LA VILLE TRANSPARENTE Rapport de stage
LA VILLE TRANSPARENTE Regard sur le patrimoine architectural de Cayenne Traditionnel, moderne et contemporain
Stage de formation pratique réalisé à l’Agence d’Urbanisme et de Développement de la Guyane (AUDeG), en partenariat avec la Maison de l’Architecture de la Guyane (MaGUY), à Cayenne Sous la direction de Juliette Guirado, directrice de l’AUDeG et Anaïs Durand, secrétaire de la MaGUY Encadré par Christel Marchiaro, architecte et enseignante à l’École Nationale Supérieure de Marseille Juillet-août 2015
SOMMAIRE 7
Remerciements
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AVANT PROPOS
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0 INTRODUCTION
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1 LA VILLE FAMILIÈRE Histoire et géographie
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1.1 La ville de l’enfance : souvenirs et sensations
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1.2 Les couleurs de la Guyane
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1.3 Géographie et processus d’arpentage
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2 CONTEXTE ET HISTOIRE Racines de la ville et fondements de l’architecture
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2.1 Histoire et contexte urbain de Cayenne, chef lieu de la Guyane
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2.2 La fabrication d’une architecture traditionnelle guyanaise
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3 ANALYSE DES ARCHITECTURES Changements, évolutions, révolutions
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3.1 Traditionnel et transformation
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3.2 Moderne et contemporain
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3.3 Paysage
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4 CONCLUSION
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Sources
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REMERCIEMENTS
Merci à Juliette Guirado, Directrice de l’AUDeG, pour sa bienveillance, sa patience et ses conseils, à Anaïs Durand, secrétaire de la MaGUY, dont l’aide et la présence m’ont été précieuses, à Jérémy Fernandez Bilbao, directeur de la MaGUY, pour sa confiance, à l’équipe de la MaGUY : Carine, Joel, Lise et Émilie, pour leur encadrement et leurs débats plein d’idées, à l’équipe de l’AUDeG : Carole, Steeve, Nellie, Boris, Leïla et Alexandra, pour leur accueil et leur gentillesse.
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AVANT PROPOS Le territoire guyanais m’est familier. J’ai grandi à Cayenne, y ai effectué mes classes de collège et de lycée et ne l’ai quittée qu’au moment de commencer mes études. Depuis, tous les deux ans et dans de constants allers et retours, j’y retrouve pour quelques semaines ma maison. C’est une région que j’aime et sur laquelle je pose inévitablement un regard ému et empreint d’affection. Aussi, dans le cadre du stage de formation pratique de master, c’est tout naturellement que j’ai cherché à me rapprocher des acteurs territoriaux de Cayenne et de la Guyane, afin d’avoir une appréhension plus fine et technique de ce territoire et d’en effectuer une lecture via les prismes de l’architecture, de l’urbanisme et du paysage. Il s’agissait de confronter mes acquis et les outils dont je dispose à un territoire riche en pleine mutation, familier mais éloigné de la pratique architecturale à laquelle j’ai eu accès jusque là. C’est donc avec plaisir que j’ai pu intégrer l’Agence d’Urbanisme et de Développement de la Guyane (AUDeG), qui m’a offert la possibilité d’avoir un point de vue général sur l’évolution territoriale du département ainsi que sa production architecturale. En partenariat avec la Maison de l’Architecture de la Guyane (MaGUY), un projet de cartographie à destination du grand public a été développé pour les Journées du Patrimoine 2015. J’ai eu la chance de travailler à son élaboration du début à la fin, et de participer ainsi à une étude fine de la ville de Cayenne, rue par rue, à la recherche de pépites architecturales à valoriser. Afin de rendre compte de ces deux mois, j’ai préféré orienter mon travail sous la forme d’une interrogation sur Cayenne, ses spécificités, et plus généralement sur la situation des villes équatoriales. Il s’agit de questionner la fabrique, l’évolution et les bouleversements d’une ville dans son contexte géographique et historique, en insistant sur l’étude de la persistance des modèles urbains et architecturaux traditionnels : leur capacité de mutation participe à forger l’identité du territoire. Les formes architecturales que nous connaissons aujourd’hui, et sur lesquelles nous nous sommes penchés dans le cadre de ce travail de cartographie, sont le fruit des métamorphoses successives qu’a connu Cayenne.
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de la Guyane 10 Situation © Centre d’études de géographie tropicale, CNRS, Atlas des départements français d’outre-mer, Marc Boyé et Gérard Brasseur, 1982
La ville transparente
0 INTRODUCTION Agence d’Urbanisme et de Développement de la Guyane et Maison de l’Architecture de la Guyane L’AUDeG fait partie d’un réseau d’agences d’urbanisme fédérées au sein de la FNAU (Fédération Nationale des Agences d’Urbanisme). L’agence a été créée en 1978, pour disposer en Guyane d’un outil technique fédérant les collectivités, l’État et les différents acteurs de l’aménagement autour de projets communs. Il faut dire que l’AUDeG rayonne sur un territoire immense de 84000km², le plus vaste des périmètres d’intervention d’une agence. L’agence guyanaise mène des travaux d’observation territoriale, de planification urbaine, participe à des projets d’aménagement ainsi qu’à l’élaboration des documents d’urbanisme. Au fil des ans, a été développée une « culture partagée de la connaissance du territoire », à travers la production de données et d’outils mis à disposition des partenaires et du grand public. Par la diversité de ses études, l’AUDeG se positionne comme un acteur incontournable dans l’anticipation des réflexions de la Guyane de demain. Créée en juin 2010, la MaGUY fait partie du réseau français des Maisons de l’Architecture. Son ambition est de créer des événements, de provoquer des rencontres pour susciter le débat sur des problématiques liées à l’architecture guyanaise. Ainsi, la MaGUY propose de diffuser la culture architecturale et urbaine au plus grand nombre par le biais de publications, d’expositions, de conférences et de manifestations, notamment dans les établissements scolaires. Il s’agit de contribuer à la promotion de la création architecturale de la Guyane auprès du grand public et de développer l’intérêt des usagers pour leur cadre de vie.
Mission L’AUDeG et la MaGUY ont développé un partenariat afin de produire une cartographie des curiosités architecturales et paysagères de Cayenne. Ce support à destination du grand public souligne et valorise la diversité du patrimoine bâti et paysager en proposant un parcours dans la ville à la découverte des architectures traditionnelle, moderne, contemporaine, et des transformations et réhabilitations de l’ancien. Objet d’une publication éditée sur support papier et diffusée gratuitement, le projet s’inscrit dans le cadre des Journées du Patrimoine 2015 placées sous le thème du patrimoine du XXIe siècle. Le stage aura ainsi été consacré à la conception de la maquette graphique de cette carte, avec une large place donnée à l’originalité
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de sa charte graphique, tout en assurant une lecture aisée pour le grand public. La mission m’ayant été attribuée consistait également en la sélection et la production d’une analyse des bâtiments et sites sélectionnés, selon l’intérêt et la typologie. Ce recueil d’informations auprès d’acteurs publics, d’architectes et d’habitants aura permis un repérage des bâtiments ayant fait l’objet de visites durant les Journées du Patrimoine.
Problématique et portée La Guyane est un département d’Outre-Mer depuis 1946. De ce fait, elle est soumise aux même lois d’urbanisme que l’hexagone, avec toutefois des dispositions particulières à son littoral et à l’immense emprise de son parc Amazonien. Région tropicale située sur la côte Atlantique de l’Amérique du Sud, sa situation géographique, climatique et également historique ont motivé la mise en place de réglementations architecturales et urbaines spécifiques. Concrètement, le Schéma d’Aménagement Régional, SAR, est l’outil principal de planification de l’aménagement du territoire guyanais ; il s’impose aux autres documents de planification (SCoT, PLU, POS et cartes communales) et tend à structurer à grande échelle le développement des communes, disséminées sur le littoral, le long des fleuves et à l’intérieur des terres, ainsi que leurs liaisons territoriales. Partir à la recherche de curiosités architecturales interroge la structure et l’évolution des codes architecturaux et urbains d’une ville habituellement peu regardée. Cayenne est essentiellement déterminée par son réseau de voies et d’avenues. Le réseau est commun, il est chargé d’un sens quotidien : indiquer, mener, lier. Les rues sont connues et parcourues, le bâti faisant seulement office de masse sillonnée à l’image parfois regrettable. Les façades cabossées, souvent attendrissantes et familières, sont comme un parement enserrant l’effervescence extérieure. La rue concentre l’attention, et le regard du passant ne se pose que rarement avec intérêt sur l’architecture. Nous traversons ainsi la ville transparente, sur laquelle est porté ici un nouveau regard, une lecture urbaine poétique soutenue par un événement culturel. À cette occasion, le rôle des acteurs territoriaux dans la valorisation du patrimoine est souligné, mais c’est également toute la production contemporaine et les nouvelles initiatives qui sont encouragées. Il s’agit de développer l’intérêt des usagers en les incitant à porter le regard sur leur environnement quotidien ; à observer et apprécier les paysages urbains de l’ordinaire. C’est dans ce contexte que se situe la problématique de ce travail : on constate une distance installée entre l’usager et le centre ville de Cayenne. Les façades abîmées trahissent un péril des modèles 12
Vue de Cayenne depuis le fort Cépérou © Mairie de Cayenne
traditionnels, tandis que, malgré la persistance des habitants à pratiquer un espace public peu valorisé, la surpopulation donne lieu à une fuite vers les quartiers environnants, préférés. Aujourd’hui, que signifie alors l’obsolescence des cases créoles ? Que révèle la saturation du damier de Cayenne à propos de l’urbanité guyanaise ? Il s’agit d’interroger un modèle urbain et son architecture. Les cases traditionnelles sont le fruit du damier cayennais, elles sont nées à un moment précis de l’histoire de la Guyane et ont évolué pour répondre à certaines attentes tout en restant adaptées à leur environnement. Cette architecture résulte d’une rencontre entre les cultures et les savoirs. Ce travail constitue ainsi un rapide exposé sur la situation de Cayenne et plus largement sur la Guyane, qui possède une situation géographique et urbaine totalement inédite pour un département français. C’est une interrogation autour de l’identité territoriale, au croisement de différents champs de réflexion tels que les modes d’habiter, l’histoire de la ville, l’émergence d’une architecture traditionnelle, la géographie sensible ou la déambulation urbaine ; toutes ces thématiques se rejoignant dans le contexte du monde créole.
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Guyane et ses communes 14 La Š Atlas illustrÊ de la Guyane, Jacques Barret, 2001
Lagwiyann bel La Guyane est belle
1 LA VILLE FAMILIÈRE Histoire et géographie 1.1 La ville de l’enfance : souvenirs et sensations Prisme de lecture pour une analyse de la ville Détachée de son territoire amazonien par deux rivières qui font d’elle une île, Cayenne est le chef lieu d’un département immensément discret. Historiquement, la modestie des ressources de la Guyane en regard de l’activité florissante des autres territoires de la caraïbe lui a valu d’être délaissée par la métropole. De ce fait, la Guyane n’a pas eu les moyens d’élaborer une architecture de prestige, et la tradition monumentale y est presque inexistante. L’architecture religieuse, symptomatique de la richesse d’un pays, n’a jamais accédé à des splendeurs décoratives, tandis que l’architecture officielle a simplement repris avec de plus vastes proportions les aménagements et les formes de l’architecture domestique, tout en retranscrivant des codes importés de la métropole et issus du colonialisme. J’habitais à la limite du centre ville historique, structuré en damier parfait. Il me reste ainsi de Cayenne les impressions d’une ville colorée aux longues rues orthogonales, que je parcourais patiemment lorsque je me rendais à pied à l’école, située en plein centre ancien. Le centre de Cayenne est compact : ses dimensions relativement réduites favorisent la marche et lui sont d’ailleurs dédiée, ainsi qu’initialement au transport optimisé des marchandises et des ressources locales, ce qui explique l’amplitude des voies. Ces longues lignes droites sont bordées de trottoirs défoncés, aux trous éternellement remblayés et aussitôt reformés, et encadrées de maisons traditionnelles aux couleurs chaudes qui irradient les rues, aux façades et aux toits tantôt abîmés et palis, tantôt entretenus et réhabilités avec le soin nécessaire à faire fleurir un foyer. La première fois que je me suis rendue seule à la place des Palmistes, je m’y suis perdue. De quelle rue je venais, vers quelle rue j’allais ? Le damier cayennais est si rigoureux que le nouvel arrivant va presque systématiquement s’y perdre. Ce sont ces moments d’égarement qui vont d’abord faire porter le regard au dessus des trottoirs, sur les façades, à la recherche d’éléments marquants et familiers. C’est ainsi que la carte mentale de Cayenne se dessine dans les esprits : on la tisse petit à petit entre les édifices et les événements naturels et urbains les plus significatifs, entre les monts, les quelques places, les maisons remarquables, et ce sont ces repères qui mettent du rythme dans la maille cruciforme.
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1.2 Les couleurs de la Guyane Les couleurs de la Guyane sont incarnées par les paysages de la Guyane. Il y a le brun de l’eau pleine d’alluvions, le vert foncé de la forêt, le bleu du ciel et l’or qui fait le trésor de l’Amazonie. Il est du ressort du graphiste d’enrichir son travail avec ces tonalités marquantes, surtout lorsqu’il s’agit de participer à la valorisation d’un patrimoine régional très spécifique.
Guyane, géographie colorée La particularité du territoire guyanais réside en le fait qu’il soit très faiblement anthropisé : la main de l’homme ne l’a pas encore complètement travaillé. Il y a des endroits pour lesquels aucun témoignage n’existe : le paysage est indéfinissable en tant qu’entité territoriale perçue au travers le filtre culturel. L’appréhension de la majeure partie du territoire étant encore très difficile, l’impression de terre inconnue persiste encore, même si l’histoire montre une plus large diffusion de la présence humaine (présence des amérindiens, activité des orpailleurs, études scientifiques, observation satellitaire). La Guyane se manifeste par ses frontières extérieures placées sous le signe de l’eau. Il y a la côte maritime baignée par l’océan Atlantique, puis à l’ouest le fleuve Maroni séparant la Guyane française du Suriname, ex-Guyane hollandaise, et au sud une frontière fluvioterrestre avec le Brésil incarnée par le fleuve Oyapock. À l’intérieur des terres également, la géographie guyanaise est irriguée de cours d’eau. Le territoire, qui semble a priori simple à appréhender puisqu’il est plat, est en réalité complexe : la topographie est très chahutée, avec d’importants reliefs de recueil d’eaux pluviales. C’est leur couleur qui fait la spécificité des eaux guyanaises : l’océan à cet endroit recueille le milliard de tonnes d’alluvions rejetées par le fleuve Amazone à 400km au sud de la Guyane. Résultant du double mouvement des courants marins et des phénomènes météorologiques, les plages guyanaises se colorent ainsi de beige et de brun, offrant des paysages aux teintes inédites. L’implantation des communes en fer à cheval, essentiellement le long du littoral et des fleuves Maroni et Oyapock, montre le rapport qu’entretiennent les populations à l’eau. C’est le résultat de dispositions géographiques naturelles, avec l’immense emprise de la forêt équatoriale qui représente 90 % du territoire, mais également de politiques spécifiques et de frontières socio-économiques. Il n’est jamais nécessaire d’aller très loin pour être en contact avec la nature en Guyane : la forêt, mais également les mangroves, les marais, les criques, les fleuves et les plages sont le cœur battant de la région. 16
Art Tembé
© Inventaire général du Patrimoine Culturel
Cayenne, mouvement des paysages Le climat équatorial et les deux saisons, sèche et humide, accompagnent les mouvements naturels du territoire guyanais dans l’espace et dans le temps. De ce fait, l’élément fort de la Guyane est sa dynamique d’évolution. Les paysages changent à une vitesse extrêmement rapide et dans des proportions extrêmement fortes. Ce changement est dû à la fois aux dynamiques naturelles, telles que l’hydrographie ou la végétation, ou aux dynamiques humaines. Cayenne est une île au littoral cyclique tantôt barré d’une mangrove épaisse, tantôt dégagé sur les eaux brunes de l’Atlantique. Le rapport à la mer n’est pas définitif. Il y a ce jeu magique d’apparition, de disparition et de déplacement de la mangrove, suivant des temporalités difficilement définissables, de l’ordre des 10 ans. La beauté de Cayenne se retrouve dans ce rapport à la mer constamment mouvant, marqué par l’un des plus importants phénomènes d’envasement et d’érosion au monde.
Couleurs, graphisme, art Tous les mouvements, les teintes et les couleurs des paysages guyanais sont potentiellement sources de richesse et d’inspiration pour le graphiste. La réflexion sur le caractère graphique du paysage urbain notamment - a été naturellement menée au cours de ce travail de cartographie, l’objectif de cette publication étant finalement de proposer un objet simple et familier, à garder près de soi et à avoir avec soi en cas de déambulation urbaine. Un support en papier en contact direct avec l’usager, tendant vers un contact plus tactile et enthousiaste avec la ville. Il s’agit plus largement de questionner le paysage et sa retranscription: une approche poétique et picturale d’un paysage propose toujours d’en rendre une impression singulière. En Guyane, c’est l’art Tembé qui révèle les relations intimes qui se tissent entre les guyanais Noirs-Marrons et leur territoire. Ce peuple descendant d’anciens esclaves affranchis (« Marron » vient du mot « marronnage », qui désigne la fuite des esclaves hors des plantations) est aujourd’hui installé majoritairement le long du fleuve Maroni, frontière naturelle avec le Suriname. Dans l’art Tembé, les motifs abstraits, symétriques, géométriques, les entrelacs et les couleurs ont des significations particulières. Ces œuvres sont une façon de communiquer et de transmettre la culture de communion entre les hommes et la nature, au-delà de la simple expression picturale d’une représentation de l’espace. Cet exercice ludique de cartographie interactive a été l’occasion de mener une réflexion sensible sur un paysage familier, en plus d’évoquer la valorisation poétique de l’espace urbain, démarche qui peut avoir un impact sur le réel. 17
couleurs de la Guyane 18 Les Photos personnelles
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1.3 Géographie et processus d’arpentage En parcourant les rues de Cayenne, il ne faut pas chercher l’éclat inédit et parfait, la qualité fascinante. À l’époque des maisons créoles traditionnelles, les demeures devaient être riches à vivre avant d’être belles à regarder. Leurs qualités profondes se découvrent lorsque l’on rentre dans l’appréciation de l’espace vécu, au delà de la contemplation du bâti comme structure et composition de matières et de traits.
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Pour l’élaboration de la carte dans le cadre des Journées du Patrimoine, le parti pris est alternatif : il s’agit de partir à la recherche des curiosités architecturales et paysagères de la ville de Cayenne. Qu’est-ce qu’une curiosité ? C’est un objet qui suscite un désir indiscret, mais également la qualité de quelque chose d’original, de rare et singulier, qui retient l’intérêt. Ainsi, on propose d’aller à la rencontre d’édifices et d’espaces ne présentant pas forcément une démarche architecturale exemplaire ou une composition des plus justes. À l’inverse, est motivée une lecture fine des détails, un regard attentif à la recherche de discrétions intéressantes et de particularismes élégants.
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Des rues composites et lumineuses mais vieillissantes du centre historique au bâti hétéroclite post-moderne des ensembles ourlant les longues extensions urbaines ; le paysage urbain ordinaire de Cayenne s’oppose au caractère grandiose des paysages naturels de la Guyane. On est dans un double mouvement de l’ordinaire et du sublime, dans une contrariété de la nature par la ville minérale, mettant en jeu deux notions qui s’opposent et se complètent. Le grand défi de la carte est donc de travailler à changer le regard sur un espace familier et empreint d’ordinaire. Parce qu’en Guyane, les habitants cherchent de plus en plus le contact avec une nature majestueuse devenue domesticable, aspirent à une vie plus rurale, on observe une fuite de la population hors de Cayenne, vers les communes périphériques moins urbaines.
Méthodologie et processus d’arpentage Une méthodologie a été pensée afin de simplifier la mise en œuvre de la carte à chaque étape : il s’agissait de parcourir longitudinalement puis transversalement la ville découpée en quartiers, de photographier des bâtiments, de les discuter collégialement avec l’AUDeG et la MaGUY pour en avoir la s élection définitive, de les analyser succinctement et de prendre contact avec les architectes 21
ou les habitants en cas d’information manquante, afin de visiter ou éventuellement de proposer à la visite l’édifice pour les Journées du Patrimoine. En parallèle s’effectuait le travail de graphisme sur le cadrage, les couleurs et la mise en page de la carte, dans de constants allersretours entre la ville physique et la ville retranscrite. Méthodologie : parcours, photographie, discussion et sélection, analyse, contact. C’est à vélo que je parcourais les rues de manière systématique, d’abord en long, puis en large, consacrant une demi-journée à chaque quartier, le matin ou l’après-midi en fonction de l’ensoleillement des façades à photographier, et veillant à ce que trop de voitures ou d’autres obstacles n’en obstruent pas la lecture. Il ne fallait pas manquer d’observer les angles, où les édifices font parfois preuve d’ingéniosité avec un traitement remarquable. Lorsqu’il a fallu aller explorer Cayenne hors des limites du centre ancien, une voiture a été nécessaire. L’extension urbaine cayennaise s’articule le long d’artères viaires centenaires, reliant l’île aux communes voisines, et se répand dans les terres, autour des différents monts. La croissance de la ville s’est effectuée en différentes opérations successives, essentiellement des ensembles résidentiels et quelques équipements de quartiers, sans structure d’ensemble. On remarque avec contraste que le damier cruciforme cayennais n’a pas eu de successeur et que la ville s’est déployée progressivement sans appréhension générale du territoire à urbaniser.
Quartier de la Crique, centre ancien
© Inventaire général du Patrimoine Culturel
Au fil du temps s’est ainsi construite Cayenne : la ville haute avec les fortifications médiévales du Mont Cépérou, la ville basse en damier et la ville étendue hors des limites historiques. L’articulation entre ces trois entités urbaines est plus ou moins travaillée et structurée. Il est intéressant de noter qu’au sein de ce système qui confronte à la rigueur de l’ancien la souplesse des tissus récents, du centre historique aux quartiers périphériques ; le littoral cayennais se trouve préservé. De nombreux événements naturels sont d’ailleurs protégés par le plan d’occupation des sols de Cayenne, et présentent une grande diversité : il y a des canaux, des plages de sable formées par des anses, des pointes rocheuses et des monts. Un dialogue entre les trames urbaines et le paysage naturel est pressenti. Le damier de la ville historique, par exemple, s’assouplit et s’adapte au contact du Mont Cépérou, où s’effectue la liaison avec la ville fortifiée. Les extensions péri-urbaines de Cayenne partagent cette même façon de s’implanter à distance des quelques reliefs naturels. Toutefois, ce sont généralement des habitations insalubres qui sont construites aux pieds des monts, parfois soumis à des glissements de terrain. 22
Marché de Cayenne, centre ancien
© Inventaire général du Patrimoine Culturel
Si la ville guyanaise semble préserver ses richesses naturelles en s’y épandant à distance, cette diffusion est essentiellement le fruit de contraintes réglementaires strictes. Même si on peut reprocher à cette planification le blocage des possibilités d’extension de la ville, les littoraux cayennais sont ainsi intégralement sauvegardés, et non bétonnés : la ville se fabrique et s’invente en retrait de la mer.
Ambiances et cartographie sentimentale On distingue trois grandes phases à la croissance de Cayenne : la ville haute, la ville basse et les quartiers périphériques au centre historique. Toutefois, ces fractions urbaines ne sont pas unies et indivisibles. À l’inverse, ces entités sont elles-mêmes constituées d’un assemblage d’ambiances et d’atmosphères, qui relèvent de données géographiques, géométriques et mesurables, mais qui font également appel à la sensibilité et aux domaines de l’imaginaire et de l’émotionnel. Les ambiances sont souvent fragmentées en quartiers. Le centre historique de Cayenne en recèle plusieurs bien qu’il soit peu étendu. Du port à l’ouest au Mont Cépérou fortifié, en passant par le marché, le quartier brésilien tout proche, du village chinois aux accents dominicains et guyaniens de la crique ; on retrouve à Cayenne différentes populations qui font le métissage de la Guyane. Au cœur du centre, voici la place administrative de Grenoble et l’ancienne place d’armes des Palmistes, plus touristique. Puis cessent les places et s’étendent les longues rues, cadencées par quelques écoles qui remplissent et vident les artères au rythme des emplois du temps. Les borde, au nord, le littoral qui accueille la place arborée des amandiers et une alternance d’anses et de pointes rocheuses jusqu’au Mont Montabo, qui se situe déjà hors des limites historiques. La périphérie de Cayenne rassemble également au sein d’un réseau de voies plus ou moins dense une grande variété de lotissements, des grands ensembles populaires comme des villas cossues. Au détour d’une route, étonnamment posées là, apparaissent parfois des barres de logements collectifs abîmées, manifestement complètement inadaptées au climat équatorial, salies par les pluies, aux fenêtres étroites qui suggèrent une atmosphère chaude et sombre à l’intérieur des logements, marquées par une absence de traitement des espaces publics et surtout un manque de dessertes et de liens avec l’environnement immédiat, le quartier ou la ville, créant un sentiment de fermeture et parfois l’impression cruelle d’une ghettoïsation. À quelques minutes, un tout autre quartier, formé de maisons modernes et contemporaines très cossues, implantées en retrait de la voirie sur de vastes terrains cachés par des grilles. Ici et là, quelques opérations de logements collectifs exemplaires en terme d’adaptabilité au milieu chaud et humide et d’attache à la ville. Enfin, quelques maisons de la fin du XXe siècle, réinterprétations modernes de l’architecture 23
traditionnelle, ayant traversé les âges, ponctuent discrètement les artères centenaires. Géographiquement, les différents ensembles sont proches. L’hétérogénéité n’est pas nécessairement un problème urbain, au contraire : les villes possèdent un relief, avec des courants constants, des points fixes, et des tourbillons qui rendent l’accès ou la sortie de certains lieux plus ou moins confortable ou aisé. Par contre, l’absence de cohésion entre différents quartiers peut engendrer des problèmes sociaux et des ruptures néfastes à la ville. Ces nombreux contrastes à Cayenne interrogent la spatialisation des populations ainsi que le rôle social de l’architecture.
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Finalement, il s’agit de travailler à une appréhension plus sensible et affectueuse de la ville.
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Dans ce sens, l’exercice de cartographie proposé ici vise également à ce que les usagers renoncent pour une durée plus ou moins longue aux raisons de se déplacer et d’agir qu’ils se connaissent généralement, pour se laisser aller aux sollicitations du terrain et des rencontres qui y correspondent - y compris architecturales. Ces déformations des parcours et des regards vont aboutir à la construction mentale d’une cartographie sentimentale de Cayenne.
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En faisant abstraction des considérations pragmatiques quant à l’articulation de la ville pour se concentrer sur les sensations, on peut dire que différentes ambiances sont perçues par celui qui traverse Cayenne. En plus d’être construites par les urbanistes et les architectes, ces ambiances sont constituées par un ensemble de facteurs environnementaux perceptibles par les sens : lumières, son, température, odeurs, mais aussi matières tactiles, etc. Ces ambiances participent à la construction d’un imaginaire spatial que chaque individu se crée et qui modifie en retour sa pratique de la ville.
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de Cayenne de 1677 à 1950, échelle 1 : 10000 26 Croissance © AUDeG, Le centre ancien de Cayenne, Bernard Girard, 1984
Sa ki ta’w dlo pa ka chayé’y Ce qui t’appartient te restera
2 CONTEXTE ET HISTOIRE Racines de la ville et fondements de l’architecture 2.1 Histoire et contexte urbain de Cayenne, chef lieu de la Guyane La Guyane et les communes guyanaises L’histoire guyanaise est complexe et en partie mal connue. Elle est d’abord amérindienne. Puis, après l’arrivée des colons européens et de leurs esclaves africains, s’intègre dans l’histoire de France et de l’Amérique du Sud, comme en témoignent encore sa pluralité linguistique et sa place dans le monde créole. Écorchée par l’impression d’« enfer vert » qu’elle renvoie dès le XVIIIe après que des tentatives de peuplement aient cuisamment échoué dû aux maladies tropicales qui décimèrent les populations de colons, la réputation infernale de la Guyane est encore accentuée avec la mise en place du bagne en 1852, malgré l’abolition de l’esclavage quatre ans plus tôt. La commune de Saint-Laurent du Maroni sera pendant près de 90 ans le centre administratif de la Transportation. La découverte de sites aurifères amorce dès le milieu du XIXe une ruée vers l’or qui marque un regain d’intérêt pour la sulfureuse Guyane, mais c’est la départementalisation de 1946 puis l’implantation du Centre Spatial Guyanais en 1965 qui vont relancer l’économie. La population septuple alors en quarante ans, avec des courants migratoires accentués depuis les îles des grandes et petites Antilles (Haïti, République Dominicaine) et des frontières poreuses avec le Suriname et le Brésil. Aujourd’hui, la Guyane compte 254 000 habitants (chiffres INSEE 2015). De l’époque coloniale, les communes de la Guyane ont notamment hérité du damier cruciforme. Outil aujourd’hui universel, originaire de Grèce antique puis codifié par les romains, le damier est le générateur et le dénominateur commun aux villes du Nouveau Monde. Mal maîtrisée, cette planification orthogonale découpe le territoire en cases identiques et monotones. En revanche, si le maillage cruciforme est bien conçu, il créé, oriente, structure la ville et en hiérarchise les espaces publics et les parcelles. Le tracé rationnel et pragmatique des villes d’Amérique avait pour but essentiel de favoriser le commerce colonial. Le maillage orthogonal rationalise en effet le transfert des richesses locales et des produits des plantations, la circulations des esclaves et l’installation des colons. Ces cités coloniales constituaient donc la matrice du pouvoir royal et de l’administration. À la faveur d’un peuplement basé sur l’esclavage et la déportation, et dans une trame ordonnée facilitant le maintien de l’ordre, les différentes
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cases du damier colonial sont devenues le lieu producteur de la ville créole. Cayenne et les autres communes guyanaises n’échappent pas à cette logique du tracé orthogonal. Il s’agissait alors de créer un morceau de ville doté d’une croix viaire, facile à fortifier le cas échéant, puis de s’agrandir de la même manière, chaque cellule absorbant la voisine. Sinnamary, Iracoubo, Mana, Roura, et d’autres communes présentent toutes le même tracé cruciforme sur lequel s’est calquée dans la foulée la croix chrétienne avec l’implantation centrale de l’église du bourg. Toutefois, les communes de la Guyane présentent également des particularités d’implantation directement liées au milieu équatorial et à la géomorphologie des paysages guyanais. Les modes d’implantation les plus connus sont ceux de la mosaïque littorale, ces bandes paysagères très diverses parallèles à la côte. On y trouve traditionnellement une implantation des grands bourgs à la limite entre la mangrove et la savane. La ville est implantée dans les zones les moins perturbées : en dehors des mangroves, des pripris (désigne en créole les marais et zones humides côtières) ; sur les zones les plus stables et au niveau des premières terres émergées dans les embouchures. Les fleuves, sous l’effet des courants marins, dévient avant d’arriver sur la côte : on remarque donc souvent un mouvement sinueux à leur embouchure. La ville se situe alors à l’interface exacte entre les milieux marécageux et les zones de savanes ou de forêt ; construite sur des dunes ou sur des éléments de roches plus dures. Autre schéma qui incarne sûrement la plus grande adéquation avec le milieu : le village amérindien, implanté sur les reliefs surélevés afin d’être hors des zones d’inondations, de préférence à proximité des sauts ou des zones rocheuses des fleuves pour les accostages, la lessive et les bains, et à proximité des abattis (petites clairières agricoles traditionnelles des régions tropicales). Au sein des villages amérindiens, il est intéressant de souligner que l’espace collectif est sans limite : il n’y a pas de différenciation d’espace parce qu’il n’y a pas de propriété.
Quadrillage du plan Turgot, 1760
© AUDeG, Le centre ancien de Cayenne, Bernard
Cayenne : petite tête de la Guyane Cayenne a été choisie pour être le chef-lieu de la Guyane grâce à ses qualités géographiques et sa situation stratégique. Il s’agit en effet du seul relief côtier existant sur la longue côte entre l’Amazone et l’Orénoque : les côtes de l’État d’Amapa au Brésil, du Suriname et du Guyana sont toutes plates. Le site est vaste, et la colline Cépérou dominant l’estuaire de la rivière de Cayenne est choisie pour abriter le fort qui donne naissance à la capitale de la colonie. Peu nombreux, les colons ne mirent en valeur que la portion littorale qui suffisait à approvisionner la France en denrées coloniales (sucre de canne, roucou). Aussi, jusqu’au XIXe siècle, le port de Cayenne est le cœur battant de la cité. Cayenne constitue ainsi un cas de macrocéphalie urbaine au profit de la capitale, situation typique des États et territoires 28
Damier de Sirdey, 1821
© AUDeG, Le centre ancien de Cayenne, Bernard
du Plateau des Guyanes : on retrouve ce cas de figure à Georgetown, Paramaribo et Macapá, ainsi que dans une grande partie du monde caraïbe et sud-américain qui a connu une histoire coloniale similaire. Rapidement, la ville médiévale perce ses fortifications pour s’étendre sur la plaine marécageuse de l’est en suivant le fameux système orthogonal qui présente le double intérêt de faciliter le maintien de l’ordre colonial en plus de permettre une appropriation subtile des sols pour l’installation pérenne des colons. Cayenne est alors le lieu de résidence des colons, les amérindiens natifs et les noirs affranchis occupant les espaces périphériques. La ville est d’abord découpée en îlots carrés de 130 mètres selon le plan de Turgot, gouverneur de Cayenne, puis redivisée en deux par l’architecte Sirdey en 1821, ce qui a pour effet d’insérer du rythme dans un maillage jusque là monotone. Il s’agit du découpage que nous connaissons aujourd’hui : le nombre d’axes est doublé, les voies larges alternent avec les voies étroites et les îlots rectangulaires apportent aux nouvelles parcelles une profondeur plus rationnelle. Cayenne se voit conférer une certaine majesté.
Girard, 1984
Le dessin circonscrit de la cité met en communication le port, plusieurs monts, plusieurs anses. La ville nouvelle étend ses longs bras jusqu’à la vieille ville pour s’y unir habilement. Les ruelles de la ville médiévale disparaissent ou s’alignent, en s’élargissant, sur les axes du damier. Le mariage des deux villes est harmonieux, la qualité de l’ensemble ancien se mêlant aux perspectives obtenues dans le tracé rectiligne. L’unification s’opère dans un mélange d’architectures juxtaposées. Des vestiges de la ville médiévale aux immeubles modernes en passant par les façades des maisons traditionnelles, c’est dans cette diversité que le damier cayennais a puisé les éléments qui équilibrent l’excès d’ordre qu’il était susceptible de créer.
Temps modernes La pertinence du tracé cayennais a garanti à la ville un développement sur plus de deux siècles ; mais c’est un siècle après sa conception que le plan orthogonal a pris son essor, remplissant sa fonction dans le contexte consécutif à l’abolition de l’esclavage. Cependant, on observe aujourd’hui un désamour de Cayenne suite à un grave phénomène de saturation urbaine. Bien que les cases du damier aient favorisé le développement de la vie métisse guyanaise, les profondes modifications engendrées après la départementalisation n’ont pas été anticipées. La population de l’île a connu une forte poussée démographique, aggravée par un exode rural motivé par l’attraction économique du chef-lieu, provoquant une promiscuité non souhaitée. Le damier de Turgot n’était pas calibré pour une telle population : un développement mal contrôlé a ainsi provoqué une extension désordonnée vers l’est et le sud-est. Girard, 1984
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Cayenne, rue Christophe Colomb, XIXe siècle
© Madame Georges Evrard, ancienne carte postale des éditions La Conscience
rue Molé, XIXe siècle 30 Cayenne, © Jeannin, ancienne carte postale des éditions La Conscience
Aujourd’hui, Cayenne est la plus petite commune de la Guyane en superficie, mais aussi la plus peuplée : avec 55 000 habitants, elle rassemble plus d’un cinquième de la population guyanaise totale (chiffres INSEE). Son espace est déjà saturé par l’urbanisation et les possibilités d’extension sont bloquées par les éléments naturels et les espaces protégés. Cela se traduit d’une part par une forte demande de logements, d’autre part par d’intenses migrations pendulaires car les emplois restent encore grandement concentrés dans Cayenne. La ville créole devient une ville d’affaire et de commerce, une cité administrative éclatée vers laquelle convergent chaque matin des milliers de travailleurs qui vivent en périphérie. En conséquence, un basculement a eu lieu : du damier saturé, le trop-plein des populations urbaines est parti occuper l’espace des quartiers anciennement ruraux créés par les successions de lotissements. De fait, la surdensité du centre-ville combinée à la hausse des loyers et l’aspiration à un cadre de vie plus spacieux et proche de la nature ont provoqué une fuite vers deux autres communes de l’île, aujourd’hui en plein essor : Rémire-Montjoly et Matoury. La conséquence sur l’espace est un grignotage, par des constructions privées ou informelles, amenant une urbanisation en tâche d’huile le long des principales voies de circulation (routes de Baduel, de Montjoly, de Matoury), ainsi que la prolifération de quartiers informels le long de ces routes et au pied de collines menacées par les glissements de terrain, rendant ces espaces inconstructibles. La nouvelle vie urbaine, avec ses motocycles, ses bruits, son activité grandissante, sa pollution et son insécurité, semble avoir poussé les cayennais à rechercher un cadre de vie auquel ils étaient auparavant habitués. Les maisons traditionnelles sont progressivement abandonnées par leurs propriétaires créoles, et leur succèdent des occupations diverses pour lesquelles leurs espaces n’étaient pas conçus. À l’instar des cases du damier, les maisons créoles, qui avaient été édifiée à une autre époque, ne semblent plus adaptées au nouveau style urbain.
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2.2 La fabrication d’une architecture traditionnelle guyanaise Des architectures guyanaises La Guyane, c’est la rencontre en un même lieu de populations d’une grande diversité, issues des pays voisins, Suriname et Brésil, mais aussi d’Haïti et des Antilles. On ne peut pas parler de l’architecture de la Guyane sans évoquer sa pluralité. Les différentes cultures influent sur le mode d’organisation de l’espace. Le bâti, et en particulier le logement, joue un rôle important dans la vie des communautés Créoles, Amérindiennes et Noirs-Marrons. Ces modes d’habiter sont aujourd’hui en pleine mutation. Les Amérindiens sont les premiers habitants de la Guyane, aujourd’hui principalement installés le long du fleuve Oyapock et sur le Haut Maroni. Cette situation trouve son origine au XVIIe siècle : face à la conquête par les colons des espaces littoraux, les amérindiens, peuples tribaux évoluant hors de l’espace colonial organisé, se sont repliés vers l’intérieur des terres. Les constructions amérindiennes traditionnelles sont des carbets à vocation d’abri, représentatifs du nomadisme sylvestre caractéristique du monde amazonien. Aujourd’hui en majorité sédentarisés, les Amérindiens ont un habitat moins précaire même si les matériaux sont restés identiques. Leur habitation traditionnelle est d’une simplicité toute particulière : une structure de poteaux en troncs écorcés enfoncés dans la terre forment des pilotis et des bois ronds noués par des lianes constituent la charpente, laquelle est recouverte d’un toit de feuilles de palmier. La spécificité du carbet est son caractère ouvert à tous vents : seul le vaste toit de feuilles tressées retombe parfois suffisamment bas pour protéger les parties latérales de l’habitat. Ce type d’habitation n’est en fait utilisé que pour les moments de repos, avec des hamacs disposés à l’intérieur. Les activités quotidiennes telles que la cuisine ou l’artisanat se déroulent sous des espaces couverts collectifs, la vaisselle, la lessive et le bain se font dans le fleuve. Chez les Amérindiens, tous les carbets sont construits les uns à proximité des autres et le sol est la propriété de tous les habitants. Les Noirs-Marrons, anciens esclaves ayant fui les plantations (« Marron » désigne un esclave fugitif) et réfugiés des guerres civiles du Suriname, sont concentrés en majorité sur le Maroni. Ils exploitent des terres regroupées de part et d’autre du fleuve, étroitement cernées par la forêt, et possèdent une culture et un dialecte propres. Le principe de construction des cases se trouve différencié de celui des Amérindiens par l’existence de parois et de décorations intérieures. L’art est d’ailleurs très important dans la culture Noir-Marron. Notons que les Créoles désignent les Noirs assimilés, par opposition aux NoirsMarrons. 32
Carbet amérindien traditionnel
© Demeures traditionnelles de Guyane, Paulin
Carbet okawenbé ou « carbet tatou » © www.aventuresenguyane.com
Bruné, 1987
Maison Noir-Marron traditionnelle au fronton orné d’art Tembé © http://mizokazou.over-blog.com
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Chez les Noirs-Marrons, femmes et hommes du même lignage résident dans le même village, mais la notion traditionnelle de couple vivant dans la même maison n’existe pas : chaque conjoint a une maison individuelle. Contrairement à l’habitat amérindien, les maisons n’ont pas de dépendance, à l’exception de la case où se prépare le couac (préparation à base de manioc). L’habitat Noir-Marron se caractérise par des pilotis, une structure légère, des fondations peu profondes, des parois en feuilles de palmier tressées ou en planches, une charpente simple avec un toit aux pentes fortes sous couverture végétale en prévision de l’écoulement des eaux, et surtout, un pignon décoré de Tembé, l’art traditionnel Marron. La porte dans l’axe du pignon est le seul accès de cette case, simple et solide. L’espace d’entrée est d’ailleurs un lieu de rencontre, de travail et d’échanges.
Structure du carbet okawenbé
© Case Mo Péi, Rémi Auburtin, 2000
L’architecture purement coloniale et l’architecture issue du bagne sont nés au moment où l’histoire de la Guyane s’inscrit dans l’histoire française, avec l’arrivée des colons. Ces architectures possèdent des particularités dues à l’introduction de nouvelles techniques. À Cayenne, principal cadre urbain de la Guyane, les plus anciennes constructions coloniales sont constituées de pierre et de brique. À l’opposé des maisons traditionnelles en bois, à Saint-Laurent du Maroni, capitale pénitentiaire, la brique est omniprésente dans les murs, les cloisons, les plafonds, mais également sur les allées et les clôtures. Aussi, la réinterprétation des habitats traditionnels des peuples amazoniens, qui sont parfaitement adaptés au climat équatorial, et de leurs concepts, comme le « tout espace public » des Amérindiens, peut être source d’inspiration, de beauté et d’harmonie pour nos villes contemporaines.
L’architecture traditionnelle de Cayenne et des bourgs : un métissage L’histoire guyanaise est courte mais on peut parler d’une architecture traditionnelle. La Guyane est multiculturelle, enrichie de traditions et de savoirs-faire de différentes sociétés, qui se sont progressivement mêlées pour fonder ce qu’on appellera l’architecture traditionnelle guyanaise. Reflet d’une certaine diversité, celle-ci est essentiellement le fruit de la rencontre entre les modes d’habiter amazoniens évoqués précédemment et l’établissement pérenne des colons, à Cayenne principalement. L’architecture traditionnelle est donc à l’image du département : métisse. Dans un premier temps, pour construire des demeures adaptées au pays, les colons ont du faire appel à des techniques qu’ils maîtrisaient tout en utilisant les ressources matérielles de la Guyane. C’est de l’union de deux savoirs qu’est née la maison créole : d’un 34
Ossature d’une maison guyanaise
© AUDeG, Le centre ancien de Cayenne, Bernard
côté, la technicité et l’habileté à travailler le bois selon des procédés particuliers des charpentiers navals, de l’autre, la réinterprétation des maisons à colombages des provinces natales de la majorité des colons militaires débarqués des expéditions. Le territoire fournissait du bois en abondance, de la pierre de granit ainsi que de l’argile naturellement présente dans la terre, nécessaire à la fabrication des briques. On retrouve ici les fondations de la maison traditionnelle guyanaise : un squelette en bois et un remplissage de terre. Le désir des colons qui arrivaient à Cayenne était de s’installer de manière durable ; volonté basée sur la nécessité de construire des bâtisses en dur, conférant un sentiment de sécurité. Les constructions devaient à la fois répondre à des exigences sécuritaires et être adaptées au climat équatorial. En Guyane, il est nécessaire de s’abriter des fortes pluies, de se protéger du soleil et de s’éloigner des insectes. C’est ainsi qu’on peut effectuer des rapprochements entre l’émergence de la bâtisse créole en tant qu’adaptation locale originale et le carbet amérindien : le carbet est par excellence l’architecture adaptée à son milieu très chaud et humide, malgré son statut sommaire. Des similitudes et des relations entre ces deux constructions indiquent une influence du principe de l’abri amazonien sur la maison traditionnelle guyanaise. En premier lieu, c’est le matériau de base, le bois, qui établit ce lien : les poteaux, formant la structure de base du carbet, ont également dicté l’organisation spatiale de la maison créole, qui s’est toujours développée selon un plan rectangulaire tramé organisant les pièces de la maison. Ensuite, à l’instar du carbet amérindien, l’idée de la toiture enveloppante et protectrice se retrouve dans la maison créole, puisque celle-ci est surmontée d’un toit à fortes pentes et cintrée à tous les niveaux de larges débords ombrageant les façades et déversant l’eau de pluie à distance sans risque d’éclaboussures grâce à une inclinaison finement étudiée, le coyau. Enfin, le caractère ouvert du carbet se retrouve dans la maison créole dont on ouvre tous les volets et portes du lever au coucher du soleil. La circulation de l’air est favorisée par le biais des nombreuses ouvertures tout en assurant l’intimité à l’intérieur, avec des systèmes persiennés. L’absence de mur du carbet amazonien se cristallise ainsi dans la maison créole par la multitude de volets. Ainsi, les bâtisseurs créoles ont su faire de la maison traditionnelle guyanaise une adaptation locale perpétuant un ancien savoir-faire européen et puisant dans le vocabulaire de l’abri vernaculaire amazonien. La forme des maisons cayennaises est la conséquence de rapports socio-culturels propre à la Guyane et à son histoire, elle est le produit du mélange culturel et ethnique guyanais. Aussi, l’architecture guyanaise se différencie par diverses originalités, tout en développant des constances architecturales et esthétiques traduisant des fonctions techniques et structurelles précises. Girard, 1984
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Des éléments spécifiques à l’habitat créole L’architecture traditionnelle guyanaise s’est dotée de dispositifs propres issus d’un mélange de techniques, de façon à répondre aux exigences climatiques locales. Du point de vue de la structure, la maison créole compte une typologie originale : celle du carbet, construction totalement ouverte sous une toiture à forte pente ou courbe. En Guyane, le bois reste le matériau le plus utilisé dans la construction traditionnelle jusqu’à l’arrivée des colons qui font évoluer les techniques de construction : dorénavant, il s’agira de dresser une ossature de bois avec un remplissage en bois ou en briques enduit de sable et de chaux. Les matériaux nécessaires à la construction sont issus du milieu environnant. Aussi, on retrouve dans les volumes de la maison traditionnelle une inversion des rapports harmoniques habituels qui favorisent une hauteur sous-plafond décroissante avec la hauteur d’étage. Ici, à l’inverse, puisque la chaleur monte, les étages sont plus hauts sous-plafond que les rez-de-chaussée. Les hauteurs sous-plafond importantes compensent le manque de ventilation. De même, le rez-de-chaussée est souvent construit en maçonnerie tandis que les étages sont faits de bois, plus léger. De vastes combles sont également aménagés afin de ventiler les derniers niveaux des maisons, qui sont potentiellement les plus chauds, sous toiture. Les toitures possèdent souvent des pans fortement inclinés adoucis par des coyaux, ces brisures de la pente très spécifiques à l’architecture guyanaise. Les toits surplombent la rue et forment de grands auvents protégeant de la pluie, du soleil, et préservant de la chaleur moite l’intérieur des habitations en ombrageant les ouvertures. Les hautes toitures sont souvent percées de lucarnes ou de chiensassis qui assurent la circulation de l’air. Enfin, pour isoler les constructions de l’humidité stagnante du sol mais aussi des insectes, celles-ci sont surélevées, créant parfois des vides sanitaires. De traditionnels emmarchements permettent ainsi d’accéder aux maisons, parfois améliorés en galeries d’entrée ombragées, souvent pratiqués comme des lieux de rencontre et de bavardage. Ces espaces de croisement, d’arrêt, font partie du paysage et des habitudes culturelles de Cayenne. Certains dispositifs, en plus de s’inscrire dans une tradition architecturale, sont devenus le support de pratiques culturelles et d’habitudes locales participant à la poétique urbaine de Cayenne. Les cases traditionnelles sont le siège d’une grande circulation d’air : elles possèdent des grandes ouvertures sur au moins deux façades, qui leur donnent un caractère perméable. Il n’est pas rare de voir des maisons avec deux ou quatre portes au rez-de-chaussée. Les ouvertures sont tramées selon la structure de base, qui est toujours sensiblement la même, et qui influence la disposition des pièces. 36
Maison d’angle traditionnelle à Cayenne : © Inventaire général du Patrimoine Culturel
Conséquence de cette porosité : les volets. Sur toutes les portes et sur toutes les fenêtres, se ferment une fois la nuit tombée de lourds volets. Les impostes ajourées, ces ouvertures rehaussant les fenêtres et les portes d’un rectangle ornementé, permettent de pallier la chaleur moite par la libre pénétration de l’air dans la maison, de jour comme de nuit. Les motifs se déclinent alors au gré des artisans, des résilles les plus simples aux entrelacs les plus travaillés. La maison guyanaise se pare de ces délicatesses, qui, le soir venu, laissent entrevoir au passant au travers les motifs ajourés la lumière filtrée des pièces encore habitées. Au lever du soleil, lorsque l’on ouvre les volets, il est nécessaire de disposer d’un système permettant de profiter de la lumière et de l’air extérieur tout en préservant l’intérieur des regards de la rue. Ce sont les persiennes qui offrent cette possibilité : il s’agit d’être éclairé, d’être ventilé et de voir, sans être vu. Les persiennes sont ainsi l’élément fondamental de l’urbanité créole. Au rez-de-chaussée, les portes à battants mi-hautes sont souvent surmontées d’un rideau fin. La nuit, on y attrape un morceau de la lumière intérieure. Mais il n’y a pas que l’air qui filtre dans ce système poreux : le bruit aussi. La maisonnée vit au rythme de l’ouverture et de la fermeture des volets, la maison s’en trouve incarnée. Par ailleurs, ce sont les balcons qui ont la fonction de représentation sociale la plus importante. Peu d’immeubles traditionnels en sont privés : ils sont le lieu incomparable pour profiter du spectacle de la rue. À partir d’une certaine hauteur, la relation avec la rue change, il s’agit de voir en étant vu. Les éléments de console, les goussets et les gardes-corps en fer forgé, moulé ou avec un barreaudage traditionnel en bois, participent à l’ornementation et à l’élégance de la maison. Le balcon ne dépasse d’ailleurs jamais en profondeur le débord du toit qui le surplombe. Enfin, dernier élément architectonique de base de l’architecture traditionnelle : la galerie, qui est l’équivalent sur cour du balcon, avec en plus une fonction de circulation. Dans la maison, la galerie apparaît comme une trame secondaire servant à la fois d’entrée et de filtre protégeant la vie intérieure. C’est un espace très pratiqué de détente, d’accueil, et de bavardage, faisant face à la cour arborée qui abrite les activités domestiques à cacher : traditionnellement, la dépendance de la cuisine et les salles d’eau. De nos jours, la galerie est remplacée par la terrasse, qui traduit le besoin d’espace extérieur du logement en général, et en milieu tropical en particulier.
socle, auvents, volets, persiennes et balcon
Ces modèles traditionnels manifestent des modes d’habiter très spécifiques, que les mouvements de la société guyanaise ont bousculé et tendent parfois à faire disparaître. La compacité des espaces de vie est le maître mot des nouvelles constructions, quand l’éclatement et la perméabilité faisaient les maisons d’autrefois. 37
extérieur en bois plein et petite porte fermant la maison le jour 38 Volet © Demeures traditionnelles de Guyane, Paulin Bruné, 1987
Fenêtre surmontée d’une imposte, maison Photo personnelle
de la périphérie de Cayenne
Détail des parois et des volets persiennés, lucarne en toiture Photo personnelle
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Galerie donnant sur la cour arrière
© Inventaire général du Patrimoine Culturel
arborée 40 Cour © Inventaire général du Patrimoine Culturel
Façade principale avec balcon et lucarne © Inventaire général du Patrimoine Culturel
Porte et volets de l’entrée
© Demeures traditionnelles de Guyane, Paulin
Détail d’un balcon
© Inventaire général du Patrimoine Culturel
Bruné, 1987
Joueurs de carte sous une galerie coté rue © Inventaire général du Patrimoine Culturel
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d’entrée colorées 42 Portes © Demeures traditionnelles de Guyane, Paulin Bruné, 1987
A pa jiwèt ka touné, sé van Il faut savoir s’adapter
3 ANALYSE DES ARCHITECTURES Changements, évolutions, révolutions L’architecture traditionnelle guyanaise est intrinsèquement liée au damier cayennais qui l’a vu naître : elle a été pensée et fabriquée pour s’y insérer. Les bouleversements et les mouvements de la société, tels que l’explosion démographique, la situation de macrocéphalie du Cayenne, son attraction économique grandissante face à des extensions pavillonnaires, influent sur la pratique de la ville et sur son développement. On assiste à des changements dans les modes d’habiter, de travailler ou encore de parcourir la ville. La production architecturale évolue et se transforme en parallèle des mutations sociétales, et participe à la métamorphose de Cayenne. Après avoir parcouru les fondements de l’architecture traditionnelle de la Guyane, il s’agit maintenant de présenter les différentes formes qui lui succèdent. D’une grande diversité, l’architecture guyanaise a progressivement adopté de nouveaux matériaux et de nouvelles techniques, en majorité importés de la métropole, et parfois mal adaptés aux spécificités locales. On assiste à une distinction de plus en plus forte entre l’architecture du centre et l’architecture des périphéries de Cayenne, l’une composant avec la densité, l’autre usant plutôt des possibilités offertes par l’extension périurbaine. De nouveaux modèles émergent et tissent des dialogues plus ou moins subtils avec l’architecture classique. Des éléments typiques de l’habitat créole, tels que les persiennes, les galeries ou les auvents sont réinterprétés, quand d’autres disparaissent progressivement, comme les volets. Dans le cadre du travail de cartographie, les édifices sélectionnés ont été classés en différentes catégories selon les époques et les mouvements architecturaux.
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3.1 Traditionnel et transformation L’architecture traditionnelle est marquée par sa palette de couleur. La couleur a son importance dans les paysages urbains de Cayenne marqués par les grandes cases blanches, les petites cases colorées aux façades rythmées par les résilles structurelles apparentes, peintes ou en bois brut, et les toits en tôle de différents coloris. Mais ce qui participe encore plus à forger l’élégance particulière de ces maisons est le soin porté à l’ornementation et aux détails de finition des portes, des impostes, des balcons ou encore des toitures : motifs sculptés ou moulés, épis et frises de faîtage. Ces particularités discrètes et soignées sont l’expression de savoir-faire artisanaux. À l’origine, il ne s’agissait que de maisons d’habitation. Aujourd’hui les rez-de-chaussée mutent pour accueillir des restaurants, des boutiques ou encore des bureaux. Certaines des plus grandes bâtisses voient leurs étages divisés en plusieurs petits logements que se partagent différentes familles. C’est à cette surpopulation, cet usage différé des espaces, que l’on doit de fréquentes dégradations. La transformation ou l’extension sont des interventions contemporaines sur des édifices traditionnels et modernes. Il s’agit d’une autre façon de sauvegarder et d’apprécier le patrimoine, par la cohabitation de différentes époques et de différentes idées, mais c’est également une valorisation de la production actuelle qu’on a parfois tendance à discréditer dans son intégralité, dans un élan un peu passéiste. C’est montrer qu’une évolution est en cours, et que ce changement peut être harmonieux et positif. La transformation d’un édifice s’inspire de la base à travailler, et la fait évoluer avec contraste ou dans un jeu plus subtil de correspondance de formes et de matériaux. Ces opérations sont aussi l’occasion de rénover d’anciennes constructions de logements abîmées et d’offrir alors un nouveau cadre de vie aux habitants.
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Maison traditionnelle de la périphérie de Photo personnelle
Cayenne
Extension contemporaine d’un lycée à Cayenne Photo personnelle
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Maison implantée sur les hauteurs du Mont Cépérou Photo personnelle
d’angle à balcon filant 46 Maison Photo personnelle
Maison de l’ancienne ville fortifiée Photo personnelle
Petite maison d’un seul niveau
© Inventaire général du Patrimoine Culturel
Édifice classé aux Monuments Historiques
Photo personnelle
Volume imposant avec de grands combles aménagés Photo personnelle
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3.2 Moderne et contemporain L’influence du mouvement moderne international a passé les frontières de la Guyane, matérialisé par l’emploi massif du béton, matériaux alors innovant importé de la métropole. On y catégorise les constructions édifiées entre 1950 et 1990, caractérisées par la rationalisation, les lignes géométriques pures, les volumes clairs et les toitures plates. Les agglomérés remplacent les briques. De nombreuses de ces constructions montrent des signes d’inadaptation et une usure prématurée. On retrouve néanmoins des particularismes régionaux dans le modernisme qu’on pourrait qualifier de « tropical » : couronnements pour protéger des salissures de la pluie, débords de toiture, auvents en béton, ventelles, claustras, réinterprétations en maçonnerie de détails de balcons et façades multicolores. Au béton se joint du bois, pour les volets essentiellement. Ce sont des réappropriations intéressantes des systèmes traditionnels de ventilation et de protection contre le soleil et la pluie. Dans un tout autre style mais datant de la même époque, il y a les maisons Urubu. Ces constructions en bois sur pilotis ont la particularité d’avoir la façade principale inclinée, offrant ainsi une entière protection contre le soleil et la pluie. Des enfilades de persiennes et des toitures à écope favorisent une bonne ventilation à l’intérieur. Ces maisons ont été pensées pour répondre aux exigences climatiques de la Guyane tout en usant des matériaux locaux. Les constructions contemporaines sont quant à elles marquées par l’utilisation mixte du béton et du bois, lequel est de plus en plus sollicité pour les nouvelles opérations. Différentes sensibilités s’expriment : il y a des bâtiments en béton aux lignes dures nuancées par des couleurs chaudes et vives, des réinterprétations formelles et conceptuelles des modèles amazoniens en bois, des maisons bioclimatiques marquées par l’attention portée à la ventilation naturelle et aux matériaux locaux et respirant. On assiste au retour progressif de nombreux dispositifs de l’architecture classique, qui sont réécrits et retranscrits : persiennes, résilles de protection contre le soleil très prisées, brises-soleil horizontaux et verticaux. Ces relectures confèrent un certain caractère et une identité aux édifices.
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Maison moderne au vocabulaire traditionnel Photo personnelle
Maison contemporaine inspirée des carbets okawenbé, périphérie de Cayenne Photo personnelle
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3.3 Paysage Malgré le traitement très minéral et brut de Cayenne et ses environs, quelques espaces sont aménagés en jardins et promenades urbaines, lieux de fraîcheur et de rencontres pour les habitants. Ce réaménagement passe parfois par la simple valorisation de l’espace public, avec le dessin d’un cheminement piéton, du mobilier urbain, un éclairage particulier et un embellissement par les plantes, les arbres et les espaces verts. Le long de la façade maritime de Cayenne, le littoral protégé offre des anses qui sont aménagées en promenades et agrémentées de bancs et de kiosques abrités invitant à la détente. Plus original, un amphithéâtre de verdure achève le parcours des anses juste avant le Mont Montabo, lequel marque le point de pivot où commencent les plages, à l’est. Dans le centre, au milieu du réseau minéral, des arbres émergent parfois et dégagent une place, un écrin de verdure où toutes les générations d’habitants vont se rassembler. À l’image du potomitan - le pilier selon l’expression antillaise - c’est la tradition créole de se raconter des histoires sous un gros arbre, traditionnellement un manguier au feuillage épais, qui est poursuivie. Éparpillés hors du centre ancien, au sein des pôles culturels et universitaires, rares mais travaillés, de nouveaux jardins ou pauses urbaines sont imaginés. Tantôt sous la forme d’un simple abri où s’arrêter à l’ombre, tantôt sous la forme d’un parc proposant une grande variété d’ambiances, ces espaces participent à la création de paysages d’une plus grande diversité à Cayenne.
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Kiosque aménagé à la Pointe Buzaré Photo personnelle
Amphithéâtre de verdure à Cayenne Photo personnelle
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52 DĂŠtail Photo personnelle
4 Une identité sentimentale CONCLUSION L’architecture traditionnelle est à l’image du damier cayennais : ouverte, poreuse, perméable. L’air circule librement dans la maison comme à l’intérieur de l’îlot, caractérisé par la présence de jardins aux arbres fruitiers. Ce lien entre l’îlot et l’unité architecturale a pour conséquence un effet miroir : le désamour du damier orthogonal entraîne le désamour de ses maisons traditionnelles. Si l’on quitte l’un, forcément, l’on quitte l’autre. Aussi, on constate actuellement un péril du modèle traditionnel, ville comme architecture. Au niveau du centre ancien, le phénomène de saturation urbaine a changé l’ambiance de la ville, qui est devenue plus bruyante, polluée, en plus d’être en proie à une forte promiscuité. L’évolution de la société ayant entraîné des changements auxquels les maisons traditionnelles ne sont plus adaptées, celles-ci sont délaissées au profit des pavillons des résidences périurbaines, plus calmes et proches de la nature. Aujourd’hui, pour répondre à des besoins de climatisation, l’architecture est devenue imperméable et ne procure plus à elle seule un bon confort thermique. Avec l’apparition des vitres et de nouveaux cloisonnements, les persiennes n’offrent plus systématiquement ces jeux poétiques d’ombre et de lumière. Au niveau du jardin traditionnel urbain, les cœurs d’îlots auparavant en communication les uns avec les autres, et qui offraient de vraies relations sociales grâce à la cour accueillant la cuisine et les pièces d’eau, sont maintenant cloisonnés. De même, le prolongement de l’espace privé dans l’espace public, à l’entrée de la maison, n’est plus tout le temps possible tant l’espace de la rue se trouve déconsidéré. De nouveaux modèles se dégagent peu à peu des anciens, parfois pour mieux les révolutionner, d’autre fois de manière maladroite et inadaptée. En l’état actuel, et malgré leurs qualités et leur dimension identitaire, de nombreux systèmes traditionnels propres à l’architecture guyanaise ne fonctionnent plus à cause d’un manque d’anticipation des processus d’évolution urbaine. L’obsolescence des modèles architecturaux traditionnels de Cayenne est appuyée par l’énorme spéculation foncière à laquelle est soumise la ville. En cas de démolition des maisons existantes et du fait de l’ampleur des parcelles, la densité construite potentielle est très élevée. Le prix des demeures anciennes s’envole. C’est un phénomène qui entre en défaveur de la sauvegarde du patrimoine traditionnel. En effet, certains propriétaires vont préférer abandonner leur maison afin de toucher une prime lors de son effondrement, plutôt que d’investir le temps et l’argent nécessaires à la maintenir en état. La rupture se dessinant entre les habitants et la vieille ville de Cayenne peut également s’expliquer par la décentralisation des activités de
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loisir et de détente : le cinéma et les centres commerciaux sont situés en périphérie, mais également les plages les plus fréquentées. Le centre et ses rues rythmées de boutiques aux accents libanais, chinois et brésiliens recense tout de même de quoi contenter le flâneur, mais il se trouve surtout animé lors d’événements spéciaux tels que les fêtes de la commune, les foires ou les rencontres culturelles. En fait, il est étonnant de constater que l’espace public guyanais est vécu mais qu’il est peu aménagé. Du centre aux extensions, à proximité des noyaux urbains et de part et d’autre des axes routiers, l’espace est utilisé sans être valorisé. À Cayenne, les cheminements destinés à la circulation piétonne ou cyclable sont soit absents, soit détériorés, et le manque d’entretien des trottoirs les rend difficilement praticables. Par ailleurs, le manque de végétal dans l’espace urbain est notable : l’aspect minéral de Cayenne contraste avec la présence de la forêt toute proche. À travers l’histoire et à partir de cartes postales anciennes, on s’aperçoit que la nature n’a cessé de perdre sa place dans la ville. Pourtant, le végétal tient une place structurante sur le plan social en participant à la fabrique des ambiances urbaines. En interrogeant la structure des villes équatoriales en général, et celle de Cayenne en particulier, on constate aujourd’hui une consommation d’espace très importante. Les centres villes peinent à se recycler ; à l’inverse, ils ont plutôt tendance à s’étendre et perdent alors leur vocation attractive. Impulser des démarches intégrant des dimensions de dynamisme et de développement devient nécessaire. À Cayenne, c’est au sein même du damier cruciforme qu’il est possible de puiser des éléments de réponse quant à l’évolution de la ville. Le schéma orthogonal est un modèle toujours utilisé aujourd’hui, et sa réinterprétation peut donner lieu à des expériences urbaines viables. Au niveau de l’architecture, l’abandon massif des maisons traditionnelles cayennaises alarme quant à la nécessité d’anticiper les dégradations et les soins nécessaires à leur maintien, selon des cycles, afin d’assurer la pérennité des constructions qui fondent l’identité des villes. De tels allers-retours entre hier et aujourd’hui, entre la tradition et les nouveaux modes d’habiter ou de pratiquer la ville, forment un langage particulier qui requiert une grande implication des acteurs territoriaux. Cet état des lieux sur Cayenne, qui combine la défaillance d’un schéma urbain sans successeur à un manque de traitement de l’espace public, en plus de la présence végétale qui semble se soustraire à l’urbanité, tend à la dévaluation du chef-lieu. La démarche empruntée par l’AUDeG et la MaGUY, avec la création d’une cartographie des curiosités architecturales et paysagères, trouve ici tout son sens : la poétique de la ville prend la forme d’un engagement envers la ville. Un regard sincère est posé sur Cayenne dans toute sa diversité. Malgré un déploiement fragile et un cadre urbain discordant, Cayenne 54
possède une influence attachante, un attrait d’ordre sentimental qui pousse à de constants retours vers elle, dans un mouvement presque irrationnel tant on désire parfois la quitter. Ce facteur identitaire, presque émotionnel, est essentiel à la construction de la ville de demain. L’architecture ou l’urbanisme idéal anticiperait en effet les dynamiques d’évolution tout en engageant dans le processus les éléments fondamentaux et singuliers des territoires. Puisque la ville est faite d’ininterrompus mouvements de tensions et d’extension, il s’agirait d’imaginer des espaces souples pouvant accueillir des transformations et des mutations, au lieu d’enfermer les projets dans une dimension statique et définitive. Ainsi, de nos cases à nos villes créoles, et bien au-delà, l’anticipation des mouvements incarne la possibilité de retrouver à toutes les échelles les éléments forts qui forgent l’identité de nos territoires.
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SOURCES AUBURTIN, Rémi. Case Mo Péi. Éditions Ibis Rouge, 2000. 93 p. ISBN 2-84450-070-6 BRUNE, Paulin. Demeures traditionnelles de Guyane. Éditions Réalité. 1987. 141 p. ISBN 2-902634-27-7 BARRET, Jacques. Atlas illustré de la Guyane. Laboratoire de cartographie de la Guyane, Institut d’enseignement supérieur de la Guyane. 2001. 215 p. ISBN 2-7099-1471-9 BOYE, Marc et BRASSEUR, Gérard. Atlas des départements français d’outre-mer, IV, La Guyane. Centre d’Etudes de Géographie Tropicale du C.N.R.S. 1982. ISBN 2-222-02501-X GIRARD, Bernard. Le centre ancien de Cayenne. AUDeG. 1984. 77 p. RIPOCHE, Michaël. La difficulté d’appréhender la dimension dynamique des espaces équatoriaux dans les solutions d’aménagement. Actes du colloque « Villes équatoriales guyanaises durables, quelles perspectives ? ». CAUE de Guyane. 2012. 130 p. Schéma d’Aménagement Régional de la Guyane, Collectivité Territoriale de la Guyane [en ligne, consulté en mars 2016]. Disponible sur : https://www.cr-guyane.fr/ Cartothèque de l’IRD [en ligne, consulté en mars 2016]. Disponible sur : http://sphaera.cartographie.ird.fr/ Base de donnée Architecture Mérimée, Inventaire Général du Patrimoine Culturel [en ligne, consulté en mars 2016]. Disponible sur : http://www.inventaire.culture.gouv.fr/ MARCHITTO, Fernand et DENIAUD, Corinne. La Guyane, un territoire sud-américain dans les outre-mer français. Thème III : les enjeux de l’aménagement de l’aire urbaine de Cayenne. Académie de la Guyane. 2014 [en ligne, consulté en mars 2016]. Disponible sur : http://webtice. ac-guyane.fr/histoire/spip.php?article442 Atlas des Paysages de la Guyane, DEAL Guyane [en ligne, consulté en mars 2016]. Disponible sur : http://www.paysagesdeguyane.fr/ Portail de Données Géographiques, AUDeG [en ligne, consulté en mars 2016]. Disponible sur : www.geoguyane.fr Terres de Guyane, l’histoire de la Guyane [en ligne, consulté en mars 2016]. Disponible sur : http://www.terresdeguyane.fr/articles/histoire/ POTTE, Marie-Blanche. Manière d’habiter à Awala–Yalimapo. In Situ, revue des patrimoines. 2005 [en ligne, consulté en mars 2016]. Disponible sur : http://www.insitu.culture.fr/article.xsp?numero=&id_ article=d4-335 MALLÉ, Marie-Pascale. Les maisons des Noirs marrons de Guyane. In Situ, revue des patrimoines. 2004 [en ligne, consulté en mars 2016]. Disponible sur : http://www.insitu.culture.fr/article. xsp?numero=5&id_article=d6-487 57
Merci
Vanille Tabouillot
ENSA Marseille
2015 - 2016