendant la même période, le coût du travail a continué à augmenter. Pour rester compétitifs, nous avons dû déployer toute notre ingéniosité pour répondre à l’augmentation des coûts par une augmentation massive de la productivité, que nous avons multipliée par 20 pendant ces mêmes 150 ans. Cette augmentation conjointe des coûts et de la productivité a alimenté le moteur de notre progrès technologique.
Ingéniosité et innovation La principale tendance actuelle est la fin des ressources bon marché. Le coût des matières premières s’élève à plus de 40 % des coûts totaux de l’industrie manufacturière alors que le coût de la main-d’œuvre ne dépasse pas 20 %, il est ainsi clair que nous devons désormais faire preuve de la même ingéniosité et capacité d’innovation pour augmenter la productivité des ressources, comme nous l’avons fait autrefois avec le travail.
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Enfermés Il s’avère qu’après quelques siècles de croissance basée sur une utilisation intensive des ressources, nous sommes « enfermés » dans des infrastructures, dans un système économique et financier, dans des business models et dans des comportements basés sur une utilisation inefficace des ressources. C’est notre défi. C’est aussi un problème que n’ont pas à affronter les BRIC, qui sont capables de changer rapidement de direction pour faire face à la limitation des ressources. Si nous voulons rester compétitifs en Europe, nous allons devoir réaliser une transformation structurelle majeure. Il n’y aura pas de croissance s’il n’y a pas de « croissance verte ». C’est pourquoi les écologistes et l’industrie doivent abandonner leurs anciennes polémiques et travailler en partenariat. La politique environnementale ne peut plus se contenter de punir les pollueurs. Nous devons la construire en repensant la façon même dont nous produisons et nous consommons. Si nous y arrivons, nous commencerons à envisager la politique environnementale non pas comme un frein à la compétitivité, mais bien au contraire comme un élément essentiel permettant d’assurer notre compétitivité future. Autrement dit, il ne s’agit pas tant de protéger l’environnement du business que de l’utiliser pour protéger l’environnement.
L’initiative Je demeure optimiste parce qu’une des ressources dont nous ne manquons pas en Europe, c’est notre capacité d’initiative. Le pouvoir de nos idées et de notre créativité nous donne un avantage comparatif pour la croissance future. L’innovation nous offre d’ailleurs une grande marge d’efficacité dans l’utilisation de nos ressources : l la transformation du charbon en lumière n’a un rendement que de 3 % ; l seuls 15 % de l’énergie utilisée pour remplir votre réservoir d’essence sert réellement à faire rouler votre voiture ; l 80 % de ce que nous produisons est jeté après une seule utilisation ; l 80 % des ressources mondiales sont utilisées par 20 % de la population ; l seul 1 % des métaux rares présents dans les produits arrivés en fin de vie est recyclé. Si nous sommes les premiers à nous attaquer à ces utilisations irrationnelles, nous
Photo : Union européenn, 2011
Dans un monde aux ressources limitées, notre manque de ressources signifie que le cycle traditionnel du « j’extrais, j’utilise, je jette, j’extrais, j’utilise, je jette » ne fera qu’accentuer notre dépendance vis-à-vis des sources externes d’approvisionnement et notre vulnérabilité face aux hausses de prix. C’est ce message qui me saute aux yeux à la lecture des documents de travail. C’est ce message que je déchiffre dans la politique industrielle du Japon et de la Corée. C’est ce message que je retrouve dans le dernier plan quinquennal chinois.
aurons l’avantage d’être les premiers sur le marché mondial avec nos technologies. Mais l’innovation ne suffit pas. En tant qu’économiste, j’ai appris que la première règle de la compétitivité est la répartition rationnelle des ressources et c’est à ça que servent les prix sur nos marchés. Mais comment peut-on espérer être rationnels et efficaces si les prix ont aussi peu de rapport avec la valeur des ressources ? La plupart des matières premières sont échangées et plutôt bien administrées, mais nous ne pourrons jamais administrer d’autres ressources précieuses, comme l’eau ou les forêts, tant que nous ne serons pas encouragés à le faire. Les instruments du marché sont là pour fournir ces encouragements.
Difficile à digérer C’est là que nous atteignons l’aspect le plus difficile de la relation entre utilisation rationnelle des ressources et compétitivité en Europe. Je ne vous cacherai pas que le prix de certaines ressources devra augmenter et que notre niveau de consommation devra être réduit. Ces messages ne sont pas faciles à digérer pour l’industrie, permettez-moi de les développer. D’abord, il peut sembler illogique de suggérer que l’augmentation des prix de certains éléments peut nous rendre plus compétitifs, mais uniquement si l’on adopte une vision à court terme. Mieux fixer les prix ne signifie pas seulement que nous administrerons mieux les ressources naturelles, mais aussi que nous aurons une gestion durable nous évitant de filer droit dans le mur, comme je le mentionnais précédemment. Il ne faut pas se leurrer, nous ne pouvons plus compter sur des ressources naturelles à bon marché. Nous devons prévoir une politique tarifaire sur le long terme qui donne à l’industrie le temps d’investir afin de garantir que la productivité des ressources accompagne la hausse de leur prix. Ensuite, lorsque nous parlons de réduire la consommation, nous parlons en fait de réduire le nombre de « choses » que nous consommons. Ce qui ne veut pas dire réduire les profits. Nous devons développer des produits plus intelligents qui aient les mêmes fonctions, mais avec moins de ressources. Et nous devons vendre les services associés. Nous avons besoin de nouveaux business models qui encouragent une augmentation de la valeur
Janez Potočnik, discours de la conférence de presse sur la Feuille de route vers une utilisation rationnelle des ressources en Europe, septembre 2011.
ajoutée et plus de réflexions sur le cycle de vie comme le leasing chimique. Nous avons également besoin de développer des outils financiers et des compétences à même de garantir la continuité et la fluidité du développement de ces approches.
Avancer ensemble Je veux que la « Feuille de route pour une Europe efficace dans l’utilisation des ressources » de la Commission européenne soit vue comme un partenariat supplantant les vieilles oppositions. Alors même que le paquet législatif énergie-climat de 2009 qui, en instaurant la réduction des émissions de CO2 des nouvelles voitures et des transports, a mis d’accord les deux parties en montrant qu’une solution était possible, je veux que l’environnement et l’industrie s’associent pour reconnaître que l’environnement et l’économie doivent coexister et dépendent l’un de l’autre. Antonio Tajani, commissaire chargé de l’Industrie et de l’Entreprenariat, et moi-même sommes déjà sur la même longueur d’onde, mais les outils disponibles à Bruxelles ne suffiront pas à faire réussir notre projet de dissocier la croissance européenne de la raréfaction des ressources naturelles. Nous avons besoin d’une initiative publique et de l’appui du secteur privé. Le rôle des ministres européens de l’Industrie sera central dans l’obtention d’une croissance rationnelle et j’ai hâte de travailler avec eux pour m’assurer que… faire plus avec moins sera notre avantage comparatif de ce XXIe siècle. n
« Messieurs les ministres de l’Industrie, nous n’avons pas d’autre planète et nous n’avons donc pas d’autre choix que d’utiliser de manière plus rationnelle les ressources que la terre nous offre. » MakingIt 39
POLITIQUE EN BREF
Photo : ONUDI
Groupe de femmes productrices de beurre de karité recevant une formation au Mali.
Développement industriel tenant compte des disparités entre les sexes 40 MakingIt
Par le Comité directeur pour l’égalité entre les femmes et les hommes de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) Le mandat de l’ONUDI est ciblé sur la promotion du développement industriel pour diminuer la pauvreté, pour une mondialisation inclusive et pour un environnement durable. Cela ne peut être accompli sans prendre en compte l’intégralité du potentiel des femmes. Nous pensons que l’élargissement des opportunités économiques pour les femmes devrait être au cœur de toutes les
POLITIQUE EN BREF
interventions et les politiques de développement, en se concentrant sur la création d’emplois tenant compte des disparités entre les sexes, la fourniture de ressources productives, comme des fonds, des informations sur le marché, des technologies, des compétences et de l’énergie durable, et l’investissement simultané dans les services de garderie qui diminuent le fardeau des femmes en matière de travail domestique et de garde d’enfants non rémunéré. L’ONUDI vise ainsi à atteindre l’objectif d’une autonomisation économique des femmes grâce à des conseils en matière de politiques, des programmes de coopération technique et des stratégies organisationnelles pour un développement industriel tenant compte des disparités entre les sexes, et cela dans un cadre d’égalité totale entre les femmes et les hommes au niveau institutionnel. Nos conseils sur les politiques et nos programmes de coopération technique se concentrent principalement sur le transfert des compétences et des technologies pour aider les femmes à entrer sur le marché du travail formel en tant que travailleuses indépendantes. L’ONUDI a plus de 30 ans d’expertise dans le développement de l’entreprenariat féminin, en utilisant divers outils et mécanismes comme le renforcement des capacités au niveau politique, institutionnel et des entreprises, en créant un environnement favorable pour les femmes entrepreneurs grâce au renforcement des services de soutien et en les aidant à accéder aux ressources productives et financières. Nous organisons également les femmes en groupes pour faciliter leur accès collectif à aux matières premières, aux informations, aux technologies et aux marchés. Par exemple, l’un des projets en cours de l’ONUDI, au sud du Mali, dans une des régions les plus pauvres d’Afrique, est en train de renforcer les capacités de groupes de femmes pour produire des produits à base de karité. Le beurre de karité est un ingrédient très en vogue dans les produits cosmétiques pour ses bienfaits considérables en termes de santé et de beauté. Comment aidons-nous ces groupes de femmes à tirer profit de cette demande ? En leur faisant découvrir des technologies adéquates qui augmentent leur productivité, en les sensibilisant et en fournissant des formations sur les systèmes de contrôle de
« Investir dans un développement industriel tenant compte des disparités entre les sexes a un effet multiplicateur sur la productivité, l’efficacité et la durabilité de la croissance économique, ainsi que sur le renforcement des droits des femmes. »
qualité, la certification des produits et la commercialisation, et en les rapprochant des marchés internationaux sur lesquels elles peuvent vendre leurs produits. Au nord du Maroc, l’ONUDI a mis au point un programme d’entreprenariat pour augmenter les opportunités de revenus de la population rurale, tout en améliorant la compétitivité de la production d’huile d’olive à petite échelle, des textiles et des groupes de dessiccation de fruits et de légumes gérés par des femmes. Les femmes participant au programme ont vu leur productivité augmenter de 40 % et leurs revenus de 50 %. De plus, un réseau solide d’institutions locales
a été créé pour offrir du soutien en matière de technologie de production, de gestion des affaires et de commercialisation. Cela a permis aux femmes entrepreneuses d’être mieux organisées, de mieux utiliser les matières premières locales et de vendre leurs produits sur les marchés locaux et internationaux. Qui plus est, et tout en respectant les valeurs culturelles, le projet a aussi aidé à autonomiser les femmes rurales au plan économique : elles créent dorénavant de la richesse, emploient d’autres personnes, et leur position au sein de leur famille et de leur communauté s’est améliorée. L’éducation, aussi bien formelle qu’informelle, est nécessaire si nous voulons que les femmes et les jeunes filles aient accès à un travail décent et soient capables d’améliorer leur niveau de vie. L’ONUDI aide les pays en développement à lutter contre les attitudes discriminatoires et les stéréotypes relatifs aux différences entre les sexes dans le système éducatif, en promouvant l’éducation et l’acquisition de compétences favorables au développement industriel grâce à un programme de promotion de l’esprit d’entreprise dans les établissements. Le programme permet à des jeunes, garçons et filles, de suivre des cours pratiques d’entreprenariat dans les écoles secondaires et professionnelles. Dans le cadre de ces cours, les filles sont encouragées à prendre des initiatives entrepreneuriales qui défient les stéréotypes de la société et encouragent une attitude positive envers l’entrepreneuriat, les affaires et le développement personnel. Le projet a été lancé au Ouganda en 2001 et s’est poursuivi dans plusieurs autres pays. Au cours de la période 2006-2009, plus de 416 000 étudiants ont suivi ces cours dans 1 397 écoles. Les femmes, en particulier dans les zones rurales, passent une grande partie de leur temps à se procurer du combustible, devant souvent pour cela parcourir de longues distances. Cette activité pénible les expose, de surcroît, à des risques potentiels de violence, de viol et d’abus. Si des sources d’énergie modernes étaient disponibles dans les régions situées en dehors du réseau, cela allégerait grandement le fardeau domestique de ces femmes et leur permettrait de poursuivre des études, une activité économique ou d’autres opportunités. Cela réduirait également leur exposition à des fumées nocives et leur ‰
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‰ fournirait l’énergie nécessaire pour créer des activités rurales et artisanales à domicile. En plus des programmes de coopération technique qu’elle mène pour apporter des solutions énergétiques dans les régions rurales excentrées, l’ONUDI travaille activement au niveau international, aux côtés de ses partenaires au sein d’ONUÉnergie et du Groupe de haut niveau sur l’énergie durable pour tous du Secrétariat général, pour augmenter la prise de conscience quant au rôle essentiel que joue l’accès à l’énergie dans le développement durable et l’autonomisation économique des femmes. L’ONUDI est en première ligne des efforts destinés à promouvoir le développement industriel durable par le biais de son initiative en faveur d’une industrie verte (Green Industry Initiative). L’objectif est de parvenir à une production industrielle qui se caractérise par une utilisation efficace des ressources et une faible empreinte carbone, en s’assurant qu’à travers le monde les industries adoptent des méthodes de production, des techniques et des politiques plus propres. Cela s’applique également aux micro-industries dans les régions rurales, dans lesquelles les femmes sont fortement impliquées. L’ONUDI promeut le transfert de méthodes de production plus propres et de solutions pouvant substituer les approches traditionnelles, afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d’améliorer les moyens d’existence des femmes et de leurs communautés. Ces exemples ne constituent que quelques illustrations pratiques de l’effet multiplicateur que les investissements favorables à un développement industriel tenant compte des disparités entre les sexes ont sur la productivité, l’efficacité et la durabilité de la croissance économique, ainsi que sur le renforcement des droits des femmes. Parmi tous les types d’investissements en faveur du développement, l’autonomisation des femmes est celui qui produit le plus de résultats, et l’ONUDI continuera d’investir dans les femmes et les jeunes filles et de s’assurer qu’elles restent intégrées et qu’elles participent aux activités de développement industriel. n
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Mesurer l’autonomisation économique des femmes
Par GILLIAN GAYNAIR, écrivaine et éditrice pour le Centre international de recherche sur les femmes. L’autonomisation économique des femmes est essentielle pour diminuer la pauvreté et atteindre des objectifs plus généraux en matière de santé et de développement. Il existe néanmoins peu de données sur la façon dont les programmes peuvent rendre les femmes plus autonomes au plan économique et sur les mesures qui permettraient de déterminer si les programmes sont efficaces. Aucun programme ne peut à lui seul apporter des solutions pour tous les facteurs sous-jacents qui influencent le processus de progression économique des femmes. C’est pour cette raison que ceux qui travaillent dans le développement économique international devraient choisir un domaine du processus dans lequel ils peuvent véritablement changer les choses – et mesurer les effets de leurs actions, selon un article du Centre international de recherche sur les femmes (ICRW). Cette brève analyse définit l’autonomisation économique des femmes et propose un cadre mis au point par l’ICRW pour aider à concevoir, mettre en œuvre et évaluer des programmes de progression économique. Le cadre est construit selon des concepts que les experts de l’ICRW ont tiré aussi bien des textes existants que de leur expérience personnelle en matière d’intégration de l’émancipation économique des femmes dans des programmes et de son évaluation.
« De plus en plus de gouvernements, d’entreprises et d’organisations donatrices reconnaissent que l’implication des femmes sur le marché international est fondamentale pour diminuer la pauvreté », a expliqué Anne Golla, économiste principale et spécialiste de l’évaluation à l’ICRW. « Mais il nous est apparu clairement que bon nombre d’entre eux ne sont pas certains de savoir comment déterminer si leur travail – et leurs investissements – permet réellement d’autonomiser les femmes au plan économique. » « Nous pensons que le cadre de l’ICRW permettra d’apporter quelques conseils aux professionnels, aux donateurs et aux autres chercheurs travaillant sur cette question », a-t-elle affirmé. Anne Golla a néanmoins souligné que pour qu’une femme vivant dans des
« Mesurer l’autonomisation économique des femmes équivaut à mesurer les résultats en termes de réduction de la pauvreté », a remarqué Anju Malhotra, vice-présidente de la recherche, l’innovation et l’impact à l’ICRW, et coauteure de l’étude. « Il s’agit d’un processus complexe, mais il peut et doit être mesuré. »
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conditions de pauvreté arrive à s’armer pour pouvoir prendre ses propres décisions et réussir au plan économique, elle doit passer par un processus complexe et multidimensionnel. « Il n’existe pas d’approche unique permettant de garantir le succès des programmes axés sur l’autonomisation économique des femmes et qui cherchent à la mesurer », a-t-elle ajouté. « Cela dépend du contexte dans lequel nous travaillons et des facteurs sous-jacents contribuant à l’autonomisation des femmes sur lesquels nous avons décidé de travailler ». Ces facteurs sont variables, selon l’article de l’ICRW. Ils peuvent inclure toutes sortes de choses, depuis les ressources disponibles pour aider une femme à prospérer, comme des formations professionnelles et des prêts, jusqu’aux institutions qui déterminent comment ces ressources parviendront jusqu’à elles (des organismes juridiques par exemple). Chacune d’elles influence le chemin emprunté par les femmes vers l’autonomisation économique. La clé pour la création de programmes d’émancipation économique sérieux est de sélectionner un aspect du processus complexe d’autonomisation économique, celui où l’on peut produire le plus d’effet – compte tenu de la période du projet et du financement – et de se concentrer sur cet aspect. L’ICRW recommande également que l’évaluation du projet soit alignée avec l’aspect particulier qu’il traite. Afin d’apporter davantage de conseils, dans chacun de ses cadres de mesure, l’ICRW présente plusieurs exemples d’indicateurs de succès, aux niveaux non seulement individuel et des ménages, mais aussi de la communauté et institutionnel. l Understanding and Measuring Women’s
Economic Empowerment(Comprendre et mesurer l’autonomisation économique des femmes) a été publié par l’ICRW en octobre 2011.
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POLITIQUE EN BREF
Solutions contre les écarts de salaire entre les sexes Par Soroptimist International des Amériques Malgré des décennies de lois antidiscrimination et de changements dans les politiques des entreprises et des affaires dans le monde entier, les femmes continuent de gagner moins que les hommes sur le marché du travail. Ainsi, il existe des écarts de salaire entre les sexes à travers la planète. Il s’agit d’un problème complexe qui nécessite des solutions à plusieurs niveaux. Parmi ces mesures figurent :
Éducation Une des stratégies les plus importantes pour garantir que les filles et les garçons comptent sur des opportunités de salaires identiques lorsqu’ils seront adultes est de leur fournir un accès identique à l’éducation. Il est également nécessaire de promouvoir les carrières dans les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques de façon à les rendre attirantes pour les filles, ainsi que de les encourager à suivre des cours avancés en mathématiques. De plus, il est fondamental d’augmenter les ressources dédiées aux formations à des compétences non traditionnelles et d’améliorer l’accès à la formation professionnelle, surtout pour les mères célibataires. Il est aussi important de fournir aux filles et aux jeunes femmes qui sont encore à l’école des informations sur les options de carrière, car elles sont bien trop nombreuses à être découragées de suivre un enseignement supérieur et/ou des
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formations les menant vers des métiers où l’on ne trouve traditionnellement pas de femmes. Les jeunes filles et les femmes devraient, néanmoins, se sentir libres d’étudier pour travailler dans l’enseignement, en tant qu’infirmières ou personnel soignant, ou à tout autre poste que l’on qualifie péjorativement de « ghetto rose », et elles ne devraient pas considérer ces fonctions comme dégradantes ou insignifiantes. Il ne faut pas juger la réussite dans une carrière « uniquement en fonction de la quantité d’argent, de prestige et de pouvoir évident que l’on trouve dans certains emplois traditionnellement masculins ». Il est aussi important que le monde compte sur des infirmières et des enseignantes que sur des avocats et des comptables. Ces emplois doivent être rémunérés au plan financier et appréciés en fonction du travail en soi et non en fonction de critères reposant sur le sexe. Alors que dans les pays développés les femmes ont fait de grands progrès dans le domaine de l’éducation, dépassant parfois les hommes, il faut encore éliminer les partis pris sexistes des programmes scolaires dans les pays en développement. Les gouvernements, les parents et les donateurs internationaux doivent, compte tenu de leur rôle, « travailler ensemble pour faire en sorte que les écoles accueillent favorablement les filles ». Cela inclut, entre autres mesures, de garantir que les écoles soient situées à proximité des foyers des jeunes filles (pour diminuer les aller-retour longs et dangereux) et d’éliminer les violences sexistes des installations scolaires.
Aider les familles qui travaillent Les longues journées de travail ont des effets disproportionnés sur les femmes, car elles restent les principales responsables de la prise de soin de la famille, « ce qui limite leurs
« Aucun programme ne peut à lui seul apporter des solutions pour tous les facteurs sousjacents qui influencent le processus de progression économique des femmes »
options quant à savoir si elles vont travailler, où elles vont travailler et dans quel type d’emploi ». Les gouvernements, l’industrie et les entreprises doivent, en tant que tels, créer davantage de lieux de travail favorables aux familles et de politiques sur le lieu de travail. Il s’agit d’une question fondamentale, car elle influe sur les revenus des femmes, raison pour laquelle il faut penser à : rendre les horaires plus flexibles sur les lieux de travail ; fournir des congés parentaux et des congés payés en cas de maladie ou s’il est nécessaire de prendre soin de la famille ; offrir des solutions de garde d’enfants abordables et de bonne qualité et encourager le développement de plus d’emplois à temps partiel bien rémunérés et offrant également des avantages intéressants. De telles politiques/avantages sont non seulement positifs pour les mères qui travaillent, mais aussi pour les entreprises qui ont besoin d’attirer une main d’œuvre féminine si elles veulent survivre au départ en retraite de nombreux « baby boomers ». De plus, si les mères qui travaillent gagnaient autant que les hommes, leurs revenus augmenteraient de 17 % et le taux de pauvreté parmi elles baisserait de moitié, passant de 25,3 % à 12,6 %. Des aides sont également nécessaires pour les femmes qui sont responsables de leur foyer. « Lorsque des mères célibataires, qui sont confrontées à la discrimination et à des revenus plus faibles sur le marché du travail, sont à la tête de leur famille, celles-ci courent davantage de risques de vivre dans la pauvreté. » Par conséquent, ces femmes ont besoin d’un meilleur soutien en termes de garde d’enfants et d’un accès à la formation professionnelle. Bien que de nombreuses entreprises offrent des environnements favorables à la famille, il arrive que la culture de ces organisations encourage encore les retours de bâton, la culpabilité et la discrimination. Certaines femmes qui travaillent ont l’impression que les organisations les inondent de belles paroles à propos de leurs politiques familiales, mais elles ont le sentiment tacite que les employés qui appliquent ces politiques sont considérés comme moins engagés que les autres envers les organisations en question. D’autres affirment que si les employeurs mettent en place sur le papier des politiques allant dans
POLITIQUE EN BREF
Photo : © Organisation Internationale du Travail/Dutta B.
Une employée domestique à Bangalore, en Inde.
le sens de l’équilibre travail/vie personnelle, il s’avère néanmoins difficile pour les employés d’en profiter réellement.
De meilleures données et analyses Bien qu’il existe suffisamment d’études montrant que les femmes ont tendance à travailler plus et à gagner moins que les hommes, des analyses plus détaillées de cette question sont nécessaires. Les gouvernements doivent collecter et partager des données fiables sur les revenus nationaux à partir desquelles il sera possible de calculer et de comparer les écarts de salaire entre les sexes au niveau d’un pays. Cela permettrait « d’identifier les différentes possibilités d’affronter le problème de façon ciblée et d’identifier les améliorations pouvant être apportées aux cadres juridiques existants, susceptibles d’engendrer une diminution
significative des écarts de salaire ». Apprendre aux femmes à réclamer une meilleure rémunération Les femmes doivent assumer que la plupart des choses dans leur vie sont négociables et qu’elles ne doivent pas accepter l’idée selon laquelle le statu quo est rigide et se contenter de ce qui leur est offert. « Ce changement d’état d’esprit peut produire des résultats extraordinaires chez les femmes ». Les femmes peuvent non seulement voir le monde comme un lieu plus négociable, mais aussi commencer à envisager différemment la négociation – en la considérant comme une occasion bénéfique pour tous plutôt que comme un acte agressif ou de confrontation. « De cette façon, elles peuvent recadrer leurs négociations de telle sorte qu’elles se sentent plus à l’aise vis-à-vis de l’ensemble du processus ».
Les nouvelles générations de jeunes femmes d’aujourd’hui se sentent probablement plus à l’aise pour discuter de leurs salaires et de leur pouvoir d’achat en général et peuvent donc négocier de meilleurs salaires. Parmi ces femmes, les informations relatives aux salaires sont échangées ouvertement, tout au moins entre amis. Plusieurs travailleuses âgées de moins de 25 ans ont affirmé : « une plus grande transparence salariale entre amis est tout à fait logique à une époque où énormément d’information peut être consultée librement en ligne ». Un tel partage de l’information sur les salaires aide les femmes à déterminer à quel moment elles doivent exiger une augmentation, commencer à chercher un autre travail ou envisager de prendre des mesures juridiques. l Extrait du livre blanc du Soroptimist : The Gender
Wage Gap(L’écart salarial entre les sexes)
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LE MOT DE LA FIN
Vers une économie reposant sur l’hydrogène Anticipant le prochain numéro qui portera sur la troisième révolution industrielle, le magazine Making It a interviewé le DR. MUSTAFA HATIPOĞLU, directeur général du Centre international pour la technologie de l'utilisation de l'énergie de l'hydrogène (CITEH), un projet de l’ONUDI soutenu par le ministère turc de l’Énergie et des Ressources naturelles. Une « économie hydrogène », c’est-à-dire un système fournissant de l’énergie à partir de l’hydrogène, est envisagée comme solution possible à certains des effets négatifs de l’utilisation de combustibles hydrocarbonés. À quoi ressemblerait une économie hydrogène dans la pratique ? Aujourd’hui, le monde dépend largement des produits dérivés des combustibles fossiles qui fournissent une part considérable de nos actuels besoins en énergie. Une économie hydrogène entrainerait l’utilisation de l’hydrogène à chaque fois que les énergies fossiles sont utilisées. L’hydrogène est un gaz qui peut être brûlé de la même manière que le gaz naturel ou qui peut être utilisé pour produire de l’électricité grâce à un appareil appelé pile à combustible. Il peut être utilisé pour remplacer directement les produits pétroliers dans les moteurs à combustion interne, les systèmes de chauffage et tout autre application similaire. Comme il s’agit d’un gaz élémentaire, il ne contient pas de carbone et sa combustion ne libère aucun produit carboné dans l’atmosphère, ce qui rend son usage totalement propre. L’hydrogène se trouve lié à l’oxygène dans l’eau et dans le méthane, ou d’autres composés, lié au carbone. Pour libérer de l’hydrogène, il faut utiliser de l’énergie
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Photo : ICHET
Dr. Mustafa Hatipoğlu démontrant une « Ecocart hydrogène » du CITEH à l’Hydrogen and Fuel Cell Exhibition à Hanovre, Allemagne.
fournie par d’autres sources. C’est pour cela qu’il ne peut pas être considéré comme une source primaire d’énergie, mais plutôt comme un vecteur ou un porteur d’énergie. Les bénéfices de l’utilisation d’énergies renouvelables comme les énergies solaire, éolienne, géothermique, hydroélectrique ou marémotrice sont bien connus. Cependant, un problème commun à de nombreuses énergies renouvelables est qu’elles sont intermittentes, autrement dit, elles ne sont disponibles qu’à certains moments. Par exemple, l’énergie solaire est disponible seulement de jour, l’énergie éolienne ne peut pas être obtenue par temps calme et l’énergie hydroélectrique est disponible uniquement quand les flux sont maximaux. Ce qui signifie que pour qu’un réseau électrique soit à même de répondre à un pic de consommation, il faut pouvoir stocker l’énergie créée par ces sources intermittentes, pour surmonter les périodes pendant lesquelles elles ne sont pas productives. L’hydrogène est un excellent moyen de stockage. Lorsque l’électricité est produite en excès, il est possible de la convertir en hydrogène grâce à l’électrolyse de l’eau, et inversement, pendant les pics de consommation, l’hydrogène peut être à nouveau converti en électricité. Dans la mesure où toutes les régions de chaque pays possèdent sa part d’énergie renouvelable, l’énergie serait produite et utilisée localement, au lieu d’être importée et distribuée.
Un des aspects principaux de l’économie hydrogène repose sur l’extension de l’utilisation de véhicules à pile à combustible. Comment marchent ces véhicules ?
« L’ère de la technologie hydrogène arrive. Les changements climatiques, l’épuisement des énergies fossiles et les problèmes de sécurité énergétiques des pays la rendent inévitable. »
Les piles à combustible sont constituées d’une série de membranes, ou électrolytes solides, prises en sandwich entre deux arrivées de gaz : l’hydrogène d’un côté et l’oxygène, ou l’air, de l’autre. Quand l’hydrogène entre en contact avec la plaque d’électrolyse, les électrons sont libérés des atomes d’hydrogène et les protons chargés positivement migrent à travers l’électrolyte jusqu’à se combiner aux molécules d’oxygène situées sur la face opposée pour former de la vapeur d’eau. Les électrons libérés forment un courant électrique en parcourant le circuit externe. Plus la quantité de gaz utilisée est grande, plus le nombre d’électrons en
LE MOT DE LA FIN
MakingIt L’industrie pour le développement
LECTURES COMPLÉMENTAIRES
circulation augmente et plus le courant est important. Les piles à combustible peuvent remplacer les batteries des voitures électriques et d’autres véhicules. Le temps de charge d’une batterie est en moyenne supérieur à huit heures, alors qu’il ne faut que quelques minutes pour remplir un réservoir à hydrogène comprimé. Alors que les véhicules à batterie ont une autonomie d’environ 130 km, les véhicules récents à piles à combustible ont une autonomie de 500 à 800 km. Cependant, les piles à combustible sont plus chères à l’achat et ont un rendement énergétique moins important que les batteries.
Pouvez-vous nous rappeler quelles sont les directions prises à l’échelle mondiale pour augmenter l’usage des véhicules à pile à combustible. Actuellement, presque tous les grands constructeurs automobiles du monde développent des voitures à hydrogène, qu’elles utilisent un moteur à combustion interne modifié ou une pile à combustible. De même, presque toutes les grandes compagnies pétrolières se diversifient et se tournent vers les énergies renouvelables, parmi lesquelles l’hydrogène joue un rôle majeur. Il existera ainsi des constructeurs automobiles capables de fournir des véhicules à hydrogène et des compagnies pétrolières capables de fournir de l’hydrogène. Le défi va être d’obtenir les deux en quantité suffisante. On attend très prochainement le déploiement de véhicules en Californie et dans certaines parties de l’Allemagne où l’infrastructure va être implantée. Il y aura aussi des points d’approvisionnement en hydrogène dans un certain nombre de villes situées hors de ces régions. C’est une espèce de noyau qui permettra à cette infrastructure de se répandre. Si la volonté politique encourage par différents types d’incitations à utiliser des systèmes basés sur l’hydrogène, il y aura toujours des entrepreneurs prêts et enclins à exploiter de potentiels nouveaux produits et concepts. La clef réside donc dans la reconnaissance par les gouvernements nationaux que l’introduction de technologies de transports plus propres requiert un soutien et une collaboration considérables de leur part.
Aujourd’hui, le monde est concentré sur les voitures électriques et non sur les voitures à pile à combustible parce qu’elles coûtent moins cher, mais cela ne durera pas lorsque le public découvrira les limitations des batteries liées à leur faible autonomie et à leur longue durée de charge. Le besoin de plus d’autonomie favorisera la création de véhicules à pile à combustible et des infrastructures correspondantes. La date de mise en œuvre fixée à 2015 pourrait être repoussée à 2020 ou un peu plus tard, mais dans tous les cas, l’ère de la technologie hydrogène arrive. Les changements climatiques, l’épuisement des énergies fossiles et les problèmes de sécurité énergétiques des pays la rendent inévitable.
Est-ce que l’économie hydrogène concerne juste les pays riches ou a-t-elle aussi quelque chose à offrir aux pays en développement ? Les technologies reposant sur l’hydrogène ne sont certainement pas bon marché comparées aux coûts actuels des énergies fossiles. Néanmoins, comme les prix du pétrole augmentent, que ce soit à cause de l’augmentation de la concurrence avec les pays en voie de développement ou à cause de la lente mais inexorable disparition des ressources, le jour viendra où les coûts des technologies conventionnelles et nonconventionnelles s’équilibreront. Les avantages d’une énergie propre et renouvelable deviendront alors plus intéressants. A ce moment-là, l’hydrogène sera incontournable pour tous les pays, et pas seulement pour les pays développés et industrialisés. Nombre de pays en voie de développement, comme la Chine, l’Inde, la Malaisie, l’Afrique du Sud ou la Turquie, ont déjà développé, ou sont en train de le faire, des programmes hydrogène et l’on s’attend à ce qu’ils adoptent l’économie hydrogène. Il se pourrait même que ces pays puissent exporter des énergies comme l’hydrogène vers les pays du industrialisés du Nord. Déjà, certains projets envisagent la possibilité d’exporter l’énergie issue des énormes potentiels éoliens de la côte atlantique du Maroc et de la Mauritanie et de la transporter sous forme d’hydrogène par pipeline vers l’Europe. n
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