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Faits divers
S AME DI 1 9 S E P TE M B RE 201 5
L ' AL S A CE
COUR D’ASSISES DU HAUT-RHIN
RENCONTRES
Rixes à la fête de Rodern : les trois jeunes condamnés à du sursis
Le secourisme en question Les journées de la médicalisation en milieu hostile réunissent à nouveau, ce week-end à Villé, de nombreux secouristes et spécialistes des urgences.
La cour d’assises des mineurs a condamné à cinq ans avec sursis les trois jeunes jugés pour violences en réunion ayant entraîné une infirmité permanente. Les faits s’étaient déroulés lors de la fête du pinot noir de Rodern. Annick Woehl
Cinq ans avaient été requis, cinq ans avec sursis ont été prononcés, hier à Colmar, contre les trois jeunes jugés à la cour d’assises des mineurs pour des violences en réunion ayant entraîné une infirmité permanente (L’Alsace des 8 et 16 septembre). Rappelons qu’un jeune homme de 23 ans avait été tabassé le 19 juillet 2009, lors de la fête du pinot noir de Rodern. Longtemps dans le coma, il souffre aujourd’hui de graves troubles neuropsychologiques qui lui ont, notamment, enlevé la mémoire. Il n’a donc aucun souvenir de ce qui s’est passé l’été 2009. L’enquête avait montré que deux groupes, des Haut-Rhinois et des Bas-Rhinois, s’étaient violemment opposés ce soir-là. C’est parce qu’ils avaient pensé que la victime était l’auteur d’un coup de bouteille sur la tête d’un des leurs que
les trois accusés s’en seraient pris plus particulièrement à lui, une première fois dans la ville, une seconde dans les vignes.
Un troisième épisode de violences ? Le procès s’est déroulé depuis mardi dernier à huis clos. Un des accusés a assuré n’avoir porté aucun coup ; son avocat, Me Nicolas, a plaidé l’acquittement. Les deux autres ont reconnu quelques coups, mais assurent que leur victime était debout et consciente quand ils sont partis. Selon eux, ce ne sont donc pas leur action qui a entraîné l’infirmité de la victime. Durant l’audience, la défense a émis l’hypothèse d’un troisième épisode de violence avec un autre protagoniste. Elle s’appuie sur le fait que la scène décrite par un témoin se déroulerait dans les vignes, alors que le corps du malheureux garçon a été retrouvé à la
lisière des vignes… Pour cette raison, Mes Gilbert et Soumsa ont demandé la requalification des faits reprochés à leurs deux clients en violences n’ayant entraîné aucune ITT (incapacité totale de travail). La thèse n’a pas convaincu Bernard Lebeau au ministère public qui a requis les cinq ans de prison ferme. Pas convaincu non plus Me Mengus qui représentait les parties civiles. Tous deux semblaient satisfaits de la condamnation, puisque si la cour n’a pas envoyé les jeunes en prison, elle a estimé qu’ils étaient coupables.
Deuxième procès en correctionnelle C’est cette déclaration de culpabilité qui pose problème à la défense, vraisemblablement aussi pour ses conséquences civiles, le préjudice subi par la victime étant très important. Les avocats ne savaient
pas encore, hier soir, s’ils allaient, ou pas, faire appel. Au niveau des familles, la sentence semble avoir été relativement bien perçue. La maman de la victime nous avait confié au début du procès ne pas vouloir à tout prix qu’on envoie les agresseurs de son fils en détention : « La prison, ça ne sert pas forcément. […] Je voudrais juste que mon fils puisse vivre. » Après le délibéré, la mère d’un des accusés est allée l’embrasser. Un très beau geste, dont la symbolique résonne fort en écho aux bagarres récurrentes de fêtes de village. L’affaire se poursuivra en chambre correctionnelle devant un juge unique. Cinq autres jeunes identifiés comme ayant participé aux faits survenus au centre de Rodern contre la même victime y seront jugés. L’audience, au départ programmé en octobre comme nous l’avions indiqué, se tiendra finalement un peu plus tard.
JUSTICE
Évasions : un grand absent et trois, cinq et dix ans de prison Deux Strasbourgeois comparaissaient hier pour évasion et association de malfaiteurs. Le troisième prévenu, évadé devant la cour d’appel de Colmar en 2014, est toujours en cavale. Professionnels aguerris du trafic de stupéfiants, ils ont écopé de lourdes peines. Véronique Berkani
D’importants moyens de sécurité ont été déployés hier matin au tribunal correctionnel de Colmar lors de la comparution de Jacques Gevez, évadé le 5 avril 2014 alors qu’il était en permission, interpellé en Turquie six mois plus tard, et Ludovic Ruer, soupçonné d’avoir aidé Nicolas Gevez – le frère de Jacques – à s’évader dix jours après. Ce dernier, grand absent de l’audience, est aujourd’hui toujours en cavale. Les faits avaient défrayé la chronique le 15 avril 2014, lorsque Nicolas Gevez, qui devait comparaître devant la cour d’appel de Colmar après avoir été condamné à dix ans de prison pour trafic d’héroïne, avait réussi à fausser compagnie à son escorte. En provenance de sa prison de Nancy-Maxéville, menottes aux poignets, il s’était enfui grâce à un complice qui l’attendait au guidon d’un puissant scooter Yamaha T-Max à la plaque d’immatriculation masquée, posté à proximité d’un parking de la cour d’appel.
« Un bain de sang » si on le laisse tomber En détention provisoire depuis 17 mois, Ludovic Ruer nie avoir participé à l’organisation de l’évasion de Nicolas Gevez. Il affirme cependant avoir été présent ce 15 avril à
la cour d’appel de Colmar, où il était venu soutenir Nicolas Gevez qu’il avait connu en détention à Écrouves (Lorraine). Les images enregistrées par les caméras de surveillance de la cour d’appel diffusées lors de l’audience en témoignent. On y voit le prévenu faire deux allers-retours entre l’intérieur de la cour d’appel et son parking, observer, regarder attentivement autour de lui, pour finalement assister à la fuite à scooter de Nicolas Gevez.
Lourd élément à charge, le lendemain des faits, le 16 avril, la police, qui recherche Jacques et Nicolas Gevez dans leur quartier de la Meinau à Strasbourg, tombe sur Ludovic Ruer qui, à leur vue, déchire un papier qu’il tente aussitôt d’avaler. Sur cette lettre depuis reconstituée, écrite par Nicolas Gevez, figurent des instructions très précises à l’adresse de « Djelloul », surnom de M. Ruer. Il y annonce son intention de se rendre en Espagne.
« Juste au moment où il s’échappe, vous êtes là, c’est une drôle de coïncidence », relève Sophie Thomman, présidente du tribunal. « C’était organisé, vous étiez au courant de ce qui allait se passer. » « Non, sinon je ne serais pas allé me promener devant les caméras de surveillance », rétorque Ludovic Ruer. « Sauf que vous ne saviez pas qu’il y en avait à cet endroit. » « Si, je le savais, qui ne le sait pas ? »
Pour cela, il a besoin d’argent, de papiers d’identité d’une personne qui a la même taille que lui et d’une grosse cylindrée. Il assure qu’il sera généreux envers tous ceux qui l’aideront, mais menace de « faire un bain de sang » si on le laisse tomber.
Le prévenu prétend être simplement allé chercher des cigarettes dans la voiture. La présidente s’étonne que M. Ruer, « boulimique du téléphone », ait éteint son portable juste avant l’évasion, à 9 h 57, et l’ait rallumé à 12 h 15, une fois revenu à Strasbourg. « Je n’avais plus de batterie », explique-t-il. « Ne me faites pas croire qu’avec l’usage que vous faites de votre téléphone, vous puissiez avoir des problèmes de batterie ! »
« En détention pour un bout de papier » « Ce courrier, Nicolas Gevez vous l’a donné à Colmar, alors qu’il s’évadait ? », interroge la présidente. « Non, je l’ai eu le lendemain, c’est une personne du Haut-Rhin qui est venue me l’apporter dans le quartier. » « Visiblement, Nicolas Gevez avait toute confiance en vous pour organiser sa cavale. » « Non, on m’a juste donné un papier que je devais transmettre à quelqu’un d’autre. À part la lettre, je n’ai rien à voir dans cette affaire. Ça fait 17 mois que je suis en détention provisoire pour un
bout de papier ! », s’énerve Ludovic Ruer (dont quatre mois à l’isolement, NDLR). Jacques Gevez, lui-même évadé le 5 avril 2014, dix jours avant son frère – il n’était pas rentré de permission –, est également soupçonné d’avoir aidé son frère dans son évasion et sa cavale. Il conteste les faits, arguant que son frère et lui, qui avaient un temps partagé la même cellule à Nancy, avaient été séparés et ne s’entendaient pas. « Pourquoi les deux frères auraientils souhaité se séparer s’ils étaient censés préparer leur évasion ? », appuie maître Braun, l’avocat de Jacques Gevez. « Mon client a demandé plusieurs fois une permission de sortie. Ce n’est qu’au bout de la quatrième fois qu’il l’a obtenue. Comment aurait-il pu prévoir que quelques jours avant le passage de son frère devant la cour d’appel de Colmar, il serait en situation de s’évader ? », ajoute-t-il. Le tribunal a reconnu Ludovic Ruer coupable de complicité d’évasion et d’association de malfaiteurs. Il a été condamné à cinq ans d’emprisonnement avec maintien en détention. Nicolas Gevez a écopé de dix ans de prison avec mandat d’arrêt et son frère, relaxé du chef d’association de malfaiteurs, de trois ans d’emprisonnement avec maintien en détention.
SÉLESTAT
GEISHOUSE
Avec 2,92 g d’alcool, il fonce dans une voiture et prend la fuite
Mauvaise chute d’un toit
Un homme de 63 ans, domicilié à Saint-Amarin, a lourdement chuté d’un toit, hier vers 16 h 40, chemin des Prés, à Geishouse. L’accident s’est Après avoir embouti une voiture, jeudi vers 17 h 30, rue d’Ebersheim à Sélestat, produit lors de la construction d’un abri en bois pour une voiture à un Sélestadien de 46 ans prend la fuite. La conductrice du véhicule percuté, une l’extérieur d’une habitation. Le sexagénaire, ancien maître charpentier, a Sélestadienne de 52 ans, a été légèrement touchée aux cervicales. Plus tard, subitement glissé de l’échelle avant de se retrouver au sol. Conscient une patrouille de police aperçoit le véhicule incriminé. Le conducteur refuse mais souffrant d’un traumatisme crânien, il a été secouru par les sapeursd’obtempérer et s’enfuit à nouveau. Il est finalement interpellé route de Stras- pompiers de Geishouse et de Thann, avant d’être pris en charge par bourg. Au commissariat de police, l’individu est contrôlé positif à l’alcool avec l’hélicoptère du Samu 68, et héliporté à l’hôpital Émile-Muller de Mul2,92 g par litre de sang. Après avoir été placé en garde à vue, il a reconnu les faits house. Dans la soirée, il a été transféré en hélicoptère à l’hôpital Pasteur et a été déféré au tribunal de grande instance de Colmar. de Colmar. Les gendarmes de Fellering se sont rendus sur place. A. V. IRE03
Avec un démineur et un médecin-urgentiste, les participants ont planché sur la toxicité des gaz rejetés par les explosifs. Photo L’Alsace/Thierry Martel
Thierry Martel
Pendant trois jours, à la MJC Le Vivarium de Villé, une cinquantaine de professionnels du secourisme et de l’urgence vont se retrouver dans une pièce pour « phosphorer », selon le mot utilisé par le Colmarien Eric Zipper, président de l’ONG Corps mondial de secours et organisateur de ces journées de la médicalisation en milieu hostile. Par milieu hostile, il faut comprendre les espaces souterrains, mais également la montagne ou les lieux touchés par une catastrophe naturelle. « De par mes activités (Eric Zipper est également conseiller technique au Spéléo-secours français, NDLR), j’ai été en contact avec de nombreux professionnels du secourisme, qu’ils soient médecin, infirmier ou pompier. Et nous sommes tous confrontés à certaines problématiques : éloignement des renforts, matériel non adapté à certaines interventions, etc. Comme personne n’a pris le temps de réfléchir aux moyens d’améliorer les choses, nous avons décidé de prendre les choses à bras-lecorps ». Ainsi est née, en 2012, la première édition des journées de la médicalisation en milieu hostile. « On avait également passé trois jours à se poser de nombreuses questions, mais on était ressorti sans y apporter de réponses », avance Eric Zipper. Trois ans plus tard, à l’issue de ces trois jours, les organisateurs de ce
« brainstorming » souhaitent pouvoir valider « des processus, des techniques ou du matériel ». Les comptes rendus de ces journées seront ensuite publiés dans des revues médicales ou destinées aux pompiers, afin que le fruit du travail effectué à Villé puisse profiter au plus grand nombre.
Les gaz toxiques des explosifs Hier après-midi, les participants à ces rencontres se sont penchés sur la toxicité des fumées de tir d’explosifs en spéléologie. Pour en parler, Eric Schnell, démineur au centre colmarien de la sécurité civile et Jean-Christophe Zink, médecin-urgentiste à Colmar. Pour le démineur, ces journées sont « le prolongement des rencontres sur le terrain ». Le docteur Zink a rappelé que les spéléologues utilisent de plus en plus d’explosifs, notamment pour désobstruer des grottes, et cela parfois pour secourir des personnes. Or, les spéléologues s’exposent (ainsi que les victimes) aux gaz dégagés par l’explosion. Afin de pouvoir intervenir en toute sécurité, les professionnels du secourisme présents hier à Villé s’interrogeaient sur la manière de savoir précisément quels types de gaz sont rejetés et leur toxicité. Aujourd’hui, dans une mine du Val de Villé, les spéléologues vont provoquer une explosion afin de prélever des gaz explosifs et les analyser. De la théorie à la pratique, il n’y a qu’un pas.
NANCY
Meurtre d’un Bas-Rhinois : 10 ans de prison requis Le parquet a requis hier une peine de 10 ans de réclusion criminelle à l’encontre d’un homme qui comparaissait devant la cour d’assises de Meurthe-et-Moselle pour le meurtre par balle, sans raison apparente, d’un homme sur un parking. L’avocat général a demandé que la peine soit assortie d’un suivi socio-judiciaire pendant 15 ans après exécution de la peine.
Peu avant les faits, une altercation aurait éclaté entre les deux hommes, qui ne se connaissaient pas. « Tout est parti d’un échange de regards », a déclaré l’avocat du prévenu, Me Alexandre Gantois. Son client affirme « avoir dû réagir face à des violences », notamment des « coups de parapluie » qu’il a dit avoir reçus de la part de la victime, ce dont attestent plusieurs témoins.
Le 24 février 2012, la victime, un père de famille de 47 ans, originaire du Bas-Rhin et chef d’entreprise, avait été mortellement blessé d’une balle en pleine poitrine sur le parking du supermarché « La Cascade », en banlieue de Nancy.
Atteint de troubles psychiatriques pouvant altérer son discernement, l’accusé était, au moment des faits, en rupture de traitement.
« Échange de regards » L’accusé, un homme de 48 ans atteint de troubles psychiatriques, avait pris la fuite. Il avait été interpellé trois semaines plus tard à Nancy par les hommes du Groupement d’Intervention de la police nationale (GIPN) de Strasbourg, au domicile d’un couple d’amis chez qui des armes lui appartenant avaient été retrouvées.
L’avocat général a pris en considération l’influence de la maladie qui a « aidé au passage à l’acte » mais selon lui, « le passage à l’acte était déjà là, dans sa poche ». Une allusion au fait que, depuis plusieurs semaines, l’accusé, qui se sentait menacé, ne sortait jamais sans une arme chargée. « Quand on se promène avec un pistolet chargé, potentiellement, on a intégré l’idée de s’en servir et de tuer », a estimé l’avocat général dans son réquisitoire.